Le soleil avait brulé la plaine tout entière, tout au long de la journée. Pas un nuage n'avait obscurcie sa lumière cet après-midi là. Alors qu'il s'évaporait doucement vers l'horizon, les températures redevenaient plus clémente. Sirat avançait sur le chemin de terre qui le ramenait chez lui. Il observait la faune se réveiller et sortir de leur cachette. Le soleil ne se couchera que dans quelques heures, mais déjà l'atmosphère permettait de reprendre une activité. Il s'arrêta un instant et passa un mouchoir sur son visage afin d'éponger la sueur. La journée avait été harassante, mais finalement le village bénéficiera d'une grange pour stoker les récoltes pendant l'hiver. Il leva la tête et observa sa maison, la dernière du hameau, cette vieille bâtisse, tantôt leur prison était devenue leur nid. Il termina les derniers pas qui le séparait du portail en bois. Au loin le soleil se couchait sur la mer délayant le ciel dans un camaïeu de malte. 
Elle l'attendait, la mine boudeuse les oreilles en arrières. Elle portait une robe longue, simple, de couleur opale, qu'elle avait elle même cousu. Elle épousait son corps avec grâce, découvrant légèrement sa poitrine généreuse, glissant sur un ventre qui s'était maintenant bien arrondi. Il esquissa un sourire maladroit et s'avança vers elle. Elle souffla et entrant dans la maison ne daigna pas l'embrasser. Sirat haussa les épaules, il avait l'habitude depuis le début de sa grossesse, N'kpa était plus sensible et plus impulsive qu'à son habitude.
La nuit était maintenant installée, la shamane était à la fenêtre le regard perdu entre les étoiles et la mer, qu'ils pouvaient contempler du premier étage. Sirat s'approcha dos à elle et tendrement l'enlaça. Elle déposa sa tête contre son épaule et il passa sa main sur son ventre.
Il restait là, sans rien dire, il appréciait son parfum, le contact de sa peau contre la sienne et goûtait à chaque seconde de cet instant. Son regard se détourna et porta sur un coin de la pièce. Elle avait fermé les yeux et profitait de la chaleur de son compagnon contre lequel elle se blottissait.
Dans le coin sombre, il finit par discerné ses armes juste éclairé par la leur blafarde de la lune. Etonnament il ne se demanda pas comment elles étaient arrivés là. Son marteau trônait contre le pavois au reflet cobalt et sombre. Il tenta de se remémorer quand il les avait laissés, quand il avait arrêté de se battre, quand il avait oublié l'effet qu'avait la liberté de parcourir le monde riant face à l'aventure et relevant des défis. Son imagination lui envoyait des images agréables, de lui dirigeant une armée à la bataille. Un mouvement dans le ventre de N'kpa le coupa dans ses pensées, il avait reçu un coup perceptible, comme une taquinerie contre sa main posée là. Il plongea alors son regard ahuri et souriant dans celui de son amante qu'il lui répondit avec l'affection des ses grands yeux ambres. Ils s'embrassèrent langoureusement avant de s'éloigner de la fenêtre et d'aller se coucher. Il avait balayé ses pensées de combat, de guerre et de quête aussi vite qu'elles étaient venues, il était heureux et cela lui suffisait.
La pluie avait frappé aussi subitement que les contractions. Il courait le visage frappé par la tempête, malgré le bruit de l'orage il l'entendait hurler. Elle avait commencé dans la nuit, à peine étouffé par le tonnerre. Il était sorti aussi vite qu'il pouvait chercher la guérisseuse. Puis elle lui avait demandé d'aller chercher de l'eau au puits. De l'eau au puits se répétait-il, quelle chose stupide vu qu'il pleuvait des cordes. Il voulait être là, il ne voulait pas la laisser franchir cela seule. Il glissa dans la boue et trébucha, mais se reprit vite. Quand il arriva dans son salon, il était trempé sale et plein de terre, la vieille était au pied de l'escalier qui menait à la mezzanine ou était leur lit. En haut les hurlements redoublaient d'intensité, il regarda l'ancienne qui baissait la tête.
il la poussa si fort d'énervement devant son inaction, qu'elle alla choir contre le sol, inanimée. Il monta fiévreusement les marches, il ne remarqua même pas la lueur bleuté de son marteau dans le coin du salon.
Quand il posa le pied sur le parquet devant leur couche. Un homme aux cheveux blancs s'occupait d'accoucher sa compagne. Il resta tétanisé entre la peur de le déranger et de risquer de faire du mal à sa femme et l'envie de tuer cet étranger. Son esprit se forçant à le considéré comme un guérisseur. Il se calma, tempérant son angoisse et l'accouchement sembla bien ce passé, les cris diminuaient, N'kpa travaillait courageusement, soufflant et serrant les dents. Il n'osait pas s'avancer, mais très vite un cri qui ne venant pas de son amante le libéra.
L'homme à la chevelure argenté se retourna, c'était Drizton, son regard placide et solennel sauta au visage de l'humoran. L'elfe noir tenait dans ses mains un bébé criard et gluant, le corps grisâtre. Sirat ressentit une immense joie s'ouvrir en lui. Une multitude d'émotions le parcoururent, la peur avait disparu remplacé par un émoi, un frisson presque enfantin. Il avait l'étrange impression de ne plus existé devant cet enfant, son enfant. Les yeux carmin, injecté de sang du Shaakt scrutait l'enchanteur. Son double s'extirpa alors de lui, un kandjar ébène à la main. Le bonheur éclata alors déchiré par l'épouvante et la panique de la menace qui pesait sur les siens. Jack s'exprima d'une voix lente et démoniaque.
On n'échappe pas à son destin, Sirat Ybelinnor, choisis la femme ou ta fille !
Sirat était figé par l'effroi. Il remarqua alors son marteau qui semblait ce pavaner non loin de lui, délaisser sur une commode usée. N'était-il pas au rez-de-chaussé avant, peu importe, le souffle épuisé et gémissant de N'kpa, balaya toutes ses questions. Les pleurs de sa descendance libérèrent sa fureur. Il tendit la main et l'arme se lança vers lui, il l'empoigna de rage, près à frapper de toutes ses forces.
Très bon choix, Fils du destin, Très bon choix...
Le poignard se leva aussitôt pour affliger sa sentence infernale.
l'enchanteur hurla et se réveilla. En sueur, à bout de souffle, il tata le sol autour de lui et discerna l'herbe humide et grasse.
(un cauchemars... j'ai fait un cauchemars...)
Il passa sa main sur son visage en sueur, encore tremblant et dépassé par les visons qu'il venait d'avoir.