Lindeniel a écrit:
La réponse de l’humain aux propos de l’elfe est vive et non dénuée d’une certaine agressivité fougueuse et obstinée, bien qu’il n’ait pas tort dans ce qu’il disait sas aucune diplomatie. En effet, Lindeniel détestait les gobelins, au même titre d’ailleurs que toutes les autres races présentes ici. En fait, il détestait tous les êtres qui n’étaient pas lui, et comme personne n’était lui, il les détestait tous au plus haut point. Il ne s’y intéressait pas, il les méprisait tous silencieusement, du haut de son ego démesuré et plein de magnificence et de grâce. En effet, il n’avait cure de la race dont il serait sali par le sang. Tout ce qu’il voulait, c’était rester pur. Seul son sang elfique et noble avait le droit de couler doucement le long de sa douce et pâle peau, et encore, seulement quand lui le décidait. Jamais il n’aurait laissé quiconque faire jaillir son sang hors de lui, sous aucun prétexte.
Kerkan conseillait de fuir la forêt. Ah s’il s’avait, ce jeunot, que la vie n’était pas facile, qu’elle était loin d’être aussi simple qu’il ne semblait le prétendre. Si Lindeniel était ici, c’est parce qu’il y était contraint. L’esprit de son père fraîchement assassiné par ses soins le hantait, envahissait ses nuits et ses rêves. Voilà pourquoi il était là en ce jour. Et aussi surtout parce qu’il avait été forcé de quitter sa grande et noble demeure familiale, trahi par un esclave, un larbin, qui avait cru bon d’avertir la milice du crime parricide de Lindeniel. Ah il se vengerait, une fois qu’il en aurait les moyens. Ce traître devrait payer son acte, et avant, il lui ferait regretter, amèrement.
Mais avant tout, il devait se débarrasser au plus vite de l’esprit envahissant de son père, qui hantait les profondeurs de son esprit tourmenté. Alors qu’il doive tuer n’importe quelle créature pour y arriver, quitte à être souillé de son sang impur, il le ferait, avec sang froid et indifférence. Il n’avait pas de pitié à avoir pour les autres. Ils ne méritaient en aucun cas qu’on se penche sur leur sort.
« Kerkan, ne soyez pas si hâtif dans vos réponses. Votre fougue pourrait vous jouer des tours. Vous êtes jeune, encore, et semblez ignorer beaucoup des choses de la vie. Vous verriez sous un autre regard vos contemporains si vous saviez ce que moi je sais. Mais là n’est pas le débat. Je ne tuerai que si l’on m’attaque, et peu importe le sang qui coulera, il souillera ma peau, comme il souillerait la vôtre. Si je suis ici, c’est parce que j’y suis contraint. Vous aussi, j’en suis sûr, vous préfèreriez être bien tranquille, au chaud, dans un endroit confortable et qui vous plait. C’est l’évidence même. Mais il est des choses par lesquelles nous devons passer, les obligations de la vie, le Destin. Alors laissez Zewen guider nos pas vers notre avenir, jeune homme, et priez-le que cette voie ne nous soit pas trop ardue. »
Le ton de Lindeniel s’était calmé, et bien qu’il ne comporte pas la moindre once de compassion, il se voulait plus chaleureux, moins froid. Il n’était pas énervé, ce Kerkan était juste un ignorant de plus, qui valait peut-être plus que la plupart des autres, s’il était un envoyé de Zewen, mais rien de plus. Aussi, Lindeniel doutait qu’il puisse saisir le sens de ses paroles, mais il les avait dites, presque par pitié de voir cet homme qu’il pensait meilleur ignorer tant de choses.