Le combat devient de plus en plus haletant à mesure que, sans montrer un quelconque signe de faiblesse dans ses déplacements athlétiques, le Docteur poursuit sa course étourdissante autour de toi, semant sur son passage toujours plus de cette brume noirâtre dont les mouvements pourraient paraître suivre les tiens tant il semble impossible d’y échapper. Répondant présent à ta demande, tes fluides de glace s’amoncellent vite fait bien fait à l’extrémité de ton arme magique, formant une impressionnante munition effilée qui se propulse bien rapidement avec la force d’un boulet de canon en direction de ta cible.
Un immense éclat de voix multiforme mêlant déception et vivats secoue la foule au moment où ton projectile rate de peu la preste créature, passant de façon frustrante à moins d’un mètre de distance avant de frapper un des murs de l’arène. La manifestation de magie n’en reste toutefois pas moins probante, car plutôt que de se briser en mille morceaux, la grande arête d’eau solidifiée se fiche dans la solide paroi de pierre, y creusant un trou de plus parmi toutes les dégradations que le bâtiment a subies au fil des affrontements.

Mais déjà, c’est au tour de l’autre combattant de faire une nouvelle démonstration de ses capacités, et le parcours bondissant du grand personnage prend un rythme frénétique tandis que la forme des nuages qu’il avait semés depuis le début des hostilités s’altère. L’instant d’avant de simples panaches bien vite écharpés sous les coups du vent, ils acquièrent comme sous l’effet d’une indicible commande une épaisseur intimidante, renforçant leurs positions, s’accumulant irrésistiblement autour de toi tel un troupeau menaçant.
Et sans prévenir, voilà cet amoncellement qui jaillit sur toi à la façon d’une chape ténébreuse et désagréablement humide, se plaquant contre ton corps, s’infiltrant par les moindres interstices de ton équipement, paraissant drainer tes forces et amollir ta peau tel un acide rongeur. A part un très déplaisant picotement aigu qui t’envahit les chairs, tu ne ressens pas de réelle douleur, mais tu es cependant pénétré d’une sensation de faiblesse et de vulnérabilité qui, contrairement à la brume dont l’écrin se dissipe plutôt rapidement, ne te quitte pas après coup.

Pendant tout ce remue-ménage, les spectateurs se sont perdus en conjectures diverses, et ils se tiennent maintenant coi, la scène que vous offrez ayant repris une certaine stabilité puisque le Docteur se tient désormais immobile à quelques mètres de toi, te fixant sans mot dire, l’allure indéchiffrable.

Il était trop rapide ! A peine avais-je tiré mon missile de glace qu’il avait quitté sa position, laissant mon tir faire chou blanc en s’éclatant sur le mur. Je continuais mon placement stratégique en poussant un juron et me mis en garde, observant la suite des événements. Et là le docteur montra enfin ses vraies capacités. Ses déplacements incessants avaient diffusé sur dans l’arène des brumes sombres qui s’animèrent d’un coup pour fondre sur moi. Pris au dépourvu, il me fut impossible d’esquiver cet assaut magique qui traversa mon armure pour venir me coller à la peau. Un cri entre la surprise et la peur s’échappa de mes lèvres alors que mes forces se dégorgeaient de mon corps sous l’effet de la substance funeste.

(Ce sort est affreux. Je me sens réduit, comme si je n’étais plus capable de me battre)

Le corbeau se posta en face de moi, me fixant longuement. Il attendait une réaction. Et avec sa vitesse, je voyais difficilement comment le toucher. Mon premier essai l’avait prouvé. En tout cas, sa magie insidieuse me rendait vulnérable et il allait en profiter. Je devais l’empêcher de m’atteindre.

« J’ignore tout de ta magie docteur, ni ce que tu me réserves… Mais pour ça, tu devras réussir à me toucher. »

Tout en parlant, je commençai à lâcher autour de moi des flocons éclatants s’emportant dans le vent et formant des silhouettes floues autour de moi. Je commençais à me fondre dans la masse neigeuse et venteuse, tout en marchant lentement sur le coté pour feinter mon adversaire.

(((Activation de la capa de classe « illusion de présence »)))

De part et d’autre, les sortilèges se font non seulement de plus en plus puissants, mais aussi et surtout de plus en plus spectaculaires, au grand ravissement du public qui se perd désormais en un concert de « Oh ! » et de « Ah ! » à la vue de l’arène envahie de vent, de brouillard et de glace en un véritable creuset élémentaire. De ton côté, loin d’avoir droit à une contemplation aussi exaltante d’une telle scène, tu en es un participant direct, idée à tout moins stressante tant ton adversaire est de toute évidence un combattant aguerri qui a plus d’un tour dans son sac. Ainsi, c’est une perspective soulageante que de te retrouver environné d’une émanation de tes fluides de prédilection en un abri protecteur, véritable cocon de neige te masquant aux regards extérieurs tandis que ta propre visibilité n’est nullement contrariée.
Mais étonnamment, malgré l’ouverture que tu as offert au Docteur en prenant le temps de dresser autour de toi ta barrière magique, celui-ci n’a pas fait le moindre geste dans ta direction. Au lieu de cela, son ombrelle reposant toujours sur l’épaule et sa dague toujours étroitement en main, il paraît lui aussi se concentrer, se préparer à une nouvelle confrontation, regardant vaguement dans ta direction en laissant échapper un mot dont tu peux à peine saisir les sonorités au milieu des rugissements des bourrasques maintenant encombrées de cristaux de givre :

« Intéressant. »

L’air ambiant se chargeait de l’odeur si particulière de l’hiver et m’apportait le confort de me sentir en terrain maîtrisé. J’étais pour ainsi dire chez moi. Le docteur, demeurant toujours aussi imprévisible, se contenta d’une observation curieuse, arrêtant carrément le combat. Il semblait prendre un malin plaisir à m’étudier et se jouer de moi en me menant en bourrique.

(Le meilleur moyen de le stopper serait de gagner ce combat.)

J’étais bien tenté de répondre, mais je préférai m’abstenir pour garder ma localisation imprécise et attaquer tant qu’il en était temps, avant qu’il reprenne sa ronde effrénée. D’un geste brusque que je voulais surprenant, je fis jaillir un nouveau pic pour le pourfendre, ou au moins l’atteindre et teinté de pourpre son manteau noir.

(((pic de glace, lancé au nv4, init 1, PM 1, attaque magie +8)))

Cependant que tu mets ton adversaire en joue, voilà que celui-ci, sans prévenir, frappe à nouveau, toujours aussi incroyablement rapidement que la fois précédente, s’élançant avec une souplesse digne d’un serpent dans ta direction. Tel un éclair crevant un nuage, il traverse ta protection cryogénique, ses prunelles d’un blanc éclatant derrière ses lunettes semblant étinceler alors que son bras s’abat en un arc parallèle au sol en direction de ton torse.
Préparé cette fois à la rapidité désemparante du Docteur, tu as le réflexe d’esquiver, ce qui n’empêche toutefois pas la lame couleur d’onyx de toucher, perforant ta cuirasse. Par bonheur, si ta protection matérielle est traversée, celle magique tient bon, et ce n’est donc en n’emportant sur son passage que quelques écailles de cristal en guise de trophée que l’attaquant poursuit sur sa lancée, se dépêchant de te dépasser pour se mettre à distance.

C’est alors que, entraîné dans ton geste, ton bâton laisse jaillir la puissance que tu lui avais insufflée, et c’est un nouveau javelot congelé qui part en direction de l’humanoïde, fendant l’air chargé de fraîcheur. Le diable est vif comme une sauterelle, mais cela n’empêche que ton projectile l’atteint, perforant une partie de son grand manteau pour lui déchiqueter le flanc, lui arrachant sur le passage du missile un intense cri de douleur. Véritable croassement de corbeau blessé, la plainte déchire l’air, plongeant momentanément la foule dans la stupeur tandis que ton opposant qui avait flanché sous le coup se remet debout d’un redressement sec, constellant dans ce mouvement le sable de l’arène de taches écarlates autour de lui.
Mais malgré sa blessure, il n’est visiblement pas disposé à abandonner, et d’un air non moins majestueux qu’auparavant, il te fait face à nouveau, son regard rivé sur toi ayant cette fois-ci l’air de réellement s’éclairer d’une lumière propre.

Et les spectateurs, haletants, dévorent l’affrontement des yeux.

A peine avais-je esquissé un mouvement que le docteur m’assaillit à nouveau, chercher à percer ma peau de sa dague d’obsidienne. J’eue juste le temps de m’écarter assez pour que la lame ricoche sur mon armure cristalline, ne me faisant aucun mal. Pris dans mon déplacement en rotation J’étais bien orienté pour pouvoir lui rendre la monnaie de sa pièce en lui envoyant un épieu tranchant alors qu’il s’éloigne, sa défense baissée.

Je fais enfin mouche et son croassement de douleur m’arrache la satisfaction d’avoir enfin réussi. Heureux de savoir que je pouvais finalement l’atteindre, je lui adressai un une provocation gentillette.

« Touché ! Ca fait un partout. Qui aura le prochain point ? »

Prenant une position de garde, j’attendais son prochain assaut. Dès que je bougeais, il fondait sur moi à la vitesse de l’éclair. Il ne me servait à rien d’agir en premier tant il me surpassait en rapidité à chaque fois. Je comptais donc attendre sa prochaine attaque et profiter de la subite proximité pour lui agripper le bras et insinuer un froid mortel dans ses chairs.

(Au pire, s'il se lance dans une nouvelle séance contemplative, je peux lui envoyer un autre pic de glace pour le déloger)


(((Toucher glacé, lancé au nv4, init 1, PM 1, attaque magie +8, ou pic de glace, lancé au nv4, init 1, PM 1, attaque magie +8 selon la situation)))

Les puissances se déchaînent au centre de l’arène, produisant un véritable vacarme tant les rafales charriant grêle et sable font enfler une rumeur persistante s’assimilant au grondement digne d’un géant colérique. Pourtant, à l’heure actuelle, ce n’est pas un tumulte féroce qui règne entre les deux gladiateurs, chacun guettant les mouvements de l’autre avec une vigilance qui n’a de pair que l’immobilité vigilante qu’ils observent.
Cette fois-ci, le Docteur ne répond pas, mais n’a nullement l’air inactif pour autant, la façon hardie qu’il a de se tenir indiquant que si tu as remporté une manche en le blessant, la victoire ne t'est de son avis nullement acquise pour autant ! Et d’ailleurs, de façon perturbante, il émane de ses yeux une brillance de plus en plus intense, et à moins que cela soit un effet du soleil qui se réverbère sur son manteau couvert de givre, celle-ci semble se propager à tout son être.

Le statu quo se prolonge un moment, puis, de crainte de laisser à ton adversaire le temps de se remettre des atteintes que tu lui as infligées, il te faut bien passer à l’assaut, si bien que c’est encore une fois un pic de glace qui te fait office d’armement. Giclant de ton bâton magique, le puissant carreau file droit vers ton opposant, lequel, alors que ton attaque est sur le point de lui transpercer le ventre, exécute un impressionnant moulinet de son ombrelle. Reconverti en véritable bouclier, cet objet qui avait plus l’air de tenir d’un accessoire de mode qu’autre chose intercepte lestement ton pic. Celui-ci glisse sur la surface de toile cirée, et, sa trajectoire infléchie sous le poignet de la mince créature, va se planter un peu plus loin dans le sable de l’arène.
C’est à ce moment là que tu peux t’apercevoir que ta vue ne t’avait bel et bien pas joué un tour : l’étrange personnage est bien nimbé d’une aura d’un blanc transparent à peine perceptible, et c’est auréolé de cette curieuse lumière qu’il prend la parole, sa voix de ténor maîtrisée sifflant posément malgré sa blessure toujours saignante :

« Je ne suis pas poli au point de vous laisser ce plaisir. »

La tension grimpait dans l’arène et j’avais l’impression que l’on se trouvait dans l’œil d’un vortex de cris, de bourrasques et de sable. Un calme paradoxale s’abattait sur les deux duellistes que nous étions, guettant l’un l’autre le prochain mouvement ennemi. Nous nous observions avec application et la folie aérienne qui nous entourait me faisait miroiter quelques mirages étranges sur la personne de mon adversaire. D’étranges éclats de lumière recouvraient l’obscurité de ses vêtements. C’est en craignant que ce soit plus qu’une simple illusion optique, je fus le premier à briser cet immobilisme, par une attaque vive et précise. Cependant, fidèle à sa célérité que je qualifierais de surnaturelle, le corbeau fis tournoyer son ombrelle qui se révéla être un bouclier d’une efficacité surprenante et mon pic ricocha pour se planter un peu plus loin dans le sol sablonneux sur sa droite.

(Quelle parade ! Cette ombrelle était un atout caché dans sa manche ! )

Mais ce n’était pas le seul atout caché qu’il avait choisit de me montrer car l’aura nacrée était bel et bien présente et l’entourait entièrement. Comme toujours et malgré sa blessure précédente, il garda sa contenance et répondit avec le même verbiage distingué et un brin provocateur qui lui sied si bien.

(C’est vraiment quelqu’un de particulier, pas un bête gladiateur… Je suis bien tombé.)

« J’en aurais été fort contrarié. Une victoire offerte serait de mauvais goût. Si je veux gagner, je dois aller la chercher moi-même ! »

Joignant le geste à la parole, je chargeais vers lui d’une foulée svelte. Je devais aller de l’avant plutôt que de répondre simplement à ses assauts. C’était risqué de me jeter ainsi vers sa lame, mais c’était une bonne occasion de percer sa défense. Chargeant mon bras d’un froid intense, je laissais derrière moi une trace givré sur le sable humide tandis que j’approchais du docteur. Mon but était de sauter sur son flanc gauche. C’était son coté blessé, mais aussi celui où le bras portait l’arme et non le bouclier, m’assurant de pouvoir le toucher plus facilement. Après l’avoir touché, je m’écarterais rapidement pour pouvoir m’éloigner de sa dague.


(((Toucher glacé, lancé au nv7, init 2, PM 2, attaque magie +14)))

Ton initiative est dûment saluée par le public, qui, encourageant la confrontation directe et impressionnante plutôt que les subtilités magiques, ne manque pas de laisser échapper à l’unisson une assourdissante vague d’encouragements. D’ailleurs, ceux-ci sont d’autant plus prononcés qu’en réponse à tes propos, le Docteur laisse se peindre sur ses traits aviens stoïques un mince sourire sportif, puis, d’un ton non moins spectaculaire, rétorque :

« Comme vous dites ! »

Et le voilà qui, dans un nuage de poussière sablonneuse mâtinée d’émanations gazeuses ténébreuses, s’élance dans ta direction par une agile impulsion de ses jambes toujours aussi vaillantes malgré les dégâts qu’il a subis. Harnachement de glace, constellation givrée et poing calorifique d’une part, et costume noir élégant, quasi-imperceptible halo perlé et dague d’obsidienne de l’autre, l’image de confrontation que vous offrez a de quoi se trouver aux premières loges de récits à venir !
Le moment du choc arrivé, c’est la rapidité de ton adversaire qui commence par prendre le dessus, car s’il n’est plus d’une vitesse aussi effarante qu’avant, il reste vif et habile. Ainsi, il se dirige vers ton côté gauche de manière à éviter ta redoutable arme fluidique, mais au dernier moment, ô surprise, il embraye agilement vers la droite, se baisse avec une souplesse confondante, et passe outre ton bras tendu. Sur son passage, son arme effilée touche, maintenue avec une force étonnante tandis qu’elle scie à travers écailles et bouclier des mages pour trancher profondément ta chair quelques centimètres au dessous de l’aisselle.

La douleur est cuisante, agrémentée d’une sensation de chaleur perforante lorsque ton sang gicle, et pis encore, déboussolé par la soudaineté du choc, tu trébuches sur un nid-de-poule formé par les vents violents, t’étendant de tout ton long sur le sable de l’arène. Celui-ci se voit d’ailleurs couvert d’une couche de gel sur un diamètre d’un bon mètre alors que ton sort se décharge.
Devant ta chute, les réactions des spectateurs se font diverses, certains laissant échapper des cris de stupeur et de désarroi, d’autres t’enjoignant déjà avec énergie à te relever, a contrariori d’un troisième parti bien échauffé qui crie au coup de grâce. Ce dernier camp est bien déçu, car en te remettant sur tes deux jambes, tu peux t’apercevoir que le Docteur, bien qu’en position de combat, s’est campé à distance respectueuse de toi, confirmant son intention par une phrase bien familière :

« Une victoire offerte serait de mauvais goût. »

Le public avait beau être tout feu tout flamme pour mon attaque, elle fut un échec cuisant. Le docteur prit les devants et vint chercher le contact. Il feinta une attaque sur la gauche pour fondre subitement sur ma droite et lacérer mon aisselle d’un coup net et précis. Déséquilibré par le choc et la douleur, je ne vis pas le nid-de-poule et continuais ma course en m’affalant au sol et conclure ma charge par un roulé-boulé douloureux. Mon sort se déchargea au contact du sol humide et le sable se couvrit d’une couche de verglas.

Le vent charriait les rumeurs gonflantes des gradins et mon envoi au sol attisa les contestations et les encouragements. A terre, couvert de sable et blessé, je peinais à me redresser. L’estafilade sur mon flanc avait été suffisamment profonde pour griffer mes cottes et j’empourprais rapidement le sol sablonneux et les cristaux de mon armure. Mes muscles endoloris me dictaient de rester allongé mais cela serait un abandon misérable après la première vraie blessure. Happant dans mes réserves de volonté, je comptais me remettre debout pour reprendre le combat, mais à ce moment là je me rendis compte que mon pic de glace précédemment lancé gisait à quelques mètres de moi.

(Il est juste planté dans le sable. Je pourrais m’en servir pour une diversion)

Je roulais sur le coté pour soulager mon flanc ouvert et me rapprocher de la stalactite pour ensuite me redresser et faire face au sanguinaire corbeau. Il me fallait vite une stratégie pour éviter de me prendre une nouvelle attaque aussi violente que celle-ci. Ses attaques pouvant faire de sérieux dégâts, je dois éviter le contact.

(En tout cas, j’ai beau cherché, je ne vois pas comment utiliser le pic au sol. A moins que…)

Prenant une pose plus combattive, je lançais un regard provocateur vers mon adversaire en espérant qu’il allait relancer une offensive. Attendant sa charge, je me répétais mentalement comment réagir.

(Quand il viendra, je fais un pas de coté avec un regard appuyé vers le pic planté au sol pour lui laisser croire que je compte l’utiliser. Il se placera en conséquence mais je le prendrais à contre-pied en me jetant de l’autre coté pour lui geler le bras)

« Prêt pour un second tour. »

(((Toucher glacé, lancé au nv7, init 2, PM 2, attaque magie +14)))

Même au milieu de l’atmosphère électrisée par la tension guerrière et envahie de résonances fluidiques, ton élégant adversaire semble garder son calme, te laissant reprendre tes esprits aussi bien que ta position dans une attitude de circonspection vigilante. Vos échanges n’ont certes pas été aussi violents que ceux de deux gladiateurs armes en main, mais ils n’en ont pas moins été impressionnants tout autant que meurtriers. La foule, torturée de suspens, reste muette d’attente, mais étonnamment, ce silence paraît presque plus tumultueux que les cris les plus bruyants tant l’atmosphère sourdement batailleuse fait battre le sang aux oreilles de chacun de façon assourdissante.

Mais trêve d’attente, il est temps d’en finir ! Sans prévenir, avec la force et la soudaineté d’un ressort tendu, la créature aux allures de rapace s’élance dans ta direction avec une impitoyable célérité, l’air laissant échapper un sifflement de mauvais augure sur son passage fulgurant. En un réflexe de survie bien calibré par tes aventures sur Verloa, tu ne peux alors que t’empresser de t’écarter de la trajectoire du Docteur en espérant échapper à la cruelle morsure du poignard noir qu’il brandit une fois de plus dans ta direction.
On dit souvent que, dans de telles situations, le temps passe au ralenti, mais en l’occurrence, c’est avant même de te rendre entièrement compte de ce qui se passe qu’une sensation effroyable t’envahit l’abdomen sur le passage de ton opposant. Perçant à travers l’étreinte rassurante de ta magie et de ton armure, une lame de rasoir diaboliquement effilée semble t’avoir chirurgicalement cisaillé le ventre pour laisser échapper à flots ton liquide vital.

Mais tout n’est pas encore joué ! Comme conditionné par ta planification rigoureuse, ton corps paraît agir de lui-même : lorsque tes yeux embués de larmes de douleur captent l’image floue de ton adversaire qui se montre un instant déconcerté devant l’obstacle de ton pic de glace, tes muscles se détendent. Avec une prestance ravageuse, ta main bourdonnante de fluide s’élance pour s’abattre sur l’épaule offerte de l’être en noir, et à ce contact presque inespéré, ton sort se délivre.
N’ayant alors que la force de laisser échapper un perçant soupir de douleur, ce combattant insaisissable se recroqueville sur lui-même, manifestement terriblement atteint par le froid cryogénique que tu as insufflé en lui. En un spectacle d’une rapidité perturbante, un halo cyan l’envahit de haut en bas avant de paraître de resserrer sur lui en une étreinte gelée qui lui écrase les chairs et lui pilonne les os.

Un instant, il paraît prêt à s’écrouler, inerte, mais finalement, c’est en titubant mais en restant bien debout qu’il s’éloigne de toi, le souffle court, avant de reprendre péniblement une meilleure posture. Il est ainsi visible qu’il a été sévèrement touché par ta magie, mais on ne peut pas en dire moins de toi : ton sang continue de s’échapper abondamment par tes deux vilaines blessures, et tes perceptions se troublent de façon alarmante.

« Vous êtes l’invité, à vous l’honneur de la décision. » Chuinte-t-il laborieusement mais suffisamment clairement pour se faire entendre au-dessus des grondements du vent et des spectateurs. « Voulez-vous continuer, ou en resterons-nous là ? »

Face aux hauts murs de l'arène de Kendra Kâr, Nark était minuscule. Il se sentait insignifiant devant cette magnificence et cette beauté écrasante. Le lieu de spectacle était majestueux, massif. La pierre blanche renvoyait les rayons du soleil, qui était à son zénith. Les passants défilaient dans la grande rue adjacente à l'arène. Il se sentait insignifiant dans ce monde où il n'était qu'un grain de poussière, un homme parmi tant d'autres. Il se sentait insignifiant face aux dieux, ces êtres supérieurs, qui avaient le droit de vie ou de mort sur les ridicules mortels que sont les habitants de la planète. Nark n'arrivait plus à voir le bon côté des choses depuis la mort de sa famille, il y avait plus d'un an.

Pour Nark, c'était l'heure de vérité. Aujourd'hui, ce serait le commencement de ses aventures, ou la fin de sa vie. Nark s'était imposé un ultimatum : s'il voulait vivre ses rêves, il devait parvenir à attenter à la vie d'un homme, ce qu'il avait fait une fois et qu'il avait amèrement regretté. Ou être grièvement blessé, voir mourir. Il devait raviver son sens du combat, et c'était sa seule et unique chance. Il devait réussir à se concentrer, à ne pas laisser de pensées négatives l'envahir.

Nark s'avança vers le guichet.
Que puis-je pour vous? , demanda sèchement un homme.
Nark soupira. N'y avait-il plus de personnes agréables, douces, amicales? , pensa Nark.
Je viens m'inscrire pour un combat. L'homme étouffa un ricanement. Que pouvait faire cet jeune garçon, armé d'une rapière légère, sans protection en dehors de ces plaques de cuir, face à des hommes de 120kg, équipés de lourdes épées à deux mains et d'armures d'acier? Mais cela lui importait peu. S'il voulait mourir à peine sorti de l'enfance, que bien lui en fasse. Il y avait trop de jeunes idiots sans cervelles.
Quel nom?
Nark.
Bien. Je vous laisse prendre la deuxième porte à gauche, c'est la salle "d'attente". Bonne chance. , dit l'homme avec hypocrisie. Nark se dirigea vers celle-ci. Plus que quelques minutes, et ce serait l'un des moments le plus important de sa vie: le début de son odyssée. Il pensait à ce qu'il allait faire après ce duel à mort dans la fosse au lion. D'abord le match, je réfléchirai à mon futur après.

Les minutes défilèrent. La foule eut un sursaut. Nark se leva, comprenant que c'était à lui. Un homme arriva, le priant de le suivre.
"Cher public, nous accueillons aujourd'hui dans notre arène un tueur de plus de deux mètres, Rico!
La foule scandait son nom. Nark restait calme. C’était son tour.
Et maintenant, cher public, face à lui, voici Nark !

Nark entra dans l'enceinte de l'arène, ce temple de la mort. L’homme, qui lui faisait face, à une trentaine de mètres, était son unique but. Il se sentait bien, il était concentré..15 mètres. Nark avançait à pas lents, il n’entendait plus le bruit de la foule, son attention résidait sur le colosse de plus de deux mètre qui se trouvait maintenant à une dizaine de mètres, la lourde épée de celui-ci, et sa rapière qu’il possédait depuis de nombreuses années. 5 mètres. Les spectateurs criaient de plus en plus fort, Nark observa bien les défauts de l’armure de son adversaire. Il portait un lourde armure, un heaume, mais ses jambes ne portait aucune protection. Un léger couteau de lancer pendait à sa ceinture.

Nark chargea. Il tenta d’empaler son ennemi, comme il l’avait appris à son école, mais celui-ci s’y attendait, et s’écarta juste à temps pour que Nark n’ai pas le temps de changer sa course. L’énorme guerrier tenta d’asséner au dernier des Lounge un coup quand il passa devant lui, mais déjà Nark n’était plus là. Le géant était ralenti par son encombrante armure et sa lourde épée. Nark avait l’avantage de la vitesse. Il avança vers l‘homme, échangeant des coups d’épée où se mélangeait passes en tout genres et coups de revers. Mais peu à peu Nark perdait du terrain. Sa légère rapière ne valait pas l’épee de son adversaire. Son sens du combat, à un degré inférieur de celui de son adversaire, ne l’aidait pas. L’homme possédait aussi la technique, et il était vraiment concentré.
Je vais mourir, mon adversaire est meilleur. Je vais rejoindre ma famille., songea Nark avec défaitisme. Profitant d’un temps mort dans le rythme du jeune Kendran, le grand guerrier désarma Nark de sa rapière, celle-ci roulant à quelques mètres de là. Nark, qui pensait déjà mourir, voyait sa fin de plus en plus proche.
Mais je dois me calmer et reprendre espoir! Il faut que j’aille chercher mon épée!, s’exclama Nark en son for intérieur. Son adversaire semblait ravi par le conflit qui semblait agiter Nark. Il s’apprêtait à donner le coup de grâce. Il leva son épée bien haute dans le ciel, comme si elle ne pesait rien. Il l’abattit de toutes ses forces sur Nark. Mais son épée se contenta de toucher le sol. L’homme s’était déconcentré et n’avait pas remarqué que Nark se trouvait près de son épée. Humilié par son coup raté, le colosse tira son petit couteau de lancer sur son adversaire.

Nark Lounge était de dos, il ne pouvait pas esquiver. Le couteau, parfaitement lancé, en une courbe gracieuse, se dirigeait vers la nuque exposée de Nark. Mais la lame, mal équilibré et de mauvaise qualité, déviait peu à peu de sa trajectoire initiale. Elle se Lanta avec un bruit mate dans l’épaule gauche du jeune guerrier. Il hurla de douleur, et palpa sa blessure : le cuir était imprégné de sang et la douleur était insoutenable.

Il était près de sa rapière, son arme fétiche. Il la ramassa, se retourna, et fit face à son gigantesque adversaire. Alors qu’il marchait, il se rendit compte que sa lame était légèrement fissurée.
Cette fois-ci, c’est vraiment la fin, je n’ai plus d’arme, à part ce ridicule petit couteau. En plus, je suis blessé à l’épaule. Il devait tenter le tout pour le tout. Il chargea son adversaire avec son épée. Son adversaire, méprisant et comprenant que c’était une attaque désespérée. Une nouvelle fois, il se déplaça vers la gauche au dernier moment. D’un coup sec, il tenta une parade. Nark, de justesse, réussit à la parer. Mais, sa rapière, endommagée, tomba en deux morceaux sur le sol. Le colosse eut un rictus satisfait, il tenait sa victoire. Utilisant sa technique finale favorite, il leva sa lourde épée à deux mains. Mais Nark, profitant de cet instant de déconcentration, planta le petit couteau dans le ventre de son adversaire. Celui-ci fit un pas, ébahi et abattit son épée. Nark esquiva aisément ce coup. Il reprit le petit couteau de la poitrine de son adversaire, et le géant lui donna un coup de poing dans le ventre. Déséquilibré, Nark se redressa de toute sa hauteur et ficha à nouveau la minuscule arme dans l'abdomen de son ennemi, qui s’effondra, sa vie s'échappant à gros bouillons de ses blessures.

Reprenant soudainement contact avec la réalité, Nark entendait les cris de la foule en délire scandant son nom :
Nark, Nark, Nark, Nark ! Levant les poings en signe de victoire, Nark eut soudain une intense douleur dans l’épaule gauche.
Je dois m'améliorer, il ne faut plus que je subisse des attaques comme celle-ci., pensa Nark en baissant les bras sous l'effet de la douleur. Déjà des infirmières arrivent pour soigner le vainqueur et le vaincu, qui avait peu de chance de s'en sortir.
Après quelques heures de repos, Nark apprit que son adversaire, très solide, n'était pas mort. Nark quitta l’arène après avoir récupéré son dû. Il était heureux.

La nouvelle charge se faisait plus meurtrière que les précédentes. Tel un toréador, j’attendais l’assaut bestial de mon ennemi pour bondir sur le coté et esquiver une attaque mortelle. Mais ma souplesse et ma célérité avaient leurs limites et je ne pouvais pas me mettre hors de portée de la lame cinglante. Alors que le tumulte de la tempête et du combat était démultiplié par les cris enfiévrés de la foule dans les gradins, la pointe habilement maniée cherchait une faille dans mon armure, en trouva une bien trop aisément, fissura la magie qui couvrait ma peau, transperça ma chair et taillada à l’intérieur de mon être.

Heureusement pour moi, l’adrénaline surchargeait tellement mon organisme que la douleur passa en arrière-plan et je laissai mes sensations en retrait pour obéir à la stratégie que j’avais calculée. Malgré l’élancement dans mon abdomen, je pivotais sur mes appuis et poser ma main gauche sur l’épaule du Docteur. Il était proche et la diversion au regard appuyé marcha, si bien que je pu toucher pour la première fois cet être aérien si dur à approcher. J’en profitai aussitôt pour déchainer mes fluides et libérer la fureur blanche sur la créature plus proche du corbeau que de l’humain.

Une lueur couleur de glace apparut pour suivre le chemin du froid et englober le bras directeur de mon adversaire. Le gel étreignit ses chairs dans un crissement déchirant et le Docteur paraissait au plus mal. Il tituba au bout de quelques mètres et je pensai un instant que j’avais gagné. Il se retourna vers moi et se redressa pour gagner une posture plus noble, cachant ainsi son affaiblissement général que sa voix trahira quelques instants plus tard. D’un geste preste, il envoya son poignard de sa main droite à la main gauche, armant ainsi son bras encore intact.

De mon coté, je ressentis plus vivement la douleur dans mon ventre. Mon sang coulait abondamment et suintait entre les cristaux de mon armure. J’avais l’impression que mes boyaux étaient déchirés et qu’ils ne cherchaient plus qu’à sortir. Mais le plus grave dans l’histoire, c’est que mes protections n’étaient plus aussi bonnes. Mon armure me semblait d’un coup plein de failles et ma protection magique insuffisante me laissait vulnérable. Encore un coup comme ça et je tomberais au sol, probablement inerte…

(Ce combat devient vraiment dangereux. Phaitos guette aux portes de cette arène.)

Dans un croassement faible et aigu, le Docteur proposa une échappatoire et de finir ce duel sur un match nul. La fierté aurait pu me pousser à rejeter son offre d’office, mais un peu clairvoyance demandait de mieux reconsidérer la situation.

(Je lui ai porté un coup très violent. Son bras droit est inutilisable désormais et il se battra moins bien en gaucher. De plus, il commence à être plus lent, moins stable. Je pourrais réussir à l’atteindre avec un nouveau sort et je gagnerais sans problème… Mais je ne suis pas intact de mon coté non plus. Je ne sais pas si je pourrais bouger aisément avec mon flanc droit par deux fois tailladé. J’ai perdu beaucoup de sang et ma vue se brouille un peu. Et pour finir, j’ai du épuiser une bonne partie de ma magie, ce qui me laisse plus que peu d’essai.)
Après quelques longues secondes de réflexions, je me laissais aller vers une conclusion moins belligérante.

« Je crois, cher Docteur, que nous avons tout deux fait nos preuves sur cette piste sablonneuse et que continuer mènerait vers une conclusion qui serait mauvaise pour tous. Restons en là et sortons en bons termes. »

Adjoignant le geste à la parole, je m’approchai d’un pas lent et pacifique, rangeant mon sceptre à ma ceinture et tendant une main tâchée d’un sang poisseux et sablonneux pour sceller ce combat dans une poignée de main amicale.

(Je ferais mieux la prochaine fois.)

Aux paroles du Docteur, le vacarme de la foule s’est tu pour laisser place au silence tendu de cette grande oreille collective, tendue dans l’attente de la réponse que tu donneras. L’arène de Kendra-Kâr n’est certes pas étrangère au sang et même aux cadavres, mais cela n’empêche pas qu’un combat de l’envergure que vous offrez ne se produit pas tous les jours, et que son dénouement restera par conséquent dans les mémoires pour au moins les quelques mois à venir, quel qu’il soit.

A tes mots, tu ne saurais exactement jauger la réaction de ton adversaire tant celui-ci est indéchiffrable derrière sa barrière de vêtements et de flegme, mais la façon dont ses muscles se détendent et celle dont la brillance derrière ses lunettes décroît soudainement laisse entendre qu’il n’est pas contre quelques années de vie de plus plutôt que de risquer de la voir finir en ces lieux. Quant à la foule, quelques huées vindicatives percent tout d’abord, mais celles-ci sont bien vite remplacées par une majorité manifestement bien plus appréciatrice de l’esprit sportif, un tonnerre d’applaudissements résonnant pour saluer la fin des hostilités.

Le grand humanoïde, ne se départissant pas de son standing en dépit de son état de santé inquiétant, essuie superficiellement son arme ensanglantée d’une de ses mains tachée de sang avant de la faire disparaître dans un des multiples replis de son grand manteau noir. Ensuite, repliant son ombrelle d’un geste presque précieux, il s’appuie dessus de sa poigne à moitié paralysée par le froid pour venir vers toi, l’autre tendue pour serrer la tienne sans manières malgré la sensation poisseuse due au liquide rouge qui couvre vos doigts.

« Une expérience que je n’aurai garde d’oublier. » Fredonne-t-il tandis que les traits de son grand bec se déforment un instant en un mince sourire. « Je vous remercie pour cette occasion des plus… profitable. » Achève-t-il comme si ce mot avait un double sens secret.

Mais tandis qu’il s’exprime, une véritable escouade composée d’une demi-douzaine de personnes arborant la toge des adorateurs de Gaïa fait irruption dans l’arène, se scindant promptement en deux groupes venant à votre contact. Ces gens étant manifestement bien habitués à faire leur travail, vous vous retrouvez tous les deux rapidement au cœur d’une litanie ininterrompue de prières diverses entrecoupée de halos de lumière guérisseuse bienfaisante qui a vite fait de chasser de vous le spectre de Phaitos.

Ensuite, de façon prévenante mais ferme, vous êtes séparés pour être escortés chacun jusqu’à l’extrémité de l’arène dont vous êtes sortis précédemment, cela toujours au sein d’un concert d’acclamations dont l’ampleur ne décroît pas, les vivats se mesurant avec enthousiasmes aux sifflements.
Ton désormais ex-opposant se laisse de son côté faire docilement par ses infirmiers, te gratifiant simplement d’un salut courtois en levant son chapeau avant de faire demi-tour.

A mon grand soulagement, le public semblait avoir été conquis par notre performance et ne voyait pas dans notre fin de duel un abandon honteux. En bref, un silence attentif emplît les lieux et non une huée sifflante. Mon adversaire acquiesça à ma décision et vint me serrer la main en signe de trêve.

Le combat est finit. Nous avons bataillé dur, cherchant à se vaincre l’un l’autre sans épargner les coups et en un instant, nous devenons de simples connaissances, presque compagnons tant nous avons partagé en quelques minutes de combat.

« Une rencontre que je n’oublierai pas non plus. Vous faire face dans l’arène a été un honneur. »

Malgré ses paroles aimables, je ne pus m’empêcher de tiquer sur son dernier mot qu’il avait appuyé avec un sourire aussi bien suggéré que le peu un bec d’oiseau sur un visage humanoïde. Il devait cacher quelque chose, mais en cet instant, il m’était impossible de savoir quoi.

Notre poignée de mains fut interrompu par une véritable horde de soigneurs qui nous séparèrent vite en psalmodiant des prières envers Gaia pour qu’elle nous accorde sa guérison. Je n’avais même pas atteint la porte me menant dans les salles sous les gradins que déjà mes plaies s’étaient refermées et mes boyaux rétablies. Je reprenais du poil de la bête à un rythme effarant. Avant de retourner dans l’ombre des lourdes pierres, je me tournai une dernière fois vers le public pour le saluer et laisser derrière moi un dernier tour de passe-passe. Je profitai des vents violents balayant l’endroit pour accrocher au contact de ma main des gouttes d’eau et le refroidir brutalement pour les transformer en légers flocons qui s’en vont virevolter. Après quelques instants de cette manifestation, l’aura bleutée autour de ma main s’évanouit pour laisser un spectacle plus féérique et une neige duveteuse qui était charriée par les esprits de Rana pour les disperser dans toute l’arène.

Les portes se fermèrent dans un choc métallique et le silence bourdonna à mes oreilles après ce combat dans la tempête. Les gens présents, que j’avais pu voir à mon arrivée me regardaient fixement, mêlant l’admiration et la déception dans leurs yeux, mais aussi une colère inattendue.

« Pas mal mon gars… Mais pourquoi avoir plié ? Tu aurais pu lui faire la peau à ce corbeau ! »

Son ton déçu me laissa dubitatif, mais l’intervention d’un guerrier qui se torturait la table en bois en griffant sa surface avec sa dague me plongea dans des interrogations muettes.

« N’importe quoi, il a eu un coup de chance en blessant le Docteur. S’il n’avait pas touché au bras à la fin, il n’aurait fait qu’une bouchée de sorcier de pacotille ! Et oui Monsieur le magicien, vous avez peut-être voyagé sur Verloa pour le roi, mais le Docteur a fait des missions bien plus dangereuses que vous n’en supporteriez. »

(Mais que ce passe-t-il ?)

« T’es juste rageur parce que ton favori n’a pas gagné, laisse tranquille. Vous vous êtes bien battu Lillith. Qui aurait cru à un match nul ? Heureusement que je n’ai pas misé trop. »

Tout s’expliquait enfin. Bien entendu, ils avaient pariés, comme bon nombre de spectateur et le résultat final était plutôt inattendu, comme on en voit peu sur ce sable empourpré.

« Il a vraiment du talent et ça allait une destruction mutuelle assurée si on continuait ainsi. J’ai préféré cesser avant qu’un de nous meurt bêtement. »

Vu la situation et les regards noirs qui me visaient, je décidai d’ignorer ces manifestations d’animosité et passer outre cette situation qui devenait embarrassante. Le responsable alla chercher une bourse puis me la tendis à contrecœur.

« Voilà votre récompense pour le combat. On a retiré les frais de soins magiques bien sûr, mais il vous en reste. »

A sa voix, cela semblait être vraiment dommage que la magie blanche n’avait pas engloutie tout mon salaire. Avec juste un mot de remerciement, je pris la bourse pour m’éloigner sans trop tarder et quitter les lieux hostiles à ma présence.



Malgré les gens revanchards qui avait perdu de coquettes sommes dans les paris, ce combat m’avait apporté une certaine gloire en ville, une sorte de confirmation de la valeur que m’avait offert l’expédition sur Verloa. Mais surtout, j’avais eu la chance d’effleurer la crème des grands guerriers kendrans. Durant les jours qui suivirent, j’entendis parler un peu plus du Docteur, ce Krähe qui avait renié la Grande Ombre pour entrer au service de Solennel VI. Un être étrange mais qui s’était fait sa place dans les hautes sphères de Kendra-Kar et qui participait activement dans la guerre contre Oaxaca. J’avais une certaine fierté d’avoir pu rivaliser avec lui et j’espérais recroiser son chemin à l’occasion. Il y a eu d’autres faits pour le moins surprenants lié à ce combat peu de temps après. Tout d’abord, alors que cela avait été un pari improbable, j’avais entendu qu’un nobliau bien éclairé avait misé une grosse somme sur le match nul et qu’il avait floué ainsi tout le monde. Mon instinct me disait que le Docteur n’était pas étranger dans cette manigance. Après tout, il avait eu l’air à mes yeux vraiment ravi de cette conclusion de notre duel, au-delà des risques pour sa vie. L’autre histoire amusante, du moins, amusante après un peu de recul, se déroula à l’auberge lorsque j’y passai le soir même pour boire un verre avant de rentrer.

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