La tourmente nous submerge, mais malgré tout, nous tenons bon. L’elfe blanche démontre qu’elle a ses propres arguments pour se défendre contre une telle tempête, sortant un fouet de son sac pour imiter mon geste. Un fouet… J’en viendrais presque à regretter qu’elle l’ait eu, et qu’elle ne soit pas venue s’accrocher à ma taille, dans une promiscuité subite et nécessaire, mais non moins agréable. Celui qui s’accroche à moi, en revanche, c’est Fléau, qui s’y prend un peu mal, et un peu tard, et se fait à moitié emporter par la bourrasque terrible. Il ne se raccroche que de peu à ma cape claquant dans mon dos, m’étranglant à moitié.
« Gargl… »
Il tient bon néanmoins, et j’en remercie le solide tissu de mon habit qui ne cède pas. Un cadeau des Amants… Comme quoi, j’ai peut-être finalement réussi à créer des liens solides, même s’il ne s’agit que de métaphore textile.
Hélas, nous ne sommes pas les seuls à voler : les insectes se font retourner dans tous les sens, et virevoltent sauvagement, menaçant à tout moment de nous blesser. La blanche est épargnée, et je ne me fais que légèrement heurter par une carcasse encore vivante, qui ne m’abîme pas trop. En revanche, mon ami sindel en prend littéralement plein la tronche. Bien moins protégé, dans ses habits, il se fait transpercer de part en part par le dard-épée de ces satanées bestioles, juste avant que la tempête ne s’en aille plus loin, et que le calme retombe.
Mais il n’est guère le temps de souffler, fut-ce plus calme, désormais. Car mon ami se vide de son sang, grinçant de douleur sur la branche où il s’est reposé. Je laisse mon arme reprendre une forme plus pratique pour la rengainer dans son petit fourreau de dague, et je me retourne vers Fléau tout en me massant le cou, pour en amoindrir les marques d’étranglement.
« Fléau, je suis là. C’est fini. »
Je tâche de garder son regard sur le mien, qu’il ne parte pas dans l’inconscience qui lui serait fatale. Son état est critique, et je me dois d’intervenir, fut-ce douloureux. Ma main se pose sur l’aiguillon terrible qu’il a dans le ventre, et le rassure du mieux que je peux… C’est-à-dire pas grand-chose.
« Respire. Tout va bien aller. »
L’action que je dois effectuer est quasiment aussi difficile pour moi que pour lui… C’est délicat, et je ne peux le laisser dans cet état.
« Sinaë, il y a des gourdes de potion dans mon sac. Donne-lui une gorgée, il en aura besoin. »
Le diminutif, le tutoiement, je n’y ai pas vraiment pensé en le disant. D’un coup sec, et néanmoins contrôlé pour être le plus précis possible, je retire l’appendice de l’insecte de sa plaie béante, espérant dégorger le sang qui s’en écoule avec ses propres habits déchirés.
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