L'Univers de Yuimen déménage !


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 Sujet du message: Re: Les habitations
MessagePosté: Sam 3 Sep 2011 17:31 
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Dans les rues, vers chez Eiko.


Je suivis Eiko dans un entrelacs de ruelles qui me parut infini tant la fatigue prit possession de mon corps. Une demeure couverte de végétation s'offrit à mes yeux, Eiko en ouvrit le portail et nous nous dirigeâmes vers la porte. Il fouillât un instant dans sa poche avant d'en extraire une clef qu'il plaça dans la serrure avant de la faire pivoter. Il poussa lentement la porte et me laissa entrer en première. Les ténèbres m'enveloppèrent, douces et protectrices elles caresser ma peau comme un appel au sommeil, sommeil que je désirais maintenant plus que tout. Deux petites lueurs virent briser la volupté du noir, accompagnées de pas lourds, ceux de Eiko, lui aussi engourdi par la fatigue. Le jeune homme tendit vers moi une bougie de cire blanche, parfait contraire de tout ce à quoi me faisait penser celui qui la tenait. Eiko était aussi sombre et secret que mon Maître. Et si ces yeux, d'un bleu aussi intense que les glaces de Yuia, inspiraient la confiance et la pureté, son âme, elle, était aussi noires que la magie de Thimoros.

Je perçut en lui un conflit interne qui le contraignit à prendre un choix lui déplaisant. Il me regardait avec insistance avant de me faire signe de le suivre. Il m’entraîna dans un escalier - encore... - que nous gravîmes tant bien que mal. Arrivés en haut, Eiko désigna une salle dans laquelle je pénétrai. Il resta dans l'encadrement de la porte et m'expliqua, à contre coeur, que c'était sa chambre et que je dormirai dans celle-ci. Il quitta presque aussitôt les lieux, prenant tout de même la peine de m'indiquer où me nettoyer. Descendre les escalier et les monter une nouvelle fois pour un semblant de toilette... Cela me demandait un effort quasiment surhumain, mais j'étais recouverte de sang et je transpirais.

Je pris position en haut des marches et observai un court instant l'épreuve. Je pris une grande inspiration et dévalai l'escalier, profitant de ma lourdeur comme un élan qui me poussait vers le bas. Par chance ma bougie ne s'était pas éteinte et je pus chercher la salle de bain. J'en profitai pour visiter un peu l'étage inférieur. De toute évidence la maison était vieille, et chargée d'histoire. Le silence régnant je pus percevoir - enfin, imaginer - les murmures et les sanglots passés. C'est en ouvrant la porte de la cuisine que je vis une femme, seule assise à la table, pleurant et hurlant son malheur. J'eus un mouvement de recul et fermai les yeux.
Silence.
J'ouvris lentement les yeux, j'étais seule.

(Il faut que tu dormes ma vieille, ça va vraiment pas là!)

J'ouvris une seconde porte, la bonne cette fois. Une petite salle de bain s'offrait à moi, propre et agréable, c'était le moment pour se détendre. J'emplis la baignoire d'eau tiède, presque froide, et m'y glissai goulûment. Laissant échapper un soupir de satisfaction, je me détendis, mon corps sombra. Mes muscles étaient réduits au néant, le moindre mouvement m'était impossible, ma tête était lourde et... Vide.

(Il faut que j'aille me coucher... Maintenant...)

Je laissai mon corps entier aller sous l'eau. Le sang qui s'échapper de mon bras se mêla au liquide translucide, le rendant rosâtre et impure. La faible lueur de la bougie se reflétait dans le fluide et les voluptés crées par ce mélange dansaient dans mes yeux.
L'air me manquait, je devais me relever, mais j'étais trop bien. Je n'avais plus mal, ni physiquement, ni moralement. Mon corps était parfaitement détendu, et mon âme dormait déjà. Mon coeur se serra dans ma poitrine, mes poumons semblait se rétracter sur eux-mêmes. Je me relevai brusquement, l'eau ruissela sur mes épaules et mon dos. J'emplis mes poumons de tout l'air qu'ils étaient capables de contenir et me détendis de nouveau. Je sortis de mon bain avec toute les difficultés du monde, m'enroulai dans une serviette trouvée dans un placard, fis partir l'eau, et partis vers mon lit.

Je gravis l'escalier presque en rampant et me glissai, nue, dans les draps frais du lit de Eiko. Mes yeux se fermèrent presque spontanément, et le sommeil pris d'assaut mon corps.

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 Sujet du message: Re: Les habitations
MessagePosté: Sam 30 Juin 2012 22:51 
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Prologue

~1~



Une fraîche manifestation de Rana vient jouer avec l'une de mes mèches brunes alors que la porte de la boutique se referme. Déjà, le bruit des bottes du messager se fait moins présent. Cet oranien, à peine plus grand que moi, vient de me laisser entre les mains une lettre en papier de riz d'une grande qualité. Un fin ruban de soie pourpre la retient, lui-même maintenu par un cachet de cire brune. J'effleure la marque présente dans cette matière, encore un peu incrédule. Mon coeur cogne dans ma poitrine, au diapason du claquement de mes getas sur le plancher de la boutique.

Je ne suis pas du genre à perdre mon sang-froid, mais je dois avouer que cet objet me laisse perplexe. L'envoyé appartient à la maisonnée de ma mère, et le cachet en porte le blason. J'ai le droit d'être dubitatif. Après tout, cela fait plus de quarante années que le chef de cette famille nous a reniés. A cette pensée, je regarde avec tendresse l'anneau d'argent brillant à mon index gauche. Décidé, je longe le comptoir barrant l'accès au dernier tiers de la pièce, et prends place sur une chaise basse calée entre ce dernier et une étagère. Après avoir jeté un bref coup d'oeil aux plantes séchées qui y reposent, je repousse ma longue chevelure noire, et m'intéresse au courrier.

Je viens à peine de le décacheter que je suis interrompu par le mouvement de la porte coulissante, placée sur ma droite après l'étagère. Je ne retiens pas un sourire amusé.

( Houlà.)

Dans l'encadrement se présente un oranien d'un peu moins d'une soixantaine d'années. Ses longs cheveux grisonnants sont vaguement tressés en une natte maladroite, renvoyée sur son épaule gauche. Ses yeux bridés m'ont l'air encore plus petits que d'habitude, et ses rides naturelles sont couvertes par une marque de drap mal placée. Je suis toujours du même avis. Sans ses longues moustaches, il parait bien plus jeune. Alors qu'il s'avance, un détail me saute aux yeux. J'ai du mal à contenir mon rire alors que je l'interpelle.

"Oncle Masaya ?"

Ses yeux s'ouvrent et balaient la pièce. Je suis son regard. Ce dernier se pose sur les étagères de bois brillant flanquant les murs, et où de petits pots en céramique bleutée, contenant des onguents parfumés, sont exposés. Ses yeux sombres remontent sur la lanterne éteinte au plafond, puis glissent sur un noeud du plancher poli avant de finalement se tourner vers moi. Ses lèvres sèches s'ouvrent pour laisser passer une voix rauque.

"Oh ! Bonjour Kiyo'... "

Mon visage s'incline sur le côté et je hausse un peu les sourcils, affichant une expression entre la compassion et l'amusement.

"Toujours pas de regrets concernant cette dernière petite bouteille ?"

"Regretter ? Jamais ! Aouch. "

Ma tête effectue un mouvement négatif alors que je le vois s'emparer d'une préparation. Immédiatement, je l'interpelle sur un ton léger.

"C'est destiné à soulager des maux de tête ou de vessie ?"

Mon oncle stoppe son mouvement et observe un peu mieux le pot saisi. Son expression se fige puis se teinte d'une moue embarrassée. En quelques pas, il vient vers moi et aplatit sa grande main rude sur mon crâne, m'ébouriffant sans ménagement. Son rire se mêle au mien alors qu'il s'amuse à faire ressembler ma chevelure, jusqu'à lors bien peignée, à un nid d'oiseau. Lorsqu'il s'arrête, le véritable remède en main, il avise finalement le rouleau resté sur mes cuisses.

D'abord interrogateur, son ton se teinte de taquinerie.

"Qu'est-ce donc ? Une missive secrète d'un ou d'une fiancée potentielle ? "

"Cesse de me taquiner, voyons. Tu sais bien que personne ne voudrait de..."

Soudain, le tranchant de sa main s'abat douloureusement sur ma tête, me coupant la parole.

"Je t'interdis de finir cette phrase. Tu es aussi ynorien que moi, et tu as un tas de qualités, mon garçon. Si personne ne s'intéresse à toi, c'est que personne ne te mérite. Voilà tout !"

Sur ces mots qui me font sourire, il croise les bras et pousse un souffle par le nez. Cet homme est chaleureux. Il a toujours su ce qu'il fallait dire pour me rassurer et me rendre ma bonne humeur. Je lui suis tant redevable que je ne sais pas quand je serai en mesure de lui rendre la pareille. C'est décidé. Si je peux faire quoique ce soit pour lui venir en aide, je ne dois pas hésiter.

Plongeant mon regard vers la lettre pendant que mon oncle s'affaire, je suis avec attention les lignes fines formant des mots clairs mais sérieux.

Citation:
A Kiyoheiki, fils de Tanigawa Sakuya et de d'Esh Elvohk Myrimak.

Recevoir cette missive va te surprendre, j'en suis conscient. Tu dois sans doute te demander pourquoi, après toutes ces années, cette famille a décidé de te recontacter. Je ne peux pas te révéler tous les détails dans cette lettre, mais sois assuré que je ne te suis en rien hostile.

Comme tu l'as peut-être appris par Masaya, l'ancien chef de notre famille est décédé. C'est moi qui suis maintenant à la tête des nôtres. J'ai pris une décision importante qui concerne ta mère, ce qui t'implique également, fils de Sakuya.

Rends-toi dès que possible à la résidence principale. Viens accompagné si tu le souhaites, mais je ne m'entretiendrai qu'avec toi.

Prends bien conscience que si tu refuses de me rencontrer, tu ne seras pas le seul à en subir les conséquences.

Kawarin Toranosuke


Mes yeux se plissent. Cette lettre a beau être écrite avec soin, elle n'en reste pas moins menaçante. Je n'aime pas cela. Levant le nez de la lettre, j'observe le dos large de mon oncle. Je ne sais pas ce que ce chef est capable de faire, mais je ne veux prendre aucun risque, en particulier si Masaya peut en faire les frais. D'un coup, celui-ci se retourne et scrute mon visage. Je sais qu'il ne veut que mon bien. Aussi, sans qu'il dise quoique ce soit, je lui tends la missive. A mesure que ses yeux la parcourent, son expression se ferme.

Lorsqu'il me la rend, il accompagne son geste de paroles assurées.

"Je t'accompagne."

Cette fois-ci, j'émets un léger rire.

"Je savais que tu allais réagir comme cela."

"Evidemment ! Allons-y immédiatement !"

"Maintenant ?"

"Oui."

"Tu es sûr ?"

"Certain !"

Roulant la missive, je me lève et masque à peine un sourire franchement amusé.

"D'accord. Mais je crois que tu devrais quand même prendre le temps de mettre l'un de tes yukatas."

L'ynorien âgé semble un instant perplexe, puis baisse les yeux sur l'habit. Manches trop courtes, obi trop serré et coloris trop clair. Pas de doute possible, il a pris l'une de mes tenues sans s'en rendre compte. En l'espace d'une seconde, je le vois filer ventre à terre, comme propulsé par Rana elle-même, par la porte coulissante. Au loin, j'entends le bruit d'un autre panneau que l'on bouge rapidement. J'ai du mal à ne pas sourire en voyant cet homme respectable revenir, aussi embarrassé qu'un enfant pris en faute.

Adroitement, je décroche l'arme que Père m'a donné, et en passe la sangle en travers de mon torse. Dès que j'ai fini, les doigts rudes de mon oncle viennent me tapoter la tête, me poussant tranquillement vers la sortie. Il semble penser que j'ai besoin d'encouragement.

Mes mains tremblantes semblent confirmer qu'il n'a pas tort.


~Suite~

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Dernière édition par Kiyoheiki le Ven 27 Juin 2014 18:40, édité 4 fois.

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 Sujet du message: Re: Les habitations
MessagePosté: Dim 1 Juil 2012 14:39 
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Le souffle de Rana m'apporte des relents frais et floraux. J'ai beau vivre à Oranan depuis ma naissance, je redécouvre chaque jour quelque chose de cette ville. Hier, c'était le clapotis de l'eau, aujourd'hui la douceur de la brise. Quid de demain ? Le mince sourire que j'ai se perd bientôt lorsque, en chemin vers la résidence, je vois un groupe de jeunes oraniens armés. Ils ont tout juste l'air sorti de l'adolescence, et pourtant leur visage affiche un air adulte et résolu. Je n'ai jamais oublié que nous sommes en guerre, mais sa réalité ne me frappe que devant ce genre d'images.

Marchant à mes côtés, l'oncle Masaya me jette par moments un regard appuyé. S'il se fait du souci parce que certaines personnes chuchotent peu discrètement sur mon passage, il s'inquiète pour rien. Certes, ce n'est jamais agréable d'être ainsi sujet à rumeurs et commérages, mais je m'efforce de ne pas y prêter attention. Les gens ont besoin de se distraire des conflits, après tout. Tant que cela ne vire pas à l'altercation, je peux endurer quelques moqueries. Vivement, je lève les yeux vers son visage et lui offre un sourire amical. En me voyant faire, il pousse un soupir puis me tapote l'arrière du crâne.

Rapidement, au bruit des getas claquant au sol, nous arrivons dans un quartier plus riche de la ville. La belle villa vers laquelle nous nous dirigeons est assez vaste, mais moins que ses voisines. La double porte de bois perforant le mur d'enceinte clair est ouverte, et deux personnes discutent dans son encadrement. J'ai à peine le temps d'atteindre l'entrée que leurs paires d'yeux se posent sur moi avec une telle rudesse que j'ai la sensation de réceptionner un lourd bagage sur le dos. Avant que Masaya, sans doute agacé par leur attitude, ne leur adresse la parole, je m'avance.

Brièvement, je m'incline respectueusement et leur présente le rouleau décacheté.

"Bonne matinée à vous. J'ai reçu cette missive de la part de maître Kawarin Toranosuke. Peut-il nous recevoir ?"

Je remarque enfin que les deux hommes sont vêtus d'une fine armure de cuir, ciselée en lamelles souples. Leur visage a l'air grave, même si je leur donne à peine un peu plus d'une vingtaine d'années. S'ils font partie des serviteurs de la maisonnée, il est normal que je ne les ai jamais croisé.

L'un d'eux jette un coup d'oeil à la lettre, fixe brièvement mes yeux violins, puis se hâte dans la demeure. Un grommellement parvient à mes oreilles avant que la main de mon oncle ne se pose rudement sur mon épaule droite. Ses doigts ridés se faufilent entre son pied et sa semelle.

"Saleté de caillou."

J'émets un souffle amusé, puis reporte mon attention sur la cour. Un petit lagon artificiel s'y trouve, entouré de plantes superbement entretenues. Par moments, j'ai même l'impression de voir remonter des poissons à la surface. Mon regard suit le contour de la zone liquide, jusqu'à tomber sur la silhouette d'un jeune enfant. A sa taille, je doute qu'il ait plus de six années. Vue sa tenue, c'est un jeune garçon, observant le mouvement des bêtes. Il est sous la surveillance étroite d'une femme âgée, aux traits sévères. Coiffe haute, retenue par deux aiguilles d'où tombent des décorations argentées, peau poudrée et kimono brodé de dorures me font savoir qu'il s'agit d'une personne importante.

A l'instant où le petit me remarque, il se fige. Ses yeux innocents me scrutent avec l'intensité de la curiosité naïve. Un enfant surveillé si étroitement ne doit pas être descendant de servante, surtout avec des habits aussi riches. Un bref ordre de l'oranienne, et celui-ci referme une bouche restée ouverte pendant de longues secondes. Doucement, je me penche un peu en avant, saluant ce petit être. Il affiche un instant un air perdu, puis son visage se pare d'un superbe sourire. Il répond à ma salutation de la même manière, avant que la dame âgée ne l'interpelle. Son regard va d'un bout à l'autre de la cour, puis il fait demi-tour et disparait auprès de sa chaperonne.

( Sans doute l'un des héritiers de la maisonnée. )

Bientôt, l'homme parti dans la demeure revient vers nous à grandes enjambées. Tendant le bras, il nous invite à entrer. Sa voix, grave mais chaude, accompagne son geste.

"Le maître va vous recevoir sous peu. Veuillez me suivre."

"Eh bien. Moi qui pensais que les chefs de famille étaient des gens occupés."

J'adresse à mon oncle un regard interrogateur. Je suis plutôt surpris de l'entendre parler ainsi de quelqu'un. Il n'est pas du genre à médire sur les autres ou se moquer d'eux, pas sans une bonne raison en tous cas. L'herboriste semble ne pas remarquer ma question implicite, m'incitant à passer devant.

A la suite de notre guide, nous entrons dans la demeure, laissant nos getas à l'entrée de la pièce pavée de tatamis. La salle où nous sommes conduits est fermée de murs en papier de riz, entre des cadres de bois. Sur certaines parois, des rouleaux sont suspendus, arborant le symbole de la famille. D'ailleurs, il ressemble à l'emblème d'Oranan, sauf qu'il est de coloris noir, et représente un arbre nain.

Je n'ai guère le temps d'observer davantage l'endroit que le panneau coulissant, face à l'entrée, glisse. Dans l'encadrement, un humain de grande taille apparait.

( Huh ? Ce n'est pas un ynorien ?)

L'être arbore une lourde armure métallique, qui rend ses formes difficiles à cerner. Une épée large, d'une facture qui m'est inconnue, pend à sa ceinture. Son visage est assez étrange. De grands yeux d'une teinte vert pâle, une peau pêche, mais surtout un visage fin. Avec ses longs cheveux dorés retenus en une natte à l'ynorienne, j'ai du mal à déterminer s'il s'agit d'un homme fin ou d'une femme à carrure développée. A côté, mon mètre trente ne parait pas. La difficulté de connaître son genre s'accroit encore quand sa voix s'élève. Elle me parait trop grave pour être féminine, mais pas assez pour convenir à un homme.

"Entrez et prenez place."

"Tout de même !"

A peine oncle Masaya tente-t-il de franchir la porte à ma suite que le bras de la personne lui barre le passage.

"Pas vous. Le shaakt seulement."

Par-dessus mon épaule, je vois le visage, pourtant calme de l'herboriste, se voiler d'une ombre.

"Attention à tes paroles, grande brute. Si tu manques de respect à mon neveu, je..."

"Oncle Masaya. "

Je lui adresse un signe de tête et un sourire calme. Bien entendu, être appelé par la race de mon père n'est pas habituel, mais je doute que cet humain ait eu la moindre pensée hostile. Même si mes cheveux n'ont pas la teinte neige de ceux de Père, j'ai tout de même une grande ressemblance avec lui.

"Il n'y a pas de mal. "

Son visage s'apaise, affiche un bref instant un air de fierté, puis il fait demi-tour. Je ne sais pas s'il est allé s'asseoir dans la salle, le panneau coulissant étant refermé devant mes yeux avant. Suivant le geste de ce grand être blond, je me dirige vers un coussin épais face à moi. Je retire de mon dos l'arme de Père, puis m'agenouille et dépose la missive et le Fang Bian Chan devant moi. Je ferme un instant les yeux, cherchant à regagner un peu de calme avant que le maître des lieux n'arrive.

C'est presque serein que je perçois l'ouverture d'un panneau en papier de riz, un peu plus loin sur ma gauche. Je vais enfin savoir ce que l'on me veut.

~Suite~

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Dernière édition par Kiyoheiki le Dim 1 Juil 2012 22:59, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Les habitations
MessagePosté: Dim 1 Juil 2012 22:24 
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Le panneau blanc glisse dans sa rainure, laissant passer une silhouette haute. Entre alors un oranien au profil court et sévère, au port de tête haut et noble. Ses pas sont lents et mesurés, et surtout il ne m'adresse pas le moindre regard. Tout ce qu'il m'offre, c'est la vision d'un kimono noir, richement décoré du blason familial, et d'une arme courte à la ceinture. J'ai beau avoir un certain sang-froid, voir se déplacer cet homme me donne la sensation de me trouver bien loin de lui. Il a comme une aura le rendant peu approchable, froide et distante. Je me sens un peu mal à l'aise, mais un bref regard sur l'arme de Père posée devant moi m'aide à me reprendre.

L'homme s'agenouille sur un coussin face à moi, ses yeux mi-clos. Son visage arbore de profondes rides qui durcissent son expression. Ses longs cheveux encore noirs sont tirés vers l'arrière, et maintenus sur le haut du crâne par une cordelette incrustée de fils d'or. Démarrant de part et d'autre au-dessus de ses lèvres, un duo de longues moustache descend jusqu'à une dizaine de centimètres sous son menton. Reposant à la naissance de sa gorge, j'ai l'impression de voir l'éclat d'une chaîne en argent.
D'un coup, l'oranien ouvre ses yeux, les rivant aux miens.

Un violent frisson me parcourt l'échine, que je tente de maitriser au mieux. La présence de cet homme est encore plus oppressante maintenant qu'il me scrute. Je me sens jaugé, jugé, mais pas question de baisser les yeux pour autant. Ma surprise passée, je soutiens le regard de l'être âgé pendant ce qu'il me semble être une éternité. Je ne me sens ni tendu, ni en colère, un peu comme si lui et moi étions les seuls êtres présents dans la salle.
Ce n'est que lorsque l'humain blond provoque un bruit métallique que nos regards divergent. Lorsque je reporte mon attention sur cet oranien, j'ai presque l'impression de voir un éclat amusé dans son regard. Ses lèvres finissent par se desserrer, laissant passer une voix posée, mais teintée d'une grande expérience.

"Bienvenue, fils de Sakuya. Je te savais diligent, mais pas au point de venir si tôt. C'est bien."

Je garde le silence, mais abaisse un peu les épaules, attentif.

"Je suis Kawarin Toranosuke, comme tu l'auras deviné. Mais trêve de politesses. Tu dois être impatient de savoir pourquoi je t'ai convoqué."

Un petit mouvement de tête affirmatif de ma part l'enjoint à poursuivre.

"Cela fait plus de quarante années que le nom de Sakuya est associé à une honte pour notre famille. Pourtant, ceci n'a plus de raison d'être. Jusqu'à son trépas, elle a été dévouée aux siens. Elle a tenu à protéger sa famille et ses proches. Mon prédécesseur était aveugle, orgueilleux, mais surtout blessé dans son autorité de père. Aussi, maintenant que c'est moi qui mène cette famille, je m'apprête à réhabiliter cette femme."

La nouvelle me surprend, au point que j'ai du mal à empêcher mes lèvres de se desserrer. Ma mère va pouvoir reprendre sa place en tant que membre de cette famille ? Cela signifie un bon nombre de choses. Sa mémoire sera honorée comme celle de tous les disparus. Mais est-ce que cela signifie que je vais également être rattaché à cette maisonnée ? J'ai des difficultés à le croire, mais un certain espoir envahit ma poitrine. Un doute également. Que va-t-il advenir de la situation de Père dans ce cas-là ? Va-t-il aussi être affilié aux Kawarin ?

Mon visage doit sans doute refléter une partie de mes pensées, car la voix grave et sévère de mon interlocuteur se fait entendre. Ses mots tombent comme un couperet sur mon coeur.

"Et elle uniquement."

Mes yeux se plissent légèrement sous le choc. Devant son soudain silence, je me permets de l'interroger.

"Que voulez-vous dire ?"

Ses yeux noirs se font glacés, et sa voix lance des mots laissant une trace douloureuse en moi.

"Tu m'as bien entendu. Aux yeux de notre famille, cela signifie que ni ton père, ni toi n'avez de lien direct avec nous. Sakuya sera officiellement décédée en mettant au monde le deuxième enfant de Kiyomaru. "

Sur mes cuisses, mes mains se serrent, froissant le tissu du yukata. L'anneau d'argent luit, reflétant la lumière que je trouve bien pâle, d'une lanterne proche. Je sais que je n'ai jamais vraiment connu ma mère, mais rompre brutalement ma filiation avec elle me blesse. Je ne comprends vraiment pas cette décision. Pourquoi m'en faire part ? Je n'en vois pas l'utilité. Ce n'est pas comme si j'allais prétendre à un héritage quelconque de ce clan.

Une lueur de compréhension éclaire bientôt mon regard. Peut-être est-ce justement de cette éventualité que l'on veut se débarrasser. Maintenant que j'y songe, j'ai entendu oncle Masaya évoquer la disparition au combat du futur dirigeant de cette maison. Réhabiliter Mère sans moi écarte toute prétention de ma part. C'est une idée censée, mais un peu paranoïaque.

La voix de l'homme ramène mon attention sur lui.

"En contrepartie, Kawarin Masaya devient ton tuteur officiel. "

"Mon tuteur ?"

Un lent mouvement de tête affirmatif de la part de maître Toranosuke précède son explication.

"A nos yeux, tu seras en droit d'hériter de ses biens et propriétés lors de son trépas, comme son propre fils. Mais cet avantage vient avec une obligation que tu ne peux pas refuser."

Je suis comme suspendu à ses lèvres. Oncle Masaya a toujours été tel un second père pour moi. Vivre à ses côtés et prendre sa suite m'a semblé aussi naturel que de prier Rana, Zewen ou Gaïa, mais il semble que ce ne soit pas aussi simple. L'obligation mentionnée me fait craindre le pire. Déjà que je suis censé renier ma filiation avec Mère, je vois mal ce qu'il peut m'être imposé d'autre.

Après une longue inspiration, le chef de famille reprend la parole.

"Par tradition, lorsqu'un membre mâle des Kawarin vient à avoir un fils, il doit prendre une part active à la défense de la République. Autrement dit, il doit s'enrôler dans la milice. "

Milice. Ce mot amène immédiatement à mon souvenir les images de ces jeunes oraniens en arme, de ces familles blessées par la perte d'un être cher, et surtout l'idée d'une séparation presque définitive.

Je sens mes yeux s'écarquiller et mon coeur manquer un battement. Ce doit être une incompréhension de ma part.

C'est la seule explication.



~Suite~

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Dernière édition par Kiyoheiki le Dim 1 Juil 2012 23:05, édité 2 fois.

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 Sujet du message: Re: Les habitations
MessagePosté: Dim 1 Juil 2012 22:40 
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~4~


Mes pensées s'entrechoquent, cherchent à se mettre dans l'ordre, mais la conclusion reste la même. Le dirigeant des Kawarin veut que l'herboriste intègre la milice.

Oncle Masaya ? Dans la milice ? Impossible ! Malgré toute l'affection que j'ai pour lui, je sais que ses capacités physiques ne sont plus ce qu'elles étaient. L'obliger à s'enrôler, c'est lui faire signer son arrêt de mort. Ceci me parait tellement évident que je me demande comment maître Toranosuke ne peut pas y avoir songé. Cet homme occupé n'y a-t'il tout simplement pas prêté attention ?

Non.

L'éclat intéressé dans son regard me signifie qu'il sait pertinemment que ce qu'il m'a annoncé est absurde. Il doit savoir que je ne peux pas laisser faire cela. Aurait-il anticipé ma réaction ? Est-ce le but de ce tête-à-tête ? Je veux aider mon oncle, et l'opportunité de lui rembourser l'équivalent d'une vie se présente. Rivant mon regard à celui de l'homme, je prends la parole avec assurance.

"Je ne peux pas laisser mon oncle s'enrôler. Il y a forcément un autre moyen."

Les yeux bridés qui me scrutent s'ouvrent, comme intrigués.

"Oh ? Et qu'as-tu donc en tête, mon garçon ?"

"La même chose que vous, je pense. Je veux prendre sa place au combat."

Un souffle amusé échappe à mon interlocuteur.

"Toi ? Chétif petit shaakt, tu veux devenir milicien ? Qu'as-tu donc à leur offrir ?"

Je prends un instant de réflexion, en abaissant les paupières sur mes iris violines. Je ne peux pas agir sur un coup de tête, quand bien même je veux protéger Masaya. Mon esprit, pendant un moment agité, finit par s'apaiser. Silencieusement, je prie Zewen pour que ma vie avec Masaya demeure la même malgré cette épreuve, Rana pour me pousser dans la bonne direction, Moura pour me donner la force d'assumer mon choix, et aussi Gaïa pour chasser mes craintes.

Mes mains détendues sur mes cuisses, je dirige un regard résolu vers l'oranien.

"Je suis initié au combat, maître Kawarin Toranosuke. Et quand bien même Père était shaakt, mon coeur et mon âme appartiennent à la République d'Ynorie. Ces terres sont ma patrie, et je suis prêt à la défendre comme tout véritable ynorien se doit de le faire."

Abaissant la tête, repoussant arme et lettre, j'appose mes mains sur le tatami et m'incline humblement et respectueusement. Mes longs cheveux noirs glissent avec lenteur sur mon épaule droite, formant bientôt un réseau contrastant avec le sol. Les mots que je m'apprête à dire sont chargés de sens, transportant une parole sur laquelle je ne peux pas revenir.

"Sur mon honneur, je jure de rejoindre la milice et de m'acquitter de mon devoir, quitte à le payer de ma vie. Accordez-moi le droit de remplacer Masaya."

A l'instant même où j'achève ma phrase, le panneau coulissant dans mon dos s'ouvre.

"Kiyo' ! Ne fais pas cela !"

"Tiens, oncle Masaya. Toujours aussi peu enclin à respecter le protocole."

"Suffit Tora' ! Tu as beau être aussi mon neveu, tu ne peux pas l'obliger à..."

"Kawarin Masaya ! Sous mon toit, tu me dois le respect, oncle ou non. Quant à ce petit, il a déjà donné sa parole. A moins que tu comptes renier tes propres mots, Kiyoheiki ?"

Je me redresse, me rasseyant sur mes talons. C'est avec une voix pleine de calme et d'assurance que je réponds.

"Mes mots sont un pâle reflet de ce que m'ordonne mon coeur. J'ai juré que je servirai la République, et je le ferai. "

"Mais ! Kiyo' !"

"Oncle Masaya. Je te suis et te serai toujours reconnaissant, mais il est grand temps que je te rende la pareille. Qui sait, ce sera peut-être l'occasion de rencontrer la personne qui me mérite."

Sur cette phrase, je lui souris avec calme et complicité. L'herboriste grimace un peu et se frotte les yeux. Je ne sais pas s'il tente de se réveiller, s'il fait preuve d'agacement, ou s'il masque simplement des témoins liquides de sa peine. Mon coeur se serre à cette vision, mais je demeure inflexible.

"Aussi courageux que ton père, petit. "

A l'autre bout de la pièce, maître Toranosuke fait un bref signe de la main. En quelques pas bruyants, la personne en armure s'avance. Elle me tend un rouleau cacheté et un petit papier sur lequel une adresse est écrite. Alors que je prends le tout en main, la voix d'un coup moins froide du maître des lieux résonne.

"Ceci est une lettre de ma part. Porte-la à l'adresse que je t'ai indiqué. Cette entrevue s'achève ici."

L'être au kimono lourd se lève et se dirige vers le panneau coulissant par lequel il est venu. Juste avant de passer la porte, il s'arrête. Sans me regarder, il s'adresse pourtant une dernière fois à moi.

"Rends-moi fier de toi, petit frère."

Ma poitrine se serre douloureusement à ces paroles simples, et un sourire fade étire mes lèvres. J'aurais du faire le rapprochement, mais il est trop tard. Pendant ce bref entretien, j'ai eu face à moi mon aîné, premier fils de Sakuya, et je n'ai rien pu tenter pour réduire cette distance créée au fil de ces quarante années.

Ramassant mes affaires, je suis mon oncle tête haute. Je n'ai pas à regretter ma décision, même si l'air peiné de Masaya alourdit l'atmosphère. Lorsque le mur d'enceinte est franchi, il fait quelques pas en direction de la boutique, puis se tourne vers moi. Sa large main vient gentiment tapoter mon crâne, comme d'habitude. D'un coup, ce grand homme se penche en avant et m'attire à lui, m'enserrant dans une étreinte rude. Un instant, j'ai peur qu'il se blesse sur l'arme dans mon dos, mais ce n'est pas le cas. Sa voix chargée atteint difficilement mon oreille.

"Je suis fier de toi, mon garçon. N'oublies pas, l'herboristerie est aussi ton foyer."

J'acquiesce, un peu troublé par ce soudain élan d'affection. Je ne le savais pas si démonstratif. Vivement, mon oncle se retourne et emprunte la rue, sans se retourner. Je patiente un moment, Sentant ma longue chevelure brune voleter dans la brise matinale. Lorsqu'il quitte mon champ de vision, je me dirige vers le lieu indiqué. Je n'ai pas le droit de faire preuve de faiblesse. Je vais devoir être fort. Non seulement pour moi, mais aussi pour nos terres.

La milice n'a aucunement besoin de faibles dans ses rangs.


Fin du Prologue


~Suite~

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 Sujet du message: Re: Les habitations
MessagePosté: Lun 23 Juil 2012 22:08 
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[Interlude]
~1~



La nuit est fraîche, bleutée et sombre malgré les torches disposées avec stratégie. Je sens encore dans ma poitrine les pulsations rudes de mon coeur, alors que je repense aux derniers événements. J'ai mené ma tâche à bien, en escortant la milicienne Uzuuma à l'office. J'ai encore un peu de mal à réaliser que je suis à présent un apprenti officiel de cette importante faction. Un léger regret teinte ma démarche fatiguée, tandis que je revois le visage un peu moins tendu de ladite Akiko me proposer de boire quelque chose. Regret parce que je n'ai pas su réagir à son invitation. Après tout, c'est la première fois que ce genre de chose m'arrive. Aucun mensonge cependant. Je suis certain que, comme je l'ai dit, oncle Masaya doit m'attendre.

Mes foulées restent cependant d'une taille banale. Est-ce le contrecoup de l'adrénaline ou l'usage de mes fluides de lumière ? Une lassitude intense ravive les plaies striant mon corps. A cette idée, je passe rapidement deux doigts sur la tempe et la pommette frappées par l'épée un peu plus tôt. Je pousse un souffle amusé en songeant que dormir de ce côté ne va plus être possible pendant un moment. D'ailleurs, je me sens véritablement sale, entre le sang qui a maculé jusqu'à ma main et l'étrange produit dont s'est servi la milicienne.

Bientôt, j'arrive à l'herboristerie. Sous la porte, un faible rai de lumière orangée m'indique qu'une lanterne est allumée. D'un geste machinal, j'use de ma clé pour entrer. Contrairement à ce que je croyais, pas d'ynorien au comptoir pour m'accueillir. Un peu déçu, je me retourne, fermant puis verrouillant la porte. J'ai à peine entendu le déclic qu'un léger poids est perçu par l'arrière de ma tête.

"Bienvenue à la maison, Kiyo'."

J'esquisse un sourire puis me retourne, sentant la grande paume de l'humain frotter amicalement ma chevelure sombre. La chaleur de ce contact passe dans chaque fibre de mon corps. Cette réaction me fait réaliser une chose simple mais ô combien précieuse.

"Je suis rentré, oncle Masaya."

Il me rend mon sourire. Sa voix prend une intonation amusée.

"Et dans un état ! Tu vas devoir me raconter ce qu'il t'est arrivé, mon garçon. Mais d'abord, une toilette s'impose."

Sa grande main s'abaisse, venant me donner une brève poussée contre l'omoplate gauche. Tout en me dirigeant vers le couloir lié au fond de cette boutique, je me défais de la sangle de mon arme, puis la suspends à un crochet mural. Je fais de même pour ma large besace. Il a raison, j'ai bien besoin de me laver, ne serait-ce que pour pouvoir panser efficacement mes blessures. Sans perdre de temps, je me dirige vers une pièce latérale où, à ma grande surprise, la cuve est déjà emplie d'une eau sans doute chaude. Prestement, ignorant la température de l'air, je me défais de mon yukata et de mes getas. Seul reste en place le fundoshi me servant de sous-vêtement.

Une bassine dans la main, j'utilise l'autre pour retirer le ruban doré retenant mes cheveux. J'ai à peine le temps de remplir le récipient que l'ynorien entre dans la pièce, apportant avec lui diverses préparations à base de plantes. Masaya s'arrête soudainement, son regard posé sur ma gorge tachée et mes membres maculés de sang. Sa première réaction n'est cependant pas celle à laquelle je me serais attendu.

"Euh... J'aurais peut-être du frapper."

"Haha. Un peu tard, non ? "

"Alors je vais..."

"Sortir et toquer ? Je n'en vois pas vraiment l'utilité. "

"Maintenant que tu le dis..."

L'herboriste affiche une moue un peu embarrassée, puis il s'avance. Prenant place sur un tabouret bas, je le laisse me nettoyer le dos pendant que je lave mes plaies. Tout à mes ablutions, je lui narre la journée. L'enquête sur le pillage de tombes, la confrontation et le retour à la milice, évitant cependant de mentionner des noms. J'ai beau avoir une totale confiance en mon parent, je n'ai pas spécialement envie de trop l'impliquer. J'édulcore même, de sorte à ne pas trop l'inquiéter, mais je ne lui mens pas pour autant.

Mes yeux se rivent à une tache sanglante noircissant la bague de Mère. Sous ma traction, elle glisse le long de mon doigt. A l'aide d'un tissu, je la frotte vigoureusement. Soudain, je perçois un léger éclat lumineux émanant du métal. Je cesse tout mouvement immédiatement, attirant l'attention de l'humain sur ce que je fais. Lentement, je recommence, nettoyant le caractère incrusté dans le métal qui représente le prénom de celle m'ayant donné la vie. Brièvement, je le vois luire d'un faible éclat doré. Je suis surpris, et cela s'affiche sur mon visage. Au moment où je passe l'anneau à mon doigt, j'ai la sensation de m'apaiser un peu. Je l'ôte pour mieux l'observer.

Une idée saugrenue germe dans mon esprit. Ce n'est qu'une hypothèse, mais est-il possible que la concentration de mes fluides lumineux dans mes mains, pour soigner la milicienne, ait eu des conséquences pour l'anneau ? Il m'est toujours apparu fait d'argent, mais maintenant que j'y prête attention, j'y distingue la présence de léger filaments d'une autre teinte. Ce sont justement ces derniers qui forment le nom de Mère. Serait-ce ce métal qui aurait réagit à mes fluides ? J'ai beau le scruter, je n'arrive pas à déterminer le type de minerai dont il est constitué.

Mes pensées sont coupées par une cascade d'eau plaquant mes cheveux sur mon visage.

"Oncle Masaya !"

"Ouiiiii ?"

Faisant pivoter mon buste, mon visage se lève vers lui alors que mes doigts libres retiennent difficilement mes mèches sombres trempées. Je passe d'une moue presque boudeuse à un sourire sincère.

"Gamin."

L'homme âgé porte la main à son sternum, prenant une pose faussement outrée. Il finit par éclater de rire en me posant un tissu sur le crâne.

"Finis de te sécher et rejoins-moi dans la pièce à vivre. J'ai quelque chose qui t'est destiné."

Enfilant la bague à mon index gauche, j'abaisse le tissu contrastant par sa pâleur avec ma peau, sur mes épaules. Mes lèvres s'entrouvrent, mais l'homme a déjà filé, me laissant avec mes questions et une tenue propre. Malgré la fatigue, je m'active, finissant de me sécher et m'emparant de mon peigne avant de lui emboiter le pas.

Le moins que l'on puisse dire est que Masaya est toujours aussi doué pour se donner un air mystérieux.


~Suite~

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Dernière édition par Kiyoheiki le Mar 24 Juil 2012 15:57, édité 2 fois.

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 Sujet du message: Re: Les habitations
MessagePosté: Mar 24 Juil 2012 00:44 
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~2~


C'est avec un certain empressement que je parcours le couloir aux planches claires. Bifurquant sur ma gauche, je me dirige dans la pièce voisine de la salle d'eau, tenant le peigne entre les dents tandis que je resserre mon obi noir. La porte en papier de riz est ouverte, dévoilant l'intérieur de cette pièce carrée si familière. En son centre trône le foyer encore vif au-dessus duquel est suspendu un chaudron noirci. A ma gauche se trouve la table basse rectangulaire arborant toujours cette même tache de roussi. Je ne peux pas retenir un sourire en l'apercevant. C'est tout de même étrange. J'ai beau la voir tous les jours depuis des années, je redécouvre ce petit détail.

Le reste de la pièce est paré de simples étagères contenant des pots à thé, de sacs de riz et de jarres à denrées alimentaires. Dès qu'il me voit, mon oncle me fait signe de prendre place à la table. Je lui obéis, me mettant à peigner et lisser ma longue chevelure avec soin. Toutefois, cette activité ne m'empêche en rien de regarder ce que trafique l'ynorien grisonnant. Au son de l'eau qui coule, je le devine préparer quelque breuvage censé m'aider à trouver un sommeil calme.

Avant que je m'en aperçoive, Masaya m'a apporté un plateau où trônent bols et assiettes formant un repas coloré. Devant mon air étonné, l'homme prend un air taquin, haussant un sourcil et un coin de lèvres.

"Eh ! Tu ne penses quand même pas que je vais laisser mon neveu aller au lit sans manger ? Une journée pareille ne peut que creuser."

J'émets un rire sincère, posant le peigne sur le meuble.

"C'est bien vrai."

Attrapant les plats, je ne fais pas de manières en mangeant ce qu'il m'a préparé. Il manque parfois quelques condiments, mais l'expression chaleureuse et tendre que je décèle sur les traits âgés compense largement ces lacunes. Pendant de longues minutes de ce repas nocturne, les yeux de mon oncle restent rivés à ma silhouette. Je ne me sens aucunement dérangé, au contraire. Entre la chaleur du foyer et celle de ce parent attentionné, je me sens vraiment à l'aise.

Alors que je m'attaque au dernier plat, Masaya se décide et va chercher quelque chose sur une étagère. Bientôt, une petite sacoche fait son apparition sur la table. Délaissant le bol, j'effleure la surface de l'objet, plissant les yeux. J'ai la sensation de l'avoir déjà vu, mais je ne me rappelle plus où. Ce n'est qu'aux mots prononcés par Masaya que cela me revient.

"C'était un cadeau de Kiyomaru à ton père."

Je braque un regard empli d'espoir vers l'ynorien. Ce dernier affiche un moment un air surpris, puis il se radoucit et fait un signe de tête négatif.

"C'est une connaissance commune qui me l'a apporté, pas Myrimak en personne. Désolé Kiyo'."

Une déception aussi intense que mes espoirs apparait brièvement. Elle est chassée par du soulagement. Après tout, si Père était passé alors que j'étais absent, j'en aurais été bien plus affecté. Son absence cause un soudain manque, mais sentir les doigts de l'herboriste sur ma tignasse encore humide l'atténue.

Attirant la sacoche à moi, j'y décèle la présence de quelques objets. Un regard encourageant de mon oncle me pousse à l'ouvrir. J'y découvre un papier soigneusement coincé dans un rabat de cuir, une potion de soin dans un contenant un peu biscornu, et un tissu couvrant quelque chose. Une fois déroulé, celui-ci laisse apparaitre un poignard dont la lame me parait étrange. Très claire, elle est aussi étrangement douce au toucher, mais reste crantée par endroits. Sa facture ne me semble pas ynorienne, mais je dois bien avouer que je ne connais simplement pas de forgeron apte à fabriquer des armes en os.

Délaissant cette arme que l'herboriste examine à son tour, j'extirpe le papier de sa protection. L'écriture est belle et rigide, légèrement penchée sur la droite. J'ai presque l'impression de voir de minuscules coups de lame formant les lettres.

Citation:
Mon cher Kiyoheiki,

Tu dois avoir bien grandi à l'heure où j'écris ces lignes. Je ne sais pas vraiment quand tu recevras tout ceci, mais j'espère que tu accepteras cette lettre, ce médicament et ce poignard. Si tu es toujours aussi attentionné que dans mon souvenir, tu sauras en faire bon usage. Je sais que je n'ai pas été le meilleur des pères, et j'en suis désolé.

Sache que je n'ai pas vraiment eu le choix. Tu es mon fils, et pour te protéger de ce passé honni, j'ai du m'éloigner de toi. J'ignore quand je serai en mesure de rentrer à Oranan, mais sois certain qu'un jour je reviendrai. J'espère que tu accepteras de me revoir malgré tout.

Je pense à toi à chaque fois que Rana murmure à mes oreilles, et je prie Gaia pour que tu restes en bonne santé. J'aurais aimé te voir grandir, mais je sais que tu es entre de bonnes mains.
Tant que j'y pense, préviens Masaya que je n'ai pas oublié la bouteille que je lui dois, et ne l'incite pas trop à boire. Il a tendance à devenir un peu trop exubérant quand la boisson le gagne. Prenez soin de vous tous les deux.

Tu es et resteras toujours dans mon coeur, mon fils.

Myrimak d'Esh Elvohk


Mes dents se serrent au diapason de ma poitrine. Comme tout ynorien, je retiens mes larmes, quand bien même je suis secoué. Je suis à la fois heureux, triste et soulagé. Je relis chaque ligne plusieurs fois, jusqu'à ce que les mots se mêlent. Père pense à moi autant que je pense à lui. J'en suis ému et ravi, au point que j'ai l'impression que tout mon être l'affiche. Replaçant le tout dans la sacoche, j'appose un instant cette dernière contre mon front. Je ne sais pas comment réagir, mais je suis certain d'une chose. Lorsque Père rentrera, je lui prouverai qu'il a toujours une place importante dans mon coeur.

La voix de l'ynorien, douce et compatissante, me tire de ma rêverie.

"Bois ta tisane et file te coucher. Cette journée a assez duré."

Je ne peux qu'acquiescer, lui laissant le soin de ranger la sacoche dans ma besace pendant que je me dirige vers notre chambre. La porte coulissante glisse dans sa rainure, laissant visible cette pièce pavée de tatamis propres. Mécaniquement, j'extirpe mon futon d'un placard incrusté dans le mur, le plaçant non loin de celui de Masaya. Nous n'avons jamais eu besoin de dormir séparément jusque-là, et je n'ai pas envie de commencer maintenant.

A peine allongé, la fatigue me submerge. C'est dans un demi-sommeil que je me rappelle avoir gagné quelques yus, et qu'un tour chez un marchand ne peut pas me faire de mal.


[Acquisition rp du Poignard d'os et de la Potion de Bienveillance]




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 Sujet du message: Re: Les habitations
MessagePosté: Sam 1 Sep 2012 01:02 
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Deuxième mission de milice : Protection rapprochée

~1~


J'ai beau savoir qu'il me reste une bonne heure avant l'aube, ma nervosité reste rivée à ma poitrine. Deux jours auparavant, en retournant prendre du service à la milice, je me suis vu octroyer une nouvelle tâche. Ou plutôt, j'ai été intégré au contingent participant à cette mission. L'un des dignitaires d'Oranan doit se rendre à Bouhen, et j'ai été choisi pour faire partie de son escorte. Mes sentiments forment un tel sac de noeuds, que j'ai du mal à savoir si je suis d'humeur positive ou non. Je suis heureux de pouvoir servir mon foyer, mais je redoute ce qui m'attend.

Est-ce que je vais être à la hauteur ? Avec qui vais-je faire la route ? Ai-je bien pris les vivres et le couchage que j'ai préparé ? Dans la chambre que je partage avec oncle Masaya, j'ai l'impression de tourner en rond, sans parvenir à quoique ce soit d'utile. Le bruit de la porte coulissante me sort de ce petit moment d'égarement. Dans le cadre, l'oranien âgé aux longs cheveux lissés me regarde avec une lueur d'amusement. Son expression est accentuée par la lumière issue de la lanterne qu'il tient. Son ton compatissant me parvient.

"Si je ne m'abuse, cela fait la troisième fois que tu vérifies ton paquetage. Tu as peur qu'il s'échappe ?"

Un genou à terre, je lui lance un regard boudeur, puis pousse un soupir avant d'esquisser un sourire.

"Tu ne m'accordes même pas le droit d'être un peu nerveux ?"

Un léger rire de gorge parvient à mes oreilles en pointe tandis qu'il entre dans la chambre. Posant la lampe, il me prend la cordelette du sac des mains, fermant ce dernier. Tout en s'activant, il reprend la parole.

"Pas après que tu aies bu ma superbe tisane destinée à t'apaiser !"

Il me lance un regard presque boudeur, puis sourit. C'est vrai. J'ai momentanément oublié que de nous deux, c'est mon parent qui doit être le plus inquiet. Après tout, je vais protéger une personne importante, risquer ma vie dans ce but, sans pouvoir faire autre chose que me préparer à la venue d'ennuis. En prime, je vais faire équipe avec des miliciens ou soldats que je ne connais pas. Qui sait si ces derniers n'auront pas d'à-priori envers moi parce que je suis à demi shaakt ? Et puis, plus important encore, ce sera la première fois en une vingtaine d'années que vais quitter Oranan. J'ai beau être sorti plusieurs fois, cela ne s'est fait qu'en compagnie de Père, ou de mon oncle.

J'ai paradoxalement hâte et peur d'effectuer ce voyage. Quelle sensation étrange ! Si inconfortable et pourtant vivifiante !

La large main de Masaya vient se poser sur mon crâne, le tapotant comme à son habitude. Ou presque. Se comportant exactement comme lorsque j'ai juré de devenir milicien, l'herboriste m'attire soudain à lui, dans une accolade protectrice. Pris au dépourvu, je le laisse faire, venant tapoter son dos de mes mains. Il n'y a rien à faire, comparé à lui, mon petit mètre trente me donne encore un aspect d'enfant. Je croise les doigts en espérant gagner quelques centimètres dans les années à venir.

" Comment as-tu fait pour grandir autant sans que je m'en aperçoive ?"

Il me relâche, tendant une main devant lui, m'invitant à lui donner la mienne. Je m'exécute, tendant la droite à laquelle je porte immédiatement les yeux quand j'y sens un contact métallique. Les doigts rudes de l'homme font glisser le bijou sur mon majeur. Devant mon expression interrogatrice, l'herboriste s'explique, prétextant qu'il ne m'avait rien offert jusqu'à présent pour fêter mon intégration à la milice.

J'observe ce petit anneau plat et simple, où un motif ondulant est gravé. La voix profonde de mon parent m'apprend que cet objet, apparemment âprement négocié à grands renforts de traitements par les plantes, me permet de renforcer l'un de mes soins. La seule limite est qu'il se décharge vite, et ne peut guère être utilisé plus d'une fois par jour. En retour pour ce cadeau, j'offre un sourire dénué de nervosité à mon aîné. Qu'importe sa forme, un présent venant d'une personne chère ne peut que me faire plaisir.

L'aube ne va pas tarder à poindre quand, mes affaires et mon Fang Bian Chan prêts, je sors de la boutique. Je rajuste mon tabi gauche, songeant que ces chaussettes ynoriennes vont être indispensables pour éviter que mes getas ne me blessent les pieds. Après tout, le chemin entre Oranan et Bouhen, même si nous n'irons pas jusque-là, va être long, et marcher avec des ampoules est affreusement désagréable.

Je me retourne, laissant la main de l'homme repousser l'une de mes longues mèches brunes. Devant son air inhabituellement grave, je décide de le taquiner.

"Qu'y a-t-il, oncle Masaya ? A voir ta tête, j'ai l'impression que tu voudrais te glisser dans mon sac."

Ses yeux se plissent, lui donnant un air préoccupé qui fait ressortir quelques rides.

"Ne me tente pas, Kiyo'. Si cela ne tenait qu'à moi, je ne te quitterais pas d'une semelle... Quoique, non... En fait, je ne te laisserais même pas partir."

Mes yeux violins se plissent et scrutent sa personne. Il ne plaisante pas, chose rare concernant cet homme si amical et joueur. Une sensation de culpabilité m'étreint au coeur quand je vois son poing resserré contre son yukata. Il est inquiet, mais il semble surtout lutter contre lui-même. Depuis quand a-t-il développé un tel attachement pour moi ? A l'entendre, je suis aussi fragile qu'une sculpture de porcelaine. Problème, qu'il le veuille ou non, je suis un homme de la République d'Ynorie. En ces temps troublés, je n'ai plus le loisir de me comporter comme un enfant, quand bien même j'en aurais encore les traits. Cependant, prononcer ces mots reviendrait à poignarder moralement cet oncle. Faire souffrir Masaya est bien la dernière chose que je souhaite.

Un souffle lui échappe, puis un sourire s'installe sur son visage.

"Allez, va mon garçon. Ne laisse pas mes paroles de vieillard te mettre en retard."

Après une brève hésitation, j'acquiesce vivement, rajuste la sangle retenant mon arme, et file en direction des portes. Il a toujours fait preuve d'une volonté protectrice flagrante à mon égard, mais je dois bien admettre que je suis surpris par son attitude. Je ne suis pas stupide, je sais bien qu'être milicien signifie risquer sa vie, mais je suis fier d'en faire partie. Peut-être en doute-t-il ? Je hausse brièvement les épaules, songeant que je pourrais lui en parler lorsque je reviendrai.


[Acquisition Rp de l'anneau de guérisseur]



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 Sujet du message: Re: Les habitations
MessagePosté: Ven 28 Sep 2012 17:33 
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~2~



Le chemin jusqu'à la boutique est calme, Genji restant muet, mais ses mouvements de tête indiquant son intérêt pour le chemin emprunté. Je sais qu'il souhaite bien faire en m'aidant, mais je n'en comprends pas vraiment la raison. Étant donné qu'il semble aussi proche de Nawakura Ayame, pourquoi ne pas être rentré avec elle ? Visiblement, ce n'est pas pour converser qu'il m'accompagne. Souhaite-t-il simplement savoir où je réside ? Pourquoi ne pas l'énoncer de vive voix, dans ce cas ? Peut-être est-ce lié à l'absence de son jumeau ? Mais pour quelles raisons ne pas rentrer alors ?

Aucune réponse ne m'arrive alors que nous approchons de la boutique. Je suis d'ailleurs surpris de voir plusieurs personnes, dont des clients réguliers, frapper à la porte. Leurs visages arborent une expression perplexe, me faisant hâter le pas. Apercevant la petite silhouette courbée par l'âge de notre voisin d'en face, je me dirige vers lui. Une main dans le dos, il se lisse une longue moustache, fixant alternativement la porte et l'un des badauds.

"Honorable Shin'Ichi, que se passe-t-il ? "

L'ynorien âgé se tourne vers moi, une lueur surprise dans le regard. Son émotion passée, il désigne l'entrée du chef.

"J'aimerais bien le savoir, mon garçon. Ton oncle ne t'a pas prévenu d'une absence ?"

Ma tête fait un signe négatif d'elle-même. Plongeant la main dans ma besace, je m'avance en demandant le passage, puis j'en extirpe la clé, faisant jouer la serrure. Je suis inquiet. Cela ne ressemble pas à mon parent d'agir de cette façon, et surtout sans prévenir qui que ce soit. Aussitôt débloquée, je pousse fortement la porte, débouchant sur la boutique totalement sombre. Prestement, je m'avance jusqu'au comptoir. Un son de gorge m'interpelle alors que je m'apprête à poursuivre dans la demeure. Braquant mon regard sur la droite, j'y découvre une forme allongée sur le flanc.

Je n'ai aucun doute.

"Oncle Masaya !"

Plaquant une main rendue rigide par l'appréhension contre sa gorge, je prends son pouls. Il est un peu faible, mais présent. J'inspire puis expire lentement, cherchant à retrouver mon calme. Si je panique, je ne pourrais pas l'aider. De l'autre côté du comptoir, Genji parle calmement aux personnes présentes, les empêchant d'aller plus avant dans la pièce. Masaya respire, mais mal, provoquant un sifflement audible. Non loin de lui, j'aperçois vaguement une racine, et des morceaux apparemment mâchés au sol.

Je ne sais pas ce que c'est, mais l'oranien semble être parvenu à le rejeter. Avec précaution, je palpe la gorge de mon parent, la trouvant un peu gonflée, mais je suis davantage préoccupé par ce qui se passe dans sa poitrine. Apposant une main contre son torse, j'y accumule mon fluide de lumière.

"Gaïa, je vous en conjure..."

Plissant les yeux, je diffuse mon énergie curative dans la cage thoracique de mon aîné, scrutant son visage à chaque instant. Petit à petit, je sens son coeur et sa respiration prendre un rythme plus approprié. Je ne relâche pas mes efforts pour autant, pas avant qu'il n'ouvre les yeux.

"Je suis là. Je suis rentré, oncle Masaya."

De longues minutes s'écoulent quand il entrouvre enfin les yeux. Son regard est empli de lassitude, mais il tente quand même de me sourire en me voyant. Attentif, je vérifie son pouls, son souffle, et sa température un peu élevée. Au moins, ce qui le faisait souffrir semble avoir disparu.
Avant même de demander un coup de main à Genji pour le porter jusqu'à la chambre, le milicien est déjà à mes côtés, les yeux rivés à mon profil. Ce n'est qu'en sentant sa présence que je prends conscience qu'il a fait partir les badauds. Je sais que je dois le remercier, mais seule la santé de l'herboriste occupe mes pensées.

~


L'aide de Genji s'avère précieuse, me permettant de me décrasser avant d'aller reprendre ma place au chevet de l'homme âgé. Mes yeux violins ne quittent pas son visage, faiblement éclairé par une lanterne à la lumière douce. Prenant place à genoux à mes côtés, le milicien reste silencieux. Au bout d'un moment, alors que je change le linge frais du front de mon parent, il se décide.

"J'admire votre sang-froid... Je ne sais pas comment j'aurais réagi à votre place."

"Pendant un instant, j'étais loin d'être calme. Maintenant aussi..."

Levant la main, j'observe ma paume, secouée de légers tremblements. Serrant le poing, je le repose contre ma cuisse, fermant à demi les yeux.

"Je croyais avoir accepté le fait que la fatalité pouvait frapper n'importe qui, mais je me suis surestimé. "

"On ne sait jamais comment on va réagir à la disparition d'un proche. Si jamais il arrivait malheur à Junji, je..."

Pivotant un peu, je vois le milicien légèrement penché en avant, les doigts agrippant le tissu de son pantalon. Il a un air visiblement préoccupé. Je ne doute pas qu'en cet instant, il pense à son jumeau. Vu les coups d'yeux qu'il m'envoie, je pense deviner ce qui le tracasse. Tendant la main, je la pose contre le haut de son bras. Quand j'ai finalement son attention, je lui adresse un signe de tête.

"Je vous suis reconnaissant pour votre aide. Je peux m'occuper de la suite. Vous devriez rentrer, et aller voir votre frère."

Le visage de l'oranien affiche une expression incrédule.

"Comment le savez-vous ?"

"J'aurais sans doute eu le même fil de pensées. Allez-y, et prenez soin de vous."

A ma grande surprise, le milicien appose les mains au sol, prenant une posture résolument respectueuse. Dans les quelques secondes qui suivent, il s'empare de son bagage, et sort du bâtiment. Faisant un léger signe de tête négatif, je m'apprête à me lever quand la main de mon oncle rencontre la mienne. Bien que fatiguée, son expression semble heureuse.

"Bienvenue à la maison, Kiyo'."

"Oui, mon oncle. Je suis rentré. "

Me sachant peu enclin à dormir en ce moment, je garde précieusement la main rude de cet homme dans la mienne, veillant sur son sommeil.



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Dernière édition par Kiyoheiki le Lun 1 Oct 2012 17:27, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Les habitations
MessagePosté: Lun 1 Oct 2012 17:23 
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~3~



Pendant une poignée de jours, il me faut rester au chevet de mon oncle. L'observer et faire le lien avec mes activités me permet de l'aider à se rétablir. J'ai noté que son état s'est dégradé lorsque je suis allé le voir après avoir été dans la réserve, là où cette mystérieuse racine est entreposée. Après l'avoir mise sous scellé dans un baril de petit gabarit puis aéré la pièce, je parviens enfin à me débarrasser des effluves. Vu ses symptômes, je n'ai aucun doute concernant ce qu'il lui est arrivé. Oncle Masaya a du recevoir ce nouveau végétal par voie commerciale, sans doute pour l'analyser, et en définir les usages médicaux possibles. A en juger par son état, il y a fait une brutale allergie, mais a heureusement recraché la racine à temps.

Debout derrière le comptoir, je croise les doigts, apposant mon menton dessus. Mon regard se rive au nœud visible du bois, sans que j'y prête grande attention. Avec le recul, la scène me revient en mémoire. Je n'ose pas imaginer ce qu'il se serait passé si nous étions arrivés ne serait-ce qu'une journée plus tard. Pendant un instant, j'y ai presque vu la punition pour avoir ôté la vie d'une personne. Fort heureusement, Gaïa ne m'a pas retiré son don lumineux. Il n'empêche que cette éventualité me fait frissonner.

Je veux me racheter auprès de la Déesse, quand bien même je n'ai pas tous les torts. Si je redoute lui adresser une prière, comment pourrais-je me revendiquer guérisseur et fidèle ? Je pousse un léger soupir, faisant s'envoler une mèche brune.

"Quelque chose te tracasse ?"

Je regarde par-dessus mon épaule. Un peu surpris, je découvre l'ynorien âgé debout, avançant avec précaution, et emmitouflé dans une couverture traînant au sol.

"Là, c'est de te voir debout qui me perturbe."

"Ah mais ! Pas question de rester couché un jour de plus ! Mon futon va finir par ressembler à un moule à Masaya !"

L'homme pousse un souffle par le nez, à l'instar d'un jeune garçon vexé d'être laissé en-dehors d'activités amusantes. J'esquisse un sourire, secouant négativement la tête tandis que l'homme s'asseoit sur une chaise basse à ma gauche. Je m'apprête à répliquer quand de légers coups sont frappés à la porte. Une voix connue, ou plutôt deux, s'élèvent.

"Appren..."

"Rha ! Décrispe-toi un peu ! Tu ne peux pas l'appeler simplement par son prénom ? "

"Junji..."

"Tu vois ? Avec moi, tu y arrives ! Va falloir travailler ton sens de la communication."

"..."

"Bon. Kiyo' ? Tu es là ? C'est Uzuuma Junji et Genji !"

Mon oncle sourit, puis lance une tirade moqueuse.

"Va vite, je ne voudrais pas qu'ils enfoncent la porte."

Contournant le meuble, j'ouvre aux jumeaux, restant un instant muet. Je ne les ai toujours connus qu'en tenue de milicien, mais il est vrai qu'ils sont ynoriens avant tout. Le terme de jumeau est parfaitement adapté, puisque les deux jeunes hommes portent le même yukata d'un vert sombre fermé par un ceinturon brun. Ils sont chaussés de getas, et ont attaché leurs cheveux en queue-de-cheval simple. La seule différence entre eux est leur expression faciale. D'un côté Junji affiche un sourire jovial, de l'autre Genji croise fermement les bras, comme ennuyé.

Tenant la porte, je me décale pour les laisser entrer. J'ai à peine refermé le battant de bois que la voix joueuse de mon oncle s'élève.

"Une invasion de jeunesse ! Vous avez décidé de me rappeler mon âge, c'est cela ?"

"Pourquoi ? Pour vous le rappeler, il suffit de regarder vos cheveux gr... Aie !"

La paume de Genji vient de percuter l'arrière du crâne de son jumeau, venant se placer en biais vers son épaule opposée.

"Que vais-je pouvoir faire de toi... "

Le jeune homme s'incline poliment avant de reprendre la parole.

"Bonjour à vous. Je suis heureux de voir que vous vous portez mieux."

Il m'adresse alors un regard amical, auquel je réponds de la même façon. Junji se redresse, grommelant un moment, puis il salue à son tour. Ses yeux sombres passent de mon visage à celui de mon parent, s'arrondissant un peu avec une lueur curieuse. Tandis qu'il s'approche du comptoir, il prend la parole.

"Vous êtes parents ? Non mais, vraiment ? Je veux dire, vous ne vous ressem..."

Cette fois-ci, il évite la paume de son jumeau, lui tirant la langue avec un air joueur. J'esquisse un sourire, sentant que mon oncle veut rentrer dans son jeu. Je ne compte pas l'en empêcher. Après tout, cela fait des jours qu'il est cloué au lit, sans avoir rien d'autre à faire que de se reposer.

"Tout n'est pas marqué sur le visage des gens, gamin."

Au dernier mot, Junji tique, toute son attention accaparée par l'ynorien.

"Qui peut deviner qu'à ton âge, je battais les plus expérimentés des joueurs de shôgi ?"

"Ca devait être il y a longtemps. Je suis prêt à parier que je peux vous battre à plates coutures !"

"Je relève ton défi. Mais tu as quelque chose à parier, au moins ?"

Le milicien prend un instant de réflexion, jetant un regard à son frère qui se masse la tempe en secouant la tête. Radieux, Junji tend l'index vers mon parent.

"Une bouteille toute fraîche d'alcool de riz !"

"Pari tenu !"

Avant même que je puisse ouvrir la bouche, les deux compères se rendent dans la demeure. Je perçois vaguement le son d'un placard, la pose d'un objet de bois, puis le mouvement d'une porte coulissante. Levant le nez, je rencontre le regard blasé de Genji. La seule réaction que nous avons est de nous mettre à sourire et rire doucement. Tandis que je me hisse sur le comptoir, j'invite le jeune homme à prendre le siège bas.

Une fois assis, son expression se fait un peu plus sérieuse.

"Votre oncle a l'air d'aller mieux, mais vous, vous semblez un peu fatigué."

"Il est vrai que j'ai du casser mon rythme de repos pour prendre soin de lui, mais cela en valait la peine. "

Son regard se fait un peu plus insistant, m'amenant à pousser un souffle.

"Et mes cauchemars sont encore trop présents. "

L'ynorien acquiesce, puis son visage s'éclaire. Apposant la main contre son yukata, il en extirpe une petite bourse en cuir qu'il m'envoie. L'attrapant au vol, je me demande ce qu'elle contient quand il devance ma question.

"C'est un bonus reçu après la mission. Il s'agit d'une gemme à faire sertir sur une pièce d'équipement, et qui aiderait à mieux contrôler la magie. Junji et moi n'en faisant pas usage, j'ai pensé à vous... Enfin, je veux dire que je pensais qu'elle pourrait vous être utile."

Genji abaisse les yeux vers le sol de bois tandis que j'ouvre le contenant, y trouvant un bijou aux reflets changeants. Je suis touché par son attention, mais si l'on parle magie, pourquoi ne pas l'avoir donné à la milicienne Nawakura ? Cette pyromancienne pourrait sans doute en avoir davantage besoin que moi. D'un autre côté, je me doute que prendre cette décision a fait suite à une longue réflexion. Je vais considérer cela comme le présent d'un camarade proche, presque un ami en vérité. Replaçant la gemme dans son sac, je mets celui-ci dans ma besace. Je m'apprête à le remercier, mais suis interrompu par les rires de nos parents respectifs. Je n'ose pas imaginer à quoi ressemble le champ de bataille du shôgi, ni même s'ils sont toujours en train d'y jouer.

En tous cas, il semble évident que ces deux-là ont pas mal de points communs.


[Acquisition rp de la Gemme de magie]


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 Sujet du message: Re: Les habitations
MessagePosté: Mer 24 Oct 2012 14:11 
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[Interlude]

~1~



Debout devant le miroir en pied, si grand que je peux m'y voir totalement, et en ayant encore une bonne tête de marge, j'observe ma tenue. Lorsque j'ai appris à oncle Masaya ma promotion au sein de la milice, ce dernier a tenu à m'offrir un yukata neuf. Un simple nécessaire pour réparer les miens, troués par des armes au cours de mes missions, aurait été suffisant, mais l'humain dans la force de l'âge a tenu à marquer l'événement. Je me retrouve donc paré d'une tenue neuve, d'une teinte nuit de pleine lune, aux rebords clairs. Le yukata est fermé par une bande de tissu noir, et même mes getas ont été remplacés.

Silencieux, je laisse l'humain nouer un ruban doré, neuf également, retenant ma chevelure au niveau de la nuque. Sur ses traits ridés, et tandis qu'il repousse sa longue chevelure poivre et sel, une expression satisfaite apparait. Après avoir croisé les bras, mon parent m'incite à me tourner, lui montrant ainsi la totalité de mon nouvel habit. Soudain, son sourire s'élargit. Malgré une envie presque instinctive de lever la main pour contrer son poignet, je le laisse faire tandis qu'il s'amuse à m'ébouriffer. Lorsqu'il s'arrête, m'ayant fait sourire à mon tour, il prend la parole.

"J'ai l'impression que c'était hier que tu t'enrôlais dans la milice. Et aujourd'hui, regarde-toi. Un véritable et honorable jeune ynorien."

Une légère pointe d'embarras m'enserre la gorge, ou alors c'est simplement l'émotion de voir mon parent rayonner de fierté. Je suis pourtant en bas de l'échelle, mais passer d'apprenti à instructeur marque quand même une étape.

"J'aurais préféré que tu puisses célébrer cela avec ta tenue neuve..."

Suivant son regard, je jette un coup d'oeil en direction du présentoir vaguement humanoïde où sont rangés le plastron et les jambières prêtés par la milice. Prenant appui sur un pied, je resserre la bande de tissu, lui répondant avec amusement.

"C'est parce qu'elle ne m'appartient pas que je ne peux pas la porter à mon gré."

"Oui, je sais. Propriété de la cité, missions uniquement et gnagna gna... Il faudra quand même que tu l'essaies, pour voir si elle te va."

"Ne t'inquiète pas, j'ai déjà eu l'occasion de la porter dans les locaux."

"Mais cela n'a rien à voir ! Je n'étais pas là !"

L'humain prend un air boudeur, comme un enfant qui n'a pas pu assister à un spectacle attendu depuis un moment. Ramenant ma chevelure sur mon épaule gauche, je l'observe puis émets un léger rire.

"J'ai compris, j'ai compris. Je la mettrai ce soir en rentrant."

Le visage de mon oncle s'illumine, puis il jette un regard par la fenêtre de la chambre. Pendant qu'il semble perdu dans ses pensées, j'attrape les lanières de mes chausses neuves. J'ai à peine fini de m'assurer de leur solidité que l'herboriste reporte son attention sur moi.

"Il reste encore une ou deux heures avant le rendez-vous. J'ai hâte d'y être."

"Hâte ? Pour profiter d'un bon coq au praijo ? Rencontrer le milicien Tanigura Hidate ? Revoir les jumeaux Uzuuma Junji et Genji ? Ou est-ce parce que Junji est justement censé t'apporter la bouteille d'alcool que tu as gagné ?"

C'est avec un air malicieux que mon parent lance une réplique interrogative.

"Qui t'a dit qu'il n'y avait qu'une seule bonne réponse ? "

Tout en éclatant d'un rire sonore, l'homme me devance dans le couloir puis dans la boutique. Le panonceau sur la porte menant à l'extérieur signale la fermeture exceptionnelle de l'herboristerie. C'est bien entendu temporaire, mais même si cela ne doit durer que le temps d'un repas, autant faire les choses correctement. Lorsque j'arrive à mon tour dans la boutique, j'enfile mes chausses et reprends mon Fang Bian Chan. Une légère vibration se produit quand le manche heurte sans violence la bague dorée à mon index droit. Oncle Masaya ne m'a pas encore questionné à son sujet, quand bien même il l'a évidemment remarqué.

Paré, je vérifie avoir dans ma besace ma bourse de yus et le petit paquet contenant la gemme de magie. Étant donné que j'ai encore un peu de temps devant moi, autant l'occuper utilement.

En quelques pas, je franchis la distance me séparant de la porte, puis me retourne.

"On se retrouve à l'auberge."

"Compris. Prends ton temps, mon garçon."

J'acquiesce avant d'emprunter la sortie. J'ai quelques courses à faire, et surtout des renseignements à prendre au sujet de la gemme offerte par Genji. D'ailleurs, j'ai aussi hâte de revoir les jumeaux. Après tout, c'est dans un peu moins d'une journée qu'ils partent pour leur mission longue durée, et tenue secrète.



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 Sujet du message: Re: Les habitations
MessagePosté: Dim 4 Nov 2012 16:08 
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Quatrième mission de milice : Pédagogie sur le terrain

~1~



Le soleil vient juste de se lever sur Oranan, éclairant la façade de la boutique avec difficulté. Pourtant, oncle Masaya et moi sommes déjà réveillés depuis un moment. Dans la pièce adjacente, nous travaillons à la préparation de divers baumes. Peut-être est-ce le temps se faisant plus frais, mais les médicaments combattant les coups de froid et la fièvre partent rapidement. En somme, les finances de la boutique sont au beau fixe. Malgré mes protestations, l'oranien âgé m'en offre une partie, au cas où j'aurais des achats imprévus à faire.

Mon esprit est toutefois tourné vers la tâche de milice que je vais devoir remplir. Je suis impatient, et en même temps tendu. Hier, mon supérieur m'a appris que mon devoir allait être double. En ville, un groupe atypique gagne un large montant de yus en revendant des armes. La milice ne serait pas aussi préoccupée par l'affaire si ces personnes, des sinaris en vérité, n'étaient pas aussi peu scrupuleuses concernant leurs clients. Je plisse les yeux, contrarié au fait avéré qu'ils arment également des forces ennemies de la milice. Sauf que, leur race exceptée, je ne sais rien d'eux. Combien sont-ils ? De quel genre d'armes s'agit-il ? Où se trouve leur cachette et comment procèdent-ils à leurs transactions ?

Tout en réfléchissant, je retourne dans la chambre pour me préparer. Dépouillant le présentoir de l'équipement prêté, je revêts ce dernier et jette un coup d'oeil dans le miroir. Sur la tunique légère et à manches courtes, de coloris gris, est placé le plastron. Couvrant jusqu'au niveau de mes hanches, il ne protège que le dessus de mes épaules. Sur mes biceps en partie à découvert, les bracelets offerts par Hidate masquent ma peau sombre. Camouflées par le pantalon large et plissé, appelé hakama, bleu sombre, je sens les jambières couvrant de mes genoux à mes chevilles. Porter un hakama n'est pas une chose que je fais souvent, mais avec le plastron, impossible de me vêtir d'un yukata classique.

Tandis que j'attache ma chevelure comme à l'accoutumée, mon parent s'adosse au montant de la porte, m'observant avec attention. Une expression proche de la fierté peint ses traits, les illuminant malgré un air un peu fatigué.

"Instructeur d'Esh Elvohk... Ne tape pas trop fort sur les doigts des recrues, hum ? "

"J'espère ne pas avoir à en arriver là."

Bientôt, je remarque un petit paquet dans les bras de l'herboriste. Quand l'homme s'aperçoit que je l'ai vu, il s'avance en me le tendant, lisant à voix haute le message inscrit sur un tout petit rouleau.

"J'ai appris la promotion de ton héritier. Si tu pouvais lui transmettre ce don, je t'en serais gré. Encore toutes mes félicitations. Et c'est signé Kawarin Toranosuke."

"Tiens ? Je croyais que ce clan ne voulait plus rien à voir à faire avec les d'Esh Elvohk ?"

Un air espiègle apparait sur le visage âgé.

"C'est bien le cas. Après tout, le cadeau est destiné à mon fils."

Sur ce, il m'adresse un clin d'oeil complice tandis qu'il m'incite à défaire le paquet. À l'intérieur, du tissu d'une teinte blanc-gris. Prenant celui-ci à pleines mains, je perçois la qualité du matériau et sa légèreté. Nul doute que cet objet a été confectionné avec un très grand soin.

Lorsque je le tire à moi, je note qu'il s'agit d'une cape presque aussi grande que moi, et dotée d'une capuche. Sans me laisser le temps de protester, chose dont je n'ai d'ailleurs pas envie, oncle Masaya me l'emprunte pour m'assister dans sa mise en place. Je sens à peine le poids de cet habit supplémentaire, et en l'examinant avec attention, je note la présence de motifs brodés le long des pans. Le fil clair dessine des volutes identiques de part et d'autres d'un demi soleil stylisé. Un fermoir portant l'emblème d'Oranan maintient l'habit à peu près au niveau de mon épaule droite.

Un détail me saute aux yeux, et je m'empresse de prendre mon arme pour le vérifier. En essayant de placer la sangle comme à mon habitude, je constate un inconfort certain, et risque de froisser durablement le cadeau neuf. Ôtant puis rétrécissant l'attache, je décide de ne porter mon arme que sur mon épaule droite, tout en gardant la main sur le ruban de cuir. Mon bras droit est quasiment à découvert, mais la gêne a disparu. Faisant quelques mouvements pour m'assurer ne pas avoir l'épaule bientôt engourdie, j'adresse un sourire sincère à mon parent.

"Si tu en as l'occasion, remercie maître Kawarin de la part de ton fils."

La large main de l'humain vient se poser en douceur sur mon crâne, le tapotant gentiment. Peu après, je me dirige vers la sortie de la boutique, ayant vérifié avoir bien pris mes affaires. Au moment d'ouvrir la porte, je me retourne.

"Je suis parti."

Levant la main, mon oncle me fait un petit signe, l'accompagnant de paroles empruntes de chaleur.

"Bonne journée, et fais attention à toi."

J'acquiesce, puis sors, me dirigeant vers le bureau de la milice. Mes pensées convergent vers ma mission. Non content de devoir mettre un terme aux agissements des trafiquants, je vais également être en charge de recrues. Quatre. Quatre nouvelles têtes dont je ne sais rien, et dont je dois former le cœur et l'esprit pour en faire des apprentis dignes de ce nom. Je me sens assez confiant à ce sujet. Après tout, pour entrer dans la milice, il faut déjà posséder quelques qualités indispensables. Le reste dépend de ma capacité à les guider sans qu'ils me suivent aveuglément pour autant. Ce n'est pas parce que le sergent m'a conseillé de ne pas me laisser marcher sur les pieds, voire d'user de force, que je dois m'inquiéter. Tout va bien se passer.

( Sans le moindre doute... Certainement... Probablement... Avec de la chance... Oh... Par Gaïa ! )

Enfin, je l'espère.




[Acquisition rp de la Cape théurgique]

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 Sujet du message: Re: Les habitations
MessagePosté: Sam 2 Mar 2013 01:21 
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Je me dirige à grands pas vers la boutique, après avoir été jusqu'aux écuries avec Ganko. Fort heureusement, celles-ci étaient encore en activité, me permettant de confier mon étalon et son harnachement particulier aux palefreniers. Suite à mon récit sur le caractère du géant, ils avaient pris soin de le placer dans le même pré que quelques hongres. Ainsi, Ganko n'aurait pas à sentir sa position menacée. Je revois encore ce quadrupède partir au galop dès sa selle et les rênes retirées. J'ai hâte de rentrer, le souffle de Rana se chargeant de la fraicheur marine et nocturne.

Je trouve la porte déverrouillée, et m'empresse d'entrer. Masaya n'a pas allumé la lanterne de la boutique, mais le panneau coulissant donnant sur notre zone d'habitation laisse filtrer de la lumière. J'esquisse un sourire embarrassé en constatant que j'ai oublié ma clé. De toutes manières, il est trop tard pour que quiconque vienne à cette heure tardive. Laisser la porte ouverte quelques minutes de plus ne changera rien. Je m'en détourne, devinant les contours des meubles dans la pénombre.

Cela fait à peine quelques jours que nous sommes partis, et pourtant ces étagères m'ont manqué. Je m'avance après le comptoir, laissant là mes getas. Ma sacoche et mon arme sont à leur place sur le crochet mural. Tout en les effleurant, j'esquisse un sourire.

"Oncle Masaya ! Je suis rentré !"

Je ne perçois pas de réponse, mais le bruit du crépitement du feu dans la pièce à vivre m'incite à m'y rendre. Peut-être que l'oranien âgé est occupé et ne m'a pas entendu, ou alors il est en pleine dégustation de soupe. J'allonge les foulées, affichant un air détendu tandis que je me dirige vers la pièce.

Quand j'arrive dans l'encadrement de bois, mon sang se fige. Mon parent est au sol, à côté du foyer, et sa position m'indique qu'il n'a même pas essayé d'amortir sa chute. Je me précipite à ses côtés, sentant mon muscle cardiaque se mettre à cogner à un rythme soutenu. La scène fait écho en moi. Aurait-il repris de ces racines allergènes ? Ne prenant pas le temps de réfléchir, j'applique ma main contre sa gorge, à la recherche d'un pouls. Rien. Pas le plus petit mouvement. Même sa cage thoracique demeure immobile. Est-ce son coeur ? Immédiatement, tout en veillant à le maintenir sur le flanc, j'applique ma main à l'emplacement de ce muscle. Pas même le plus petit frémissement.

"Gaia ! Je vous en supplie !"

Déterminé à le sauver, je scrute la moindre de ses réactions tout en diffusant ma magie curative dans sa poitrine. Je suis attentif à chaque détail. Est-ce que ses lèvres viennent de se mouvoir ? Je suis sûr de l'avoir entendu respirer. Est-ce bien son muscle cardiaque qui vient de bouger sous ma paume ? Une longue goutte de sueur glacée dévale mon échine quand je ne ressens aucun changement se produire. Ma magie fait effet, mais il semble ne pas y avoir la plus petite blessure à refermer. Je tremble soudain. Son coeur a l'air d'avoir tout bonnement cessé de battre.

Un instant décontenancé, je cherche dans ma mémoire un remède ou des gestes pour l'aider. Mes pulsations s'accélèrent, ma gorge se serre, et je sens mon bras gauche se raidir. Oui, je dois commencer par là. Brisant ma promesse, j'applique ma main sur mon avant-bras immobilisé par l'attelle d'écorce, et y envoie ma magie, soignant l'os abimé. Quand je retrouve des sensations, j'arrache brutalement ce qui restreint mes mouvements, et fais basculer mon parent sur le dos. Je dois relancer son coeur sans perdre un instant !

(Vite, en rythme !)

J'appose mes mains en croix sur son torse, constatant l'horrible faiblesse de mon bras gauche. À genoux, j'appuie en suivant mon propre rythme cardiaque sur son sternum, tout en insufflant ma magie de lumière en lui. Je peux le sauver ! Je dois le faire ! Gaia m'a offert son don de vie, c'est le moment où jamais pour en faire usage ! Priant la Dame de Lumière, je masse le torse de l'ynorien, guettant ses réactions. Son visage a déjà perdu des couleurs, et je ne le vois toujours pas respirer.

"Masaya ! Accroche-toi ! Repars, allez !"

Je serre les dents, me rendant compte que ma bouche est totalement sèche. Une angoisse profonde m'étreint, mais je refuse d'abandonner. Il y a moins d'une heure encore, il marchait tranquillement à mes côtés. Son corps ne peut pas le laisser tomber aussi soudainement ! Je m'y refuse ! À un rythme aussi régulier que possible, tant dans la pression qu'en terme de nombre, j'appuie des deux mains. Tout mon être est en accord parfait, focalisé sur une seule tâche : ramener mon oncle à la vie. J'emploie toutes mes connaissances, allant insuffler de l'air dans ses poumons avant de reprendre le massage.

Je suis terrorisé. J'ai peur de le perdre. J'en viens presque à douter de ce que je suis en train de faire, mais je ne vois pas comment agir autrement. Alors je continue, employant ma lumière afin de le ramener jusqu'à moi. Je crois apercevoir le frémissement de ses lèvres ou bien une réponse à ma pression. Je regarde ce visage ridé, sentant le mien se crisper. Je refuse d'imaginer le pire. Cela ne peut pas se produire, pas alors que je suis là pour le secourir.

"Tu peux y arriver. Allez, reprends-toi, je t'en supplie !"

Les flammes crépitent non loin, mais elles me donnent l'impression d'être à des lieues de moi. Le feu faiblit peu à peu. Il est mourant, produisant une atmosphère inquiétante tout autour de nous. Je mets à contribution toutes mes capacités, guettant et espérant une réaction positive. Je ponctue mes paroles de gestes sur sa cage thoracique.

"Tu es plus vaillant que cela ! Fais un effort ! Papa !"




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 Sujet du message: Re: Les habitations
MessagePosté: Ven 8 Mar 2013 18:10 
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~7~



Perdu dans mes pensées et fatigué par mes heures de chagrin, je n'ai pas vraiment conscience de la distance parcourue silencieusement dans les ruelles. Hidate marche lentement à mes côtés, m'abritant des bourrasques nocturnes de sa haute stature. Je pousse un lent souffle quand ma main se pose sur la poignée de la porte. Je redoute de rentrer. La boutique a beau être mon foyer, les souvenirs qui y sont liés me rendent hésitant. Je suis certain que dès que mon regard se posera sur quelque chose, un événement impliquant Masaya me reviendra. J'ai peur de souffrir encore, mais paradoxalement je refuse d'oublier.

Un lent contact entre mes omoplates me fait reporter mon attention sur mon camarade milicien. Sa peau est hérissée, me faisant prendre conscience de la faible température. Prestement, j'ouvre la porte. J'ai beau ne pas être bien, inutile que mon grand ami en souffre. D'un geste, je l'invite à se diriger au coeur de l'habitation, refermant le panneau de bois derrière moi. Je marque une courte pause avant de me retourner. Lorsque je le fais, le comptoir entre dans mon champ de vision, m'amenant l'image de mon oncle s'y tenant avec un sourire ravi.

Je baisse la tête, avançant vers le couloir et le parcourant après m'être défait de mes zoris. Hidate m'accompagne tandis que je me dirige dans la pièce à vivre. Mon esprit est ailleurs quand je l'invite à prendre place à la table basse. Les braises du foyer rougeoient encore, facilitant la reprise des flammes. Distraitement, je décide de nettoyer une portion de riz, et de préparer de la boisson pour mon invité. Le milicien en profite pour m'emprunter la lame des Kawarin pour l'observer.

"L'endroit est un peu désordonné. Je n'ai pas encore eu le temps de faire du rangement."

"Ne t'en inquiète pas."

Je poursuis la préparation de ce maigre repas, mes oreilles pointues se focalisant sur le crépitement du bois sec. Tous les détails concourent à raviver des souvenirs. Si je n'avais pas autant pleuré, j'aurais sans doute encore les larmes aux yeux. Une fois le repas servi, je m'éclipse quelques instants, allant prendre un onguent apaisant pour mes yeux. Hidate mange calmement, mais me lance régulièrement un regard concerné.

De longs instants s'écoulent avant qu'il ne décide de prendre la parole.

"Tu t'es décidé ?"

Massant mes paupières inférieures, je lui réponds avec une curiosité lasse.

"À quel sujet ?"

"La boutique. "

Je réfléchis un peu, tentant de réorganiser mes idées. Lorsque c'est fait, je referme le pot à médecine.

"Il est trop tôt pour prendre une décision. Un envoyé des Kawarin est censé me confier le titre de propriété quand tout sera réglé, mais en attendant..."

"Et après ?"

Il semble insistant, m'incitant à orienter mon visage vers lui.

"Penses-tu pouvoir t'en occuper, et continuer à la milice ?"

Je soutiens son regard, entrouvrant les lèvres pour lui répondre. Je les clos presque aussitôt. Cette question...

"C'est ce que je me demande depuis des heures... Je suis entré dans la milice pour lui, pour protéger Masaya. Lui parti, je n'ai aucune raison de continuer."

Je lis une certaine peine dans l'expression de mon interlocuteur, ce qui m'incite à poursuivre.

"Mais depuis, je suis devenu un véritable milicien, et j'ai rencontré des gens formidables. Les Uzuumas, mes apprentis, et toi, évidemment. Intégrer la milice est sans doute l'une de mes meilleures décisions à ce jour."

Avec lenteur, presque comme si je l'imaginais, un sourire touché se peint sur les traits du grand ynorien. Sa main se pose sur mon épaule gauche, en un geste puissant et contenu. Il acquiesce doucement, manifestant ainsi son soutien et sa compréhension. Je comprends enfin. Je ne suis pas seul, plus maintenant. Masaya était ma famille, mais j'en ai une autre d'un type différent à présent. La milice de la République comprend des proches, et ma vocation pour protéger ma patrie est devenue plus forte encore après mon voyage à Bouhen.

Je suis un milicien, tout comme je suis herboriste. Ces facettes me constituent, et je ne peux renier ni l'une, ni l'autre. J'adresse une expression de gratitude à Hidate. Ce dernier s'effleure le nez, puis il reprend la parole. Je l'ai rarement connu aussi loquace, alors j'en profite.

"Pourquoi ne pas former un assistant ?"

J'ouvre des yeux ronds, l'invitant à poursuivre.

"Tu tiens à la milice et à cet endroit. Impossible de faire les deux à la fois... Donc..."

Je baisse un peu les yeux, réfléchissant à son idée. Je me rappelle de mon enthousiasme à apprendre à l'enfant ynorien, Tohru, à contrôler sa magie. Peut-être puis-je trouver quelqu'un d'aussi volontaire en matière d'herboristerie ? Les possibilités me semblent importantes, et je reprends peu à peu confiance. Je sais que suivre cette voie va demander du temps, et que je ne peux pas confier la boutique au premier venu. Pourtant, ces difficultés me semblent bien faibles.

Je lève doucement la tête, songeant à mon oncle. La peine est toujours là, mais je fais de mon mieux pour ne pas la laisser prendre le dessus.

(Cela va aller. Oui, tout ira bien.)

L'oranien décide de rester me tenir compagnie, chose pour laquelle je lui suis reconnaissant. J'ai l'impression que cette épreuve nous a aidé à nous rapprocher. Je lui fais confiance, et il le sait. D'ailleurs, quand il apprend que j'ai acquis une monture, il se propose de lui-même pour m'apprendre les bases de l'équitation.

Ce jour est malheureux et triste, mais grâce à lui, je ne me sens pas aussi seul que ce que je craignais.



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 Sujet du message: Re: Les habitations
MessagePosté: Sam 6 Avr 2013 12:29 
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Localisation: Oranan


Alors que je marche dans les rues d'Oranan, en direction de la maison où je pourrais sûrement vendre le livre, mes pensées tourbillonnent sous mon crâne, sans que ma conscience y prête attention. Comme d'habitude. Ainsi est faite ma vie solitaire, de pensées et de réflexions qui n'ont parfois aucun sens, et de course, "d'emprunts", et de solitude, encore et toujours.

Je relève la tête et mes yeux croisent le ciel bleu et les nuages blancs. Je regarde devant moi, le regard fixe, le pas lent et quand je baisse à nouveau la tête, j'aperçois à quelques mètres de moi, une bâtisse très belle et très grande, dont les jardins soignés et les murs hauts sont dissimulés par les quelques arbres présents et par la haie qui les entoure. Je m'approche, souriant et tend la main en direction de la porte qui clôture l'enceinte de ma maison. Mon ancienne maison. Ma main ne rencontre rien que le vide. La porte en question git sur le sol, bien en dessous de celle-ci. Arrachée de ses gonds. Calcinée. Les arbres au feuillage autrefois si vert ne sont plus que des troncs noircis par les flammes. Les hauts murs blancs sont à moitiés effondrés et en place de toit, seules quelques poutres souviennent encore une couverture imaginaire et nostalgique.
Voilà bien sept ans que cet endroit est resté ainsi, inchangé. Depuis que tout a été ravagé, que tous ont été tués... Je me détourne de cette vision qui me brouille la vue. Ce n'est pas la première fois que je la vois tel qu'elle était avant... Tout ça. Telle que dans mes souvenirs. Pas la première fois que j'ai l'espoir de la retrouver, de retrouver mes amis, ma famille... Je continue à marcher. Une larme solitaire glisse sur ma joue et vient s'envoler dans l'air glacé du matin. Petite, fragile, elle gèle aussitôt. Avant de tomber devant le sol resté noir depuis longtemps, brisée en mille morceaux.

Quant à moi, je continue ma route, sans ralentir. Je suis déjà venu pleurer ici, je pleurerai sûrement encore. Mais pour l'instant, rien ne sert de s'attarder sur le passé. Ce qui est fait est fait. Et ne se reproduira plus.

_________________
Des armes, au secret des jours
Sous l'herbe, dans le ciel et puis dans l'écriture
Des qui vous font rêver très tard dans les lectures
Et qui mettent la poésie dans les discours
'Des armes, Noir Désir.'



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