VI.6 Faire le plein.Une fois les achats effectués nous sommes parés pour la mission et prêt à affronter les dangers. Bien qu’à mon avis il ne s’agit que de simples scribes trop zélés. Nous arrivons enfin à la bibliothèque. Construit sur deux étages, le bâtiment rectangulaire est splendide vu de l’extérieur. La menuiserie est finement réalisée et les diverses teintures, dorures ainsi que les sculptures qui la composent sont d’autant d’éléments qui accroissent le prestige de l’édifice.
"C’est un héro d’une grande campagne punitive contre les garzoks qui a proposé l’idée de la bibliothèque. Il pensait s’en servir pour entreposer divers plans et compte rendu militaire pour donner un avantage significatif pour les générations suivantes. Cependant, l’engouement des générations suivantes était tel que la bibliothèque n’avait rien à envier aux grandes cités culturelles sur tout Yuimen." M’explique Sylve.
"Tant que cela ?" J’interroge plus par surprise que par une réelle attente de réponse avant d’entrer.
L’intérieur est d’une élégance sans nom. Chaque mur à son étagère garnie de recueils et parchemins parfaitement rangés. Nous sommes rapidement accostés par une élégante femme aux cheveux longs regroupés en chignon. Son kimono pourpre décoré de symboles inconnus par une élégante broderie rouge, flotte à quelques centimètres du sol.
"Que…que puis-je faire pour vous servir ?" Nous demande-t-elle en me voyant.
(Les choses vont être difficiles, bien plus qu’à Kendra Kâr ! Il faut que je parvienne à me faire accepter à la population petit à petit.)Voyant Sylve qui s’apprête à répondre, je fais un pas en avant pour l’interrompre et prends la parole.
"Je suis mandaté par la milice de la ville. Vous avez fait mention d’individus ayant pénétré dans une section à accès restreint. On m’a chargé d’enquêter sur le fait et d’appréhender les individus." Je lui explique.
"Hé bien…c’est que…"Balbutie-t-elle avant qu’un autre homme ne vienne à son secours.
Un homme plus vieux que la jeune femme d’une bonne dizaine d’année. Lui aussi porte un kimono aux dorures similaires, mais aux couleurs différentes. Blanc sur fond gris. Les cheveux tirés en arrière et l’air sévère, il me scrute des pieds à la tête.
"Que se passe-t-il ? Cette peau noire vous importune-t-elle ? Comment les gardes ou la milice peuvent-ils laisser passer un tel individu ?" Demande-t-il à la jeune femme.
"Si je puis me permettre, c’est la milice qui m’envoie. Je me nomme Nhaundar et je suis chargé d’enquêter sur les intrusions dans votre établissement." Je me présente.
"Comment ? Mais c’est un véritable scandale ! S’insurge l’homme. Milice ou non je vais de ce pas vous faire expulser d’ici prestement ! Ne laissez surtout pas entrer ce criminel !" Ordonne-t-il à la femme avant de se rendre à la milice d’un pas décidé la laissant seule.
"Des Shaakts dans nos rues et bientôt se seront les Garzocks qui fouleront le sol !" Continu-t-il pour lui-même.
"C’est une attitude à laquelle je vais devoir me faire." Dis-je à ma camarade avant de reporter mon attention sur la femme qui ferme précipitamment la porte et ma camarade use de sa main pour la laisser ouverte.
"Sans vouloir me paraître insistante, on n’aurait pas laissé ce Shaakt venir ou même fouler ce sol avec une tunique à l’effigie de la milice." Fait-elle en désignant le symbole sur le torse.
"Je suppose que l’homme qui est parti est votre supérieur. Je crains malheureusement qu’il rencontrera un véritable obstacle à la milice et vous de même si vous nous empêchez d’œuvrer pour elle. Laissez-nous faire le travail pour lequel vous avez requis de l’aide. De plus, je suis présente pour s’assurer de son attitude vis-à-vis de vous." "Dans ce cas, laissez-moi vous guider." Cède-t-elle finalement en ouvrant lentement la porte.
Je pénètre à la suite de ma camarade que je remercie d’un signe de la tête. Notre guide nous fait passer les grandes allées garnies de livres et le savoir qu’ils contiennent me pousse à revenir une fois que cette histoire sera finie. Nous pénétrons par d’un couloir descendant en sous-sol et gardé par deux hommes armés où il faudrait se serrer pour passer. C’est une grille qui nous stoppe et il faut attendre que les clefs tournent par deux fois dans le verrou pour ouvrir sur un autre espace.
"Voilà c’est ici que des individus ont été repérés." Déclare la guide.
"C’est le seul accès ?" Je demande et la femme me confirme en hochant de la tête.
(Jusque-là il n’est pas possible d’accéder à cette zone sans se faire prendre. Les gardes ont-ils été corrompus ?)"Qu’en est-il des clefs ce sont les seules en votre possession ?" Je continue.
"Il y a trois jeux de clefs qui permettent de venir ici. Le mien, celui du bibliothécaire en chef ainsi que l’intendant Kayeko que vous avez rencontré en arrivant." Me répond-elle.
"Vous permettez ?" Dis-je espérant que nous puissions examiner la pièce.
Timidement elle nous y invite d’un geste de la main, mais il est clair que ma présence en ces lieux ne lui plait guère. Nous marchons dans l’allée centrale au milieu de hautes étagères. Un bref coup d’œil me confirme le caractère particulier de cette pièce. Les scribes sont chargés de copier méticuleusement les recueils qu’on leurs confie. Ici se sont tous les ouvrages originaux qui sont stockés. C’est la raison par laquelle l’accès est gardé, mais cela n’explique en rien la présence d’intrus ici.
Comme à chaque fois qu’elle entend un bruit suspect, Sylve m’agrippe le bras. Je m’arrête net et prête l’oreille. Un bruit de parchemin se fait entendre.
"Restez ici et gardez les torches !" Dis-je à la jeune femme en l’orientant vers une autre allée pour que nos ombres ne nous dévoilent pas.
La pièce est composée de nombreuses allées formées par des étagères. Je distingue plus loin que quelques couloirs coupent ces allées pour les desservir, permettant de passer de l’une à l’autre sans avoir à faire un détour important. Nous progressons dans les passages sombres et je me porte en tête pour profiter de ma vision nocturne, mais rapidement une source lumineuse apparaît. Je m’approche lentement et passe la tête au bout d’une étagère. Dans un renfoncement, créant un espace de travail, un homme passe en revu des parchemins et quelques grimoires ouverts sont disposés sur la grande table d’étude. Seule une maigre bougie éclaire le coin.
(Nous avons pourtant été bruyants, alors pourquoi reste-t-il encore ici ? Est-il trop concentré sur ses recherches ?)Sylve vient à mes côtés et jette un œil discret. Sur un accord tacite, la semi-elfe dégaine silencieusement sa lame et s’avance en pointant son arme dans le dos de l’individu.
"Mettez les mains en évidence et tournez vous lentement." Ordonne-t-elle tandis que je me prépare à manipuler ma magie.
Surpris, l’homme se redresse vivement et tourne le visage vers la semi-elfe plutôt que d’obtempérer. L’homme est âgé. D’un point de vue humain il devrait avoir une cinquantaine d’années, ou peut-être plus. C’est difficile à dire tant ils vieillissent vite. Sa chevelure foncée cache des yeux cernés de fatigues.
"Qu’est-ce donc que ces manières jeune femme ? Ne voyez-vous pas que je suis en plein travail ?" Déclare-t-il sans masquer sa contrariété et balayant d’un revers de main la lame pointée sur lui.
"Qui êtes-vous et que faites-vous ici ?" Je lui ordonne de répondre en m’avançant dans la lumière.
"Une peau noire ? Avec l’écusson de la milice ? J’aurais décidément tout vu dans cette vie !" Lâche-t-il avant de reprendre.
"Sachez jeunes ignares que je suis Sakazuki Ashiro, grand archéologue et je suis sur le point de découvrir l’emplacement d’un ancien culte magique. Alors à moins que vous n’ayez les documents que j’ai demandés, veuillez me laisser poursuivre mes recherches jeunes sots !"(Mais il sort d’où ce type ? Il sème le trouble et c’est limite moi l’intrus !)"Dites grand-père. Je ne suis peut-être pas le bienvenu, mais je reste un milicien !" Lui dis-je sans me démonter.
"On m’a chargé de m’occuper du perturbateur qui sème le trouble dans la bibliothèque. Maintenant rassemblez vos affaires, nous allons régler cette histoire à la milice !""Moi, un perturbateur ? Mais vous ne manquez pas de toupet ! Ce n’est pas la première fois que je viens et ce n’est certainement pas un inculte de Shaakt qui va m’en empêcher." Rétorque Ashiro sans se laisser démonter.
(Des aveux, c’est encore mieux ! Il ne me reste plus qu’à le présenter à Akiko.)"Je me moque bien de ce que vous pensez. La milice s’occupera de votre cas vous pouvez me croire vieux fou !" Je commence à m’énerver.
Je m’approche pour lui agripper le bras et le sortir de la bibliothèque que Sylve fait de même pour moi. Elle dirige son regard plus loin dans la pièce sombre. De cette façon elle ressemble à un lapin aux aguets, mais elle m’inquiète. Elle agit ainsi lorsqu’elle perçoit un bruit suspect, cependant nous sommes seuls ici, non ?
(Non il y a bien quelqu’un. Un complice du vieux ? A moins qu’il soit complètement innocent. Il faut que j’aille voir. Dans l’hypothèse où le vieux est innocent, je me dois de les débusquer, dans le cas contraire cet Ashiro dévoilera ses véritables intentions en prévenant les hommes et se retrouvera seul face à Sylve. Si elle entend mieux que moi, j’ai un avantage certain dans les endroits sombres comme celui-ci. Avec un peu de chance je vais les repérer avant qu’ils ne se rapprochent de nous !)Je me rapproche de la semi-elfe et lui murmure à l’oreille.
"Je vais jeter un œil discrètement." Continue de parler et mets-toi devant la lumière pour m’aider à m’éclipser.
Je la vois rejeter ma proposition du regard, alors je la pousse moi-même vers la bougie.
"Ma camarade va s’intéresser aux parchemins que vous avez dérobés. Moi je vais m’inquiéter du bazar que vous avez généré." Dis-je tout haut en l’intimant du regard d’obéir à mes instructions
"C’est un véritable scandale, je n’ai rien dérobé. Et où est-ce que…"Répond de nouveau Ashiro qui me voit partir, mais est rapidement interrompu par ma camarade.
"Cessez vos enfantillages vous voulez bien ? Que faisiez-vous ici si ce n’est pour dérober des secrets ?" Hurle la guerrière coupant la réplique de l'archéologue.
(Excellent Sylve ! Fait-le parler ça focalisera son attention et celles des autres sur leur conversation. En tout cas il n’a pas dénoncé ma disparition, ou alors il attend un moment plus propice.)"Je vous l’ai dit, je suis un grand archéologue. Si vous ne me croyez pas regardez ceci !" Déclare le vieil homme.
(Un document officiel ? Pourquoi ne l’a-t-il pas mentionné plus tôt ? A moins que cela ne soit un code entre eux ?)Dissimulé par les ombres et la conversation, je me faufile entre les allées sans me faire surprendre, enfin j’espère. Je ne perçois rien ni personne hormis les longs rayons d’étagères. L’échange verbal devient un véritable auditif et s’oriente sur la véracité d’un certain document. Je me mets à douter des compétences auditives de la semi-elfe, lorsque je vois un mouvement subreptice du coin de l’œil. Prudemment, je m’avance jusqu’au bout de l’allée où je me trouve et vois, à quelques mètres de moi, deux individus observant ce qui doit être un balais des ombres de Sylve et du vieil homme. L’environnement trop sombre pour que je les distingue clairement, ils sont placés au bout de l’allée menant à l’unique conversation du lieu et un couloir desservant toutes les autres allées, ils semblent se murmurer l’un l’autre, ignorant complètement ma présence. Ce n’est que lorsque l’un d’eux se dresse pour encocher une flèche dans un arc que je décide d’agir.
Je fais rugir mon fluide majeur et projette une boule de feu sur l’individu armé. Percuté en plein torse il choit en arrière avec un mélange de souffrance et de stupeur. Alerté, son camarade saisit un objet que je devine être une fine lame par son léger éclat. De nouveau je rassemble mon feu intérieur et nous nous expédions l’un l’autre nos projectiles. Si sa lame m’entaille correctement l’épaule droite, ma boule de feu percute le mur de la pièce quelques mètres plus loin.
"Du feu mais vous êtes fou ! Vous allez brûler toutes les précieuses connaissances amassées avec le temps !" Déclare le vieil homme sans trop savoir qui il prévient.
(C’est bien ma veine. Me voilà privé de ma principale source de magie si je ne veux pas brûler tous ces recueils ainsi que nous par la même occasion !)Je traverse le couloir qui coupe l’allée pour me rendre à celle d’en face et avoir un angle différent. Une rapide inspection de la position des hommes et une lame se fige à quelques centimètres de moi, figée dans le bois du meuble où je me suis adossé.
(Les choses prennent une tournure désagréable !)Je me redresse prestement en distinguant les bruits de pas d’une course et m’apprête à voir un des hommes débouler devant moi. Pourtant, c’est plus loin qu’un choc a lieu. Mon bâton prêt à me défendre, je vois une troisième silhouette aux cheveux blonds.
(Sylve !)Je m’empresse de venir à son aide. Je la retrouve avec l’homme que j’ai touché face à nous et le second avec ses lames sur notre droite qui se relève. Nous sommes rejoint par Ashiro éructant à nouveau la folie d’utiliser une telle magie en ce lieu sacré. L’adversaire et ses lames de jets se saisit d’une rapière et me charge. Il pense à raison que je ne vais plus utiliser mes boules de feu. Malheureusement pour lui, je me baisse posant une main au sol et commande à une colonne de terre de s’y extirper pour le faucher en pleine course, le propulsant plus loin.
"C’est la raison pour laquelle tu as préféré l’élément de terre ?" Me demande ma camarade.
Elle s’avance face à l’homme et bloque chaque flèche qu’il lui envoie. Il parvient à tromper sa vigilance en la touchant à la jambe, l’obligeant à baisser sa garde. Un nouveau projectile se rue sur elle, mais il est stoppé net par une nouvelle colonne de terre que je viens de dresser.
"Il est plus facile de prévenir que de guérir. C’est en cela que la magie de terre est efficace. Ca et d’autres raisons." Je réponds enfin.
(Sauf que je n’ai plus la possibilité de générer de nouveau sort terrestre, à moins de demander une pause pour boire une potion.)De stupeur, l’homme se bloque et me laisse le temps nécessaire pour chauffer son arc avant qu’il ne décoche un nouveau trait sanglant. Il lâche son arme et disparaît dans une allée lointaine. Je n’ai cependant pas les techniques de déplacements de la guerrière. Sinon je ne serais pas resté dans l’axe de tir de l’homme et ses lames de jets et n’aurais pas reçu l’une d’entres elles sur mon flanc droit, m’arrachant un cri de douleur et me faisant perdre ma stabilité. En m’inquiétant sur cet adversaire de droite je perçois une nouvelle lame se ruer vers moi. Contrairement à l’autre je ne peux chauffer toutes ses armes à distance ce qui m’oblige à user à nouveau de mon feu.
(Tant pis si je risque l’incendie !)Malgré la douleur qui me lance, je fais rugir mon fluide magique et envoie une boule de feu sur la lame. Par chance les deux se neutralisent générant une explosion sans gravité. Il se saisit d’objets dans ses deux mains et m’en lance un premier. Je m’apprête à contrer de la même façon qu’un pic de douleur m’empêche de me concentrer assez. Je me laisse choir au sol pour éviter le tir et place une main sur la dague encore enfoncée. L’homme lance à nouveau quelque chose sur moi, un étrange projectile arrive sur nous différent d’une lame, plus volumineux. Hors de question de rester là sans rien faire ! Je lance une nouvelle boule infernale avant que l’étrange arme de jet arrive sur nous. Le choc fait exploser ma boule de feu, heureusement sans embraser les alentours, mais une étrange fumée nous agresse les yeux et les voies respiratoires. Je force ma camarade à se replier et vois l’homme qui nous a projeté l’objet fuir au loin. Peut-être par manque de lame de jet.
(Ces idiots sont fait, il n’y a pas de sortie ! Il nous faut nous replier et revenir avec des renforts.)Je prends le bouclier de la semi-elfe pour nous protéger des flèches lancées à l’aveugle et nous revenons avec difficultés à l’entrée du sous-sol.
VI.8 Investigation à la librairie.