Voyant le petit rongeur aux mains agiles détaler vivement pour ne plus être visible, Jophiel agitait sa main de manière enfantine pour souhaiter l’au revoir à ce rapide kender. Demain, dès l’aube, à l’heure où la rosée arrose la nature, ils partiront. Il ne savait pas par contre, si le larron sera de la partie, enfin, il y avait des chances que ce soit le cas. Afin de comprendre tout ce que cette scène pouvait avoir de fatiguant et d’inattendu pour le semi-elfe, il faut ajouter que depuis quelques heures seulement il avait veillé dans ce campement, sise dans une des claires-obscures forêts de l’est de la contrée de Dahràm, partant de la cité du même nom, du port, en passant ensuite dans une taverne, puis courant ou marchant à vive allure en direction d’un castel pas encore atteint, et dormant une moitié de nuit uniquement pour tout un périple usant pour le non-initié. Taciturne, il restait un être à peu près banal pour ce qui est de l’action, du mouvement, il avait fait la guerre et a été placé au sein d’une affaire mystérieuse mais bon, il supposait que c’était le lot de tous. Il n’était pas le premier, certes, qui ait été frappé par la ressemblance qui existe entre les actes répétitifs d’un métier – comme ici, le vol – et les exercices par lesquels le prêtre et le fervent témoigne de sa puissante piété. Pour les deux, l’emploi de cérémonial est à prescrire. Pourquoi parler de ceci ? C’était exactement ce qui tournait dans la tête de l’ancien soldat ! Cependant, cogitait-il en regardant toujours un peu partout dans son acte lui aussi répétitif de « surveillance », la ressemblance lui semblait plus un apparat superficiel, de telle sorte que l’on pourrait, d’un entendement de la base du cérémonial du travailleur, se risquer à tirer par similitude des conclusions proportionnelles aux processus magiques de la vie religieuse.
Jophiel n’était en rien parfait mais il avait fait des études. Ces études relataient du comportement des êtres, de la magie et de la science abstraite en général ; l’université de Pohélis fut une mine de connaissance pour ceux qui eurent l’aubaine d’y accéder : il en fut et il se réjouit à chaque instant où ses dogmes lui furent utiles. Autant pour passer le temps que pour… lui sauver la vie. Pour reprendre sa pensée, les gens qui pratiquent des rituels, des cérémonials profanes – ceux du travail et de la vie normale -, avec des autres qui étaient en connexion avec des raisonnements envoûtants de l’âme, de représentations harassantes, de forces lancinantes formaient un groupe précis celui des « maux de l’obsession ». Jophiel peaufina l’idée d’un professeur odieusement tué pendant la guerre de Pohélis, maître des fluides lumineux qui avait l’ambition de soigner la folie pure ; sa folie se situait uniquement chez les possesseurs de fluides sombres pour lui, Jophiel n’était pas d’accord avec cela et il ne se gêna pas « d’améliorer » la théorie par le biais de son expérience. Jetant les dernières buchent dans le feu, il le regardait avec passion en grommelant quelques mots : « Si je rêve, c’est que je veux quelque chose. Disait professeur Eneor. Je pense encore qu’il a faux et qu’il se limite dans son idée, le rêve est bien plus profond que cela, je ne veux pas quelque chose : je recherche une chose. Il n’y a que les insensés qui ont le désir en tête. »
Il semblait passer du coq à l’âne très rapidement, il y a moins de vingt minutes, il se faisait arnaquer et il tentait d’en décider les modalités puis maintenant, il se tourne vers des théories avant-gardistes qui ne verront le jour uniquement si les garzoks sont cléments avec l’université. On pouvait penser que les supérieurs de ces orques, eux, allaient user de ces techniques pour œuvrer le mal sur terre. Imaginez justement une créature aux traits beaucoup plus grossit que le kender larron souffrant du murmure séduisant d’une obsession sur le vol, l’argent, le meurtre ! Il en était capable et cela pouvait déjà exister, le demi-elfe frissonnait à cette possibilité. En réalité, il n’avait pas vraiment changé de sujet, il voulait juste comprendre un peu plus nettement les mécanismes du voleur. L’appât du gain pour la gent normale mais pour le glaneur de l’université, c’était un trouble obsédant du psychisme du jeune kender qui se formait – attrait naturel chez cette race mais Jophiel ne savait qu’icelui était kender donc… - en lui pour s’accentuer encore plus. Son cérémonial se résumait certainement aux vols de petites choses : actions tels déplacement silencieux, rangements, découvertes de l’objet, des actions de sa vie quotidienne qui sont toujours exécutés d’une manière qui le rassure. Elles apparaissent comme de simples formalités pour son métier.
Le vétéran avait côtoyé dans son régiment un certain lieutenant qui, toutes les heures, devait nettoyer son sabre de cavalerie. Et quand, par malheur, il ne pouvait pas le faire pour cause d’attaque ou de mission, il semblait être puni d’une insupportable inquiétude, qui l’obligeait à se focaliser sur son acte omis. Cette volonté le poursuivait tellement qu’il se donnait tout les moyens pour y arriver et souvent dans les cas d’assaut garzoks, l’extermination de l’ennemie. C’était ce qui faisait de lui un aussi bon combattant : cette folie aveugle qui l’embrassait dans son unique conviction de nettoyage. (On est tous ainsi), remua-t-il dans son esprit. Pour le kender, rien ne devait le perturber. C’était juste dans son « art », dans sa technique, dans son rituel d’œuvré ainsi, mais cela avait des risques de devenir malsain. Le rapport précis avec les rituels divins ? Jophiel pensait à une sorte de peur consciente de faillir lors de la cérémonie qui se traduirait par le châtiment du dieu. D’où une certaine mise en isolation ainsi qu’une grande précision dans les gestes. Un obsédant, comme un religieux sont foncièrement pointilleux dans leurs arts et en sont généralement experts. Pour le professeur Eneor, l’analogie s’arrête là. Pour Jophiel, non. Car pour lui, les deux possèdent un symbolique précise permettant la compréhension de l’acte en lui-même, le sentiment de culpabilité est aussi le même lorsqu’ils ne peuvent pratiquer mais il était le lecteur, l’étudiant, le petit et non le « créateur » de cette doctrine. Cela ne l’empêchait pas d’essayer de voir plus profond que la surface de l’être, il lui fallait plus de temps et plus d’expérience. Le feu ne servait déjà plus à grand-chose, ses flammes n’étaient pas égales à ceux du soleil pointant un bout de sa flamboyante tête, il fallait sortir de son état pensif pour retrouver le chemin de l’aventure. Il n’avait pas l’ambition de réveiller le chevalier bleu qui le fera certainement seule mais lui, s’étonna que le temps eût un si grande rapidité tout en s’imaginant que si un brigand eût passé dans le coin, il ne l’aurait même pas vu !
Bientôt, il mandera le kender pour ces services même si il savait qu’il ne fallait pas trop se duper vis-à-vis de du petit être. Il avait gagné une direction, une bonne, il fallait espérer. Une triste nature régnait en ce jeune matin, des oiseaux commencèrent à quitter leurs nids pour chasser, le vent souffla timidement sur les branches, cette zone était oubliée sans être dévasté. Jophiel, debout, bailla et commença à s’étirer tout en restant méditatif sur la suite des évènements.
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« La mort est personnifiée COMME FIGURE ANTHROPOMORPHE ou personnage fictif dès le début de l'humanité. »
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