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 Sujet du message: Le Bochi (cimetière)
MessagePosté: Mar 28 Oct 2008 10:42 
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Le Bochi (cimetière)


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Les décès sont malheureusement monnaie courante dans un pays en guerre. Mais les morts ont droit à un repos paisible dans ce cimetière sacré. A l'entrée de celui-ci, un grand bâtiment dans la partie centrale est construite en pierre massive qui se prolonge en une cheminée richement décorée. C'est le crématorium, étape obligatoire dans les funérailles traditionnelles Ynoriennes. Plus loin, des rangées de tombes en colonnades sculptées sont le lieu de repos final, les cendres étant enterrées sous ces piliers ou casées dans les alcôves à leur sommet.

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 Sujet du message: Re: Le Bochi (cimetière)
MessagePosté: Mer 4 Juil 2012 19:41 
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A mesure que j'approche du cimetière, la nervosité restante dans mon coeur se dissipe. Quelques oraniens vont dans la même direction que moi, certains en tenue formelle, type kimono sombre, d'autres en tunique de toile humble. Quelques murmures sont perceptibles dans l'air, mais aucune parole distincte. Quelques personnes portent des baluchons clairs, contenant sans doute des offrandes pour les défunts. Etrangement, j'ai l'impression que personne n'amène de ces fameux bâtonnets d'encens, destinés à purifier symboliquement les tombes.

La ruelle laisse bientôt place à un chemin de dalles plates et grisées, avançant en ligne droite. Alors que je progresse, je passe sous une haute porte faite de bois, dont la peinture écarlate s'écaille en de nombreux endroits. Dès cet instant, je garde les lèvres closes. J'ai la sensation d'être entré dans un endroit où le respect et le silence sont des valeurs absolues. En mon for intérieur, je songe que ce ou ces pillards ne doivent pas ressentir la même chose.

Alors que j'avance, jetant par moments un coup d'oeil aux colonnades marquant l'emplacement des cendres, je remarque que certaines d'entre elles ont subi un mauvais traitement. La sculpture semble avoir été sauvagement martelée, et les morceaux repoussés pour dégager la dalle recouvrant les urnes. Je sais que le pillage de tombes est irrespectueux, mais pas au point de briser ainsi ce symbole. En y attardant un peu le regard, je me rends compte que la pierre est quelque peu recouverte de mousse par endroits. La profanation ne semble guère récente.

(Passons. Si cela ne peut rien m'apporter, je ne vais pas m'y attarder. Voyons... Il me faut trouver une personne susceptible de me renseigner.)

Bientôt, j'arrive aux portes d'un large bâtiment en pierres massives, coiffé d'une haute cheminée d'où sort une épaisse fumée. Le crématorium est évidemment en activité, et le fait que ce soit le milieu de matinée ne change pas grand-chose. Des visages graves sont présents en dehors et dans le bâtiment dans lequel j'entre aussi silencieusement que possible. Aux quelques regards que je croise, j'adresse un signe de tête respectueux. Peu importe la douleur ou la rancune présentes dans ces regards qui me transpercent, sans doute à cause de mon aspect demi-shaakt, je dois mener ma tâche à bien.

La pièce rectangulaire est éclairée par de nombreux lampions et lanternes, me permettant de chercher du regard mon objectif. Bientôt, je le trouve. Droit, le visage serein et compatissant, un ynorien à la pilosité grisonnante parle à voix basse à un oranien d'aspect plus jeune. Le premier porte une longue tenue cérémonielle, de la teinte des flammes. Manches longues, getas et chaussettes claires, corde tressée à la ceinture, il m'a tout l'air d'un homme respectable. Le jeune à ses côtés arbore un faciès presque innocent. Je ne lui donne guère plus de seize ou dix-sept années. Ses cheveux sont noués en un chignon au-dessus du crâne, et il porte une tunique sombre à manches courtes.

Longeant le mur, je me rapproche d'eux. Je suis ennuyé à l'idée de les déranger, mais je n'ai guère le choix, surtout si la vie d'un milicien est en jeu. Bientôt, le plus âgé me remarque et m'adresse un bref signe de tête. Je m'incline en réponse, avant de le voir donner des directives au plus jeune. Ce dernier s'esquive alors dans un couloir que je viens juste de remarquer face à moi. Le vieil ynorien me scrute ensuite un instant, devant baisser les yeux sur ma taille d'une tête inférieure à la sienne. J'en profite pour m'adresser à lui à voix basse.

"Bonne matinée à vous. J'aimerais vous poser quelques questions si vous m'y autorisez. "

"A quel sujet, jeune personne ?"

"La profa... L'irrespect envers certaines sépultures."

Je m'efforce de choisir mes mots avec attention, n'ayant pas envie de faire redouter aux personnes présentes la possibilité que la tombe d'un proche soit profanée. A l'air soucieux s'installant sur son visage, je pense que mon interlocuteur semble comprendre où je souhaite en venir.

"Je vois. Je vous demanderai de patienter le temps que les cendres soient remises à la famille."

Je ne peux qu'acquiescer et, croisant les bras, j'attends à ses côtés. Bientôt, le jeune homme en tunique revient dans la pièce, portant dans ses mains un plateau sur lequel repose l'urne cinéraire. Je sens mes yeux s'écarquiller un peu devant cette scène. L'objet présenté est magnifique. Il doit faire une trentaine de centimètres de haut, cylindrique s'élargissant au milieu, et peint d'un vernis noir et luisant. Ce qui attire mon regard n'est pas vraiment la beauté de la facture ou l'esthétique de l'urne, mais la présence de deux grands motifs argentés sur le corps. Le premier doit être l'emblème de la famille, que je peux voir sur les tenues, et l'autre est celui d'Oranan. Je n'ose pas imaginer la valeur en yûs de ce que j'ai sous les yeux.

J'entends discrètement l'ynorien à ma gauche m'adresser la parole.

"Magnifique, n'est-ce pas ? Incrustée d'argent pur travaillé par un artisan local."

Mes yeux violins glissent sur le profil de mon interlocuteur. Il a beau être impassible, son regard trahit une fascination mêlée d'une lassitude étrange. Il est vrai qu'en ces temps troublés, ce genre de spectacle doit se répéter régulièrement, si ce n'est quotidiennement.
Avec cérémonie, une femme âgée, mais admirablement coiffée au moyen d'un lot de baguettes brillantes, reçoit l'urne. Le stoïcisme ynorien dans toute sa splendeur. Elle va sans doute se rendre dans le jardin y pleurer cette personne. Est-ce que Père a fait la même chose lorsque Mère est décédée ? Sans doute.

Suivie par les membres de sa famille, l'oranienne sort du bâtiment. Un faible silence s'installe, que brise bientôt le ton amical du responsable des lieux.

"Bien. Je suis Terada Masahiko, en charge de ce crématorium, et voici Terada Hiroto, mon petit-fils. Vous aviez des questions, il me semble ? Allons, suivez-moi. Hiroto ?"

"Grand-père ?"

"Prépare-nous donc un peu de thé, veux-tu ?"

Le jeune homme acquiesce, puis disparait en quelques pas dans une pièce sur notre gauche. J'aurais pu refuser l'invitation de Masahiko, mais je ne veux pas prendre le risque de le froisser. L'important reste d'obtenir des réponses.


~Suite~

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Dernière édition par Kiyoheiki le Mer 4 Juil 2012 21:59, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Le Bochi (cimetière)
MessagePosté: Mer 4 Juil 2012 21:58 
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~3~


A la suite de Masahiko, j'entre dans la pièce, me déchaussant au passage. Derrière moi, le jeune Hiroto fait coulisser la porte en papier de riz tandis que j'observe l'endroit. Le sol est un plancher légèrement surélevé en bois, encadrant en son centre une dépression rectangulaire granitique. Dans ce creux bien protégé, quelques bûches crépitent sous une tige de métal. Sans doute est-ce là le foyer leur servant à préparer les repas. Les murs sont flanqués d'un mobilier sobre et élégant, entièrement d'un bois bicolore, noir et blanc. A ma gauche, plusieurs étagères sont fixées au mur, arborant des objets divers, allant du bol de bois à la lanterne éteinte.

Face à moi, de l'autre côté du foyer, j'aperçois un panneau coulissant, sans doute placard incrusté dans le mur. A ma droite, un bureau bas supporte quelques documents proprement ordonnés, et un nécessaire d'écriture. Ce n'est qu'en ayant ce meuble dans mon champ de vision que je remarque une discrète porte coulissante sur ce mur, donnant sans doute dans une salle attenante.

Je prends place à genoux sur un coussin beige lorsque mon hôte m'y invite. Il fait de même à ma gauche, puis esquisse un sourire auquel je réponds avec politesse.

"Puis-je vous demander qui vous êtes ?"

"Certainement. D'Esh Elvohk Kiyoheiki. Heureux de faire votre connaissance."

"Et qu'est-ce qui vous amène à vous intéresser à ces embarrassantes dégradations ?"

La question me semble sincère et mon honnêteté souhaite s'exprimer. Je ne compte pas tout dévoiler, mais pour l'assurer de ma bonne foi, autant lui donner quelques détails.

"J'effectue une tâche au nom de la milice d'Oranan. En vérité, il s'agit de mon épreuve d'intégration. "

"Mmhhh. Mais n'y a-t'il pas déjà quelqu'un s'occupant de cette affaire ? "

"C'est vrai, mais il semblerait que la tâche soit un peu plus complexe que prévue. "

Je m'interromps en voyant le jeune homme s'approcher avec des tasses, puis servir un breuvage à l'odeur délicate. Un autre parfum me parvient cependant aux narines, conduit par le léger mouvement d'air issu du déplacement de l'ynorien. Ce que je sens est assez fort, un peu acide, et peu familier. J'essaie de l'ignorer. Plaçant une main sous la tasse et l'autre sur le côté, je prends une gorgée de liquide.

Masahiko fait de même, laissant s'échapper un souffle serein. Ses yeux sombres se rivent aux miens.

"Que voulez-vous savoir au juste ?"

"Que pouvez-vous me dire sur les sépultures qui ont été vandalisées ?"

"Lesquelles ?"

"Comment lesquelles ?"

"Vous intéressez-vous aux pillages récents ou ceux d'avant ?"

Forçant mon visage à rester assez neutre, je prends une autre gorgée odorante, voyant du coin de l'oeil le jeune humain prendre place à son tour.

"Est-ce qu'il y a une différence ?"

"Oui, et pas une petite. Peut-être avez-vous vu l'une des colonnades à l'entrée ? Eh bien jusqu'au mois dernier environ, les pillages étaient brutaux comme celui-là."

"Ce n'est plus le cas ?"

Le vieil homme secoue négativement la tête, puis prend un air pensif. J'en profite pour jeter un regard à mon voisin de droite. Hiroto semble un peu tendu, et par moments, il scrute mon regard ou l'anneau de Sakuya à mon index. Sans doute est-il gêné par ma ressemblance avec les shaakts. Aussi, lorsqu'il me lance un énième regard, je le fixe et lui sourit amicalement. Un court instant gêné, il se met à scruter le feu tandis que son aïeul reprend la parole.

"C'est à croire que ceux qui font cela se sont rendus compte de la gravité de leur geste. Les colonnades ne sont plus détruites, mais les panneaux protégeant les urnes sont fracturés avec méthode. "

"Et les urnes ?"

"Disparues."

"Est-ce que vous pensez qu'il y a un lien entre elles ? Ou leurs propriétaires ?"

"Eh bien... Pas entre les familles, non. Elles n'habitent ni dans les mêmes quartiers, ni n'ont fait leur renom dans les mêmes activités. Par contre, elles sont toutes connues pour être financièrement aisées. "

Je tends mon oreille pointue à ses paroles. La théorie de la vengeance envers un nom semble écartée, laissant place à celle de l'appât du gain. Une lueur semble bientôt illuminer le regard de mon hôte.

"Oh ! Maintenant que vous m'y faites penser, si, elles ont un point commun. Toutes leurs urnes ont été faites par le même artisan que celle que vous venez de voir."

"Toutes ?"

"Tout à fait. Toutes avec ce vernis impossible à reproduire et cette qualité de filament d'argent. "

"Sont-elles à ce point particulières ?"

L'ynorien se lisse un instant le menton entre les doigts, et lève un regard rêveur au plafond.

"Ce n'est pas le terme que j'emploierai. Je dirais plutôt qu'elles valent leur pesant de yûs. Cet artisan est devenu la coqueluche de nombreuses fortunes, à tel point qu'il me semble que la valeur de chaque urne doit avoisiner les deux milles yûs. D'ailleurs, rien que le métal lui-même a une belle valeur."

Lentement, j'abaisse ma tasse. Je crois comprendre. Si ces objets ont un tel prix, nul doute que leur revente doit largement profiter aux voleurs. Toutefois, je fronce les sourcils. D'après ce que j'ai vu, ces objets portent non seulement l'emblème d'Oranan, mais aussi celui de la famille qui les ont commandés. J'ai beau retourner le problème dans mon esprit, j'en viens à une conclusion évidente. Aucun oranien un minimum réfléchi ne prendrait le risque d'être vu chez lui en possession d'une urne funéraire, surtout si elle est au blason d'un clan puissant.

De même, si c'est pour le métal que les pillages sont faits, que faire de ces urnes noires ? Les réduire en miette ? Les jeter à la mer ? Ce n'est pas le plus discret, mais cela reste possible. Une fois le métal obtenu, encore faut-il le fondre pour le réutiliser. Or, je doute que monopoliser une fonderie pour créer autre chose que des armes soit bien vu. La milice étant partout à Oranan, un tel trafic ne peut, de toute façon, pas passer inaperçu. Ce qui ne peut signifier qu'une chose.

Urnes entières ou motifs métalliques sont sans doute exportés en douce hors de la ville, voire hors de la République. Mais j'ignore si le milicien disparu en est venu à la même conclusion, et si tel est le cas, qu'a-t-il pu faire ensuite ?


~Suite~

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Dernière édition par Kiyoheiki le Sam 7 Juil 2012 00:17, édité 2 fois.

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 Sujet du message: Re: Le Bochi (cimetière)
MessagePosté: Jeu 5 Juil 2012 22:32 
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L'atmosphère calme de la pièce m'aide à me concentrer. Tout en finissant le contenu de ma tasse, je cogite. Quand bien même les pillards n'emporteraient qu'une urne, avec les patrouilles régulières de la milice, le risque est vraiment grand de se faire prendre. D'ailleurs, je suis quelque peu curieux concernant un autre point. Les tombes sont nombreuses, et parfois véritablement semblables. Comment font ces personnes pour trouver exactement celle contenant l'urne recherchée ? Repérage ? J'en doute. Faire des allées et venues sans but dans le Bochi serait sans doute remarqué. Peut-être en y faisant une marque ? Oui, mais à quelle occasion ?

Mes pensées sont interrompues quand Masahiko affiche une soudaine grimace, sa main se plaçant immédiatement contre son estomac. J'ai à peine le temps de comprendre ce qu'il se passe que le jeune oranien a bondi sur ses pieds, et s'est précipité en direction du placard à porte coulissante. D'un geste vif, trop même, il fait claquer la paroi et, en attrapant ce qui me semble être un pot à remèdes, son coude heurte un objet. Mes yeux violins suivent chaque mouvement, en particulier celui de cette forme inanimée sur le plancher. Cela ressemble à une pièce de cuir, un brassard en vérité.

Mes yeux se plissent quand je me rends compte que le dessin net qui y est incrusté est le symbole de la milice. Masquant ce que je viens de remarquer, je m'inquiète de la santé du vieil homme. Ce dernier vient de prendre une sphère odorante de son pot, et de l'avaler avec une gorgée de thé.

"Etes-vous souffrant ?"

Hiroto, d'une voix sèche et sévère, répond à sa place.

"Ulcère à l'estomac. Et ce ne sont pas vos stupides questions qui aident !"

J'écarquille brièvement les yeux, puis me reprends. Je ne peux pas deviner cela à son visage, après tout. Je reste silencieux tandis que le jeune homme retourne vers le placard. En apercevant l'objet de cuir, il se stoppe net. Brutalement même. Ramassant le brassard, il se tourne vers Masahiko dont le teint revient progressivement à la normale.

"Grand-père ? Qu'est-ce donc ?"

Un air calme peint les traits du vieil ynorien, qui se masse lentement l'estomac.

"Ah ! Le voilà donc. C'est un souvenir du temps où j'étais milicien. J'étais bien jeune à l'époque. Je suis certain qu'il ne me va plus."

Amusé, il tente de se parer du brassard qu'Hiroto lui tend. En effet, la taille est bien inférieure. J'ai un sérieux doute quant à ce qu'il vient de raconter. Non seulement je ne suis pas certain qu'il ait pu un jour porter cette pièce d'équipement, mais en prime, le cuir m'a l'air d'avoir été entretenu très récemment tant il m'apparait luisant. Mon imagination se met en route. Cela semble stupide, mais peut-être appartient-il en réalité au milicien que je recherche ? Mais pourquoi se trouverait-il là ? Cela ne serait logique que si au moins une de ces personnes est impliquée dans cette affaire de pillage.

J'ai du mal à le concevoir. Masahiko semble trop honnête et surtout trop inquiet des profanations pour en être l'auteur. Son petit-fils m'apparait trop attaché à son aïeul pour lui causer le moindre chagrin. Je dois faire fausse route. Il est temps d'aller voir d'un peu plus près les lieux des crimes.

"Pouvez-vous me conduire à ces sépultures récemment profanées ?"

"Bien entendu. Hiroto, passe devant, tu as ton encens à placer."

Sans dire un mot, le jeune homme s'empare de deux lots de bâtonnets de coloris distinct. L'un semble gris, l'autre légèrement bleuté. Tout en me redressant, détendant mes mollets, je patiente jusqu'à ce que ce brun sorte. Doucement, je m'adresse avec un pointe de curiosité à mon interlocuteur.

"Pourquoi deux lots différents ?"

"Une idée de mon petit-fils. Les familles sont déjà dans l'obligation de payer les funérailles, alors nous leur offrons l'encens. Les bleutés se composent d'ingrédients plus rares, et sont plus chers. Ils ont aussi une odeur qui persiste plus longtemps. Les familles marchandes apprécient de sentir la purification, même une semaine après."

Un doute m'envahit, me forçant à formuler une question simple.

"Seuls les clans les plus aisés y ont droit ?"

"Oh non. Mais l'élite a droit à deux bâtonnets."

Je profite de sa bonne disposition pour lui poser rapidement une autre question.

"Dites-moi. Un autre milicien est-il venu avant moi vous interroger sur cette affaire ?"

Les yeux sombres du vieil homme se rivent à mon visage, soutenant mon regard. Un bref instant, j'ai l'impression de le voir hésiter. Finalement, il détourne le regard en me donnant une réponse expéditive.

"Pas vu."

J'ai beau douter de ses dires, je n'insiste pas plus. Après avoir ramassé puis ajusté mon Fang Bian Chan, je laisse passer l'ynorien devant moi, et émerge à sa suite du bâtiment. Cette idée d'encens semble animée d'une bonne intention, et pourtant quelque chose me dérange. Déjà que l'odeur est forte, ajouter une seconde tige signifie presque planter un panneau indiquant "tombe de riche". Ma pensée se heurte à un pressentiment. Et si c'était le cas ? Si les vandales se servaient de la bonne volonté d'Hiroto pour cibler précisément les sépultures à ouvrir ? Cela n'est pas impossible, et si l'odeur persiste, pas besoin de passer trop fréquemment dans les environs.

Ou alors je deviens trop suspicieux. Cette mission me fait m'interroger, sans pour autant sembler me rapprocher du milicien que je recherche. A moins que Masahiko m'ait menti et caché des choses.

A la suite de ce dernier, je contourne le bâtiment, notant la présence d'une double porte en biais, semblant protéger un passage dans le sol. Remarquant sans doute l'expression curieuse sur mon visage, Masahiko prend les devants.

"Ouverture sur la cave, que l'on peut atteindre par une trappe à l'intérieur. C'est là que nous stockons le combustible nécessaire aux crémations. C'est malheureux, mais le crématorium est si souvent utilisé que nous entretenons le feu en permanence."

"Hum. Et par combustible, vous entendez quoi ? Amadou ? Bois sec ?"

"En partie, mais je pensais surtout au charbon. D'ailleurs, le livreur était censé nous en amener hier. "

"Cela doit faire une impressionnante dose. Je ne savais pas qu'il y avait une mine dans les environs."

"Une mine ? Non. Je le fais importer à mes frais depuis Kendra Kâr. Une vieille rancune envers... Mais cela n'a pas d'importance. J'essaie d'en garder un tas conséquent à la cave. Il est arrivé que le navire soit pris dans une tempête, et accuse un ou deux jours de retard. Vous imaginez sans doute l'embarras d'annoncer aux familles que leurs défunts doivent patienter ?"

J'acquiesce mais me fais silencieux. Au son des getas, j'arrive avec lui devant quelques tombes ouvertes. L'odeur de l'encens est restée forte, et je comprends maintenant que c'est également celle que j'ai repéré sur Terada Hiroto. J'ai réuni des informations assez intéressantes, mais elles ne peuvent m'aider à établir qu'une théorie. Je la garde dans un coin de mon esprit, puis propose bientôt à Masahiko de patrouiller les lieux, juste pour repérer d'éventuels individus suspects.

Amusé, cet honorable me confie un balai, pour me donner une certaine "couleur locale". Tout en débarrassant les dalles grises de feuilles, je jette des regards aux différentes personnes. Cependant, rien ne m'interpelle durant ces longues heures, même lorsque je partage le repas de mes hôtes hors du crématorium. Lorsque le soir tombe, je présente mes respects au duo oranien, et fais mine de partir. Arrivé à la sortie, je me glisse auprès de végétaux, et reviens sur mes pas. J'ignore s'il va se passer quelque chose ce soir, mais je ne veux prendre aucun risque.

(Voyons... Là, entre ces sépultures. J'ai une bonne vue sur le crématorium et sur ces tombes récentes.)

Un genou à terre, retenant d'une main ma chevelure noire, je scrute la nuit. Pendant une bonne heure, seuls quelques passants pressés traversent les rangs de pierre. Ma peau se hérisse sous le souffle de moins en moins chaud qui caresse ma nuque, mais je refuse de renoncer. L'attente est longue, et par moments je sens mes pensées se tourner vers oncle Masaya. Il doit se faire du souci pour moi à l'heure qu'il est. Je me donne une légère gifle, chassant cette image de mon esprit. Ce n'est pas le moment de se déconcentrer. Aussi discrètement que possible, je change d'emplacement, puis recommence à patienter.

Le temps me semble long, mais la chance décide de me sourire quand, se dessinant péniblement dans l'ombre, deux silhouettes approchent. L'une d'elle tient un petit objet rectangulaire éclairant faiblement la zone. Avec une rapidité confirmant mes doutes, elles se dirigent vers l'une des colonnades neuves, où Hiroto a du poser deux bâtonnets. Un doux bruit régulier me parvient. Je suis quasiment certain que l'un des deux êtres s'attaque au panneau en ce moment même. Lentement, camouflé par une sculpture, je tends la main vers la sangle retenant mon arme.
Que faire ? Aller chercher un lampion et les surprendre ? Je risque de les perdre de vue, sans savoir quand ils reviendront. Je ne peux pas non plus me jeter à corps perdu sur eux. Lutter ici serait trop délicat. Le mieux reste de les laisser faire, puis de les suivre jusqu'à leur cachette. Si le milicien a eu la même idée que moi, j'ai de bonnes chances de le retrouver ainsi.

Je constate bientôt que l'odeur de l'encens est véritablement forte, au point que j'en ai presque la tête qui tourne.
D'un coup, cette senteur devient si puissante que je réalise que quelque chose d'anormal se produit. Mon instinct de survie se manifeste, me criant de ne pas rester là.

Mais trop tard.

Au moment où je regarde par-dessus mon épaule, je me sais repéré. Une forme humaine abat brutalement quelque chose contre ma tête. La douleur me vrille le crâne, à un point tel que je ne sais pas comment je fais pour parvenir à me lever et à tenir debout. Un vague son de pas se rapproche, mais je n'ai pas le temps de réagir. Un violent coup m'est asséné dans le ventre. Souffle coupé, tête meurtrie, je m'affale au sol. Je ne sais pas comment je parviens à ne pas perdre immédiatement connaissance, mais cela me permet de me rendre compte que je suis trainé sur les dalles de pierre. Je devine un vague bruit de gonds.

Et puis, c'est le trou noir.


~Suite~

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Dernière édition par Kiyoheiki le Ven 20 Juil 2012 20:39, édité 5 fois.

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 Sujet du message: Re: Le Bochi (cimetière)
MessagePosté: Ven 6 Juil 2012 15:46 
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Combien de temps s'est écoulé ? Quelques instants ? Quelques heures ? Je penche davantage pour une poignée de minute quand je discerne difficilement devant moi le mouvement de mains resserrant un lien autour de mes poignets. La douleur revient brutalement, mais un sursaut de volonté m'empêche de faire le moindre bruit. Je perçois la colère monter. Elle n'est pas dirigée vers ceux qui m'ont agressé, mais envers moi-même. Comment ai-je pu me laisser surprendre ? Inspirant lentement par le nez, je sens un tissu frotter contre mon visage. Un bâillon ? Sans doute. Et ce poids dans mon dos ? Mon arme ? Possible.

L'endroit est faiblement éclairé, mais assez pour que je vois des ombres projetées sur le mur clair. Evitant de remuer, je tends l'oreille à des murmures proches. Parmi ceux-ci, je crois reconnaitre une des voix.

"C'est quoi ça ? Un shaakt ?"

"Non, enfin c'est... C'est l'apprenti milicien qui furetait au Bochi aujourd'hui."

"Un app... Bon sang ! Pourquoi tu n'as pas essayé de nous prévenir ?"

Une voix au timbre plus doux et aigu coupe soudain la parole, chargeant l'atmosphère déjà peu agréable.

"Silence ! Réfléchis un peu ! Si ce type est encore là, c'est qu'il a déjà des soupçons. Tu ne crois pas que voir Hiro' s'esquiver n'aurait fait que confirmer ses doutes ?"

"Pas faux. Mais on fait quoi maintenant ? T'es sûre qu'il ne nous écoute pas ?"

"T'as qu'à t'en assurer."

Je perçois un son proche d'un grommellement, mais pas un bruit se rapprochant de moi. J'en profite pour tenter de savoir où je suis. J'ai la sensation d'être dans un endroit clos et, pas loin de mes pieds, j'aperçois un monticule sombre. Un tas de charbon ? Est-ce que je serai dans une cave ? Impossible... Mais si j'ai bien entendu, alors le jeune Hiroto semble impliqué dans cette affaire. Ce qui signifie que je suis sous le crématorium, dans leur réserve de combustible.

D'un coup, l'une des ombres se fait plus petite, et le son de bottes résonne. Une main gantée attrape mon yukata, tandis qu'un poing fermé s'abat contre mon visage. La sensation est si vive que j'ai l'impression de sentir ma pommette se briser sous l'impact. Prenant sur moi, je ne laisse échapper qu'un bref souffle, bridé par le tissu. Je cherche une explication à ce geste quand la voix féminine et posée s'élève.

"Un bon coup dans la tempe, et monsieur le gêneur fait un joli somme. Problème réglé. Parlons affaires."

"Tu es sûre qu'il..."

"Tu doutes de moi, petit ?"

Je ne comprends pas. Cette femme m'a frappé, mais loin de la tempe comme elle l'indique. C'est à croire qu'elle a délibérément manqué son coup pour me laisser un temps de répit. J'en profite pour tendre courageusement et posément l'oreille. Je vais peut-être enfin comprendre ce qu'il se passe.

"Justement, à ce propos... Vous ne pensez pas qu'on en a assez fait ?"

"Qu'est-ce que tu veux dire ?"

"Cela fait des semaines qu'on fait parvenir ces urnes hors de la République. Le client devrait en avoir suffisamment, non ?"

"J'en doute."

"Tant que cette tête de brok'nud d'artisan refusera de vendre à des non-ynoriens, je pense qu'on aura encore pas mal de travail à faire. Ce kendran doit se faire un bon paquet de piécettes en revendant tout cela."

"Tu ne vas pas me dire que tu regrettes ces yûs, hum ? Pense à ce vieillard malade."

"J'y pense... Mais je refuse. Je ne peux pas continuer à voir grand-père souffrir à cause de nos actes."

"Tu crois avoir le choix ? Tu es dans ce trafic avec moi, euh, nous, jusqu'au bout."

"Arrête de lui faire peur. Ecoute petit, je comprends ta réticence. On n'a qu'à convaincre le contact d'en embarquer un peu plus en une fois, et tu seras tranquille pendant un moment, cela te va ?"

L'ombre du mur semble acquiescer, puis un petit silence s'installe. Le trio se meut finalement, dégageant des morceaux calcinés noirs du monticule. Je retiens mon souffle en apercevant l'éclat luisant du métal argenté. J'ai compris. Voilà pourquoi il est impossible de retrouver ces urnes. A chaque pillage, elles sont soigneusement dissimulées dans le tas de charbon. Hiroto étant le seul des deux hommes à pouvoir descendre, aucun risque que Masahiko ne découvre la supercherie par accident. Enfin, s'il n'est pas impliqué. Il a pourtant l'air honnête, et véritablement touché par les pillages. Mais dans ce cas, n'a-t-il vraiment pas vu le milicien disparu ou n'était-ce qu'un mensonge ? Pourquoi ? Je laisse temporairement de côté cette question.
Logiquement, l'homme que je ne reconnais pas a peut-être quelque chose à voir avec la livraison du charbon.

Quoi de plus anodin qu'un livreur de charbon tirant son chariot ?

Je tressaille quand la présence du trio se fait plus imposante. Le danger de ma situation me frappe plus fort que le coup de poing précédent. Me voilà seul, à leur merci, incapable de me défendre ou de faire le moindre bruit. Je ne dois pas flancher. Je m'oblige à rester calme et à attendre une occasion. En attendant, je bouge un minimum, cherchant à détendre mes liens. Je me fige quand leurs voix s'élèvent.

"Et lui ? On en fait quoi ? "

"Il n'y a qu'à s'en débarrasser."

"Eh ! Je pille peut-être des tombes, mais je ne tue personne de sang-froid."

"Et ça se prétend un homme, hein ? J'aimerais voir ta tête face à un orque."

"Grrr."

"Passe-moi une dague."

Pas après pas, la femme se rapproche et pose un genou dans mon dos. Sa main gantée se plaque contre mon visage, me maintenant la tête immobile. Mon coeur se met à battre avec la rapidité d'un cheval au galop. J'imagine déjà la sensation du métal froid contre ma peau, l'adrénaline se ruant dans mes veines. La peur me noue l'estomac, et pourtant je scrute comme je le peux ce visage penché sur moi. D'ailleurs, il se rapproche peu à peu. Brièvement, je perçois un ordre à voix très basse.

"Ne bouge surtout pas."

En quelques instants, je sens quelque chose glisser entre la dague et ma gorge, puis la pression de l'arme s'exercer dessus. Un son de déchirure précède le timbre aigu d'un liquide jaillissant. L'odeur est amère et ferreuse, la sensation glaciale, mais c'est surtout l'incompréhension la plus totale qui me submerge. Je demeure immobile, tentant de savoir ce qu'il se passe. La voix féminine s'élève.

"Rha ! Saleté ! Je m'en suis fichu plein la main ! "

"Urk..."

"Hum... Et tu vas en faire quoi maintenant ?"

"On est dans un crématorium, non ? Cela me parait évident. Allez, on se retrouve à l'entrepôt treize, et en on finit avec ce chargement."

"C'est le quinze, pas le treize."

"Moi et les nombres. Filez, sauf si vous tenez à me voir le dépecer d'abord ?"

Les gonds de la double porte grincent légèrement, et le silence reprend ses droits. Lorsque tout est enfin calme, la dague teintée plonge en direction des liens de mes poignets. Les fibres commencent à lâcher alors qu'elle m'adresse la parole, toujours à voix basse.

"Imbécile ! Tu te rends compte de tout ce que j'ai du faire pour te sauver la mise ? Ah les apprentis ! Ecoute-moi bien. Mon nom est Uzuuma Akiko, milicienne d'Oranan. Attends que je sois partie, puis détache-toi et retourne à la milice. Pas la peine d'envoyer qui que ce soit avant l'aube. Je fais de ces pillards une affaire personnelle, c'est bien compris ? "

Incrédule, je reste silencieux sous mon bâillon, attendant qu'elle finisse de rompre les liens.

Ce qu'elle ne fait pas.

Au lieu de cela, lorsque la moitié de la corde a cédé, elle plante la dague dans une bûche proche et fait demi-tour. Ses pas rapides s'éloignent, précédant le son des portes que l'on referme.

(Bon sang, je ne m'y serais jamais attendu. Allons, ce n'est pas le moment de rester planté là. Je dois la ramener en un seul morceau, que cela lui plaise ou non.)

Après de longues minutes, bien trop à mon goût, je parviens enfin à casser ce qui me retient, et use de la dague pour trancher les entraves de mes chevilles. Je n'ai pas de temps à perdre. Poussant brutalement les portes, je jaillis de la cave, repérant les colonnades du Bochi. Immédiatement, faisant claquer mes getas au sol, je me hâte en direction du port, et surtout de cet entrepôt quinze.


~Suite~

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 Sujet du message: Re: Le Bochi (cimetière)
MessagePosté: Sam 2 Mar 2013 15:18 
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Lentement, j'inspire l'air frais et parfumé d'encens de ce début d'après-midi. Mes yeux violets sont tournés vers les nuages d'un blanc cassé qui survolent les lieux. L'atmosphère du Bochi semble encore plus tourné vers le recueillement que d'ordinaire. Mis à part un léger sifflement dans les branches végétales, pas un son ne se fait entendre. Je ne pensais pas devoir revenir ici avant longtemps, mais je me fourvoyais. Près de moi, de nombreuses silhouettes se déplacent, certaines aux visages familiers, d'autres non. Une par une, ces personnes viennent me saluer, m'offrant des expressions graves. Je me sens un peu mal à l'aise, mais ce n'est pas la faute de ma tenue. Tout comme les ynoriens venus en ce jour, j'arbore un kimono d'un blanc impeccable, des zoris dans le même état, et pour une fois, j'ai natté ma longue chevelure ébène.

La famille et les connaissances de Masaya se regroupent devant l'entrée du bâtiment, m'adressant des regards neutres ou navrés. Sur ma droite, je redécouvre les faciès des Terada, grand-père et petit-fils. Je suis content que la sanction appliquée à ce dernier n'ait pas été trop lourde, et que les pillages des urnes aient cessé. Mais l'heure n'est pas aux réjouissances, et l'étau que je ressens dans ma poitrine en est la preuve. Pourtant, je dois patienter et être brave, fier, comme tout ynorien se doit de l'être en de telles circonstances.

Un silence soudain frappe le groupe, m'incitant à reporter les yeux en direction d'une silhouette empreinte de noblesse. Je m'incline avec respect face à mon demi-frère, le dirigeant de la famille de mon oncle. Ce dernier reste stoïque, puis sa main vient lentement s'apposer sur mon épaule. Quand nos regards se rencontrent, j'y décèle une grande compassion. Mes yeux me piquent, mais je retiens mes larmes. Aucun citoyen de la République ne peut se permettre de déshonorer un être cher en pleurant à sa cérémonie. Vêtu d'un lourd kimono clair, et paré d'une coiffe élégante, Kawarin Toranosuke replace ses mains l'une sur l'autre, et s'engage dans le bâtiment. Il est bientôt suivi par le responsable du crématorium.

Une nouvelle fois, j'inspire lentement, apercevant bientôt une haute stature s'avançant dans ma direction. Le visage neutre du milicien Tanigura Hidate se pare d'une douleur et d'une inquiétude visible tandis qu'il s'approche de moi. Voyant qu'il n'arrive pas à prendre la parole, je m'incline légèrement, et le fais en premier.

"Merci d'être venu."

Son regard sombre balaie mon visage quelques instants, tandis que les ynoriens de la maisonnée Kawarin entrent peu à peu dans la pièce. Il effleure le chignon haut qu'il porte dans un geste réflexe, finissant par m'adresser la parole à voix contenue.

"Toutes mes condoléances, Kiyo'."

Une nouvelle fois, je m'incline dans sa direction, mes émotions devenant presque impossibles à différencier. Suite au signe du maître de cérémonie, j'entre à mon tour dans la salle. Des coussins sont disposés de part et d'autre de l'axe central, où l'objet de bois a été déposé plus tôt. Maître Toranosuke me fait signe, m'indiquant la place à ses côtés. J'acquiesce lentement, venant m'agenouiller à sa droite, puis posant mon regard sur la forme drapée dans son linceul. J'aimerais prier, mais mon esprit est vide, et je ne parviens pas à savoir vers quelle divinité me tourner.

Bientôt, après être passée dans mon dos, la jeune officiante de Gaïa que j'ai connu quelques temps auparavant vient se placer près de la tête de mon oncle. Elle m'adresse un regard compatissant, puis indique à quelques personnes de fermer les portes de la salle. Elle dépose doucement trois objets au sol, puis se redresse pour faire face à l'assemblée. Les yeux mi-clos, rivés au tissu enveloppant mon parent, je ne l'entends qu'à peine parler de la vie de Masaya. Elle prie pour lui, tout en énonçant ses qualités, et ce que son oeuvre d'herboriste a fait pour bien des oraniens. Elle le décrit comme sérieux, doté d'un esprit bienveillant et secourable. Je ne peux qu'être d'accord, mais ne manifeste rien. Je sens bientôt peser sur moi quelques regards quand la prêtresse cite sa décision de me prendre sous son aile, et d'avoir fait de moi un jeune ynorien honorable.

J'ai un peu de mal à me concentrer, mais je me ressaisis quand l'office se termine, et qu'il faut des bras pour placer le corps dans le four crématoire. Je retourne ensuite à ma place, gardant les mains sur les cuisses. Je fais de mon mieux pour demeurer impassible, mais ne peut m'empêcher d'esquisser un sourire devant le nombre de personnes qui se sont déplacées pour Masaya.

(Comment aurait-on pu ne pas l'apprécier ?)

Impossible d'appréhender le temps passé ici, l'esprit perdu, mais bientôt Terada Hiroto fait son apparition, apportant avec lui une riche urne décorée du blason des Kawarin. Maître Toranosuke la prend avec révérence, puis il se tourne dans ma direction. Sa voix, grave et solennelle, retentit dans la pièce, mettant fin au doux brouhaha des conversations discrètes.

"Kawarin Masaya a perdu sa mère depuis longtemps. Il avait fait le lourd choix de ne pas prendre de compagne. C'est donc à toi, D'Esh Elvohk Kiyoheiki, son fils, que reviennent la responsabilité et l'honneur de procéder au Hosoi."

Malgré moi, mon visage laisse paraitre un brin de surprise. En réfléchissant un peu, je me reprends. Il a raison. De toutes les personnes présentes aujourd'hui, je suis celle qui le connais le mieux, et dont le coeur doit être le plus déchiré. C'est avec humilité que je reçois de ses mains l'urne cinéraire. Elle est glacée, et le froid ressenti commence à remonter le long de mes doigts. Je serre lentement l'objet contre ma poitrine, m'incline lentement en une salutation respectueuse, commençant à réaliser ce qu'il se passe. Avec autant de cérémonie que pour l'urne, Kawarin Toranosuke me présente une lame aiguisée, décorée de leur blason sur le pommeau. Je me doute qu'il s'agit juste d'un emprunt, et que la cérémonie achevée, il me faudra la lui rendre.

Discrètement, Terada Masahiko m'indique le passage près de lui, devant déboucher directement sur le Jardin des morts. À son expression peinée, je réponds par un faible sourire. Je dois tenir bon, au moins jusqu'à ce que le dernier rituel soit mené à son terme. Je n'ai jamais vu la façon de procéder, mais les quelques explications fournies par le responsable des lieux sont amplement suffisantes.

Ma main se serre sur l'urne froide au diapason de ma poitrine, tandis que je disparais derrière les hautes haies du jardin. Je m'avance sans but précis, mes yeux ne m'apportant que des images vagues de chemins de cailloux blancs. Je finis par découvrir une petite table de pierre rectangulaire, accolée au fond d'une impasse, le long d'un mur végétal. L'endroit est calme, isolé, et il m'interpelle.

C'est ici, seul, que j'accomplirai les derniers gestes.



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Dernière édition par Kiyoheiki le Mer 6 Mar 2013 16:56, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Le Bochi (cimetière)
MessagePosté: Mer 6 Mar 2013 16:55 
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Agenouillé devant la table minérale, je demeure de longues secondes immobile. Mes yeux se ferment lentement, tandis que je me remémore les conseils prodigués. Silencieusement, j'attrape ma natte, faisant courir mes doigts sombres sur une chevelure qui l'est aussi. Quand j'estime être parvenu au-dessus de mes épaules, je rouvre lentement les paupières, braquant mon regard violet droit sur l'urne. Main gauche tenant ma natte, main droite serrée sur la lame, j'inspire brièvement puis porte le coup. Le fil de l'arme est aussi tranchant qu'un rasoir, coupant nette ma chevelure.

Lentement, mon ruban doré glisse de la longueur restante sur ma nuque, venant choir sur mon épaule. Je me rends compte que la natte s'est relâchée, m'obligeant à séparer les cheveux pour les tresser de nouveau. Mon esprit est vide, au point que j'ai l'impression de ne pas être l'auteur de mes gestes. Mes mains tremblent un peu, tandis que j'enroule cette cordelette de crins noirs autour du couvercle de l'urne. Une fois ma tâche terminée, je repose l'arme et mon ruban sur la table de pierre, fixant sans le voir cet objet froid.

Mon coeur est confus. Je ne sais pas quoi penser, ni ce que je dois faire. Distraitement, je regarde le bout de tissu qui a servi si longtemps à retenir mes cheveux. Maintenant que j'y songe, il s'agit d'un cadeau de Masaya. Je le revois encore, émergeant d'un coup dans la pièce d'eau pendant mes ablutions, et tenant ce dernier triomphalement. C'était la première fois qu'il agissait de la sorte, et cette habitude d'entrer sans prévenir ne lui est jamais passée. J'esquisse un sourire tendre à ce souvenir.

Ma mémoire me rapporte d'instant en instant la vie que j'ai eu à ses côtés. Mes premiers essais en préparation de baume, ses conseils et sa fierté quand je parvenais à un résultat. Je me souviens qu'à ce moment-là, il avait l'habitude de... Mes pensées se figent et mon coeur se serre tandis que j'élève la main, venant lentement tapoter mon crâne. Toujours là cette paume. Synonyme de chaleur, de réconfort et d'approbation. Un léger souffle de vent me fait frissonner. Je réalise alors à cet instant que c'est terminé. Jamais plus je n'entendrai sa voix puissante et joviale. Sa silhouette d'endormi ne vivra plus que dans ma mémoire et mon coeur. La chaleur de son affection ne pourra plus m'être offerte.

Ma vue se brouille, ma gorge se noue. Avant même que je ne le réalise, mon visage est inondé de larmes. Je veux les arrêter, je veux me reprendre et trouver du réconfort. Mais auprès de qui ? Masaya était ma seule famille. Vers qui me tourner à présent ? La solitude me submerge, causant un nouvel afflux de larmes.

(C'est impossible. Non, c'est impossible. Je ne peux pas y croire. C'est juste un cauchemar... Juste...)

Quand l'urne entre dans mon champ de vision, la réalité de la situation me frappe de plein fouet. Mes pensées s'embrouillent, ma vue se trouble et mes sens deviennent inutiles. Je ne sais plus ce que je vois, ce que j'entends ou ce que je ressens. Il n'y a plus que la peine et la douleur. Masaya est mort. Mon oncle s'est éteint, et ce fait tourne en boucle dans mon crâne.

"Papa ! Pourquoi ? Pourquoi ne m'as-tu rien dit ?"

Poings serrés sur les cuisses, je tremble de tout mon corps, déchiré par la douleur de sa perte. L'impuissance me submerge. La tristesse côtoie l'incompréhension et la culpabilité. Entre deux hoquets, je lève les yeux au ciel, laissant mes sanglots s'échapper sans retenue.

"Gaïa... Dame de... Lumière... Pourquoi m'avoir confié ce... Don... S'il est impuissant... À sauver les êtres que j'aime ?"

Ma voix se brise sur les derniers mots. Je ne sais pas si je vais parvenir à trouver la force de reprendre le cours de ma vie. Mon existence entière tournait autour de mon oncle. Mon instruction, la boutique, mon rythme de vie et... Mes limites. Je regarde l'urne avec une légère anxiété. Pendant un bref instant, la pensée de fermer la boutique pour ne me consacrer qu'à la milice m'effleure. Lentement, j'extirpe un mouchoir de ma manche, tapotant mon visage.

Non, je ne peux pas faire ça. La boutique est mon foyer, et un endroit important pour le voisinage. Ce serait égoïste, sans coeur, et ce n'est pas ce que Masaya voudrait. En revoyant son expression réjouie lorsqu'il parlait à ses clients, une nouvelle vague de larmes ruisselle. Je ne résiste plus et laisse mon être exprimer son chagrin. Des sons réguliers et déchirants se font entendre, mais il me faut bien une dizaine de minutes pour comprendre que c'est moi qui en suis l'auteur. Ma blessure au coeur est béante, causant une douleur infinie. Je suis certain que peu importe le temps que je resterai au Bochi, jamais je ne me remettrai complètement.

Je culpabilise. Moi qui me targue d'être capable de guérir, que ce soit par les plantes ou la magie, j'ai été incapable de sauver mon parent. La leçon est si cruelle que j'en viens presque à accuser les divinités que je respecte. Pourtant, je parviens à m'en abstenir. Il est trop tard. La seule chose que je puisse faire est de garder cet échec en tête. Je suis convaincu que c'est pour me punir de mon arrogance que mon oncle m'a été pris. Silencieusement, le visage inondé et assombri, je prie encore et encore.

Lorsque je sors du jardin, le coeur vidé de tout mon chagrin, la soirée est déjà bien avancée. Je frissonne un peu en sentant un souffle de Rana effleurer ma nuque. Cela fait si longtemps que mes cheveux sont longs que j'avais oublié la sensation de ne les avoir qu'aux épaules.

(Que de changements en si peu de temps.)

L'urne serrée sur la poitrine, je me redresse et affiche ma surprise quand je me rends compte que le milicien Tanigura Hidate m'attend, assis au pied d'un arbre. Quand il me voit, il se relève vivement, époussète sa tenue, et vient se planter face à moi. Son visage a beau être stoïque, son regard en dit long sur son inquiétude.

"Est-ce que... Est-ce que tu m'as attendu ? Tout ce temps ?"

À mes deux questions, le grand ynorien opine. Je sais qu'il n'a rien à y gagner. Je ne suis pas riche, ni vraiment important. La seule raison que j'y vois est un certain attachement pour moi. Je ne peux pas vraiment cacher mon intérêt quand ce grand gaillard, d'ordinaire silencieux, prends la parole de lui-même.

"Masaya était quelqu'un de bien... Pourtant les autres sont partis dès qu'ils ont pu. Quand j'ai vu ça, j'ai décidé de rester là."

Jamais je ne l'ai entendu auparavant aligner autant de mots. Toutefois, fatigué par mes pleurs, je ne peux que m'incliner avec gratitude. Il ne faut guère que quelques minutes de plus pour que l'urne cinéraire rejoigne la tombe familiale des Kawarin, et que la lourde sculpture qui en marque l'emplacement soit remise en place. Je dois reprendre ma vie, même si cette tâche va être difficile. En regardant mon camarade milicien, je le devine réticent à me laisser seul, mais c'est son expression, quand il fixe l'arme acérée, qui trahit le plus son inquiétude.

Du revers de la main, je retire quelques traces de mon kimono blanc. Mes yeux sont chauds, et je sais déjà qu'ils auront gonflé si je n'y applique rien bientôt. J'offre un sourire un peu faible à l'ynorien.

"As-tu un peu de temps devant toi ?"

Il acquiesce. Sans me poser la plus petite question, il m'emboite le pas en direction de la boutique. Je n'ai pas très faim ni soif, mais je veux remercier Hidate pour son geste. De plus, je crains que rester seul trop vite ne fasse que me briser davantage. Quand bien même je ne pleure plus, je suis loin de la guérison.



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 Sujet du message: Re: Le Bochi (cimetière)
MessagePosté: Mar 4 Oct 2016 13:23 
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Il passa sous l'arche du Bochi et pénétra dans le cimetière. Contrairement au reste de la ville, l'endroit était désert et silencieux. Le soleil avait à peine commencé sa descente dans le ciel, mais la chaleur risquait encore de prendre de l'ampleur. Marthalion releva la tête et entreprit de faire une natte avec ses cheveux, révélant ses oreilles pointues et sa cicatrice à l'arrière de la tête. Il était vêtu de vêtements simples, sa tenue de voyage qu'il avait ramené de Cuilnen ainsi que d'une cape noire qui pouvait cacher son visage en cas de besoin, et ne portait pas ses armes, qu'il avait laissé à l'Auberge des Hommes Libres où il logeait depuis peu. S'il était venu dans le cimetière, c'était pour une raison précise : trouver une trace, n'importe laquelle, de l'existence d'une éventuelle famille de son côté paternel.

Une fois qu'il eut terminé, Marthalion passa la torsade devant son épaule et s'avança dans le Bochi. Il aperçut quelques personnes qui rentrèrent dans ce qui semblait être le crématorium. Curieux, il s'en approcha en essayant de ne pas trop attirer l'attention, et s'arrêta devant la porte du bâtiment. Elle était restée ouverte. A l'intérieur, il vit les individus se réunir autour d'un grand cercle, d'où sortaient des flammes qui dansaient et dont la fumée s'envolait vers le ciel en volutes noirs qui étaient annonceurs de la chose : quelqu'un était incinéré. Ils étaient tous habillés en blanc, créant un certain contraste avec le reste de la scène. L'un d'entre eux portait un bâton de bois avec un cèdre taillé en son bout. Un responsable de l'office, sans aucun doute. Ses lèvres s'ouvraient et se fermaient silencieusement, murmurant sûrement une quelconque oraison funèbre.

Marthalion s'adossa contre la lourde porte de pierre et attendit que la cérémonie fut terminée. Les minutes s'allongèrent, puis devinrent des heures. Les nuages firent leur apparition, et l'air se fit plus lourd. Alors que Marthalion commençait à se demander s'il ne ferait pas mieux de s'en aller, les personnages sortirent de la salle. Tous des humains, des vieux, des jeunes, des petits, des grands. Mais ils partageaient quelque chose d'autre que la race : la même expression faciale, figée sur des yeux vides, des teints blafards. Aucun d'entre eux ne disait mot.

Ils étaient suivis par l'homme au bâton. C'était un vieillard en habits blancs, les yeux à demi-clos, la peau marquée par le temps. Marthalion l'interpella :

" Excusez-moi..."

L'ancien s'arrêta, puis remarqua la présence du demi-elfe :

" Mon garçon, je ne vous avais pas vu. Que puis-je faire pour vous ? "

" Sauriez-vous m'indiquer où se trouve l'alcôve de Lyam Yuwan ? "

Devant l'air méfiant de son interlocuteur, Marthalion rajouta :

" Il s'agit d'un vieil ami. "

" Je vois. J'aurais été étonné qu'il fasse partie de votre famille avec vos oreilles. Venez, je vais vous y mener. "

Le vieillard partit devant. Le semi-elfe leva les yeux au ciel : même dans une ville où les deux races étaient présentes, certaines personnes rechignaient toujours à vouloir accepter le fait qu'un homme et un elfe puisse avoir un enfant. Marthalion s'étira, puis emboîta le pas au maître des offices qui marchait en s'appuyant sur son bâton.

Au bout d'une trentaine de mètres dans l'une des allées, le duo bifurqua à droite. Ils débarquèrent dans la partie du cimetière qui étaient réservée aux combattants de toute sortes, qui s'étaient battus pour préserver le royaume d'Ynorie des invasions.

" Juste après cette colonne, à droite. Vous m'excuserez, on m'attend autre part. Et faites attention à l'encens ! " lança le vieillard en s'éclipsant.

Marthalion avança dans l'allée déserte, puis s'arrêta à l'endroit indiqué. Un petit carré de marbre brun, simple mais joli, marqué des armoiries de la ville et de la milice, était posé devant lui. Aucune trace d'un hommage, ou d'une personne qui serait passée récemment déposer de l'encens. Une épitaphe stipulait :

Lyam Yuwan.

L'éclair d'argent dans la tempête d'acier.


Marthalion l'avait enfin retrouvé. Il n'avait plus revu le nom de son père écrit depuis la mort de ce dernier. Igalia était partie sur le champ... Mais il s'agissait de mauvais souvenirs qu'il ne voulait pas raviver. Il s'agenouilla devant la tombe, et y déposa une plume. Ce n'était pas grand chose, mais pour le défunt père et son fils, cela avait beaucoup d'importance. Marthalion resta encore à genoux quelques minutes, fixant la tombe de son père. Des bruits de pas le forcèrent à se relever. Il ne voulait pas donner l'impression d'avoir des liens forts avec un humain. C'était le groupe qu'il avait croisé à la sortie du crématorium, avec à leur tête le vieillard au bâton. Deux enfants au milieu du cortège tenaient une boîte en chêne massif. Sûrement les cendres de la personne qui avait été incinérée plus tôt. Marthalion décida de ne pas rester. Il avait d'autres affaires à régler.

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 Sujet du message: Re: Le Bochi (cimetière)
MessagePosté: Lun 5 Déc 2016 19:44 
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Une fois arrivée au Cimetière d’Oranan, je marche entre les tombes afin de me rendre dans le coin réservé à notre famille. Une tombe est à l’écart des autres, ornée de décorations, avec un nom écrit en or. Kazue Kusubarachi, première Héritière des Kusubarachi, femme d’exception. Une phrase est marquée en dessous, en lettres d’or :

« Sois fier, Héritier. Tu ne peux pas échouer. »

Mon ancêtre a l’art et la manière de faire naître un écho en moi. J’ai toujours eu l’impression qu’elle nous regardait. D’ailleurs, l’on dit qu’elle vit toujours dans le pendentif, ou du moins son âme.

En regardant la tombe de plus près, je vois le symbole de la Maison Kusubarachi, une arme dans une volute de fumée. J’ai toujours aimé ce symbole. Je touche les lettres d’or, pour finir par m’agenouiller devant la pierre. Joignant mes mains, je commence à prier.

- « Kazue…guide-moi s’il te plaît, toi qui est sage, toi qui as su guider notre famille, toi qui a été la première Héritière. Protège-moi de là où tu es, Kazue. Aide-moi. »

Le vent souffle doucement autour de moi, je suis concentrée, faisant abstraction de tout autour de moi. Cela m’absorbe et pourtant c’est si naturel.

- « Sois fière, mon Héritière. Tu ne peux pas échouer, Hisaya. »

La voix féminine qui vient de résonner, apportée par le vent, irréelle, est celle de Kazue. Je ne l’ai jamais entendue, et pourtant je le sens. Je sais que c’est elle. Je le sens là, dans ma poitrine. Je baisse la tête, m’incline et me relève pour repartir en sortant du Bochi. Si mon ancêtre me protège, alors il n’y a aucun doute, je réussirai. Peu m’importe s’il s’agit d’une hallucination, je sens qu’elle me protège.

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Multi de Yuélia.


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