Piqué au vif, il s'arrêta net, ignorant les bris de porcelaine qui s'étaient dispersés partout à ses pieds. Il tourna doucement la tête, ajoutant à sa mise en scène dramatique, son visage était fermé, dénudé de ce sourire moqueur qu'il arborait plus tôt. Il s'approcha d'un pas cadencé, pensant lui faire peur, pensant qu'elle se dégonflerait et qu'elle baisserait le visage, protégeant sa tête de ses bras, fonderait en larmes et finalement supplierait qu'on lui épargne son existence. Elle n'en fit rien. Son esprit se préparait au combat imminent, même si l'assassin semblait plus vouloir faire de peur que de mal, il n'en était pas moins sa cible et elle comptait bien profiter de l'effet de surprise.
D'un petit mouvement presque indicible que l'on pourrait apparenter à un geste de crainte, elle effleurait du bout du doigt la Tueuse de Mage, plus accessible que la Vieille Rengaine, mais alors, son médaillon vibra et la voix de l'assistante naïve de la Reine des Sylphes se fit entendre. Et ce qu'elle entendit n'avait rien de bon, les nouvelles ne lui plaisaient pas du tout. L'armée ennemie quittait Arden et marchait pour Illyria. Ses compagnons avaient donc scrupuleusement raté leur coup, elle n'avait toujours aucune nouvelle de Cromax, avait-il changé de plan en route, une fois de plus ? Elle devrait tirer ça au clair, une fois qu'elle en aurait terminé avec ce pitre d'assassin.
Il s'approchait, son pas faisait vibrer le plancher sur lequel elle se trouvait, ses sens s'éveillèrent, ses instincts de tueuse commençaient déjà à prendre le contrôle de son corps. Elle entendait tout. Le froissement des vêtements de l'homme tandis qu'il marchait vers elle, le cliquetis des chaînes suspendues à sa ceinture, le souffle du vent chargé d'embruns qui caressait le petit voile de la fenêtre. Il leva la main, toujours aussi dramatique pour porter un coup.
Il n'avait pas vu le sien venir. Qu'attendait-il de toutes façons ? Ce n'était pour lui qu'une servante obstinée et têtue. Il ne s'attendait pas à une menace, pas à un piège. Hrist n'avait pas observé son visage marqué par l'étonnement lorsqu'elle activa la magie des Sylphes et aussi imperceptible que la brume et cinglante comme le vent, elle avait glissé sur le côté, terminant sa frappe par un petit volte face, gardant bien sa cible en vue.
Son arme était déjà tâchée de sang, l'homme d'un hoquet de surprise tenait son bras endolori. " Les hommes d'Illyria ne savent pas armer leur femme, n'est-ce pas ce que tu disais ? "
Devant son air ébahi, elle adressa un petit rire moqueur mais cette fois-ci, il n'était plus question de provocation, son rire était sincère. " Crois moi, j'en ai connu des assassins. Certains médiocres, d'autres doués, peu d'exceptionnels mais ils sont tous morts à cause d'une chose, une seule. L'excès de confiance. Là tu vois, dans cette situation, tu ne restes pas discuter avec une servante après avoir échoué à tuer la Reine... C'est assez risible je dois dire, de tous les assassins que j'ai pu voir, tu es certainement l'un des plus inexpérimenté. " Son rire se poursuivi un temps, elle lui laissait reprendre ses esprits, essayant de déclencher en lui de la colère afin de poursuivre le combat, elle comptait bien lui laisser une chance de sauver son honneur.
" Manque de chance pour toi, tu as préféré répondre à la provocation et au lieu de t'enfuir... " Elle agita la pointe de sa lame ensanglantée devant lui, tout sourire qu'elle était, la Murène voulait jouer avec sa proie. " Oui, je sais, les blessures de cette lame son très douloureuses, elle a été forgée par une Shaakt, une Elfe Noire si tu préfère, son fil est si fin qu'elle perce une armure de plate, de cotte ou de cuir avec le même appétit. Alors tu te doutes bien que ton accoutrement de danseuse..."
Elle se tint droite, fixant l'homme, pointant sa lame vers lui comme pour le mettre en garde, il récupéra son arme dans l'autre main, ayant conscience que son bras blessé ne serait pas assez rapide pour engager le combat. " Je te laisse trois attaques, essaie de redorer un peu ton honneur, après, je te ferai comprendre le sens du terme ' épingler '. "
Elle lui barrait délibérément l'accès à la fenêtre, les volutes de vent magique et l'ombre noire la rendait difficile à percevoir lorsqu'elle bougeait, elle avait un aspect hideux, celui d'une ombre qui rampait ou flottait, un aspect imperceptible. L'assassin avait la mine désemparée, perdu, noyé face au doute et à la grande incompréhension qui assaillait son esprit.
Il attaqua, plus vivement que son premier assaut et avec beaucoup plus d'énergie, il n'avait pas répondu à la provocation, préférant se concentrer sur cet obstacle totalement imprévu.
Hrist esquiva l'assaut sans trop de mal, elle qui avait pris soin de blesser son adversaire au premier coup gardait cet atout de côté, il était plus faible et en plus blessé, l'issue était déjà scellée aux yeux de la Frémissante. Elle fit un autre volte face, gardant son adversaire en vue et frappa à a son tour, à peine plus haut que la première estafilade, blessé deux fois au même bras. Le sang perçait abondamment sa tenue et bientôt perlait sur le sol. Hrist tournait autour du jeune assassin comme un oiseau de proie.
" Donc c'est toi qui a été désigné pour tuer une Reine... Je trouve ça assez risible. " Elle retira son bonnet de servante, laissant tomber ses longs cheveux noirs sur ses épaules. " Oui, oui, oui, je ne suis pas vraiment une servante. Allons, dis moi ton petit nom et je te donnerai le mien. "
L'assassin la toisait d'un regard mauvais, lui lançant des tonnes de mépris. Il n'était plus question de sourire et de grandiloquence, le voilà en mauvaise posture, il le savait, elle le savait, restait à tracer le chemin qui le conduirait de manière immanquable à sa chute.
" Je croyais avoir tranché le biceps et non la langue... Mais soit. Je pourrais bien me présenter mais il y a peu de chance que tu aies déjà entendu mon nom, Hrist d'Omyre, la Lame Perfide, Rose, la Dernière Soeur, la petite Ombre de la Mort, Bras droit de Xenair et détentrice de l'Ombre Noire. " Elle éclata de rire. "" Tout vois un peu, tout ceci n'a pourtant aucun sens. Des noms, des mots, des vestiges d'une gloire passée, écrite à la plume de fer à l'encre du sang. C'est bien ce qui t'a amené ici non ? L'envie de gloire, la soif de renommée. Oh mais quel Assassin suis-je ? Un assassin silencieux, tuant dans les ombres ? Un assassin insaisissable, capable de tuer une Reine dans une foule et de s'enfuir sans se faire arrêter ? Non.
Elle marqua le dernier mot avec une froideur alarmante, elle refit face au jeune tueur, lui laissant le loisir de porter de nouveau un assaut, et il ne se fit pas prier. Cette fois-ci, armé du désespoir et de la colère, il lança de nombreuses frappes puissantes et ordonnées, parant à deux fois la tentative de Hrist de le blesser, il usait de tout ce qu'il pouvait, poussant les chaises, renversant les tables et jetant de nombreuses choses sur la femme pour la déstabiliser. Tous deux s'arrêtèrent de part et d'autre d'une table échouée, les bottes faisant crisser la porcelaine et les débris de verre à chaque pas.
" Non... Tu n'es rien, tu mourras comme tu es sorti de chez toi. Parfaitement anonyme. D'ici peu je te conduirai devant la Reine que tu as échoué à tuer. Et tu mettra genou en terre... Et tu baissera les yeux.. Et tu dira tout, car c'est là tout ce qu'il te reste pour t'éviter une mort aussi infâme que douloureuse. "
Piqué à vif par l'humiliation qu'elle venait de lui décrire, il attaqua encore, cette fois-ci bondissant au dessus de la table, usant de son seul bras valide pour frapper. L'adrénaline qui nourrissait ses coups le rendait plus précis, plus dangereux et même blessé il faisait de son mieux pour viser la gorge ou le cœur de la femme. Hrist quant à elle ne comptait pas reproduire la même erreur que l'assassin inconnu, elle n'allait pas le sous estimer, la tueuse parait et frappait avec précision, s'attendant à un coup bas, une tentative quelconque de tromperie, de berner sa vigilance. Mais il n'en fit rien. Les rares échos métalliques que chantaient les lames en se rencontrant résonnait par la fenêtre toujours ouverte qui donnait sur la rue. Son unique échappatoire que barrait la femme. Mais Hrist trop concentrée sur son adversaire ne prit pas garde à la flaque d'eau du vase qu'elle avait elle même renversée sur le marbre blanc. Elle glissa le temps d'une fraction de seconde et toujours eut elle le temps de reprendre son équilibre, il lui envoya un puissant coup d'épaule, l'envoyant s'effondrer par chance dans un fauteuil massif. Il y vit sa chance et lui envoya sa lame d'un coup vif comme l'éclair, le poignard fila dans les airs et elle pu éviter in-extremis le fil mortel de l'arme qui s'enfonça dans un bruit de bois percé jusqu'à la garde dans le dossier de velours rouge.
Sans attendre son reste, il détalait comme un lapin vers la fenêtre, envoyant à coup de pied valser coussins et tabourets avec la même hâte. Il venait tout juste de passer sa jambe par dessus la fenêtre qu'il senti une main agripper sa capuche et la lui ficher devant les yeux, aveugle, il se débattait avec sa propre tenue tandis qu'une main s'enroula autour de la chaine qui pendait à sa ceinture. Toujours dans le noir, il senti cette même chaine s'enrouler autour de sa gorge et le tirer en arrière.
Les joues rouges de colère, Hrist l'envoya retomber en arrière de tout son poids, lui envoya un coup de botte dans ce qu'elle pensait être la mâchoire histoire de le calmer un peu et s'agenouilla sur son corps empêtré dans le tissus et les chaines, désarmé, il gesticulait à grand geste dans un fracas de chaine et d'étouffements désemparés. Il eut à peine le temps de sentir qu'elle collait la lame de la Tueuse de Mage à l'arrière de son genou, juste entre la cuisse et le mollet. Elle tira un coup sec, éclaboussant le fin voile blanc qui dansait à la fenêtre.
Il poussa un hurlement avant de retomber sur le dos, haletant, sa poitrine se soulevait irrégulièrement tandis qu'il luttait pour bouger sans qu'un mouvement ne le fasse de nouveau hurler de souffrance. " Et bien... Si tu voulais sauter par la fenêtre il se pourrait que tu rencontres deux trois problèmes quelques étages plus bas. Allez mon petit assassin de pacotille, on va aller voir la Reine. "
Elle lui envoya de nouveau un violent coup de botte en pleine face, l'envoyant une fois encore s'étaler, l'arrière du crane heurtant avec fracas le marbre blanc de la pièce sur lequel se mêlait maintenant sang et eau à la lueur des rayons de soleils qui perçaient à travers ce joli voile blanc maculé de sang.
Hrist découpa la tenue de l'assassin sans prendre garde aux douloureuses griffures que faisait son arme en rencontrant la peau de l'homme. La tueuse augmentait son humiliation en le désarmant et le déshabillant. Toujours baigné dans une torpeur aux mille cauchemars, il ne cherchait plus à se débattre. Hrist en profita pour répondre au message reçu par magie directement à Pureté : " Et bien ma chère, je m'inquiétais presque pour toi. J'ai bien reçu l'information au sujet des troupes. Je devrais avoir un peu de temps devant moi pour préparer tout ça. "
Puis un autre, destiné à Cromax : " Alors ma grande folle, j'apprends que les vilains d'Arden envoient leurs armées marcher sur Illyria ? Je dois rester sur place pour préparer la défense j'imagine ? Ah, quant à la notre petite Reine, tu seras ravi d'apprendre qu'elle est encore en vie. Je viens de retrouver l'assassin envoyé pour la tuer, je crois que nous sommes amis maintenant. "- Elle lui envoya un autre coup de botte en pleine face - " Donc maintenant, mon nouvel ami et moi allons devant la Reine, je suis sûre et certaine qu'il a plein de choses à lui dire. Tiens moi au courant pour les armées, je pourrais peut-être trouver une solution pour retarder son avancée... A ma façon. "
Il termina cul nu, incapable de marcher à cause de la plaie béance derrière son genou, obligé de ramper en boitant tant il ne pouvait s'appuyer sur son bras ou sa jambe, le tout aveuglé par le dernier morceau de sa tenue, sa capuche, enfoncée sur sa tête qui lui empêchait de voir quoique ce soit. Ruisselant de sueur et de sang, il avançait à quatre pattes, tiré par la chaine qu'il avait plus tôt à la ceinture, maintenant enroulée autour de son cou. Traité comme un animal blessé, Hrist le trainait plus qu'elle le guidait vers la sortie. Elle retira le candélabre de bronze, ouvrit la porte et cria à la garde.
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Neutralise l'assassin, tendons de la jambe et du bras droit coupés. Le désarme et le déshabille presque complètement avant de le traîner devant la Reine avec les chaines qu'il portait à la ceinture.
Adresse un message à Pureté Adresse un message à Cromax
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