Maâra ne fait que quelques pas et s'arrête au beau milieu d'une allée de gravier.

((Impressionnant hein ?
- Par où je commence ?)) s'inquiète alors l'elfe grise.

L'université de Tulorim ne se limite pas à un seul bâtiment. Deux bâtiments en face à face se trouve de chaque coté d'une place centrale ovale, au bout de laquelle se devine d'autres bâtiments pas moins petits. Les murs qu'elle aperçoit de son point d'arrêt n'ont pas ou peu de fenêtres et d'ouvertures sur l'extérieur, lui donnant l'impression de ne pas être dans le secret ou la confidence des lieux ce qui a pour effet de faire reculer l'elfe grise.

((Commence par où tu veux. C'est une université pas une prison, tu as le droit de t'y déplacer))

Elle s'arme de courage et se dirige vers le bâtiment de droite dont la porte est déjà ouverte et d'où des gens sortent par petit groupe depuis qu'ils sont tous deux arrêtés, et aucun ne donne l'impression de sortir en courant pour fuir quelque chose ou quelqu'un … fait important s'il en est.

Elle gravit les quelques marches en se soustrayant aux regards en gardant la tête baissée et un rythme soutenu qui, elle l'espère, empêchera quiconque de s'interposer entre elle est l'intérieur.
Et aussi incroyable que cela puisse l'être, son Faera est dans le vrai lorsqu'il lui explique que dans une université, on attend de savoir si les gens sont au bon endroit avant de leur faire rebrousser chemin.
Personne ne lui barre la route mais accessoirement, personne n'entend sa voix fluette tenter d'entrer en contact avec les personnes entrant et sortant du bâtiment.


Elle s'engage alors dans le hall d'entrée, un immense espace où les discussions de chacun rebondissent sur les murs de pierre lisse. Il y a là une majorité d'humains de tous âges mais quelques non humains sont parmi eux, mélangés aux différents groupes, mais tous trop occupés pour se douter que la nouvelle arrivante est tout simplement incapable de s'imposer au milieu d'eux.
C'est pourquoi le Faera la guide mentalement vers un homme seul, debout devant un tableau en bois où sont accrochés divers morceaux de parchemin.

Elle s'approche doucement mais l'homme sentant sa présence se retourne, silencieux mais la questionne du regard.

- Euh, excusez-moi …
((- Morëla, de l'aide …
- Je souhaite m'entretenir avec une personne qui s'occupe des inscriptions))
- Je souhaite m'entretenir avec une personne s'occupant des …
((Inscriptions)) … des inscriptions.

-Message Guilde pour Maâra-

Ainsi abordé, l'humain se redresse avec toute la rigidité que son physique et allure laissent présager, tout du moins à n'importe qui ne se contentant pas d'un simple inventaire purement physique comme Maâra : yeux bleus, cheveux blond, peau blanche d'un humain banal, dimension ne l'obligeant pas à lever les yeux vers elle.
Et encore a-t-il droit à cette impressionnante preuve de jugement et d'intérêt tout personnel que parce qu'il prend lui-même quelques secondes à l'estimer, sans aucun doute de manière moins concrète.

- Je peux revenir plus …. Tente-elle de répondre à l'homme l'informant de l'absence de celle qu'elle cherche, sautant par là sur l'occasion de pouvoir s'y rependre à deux fois pour intégrer cette foule, et peut être même trouver le moyen d'y échapper.

Mais l'humain ne semble même pas l'entendre et trouve vite une solution et l'invite à le suivre, s'engouffrant un peu plus dans le bâtiment.

((Raté !
- Y'a beaucoup trop de monde !!))

A vrai dire, le couloir qu'ils empruntent n'est pas d'une densité digne d'un port ou d'un marché en pleine activité. Ils ne croisent que quelques personnes marchant en groupe qui stoppent naturellement leurs discussions le temps de saluer l'homme qu'elle suit avec respect qui se contente de répondre sans grande déférence. Elle-même reste presque invisible à tous ces gens qu'elle qualifie de foule, mais à l'inverse des gens dans la rue dont elle se dissimule par sa discrétion, ceux-ci feront parti de son entourage.

Heureusement, l'humain coupe court à ses pensées en l'invitant ensuite à entrer dans une pièce dont le caractère simpliste a tôt fait de la mettre plus à l'aise.

((Non ne le dis pas, s'exclame le Faera au moment où Maâra ouvre la bouche pour répondre par une phrase inattendue lorsqu'elle est priée de s'asseoir.
- Mais je suis quand même pas fatiguée.
- Aucun rapport. C'est une manière de faire un peu partout chez les humains, et les elfes aussi
- Pas moi
- Peut être … mais il s'agit avant tout d'être lui et toi sur une sorte de pied d'égalité
- ….
- Chut, laisse le pied où il est, comprend seulement égalité, pas de vrais dominants et dominés si tu préfères.
- Il a un plus beau fauteuil alors …
- Assis !!))

De cet entracte, le visage de Maâra n'en dévoile rien même si son naturel austère et indifférent peut lui donner l'air d'être ailleurs.

- Je m'appelle Maâra, commence-t-elle d'une voix fluette mais stricte, et je veux en apprendre plus sur ma magie, l'utiliser correctement et la contrôler, surtout.

-Message Guilde pour Maâra-

Et il y a effectivement beaucoup d'informations à enregistrer d'un seul coup, mais l'elfe a passé plus de temps le nez plongé dans un livre qu'à l'air pur et tant qu'il s'agit de mots, dont certains encore inconnus sont traduits rapidement par Morëla, elle se sent presque de nouveau à l'aise.
Et même si les passages évoquant l'adhésion à un groupe ne sont pas des plus rassurants, elle reste sereine et, en accord avec Morëla, est déjà décidée à ne pas se contenter de suivre des cours.
Le simple fait d'être livrée à elle seule en dehors des heures d'études, de devoir rester quasiment oisive plus de quelques heures, d'être soumise aux sempiternels relents de bile chaque fois qu'elle laisse son esprit vagabonder librement, sont autant de raisons pour préférer le travail à tout autre chose.

- Certains oui, surtout si je peux comme je le souhaite être intégrer à l'Obédience. Mais avant tout chose, je dois vous avouer l'origine de ma magie en espérant ne pas vous donner là la raison d'un refus.
Elle marque une pause et respire longuement avant de continuer, d'une voix anormalement placide de quelqu'un qui lit une recette.
Je possède des fluides d'obscurité et j'étais jusqu'à il y a peu destinée à servir dans un temple dédié au Dieu de la mort … par choix.
Je n'ai pour ainsi dire jamais utilisé mes pouvoirs, et je ne saurais comment vous être utile … mais je ne peux pas me contenter de cours pour comprendre et contrôler ce qui vit en moi.

-Message Guilde pour Maâra-

Pas une grimace, pas un froncement de sourcils, un pincement de lèvre ou un regard dans lequel se lit la crainte ou l'effroi. Et dans son cœur, il y a comme un profond soulagement baignant dans l'onde bienveillante provenant de son Faera.
Se peut-il qu'un autre lieu puisse lui apporter ce sentiment de sécurité, de normalité à vivre entourée d'obscurité ? Le chemin sera être long et difficile mais peut être que le hasard, ou le destin la conduit ici pour faire partager à d'autre cette tolérance et prouver qu'elle n'est pas moins méritée pour des êtres comme elle.

- Je ne suis pas à la recherche d'un lieu de prière, se défend-t-elle lorsque l'humain fait une pause.

Mais l'homme change de sujet et les mots qui suivent la rendent perplexe, et pendant une seconde elle hésite à parler … une seconde seulement mais une seconde suffit et elle se doit maintenant de se poser certaines questions difficiles de part son comportement indolent.

Elle est perdue et pas qu'un peu et met plusieurs secondes à réfléchir à ce qu'il attend d'elle, un exposé sur ses facultés ? un choix rapide et arbitraire entre plusieurs énoncés dont elle ne peut que survoler la surface des enjeux ? Savoir ce qu'elle veut ou ce qu'y lui irait est une épreuve digne d'un combat en arène … et de cette indécision nait la crainte qu'elle ne soit que plus vite livrée à elle-même, là-dehors.
Elle bloque littéralement sur ses facultés, n'arrivant pas à s'enlever l'image d'un sourire pervers embrouillant toutes pensées saines.

- Euh, et bien, bafouille-t-elle en perdant un peu plus sa voix à chaque mot jusqu'à devenir murmure. Je suis quelqu'un de patient, calme ou imperturbable certains disent, mais plus débrouillarde en forêt ou en pleine nature qu'en ville je le crains. Les mots retrouvent enfin leur route jusque sa bouche à un rythme moins saccadé.
Mais euh, je suis désolée mais il y a une chose que je ne suis pas sûre d'avoir comprise. Vous parlez d'accepter de servir l'intérêt de la Magie et des ses pratiquants … et de protéger les citoyens n'ayant pas accès à nos facultés … mais si ces mêmes pratiquants choisissent en toute conscience de servir leurs intérêts aux détriments des ces citoyens ? Que se passe-t-il ?

((Incroyable mais tu écoutes vraiment ce qu'il dit et ce que je traduis ?!?
- Bien sur.)) Répond avec aplomb l'elfe, le visage toujours tourné vers Higël Drikter et visiblement toujours pas sensible aux sarcasmes.

-Message Guilde pour Maâra-

Maâra écoute l'humain en s'abreuvant de chaque mot et se remémorant certains pour ne rien perdre du discours.
((Pourquoi es-tu si prudente ? Tu étais prête à faire n'importe quel boulot dans l'auberge et voilà que tu poses milles questions.
- Tu crois que je l'embête avec mes questions ?
- Rien à voir, et je sais que tu m'as compris …
- Oui, et je sais aussi que tu connais la réponse. Alors laisse-moi.
- Ce n'est pas une secte Maâra, tu l'as entendu : chacun possède et défend ses propres intérêts. Tu vas pas être obligée de te modeler à leur image pour intégrer cette Obédience.))

Le silence une fois encore répond au Faera, lourd de sens et empli d'une crainte qu'elle sait être infondée et qu'elle combat de l'intérieur. La solitude est sa compagne depuis très longtemps, un cocon protecteur qu'elle sait maintenant être aussi la source de ses difficultés à vivre en société … mais elle n'est pas sûre à l'heure actuelle vouloir vraiment apprendre à faire parti d'un groupe où le groupe serait tout.

- Plus que clair monsieur et si je puis encore abuser de votre patience, pourrais-je vous demander aussi ce que vous attendez de vos jeunes mages lorsque vous dites servir les intérêts de la Magie, quels sont-ils et comment puis-je les servir avec mes maigres capacités ?

Mais avant qu'il puisse répondre, elle enchaine brusquement d'une voix sur la défensive.

Je ne souhaite pas me soustraire au travail que vous attendez de vos membres, bien au contraire, je suis prête à faire tout ce que vous me jugerez apte à faire.

-Message Guilde pour Maâra-

Le discours de l'homme est encourageant et bien qu'elle sache que celui-ci ne soit foncièrement la preuve d'une considération particulière envers elle, les mots lui ouvrent la voie d'un optimisme qui lui fait défaut, d'une aptitude inconnue à se projeter dans l'avenir.
Son interlocuteur, par la rigidité de son discours et l'uniformité de son attitude depuis le début de l'entretien, permet à Maâra de se concentrer sur des faits et de faire son choix.
L'humain met l'accent sur un point que Maâra avait soulevé sans s'être rendue compte de son intérêt. Son mode de vie passé et son éducation sont sources de malaises et de déboires depuis qu'elle arpente cette ville, mais seraient un atout dans d'autres situations.

- Lorsque les membres de l'Obédience me déclareront apte à utiliser ma magie pour vous servir au mieux, je vous aiderais à traquer, retrouver et punir les mages agissant contre l'ordre et l'intérêt de tous.

((Étrange discours de la part de quelqu'un que tous prendraient arbitrairement pour une adepte du chaos.
- Le Mal et le Chaos sont nécessaires, de même que la punition. Je ne crois pas en un monde sans crimes et sans chaos ou inversement à un monde sans ordre, sans règles.))

Ce raisonnement, elle le garde finalement pour elle et choisit de s'en tenir à ses derniers mots.

-Message Guilde pour Maâra-

Un changement tacite se fait sur les traits du visage de l'humain blond, il cligne des yeux et sans détourner le regard de Maâra tend son bras vers un tiroir du bureau simple.
Le bleu acier de ses yeux la fixe sans qu'elle en comprenne cette fois le sens, elle attend et suit son bras du regard, presque inquiète sans savoir d'où lui vient ce sentiment.
((Il est satisfait)) Lui traduit alors son Faera afin de la tranquilliser, qu'elle arrête enfin de toiser l'humain.

Le Faera aussi est satisfait de la savoir déterminée enfin à quelque chose d'autre qu'un verrouillage complet au monde. Un petit pas en avant cependant, quand on sait qu'elle n'a choisit cette option en partie que parce qu'elle inclut la possibilité de s'éloigner du monde en tant que foule … mais qui sait.

L'humain sort d'une boite rectangulaire en bois sombre un morceau de parchemin et un encrier qu'il dispose devant lui en silence. Il plonge la pointe d'une longue et large plume grise et commence à écrire.
Maâra l'observe avec attention au début et tente de lire les premiers mots au fur et à mesure que l'humain les pose sur le papier, mais très vite la forte concentration de ce dernier lui impose une réserve quant à sa lecture discourtoise.

Pendant cette attente elle remue et remue encore sur son siège en essayant de trouver une position confortable, très discrètement certes mais être assise sur une chaise n'est pas habituel chez elle. A force de bouger, le paquet donné par Talic tombe au sol mais l'humain ne bouge même pas un cil à ce qu'elle qualifie pourtant de bruit assourdissant (notons tout de même qu'il s'agit toujours du paquet fait de vieux draps). Elle le ramasse d'un air embarrassé et l'ouvre machinalement, pour se trouver une occupation en gardant un œil sur l'humain au cas où il relève la tête pour lui faire part de son mécontentement ... ce qu'il ne fait pas.

Elle y trouve un rouleau de parchemin scellé à la cire noire qu'elle n'ose toucher et range dans une poche, ainsi qu'un bracelet qu'elle garde en main sans réagir.

((Des présents, c'est écrit de la main de Talic là sur le drap. Le bracelet est de la part de Catelyn et Davos a trouvé l'autre truc par terre et te le donne mais rien à voir bien sur avec un cadeau)) Le rat glousse avec tendresse face à l'attitude de la grosse brute mais Maâra, bien que décontenancée de recevoir tout ça, n'a pas comprit le sous-entendu des mots.

Elle attache le bracelet à son poignet gauche avec une délicatesse émanant plus de la stupeur de recevoir quelque chose que la précaution de ne pas l'abimer. Le bracelet est fait de verre noir et vert foncé et de métal, les sortes de billes de verre sont opaques mais irrégulièrement taillées et sur les séparations de métal entre chaque bille sont gravées des formes chaque fois différentes.

Il reste une dernière chose dans le drap, une bourse de cuir élégante estampillée d'un symbole que peu de monde sur ce continent ne pourrait reconnaître. Mais elle n'a pas besoin de l'ouvrir pour savoir qu'elle y trouvera de l'or ou des pièces. Le sceau de la famille royale de Tahelta trône là comme une signature, celle de sa sœur qui possédait cette bourse dès le départ de leur long voyage.
Son visage jusque là impassible se crispe au point de faire trembler son œil encore blessé.
((Elle croit se racheter en m'envoyant de l'argent ? ou a-t-elle si peu confiance en son inutile de sœur qu'elle me croit incapable de survivre sans elle ?))

Mais un mouvement de l'humain interrompt le cours de ses pensées, au grand soulagement du Faera.

Elle met quelques secondes à refaire surface mais, guidée par Morëla, elle prend la plume des mains et lit les termes du contrat, essayant de se concentrer dessus au lieu de ruminer sa rancœur.

Au bout de quelques minutes, elle griffonne une signature, lentement et d'une main mal assurée. Cela faisait presque quarante ans qu'elle n'avait pas eu à écrire quoi que ce soit et quiconque regardera sa signature le remarquera.

-Message Guilde pour Maâra-