Mon mensonge n'a clairement pas eu le même impact que sur Vallel. Alors que le lieutenant semblait trouver cette informations légèrement inquiétante, le borgne quant à lui voyait l'arrivée de renforts Kendrans d'un œil totalement différent, si je peux me permettre de l'humour douteux. La nouvelle semblait même réjouir Lucian Elath qui visiblement ne doutait pas une seule seconde de la supériorité de son camp.

Vient ensuite sa réaction quand au fait que je demande à passer le fluide. Je me mets à sourire. Un sourire mesquin qui me vient naturellement à la fois pour jouer mon rôle et surtout parce que je trouve avec aisance des mensonges à lui balancer. Je ne peux que remercier Ezak pour ça. C'est avec lui que j'ai appris à avoir de la répartie.

" Nous ne sommes pas ennemis, vous n'avez donc pas besoin de connaitre toutes les cartes de mon jeu n'est-ce pas ?"

Mon sourire se renforce et gagne en naturelle quand j'utilise les propres arguments et la propre métaphore de mon interlocuteur.

" A moins que vous ne soyez bel et bien un traitre comme vous l'avez supposé un peu plus tôt, mais dans ce cas vous comprenez que j'ai encore moins de raison de vous montrer mon jeu."

Et encore une fois, je crois que je viens de merder...A trop tirer sur la corde, on finit par s'attirer des ennuis, et ces derniers prennent la forme d'une colère naissante. Oui, je viens très clairement de foutre le borgne en rogne et si je ne veux pas qu'il me cogne...Ou pire, je pense qu'il vaut mieux que j'arrête mes conneries.

Lucian Elath me fait très comprendre qu'ici et pour l'instant, c'est lui le boss, lui qui donne les ordres, que c'est à lui que je dois rendre des comptes. Je sais maintenant pertinemment que je ne vais pas pouvoir le convaincre de me laisser passer le fluide, il va donc falloir que je réfléchisse, et encore une fois relativement vite. Je dois réfléchir et trouver un autre moyen de nuire à l'armée Oaxienne. Certes, mes idées futures, si elles aboutissent n'auront sans doute pas autant d'impact que la condamnation du fluide, mais...

Une idée me vient soudain, oui...Ca peut peut-être marcher. Il faut d'abord que réinstaure le calme dans la discussion.

"Soit, les raisons que j'ai de passer le fluide ne sont pas capitales et je n'aurais pas d'arguments assez solides pour que vous les acceptiez. On va donc tout reprendre à zéro si vous le voulez bien."

Il me faut plus de renseignements. Je dois savoir ou frapper, trouver leur point faible, la faille pour m'y engouffrer.

" Faites-moi un résumer de la situation sur Aliaenon. Y'a-t-il des zones qui posent, ou qui risque de poser problème ? Des peuplades capables d'arrêter notre victorieuse avancée ? Si oui, je me porte volontaire pour semer la discorde...ou faire le ménage."

Laisser entrevoir un faux possible massacre, je suis sûr que ça peut séduire un Sergent d'Oaxaca non ?

J'écoute les informations que me dévoile le borgne, ignorants ses avances et ses remarques cinglantes, me concentrant sur la foule de renseignements que je dois assimiler. Ecartant les villes où je ne peux plus changer la situation, celle où la situation est clairement tendue et où je ne vais rien pouvoir faire seul, et celle où finalement, je sens que je peux changer les choses...Beaucoup d'infos, des tas d'infos, trop diront certains...Mais c'est sans compter sur ma motivation, sur ma détermination à sauver ce monde.

La carte que j'ai vu dans l'esprit du Sans-Visage m'apparait alors et j'essaye de me faire une idée plus précise de ce que vient de me dire Elath. Si les armées d'Oaxaca sont déjà sur le point de contrôler tout l'est d'Aliaenon, je ne vois que l'ouest et un nom s'impose naturellement à moi : Neo-Messaliah. Une ville de mage de feu, aussi proche d'Eslcar'Olth, c'est idéal, surtout quand on sait les dégâts que peut faire la magie sur ce monde. Je dois les pousser à se joindre au bon camp, et c'est avec cette idée en tête que j'explique tout ça au borgne...enfin plus ou moins.

" Neo-Messaliah. J'ai vu les dangers de la magie sur ce monde, on doit s'assurer le soutien des mages de feu, où tout du moins faire en sorte qu'il reste calme."

Bien évidemment, c'est sur les armées d'Oaxaca que je veux voir le feu s'abattre...et je dois agir vite.

"Du coup, si vous le permettez, j'aimerais prendre congé et m'atteler à ma tache sans attendre."

Il ignore sans doute que je peux m'y rendre instantanément avec un sifflet...et je préfère que ça continue.

Le borgne ne semble pas avoir d'objection quant au nouvel objectif que je viens de me fixer. Je prends alors congé, sans un mot de plus et m'efforce de quitter cette foutue ville glauque. Non sans mal, je retrouve mon chemin et une fois à l'entrée de la ville, je cherche un coin discret. Après quelques minutes de marche, je finis par trouver un endroit à l'abri des regards, derrière un énorme rocher. Sans attendre, je souffle dans le cadeau du Sans-Visage, attendant le cheval ailé, pour le chevaucher direction la ville des pyromanciens.

Plus rapide qu'un éclair et moins bruyante qu'une plume tombante, l'envol de Ranma jusqu'à l'unique et titanesque tour d'Elscar’Olth ne fut rien de plus qu'une tache floue dans le ciel de la cité noire.

Le barde resta un instant stupéfait, sur le dos de l'équidé volant, devant le spectacle moribond qu'offrait la cité de l'ennemi du haut de la tour maléfique. Les remparts de la ville semblaient avoir une forme de coquille enroulée sur les fondations de l'édifice où se trouvait Serpent. Si habitation il y avait, elles devaient certainement se trouver sous terre ou à l'intérieur de la gigantesque tour elle-même.

Le ménestrel flatta l'encolure de Ranma, avant que ce dernier ne disparaisse dans un souffle, laissant l'aventurier seul face à la mission qu'il s'était donnée: trouver et rassembler artefacts, alliés et informations contre Oaxaca et ses troupes.

Les choix n'étaient pas grands et le rouquin prit rapidement l'initiative d'ouvrir la porte principale, si son raisonnement était bon, les hauteurs de la tour ne cachaient pas vraiment les ressources de l'ennemi et tout au plus rencontrerait-il quelques garzoks en sentinelles. De la manière dont-il était arrivé, aucun d'entre eux n'avaient dû voir sa monture ailée se poser au sommet, il avait donc l'avantage de la surprise.

Il entrouvrit la porte le plus silencieusement possible, avant de jeter un œil méfiant dans l'embrasure, prêt à planter de ses griffes, encore sobre de sang, le premier peau-verte qui aurait eu le malheur d'être de garde ce jour-là.

Le silence, l'obscurité et le néant c'était rassemblé dans la pièce sombre dans un mariage parfait. Le ménestrel n'y voyait goutte et pourtant la lumière blafarde aurait du permettre d'apercevoir quelques choses. Un vide obscur et oppressant, des ténèbres opaques, apanage des fluide ténébreux. Le ménestrel fronça les sourcils, si ces ténèbres étaient là, c'est qu'elles cachaient quelques chose de dangereux et dont l'efficacité dépendaient de l'ombre.

Il porta une main à sa besace pour en vérifier le contenu, mais une grimace déforma rapidement son visage, lorsqu'il constata amèrement ce qu'il craignait déjà. Il n'avait plus là moindre source de lumière depuis que ses affaires avait été prises par les troupes d'Oaxaca. Quand bien même ces dernières pussent percer le voile d'ombre.

Serpent se décala de l'entrée pour se coller au mur, à gauche de l'encadrement de la porte à présent ouverte. Il ne fallait pas qu'il fasse une proie trop facile et il devait décider d'une tactique. Il contacta l'esprit brouillon de Mask, petit troll goguenard, qui lui répondit télépathiquement sans apparaitre cette fois.

" Une lumière au cœur de la nuit est un phare pour les hommes et les monstres, entrer là dedans en portant ce genre d'artifices ne ferait que sonner l'alarme maitre... laisser moi voir ce que ce velour noir cache pour vous..."

Le petit gobelin difforme parut soudainement au pied du barde, son visage au nez aquilin légèrement tordu au bout et ses yeux chafouin trahissait son ascendant maléfique, mais serpent n'avait jamais eu à souffrir sa trahison. Il partait du principe que bonne ou mauvaise, cette entité, cette faera et lui était profondément liée.

"Je te fais confiance, malice et la discrétion sont tes autres noms. Ne sois pas inutilement cruel et ne tarde pas à me faire ton rapport. Ce lieu n'est pas sujet a plaisanteries..." Murmura le barde au gremlin.

"vous êtes un vieux pet mouillé maitre." salua Mask sur un ton serviable, avant de s'engager sous forme invisible dans les ténèbres de la pièce, tous sens aux aguets, son maitre attendrai un rapport détaillé.

(("C'est plus noir que dans l'trou du cul d'un orque")) émit Mask par télépathie à son maître. (("j'vois rien et j'sens rien, c'est vraiment un puissant sortilège qui maintient cette obscurité continue."))

Le ménestrel fronça les sourcils sous son masque, le problème semblait impossible à résoudre pour le moment et il ne se risquerait pas à parcourir à tâtons une antichambre de l'obscurité telle que celle là. Il envisageait un moment de descendre par les escaliers extérieurs et se dirigeait vers ces derniers quand des bruits de pas le stoppèrent net.

(("Mask, replie toi ! Quelque chose approche de l'extérieur !")) Le barde fut pris d'une bouffée d'adrénaline insufflée par la peur, le stress et l'excitation. Il se mit à réfléchir à toute vitesse, plongeant un regard discret en contrebas, par dessus le parapet pour voir ce qui arrivait. Un groupe d'humanoïdes masqués déboulait d'un pas lent et assuré. Des hommes masqués d'un tout autre genre que Serpent, du genre qui tuent, sans réfléchir, tout intrus croisé sur leurs chemins. Le plus terrifiant se trouvait être l'unique homme à visage découvert, un visage glacial et étrangement familier au jeune barde. L'avait-il déjà croisé quelque part ?

Le ménestrel retira la tête en serrant les dents, les poings et évidemment les fesses. C'était une situation critique et quelle que soit la puissance de ses ennemis, il doutait pouvoir tenir tête à 7 hommes. Mask rejoignit son maître, son visage affreux tordu en une moue dubitative, lui même doutait de la réussite d'une retraite précipitée dans la pièce sombre.

Les hommes masqués approchaient et Serpent prit l'initiative de chercher une cachette, d'un œil paniqué, rien ne semblait assez gros pour le dissimuler et il dût se résoudre à une fuite d'un autre genre. Avant que les hommes en noir n'atteignent la plateforme, Serpent courut jusqu'au parapet opposé et jaugea ce qui pouvait être en contrebas, des escaliers ou encore une plateforme. Dès qu'il en eut une en vue, il se jeta tout bonnement dans le vide, poussé par la panique. Quelle que soit la hauteur, Serpent savait quoi faire pour atterrir plus bas sans encombre. Pas le temps pour une meilleure stratégie, il ne devait pas se faire repérer et par ce saut imprévisible, il espérait échapper au regard des nouveaux venus.

(("Mais... mais qu'est c'tu fous ! T'es complètement con ! Attends ! Revi...harrr trou d'balle !")) grogna son faera en le suivant dans son saut de lemming.

[Utilisation du sort "coussin de nuage", pour atterrir sur une plateforme ou un escalier le plus désert si possible]