[3 ter]

*23a*

Le disciple qui t'avait déjà servi repris du service pour toi en te donnant ce que tu demandais.

- "Faites-en bonne usage."

Il récupéra l'argent que tu lui présentas avant de s'en retourner à son travail.

- III -

Meraxès ne s’était pas remis de son apprentissage. Il avait ingéré trop de fluide, trop subitement, pour s’en remettre facilement. Il avait froid en permanence et suait pourtant sans cesse, ce qui lui causait une soif inextinguible. Ses sorts de soin ne suffirent plus et il se résolut à rejoindre le temple de Gaïa...

Il y fut bien accueillit, comme tout malade, miséreux ou notables. Les nones le prirent aussitôt en charge et on le mena à une chambre, où il fut couché. Lorsque le prêtre vint à son chevet – un homme étonnamment jeune pour sa fonction – il diagnostiqua immédiatement une ingestion abusive de fluides. Sa clairvoyance étonna Meraxès qui devint retissant à tout traitement. Il n’aimait pas qu’un esprit aussi perspicace l’ausculte et l’étudie...

Cependant le prêtre nota son changement de comportement et se fit plus rassurant, presque révérencieux. Cela suffit à maintenir Meraxès allongé, qui manquait de toute façon de force pour aller plus loin. Il finit par avouer avoir ingurgité des fioles de mana, et expliqua qu’il était affilié naturellement à la lumière, mais que l’envie d’apprendre et de se perfectionner l’avait conduit à oublier la prudence. Le prêtre se fit compréhensif, mais s’alarma aussitôt. Il réclama dans l’urgence des remèdes, de l'eau et des baumes aux servantes ; et maintint une main bénie sur la poitrine du souffrant. Les femmes vinrent avec linges, des bourses en lin, et un baquet plein d’eau fumante fit son apparition.

Meraxès se redressa de panique et le prêtre le coucha d’une pression. On retira sa robe pour le porter dans l’eau, dans laquelle fut déversé un tas d'herbes odorantes, et malgré l’agitation qui régnait, le prêtre maintenait sa présence rassurante et psalmodiait des prières.

L'eau brulante était désagréable à Meraxès, il voulut en sortir, mais il ne parvint pas à bouger. Son corps était paralysé et d'étranges remous continuaient à bercer les flots.

- V -

- IV -

La rémission de Meraxès dura quelques jours, un temps qu’il mit à profit pour se reposer. Il ne s’était pas arrêté depuis… Il fut surpris de reconnaitre des têtes qui ne lui étaient pas inconnues : des membres du clergé de Gaïa. Mais à sa grande déconvenue, on le reconnu comme l’elfe des lilas... apparemment. Les guérisseurs et guérisseuses le prirent en pitié et témoignèrent leur sympathie, ce à quoi Meraxès réagissait par un mutisme trouble ; peu enclin à évoquer, ni même à vouloir se souvenir du massacre du monastère des lilas…
Il finit par éluder toute les questions personnelles et déclarer avoir vagabondé depuis ce triste jour ; tout en luttant contre lui même, contre ses réminiscences obscures qui mettaient en péril sa récente sérénité. Il ne devait pas retomber dans ses tords, laisser ses désirs et angoisses de côté, et se concentrer sur son unique but.

Il en vint d’ailleurs à en parler avec celui qui lui avait sauvé la vie, le jeune prêtre, qui lui confia que le monastère disposait de documents et de réserves de fluides qu’ils pouvaient céder, avant de réaliser que c’était justement la cause de sa présence. Mais c’était trop tard et l’insistance de Meraxès finit par avoir raison de lui.

Il le mena dans une aile reculée du temple, dont l’accès était interdit au public, où ils rencontrèrent un vieux documentaliste. Il le laissa seul avec le vieillard, qui à son tour se désintéressa de lui. Il put alors consulter les archives à loisir et trouva une multitude de documents intéressants, mais scellés pour la revente, ainsi que d’autres, plus rares et moins… convenables, qui n’avaient pas grand chose à faire ici. C’était des sorts interdits, qu’il n’aurait pas du consulté. Des sorts qui étaient de toute façon hors de porté de tout apprentissage, car il nécessitaient une maitrise du fluide fantasque qui relevait de l'impossible, et les documents étaient donc disponibles à titre de consultation pour les théoriciens, mais qui, pour Meraxès, qui se savait doté d’une certaine singularité, prenaient un tout autre sens...

Il glissa alors les sortilèges interdits au milieu d’une pile de sortilèges lumineux et alla présenter l’ensemble au vieillard, qui ne prêta guère attention au détail. Meraxès demanda s’il pouvait acquérir ces parchemins, et s’il disposait de fluides lumineux.

- VI -

- V -

Le vieux documentaliste palpait les rouleaux de ses mains tremblantes et leva un regard suspicieux vers Meraxès, qui craignit qu’il se rendît compte de la présence d’écrits inappropriés. Cependant le vieil homme était davantage contrarié par l’interruption de sa lecture, que par le contenu de sa demande. Il répondit avec mauvaise volonté qu’il avait bien des fioles de fluide, et après quelques mouvements d’hésitation oscillant d’un côté comme de l’autre, il l’invita à le suivre à petit pas. Ils s’introduisirent dans une vieille remise sans fenêtre, où une lumière omniprésente émanait de bocaux et de bouteilles en verres aux contenus iridescents. Il en sélectionna deux pour l’elfe, et ils rejoignirent son bureau au pied des hautes bibliothèques.

Le vieillard grommela qu’il avait intérêt à avoir la somme nécessaire pour emporter tout ça. Il compta grossièrement les rouleaux à plusieurs reprises pour s’assurer qu’il ne se trompait pas, puis il réclama cinq mille cinq-cents dix yus à Meraxès. Lorsqu’il découvrit qu’il avait la somme nécessaire, le bibliothécaire hocha de la tête avec un bruit grossier où se mélangeait la surprise et la satisfaction, puis il rejoignit son siège contigu à un lutrin pour retourner à ses occupations.

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Meraxès retrouva la grande voûte du temple de Gaïa, ses parchemins dépassant de son sac et son bâton en main. Il n’avait qu’une hâte : consulter les documents qu’il venait d’acquérir ; mais il ne pouvait décemment pas s’adonner à la lecture d’écrits maudits dans un pareil lieux.

Il rejoignit le jeune prêtre envers qui il était redevable et le remercia pour ces soins et ses conseils, tout en le rassurant sur sa conduite à venir. Il promit d’être plus prudent dans son exploration et ses expérimentations, en ajoutant qu’il devait reprendre la route. Son interlocuteur ne fut pas dupe et comprit qu’il essayait d’apaiser ses craintes, cela transparaissait dans son regard. Mais il ne pouvait pas le retenir et ce fut avec une certaine déception qu’il lui fit ses adieux.

- VII -