Le griffonneau ne semble pas trop comprendre ce que tu lui veux et te regarde fixement en se balançant d’une patte à l’autre. Le froid semble d’ailleurs légèrement l’incommoder car il gonfle un peu son plumage. Des hululements se font entendre au loin, seul signe de vie perceptible autour de vous pour le moment.

Face à ma déclaration, le griffon resta coi, il n'avait pas dû comprendre ce que je lui demandais. Il continuait de me regarder fixement et fit une sorte d'acrobatie avec ses pattes qu'il balança de droite à gauche sans réellement se soucier de ma présence. Je me rendis compte qu'il était plus stupide qu'il en avait l'air, après tout, ce n'était qu'un animal.

(Bon, comment je vais à Mertar moi ?)

Les minutes se succédaient, je marchais dans tous les sens sans savoir pourquoi et le griffonneau gonflait son plumage, signe que le froid commençait à l'incommoder. Rien à l'horizon ne semblait vouloir déranger cette nuit calme, mis à part une chouette qui hululait à quelques mètres de la clairière. Je trouvais que cette nuit se faisait longue, je ne savais plus vraiment quoi faire, peut-être retourner dans la ville, mais d'un autre côté, je ne pouvais pas non plus abandonner cet animal. Il m'avait aidé, je lui en étais redevable.

(Je ne sais vraiment pas ce que je dois faire !)

Alors que tu fais les cent pas dans la clairière, le griffoneau ne semble pas vouloir te quitter, te suivant toujours quelques mètres en arrière. Il n’a de cesse de s’ébrouer et de glatir sans aucune raison apparente.

Cette journée fut quelque peu étrange, tout d'abord ces rêves, ensuite cette attaque, ce griffon et maintenant celui-ci ne cessait de me suivre. Que devais-je faire ? Je m'assis pour y réfléchir tout en scrutant les ténèbres glacées d'un regard vide.

(S'il refuse de me conduire à Mertar comment vais-je m'y rendre ? À moins qu'il doive d'abord m'emmener dans une autre ville.)

Cette idée germait dans ma tête, peut-être qu'il ne fallait pas que je me rendisse directement à Mertar, mais, plutôt dans une autre ville pour je ne savais quelle raison. J'observais l'animal qui ne s'arrêtait pas de crier sans réelle raison, je voulus tenter une nouvelle approche, cependant, si comme la dernière fois, il ne me comprenait pas, je ne serais pas vraiment avancé.

(Qui tente rien n'a rien ! Vas-y Kerkan, tu n'as rien à perdre.)

Je me mis en face du griffonneau, le regardant droit dans les yeux et lui demandai :
«Écoute-moi, j'ai reçu une image de toi en rêve, tu me conduisais quelque part, et je ne crois pas que ce soit une coïncidence. Donc je voudrais savoir si tu accepterais que je monte sur ton dos ?»

Pour que tout fût clair, je caressai la partie de son corps que je venais de citer. J'espérais qu'il avait compris, sinon, je ne voyais pas trop ce que je pouvais faire de plus, à part me rendre dans la cité naine avec mes pieds, et je ne le désirais pas.

Le grifonneau semble apprécier tes caresses et baisse ton cou comme s’il en redemandait…Rien ne montre toutefois s’il a bien compris ce que tu lui avais dit.

Le griffon avait l'air d'apprécier mes caresses, mais, avait-il compris ce que je lui avais demandé ? Rien ne le prouvait. Penchant sa tête comme s'il désirait que je continuasse mon action, je m'approchais lentement de lui. L'animal avait l'air en confiance, il poussait de petits beuglements presque inaudibles et ne me fixait plus de son regard inquisiteur.

(À présent, que dois-je faire ?)

J'étais si près du but, pourquoi ne pas tenter le tout pour le tout ? Sans cesser de l'occuper, j'essayai de passer une de mes jambes sur ses omoplates, usant de toute mon agilité pour ne pas toucher à ses plaies qui, sans nul doute, le faisaient souffrir.

Lorsque tu essayes de passer ton pied, le griffon s’ébroue et te fait tomber. Tu peux remarquer sur son expression qu’il ne comprend se que tu tentes de faire. Celui-ci revient vers toi lorsque tu es à terre pour te demander de nouvelles caresses…

Ma jambe était presque arrivée de l'autre côté de l'animal lorsque celui-ci s'ébroua et me renversa au sol. Mon corps s'écrasa dans un bruit sourd et je restai sonné quelques minutes, allongé dans la terre et les herbes sauvages.

(Heureusement que je n'ai pas atterri sur une branche pointue, sinon il en était fini de ma vie.)

Croyant que le griffon s'approchait de moi pour observer dans quel état je me trouvais, je fus déçu de le voir essayer de passer sa tête sous mon bras. Il redemandait seulement de nouvelles caresses. J'avais progressé, il commençait déjà à s'attacher à moi. Néanmoins, il me fallait rechercher une nouvelle tactique pour pouvoir lui grimper dessus. Apparemment il aimait bien les cajoleries, donc pourquoi pas tenter de l'amadouer ?

Je me levai, tout en grattant le cou de l'animal. Sous mes mains, je sentais ses douces plumes bien rangées, lui servant de seconde peau. J'aurais bien voulu continuer les flatteries, mais, soudain, je m'arrêtai et déclarai :
«Si tu aimes les caresses, tu vas devoir m'imiter.»

Le griffonneau avança vers moi, cependant à chacun de ses pas, je reculais toujours plus. Il finit par rester où il était et à ce moment-là, je m'allongeai sur le sol, puis me mis à quatre pattes.
«Hého ! Fais comme moi»

L’animal te regarde faire sans savoir se que tu lui demandes. Après t’avoir observé, il se rapproche de toi et vient te donner un petit coup de tête pour que tu le caresses à nouveau…

Le griffon me regardait d'un air perplexe, il n'avait pas encore dû comprendre ce que j'étais en train de faire. Je commençais à en avoir plus qu'assez de son ignorance, je sentais la rage bouillir en moi. Emporté dans mon élan de colère, je brandis mon majeur en direction du griffonneau d'une manière peu équivoque, tout en pestant des insultes. Je m'assis sur le sol pour me calmer et reprendre mes esprits corrompus par mon irritation. Le griffon se déplaça lentement dans ma direction, ses pattes étouffaient le plus discret des bruits et il pencha sa tête pour me redemander des caresses. Un petit sourire se dessina sur mes lèvres, je n'avais jamais vu une créature autant en manque d'affection.

(Au moins, lui, il sait y faire, je suis encore en train de le câliner.)

Il me fallait continuer, je ne devais pas m'arrêter en si bon chemin;je me levai rapidement. Devant lui, je m'agenouillai, joignis mes mains et telle une prière j'intimai à la créature :
«Je t'en prie, fais comme moi, regarde ce que je vais réaliser et copie-moi.»

De nouveau, je me mis à quatre pattes et je m'abaissai, j'espérais qu'elle fît la même chose que moi, sans m'en rendre compte je croisais les doigts.

(On peut penser que la chance existe !)

L’animal te regarde avec un regard curieux. Il vient à nouveau te demander des caresses en te poussant avec sa tête.

Comme mes précédentes tentatives, le griffon n'avait pas l'air d'avoir compris ce que je faisais et il vint une nouvelle fois à moi pour que je le caressasse. Je m'écroulai sur le sol de tout mon poids, je n'avais plus d'idées, comment amadouer un animal qui ne voulait que se frotter à moi ? Je commençais à désespérer, j'allais tenter une nouvelle fois de lui faire comprendre de s'abaisser à ma manière.

(Et si... Non... Je ne vais pas oser quand même...)

Mon regard se posa sur les cadavres de ces insectes horribles qui m'avaient attaqués, si j'arrivais à l'apprivoiser avec cette nourriture, tout serait réglé. Il était évident que j'aurais pu trouver quelque chose de plus ragoûtant, malheureusement il me fallait me dépêcher, je ne désirais pas que la vision de mon rêve se réalisât.

Je ramassai mon bâton que j'avais laissé sur le sol lors de mon conflit avec les mouches géantes et je le plantai dans l'un de ces insectes. Je me souvins de la manière dont le griffon en avait avalé un, c'était peut-être le moyen de se défendre, mais, pourquoi ne pas essayer ? Je brandis le bout de bois devant les yeux de l'animal, espérant de toutes mes forces qu'il eût une infime réaction.
«Regarde la bonne nourriture, tu ne veux pas la manger, c'est bon tu vas voir...»

Rien que de penser qu'il allait peut-être avaler un insecte, je fus pris de nausées. Cette image hantait mon esprit, je ne cessais de voir le griffonneau planter son bec dans l'abdomen de la bestiole.

Le griffonneau te regarde faire avant de s’approcher de toi. Celui-ci semble intéressé par l’ittic que tu as mis au bout de la branche. Après quelques secondes, il le picore et le mange d’une traite. Fatigué, il s’assied alors à terre.

Le griffonneau s'approcha de moi et dévora l'insecte, il avait l'air d'apprécier cette pitance. Puis, il s'assit comme s'il était las de tout ce qui se réalisait autour de lui, il était vrai qu'il n'avait pas dormi, puisqu'il me veillait quand je me trouvais dans le coma;je lui laissai quelques minutes de repos, le presser ne servirait à rien. Cependant, je devais continuer mon oeuvre, j'étais en bonne voix de résoudre mon problème de dressage, je sentais que Mertar était tout près. J'enfonçai mon bâton dans une autre mouche, il n'en manquait pas vu le combat acharné que nous avions mené. Je l'agitai de nouveau devant le regard affamé de la créature qui se releva d'un bond. Cette fois-ci, je ne lui laissai pas le temps de grignoter la proie et la retirai avec hâte.
«Si tu veux t'en nourrir tu vas devoir m'imiter sinon ton ventre restera vide. Alors, regarde-moi et apprends !» déclarai-je sur un ton posé.

Pour la troisième fois, je m'accroupis et lui fis des signes pour qu'il s'exécuta. Je paraissais peut-être ridicule, mais, avais-je le choix ?

Le griffon glatit de mécontentement lorsque tu écartes l’insecte de son bec, puis te regarde te baisser…avant de se poser ventre au sol. L’animal ne quitte pas des yeux l’insecte et glatit à nouveau.