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 Sujet du message: La grotte des affaires
MessagePosté: Mer 29 Oct 2008 15:00 
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La grotte des affaires


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Voilà la boutique des Duchés des montagnes: la grotte des affaires. Creusées dans le flanc de la montagne, les boutiques ne sont apparentes que par un parchemin gravé dans du bois. L'alliance entre magasins a été créée par une semi-Elfe qui a repris le magasin de son père.

Vous y trouverez de tout. Les marchands sont aimables et gentils mais n'hésiteront pas à refuser de vous servir, si vous marchandez de trop. En effet, ils savent très bien que vous n'aurez pas moins cher ailleurs dans les duchés.

Items vendus par les marchands :

Potions :

Petite potion de soin (redonne 5PV) 20 yus
Potion de soin moyenne (redonne 10PV) 50 yus
Grande potion de soin (redonne 20PV) 110 yus
Potion de soin divine (redonne 40PV) 250 yus
Élixir de soin (redonne 10 pv, 4 doses) 300 yus

Petite potion de mana (redonne 2PM) 20 yus
Potion de mana moyenne (redonne 4PM) 50 yus
Grande potion de mana (redonne 8PM) 110 yus
Potion de mana divine (redonne 16PM) 250 yus
Élixir de mana (redonne 4PM, 4 doses) 300 yus

Petite potion mixte (redonne 2PM et 5PV) 50yus
Potion mixte moyenne (redonne 10PV et 4PM) 250yus
Grande potion mixte (redonne 20PV et 8PM) 550yus

Équipement :

(((Choisissez l'article que vous souhaitez acquérir dans la liste ci-dessous, avec un peu d'imagination pour donner un nom à l'article en question, par exemple 'baguette dorée', ou 'diadème d'onyx'. Pour connaître les prix, reportez vous à l'utilitaire suivant : Générateur de prix d'équipement. Considérez uniquement la ligne de la ville dans laquelle se trouve le lieu de vente)))

Arme magique 1 main : baguette - orbe
Arme magique 2 mains : flûte - mandoline

Protection de corps : chemise - tunique - robe
Protection de bras : gants en tissu - gants en laine
Protection de tête : bonnet - cagoule - tiare
Protection de jambe : botte en cuir - botte en tissu - jambière en cuir

Vêtement : écharpe - manteau - cape

Bijoux (mag +X) : bague en argent sertie d'émeraude - boucle d'oreille sertie de diamant - collier en mithril serti d'opaline

Vous pouvez ici faire améliorer vos équipements du même type que ceux vendus. Le prix se détermine grâce au générateur de prix : prix de l'amélioration = prix de l'objet amélioré - prix de l'objet d'origine. Vous ne pouvez améliorer vos équipements que dans leurs caractéristiques premières et secondaires (voir ...). Les bijoux ne peuvent être améliorés que dans les caractéristiques déjà existantes.

Parchemins de sorts :

Sorts évolutifs (400yus)
Sorts évolutifs de classe secondaire (500yus)

(((Cliquez sur les liens pour avoir accès aux listes des sorts qui sont classés par éléments pour connaître leur effet ! Pour plus de précision sur les sorts, rendez-vous à la règle des sorts !)))

Fluides magiques d'éléments :

Fluide 1/16e (50yus), 1/8e (110yus) et 1/4e (250yus)

Les marchands reprennent vos items pour les 1/2 de leur prix initial (cf le Générateur de prix d'équipement.)

Vos objets cassés ou abîmés sont réparables contre 1/4 du prix initial, (cf le Générateur de prix d'équipement) du moment qu'ils correspondent à un type d'objet vendu ici.


(((SI VOUS VOULEZ ÊTRE SERVI DANS DES TEMPS RAISONNABLES, N'OUBLIEZ PAS DE DEMANDER AUX GM UNE INTERVENTION GMIQUE ICI, POUR QU'ILS S'OCCUPENT DE VOS ACHATS/VENTES. Nous ne faisons pas le tour des boutiques... merci de votre compréhension )))

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Chibi-Gm, à votre service !


La règle à lire pour bien débuter : c'est ICI !
Pour toutes questions: C'est ici !
Pour vos demandes d'interventions GMiques ponctuelles et jets de dés : Ici !
Pour vos demandes de corrections : C'est là !
Joueurs cherchant joueurs pour RP ensemble : Contactez vous ici !


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 Sujet du message: Re: La "Grotte des affaires"
MessagePosté: Mer 5 Juin 2013 16:46 
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Il existait une autre raison pour laquelle Calimène ne souhaitait pas voyager accompagnée dans un premier temps : un mal être. Cette étrange sensation – fort différente de celles affligeant l’âme de multiples maux – se focalisait au niveau de ses poumons. Obstruant ses voies respiratoires avec plus ou moins d’insistance cette étrange affliction ne la quittait plus depuis l’exploration du Temple de Valyus. Lors des crises les plus aigües la jeune femme ne se serait pas montrée surprise en voyant un brouillard noirâtre exsuder de ses narines ou de sa bouche. Après tout, n’était-ce pas là l’infâme substance que le Légat avait véhiculée dans son corps lors de leur affrontement ?

Plongée dans un monde de noirceur par cette horrible substance, Calimène était restée durant de longs instants comme inconsciente. Mais toute comparaison s’arrêtait là car si l’effet en avait été temporaire les affres ressentis par la Dame furent bien différents. En premier lieu, l’extinction de ses facultés physiques fut complète et instantanée. Sans signes avant-coureur – nausée, vomissement ou bouffées de chaleur – elle s’abîma en un monde de ténèbres persistantes. De plus, un froid intense s’était insinué en elle, si profondément qu’elle en garda le souvenir bien après son éveil alors que ses membres s’éveillaient de nouveau et écoutaient enfin les injonctions de son cœur.

Mais l’essentiel n’était pas là ; non.

La sensation honnie persistait d’une manière fort semblable au mal étrange décrit par les mutilés de guerre ayant perdu un membre et qui pourtant continuent à se plaindre de crampes saisissantes ou de douleurs fantômes. Parfois sourde, parfois vive, la perception de cette peine prenait tantôt la forme d’une légère peine et d’autres fois, d’une oppression prononcée. Ce qui jamais ne changeait était l’impression d’abriter une chose sournoise ayant établi domicile au cœur de son système respiratoire.

Enfin, et plus lugubre encore, le froid qu’elle ressentait parfois encore évoquait pour elle, sans qu’elle puisse y faire quoi que ce soit pour éluder l’idée, le froid de la tombe. Même dispersé aux quatre vents, la présence du Légat se révélait persistante.

« Et infecte » grommela-t-elle en faisant quitter une large route commerciale à son monture. Abandonnant les voies les plus fréquentées elle s’orienta au gré du relief en direction des hauteurs. A la recherche d’un site de moyenne montagne dont la présence approximative lui avait été révélée deux semaines plus tôt par l’un des réfugiés de la Citadelle, Calimène peinait à localiser les signes distinctifs qui lui indiquerait le lieu-dit de la « Grotte aux affaires ». Evrard lui avait révélé la position de ce lieu de commerce. Bien que n’étant pas un lieu secret par définition les tenanciers du site avaient trouvé bon de fournir l’adresse à une clientèle d’initiés. Ce qu’ils perdaient en revenus d’un côté, ils le regagnaient en tranquillité de l’autre. Car les clients recommandés ne venaient guère là qu’en se passant le mot de bouche à oreille et en s’indiquant les quelques balises et lieux notables permettant d’identifier l’entrée de cet improbable marché.

Peu à peu pourtant, les signes décrits par Evrard se firent plus précis et plus reconnaissables. Et bien que les parois rocheuses aient longtemps refusé de livrer leurs secrets, un panneau indicateur finit pourtant par les trahir en annonçant l’entrée de la Halle.

Ou plutôt des halles car visiblement, chaque commerçant s’était aménagé une boutique dans un renfoncement de la caverne principale. Certains de ces magasins tenaient plus du renfoncement de la paroi que de la caverne. Bien souvent leur propriétaire se trouvait installé à l’extérieur de leur petite échoppe, sur un tabouret ou un petit banc aménagé. D’autres magasins semblaient au contraire sans fin tant les petites salles s’enchainaient les unes aux autres. Dans les premiers comme dans les autres chaque espace utile était sollicité.

Partout des effluves assaillaient les narines du visiteur. Pour certaines il s’agissait de substances rares ; peut-être d’origine alchimique. Pour d’autres, on pouvait deviner des composants exploitables lors de rituels étranges, jugés raffinés ou barbares selon les matériaux consommés.

Déambulant au hasard parmi les présents – qu’ils soient acheteurs ou vendeurs lui importait guère – Calimène finit par s’immobiliser devant un établi porteur de nombreux flacons. Si certains semblaient fait de matières semi-précieuses d’autres possédaient une apparence toute à fait anodine. D’un mouvement de tête elle salua son interlocuteur et annonça ses intentions.

« Ma recherche concerne deux doses de fluides obscurs, l’un à consommer sur place, l’autre à emporter. Deux doses de contenance moyenne… » Précisa-t-elle à voix basse tout en surveillant les observateurs les plus proches. Elle-même tendue, se sachant en faute, elle constata assez rapidement que les affairistes à sa proximité négociaient leurs propres acquisitions et n’avaient que faire des intentions du Chevalier.

« Pourriez-vous par ailleurs m’indiquer si l’un des commerçants ici présent est capable de sertir une rune ? » ajouta-t-elle d’une voix plus détendue mais pas encore assez pour paraitre tout à fait sereine et cordiale.


[ Achat de deux fluides obscurs 1/4ème ]

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 Sujet du message: Re: La "Grotte des affaires"
MessagePosté: Jeu 6 Juin 2013 01:41 
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Intervention gmique pour Calimène


Une petite dame maigrelette, les yeux vifs et pétillants répondit à la salutation de Calimène d'une lègère inclinaison de la tête avant de répondre d'une voix à peine plus forte :
"J'ai tout ce qui vous faut ici. Et ce n'est que de la première qualité."

Ce disant, elle ramassa deux fioles transparentes contenant une sombre substance brûmeuse et les déposa sur la petite table de bois devant elle. Elle tendit ensuite la main :

"Je vous en demande 500 yus. "

A ta question sur le sertissage, elle ne te répondit pas tout de suite, semblant d'abord hésitante.

"Pour sertir une arme, il n'y a pas meilleur qu'Achille le forgeron qui est juste là bas, tout au bout ." dit-elle en pointant du doigt.

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À votre service, pour le plaisir de rp !


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 Sujet du message: Re: La "Grotte des affaires"
MessagePosté: Mer 3 Juil 2013 10:26 
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D’un mouvement de tête entendu elle mit un terme à la conversation dès la conclusion de la transaction. Fioles sombres et pièces mordorées se croisèrent au-dessus de l’étal dans un silence de mise, seulement dérangé par le tintement du métal frottant contre le métal.

« La bonne aventure » lui souhaita la petite dame en affichant un air qu’elle estima véritablement concerné. Loin d’investiguer sur la nature profonde de cette sollicitude, Calimène trancha rapidement dans le vif et n’identifia là que la préoccupation incertaine d’un commerçant souhaitant voir le retour prochain d’un client.

« Bonne continuation » trancha Calimène d’un ton neutre.

Sans plus de fioritures la jeune femme se retira hors de vue de la vendeuse. Après un temps d’observation elle s’orienta vers la sortie de la grotte des affaires. Bien que la vieille femme lui ait fourni le nom d’un artisan capable de sertir une rune, elle repoussa provisoirement ce projet, pour au moins trois raisons dont chacune tenait lieu de conclusion. En premier lieu ce n’était pas sur une arme qu’elle souhaitait faire sertir le petit artefact. Par ailleurs, et puisqu’elle souhaitait considérer la possibilité de sertir un bijou, elle repoussa l’acquisition de l’objet à d’autres périodes plus propices. Enfin, et finalement pour point le plus important des trois, elle sentait un état de manque de plus en plus prononcé aiguiller ses entrailles.

L’engeance sommeillant au sein de son corps s’ébroua presque immédiatement dès l’acquisition du fluide obscur. Très rapidement, le dos plaqué au mur de l’un des passages souterrains, Calimène réprima un début de tremblement. Consciente de ses réactions, elle tenta d’agir par introspection. Elle analysa les effets désormais perceptibles de son mal et considéra la fiole sombre d’un air interdit.

« Remède ou poison ? » considéra longuement Calimène en sentant ses poumons se hausser et s’affaisser à un rythme plus rapide qu’à l’accoutumée. Marquant la pause, elle sentit un frisson la parcourir et un début d’état fiévreux s’insinuer au sein de l’alchimie incertaine de son corps.

Après une seconde d’hésitation elle raffermit sa poigne sur le petit récipient. Elle inspira un grand bol d’air et s’orienta vers la sortie d’un pas rapide, convaincue que l’air frais des montagnes lui ferait le plus grand bien. Ragaillardie par la pureté de l’atmosphère, elle sentit l’ombrageuse infection habitant ses poumons refluer légèrement ; ce qui lui donna le temps de s’orienter vers sa monture. La main posée à plat elle flatta l’encolure de son cheval lequel lui rendit un renâclement agacé ; pour ne pas dire légèrement courroucé. Atteint de mauvaise humeur chronique le Hongre semblait plus agité qu’à l’accoutumée ; probablement de par la présence de fluides obscurs à proximité. Dénouant la bride de son support elle l’attira sur une pente descendante permettant de quitter la grotte des affaires par la façade occidentale de la montagne. Précautionneuse, elle marqua la route la première, reconnaissant à l’avance chaque pierre pouvant déstabiliser l’équilibre de sa monture.

Ce n’est qu’après avoir atteint un court plateau qu’elle s’autorisa à faire une pause. Laissant de l’espace à son cheval, elle se posa céans sur une roche plate qui semblait l’attendre en ces lieux depuis des temps immémoriaux. Sans fioritures ni hésitation, elle tira l’une des deux fioles de sa besace et en avala le contenu avant d’éprouver les premiers signes d’hésitation que raison et sagesse finiraient par lui imposer pour brider cette impulsion folle.

Durant les premières secondes rien n’augura d’un changement. Nulles douleurs ne s’imposèrent à ses sens et aucune sensation inhabituelle ne vint perturber ses pensées. Rien de notable donc ; aussi aurait-elle été la première surprise de se voir s’affaisser lentement vers le sol, les yeux ouverts et la respiration en berne : pas comme morte, juste éteinte.


X X X


Combien de temps dura cette absence ? Calimène aurait bien été en mal de le dire. Et d’ailleurs, elle aurait eu trop de mal pour le dire…

Les mains crispées à hauteur du plexus solaire, le visage congestionné par la douleur et l’esprit éberlué par l’angoisse, Calimène tentait de crier, bien qu’aucun son ne franchisse la frontière de sa bouche. Avivée par le noir nectar l’humeur sombre s’agitait ostensiblement. Masqué par la vivacité de la douleur le poison s’avança de manière insidieuse. Veine après veine, il se propagea en Calimène à la vitesse d’un être autonome explorant les lieux de sa nouvelle demeure avec de multiples précautions. Bouffée d’air après bouffée d’air, il s’infiltra plus profondément dans le buste de la Dame, trouvant là un refuge secret et inviolable.

Puis, certainement satisfait, il se recula d’un trait, retirant ses appendices noirs d’une flexion pour s’en retourner au cœur de son sanctuaire secret : les poumons du Chevalier.

Calimène éructa une nouvelle fois. A la fois privée d’air pur et soumise à une oppression sans pareille son propre corps se décida à la protéger d’elle-même. Sa température augmenta soudainement, ses muscles se tendirent, se relâchèrent puis faillirent. Son esprit s’enferma dans une prison dorée, en mura la porte et d’un trait d’un seul, son corps s’effondra en avant ; laissant la Dame exsangue dans un fourré.


X X X


Combien de temps dura cette absence était une chose qu’elle aurait bien été incapable de dire. Muette, proscrite, elle observa longuement le ciel où s’égrainaient, passants, quelques nuages chargés de pluie.

Elle nota l’insatisfaction de sa monture et ses hennissements agacés.

Devant tant de mauvaise humeur au réveil, son esprit s’éberlua de nouveau, absorbant ses pensées d’un voile noir.


X X X


Trois points d’étonnements dont chacun aurait été individuellement suffisant pour la prendre en défaut saisirent Calimène lors de son nouvel éveil. En premier lieu, la végétation autour d’elle. Fanées ou craquelées, fourrés et plantes autour d’elle s’étaient affaissés. Certains montraient un aspect sec et vidé de toute vie alors que d’autres, un brin plus éloignés, paraissaient en voie de décomposition.

Ensuite, le silence de sa monture – habituellement prompte à signifier sa mauvaise humeur à qui voulait l’entendre – l’étonna également.

Enfin, et pour conclure, elle nota une présence suspecte, installée à quelques pas d’elle et visiblement dans l’attente de son éveil. Du fait de sa vision encore trouble, elle n’osa investiguer plus avant l’aspect du charognard qui veillait au-dessus d’elle sans avoir mené une inspection plus rapide de la situation.

Rapidement, elle mena son introspection. Les yeux fermés, elle se concentra sur les sons identifiables. Un souffle rauque et régulier, peu ou pas de mouvements lui indiquèrent une seule présence qu’aucun son significatif d’un regroupement – bruits de pas ou paroles échangées – à proximité. La rapide revue de son état lui instilla plus d’appréhension encore ; d’un fait incertain – une présence hostile, neutre ou amicale – elle s’inquiéta de la faiblesse de ses muscles ; endormis à cause de l’immobilité prolongée de sa posture elle s’estima incapable de bouger immédiatement avec célérité et justesse.

Aussi elle masqua ses pensées et intentions sous l’apparence de l’immobilisme ; laissant à son cœur désormais emballé le soin d’irriguer ses membres.

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 Sujet du message: Re: La "Grotte des affaires"
MessagePosté: Ven 5 Juil 2013 12:15 
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Quelques pas rapides suffirent à considérablement réduire l’espace séparant Calimène de l’inconnu veillant sur elle.

« Me prendriez-vous pour un aveugle, un sot ou un simple zélote ? » feula-t-il d’une voix grave, lourdement chargée de menaces et rendue acerbe par l’expression mal contenue de ses sentiments : une profonde colère et un écœurement prononcé. Plissant des yeux pour se protéger de la cruelle lueur du soleil à laquelle son regard n’était plus exposé depuis des heures, le Chevalier sirène resta aveuglé durant quelques instants.

Doublement surprise par la lumière et la poigne de son assaillant, elle hoqueta à la hâte lorsqu’elle fut hissée loin du sol par une force brutale et peu scrupuleuse de son bien-être.

Traînée en arrière, elle tenta de retrouver le contact du sol du bout des pieds, sans réel succès. Passant de la pointe d’un pied à l’autre elle réussit à se maintenir debout en un équilibre précaire mais ne réussit guère à opposer qu’une résistance de principe. La poigne impérieuse la retenant par son col la libéra soudain en la projetant à terre. Par réflexe elle glissa au sol à la hâte, à la fois pour atténuer l’impact en laissant l’inertie jouer pour elle et pour adopter une posture protectrice. Bras relevés au niveau de son visage, elle plia ses jambes pour opposer une défense dérisoire à un potentiel coup porté au niveau de son estomac.

Durant une ou deux secondes, elle resta proscrite dans l’attente du coup à venir. Et si ce dernier se fit attendre ce ne fut pas par charité ou par hésitation mais juste pour ajuster la précision de la frappe. Passant ses défenses la botte de son agresseur trouva rapidement son ventre. L’impact la vida de toute capacité à penser de manière cohérente durant quelques secondes ; temps bien long qui aurait pu permettre à son ennemi de placer une autre frappe au niveau de son visage. Et bien qu’il n’en fût rien, la blonde Dame ne lui en fut nullement reconnaissante. Pliée en deux, elle se focalisa sur la douleur, tentant vainement de reprendre souffle. Le corps noué elle peina à se redresser sur les genoux. Passées quelques secondes d’atermoiement elle tenta de reprendre le contrôle de ses pensées.

« Voilà le genre de frappe qui réveille hein ? » se gaussa l’homme aux bottes roides, au talon et à la pointe renforcées de métal. Ne jugeant pas utile de rétorquer quoi que ce soit, elle s’échina à ventiler ses poumons, à retrouver le contrôle de ses membres et tenter de comprendre l’essence de la situation.

« Relève la tête, sorcière. » ordonna son interlocuteur d’une voix désormais dénuée de toute émotion, contrôlée et mesurée ; presque mécanique.

« L’heure de ton jugement sonne au firmament… » Entama-t-il avant de marquer une pause circonspecte alors que quelques gouttes d’eau commençaient à venir s’écraser sur la scène.

« … le Ciel pleure » compléta-t-il en ajustant sa posture.

Visiblement son tortionnaire avait le sens du spectacle, dans la démesure comme de la formulation. Exagérément grand il toisait Calimène de haut. Forteresse de certitudes, il campait au-dessus d’elle en affichant ostensiblement tous les sentiments qu’elle lui inspirait. Si son visage était strict, son armure l’était plus encore. Formée de plaques de métal maintenues par des courroies de cuir, elle était couverte par une longue robe de bure propre à bon nombre d’ordres monacaux. A demi caché par les allées et venues du manteau, un emblème significatif d’une appartenance au culte de Gaïa se faisait par moment visible. Eloigné des préceptes du Culte de la Déesse Mère, l’homme devait appartenir à l’une de ces obédiences armées connues sous le terme générique de « paladins ».

Dépassant de ses épaules massives et de sa tête de dogue, la garde d’une épée s’agitait nerveusement au gré de ses mouvements. De par la taille de l’homme et la position de l’arme, il ne pouvait s’agir que d’un espadon, l’une de ces épées massives maniée à deux mains par leurs détenteurs. Déplaçant son regard de l’arme aux mains de son bourreau, elle constata la présence d’un gantelet de métal, significatif de l’un des emplois particuliers d’un espadon. En effet, malgré son puissance dévastatrice, l’arme se révélait en nombre d’occasions bien peu maniable. Aussi les spécialistes du genre prenaient l’habitude de manipuler l’espadon en « demi-épée », soit maintenue en début de lame par une main cerclée de fer, afin de pouvoir donner des mouvements à la lame bien plus rapides et de pratiquer des moulinets bien plus serrés qu’à l’accoutumée.

« Tu croyais peut-être pouvoir masquer tes intentions à l’œil vigilant de Gaïa ? Et ce, d’une manière aussi proche de l’un des temples de l’Ordre Purificateur ? » Prôna-t-il en contournant Calimène par la gauche. « Etait-il vraiment nécessaire de préciser que nous surveillons toute source d’approvisionnement en fluides noirs ; ceux-ci étant l’apanage de gens aux mœurs sinistres et aux intentions l’étant plus encore. Aussi, par la loi de l’ordre et au vu des circonstances… » Dicta-t-il en dégrafant la boucle retenant son espadon dans son dos.

Mais il n’arriva pas au bout de sa réplique bien que cette dernière, à n’en pas douter, se soit certainement révélée toute à fait épique. Profitant de l’instant où le croisé s’emparait de son arme et du déséquilibre en résultant, Calimène força en avant. Tête et épaule droite les premières percutèrent son adversaire au moment où l’instabilité de sa posture ouvrait une faille dans sa garde par ailleurs attentive. L’espace d’un instant elle pensa arriver à la faire chuter sur le dos mais son opposant se campa fermement sur ses appuis. Penché en arrière et n’ayant pas pour lui l’énergie apportée par l’impact, il résista en silence. Ses efforts et sa corpulence naturelle l’aidèrent à compenser sa position de faiblesse. Surpris initialement par l’inversion de l’initiative, elle n’en perdit pas moins de sa capacité de concentration. Combattant chevronné il ne céda ni à la précipitation ni à l’envie de répliquer immédiatement. Bien au contraire, il lâcha son espadon au sol et entreprit de reprendre l’avantage au corps à corps.

D’un mouvement de torsion violement exécuté, Calimène évita de se laisser à nouveau saisir par les bras puissants de son ennemi et dans le mouvement projeta entre elle et lui comme un nuage de poussière.

Ou plutôt de sable.

Car son intention initiale n’avait pas été de le mettre à terre, plan qu’elle avait jugé être bien trop audacieux pour être tenté. Par contre, il lui fallait bien pouvoir s’approcher de son adversaire pour pouvoir l’aveugler temporairement. Car en restant au sol, elle avait eu le temps de réunir assez de sable pour s’en emplir la paume, faute de mieux. En jugeant son opposant comme ce qu’il était, un vétéran expérimenté, elle savait qu’il prendrait le parti de résister à l’engagement, sans se laisser bousculer par une combattante faisant la moitié de son poids, qu’il ne s’accrocherait pas à son arme comme l’aurait fait un novice et qu’il reprendrait l’avantage pas à pas. C’était sans compter sur le grain de sable qui venait de se ficher dans les rouages de ses projets.

Inversant la pression pendant que son adversaire relâchait prise, Calimène se libéra de ses attentions. Elle hésita une demi-seconde en observant l’espadon à terre mais ce dernier, trop lourd pour elle, ne lui sembla pas être une option valable.

Aussi, faute de mieux, prit-elle ses jambes à son cou.

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 Sujet du message: Re: La "Grotte des affaires"
MessagePosté: Lun 10 Nov 2014 13:09 
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La fuite ; que voilà une drôle et improbable option pour le Chevalier-sirène, porteuse de l’avant-goût prononcé de la défaite.

Portée par une foulée désordonnée, Calimène abandonna le chemin du col et glissa volontairement dans la pente séparant deux niveaux de la route. Bottes en avant, elle tenta de réguler sa vitesse de chute et en vint à devoir laisser son poids porter en arrière pour ne pas se laisser entraîner par son élan. Dans son cheminement désordonné, elle fit choir dans sa progression quantité de graviers et gravas et ne reprit pied sur un sol stable qu’en catimini ; le temps de vérifier la position de son poursuivant.

« Réfléchir » s’admonesta la jeune femme alors qu’elle affermissait sa posture sur le sol de nouveau stable. D’une taille à peine supérieure à la moyenne, le corps bien découplé, la dame possédait l’avantage de la vivacité.

« Si ce n’est de la vivacité physique ; du moins intellectuelle » considéra-t-elle tout en passant en revue l’état de ses muscles.

« Guère reluisant » comptabilisa Calimène en guise de conclusion provisoire. L’effet de la noirceur qu’elle ressentait au niveau de son plexus ne s’était que temporairement dispersée au moment de l’ingestion du fluide noir. Cette présence sourde redevenait peu à peu tangible et rien en dehors d’une nouvelle dose de fluide ne pourrait la gommer.

« La plaie… mes jambes ne me porteront qu’à grand peine à plus d’une centaine de pas et mon souffle est déjà trop court pour espérer distancer le bourreau de l’ordre lors d’une course d’endurance » se dit-elle en considérant l’approche de l’exécuteur. Ce dernier, d’un pas vaillant que rien ne semblait pouvoir perturber, s’approcher avec mesure et régularité. Le crâne rasé, les yeux plissés, rien n’indiquait chez lui une capacité à s’émouvoir ou à prendre en considération les arguments de sa victime. Par réflexe, le Chevalier porta la main à sa hanche où l’absence de son épée se fit cruellement sentir. Profitant du peu de répit qui lui restait encore, elle tenta de localiser son cheval, sans succès. Unissant ses doigts en forme de crochet au niveau de ses lèvres, elle tira un premier accord sonore suivi d’un second sifflement prolongé.

Quelque part, en contrebas, une monture piaffa en réponse.

« Brave bête » grinça Calimène en considérant un léger espoir.

Mais un autre cheval commenta le sifflement, plongeant la jeune femme dans l’expectative. Son cheval était en compagnie d’une autre monture ; voire de plusieurs. Les voyageurs étaient rares de par ces montagnes et voyageaient bien souvent en caravanes compactes. Par voie de conséquence, il fallait être d’une trempe bien particulière pour voyager en petit groupe dans le coin ; à moins de vouloir rester discret ou de mener des projets pour le moins irrévérencieux. En d’autres termes, seules deux possibilités se dégageaient : soit il s’agissait du cheval de son poursuivant ; soit d’un groupe de montures.

Calimène se tourna vers le paladin pour jauger de la distance qu’il avait parcouru et constata avec étonnement que ce dernier la pointait du doigt.

« Mais que … ? » s’interrogea-t-elle durant un instant fugace ; juste avant de rouler au sol en prenant conscience de la situation. Le sifflement caractéristique d’un trait d’arbalète se fit pressant à ses oreilles. Mordant l’air puis la roche avec avidité, le projectile se brisa en deux lorsque sa tête de métal rencontra un remblai de caillasse. Sur les mains et les genoux, elle rampa à la hâte afin de rejoindre un abri précaire.

« Plusieurs montures… plusieurs cavaliers » grogna Calimène en maudissant le caractère évident du constat. Tournant la tête frénétiquement, elle tenta de localiser vainement l’arbalétrier ; sans succès.

« Impossible donc de savoir si je suis à l’abri ou si un angle de tir lui est ouvert » imagina-t-elle en forçant sur ses jambes afin de se redresser.

« Cent pas, au plus » jaugea-t-elle de ses forces en constatant que déjà ses cuisses lui tiraient de vives douleurs. Mais il n’existait nulle autre alternative ; sans armes l’affrontement ne rimait à rien. Sa position était précaire et la pression qu’elle sentait croître au niveau de ses poumons réclamait une nouvelle dose de fluide. De mouvements saccadés empêchant d’identifier un réel rythme dans sa progression, Calimène reprit sa progression. Faisant au plus vite tout en restant au mieux recroquevillée, elle dévora quelques abris éphémères jusqu’à rejoindre la carcasse apitoyée d’un arbre en partie déraciné. Autant que possible, elle se recroquevilla sur elle-même et tira le flacon acheté tantôt dans la grotte des affaires.

« Le diable se cache souvent dans les détails » se dit-elle en maudissant le jour où elle avait rencontré l’Emissaire ; juste avant de vider d’un trait le liquide obscur. C’est bien ce dernier qui l’avait contaminé à Kendra-Kar ; peu à peu durant leurs chasses nocturnes. Elle s’était entretenue d’illusions en pensant pouvoir tirer plus de profit de leur collaboration que ne lui en coûterait leur coopération.

Un instant, la douleur gênant sa respiration se dispersa, apaisée par le baume visqueux ingéré à la hâte lorsque la terrible pointe de l’espadon transperça son refuge végétal de part en part. D’un mouvement réflexe, pour ne pas dire désordonné, elle roula sur le côté pour constater la présence du colosse. Ce dernier contournait l’arbre tout en jurant de ne pouvoir dégager sa large lame hors du bois pourri qui la retenait. Sans s’émouvoir de ce genre de broutilles, il enjamba l’obstacle et referma son étreinte sur la veste et la gorge de la jeune femme.

« Tu ne m’auras pas fait courir bien longtemps » apporta-t-il en guise de commentaires tout en la relevant brusquement. De par leur différence de taille et la prise qu’il lui faisait subir, Calimène peinait à restait en équilibre sur la pointe de ses pieds. De fait, elle s’étranglait proprement et ne tarderait pas à manquer d’air. En guise de sursis, elle plaça sa botte sur l’une des branches basses du végétal et atténua la prise de son étrangleur. Mais ce dernier, sans sourciller, se contenta d’ajuster sa prise et de l’éloigner de l’arbre. Elle tenta de placer sa botte sur la cuisse du paladin, sans plus de réussite. Dans un effort désespéré, elle referma ses mains sur les poignets de son assaillant mais ne réussit qu’à tirer un sourire contrarié à son assassin.

Les yeux de Calimène s’écarquillèrent en cet instant lorsque une douleur intime lui vrilla les poumons. Car si son corps réclamait de l’air ; l’odieuse présence habitant sa cage thoracique prétendait s’exprimer. A l’image d’un flux de bile rendu avec violence, l’humeur sombre reflua. Un instant calmée par les fluides obscurs ingérés, elle ordonnait désormais de manière impérieuse la survie de son hôte. Les lèvres de la dame, exsangues de toutes couleurs, virèrent clairement vers des teintes sombres, alors qu’un épais filet de bave marqua au coin de sa bouche.

« Mais que… » Commenta le paladin tout en constatant le changement d’allure de sa victime. Il entreprit d’en finir en ajustant sa prise sur le cou de la jeune femme un brin trop tard. Portée par une haleine délétère, l’humeur sombre se manifesta dans l’air ambiant sous la forme d’une gaze noire, insidieuse et manifestement vindicative. Les sombres volutes s’égrainèrent en toutes directions, cherchant indubitablement à atteindre la bouche et le nez du paladin. Ce dernier tenta de reculer mais sa victime, visiblement revancharde, renforça sa prise sur ses avant-bras.

L’air vicié se propagea entre eux, comme une maladie portée par l’air mais soudainement rendue visible. Le paladin tenta de se dégager mais tomba à la renverse ; entraînant Calimène dans sa chute. La jeune femme roula sur le dos et avala autant d’air frais que possible pendant que l’homme qui gisait à quelques pas d’elle hoquetait avec régularité.

Sans chercher à identifier la nature exacte de l’événement, elle se remit en route, vacillante.

« Ne bougez plus » lui intima une arbalétrière à l’allure générale peu engageante au moment où un troisième membre de l’ordre s’approchait d’un pas vif de son compagnon mis à terre. La main sur son torse, il invoqua quelques instances les forces bénéfiques qui parcouraient le monde et libéra le paladin de toute présence néfaste.

« Un dernier mot à dire ? » demanda la chasseuse de sorcières au chevalier-sirène.

Elle hoqueta à son tour et leva la main dans sa direction en signe de reddition.

« Inquisition » éructa la jeune femme d’une voix rendue rocailleuse par sa récente strangulation. Ce mot tira toutefois un air contrarié au troisième larron.

« J’en appelle à l’inquisition » confirma Calimène, exsangue.

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MessagePosté: Lun 10 Nov 2014 23:53 
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Bien que malmenée du fait de sa grande faiblesse, c’est néanmoins avec plus d’égards qu’elle ne s’y serait attendue que Calimène se retrouva au campement de l’ordre purificateur. Durant plusieurs heures, elle se trouva abandonnée à elle-même, pieds et poings toutefois fermement entravés.

Légion – son hongre – était bel et bien présent ; ainsi que ses affaires personnelles. Bien que sa monture bénéficie d’un caractère usuellement nerveux – pour ne pas dire « tempétueux » - c’est avec une grande placidité qu’il observait le déroulé des événements. Sans doute avait-il saisi la gravité des circonstances et décidé de ne pas aggraver la position de sa maitresse en manifestant inutilement son exécrable caractère.

L’assertion de Calimène avait plongé le petit groupe dans d’intenses débats d’ordres théologiques et pratiques. Des échanges, elle identifia avec précision le rôle de chacun des membres rassemblés. Massif pour ne pas dire titanesque, Gormin incarnait tout ce que l’on réclamait usuellement d’un paladin : une attitude inflexible et la conviction d’incarner le bon droit. Rebma officiait en tant que chasseuse de sorcière, et intervenait d’un trait implacable lorsque la situation le requérait. Son sourire montrait plus de dents que de dispositions à l’humour et ses manières, abruptes et directes, un manque flagrant de connaissances des bonnes manières. Enfin, Armin semblait être le dirigeant de cette petite assemblée. Prêtre en charge des âmes rencontrées lors de leurs chasses, il professait des paroles sages et mesurées, écoutant toujours son interlocuteur avant de lui-même parler, comme s’il modifiait sans cesse son point de vue sur les choses de l’existence.

Bien souvent, Gormin posait son regard sur Calimène d’un air peu affable, vérifiant sa position avec un manque d’entrain apparent. L’immobilisme de la jeune femme devait lui peser et de manière certaine, il se serait bien contenté d’une tentative d’évasion en guise de conclusion. Aussi, jetait-il de temps en temps un regard en direction de leur prisonnière ; consterné de la voir se complaire dans un attentisme poli.
Conjointement les trois membres de l’ordre se présentèrent à leur captive mais seul Armin se saisit de la parole.

« Vous rendez vous compte de ce que vous demandez ? » professa-t-il d’un ton bienveillant, d’où perçait toutefois une certaine inquiétude.

Calimène se contenta de dodeliner de la tête afin de lui signifier son aval et sa bonne compréhension de la chose ; ce qui ne l’empêcha pas de poursuivre en ce sens.

« Faire appel à l’inquisition signifie que les moyens d’exceptions pourront être employés » précisa le prêtre.

« Nous nous entendons parfaitement, mon père » commenta Calimène, omettant de prononcer le mot que l’ecclésiaste lui-même avait évité : « tortures ». Si les débats en démontraient la nécessité, la procédure inquisitrice autoriserait le recours aux pires exactions ; et nul doute que Gormin n’y trouverait rien à y redire.

« Seul un procès en inquisition me permettra d’apporter les preuves de mon innocence, mon père » déclara Calimène d’un ton mesuré mais ferme. Le prêtre considéra un instant le point et finit après un temps de réflexion par livrer ses conclusions quant à la demande.

« Soit » introduisit-il.

« Nous avons à composer ici à une première ; et nulle autorité de l’ordre n’étant disponible à proximité pour répondre à cette situation nous allons devoir nous-même interpréter les écritures et composer à nous trois le tribunal inquisitorial » explicita-t-il.

« Bien que le jugement soit déjà connu puisqu’elle a usé sur moi d’un souffle chargé de maléfices » ajouta Garmin.

Calimène laissa passer un instant durant lequel les officiants échangèrent quelques regards et intervint avant que l’idée de suspendre le procès ne soit énoncée.

« En ce sens, puis-je objecter que le seigneur Garmin ne peut être la fois juge et parti ? Puisqu’il se décrit lui-même comme victime et témoin, ce serait enfreindre le principe d’impartialité des juges que de le laisser prendre une part active aux délibérés du jugement » le contredit Calimène.

L’assertion fit bouillir le tempérament du preux.

« C’est l’un des fondements des procès en inquisition ; effectivement » approuva Armin.

Le paladin tempêta son mécontentement mais le prêtre ne put que conclure dans le sens de Calimène.

« Les choses sont ainsi écrites, frère Garmin. Soit votre position est celle d’un témoin, soit celle d’un membre du tribunal. Le choix est votre. Toutefois, si vous vous présentez en tant que juge vous ne pourrez soutenir votre expérience directe concernant ce souffle » confirma Armin.

« Alors, je resterai témoin. Cela suffira à prononcer la peine capitale, sans contrarier les écritures » considéra le sans peur mais pas sans reproches.

« Ainsi donc, je pousserai l’interrogatoire » confirma Armin.

« Et je serai votre juge, en charge de la sentence » trancha la chasseuse d’un ton péremptoire.

X X X


« Mon nom complet est Calimène Lendale, fils unique de la Maison Lendale, originaire de la cité de Kendra-Kâr » introduisit-elle en guise de préambule.

« Comme en atteste mon armure, je suis l’actuelle « Chevalier-sirène » ; fonction que je tiens du Chevalier Myrne auprès de laquelle j’ai servi en tant qu’écuyer » poursuivit-elle d’un ton formel.

« De quelle obédience relève votre charge de chevalier ? » l’interrogea le frère Armin.

« De l’errance, mon père » compléta Calimène.

« Rien donc ne vient confirmer votre déclaration, Chevalier Calimène. Le titre de chevalier errant se transmet de la main à la main et rien ne vient attester d’un quelconque lignage méritoire. Nul seigneur ne pourrait se prévaloir de vous et de vos mérites ? » Poussa-t-il afin de faire préciser le point à son interlocutrice.

« Le guet de Kendra-Kâr pourrait en attester car nombre de ses membres m’apportèrent leur concours durant l’affaire des empoisonneurs de Kendra-Kâr » explicita-t-elle tout en regrettant immédiatement de ne pouvoir citer de noms. L’essentiel des membres de la garde ayant œuvré avec elles étaient désormais résidents de la Citadelle ; et la Dame pas encore acculée au point de révéler l’existence de leur refuge. En effet, suite à la résolution de l’empoisonnement par le pain, plusieurs participants à l’enquête avaient été éliminés, « promus » à l’étranger ou expulsé de la garde. Signe probable de la compromission d’une partie de la noblesse dans cette conspiration.

« Aucun témoin accessible en l’occurrence » constata le frère Armin, comme à regret.

« C’est bien pratique » commenta Garmin à son tour ; ce qui le fit entrer dans la conversation lorsque l’inquisiteur évoqua sa récente expérience.

« En réalité, Mestre Armin, ce que j’ai ressenti était l’intrusion en mon âme d’une noirceur ; insidieuse, visqueuse et mortifère » explicita Garmin dans son rôle de témoin.

« Sans notre maitrise du fluide de vie, de l’essence de Gaïa, c’est le froid de la mort qui aurait figé mes muscles ; épaissi mon sang et éberlué mes sens. Voilà vingt-cinq années que j’erre de par le monde à la recherche de dévots, de séides et de pervers ; aussi puis-je le dire avec certitude. Ce que j’ai expérimenté, décrit en un mot au lieu de cent, est le « souffle » referma-t-il d’un air amer.

Calimène resta longuement interdite. Les yeux plissés et la mine sévère, elle s’adressa directement à son accusateur.

« La chaleur de la mort m’a aussi brûlé les muscles ; le manque d’air épaissi mon sang et éberlué mes sens… vos mains autour de mon cou suffirent à me faire sentir les mêmes affres que ceux que vous décrivez. Seriez-vous de même un servant secret de Thimoros ? Puisqu’à l’évidence, c’est ce dont on m’accuse ? » Le tança-t-elle en cherchant à provoquer sa colère.

Mais le piège ne trouva pas sa prise.

« Blasphème ; j’aurai du serrer plus fort » retourna-t-il, animé d’une colère apparente mais contenue.

« Et donner la mort plus vite ? » pérora Calimène. « Si fait ; il existe donc des manières plus justes de donner la mort que d’autres, d’après vous ? Fort bien, je l’agrée volontiers » concéda-t-elle en désignant l’espadon du paladin d’un mouvement du menton.

« Peut-être devriez-vous jeter votre espadon aux orties, messire Garmin, car il s’agit d’une invention de Thimoros pour dispenser des morts rapides et sanglantes. De même qu’épées, haches, couteaux et coutelas, arbalètes et arcs, frondes et autres bolas ; ajoutons pour bien faire sabres, harpons, lances, javelots, javelines et épieux en tout genre. De même… » Énumérait Calimène lorsqu’elle fut coupée par le paladin.

« Cessez là votre décompte morbide ; ce n’est pas l’arme qui fait allégeance à Thimoros mais l’usage par lequel on la dresse » affirma le paladin.

Un sourire en forme de rictus se forma sur les lèvres de Calimène.

« Nous sommes bien d’accord, messire, ce n’est pas l’arme qui impose un caractère abject ou chevaleresque ; mais l’idéal par lequel on la dresse. Ainsi, nous voilà d’accord, posséder l’arme de son ennemi ne nous rend pas pareil à lui ; merci de me le concéder » conclut-elle provisoirement.

« Les écritures … » hésita Garmin.

« Les écritures ne décrètent pas la prêtrise de Thimoros comme classée dans les abjections » trancha le frère Armin ; sans que ne s’élèvent de contradictions de la part de ses pairs. Visiblement le meilleur théologien du groupe, aucun de ses compagnons n’objectait sa connaissance des textes sacrés. C’est ce dernier qui reprit la conversation, d’un ton posé.

« Vous possédez deux objets qui chacun prit séparément sont deux marques infâmes ; niez-vous leur propriété ? » questionna-t-il en désignant le bouclier prélevé dans les soubassements de la Citadelle et les gants de Moire.

« Nier ? Bien au contraire, il s’agit là de prises de guerre faites au détriment de mes adversaires. Soustraire de tels artefacts à leurs anciens propriétaires ne devrait-il pas m’apporter des louanges ? » Répliqua-t-elle en espérant prendre l’avantage.

« Vous ne trouverez donc rien à redire à ce que nous emportions avec nous ces reliques ? » proposa le frère Armin.

« Ce serait du vol, mon Père » objecta Calimène, non sans une certaine ironie. En réaction, le paladin foula le sol du pied alors que la chasseuse restait stoïque. Le silence s’éternisa ; preuve que le dénouement était proche.

« Nous avons entendu vos arguments, Calimène, mais rien dans vos déclarations ne permet de certifier votre innocence » proposa le frère Armin en guise de résumé.

« De même qu’aucune de vos accusations ne permet d’attester de ma culpabilité » tempêta le Chevalier-sirène en se redressant malgré ses mains ligotées.

« Dame Rebma ; en avez-vous assez entendu pour énoncer la sentence ? » interrogea le théologien.

« Oui, Mestre Armin » confirma cette dernière. Aussi, le frère Armin lui intima de s’exprimer librement, comme il fut convenu en ouverture de ce procès.

« Pour tous ces crimes, votre éminence, il n’existe qu’une sentence possible » dit-elle en chargeant son arbalète d’un trait à tête barbelée.

« La mort » jugea-t-elle sans émoi aucun.

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 Sujet du message: Re: La "Grotte des affaires"
MessagePosté: Mer 12 Nov 2014 13:10 
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A l’étonnement général toutefois, c’est en direction du paladin que l’arbalète s’orienta, centimètre après centimètre, mais de manière inflexible. L’instant resta interdit durant de longs instants qu’il aurait été incertain de vouloir quantifier.

« Quelle est donc la nature de cette plaisanterie, Rebma ? » grogna Garmin, d’une voix porteuse d’une férocité mal contenue.

« Il est du devoir du Juge de s’assurer de la sérénité des débats et de la quiétude lors de l’énoncé du jugement » explicita la Chasseuse. « Ne m’oblige pas à faire en sorte que ce trait transperce ta jambe. Le Frère Armin a mieux à faire que de passer son temps à te recoudre et à régénérer tes plaies » le prévint-elle.

« Bien, vu que pour une fois on me donne la parole, je vais en profiter. Pour note, j’ai bien souvent tiré à vu sur des suspects et la preuve de leur culpabilité ne m’incombait pas. D’autres autorités plus perspicaces ou en meilleure connaissance des écritures prenaient la décision pour moi et il n’était pas de mon rôle de contester leur supériorité hiérarchique. Toutefois, puisque le tribunal inquisitorial m’a concédé un peu par hasard la position de juge ; et que la décision finale me revient… voici mes conclusions » dit-elle avant de reprendre son souffle.

« Pour les crimes décrits, la seule peine valable est la mort » rappela-t-elle.

« Pour autant, nous ne pouvons être certain de leur véracité ; et les échanges m’ont apporté la certitude que nous n’en saurons pas plus. L’argument du souffle néfaste a été levé par notre théologien et comme l’a exposé l’accusée ; si nous venions à considérer que l’arme porte la faute à la place de son propriétaire, nous affronterions tous Oaxaca les mains vides. Aussi, et puisque je n’ai pas la sagesse de percevoir ce qui relève de la vérité ou du mensonge, je n’ai d’autres choix que de reporter le jugement à une autre date » conclut-elle.

« Tu déraisonnes, Rebma » vocifère Garmin tout en s’orientant vers Calimène. Chemin faisant, il tira un coutelas de sa gaine de cuir et malgré le rouge qui marquait ses joues, n’en usa que pour libérer Calimène de ses liens.

« Le tribunal inquisitorial a rendu sa sentence ; vous êtes libre Chevalier-sirène » énonça le Père Armin, inscrivant de fait la décision dans l’éther et dans les esprits ; ce qui sembla apaiser le paladin. Ce dernier avait certes le caractère borné des fidèles mais aussi leur aspect inflexible et serein une fois revenu dans le cadre de ses croyances. Il n’était probablement pas un homme mauvais mais simplement un travailleur acharné. Bucheron, il aurait taillé du petit bois avec régularité. Maçon, il aurait fait un bâtisseur d’église acharné. Paladin, il œuvrait depuis vingt-cinq années au service de Gaïa, imperturbable et volontaire.

Calimène porta son regard sur le Père supérieur, Armin. Maintenant que les caractères s’étaient exprimés plus avant, l’équilibre tout particulier de ce groupe se faisait jour. Le théologien assurait la cohérence du groupe. Auprès de la chasseuse, il attribuait les consignes et indiquait le chemin à suivre. Envers le paladin, il ne se positionnait qu’en gardien de la tradition ; probablement pour éviter tout écart de conduite. En ce sens, le Frère Armin était le point pivot de cette petite unité ; garant de sa cohérence et de son bon comportement.

« Merci » glissa Calimène à l’intention du paladin venant de lui dénouer les mains. A l’entente de ce mot, il grogna d’un ton bourru et s’accroupit pour libérer les jambes de la jeune femme de leurs entraves. Une fois libérée, elle renouvela ses remerciements en direction des deux autres membres de l’Ordre. L’instant resta suspendu et redevint rapidement pesant.

« Il va sans dire que nous connaissons désormais votre existence, Calimène Lendale. Nous garderons un œil sur vous ; et si jamais nous nous étions trompés, il n’est rien qu’un bon carreau d’arbalète ne puisse corriger » lui asséna Rebma d’un ton formel. A cette injonction, Calimène hocha de la tête en sa direction pour lui signifier qu’elle avait bien entendu l’avertissement.

« Mon Père » adressa-t-elle respectueusement au Père Armin, avant de se hisser sur le dos de son hongre.

« Paladin » conclut-elle en guise d’adieux alors que sa monture se mettait en branle.

Épilogue


De crainte qu’ils ne changent d’avis à l’ultime instant Calimène avait mené sa monture sans retourner un seul instant. Ses affaires menées dans la grotte aux affaires, elle pouvait enfin se remettre en route vers la Porte de l’Ynorie où elle souhaitait opérer quelques relevés personnels. En premier lieu, observer l’édifice et statuer sur sa capacité à soutenir les sièges que la Reine Noire finirait par y porter. De même, elle souhaitait se rendre compte par elle-même de l’état de la garnison et de la qualité des soldats y étant stationnés.

En effet, la Porte de l’Ynorie restait un point de passage important. Une armée d’invasion en profiterait probablement pour marcher directement sur Oranan ou Kendra-Kâr mais des bandes éparses pouvaient tout aussi bien se disperser dans les montagnes ; et localiser la Citadelle.

« Légion ; en route.Nous n'avons que trop fait attendre Ziresh » confia-t-elle à sa monture.

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 Sujet du message: Re: La "Grotte des affaires"
MessagePosté: Dim 27 Déc 2015 18:04 
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Chez le luthier


L'elfe resta campée sur le seuil de la caverne. Un homme de grande taille lui tournait le dos, ne donnant à voir qu’un chaperon porté par-dessus une cape qui descendait jusqu’à des houseaux de bure, formant un ensemble en camaïeux brunâtre délavé sous l’effet des intempéries et élimé par l’usure… C’était le premier homme qu’elle voyait de près sur ces terres humaines et son apparence rustique l’intimidait quelque peu. Alors malgré la bonhomie apparente de son invitation, elle voulait éviter de faire un faux-pas. Détaillant la pièce du regard à la faveur d'une paire de flambeaux, Haple pris aussitôt conscience qu'il ne s'agissait ni d'un campement de fortune, ni d'une maison troglodyte, mais aussi surprenant cela lui paraissait-il, elle avait pénétré dans une boutique. Une boutique de… bric-à-brac à en juger par les quelques articles de quincaillerie placés pêle-mêle sur un étalage, les livres négligemment empilés sur quelques rayonnages et du matériel de théâtre, des instruments de musique et même une marionnette adossée à la paroi irrégulière.
- Made… mon enfant ? Ma qu'est-cé qué…
Le cœur de l'elfe manquât un battement. Ce qu'elle avait pris pour un petit pantin inanimé s'avérait être doué de parole et se dirigeait vers elle. Elle reconnaissait cette voix chantante aux consonnes roulantes : c’était cette petite personne qui s’était adressée à elle auparavant. La petite n'en fut pas pour autant désarçonnée bien longtemps – celui-ci ne lui inspirait aucune crainte… – et elle se ressaisit rapidement, reportant son attention sur la fin de la tirade :
- … avec lé dlapier ? Tou m'écoutes… ? Bien flappée, la petite, conclut-il à l’attention de l’inconnu.
Celui-ci se tourna vers l’entrée de la caverne pour regarder la nouvelle arrivante et haussa brusquement un sourcil. Peut-être était-il surpris de voir une enfant ici ? En tout cas, il retourna aussitôt à ses affaires avec un grognement indifférent, déposa la flute qu’il avait fait sonner si habilement avant de marcher vers un étalage plus loin des deux autres. Baignant dans la lumière d’un flambeau, le visage du client resta cependant imprimé dans la rétine de l’elfe. Une barbe de quelques jours assombrissait le creux de ses joues émaciées, ce qui intriguait Haple qui n’était guère habituée à l’abondante pilosité des humains. Mais ce qui retînt son attention plus encore furent ses yeux : Vides de toute expression, noirs comme des puits sans fond, ils faisaient écho à un souvenir à moitié oublié et un pressentiment sinistre lui glaça l’échine plus encore que le froid qu’elle avait courageusement enduré ces derniers jours.
- Tou tlembles, petite. Viens donc à la chaleul des tolches.
(Petite…) Le sempiternel qualificatif infantilisant la piqua à travers la torpeur qui avait gagné son âme et ramena son attention sur cet interlocuteur qui menaçait déjà de l’agacer.
- Et vous… ajouta-t-il d’une voix basse et tremblante à l’adresse de son client, né vous avisez pas touché mes alticles plécieux sans démander.
L'enfant elfe avait entendu parler des petites-personnes qui vivaient sur les terres au Sud du domaine de la Reine Blanche à travers les récits des rares marchands itinérants qui s'aventuraient dans ses montagnes natales. (de bons vivants ; de mauvais marchands) Ses compétences de vendeur laissaient effectivement à désirer ; l’humain ne sembla pas s’en offusquer cependant. Elle pourrait essayer d’utiliser cela en sa faveur pour se ravitailler ici à moindre coût … Mais il lui faudrait se mettre dans ses bonnes grâces visiblement, car son hospitalité semblait conditionnelle.
- Bonjour Monsieur Sinari, répondit-elle dans une tentative inédite de cordialité.
Son extrême précarité lui aurait-elle inculquée un minimum d'intelligence sociale… ? Le petit homme leva malgré tout un sourcil ; et si elle avait été en pleine possession de son esprit, Haple aurait sûrement réalisée qu'elle-même n'aurait pas considéré être désignée par sa race une marque de respect. Cependant, le marchand ne devait pas lui en tenir rigueur, car le voilà qui se ruait sur elle, la mine réjouie et les mains tendues vers la taille de l'enfant.
- Quel tamboul fascinant tou as là ! s'exclama-t-il en pointant du doigt l'instrument accroché en bandoulière. Fais donc voil, intima-t-il d'une voix plus posée en voyant la petite reculer devant son enthousiasme.
- Il est cassé, répondit-elle en espérant ramener la conversation sur un sujet qui l'intéressait plus, le manger.
Mais loin de refroidir ses ardeurs, la nouvelle fut accueillie avec moult frottages de mains et murmures précipités.
-Hum… Moui… Ma haha !… hum… C'est cé qu'on va voil, finit-il par dire à voix haute. Entle donc à la loumièle de la tolche et pose ton fatlas. Tou mé dilas cé qui t'amène aussi, ajouta-t-il d'une voix distraite.
Et la petite d'obtempérer, trop heureuse d'avoir enfin trouvé refuge.

Une fois le tambour entre ses mains, le marchant sinari retourna derrière un comptoir rudimentaire, fait de tréteaux et planches de bois, et en balaya sans plus de façons la surface pour y poser l'instrument. Dans un premier temps, Haple le suivit et l'observa faire… avant de s'en désintéresser, son esprit ramené à des considérations plus basiques. Maintenant que l'adrénaline était retombée, son estomac occupait chacune de ses pensées et laissant le gnome mélomane à ses murmures appréciatifs, la petite se mit à la recherche de vivres parmi les articles mis en vente. Elle s’aperçut vite que l'offre de la boutique se limitait malheureusement aux nourritures de l'esprit. En s'éloignant du comptoir, l'enfant elfe marcha d'abord le long d'un établi où étaient disposés ce qu'elle avait auparavant pris pour des articles de quincailleries. De toute évidence, ils n'étaient pas à la vente mais servaient à la fabrication des instruments de musique entassés à côté, parmi lesquels se trouvaient essentiellement des violes et flûtes aux formes alambiquées et au nombre de cordes et de trous...excessif. Précédé par ses murmures désormais caractéristiques, le bonhomme la rejoignit avant de la pousser pour se saisir d'un ciseau à bois.
- Si j'incise lé coffle ici… Et vlan. Facture Galzolk dé mes deux, résistelait pas lé moindle coup dé vent... Un coup d'aiguille là… Dommage dé tailler dans oune peau aussi…
Un pincement de cœur la saisit alors qu'elle regardait son tambour de guerre se faire démanteler allègrement sans qu'elle n'ait rien demandé. Mais elle n'avait pas la force de protester. Et son regard distrait vaqua au loin.

D'un pas aussi léger que son esprit – le sol sous ses pieds était d'ouate, nota-t-elle amusée – elle rejoignit des étagères chargées de feuilles volantes et de livres en équilibre précaire. « Berceuses garzorks et haka watongo : étude comparative. Tome 1 » annonçait la tranche d'un premier ouvrage. Du fait de sa faiblesse en lecture, Haple n'identifiait cependant que le premier mot pour l'avoir déjà vu sur l'un des livres qui prenait la poussière au domicile familial, un que ses parents n'ouvraient jamais. Quelques étagères plus bas, une liasse de manuscrits attira plus particulièrement son regard. Pour cause, les gravures colorées qui s'offraient à sa vue. Cela, au moins, elle comprenait ; pas besoin d'écrire quand un dessin explique aussi bien (franchement…). S'agenouillant pour se mettre à hauteur, elle extirpa les feuillets d'entre les livres écornés qui les coinçaient et s'assit à même le sol, plus lourdement qu'elle ne l'avait escompté, avant de les parcourir d'un œil fatigué. Les lignes gravées dans la matrice de cuir tanné avait été mises en valeur à l'encre brune. Ses yeux la piquaient … l’enfant épuisée les ferma un instant, s’adossant lourdement sur l’étagère. Un bourdonnement montait dans ses oreilles, comme le grondement lointain d’une chute d’eau. Et lorsqu’elle rouvrit ses paupières, une neige scintillante troublait son champ de vision, l’obligeant à cligner des yeux à plusieurs reprises, jusqu’à parvenir à distinguer de nouveau le détail des illustrations. Des écailles de couleurs vives rehaussaient de ci de là ce qui devait être la silhouette d’un homme. Il était enveloppé d'un ample manteau qui volait dans l’air, comme gonflé par un vent émanant du personnage lui-même. Sur un dessin plus bas, l'homme brandissait une crosse de mage avec résolution et dans le suivant il l'abattait sur le sol, représenté par une succession de vagues concentriques d'ampleur décroissante. Le souvenir de Roche en prise avec le Djinn Marid lui revint en mémoire… Elle tentait de se rappeler… Roche était en prise avec le démon, son bâton de marche interposé entre son visage et les griffes du monstre, et… la terre avait tremblé et… les ombres montaient… était-ce son souvenir ?… Non, la lumière des flambeaux faiblissaient… ou plutôt, il semblait brûler d’une lumière obscure… elle s’efforçait de retenir le souvenir de l'ultime combat de Roche : la terre avait tremblé et… l'étagère basculait lentement dans son dos… sans contrôle… elle sombrait… les ombres… dans le sol… bruits de pas précipités… retour à la terre … noir.
- Galdez-la, jé reviens ! Gale à vous s’il loui allive quelque chose
Mains rugueuses sur paupières ... lumière éblouissante … visage de berger … effroi … noir.

>>La comedia dell'Haple

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 Sujet du message: Re: La "Grotte des affaires"
MessagePosté: Dim 27 Déc 2015 18:27 
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La comedia dell'Haple


- ...tit ? Mon petit… ?
Une gêne l'incommodait. Qu'est-ce donc qui la dérangeait ainsi ? Quelque chose lui tapait la joue à répétition… Une main, fraîche comme l'eau des rivières de ses montagnes natales. Et Haple rouvrit les yeux sur le visage de sa mère… ! Ou du moins, un portrait bien semblable. Une elfe à la mine soucieuse occupait son champ de vision. C'était précisément ce détail, cette sollicitude maternelle, qui l'informa qu'il ne s'agissait pas de celle qu'elle avait littéralement poussée dans la tombe.
- Où suis-je ? S'enquérit Haple d'une voix hagarde.
- Chez nous autres, les marchands de la Grotte. A la Grotte des Affaires, lui répondit l'elfe d'une voix rassurée.
Puis à quelqu'un dans son dos :
- Imbécile ! Tu vois une enfant débarquer seule par cette saison et tu ne te poses pas de questions.
- Jé pensais qu'elle était avec ton client. Jé loui ai démandé ma elle est un peu simplette… tenta-t-il de justifier en faisant appel au client patibulaire.
Pourtant à deux pas du petit homme, celui-là ne sembla pas avoir entendu ; il dévisageait la petite fille en silence…
(ce visage…)
- Un diagnostic mûrement réfléchi pour sûr, coupa sec la marchande elfe. Elle est épuisée, mal nourrie et qui sait ce qu'elle a enduré d'autre avant d'arriver entre tes mains de nigaud !
D’une poigne ferme, elle la souleva par les aisselles et la remit sur pied.
- Comment est-ce qu'on t'appelle ? s'enquit-elle auprès de l'enfant.
- Jeanne. Jeanne Dracque.

Les mots lui étaient sortis de la bouche avant même que son esprit les ait formulés… Mais son instinct lui disait que c'était un mensonge heureux. Son véritable nom n'avait aucun intérêt pour des gens de bonne volonté mais pouvait attirer les foudres d'une Hinione des montagnes, et Amaranthe, où la nouvelle du décès de Roche avait dû parvenir, n'était à guère plus qu'une journée de marche.
- Viens avec moi, Jeanne. Tu peux marcher ? Bien.
Et la marchande l'emmena hors de l'antre du luthier avant de lancer par-dessus l'épaule une dernière remontrance à l'encontre du Sinari.
- Je vous jure… « y a oune pétite qui vient de mé claquer entle les doigts » imita-t-elle d'une voix pleine de sarcasmes. Heureusement que j'étais pas loin.
Sa voix n'avait pas le chantant de l'accent anorfain… Haple jeta un regard à son interlocutrice alors qu'elles marchaient côte à côte dans l'étroit boyau. En plus du parler des Montagnes, elle avait aussi la carrure de ses habitantes, et un tempérament qui n'avait rien à envier à l'ombrageuse Roche… Parvenues au seuil d'une autre caverne, l'enfant pu examiner les traits de son visage à la faveur des flambeaux muraux qui en éclairaient l'espace confiné. Ses pommettes saillantes soutenaient des yeux en amande d'un bleu électrique en tout point similaire aux prunelles de ses congénères. En revanche, ses lèvres charnues rendaient à sa figure une douce volupté qui traduisait une ascendance humaine… Alors, un élan de pitié saisit l'enfant elfe. On lui avait dit que le sort des demi-elfes était tragique, n'appartenant jamais complètement à aucune communauté et ne vivant jamais qu'une demi-vie. Et, de manière inattendue, Haple sentit un lien se forger avec la marchande : car de toute évidence elle-même n'avait plus de foyer et une longue existence elfique semblait hors de propos pour qui peinait déjà à sustenter sa faim. Mais le cours de ses rêvasseries fut interrompu et son esprit égaré ramené au moment présent lorsque l'enfant s’aperçut qu’un autre client s'affairait autour des étalages.

- Mes excuses pour cette interruption, Monsieur Bertrand. Cette pauvre enfant requiert mon assistance. Je serai à vous deux dans un instant.
Un homme de corpulence massive s'était retourné à leur entrée. Il n’accorda cependant à l’enfant qu'un coup d’œil distrait avant de répondre d'une voix polie qui contenait le juste mélange de distance et de sollicitude :
- Mais faites donc ma bonne Istrid. Puis-je vous aider d'une quelconque manière ?
- Je vous en prie, ne faites pas attention à nous. Vous trouverez nos étoffes les plus fines qui raviront les jeunes mariées sur ce présentoir-ci, indiqua-t-elle en l’enjoignant d'un geste du bras à examiner ses articles. Toi, assied-toi ici, mon petit, conclut-elle en lui tirant une chaise.
Et Haple la regarda traverser la salle en quelques grandes enjambées, sa longue jupe dissimulant le mouvement de ses jambes.
- Hum … oui… ce tulle sera sur plus d'une robe aux fêtes de Beauclair. Quelle facture exquise ! Je ne manquerai pas de préciser qui en est l'artisane.
- Vous m'en voyez ravie Monsieur Bertrand, lança-t-elle par-dessus l'épaule tandis qu'elle fouillait dans une fine et haute commode vitrée... Vous prévoyez une bonne recette cette année ? demanda-t-elle en revenant vers eux, tenant à la main un panier dont le contenu s'entrechoquait dans un bruit de verrerie.
- Oh oui, comme toujours. Les demoiselles en âge de se marier vendraient leurs parents pour des atours qui attirent l’œil des plus beaux gaillards. Et, lorsqu'au cœur de la nuit, les jupons volent haut et les gloussements encore plus, ceux-là dépensent volontiers un mois de labeur aux champs pour combler leur partenaire de danse… et étourdir leur pudeur dans l'alcool. C'est assurément la période la plus lucrative de l'année... non seulement pour mon corps de métier mais aussi pour les aubergistes et troubadours de la région.
La-dite Istrid s'agenouilla auprès de Haple que tout deux semblait avoir oubliée. En temps normal, l'enfant elfe se serait insurgée d'être ainsi traitée comme quantité négligeable, et ses poings s'étaient quelque peu raidis lorsque la marchande l'avait appelée « mon petit » pour la seconde fois. Mais, dans les circonstances présentes, Haple sentait bien que son caractère d'enfant sans défense pouvait jouer en sa faveur. Personne ne lui posait de questions gênantes d'une part, et d'autre part, peut-être parviendrait-elle à apitoyer ces adultes bien convenables afin qu'ils lui viennent en aide. Si par le passé elle avait en effet luté de toutes ses forces contre l’interventionnisme de ses aînés dans sa vie, là en revanche, la situation était tout autre : ce serait elle qui tirerait les ficelles. Et son intérêt avait été piqué par la mention de ses festivités à … elle tentait de se rappeler mais son esprit tournait à vide par manque d'énergie… Beauclair, c'est ce que le gros monsieur avait dit. Et il y avait de l'argent à gagner pour qui savait jouer d'un instrument, ce qui était son cas.

- Tiens Jeanne. Bois ça, ça devrait te remettre sur pied en attendant que tu prennes un bon repas.
Haple se saisit du flacon qu'on lui tendait son regard perdu dans ses pensées.
- N'aie pas peur. C'est seulement de l'eau sucrée, la rassura Istrid interprétant l'absence de l'enfant pour de la réticence.
Et celle-ci en but le contenu d'une traite avant de remercier la tisserande et de lui rendre la fiole vide.
- Et bien voilà qui est mieux, commenta le drapier en tapotant gentiment l'enfant sur l'épaule.
- Monsieur Bertrand… ? laissa échapper celle-ci d'une petite voix innocente.
Un silence tomba aussitôt sur la boutique. Et tous semblaient suspendus à ses lèvres. En particulier, le client du luthier qui les avait discrètement rejoint dans la caverne de la tisserande.
- Mais elle parle, commenta avec humour le grand efflanqué de sa voix rocailleuse.
Un humour sec auquel les deux autres répondirent par un sourire de courtoisie entendu.
- Oui, mon enfant…
- Jeanne, compléta la demi-elfe en réponse à un regard interrogateur du drapier.
- Jeanne, répéta-t-il avec un sourire bienveillant. Tu te sens mieux ?
- Oui, nettement. Je me demandais… si vous allez à Beauclair… pourrais-je vous accompagner ? Ma famille doit s'inquiéter de ne pas me voir revenir…
Encore une fois, le mensonge était sorti avant qu'elle n'ait pu le retenir !
- T’es d’ Beauclair, comme ça ?
Ce n'était pas Monsieur Bertrand, ni la dame au nom d'Istrid, mais l'inconnu qui avait parlé.
- Et c’est quoi qu’amène une Beauclairoise d’ ton âge sur les routes… ?
Le sucre courant dans ses veines, la petite retrouvait rapidement ses moyens ; ses méninges tournaient à plein régime. Mieux valait construire autour d'une vérité… pas la sienne … celle de Roche enfant !
- Mes parents m'ont envoyée livrer un chargement de tonneaux à une cave d'Amaranthe. Normalement, c'aurait dû être papa derrière les rênes, mais il a le souffre au cœur…
- Un souffle au cœur, rectifia le drapier un sourire affectueux en coin.
- Oui… Et… Hier, je poussais les chevaux pour trouver refuge de la tempête, nous allions à bride abattue, et la foudre est tombée et… les chevaux ont rués et... la carriole est tombée et… les chevaux… ils braillaient dans le ravin. Je suis parti en courant…
Haple marqua une pause. Elle aurait presque versé une larme tellement elle se prenait au jeu.
- Et ce matin, j'ai entendu la flûte alors je suis venu ici. Qu'est-ce que je vais dire à maman pour la cargaison ?
- Ne t'en fais pas pour l'instant mon enfant. Je vais déjà te ramener à Beauclair et tout ira mieux une fois là-bas.
La compassion du drapier était contagieuse. Istrid, après avoir écouté le récit une main sur le cœur, tapotait affectueusement la tête brune de l'enfant. L'inconnu en revanche demeurait impassible, bien qu'elle ait juré l'avoir entendu étouffer un grognement ricaneur lors de sa première réponse. Mais Haple n'en avait que faire ; elle avait son chevalier servant. Et avant que la tisserande ne fasse glisser le fichu qui dissimulait ses oreilles hiniones à force de caresses maternelles, la comédienne en herbe se mit sur ses deux jambes d'un pas hésitant et se retourna vers la demi-elfe.
- J'ai laissé les quelques affaires que j'avais pu sauver chez votre ami, ainsi que mon tambour…
- Très bien, je finis avec Monsieur Bertrand et je t'y reconduis.
- Laissez, lâcha une voix rocailleuse dans leur dos, je m'en occupe. La p’tite s’ra prête quand vous aut’ charg’rez l’char.
- Merci… Monsieur ?
- Pulchinel, répondit-il du tac-au-tac.
- Avec plaisir alors, Monsieur Pulchinel, répondit-elle avec un soupir de soulagement. Suis donc le gentil Monsieur mon petit, conclut-elle avec une condescendance infantilisante.
(« Mon petit »… rester dans le rôle, dans le rôle…)
Et Haple emboîta le pas au grand rustre qui s’avançait déjà vers la sortie.

Une marche silencieuse dans la pénombre du boyau s’en suivit. Le bruissement de sa longue cape brune sur le sol nu et le vent sifflant paresseusement dans le conduit rocheux meublaient une conversation inexistante. Un mutisme apprécié de l’enfant, bien qu’un peu intimidant. L’inconnu ne donnait pas dans la condescendance ou le paternalisme, songeait l’elfe alors qu’elle peinait à tenir son allure forcée. Et celui-ci ne se retourna qu’une fois parvenu dans la lueur de la caverne du luthier pour y attendre la petite.
Oui … ah c’est toi encole?
La voix confuse du Sinari les accueillit. Il les rejoint au seuil de sa boutique mais s’arrêta à une distance respectueuse, un air d’appréhension peint sur ses traits. Assurément, il ne se sentait pas encore fautif d’avoir négligé les besoins de l’enfant… D’où venait la gêne que celle-ci lisait dans ses yeux alors ? Toute dans son examen physionomique, Haple remarqua un tressaillement presque imperceptible sur le coin des lèvres du luthier, entre la crainte et le dégoût, lorsque le dénommé Pulchinel pris la parole :
Paraît qu’ vous avez l’ tambour d’ la p’tite… ?
Lé tamboul… oui. Celtes, lé tamboul, marmonna la petite personne.
Et le regard plongé sur ses pieds, sa tête dodelinant de côté, le petit homme s’enfonça dans sa caverne jusqu’à son établis avant de revenir peu après.
J’ai fait cé qué j’ai pu. Mais lé coffle Garzolk était tlop lalge poul accueillil cé qu’il restait dé la peau. C’est la seule paltie dé valeul dé toute façon. Si tou veux un tamboul, tou felais mieux dé rendle visite à mon cousin en Nosvelis. Il manie les flouides comme personne,

(les Fluides… ?)
La voix de Roche lui revenait en mémoire. Elle lui avait dit qu’elle lui dirait tout à leur sujet... avant de mourir prématurément.
Qu’est-ce c’est, les Fluides ? demanda-t-elle d’une voix enfantine.
Tou ne sais pas ? répliqua le luthier, l’étonnement supplantant la grimace qu’il avait jusqu’à présent affichée. Poultant on aulait pou penser qu’on t’aulait enseigné les roudiments dé la magie avant dé té mettre un instlument enchanté entle les mains…
Pulchinel changea de posture, visiblement intrigué par le sujet de la conversation, mais n’interrompit pas le Sinari qui reprit après s’être passé la langue sur les lèvres d’un air songeur :
Les flouides sont … la manifestation physique dé …l’énergie qui façonne notre monde. Les manier pelmet donc dé tlansfolmer son envilonnement … et ceci dé manièle plous ou moins plofonde et étendue sélon la quantité de flouide maitlisée.
Roche lui avait bien dit que les fluides en elle étaient forts… était-ce à dire qu’ils avaient une prise particulièrement importante sur le cours de sa vie ? Ou bien qu’elle disposait d’un pouvoir de transformation sur son environnement ? Le souvenir des dernières semaines semblaient indiquer cette dernière interprétation : l’étau de boue qui avait empêtré sa mère et provoqué sa mort ne pouvait être que l’œuvre d’une magie alors insoupçonnée. Mais Haple songea avec déplaisir que cela n’excluait pas qu’elle fut la marionnette des fluides, une idée certes abstraite, un pressentiment indistinct uniquement, mais qui la frustrait d’autant plus qu’elle s’était enfin affranchie du carcan familial et libérée de l’autorité de Roche.
- Je ne comprends pas… comment peut-on maitriser du fluide ? Ce n’est même pas visible, ou si…? corrigea-t-elle en voyant la bouche du luthier s’ouvrir au quart de tour.
- Ma si, ma si. Viens donc voil pal ici.
Et le Sinari d’entrainer la curieuse vers les étagères de la boutique.

- Voilà, c’est à ça qué ça ressemble petite, là-haut dans la colbeille, des palcelles dé flouide poul les gens dé magie. Plincipalement. J’ai aussi quelques excentliques qui en achètent poul décoler leul intélieul, ou poul faile les intélessants auplès dé leuls voisins…
Haple ne l’écoutait plus qu’à moitié. Les scintillements bigarrés d’un ensemble de flacons accaparaient son attention. Elle avait déjà vu de la verrerie de ce type dans les affaires de sa mère ; celle-ci y rangeait ses parfums et huiles de beauté. Mais le contenu de celles-là … elle n’avait jamais rien vu de pareil ! Flammèches vacillantes, volutes blanchâtres, lumières liquides et liquides lumineux ; tous en perpétuel mouvement, les uns avec la langueur de la lave, d’autres en tourbillons effrénés ! Mais parmi tous, une série de flacons l’attirait en particulier. D’une couleur ambrée tirant sur le brun, un liquide épais transparaissait derrière le verre zébré de coulures séchées. L’étrange substance mielleuse semblait en passe de se figer, son inertie démentie seulement par quelques cristaux sableux en suspension qui vibraient à basse fréquence mais d’une énergie dense et profonde comme la Terre.
- Vous dites qu’on peut en acheter…? relança-t-elle en détachant son regard avec peine de l’article convoité.
- Natoulellement. Tout est à vendle ici. répliqua-t-il automatiquement, avant de continuer d’une voix hasardeuse. Mé dis pas qué… tou en voudrais ? C’est pas donné petite…
- Et dangereux aussi…
La voix grave de Pulchinel fit sursauter les deux interlocuteurs. Ils ne l’avaient pas vu se rapprocher pour écouter la conversation… Son visage ne laissait cependant pas transparaitre la moindre inquiétude pour l’enfant, mais plutôt… était-il intrigué par cette Jeanne Dracque et son intérêt pour les fluides?
- Oui, oui dangeleux. reprit le marchand. Pas poul les enfants, ça, les flouides. Istlid me mettlait en cloix sans plocès, poul sûl! Non, non, pas poul les enfants.

La cherté du produit la laissait indifférente. L’avertissement de Pulchinel et l’agitation du luthier, en revanche, ne faisaient qu’exciter sa curiosité. Alors, faisant fi de l’avis des adultes, Haple tira sur la ficelle à son cou et sortit de sous son chemisier et chandail de bure une bourse de cuir.
- Combien ?
Sa propre audace la surprenait! Elle se faisait l’impression d’être l’un de ces marchants itinérants qu’elle aimait regarder négocier au belvédère de Cuilnen. Ce qu’elle appréhendait c’était que ce nouveau masque ne correspondrait plus vraiment à celui endossé dans la caverne de la tisserande. Mais elle ne voyait pas d'alternative et le luthier n'avait pas assisté à sa comédie d'enfant sans défense...
- Non, non… Istlid… commença le luthier d’une voix suppliante.
- Com-bien ? articula l’enfant hinione.
- Cinq…cinquante pièces, balbutia-t-il, une lueur d’espoir dans les yeux comme s’il songeait que la gamine ne détenait pas une telle somme.
Mais déjà celle-ci desserrait le cordon de la bourse et faisait rouler sous ses doigts menus les ronds de laiton dans une tentative de les compter… sauf qu’elle n’était pas bien habile dans ce domaine. Et maintenant qu’elle s’était mise en avant avec une telle assurance, elle ne voulait pas leur montrer l’étendue de son inexpérience. Alors, Haple improvisa.
- Et pour le tambour ?
- La même… poul la main d’œuvle et…
- Bien, l’interrompit la petite négociante. Mettez-moi deux flacons de cette mélasse.
- Les flouides de telle…de terre ?
- Oui, les petites fioles je vous prie. Et cet illustré que je lisais avant mon moment de faiblesse.
- Lé palchémin tlaitant des chocs telluliques…? Oune séconde, je viens dé lé ranger sour son étagèle.

Hale regarda le Sinari faire un pas de côté et tendre le bras pour atteindre le rayonnage qu’elle avait exploré auparavant. Son cœur battait la chamade. Le luthier avait retrouvé de son professionnalisme et semblait être rassuré par les airs d’adulte que la nouvelle venue se donnait. Mais d’un instant à l’autre, il se retournerait vers elle pour conclure la vente et la comédie toucherait à sa fin, soit avec un butin fantastique à la clé, soit dans un ridicule cuisant s’il s’avérait qu’elle ne possédait pas de quoi acheter une pomme. Et sur cette pensée effrayante, le petit homme rejoint les deux autres, le traité de magie en main.
- Tenez, ça fera l’affaire, déclara l’enfant en faisant sonner le contenu de la bourse avant de lui tendre d’un geste impérieux.
Les yeux détaillant la petite monnaie avec minutie, le luthier repartit vers son établi d’un pas lent et distrait. Le coeur de la petite tonnait contre sa poitrine ; ses tympans menacaient de céder sous la pression et une envie de s'enfuir en courant la gagnait...
- Oui, je vous dois quelques pièces en retoul, lança-t-il par-dessus l’épaule en ouvrant un tiroir.
Soulagement… Euphorie!
- Laissez, laissez… Gardez la monnaie pour les bons soins de votre collègue. Si vous pouviez me rendre mon sac de voyage aussi, j’aimerais finir de me préparer au départ.
- Bien entendou, lé voici ma…démoiselle.
Et Haple entrepris de ranger ses achats dans son sac, des étoiles dans les yeux.

>> Le masque de Pulchinel

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Le masque de Pulchinel


Il aurait certainement été plus judicieux d’acheter des vivres plutôt que ces accessoires de magie, aussi fantastiques furent-ils. Mais la convoitise de l’enfant prévalait encore sur la raison de l’adolescente naissante. Avant qu’elle ne serre les sangles du sac, une voix pernicieuse se fit entendre dans son dos :
- Tu n’ vas pas gouter la marchandise …?
Haple se retourna pour découvrir le visage de Pulchinel qui la regardait d’un air moqueur. Une provocation qui la piqua au vif, car elle n’avait certainement pas peur de boire ce fluide de terre ! Elle porta le flacon à la lumière : celle-ci venait mourir dans le mucus auburn. Enfin, de l’appréhension, oui, quand même… Et le luthier ne semblait pas non plus rassuré de voir la petite considérer de consommer son produit dans sa boutique. Sans doute, redoutait-il un nouveau drame dans sa boutique. Ou bien, était-il effrayé par le comportement de son rustique client?
- Ma enfin, à quoi jouez-vous ? Vous voulez qu’elle nous claque entle les doigts ?! Il y a pas plous qué dix minoutes qu’elle peldait connaissance sour lé sol. Jeanne, continua-t-il en s’adressant à elle dans une tentative de pondérer sa voix, les flouides c’est sélieux, et faut pas jouer avec ça!

Déjà échauffée par la pique de Pukchinel, les instructions du Sinari l’agacèrent tellement qu’elle dévissa le bouchon et engloutit d’une traite le contenu du flacon. Un réflexe de rejet la parcouru alors que le fluide visqueux s’accumulait dans sa gorge ne parvenant pas à s’écouler naturellement. Elle tentait de déglutir, encore et encore, mais sans succès. Et des larmes montaient à ses yeux sous l’effet de la panique. Des larmes à travers lesquelles elle vit le sinari courir vers elle et se placer dans son dos avant de l’encercler dans l’étreinte de ses petits bras pour tenter de la libérer. Un coup… ça lui faisait mal aux côtes. Un nouveau coup… son corps tout entier était agité de spasmes. Ses entrailles semblaient vouloir jaillir par sa bouche et emporter par là même le fluide magique. Un dernier coup…avorté. A peine l’étreinte du Sinari s’était-elle affermie qu’il avait lâché prise. Haple tourna des yeux affolés et remarqua le petit homme gisant à terre. Mais avant qu’elle ne puisse voir quoi que ce soit d’autre, des mains rugueuses lui tirèrent la tête en arrière avec vigueur et brutalement lui ouvrirent la bouche en tirant de part et d’autre sur ses mâchoires comme pour une oie, avant de finalement plonger brutalement un doigt rêche et amer sur le fond de sa langue ! Alors, comme si son cou s’ouvrait en deux, Haple sentit les chairs de sa gorge se remodeler pour céder le passage à ce qui en obstruait l’entrée et, dans un gargouillis de vidange, elle ingéra enfin le fluide de terre.

Soudainement lâchée par les mains qui s’étaient emparées d’elle, la tête de l’enfant partit lourdement en avant et entraina la petite dans un déséquilibre qui la fit tomber à terre. Ainsi à quatre pattes, Haple toussait de manière incontrôlée tentant avec difficulté de reprendre son souffle. Au coin de son champ de vision, elle percevait les gesticulations du Sinari qui s’était relevé et agitait ses poings vers Pulchinel tout en restant à une distance prudente. Entre deux inspirations étranglées, elle entendait la dispute dont elle devinait être l’objet :
- … inconscient ! … jouer avec sa vie… répoutation de vous autles… balbales fanatiques…
Et ce fut la dernière invective que Pulchinel autorisa le luthier à lancer. En effet, un choc sourd avait arrêté le petit homme dans sa lancée et Haple devinait que les mains rugueuses qui l’avaient manipulé si fermement venaient de s’abattre sur une nouvelle bouche. Maintenant que sa respiration commençait à retrouver une certaine stabilité, elle voulait tourner la tête pour intervenir et leur dire à tous les deux de se rassurer, qu’elle allait bien et qu’il n’y avait pas de raison de se disputer ainsi. Mais étrangement, sa nuque ne pivota pas autant qu’elle l’avait escompté… quelle sensation bizarre : comme si son esprit avait emmené son corps dans une direction mais que celui-ci ne l’avait suivi qu’au ralenti et jusqu’à un certain point seulement. Néanmoins, elle embrassait désormais du regard les deux hommes, l’un se tenant la mâchoire des deux mains et l’autre rajustant son manteau sur ses épaules. Il avait les sourcils froncés, de toute évidence agacé par la virulence du Sinari, mais ne semblait pas inquiété par les regards foudroyants que celui-ci lui jetait en silence. Finalement, tous deux tournèrent la tête lorsqu’entra en courant la tisserande d’à côté suivie d’un gros drapier à la mine déconfite et à la respiration haletante.

- Qu’est-ce que …?
La voix affolée de la demi-elfe s’arrêta net lorsque ses yeux s’arrêtèrent sur son collegue.
- J’en ai assez de tes embrouilles toi, espèce de fumeur de pipe débilitant, tu vas faire fuir les clients ! Pardonnez-le M. Pulchinel, pardonnez-nous, balbutia-t-elle allant d’un client à l’autre. Quelle honte, Monsieur Bertrand, quel embarras.
- Mais non… marmonna le drapier d’un air peu convaincant. Je vais charger la charrette. Petite… qu’est-ce que tu fais les mains dans la poussière ?
Et tous les regards se braquèrent sur elle, Istrid avec surprise, Pulchinel avec impassibilité et le luthier avec un regain de véhémence.
- C’est LOUI, c’est LOOUUIII, brailla-t-il d’un air furieux.
- AAA—SSSEZ, tonna-t-elle pour couvrir ses cris, plus un mot de toi ou je te brule avec tes flutes ici-même. Monsieur Pulchinel, poursuivit-elle avec raideur, pouvez-vous s’il vous plaît m’expliquez de quoi il retourne?

Le questionné considéra la tisserande en silence… (quel charisme) Et, inclinant légèrement la tête comme s’il se rappelait les évènements pour les rapporter le plus fidèlement possible.
- Et ben, la p’tite a avalé l’ fluide de terre, mais…
- Quel fluide? l’interrompit-elle d’une voix où la menace pointait.
- La p’tite en a ach’té à vot’ ami et elle l’a avalé sur le champ… qui peut lui r’procher, commenta-t-il en jetant un clin d’œil à l’enfant. Elle s’étouffait alors vot’ collègue a aussitôt réagi pour tenter d’ lui libérer les voies respiratoires, mais…disons qu’ tout’ la bonn’ volonté du mond’ fait pas un bon sauv’teur, poursuivit-il avec indulgence. J’ l’ai donc écarté, avec plus d’ vigueur que j’aurais dû, sûr’ment, et j’ai aidé la gamine à déglutir.
(quel talent aussi pour se présenter sous un beau jour) Et de fait, le récit avait brodé sur l’idée que la tisserande se faisait du Sinari et celle-ci avait porté une main à son visage blêmissant à la mention de la transaction. Haple espérait seulement que la tisserande et le drapier ne verraient pas à travers son piètre jeu d’actrice à elle, car en effet, la pauvre Jeanne Dracque perdue dans la montagne n’aurait pas dû être intéressée par des articles de magie, encore moins se serait-on attendue à ce qu’elle ait la témérité de consommer des fluides. Heureusement, Pulchinel l’avait présenté sous un jour innocent, blâmant indirectement le Sinari plutôt que la petite pour une raison qui lui échappait. Peut-être cherchait-il à se venger du luthier pour son manque de respect ? Et en conséquence, la tisserande semblait choquée par ce qu’elle venait d’entendre…Les mots lui manquaient. Son regard apathique allait de Pulchinel, au luthier, à l’enfant et de retour à ses clients… Elle secouait légèrement la tête, comme submergée par l’inconscience de son collègue, et arrêta finalement ses yeux sur lui avant de tendre une main menaçante dans sa direction et d’ouvrir une bouche muette. La main blanche de la demi-elfe retomba cependant, ainsi que la tempête qui avait menacée d’envahir la boutique troglodyte.
- Plus tard, laissa-t-elle échapper avec consternation.

Un raclement de gorge ramena l’attention de la tisserande sur le drapier.
- Tout est bien qui finit bien alors, hasarda-t-il avec malaise, je dois malheureusement vous quitter ma brave Istrid. La petite est-elle en mesure de prendre la route ?
- Ma foi, elle a l’air. Tu peux t' lever ? intervint Pulchinel.
- Je vais bien, dit-elle mollement en tentant de se remettre sur pied.
Mais son corps ne répondait qu’avec maladresse. Ses articulations lui faisait défaut, toute ankylosée qu’elle était, comme si du sable s’était infiltré dans entre ses cartilages et limitait l’amplitude de chacun de ses gestes. Et ses membres engourdis pesaient leur masse en pierre, si bien qu’elle ne parvenait pas à décoller ses paumes du sol. Elle s’enracinait dans la caverne! Et les autres s’aperçurent rapidement que si sa vie n’était pas en danger, elle n’était pas sortie indemne de cette expérience mal encadrée. Maudissant cette faiblesse qui risquait de lui couter son trajet vers Beauclair, Haple fit carburer ses méninges, qui eux tournaient à plein régime, afin d’inventer une histoire qui rassurerait les minces soucieuses du drapier et de la tisserande... mais rien ne venait.
- Je vais bien, répéta-t-elle alors posément comme si sa tentative avortée pour se relever n'avait rien d'alarmant.
(merde merde merde merde)
- J’ai d’jà vu un mage pour qui j' travaillais réagir de c’te façon à une prise d’ fluide terrest’. Engourdiss’ment des muscles, raidiss’ment des articulations, torpeur d’ la langue, durciss’ment d’ la peau aussi, récita Pulchinel d’une voix monotone. Ça dure pas longtemps tout ça, faut lui laisser l’ temps d’ r'trouver son équilibre.
(Ah bon, tant mieux…)
- En mêm' temps, une dose d’adulte pour son gabarit d’ souris…
Le Sinari bougonna quelques paroles amères avant d’être aussitôt réduit au silence par la tisserande elfe.
- Elle se rétablira donc sans soucis? interrogea celle-ci en partie rassurée.
Le grand efflanqué se pencha au-dessus de l’enfant et la pris dans ses bras avant de se relever et de la porter vers la charrette.
- J’ai pas dit ça… corrigea Pulchinel. Il faut quelqu’un d’expérimenté pour veiller sur elle durant son rétablissement. J’me rendais à Beauclair just’ment ; j’men occuperai et elle dans’ra aux fêtes d’ Beauclair avec ses amies. Si vous voulez bien d’ moi à bord de vot’ charrette.
Les autres adultes, la tisserande en particulier, furent légèrement pris de court par l’initiative de l’inconnu et cette question qui n’en était pas une, mais tous le suivirent au dehors sans broncher et bientôt chacun partit de son instruction :
- Faites-vous une place à l’avant Pukchinel. Je charge les premiers rouleaux de tulle, Dame Istrid.
- Je vous suis Monsieur Bertrand, après vous. Et toi, lança-t-elle d’une voix lapidaire au Sinari, charge donc les affaires de la Jeannette.
Et tous se dispersèrent pour vaquer à leurs occupations.

La complicité qui semblait s’être instaurée entre l’enfant et l’homme en brun ne perdura pas ; celui-ci la déposa en effet à l’arrière de la charrette, et après lui avoir lancé un regard énigmatique où se mêlaient curiosité et satisfaction, s’enfonça dans la pénombre du boyau rocheux, là où Haple ne pouvait pas le suivre du regard. En effet, elle était couchée sur le côté et son champ de vision était limité par les jambes et les courroies des bêtes de sommes. Frustrée d’avoir été laissée dans cette position inconfortable et indigne, Haple se jeta lourdement de côté afin de basculer sur le ventre et, se tortillant aussi vigoureusement que possible, passa ses bras sous sa poitrine, bloqua ses coudes afin d’éviter de s’avachir et entreprit de se redresser. Le souffle de l’enfant se faisait saccadé sous l’effort. Elle n’aurait pas eu plus de mal si elle avait cherché à soulever la charrette, les chevaux avec…! D’ailleurs, ceux-ci s’agitaient et leur hennissement inquiet accompagnait Haple dans son épreuve de force. Soudain, un bruit sourd retentit à côté et fit trembler le plancher de bois, manquant de lui faire perdre l’équilibre précaire qu’elle avait su établir en appui sur ses avant-bras. Un instant de panique la saisit alors ; elle devinait plus qu’elle ne percevait le souffle de quelqu’un se joindre au sien et celui des chevaux… quelqu’un qui l’observait en silence.
- Tou n’as fait qué m’attiler des ennouis, petite, tou m’as disclédité aux yeux de la gélante de la glotte… Qué cé soit cé qué tou chelchais, plobablement pas. L’autle en revanche…
Et la petite entendit avec soulagement le Sinari faire un pas pour s’éloigner. Mais il s’arrêta aussitôt.
- Aplès lé chaos qué tou as sémé aujould’hui, jé dois dile qué j’ai dou mal à compatil, continua-t-il dans sa barbe. Ma pelsonne né mélite cé qu’ils font… ces balba… barrbarrres, ces fanatiques…
Les mots faisaient mal en sortant de sa bouche, Haple pouvait l’entendre au dégout intense qui sonnait dans ces noms d’oiseaux.
- Dans ton sac, jé t’ai mis quelqué chose poul té plotéger si… lorsqu’il tombela son masque. Et un delnier conseil. N’attends pas tlop avant dé plendle cette séconde fiole dé flouide… Tou aulas bésoin dé tout cé qui peut t’aider poul t’en sortil.
Sur ces paroles réjouissantes, le Sinari rebroussa chemin dans un bruit léger d’étoffe froissée, laissant Haple achever son ascension laborieuse avec le poids nouveau d’une menace sur les épaules, et après un effort prolongé, découvrir le drapier revenir les bras chargés et le désormais inquiétant Pulchinel marchant à ses côtés au bruit régulier de son bâton de marche.

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 Sujet du message: Re: La "Grotte des affaires"
MessagePosté: Dim 20 Mar 2016 16:31 
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(Avant)

(3a)



Après quelques marches, les trois filles parviennent aux boutiques. Cela n'a pas l'air de grand-chose à première vue, mais y'a quand même un peu de monde. Ça résonne sur les parois de pierre. Et y'a des tas de trucs que l'plus maladroit des tire-laines pourrait piquer tranquille. Mais la peau-verte n'est pas l'genre à chiper sur les étalages. Pas sans avoir pété la tronche du vendeur avant, en tous cas. Et puis, y'a quelques humains qui n'ont l'air de rien, mais qu'observent avec des tronches méchantes. Des gardes en tenue d'braves gens, sans doute.

Maya tapote la main verte, et lui indique un marchand en particulier. Y'a des étagères en pierre qui portent des flacons qui brillent. Et y'a des rouleaux qui trainent dans des barriques. Des machins magiques, ça.

"Maaaa !", commence Aroroa avant que Zu'Gash ne lui pince le bec.

"Oais, on sait."

Devant elle, y'a un humain sous capuche qui tente de vendre des pots en terre cuite. Pas vides les pots. Genre avec une sorte de matière poisseuse et grasse, qui sent les plantes. La Coureuse hausse un sourcil, certaine d'avoir déjà reniflé ça. Elle avance et colle sa grosse patte sur l'épaule humaine.

Sourire à crocs bien en vue en le reconnaissant.

"Tiens ! Si c'est pas l'mulot !"

"Oh mes dieux..." Perte de coloris du visage humain. "Oh mes dieux ! La garzoke !"

"Eh ! C'est Zu'...", commence-t-elle avant de le voir jeter sa sacoche en l'air, la bousculer et se barrer en courant. "Gash... Ben merde alors."

"Pof."

Rattrapage de sacoche.

"Pour une fois qu'j'voulais êt' polie et l'remercier pour ses onguents... Eh, mate-ça Maya ! Y'en a deux qu'ont pas cassé ! Et y'a une jolie p'tite bourse."

"Zu'Gash... Cet argent... Il n'est pas à toi."

"Bwahaha ! Parce que tu crois qu'il va v'nir le récupérer ?", se marre la peau-verte. "À galoper comme ça, il doit déjà avoir atteint la plaine !"

Une petite toux interrompt la discussion. Ah oui, c'est vrai. Elles sont là pour acheter. La peau-verte pointe du doigt deux grosses fioles graduées, et étale les yus avant qu'on lui cherche des noises. Acheter des machins qui soignent, c'est une première pour la peau-verte. Elle pense surtout à Maya pour le coup, qu'elle doit ramener en un seul morceau. Elle ne sait pas si elles devront se castagner en chemin, et maintenant que le piaf noir fait aussi de la magie, faut qu'il puisse s'en servir.

De son côté, Maya dépense le fric de la secte, pour se payer des flacons noirs et un des rouleaux de papier. La garzoke n'a aucune idée de ce que c'est, mais elle a cru voir un dessin dessus. Genre un crâne ou un truc qui y ressemble.

"Allez ! On paie, et on s'casse !"

Vrai quoi. Si y'en a qui adorent passer leurs vies dans des boutiques, c'est qu'ils ont vraiment un grain.


(Après)


Achat de :
- 1 Elixir de soin : 300 yus
- 1 Elixir de mana : 300 yus
Soit un total de 600 yus.

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Dernière édition par Zu'Gash le Jeu 24 Mar 2016 23:48, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: La "Grotte des affaires"
MessagePosté: Mar 22 Mar 2016 18:23 
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Intervention pour Zu'Gash


La marchande regarde l'argent déposé par Zu'Gash sur la table, comptant manifestement le montant qu'il y a là avant de hocher la tête sans un mot et d'empocher le tout, laissant l'orque récupérer son achat. La femme la regarde nanmoins s'éloigner en plissant les yeux, sans un mot de au revoir et avec une méfiance manifeste dans le regard.


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 Sujet du message: Re: La "Grotte des affaires"
MessagePosté: Mar 29 Mar 2016 23:47 
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« Mer-ci ! Da-e-mon. Gri-gri ! »

Daemon entra d'un pas mollasson dans la fameuse grotte des affaires, l'unique boutique viable des lieux à la ronde. Alors que l'entrée n'était qu'une vulgaire béance dans la falaise, sans plus d'indication d'un vieux panneau planté dans le gravier, il fut surpris d'y découvrir une sorte de petite rue pavée de planches mansardées à même la roche. Quelques lueurs timides s'échappaient du plafond caverneux crevé par endroits et les renfoncements, faisant généralement office de boutique, étaient éclairés par des constellations de lampes à huile. Une maigre foule circulait et examinait le contenu des étales, tous semblaient être des aventuriers, des gens de passage, ou alors des bûcherons et des chasseurs venus exploiter les parages isolés et sauvages.

Les gens n'avaient pas l'air commode et les deux adorateurs de Phaïtos tâchèrent de rester discret. Plusieurs boutiques intéressaient vivement le semi-elfe, mais il ne put s'y arrêter car Asad l'attira dans un coin sombre. Une petite brèche dans la pierre, presque invisible pour les non initiés, menait à une boutique exiguë et tamisée où s'échappaient des effluves désagréables.

Le marchand n'attirait pas la sympathie, il ne les salua pas, demandant simplement ce qu'ils souhaitaient acquérir. Le regard bleuté et terriblement proche d'Asad interpella le semi-elfe en silence, puis il réclama des fluides obscurs. Sans trop savoir pourquoi, une gêne envahit Daemon, comme si son collègue lui offrait son dépucelage dans le bordel du coin.

Le marchand ricana sinistrement et disparut dans l'ombre, quelques tintements se firent entendre et il revint les mains chargés de fioles noires. Il en distribua la quantité nécessaire puis Daemon demanda d'une voix timide si le marchand possédait des parchemins de sort. Le vieil homme ronchonna, disparu derrière l'étale et dans un grand mugissement souleva une caisse sur le comptoir. Le jeune fanatique éplucha les parchemins avec passion, découvrant des sortilèges dont il ignorait l’existence, abreuvant le marchand de questions énervantes.

Au final Daemon réussit à négocier l'achat de quatre fioles et trois parchemins en troquant quelques babioles inutiles et encombrantes. Mais alors qu'il fouillait sa sacoche, il y trouva une étrange pierre qu'il avait ramassée lors d'un voyage. Un simple galet relativement rond sur lequel était gravé un symbole composé de deux traits. Le marchand déclara qu'il s'agissait d'une rune, un artefact pouvant être utilisé une seule fois pour générer un effet en rapport avec le symbole...


« Vous allez me le bouffer mon gigot ? »

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Achats, ventes, expertise :

  • Achats :
    Fluide magique d'élément sombre (¼) : 250 yus (x3)
    Fluide magique d’élément sombre (1/8) : 110 yus (x1)
    Parchemin de sort évolutif : 400 yus (x1)
    Parchemin de sort évolutif de classe secondaire : 500 yus (x2)

    Total achat : (250x3) + 110 + 400 + (500x2) = 2260 yus

  • Ventes :
    Dague dénuée de garde (for+2) : Prix de rachat : 28 yus 
    Épaisse tunique de cuir solide, mais usée par endroit (End +9) : Prix de rachat : 263 yus 

    Total vente : 28 + 263 = 291 yus

  • Demande d'expertise de la rune aoy.

------------------------------------------------------------------------


Détails des parchemins :

  • Force obscure : Vous sacrifiez un peu de votre énergie vitale pour attaquer plus fort (-1PV/lvl, for+3/lvl). Le gain de force dure lvl/2 tours.
  • Vision d'horreur : Avec ses fluides obscurs, le truand vous impose des visions abominables qu'il a puisé au fond de sa cible, et qui le font hurler d'horreur. Ces visions deviennent de plus en plus réalistes et pertinentes à mesure que le truand progresse dans l'utilisation du sort (un proche torturé, un viol, ou à l'inverse, si le personnage est d'alignement mauvais, des choses belles qu'il ne supporterait pas). Initiative-[lvl du sort/3], l'effet dure lvl/4 tours.
    (Sort de classe secondaire truand)
  • Communion des chairs : Le truand parvient à transférer la force vitale arrachée à son adversaire vers son propre corps, rétablissant les blessures qu'il a pu se voir infliger, à condition que la cible saigne. Cela provoque, pour la cible comme pour le truand, une insoutenable douleur, qui réjouira le lanceur du sort s'il est un tant soit peu sadique et masochiste. mag+2/lvl du sort, récupère [PV infligés]/2.
    (Sort de classe secondaire truand)


Merci d'avance !

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Multi : Erastos, Meraxès
Thème : Catacombae - Mussorgsky


Dernière édition par Daemon le Lun 4 Avr 2016 19:47, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: La "Grotte des affaires"
MessagePosté: Jeu 31 Mar 2016 17:17 
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Le marchand salive à la vue de ta commande et s'empresse de la satisfaire...

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Chibi-Gm, à votre service !


La règle à lire pour bien débuter : c'est ICI !
Pour toutes questions: C'est ici !
Pour vos demandes d'interventions GMiques ponctuelles et jets de dés : Ici !
Pour vos demandes de corrections : C'est là !
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