Sans que je puisse moi-même donner mon avis sur la question, ou en poser moi-même, la discussion suit son cours, alors que la tueuse blanche s’intéresse à ce que nos ennemis racontent aux ombres. La réponse des ombres à ce propos me prend de cours, lorsque le nom de Tal’Raban est prononcé. Un serviteur d’Oaxaca, à nouveau. Un des treize est physiquement présent sur cette maudite île, et pas des moindres. Connu à l’échelle mondiale comme étant un nécromancien très puissant, ça n’est guère une bonne nouvelle que de le savoir ici. Cette nouvelle risque d’effaroucher encore davantage ma compagne de route. Je décide néanmoins de ne pas cacher cette information.
« Il semblerait que Tal’Raban, le serviteur nécromancien d’Oaxaca, aime discuter avec elles. Il semble les… aimer, et leur crée des compagnons… »
Je n’ose pas imaginer la tête des compagnons. Un frisson me parcoure l’échine. Un maître maniant la mort comme instrument ne me sied que peu. Je poursuis néanmoins.
« Apparemment, il les questionne pour comprendre les Enfers, et le lien qu’elles ont entre la terre et le monde de Phaïtos. Apparemment, il adorerait faire de même, devenant lui-même une ombre. Par… chance, elles ne semblent pas apte à accéder à ses désirs, le seul moyen pour y accéder étant de… mourir. »
Une perspective enchanteresse, ma foi. Nous débarrasser de l’un des treize tout en faisant mine de lui rendre service, voilà une occasion à saisir. Je garde l’idée de côté, alors que je continue à traduire…
« Quant à nos compagnons, si on les leur décrit, ils pourront sans doute les retrouver s’ils les ont croisés. Mais… Je crois qu’il est préférable que ce ne soit pas le cas : ils n’aiment guère les vivants. Ils les trouvent dangereux. »
Pourtant, ils nous parlent. Inspire-t-on à ce point la confiance, l’elfe blanche tueuse psychopathe froide comme la glace, et le sindel déboussolé armé jusqu’aux dents, et amoureux fou de ce que ces créatures redoutent : la vie. Quoi qu’il en soit, ça veut dire que s’ils ont vu nos amis, c’est qu’ils ont eu de gros souci et… que ce ne seront que cadavres à fouiller. Espérons qu’ils n’en aient pas croisé trop. Je décide d’immiscer mon grain de sel dans la discussion.
« Les villes ont-elles une entrée secrète ? Des moyens d’y accéder moins surveillés que d’autres ? »
Elles me répondent qu’il faut éviter les chemins de pierres, très fréquentés, et qu’il n’y a que peu de gens hors des sentiers. Sans traduire, je réplique :
« Pas d’égouts, ou de failles dans les murs ? »
Là encore, une surprise : il n’y aurait pas d’enceinte. L’infiltration sera donc plus aisée que prévu. Je transfère le message à Sinaëthin.
« Les sentiers ne sont pas sûrs, mais on peut se mouvoir en dehors, où peu de gens vont. Il n’y a pas de murs, autour de ces maisons. Ce n’est pas plus mal… »
Et en parlant de Tal’Raban…
« Et… Sinon, pourriez-vous attirer Tal’Raban hors de ces maisons pour que nous… l’aidions à réaliser son désir de rejoindre les Enfers ? »
Réponse positive des ombres, que je transmets d’un simple signe de tête à l’elfe. Ainsi, même si c’est leur allié, elles pourraient le mener à nous, dans un piège. Mais pour ça, nous devrons être plus nombreux. Je ne doute pas des capacités de l’archère, mais Tal’Raban est vraiment décrit comme un puissant serviteur d’Oaxaca. Et de ce que j’ai vu des capacités de ma sœur de chair, cela ne signifie pas rien.
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