Toujours assise au sol sur son fondement, la petite poupée vivante se frotta les mains en fronçant les sourcils, ô combien mécontente de la façon dont s’était achevé cet entretien avec un mage colérique et impulsif. Il ne fallait pas toujours juger les gens sur les apparences, et ce mage donnait une très belle illustration de ce fameux dicton qui pour une fois n’était pas à prendre dans le sens le plus positif. De toute évidence, un vieux thaumaturge n’était pas forcément un sage réfléchi.
Keynthara avait été très déçue par sa réaction emportée. Elle, pourtant si gentille, qui avait même voulu lui apporter de l’aide en se mettant à la place du malheureux dont les années avaient sans doute fatigué son pauvre dos et ses vieux os aussi, s’était vue rabrouée d’une façon peu courante et peu reluisante. Ce vilain bougre pouvait en être sûr, elle allait faire parler de lui...
Une gentille dame un peu trop maquillée aida la jeune Aniathy, encore vautrée sur le sol froid, à se relever, lui offrant sa main et son sourire dans un ultime élan de compassion sans doute. Mademoiselle lui en fut d’ailleurs très reconnaissante et gratifia de doux compliments cette chaleureuse femme aux habits bleus roi, autant sur son amabilité que sur sa tenue vestimentaire plus que charmante.
« C’est vraiment adorable de me prêter une si gentille attention, Madame. Oh, et puis, vous êtes si jolie avec votre robe. Ca met en valeur votre beau sourire, et puis vos yeux aussi, c'est vraiment magnifique ! En tous cas, je suis désolée de vous avoir retardée, et de m’être trouvée sur votre passage mais… »
Au beau milieu de ces flatteries un peu exagérées qui se trouvaient pourtant être un minimum sincères, la voix de Keynthara s’intensifia pour donner lieu à une forte intonation plus que provocante, aiguë et plaintive, qui n’était dirigée qu’à l’attention du vieillard dans sa boutique, dont la porte s’était refermée dans un terrible claquement sourd.
« …mais ce méchant acariâtre de Moboutou m’a fichue à la porte parce que j’avais eu le malheur de casser son très cher carillon, sans même le faire exprès ! Il a été très méchant avec moi et m’a même jeté un sort ! »
La Petite trouvait la façon dont elle avait été traitée tout à fait méprisable et ses considérations égoïstes semblèrent même trouver écho dans le cœur de cette dame de bonne famille qui, prise d’une affection soudaine pour cette petite créature attachante, avait même renchéri derrière ses paroles pour les confirmer d'une voix claire et haute, sans gêne aucune…
« Oh oui alors, la malheureuse enfant, j'en connais qui feraient bien de se remettre en question, c'est une honte ! Même les magiciens commencent à faire n’importe quoi ! Où va-t-on ? Je me le demande ! »
Elle avait savouré cet instant de plénitude où cette belle dame inconnue avait pris de son temps pour se soucier du cas de cette adolescente au physique enfantin, mais le soleil commençait maintenant à abandonner la ville derrière son rideau de brume aux nuances écarlates et le rendez-vous de ce soir se rappela brutalement à son esprit. Il lui fallait rejoindre l’auberge au plus vite pour qu’enfin puisse débuter cette soirée qui s’annonçait chaleureuse, pensée par ce drôle de personnage qu’était l’elfe Cromax. Sans réaliser que la question rhétorique de la charmante personne n’avait pas attendu de réponse, Keynthara se risqua tout de même à en apporter une qui devait certes paraître quelque peu déplacée …
« Je ne sais pas pour vous mais moi, je vais à l’auberge pour ce soir, des amis organisent une petite fête ! Encore merci mademoiselle pour votre soutien, j’espère qu’un jour on aura l’occasion de se croiser à nouveau !»
‘A l’auberge’ semblait être une indication suffisante pour l’Aniathy qui s’était déjà rendue à celle de la Tortue Guerrière lors de ses premiers pas dans la cité de Kendra Kâr, et qui se trouvait non loin d'ici d'après ce qu’avançaient ses souvenirs. À sa connaissance, c’était d’ailleurs la seule et ce fut cette jouvencelle qui lui informa de l’existence des deux autres, plutôt connue sous le nom de taverne d’ailleurs, laissant la petite Keynthara dans la circonspection la plus totale.
(Et moi je dois aller où ? A la taverne ou à l’auberge ? Fichue mémoire… Cromax avait donné le nom en plus !)
Elle n’avait aucune idée du lieu exact où elle devait se rendre pour la fête de fin d’aventure et cette incertitude fit place à l’angoisse de ne pas arriver à temps, voir même de ne pas trouver du tout. La ravissante interlocutrice se sauva finalement, laissant la jeune guérisseuse dans de beaux draps…
(L’auberge ou la taverne ? La taverne ou l’auberge ? Déjà, c’est quoi la différence ? On y mange, on y dort ! Ah bah nan dans une taverne on fait que manger, et festoyer aussi. Ca peut donc qu’être ça… Allons bon, j’ai plus qu’à trouver un plan de la cité, et après si possible, cette fichue taverne dessus. D’ailleurs, y’en a un joli juste au pied du château je crois...)
Un peu plus sereine après ce petit cheminement de pensée qui avait apporté beaucoup de quiétude dans son esprit gamin, Keynthara se promenait maintenant paisiblement au travers des ruelles qu’elle empruntait cette fois-ci à contre-sens en essayant de se rappeler de l’itinéraire suivi tout à l’heure, quand elle était encore aux côtés de son escorte milicienne de fortune. Son mental n’avait heureusement pas éjecté tous les détails appris durant la journée, l’oubli du nom de la taverne étant déjà une bien trop grande perte qui se suffisait largement à elle-même sans qu’il faille en plus y adjoindre celle de la route à suivre.
Ainsi donc, la petite mignonnette finit par retomber sur la grande bâtisse royale de Kendra Kâr, et partant de là, sur ce grand panneau d’affichage qu’elle avait bien espéré trouver en retournant ici. Sur un pan de ce dernier trônait une multitude de papiers où l’on pouvait y lire beaucoup d’informations officielles, et foule d’autres également, qui ne l’étaient pas. Par un hasard fortuit qui ne l’était au final pas tant que ça puisqu’elle survolait chacune des feuilles placardées de son regard distrait, la demoiselle tomba évidemment nez à nez avec un parchemin portant directement le cachet du Roy Solennel VI.
Bien que l’encre ait été diluée par les pluies qui avaient dû s’abattre à foison sur la cité durant ces derniers mois, les mots du Roy étaient encore bien lisibles. Il était ici réclamé les services d’un groupe de fameux aventuriers afin de les lancer dans l’exploration d’une île pour le moins mystérieuse et répondant au doux nom de Verloa qui, lorsqu’on la connaissait un peu, n’avait en réalité que trop peu de douceur à offrir.
Keynthara se crispa un peu en revivant certains moments de cette histoire qui se jouaient telle une pièce de théâtre lugubre projetée dans sa tête comme sur un grand écran qui avait volé l’espace de quelques instants le premier rôle à ses grands yeux azurées. Finalement, elle arracha d’un coup vif et sec cette missive archaïque, laissant derrière cette dernière, au beau milieu de toutes les autres, un vaste espace vide, mais peut-être pas autant que le vide qu’elle ressentait en son sein en réalisant que plus personne n’était là autour d’elle, pour elle, à prendre soin d’elle.
Toujours était-il que cette affiche n’avait désormais plus rien à faire ici car grâce à eux et à leur remarquable collaboration, l’affaire était belle et bien terminée. L’île n’avait plus de mystères pour personnes ici-bas, à part peut-être pour les quelques individus et amis de la demoiselle qui étaient ressortis saufs de l’épopée, mais peut-être pas aussi sains d'esprit et de corps que l’on aurait pu l’espérer étant donnés les rudes souvenirs de moments encore bien trop partiellement révélés à leur conscience, comme s’ils avaient été victimes d’une mystérieuse amnésie collective…
(Bon, allons voir à côté sur le plan, ça vaudra mieux pour moi. Pas besoin de perdre plus de temps sur ces sottises définitivement révolues.)
Elle s’exécuta donc sans perdre un instant, s’attelant à cette tâche de décryptage de carte qui promettait de lui donner beaucoup de fil à retordre. C’était bien la première fois qu’elle se trouvait confrontée à ce genre d’outil qui, en plus de cela, n’était pas rendu très accessible aux petites personnes. Malgré tout, la minuscule Aniathy, même pas haute comme trois pommes, voulait tenir bon, résolument décidée à ne plus quémander son chemin au premier crétin venu sur lequel elle aurait eu le malheur de tomber.
(Si seulement monsieur Seldell le professionnel des cartes était resté près de moi. Lui, il aurait été bien plus capable que moi de lire ce machin-là, avec des numéros partout. Faut vraiment être érudit pour pouvoir s’y repérer dans tout ça. Heureusement que je sais lire ! Bon alors, taverne, taverne, taverne…où es-tu, taverne ? )
La petite poupée cherchait de son menu index pointé le chiffre de la liste pouvant bien correspondre à la taverne du coin. Cette entreprise, semblant toute anodine pour le quidam lettré et de taille normale, n’était évidemment pas de tout repos pour cette Petite qui dodelinait de droite à gauche sur ses maigres jambes tendues jusqu’à la pointe de ses orteils. Il paraissait clair que ce peintre, bien que doué de ses dix doigts, ne l’était pas forcément autant de ses méninges quand on voyait que la légende avait été placée, de façon bien peu judicieuse, à l’extrémité supérieure droite…
( Oh non ! Il y a deux tavernes ! C’est pas possible, qu’est-ce que c’est encore que cette histoire ! En fait, la demoiselle en bleu m’avait bien dit qu’il y en avait deux, et moi l’écervelée de service j’ai évidemment encore omis ce petit détail gênant… Je suis maudite ! Je suis une vraie maudite ! Ca doit être Moboutou, j’en suis sûre ! Avec sa vilaine magie !)
Surprise de sa découverte pour le moins embarrassante, la demoiselle manqua presque de tomber à la renverse, surveillant ses arrières en faisant des gros yeux comme pour accuser le premier passant de l’avoir bousculée. Il faut dire que s’enfermer dans des délires de persécution était une chose assez fréquente chez cette petite.
(La taverne du Paladin ? Hm… Curieux nom qui par ailleurs, ne me dit vraiment rien de rien. En plus de ça elle est vachement loin, punaise, j’espère que c’est pas celle-là ! Hors de question que j’aille me perdre dans cette ville une nouvelle fois, je ferai mieux d’aller à celle des 7 sabres. Je sais pas si c’est la perspective d’économiser mes p’tits pieds qui me met la puce à l’oreille, mais elle me parle déjà beaucoup plus. Allons-y pour celle-là alors, j’espère que c’est la bonne !)
Elle avait pris un peu de recul pour avoir une vue d’ensemble des lieux peinturlurés et il était vrai que cette ville semblait encore plus énorme quand on la considérait sous cet aspect global. On avait un mal fou à discerner les boyaux étroits de la cité et c’était tout juste si les maisons étaient représentées par de grossiers petits points qui se confondaient souvent entre eux tant ils étaient nombreux et compacts.
Cette étape de recherche menée à bien, Keynthara s’en alla pleine d’enthousiasme au travers du chemin qu’elle avait tenté d’imprimer dans son esprit de toutes ses forces, et avec toute la concentration qu’elle avait pu rassembler durant ce travail de mémorisation spatiale. Il fallait dire aussi que le chemin en quasi ligne droite n’était pas bien dur à suivre et que sa petite trotte n’allait pas durer longtemps, si bien qu’elle commençait à croire qu’elle serait la première à arriver au point de rendez-vous…
(Si personne n’est encore là, je serai bien embêtée pour savoir si j’ai vraiment fait le bon choix ! Quel casse-tête, j’aurai mieux fait d’être un peu plus gentille avec Seldell quand il m’a si généreusement donné la moitié de ses pièces. Il serait peut-être là à côté de moi à l’heure qu’il est… )
La demoiselle poupée resta sur sa faim en arrivant nez à nez avec les remparts qu’elle avait vus au loin se rapprocher de plus en plus sans jamais, ô grand jamais, apercevoir un seul panneau, ni même une enseigne lui indiquant l’existence de cette fameuse taverne pour laquelle elle s’était déjà donnée beaucoup de mal. Elle avait pourtant l’intime conviction d’être restée extrêmement fidèle à la carte qu’elle visualisait, mentalement, encore très bien. Hélas autour d’elle, il n’y avait que des maisons en bien mauvais états, et bien trop peu d’habitants fréquentaient les boyaux du coin pour que ce fût l’endroit idéal et stratégique où se soit un jour implantée une taverne.
Quelque part, elle avait donc dû faire une erreur. Le tout était maintenant de trouver laquelle, et surtout, de trouver le moyen de pallier à cet imprévu de taille alors qu’un étreignant malaise commençait à la gagner. Elle n’aimait pas être seule dans ce coin-là de la ville et chaque furtive présence qui se faisait sentir était plus dérangeante encore que les précédentes, si bien que sa réflexion s’accélérait encore…
(Un tournant à gauche, puis un nouveau sur la droite après un ou deux pâtés de maison, et au dernier grand carrefour, il fallait continuer tout droit. Oui, c’est exactement ça que j’ai fait ! Je comprends pas, ça devrait être quelque part dans le coin ! Ils l'ont peut-être déménagée autre part ? Ca ne m'étonnerait pas, j'aurai vraiment tout vu aujourd'hui !)
Explorer les environs à la recherche de bons vivants entrant et sortant d’une grande bâtisse prévue pour la détente et la boisson, voilà ce qu’elle s’était mis en tête de faire maintenant, et dans la plus grande hâte possible, parce que tous ces coins sombres et ces petites venelles étroites ne lui disaient rien qui vaille pour elle et sa grosse bourse…
Keynthara entreprit d’abord de faire le tour des masures en bordure de route sans trop rien trouver d’autre à l’arrière que des portes de sortie barricadées qui menaient quelques fois sur un jardin en bataille ressemblant plus à une jungle sauvage qu’à autre chose. C’était à se demander parfois si les habitants ne s’étaient pas tous donnés le mot pour déserter le quartier car moult bâtiments semblaient être laissés à l’abandon depuis un certain temps déjà. Cela n’était d’ailleurs pas forcément si étonnant que ça pour cette jeunette qui aurait bien aimé pouvoir en faire autant.
Ce parcourt infructueux mais relativement rassurants commençaient à lasser la jeune Aniathy qui perdait de sa méfiance et de sa vigilance. Après tout, elle avait peut-être été victime d’un mauvais préjugé sur l'allure générale des environs. La cité blanche ne s’appelait pas ainsi pour rien, et la paix et l’ordre semblaient réellement y régner, apparemment même dans ses plus mauvais quartiers. Il allait de toute façon falloir un peu s’y enfoncer et elle avait donc tout intérêt à garder son calme en étouffant le brouhaha de ses émotions à l’intérieur d’elle même, et celui de sa bourse clinquante aussi, pour pouvoir bien tendre l’oreille dans le cas où des éclats de voix et de rires se décideraient à venir enfin les offusquer.
Ce ne fut pourtant pas la gaîté ni les débordements de joie et d’amusement qui se présentèrent les premiers à ses esgourdes, mais plutôt une voix calme et profondément masculine provenant de derrière elle, et qui n’avait de cesse de se rapprocher maintenant alors qu’elle avait semblé l’espace d’un instant sortir de nulle part.
« Je peux t’aider petite ? Tu sembles un peu tourner en rond…»
En fait, cette voix franchement froide et placide lui glaça le sang qui lui faisait aux dernières nouvelles pourtant défaut. Comme la petite poupée ne répondait pas et continuait à marcher comme si de rien n’était en accélérant néanmoins le pas, cet individu reprit ses questions de plus belle en se tenant maintenant presque à sa hauteur. Elle pouvait voir ses habits foncés et amples remuer à ses côtés au rythme des enjambées de l’homme qui étaient nettement plus grandes, et plus lentes aussi…
« Tu as l’air pressé en tous cas, tu voulais aller où comme ça ? Chez un marchand peut-être ? Ce n’est pourtant que les voleurs que tu vas être amené à rencontrer avec ce bruit de toutes les convoitises, ma mignonne… »
Cette façon qu’il avait de lui parler, avec une nonchalance verbale qui ne se traduisait que très pauvrement dans l’intonation, commençait à agacer la petite Aniathy qui ne voulait à l’heure qu’il était, qu’une seule et unique chose, ou deux peut-être : que cet homme lui fiche la paix pour qu’elle puisse tranquillement rejoindre les gens dans la taverne des 7 sabres. En réalité, il lui faisait même assez peur avec sa grande taille et ses pas imposants, plongeant le corp de la jeune demoiselle dans une étrange situation de stress et d’indécision, attendant de voir la suite en ressentant une douleur étreignante à l’intérieur d’elle-même, dans son ventre.
Keynthara s’imaginait déjà la scène catastrophe où ce vil bonhomme l’empoignait par-dessous les épaules pour finalement l’emporter sous le bras, cherchant à tâtons une bourse bien remplie qui pendouillait naïvement à la ceinture. Il était hors de question qu’elle se laisse faire et à ses mots qui témoignaient déjà d'une menace implicite, sa première réaction fut d’apposer une main peu discrète sur sa baguette, et l’autre, bien évidemment, sur sa grosse bourse, répondant d’une voix au moins aussi machinale que celle de son impressionnant interlocuteur. Elle imaginait déjà la façon de se défendre dans l’hypothétique cas où il déciderait de toucher à un de ses cheveux, faisant appel à la mémoire du corps qui se souvenait encore trop bien de toutes ces batailles menées parfois de front sur Verloa, alors qu’elle-même ignorait tout de ses capacités qui avaient été dissimulées à sa conscience…
« Je cherche des amis, et la taverne aussi tant qu’on y est…»
En fait, elle savait très bien qu’elle les trouverait maintenant à la taverne une fois s’être débarrassée de ce personnage pour le moins dérangeant car avec tout le temps qu’elle avait perdu en déambulant inutilement dans les parages, le soleil avait eu le temps de presque totalement fait place à la nuit étoilée, sonnant les derniers instants de ce jour unique durant lequel il s’était déjà passé beaucoup trop d’évènements déplaisants.
« Où elle est cette taverne ? Rendez-vous au moins utile au lieu de me faire des remarques déplacées et de me demander des choses qui ne vous regarde qu’à moitié !»
Comme toujours, l'adolescente ne manquait pas d’impétuosité et ne sembla réaliser que trop tard la fuite qu’elle avait oubliée de prendre et qui aurait été le meilleur moyen d’échapper aux mains de ce brigand au crâne rasé. Sa main s’était lourdement abattue sur ses épaules comme elle l’avait l’instant d’avant imaginé sans vouloir y croire, et sans comprendre ce qui venait de lui arriver, la pauvre créature magique se vit projeter contre une surface de mur sale qui s’effrita considérablement en accusant le choc de ce terrible contact. Cette souffrance dorsale fut accueillie par un rugissement aiguë de colère émanant tout droit de la bouche démesurément ouverte de la Petite terrorisée.
« Tu vas apprendre à parler plus poliment à ceux qui sont plus forts que toi ma puce ! Allez, file-moi tes yus, et plus vite que ça ! »
Elle était toute seule face à un malfrat qui, maintenant elle pouvait en avoir la douloureuse certitude, en voulait à son baluchon extrêmement bien fourni, et la tournure des évènements ne se montraient pas vraiment favorables à la Chose inhumaine...
« Lâche-moi, espèce de sale voleur, je vous donnerai rien du tout ! »
Sans attendre plus longtemps lorsque l’homme plongea sa main vers le bas pour tenter de cueillir sa bourse heureusement bien fixée, Keynthara s’empressa de venir lui planter sa baguette magique dans le ventre, de toutes ses forces, sans en tirer autre chose qu’un léger râle de douleur qui eut pour conséquence de déchaîner la violence d’un homme contrarié dans ses plans les plus abjects…
Ses mains s’attaquèrent à sa fine nuque de poupée blanche et la soulevèrent du sol en frôlant le mur couvert d’une mousse desséchée qui s’effondrait doucement dans le dos de la créature se débattant au-dessus du vide. Cette situation était bien cocasse car lorsque les deux regards se rencontrèrent à hauteur d’homme, la Petite envoya un disgracieux cracha à la figure de ce voleur qui n’avait certainement pas prévu de se trouver en face d’une créature magique qui certes souffraient de cette étreinte autour de son cou, mais qui surtout pouvait bien parler et continuer de vivre sans aucun approvisionnement d’air…
« Alors, ça fait quoi de voir que je ne suis pas entrain de mourir entre vos mains d’assassin ? »
Sa jambe droite partit en avant dans un élan de tous les diables pour littéralement défoncer les parties intimes du détrousseur qui lâcha, sous l’effet de la surprise et du puissant coup, la jeune Aniathy atterrissant pour la seconde fois dans la journée sur son minuscule postérieur de poupée…
« Fou le camp, salaud ! » Murmura-t-elle haineusement entre ses dents serrées, abandonnant définitivement le vouvoiement que ce détestable personnage plié en deux et gémissant ne méritait pas le moins du monde.
Elle se sentait forte de sa sombre baguette qu’elle brandissait à présent devant elle dans une ultime menace qu’elle voulait dissuasive, se relevant prestement. Elle avait conscience du fait qu’elle n’était pas en mesure de faire autre chose que de lancer des sorts de soins et de renforcement, mais il était clair qu’ils avaient au moins le mérite d’être impressionnant. Déjà sa petite arme, brillante d'une étrange lueur dorée, se préparait à jeter de concert avec la volonté de l'Aniathy un étonnant sort d'endurance qui n'attendait plus que l'ordre final pour être lancé sur elle...
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