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 Sujet du message: Re: Temple de Rana
MessagePosté: Dim 18 Mar 2018 21:19 
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Chapitre VIII : L'ultime épreuve


Akihito n'eut qu'à descendre une petite volée de marche pour ranger l'éclat de San Divyna qu'il avait sorti pour s'éclairer. En effet, le métal élémentaire de la lumière était présent en grande quantité, fournissant un éclairage éternel au passage secret et aux générations passées et futures de porteurs du Kizoku. Le métal était taillé en forme de diamant puis logé dans la pierre. En mettant de côté la vague odeur de renfermé, Akihito sentait la lourde atmosphère solennelle peser sur ses épaules. A la quantité de poussière qu'il voyait, il comprit que cela faisait des décennies que personne n'avait mis les pieds ici.

« Cent cinquante-quatre ans pour être exacte. » l'informa Amy en se posant sur son épaule.

Pendant une demi-douzaine de minutes, l'enchanteur s'enfonça dans la terre profondément. Il comprenait pourquoi personne n'avait pu trouver l'arme légendaire sans être choisis, il aurait fallu démolir le temple pierre par pierre pour en trouver l'entrée ou creuser sur des dizaines de mètres de profondeurs. Enfin Akihito aboutit dans un couloir rectiligne, dont il voyait à peine le bout. Les losanges de San Divyna éclairaient à intervalles réguliers le couloir de dalles de pierre blanche. Aux murs, une fresque semblait raconter une histoire. Une femme et un petit garçon, la femme qui part, le garçon qui reste sur place, elle revient, reste avec lui, trois personnes deviennent proches du garçon devenu un vieil homme... Akihito connaissait bien cette histoire : c'était celle de l'Elu de Rana, celui qui avait fait bâtir le temple. Le premier Fidèle de la déesse des vents, suivi des Trois, les trois premiers Grands Prêtres du temple. Ce que raconta la suite de la fresque était une histoire qu'il ne connaissait pas cependant. L'un des Trois se sépara des autres et chemina dans ce qui sembla être un petit village. Là, il s'y entretint avec des forgerons, que Akihito identifia à leur tablier et aux outils à leurs ceintures. Ensembles, ils frappèrent le métal, le battirent, le moulèrent. Puis au bout d'un certain temps, le membre des Trois repartit avec un paquet sous la main et rejoignit ses compagnons. Il leur dévoila ce que contenait son paquet un sabre. Ensuite, la fresque montre de nombreuses personnes, seules, portant le sabre. Certaines étaient blondes, d'autre étaient petites. Toute semblaient avoir un signe distinctif qui les démarquaient des autres et l'Oranais y reconnut plusieurs des héros de contes de son enfance. Le jeune Marco, reconnaissable à son écharpe rouge. La fougueuse Alia, qui malgré son bras gauche manquant, maniait le Kizoku Rana comme peu avait pu le faire. Puis arriva le dernier.. C'était un jeune homme aux contours flous comparés aux autres personnages, qui portait le sabre dans son dos. Si le jeune homme cru se reconnaitre, il n'en avait pas la certitude. Le dessin était bien trop imprécis pour qu'il puisse clairement s'identifier.
Akihito se sentit alors encore plus touché par la grâce et la solennité du lieu. Jetant un regard à ses illustres prédécesseurs, il avança avec une détermination toute renouvelée pour arriver enfin au bout du couloir. Là, il vit quatre couloirs, tous identiques, allant dans quatre directions différentes.

« Considère ça comme l'ultime épreuve, lui déclara Amy. Ta sagesse, ta force et ton courage y seront une dernière fois testé, mais cette fois par le créateur de l'arme, l'un de Trois, qui plaça ces trois obstacles dans le cas où je faillirai dans trouver un bon détenteur ou que l'entrée soit malheureusement découverte.

- Parfait, allons-y alors. »

Akihito commença par examiner les quatre couloirs un à un. Rien ne les différenciait, chaque pierre semblait identique à l'autre. Il fit quelques pas dans chacun des passages, mais aucun piège ne se déclencha, aucun mécanisme mortel ne lui tira de fléchette empoisonnée, aucune pierre géante ne roula pour l'écraser.
(La solution est ailleurs donc.)

L'enchanteur revient sur ses pas et se plaça face aux quatre entrées. (Si la réponse n'est pas quelque chose que je peux voir, c'est quelque chose que je peux sentir.) L'élément de Rana était l'air, cela avait certainement dû jouer dans l'élaboration de ces tests. Akihito ferma les yeux et se concentra sur ce qu'il ressentait, entendait. Il ne devait plus faire attention à ce que ses yeux lui montraient. Lentement, doucement, il entendit. Il entendit le murmure du vent venir à lui, de la droite. Il se mit face aux deux couloirs de droite pour déterminer duquel le vent venait. Il se rapprocha de l'un et entendit une bise sifflante, mordante. De l'autre, ce fut une brise plus accueillante, calme, qui souffla. Akihito fut alors tenté d'aller vers la seconde, pensant à une Rana douce et aimante. Puis il se rappela que Rana n'était pas à proprement parler une déesse « gentille » et aimante. Elle était comme le vent. Neutre. Parfois impitoyable, parfois calme. Penser que Rana était aussi tranchée, c'était se méprendre sur les enseignements qu'elle essayait de transmettre. Du moins, c'est ce que Akihito pensait. Il savait bien qu'il n'avait pas la sagesse absolue. (Encore heureux.) pensa-t-il en s'engageant dans le tunnel où le murmure se faisait plus violent.

« Pourquoi avoir choisi celui-ci ? demanda la Faëra alors qu'elle se réfugiait dans le col de Akihito.

- J'ai senti le vent venant de celui-là et de celui à côté, lui répondit-il en s'asseyant un instant, reposant sa jambe qui n'avait pas tout à fait récupéré pour le moment.

- Oui mais pourquoi pas le second ?

- Entre autres parce que si je dois être testé sur ma force, choisir celui qui semble la moins calme me semble sensé.

- Les autres porteurs qui ont choisi ce chemin en premier avait parfois des réponses similaires. Bien, passons à la suite alors ! »

Akihito grimaça en se relevant. L'escalier en colimaçon lui avait fait plus de mal qu'il ne le pensait, aussi se mit-il à boiter un peu pour diminuer les efforts sur sa jambe rendue faible par le combat précédent. (J'espère que ce n'est pas un autre combat, je ne suis pas en état de mener un autre affrontement.) se dit Akihito alors que le vent semblait souffler plus fort. Bientôt, il dût se protéger les yeux pour éviter que la poussière ne rentre dedans et lui abîme les yeux. (C'est quoi ce vent de folie en plein milieu d'un souterrain ??)

A mesure qu'il avançait, le vent se renforçait. A tel point qu'une mauvaise chute le fit glisser en arrière sur plusieurs mètres avant qu'il ne puisse se stabiliser. Pour franchir un tel mur de vent, il devrait forcer sur sa jambe pas encore tout à fait remise des évènements de la journée. Il se doutait également que cela ressemblait relativement beaucoup à ce que pourrait être son épreuve de force. Dans un cri de défi, Akihito se remit debout et se remit à avancer, pas à pas. La fine odeur iodée du vent qui cinglait l'enchanteur lui fit vaguement comprendre que c'était surement un vent marin qui s'engouffrait dans les tunnels et l'atteignait là où il était. Amy, dont la voix ne pouvait plus couvrir le rugissement du vent, lui transmit par télépathie que des runes incrustées dans la roche amplifiaient également les courants d'air pour les rendre maximaux ici. Loin de se décourager, Akihito força d'autant plus sur ses jambes. Par trois fois, une bourrasque plus forte ou sournoise que les autres lui faucha les jambes, le reculant de plusieurs mètres voir une vingtaine de mètres. Quand on voyait à quel point faire un pas devenait dur, beaucoup auraient jeté l'éponge. Mais pas Akihito. Trois fois il se releva et atteignit des zones plus loin de son point de chute. Le vent mugissait à ses oreilles, la poussière et les fragments de pierre saupoudré de sel lui brûlait les yeux et mettaient sa peau à rudes épreuves.

Chaque pas était moins grand que le précédent. L'un deux força la fois de trop sur la blessure de Akihito au flan qui commença à se rouvrir. Néanmoins, cette obstination ce révéla payante puisque lorsqu'il pensa sérieusement à rebrousser chemin, la charge du vent se calma rapidement pour laisser enfin la place à une brise forte, puis discrète dans le silence du tunnel. Levant les yeux, Akihito vit une cavité dans le plafond dont semblait venir les vents marins. Exténué, il s'assit une nouvelle fois pour reprendre son souffle.

« Tu ne l'as pas vu, mais dans l'autre sens il y a beaucoup de petits couloirs annexes qu'on ne voit pas en affrontant le vent. Vouloir rebrousser chemin, c'est s'exposer au risque de se retrouver dans un cul de sac sans le savoir et de se retrouver piéger, clouer contre le mur par la force des vents.

- Mais moi... Ahh... J'ai tout fait d'une traite... Ouf, haleta Akihito en examinant sa plaie au ventre.

- C'est le moyen le plus sûr et simple de réussir cette épreuve. J'en suis d'autant plus impressionnée que tu n'étais pas au meilleur de ta forme... Allez, un dernier petit effort ! Il ne reste plus qu'un obstacle et ce sera fini ! »

Serrant les dents, Akihito se releva avant qu'une douleur aiguë ne le fasse tituber. Tout en grimaçant de douleur et se frottant la mâchoire, Akihito se sermonna intérieurement. Il venait de subir les affres d'une crampe de la mâchoire à trop avoir serré les dents pour endiguer la douleur. Il avait subi quantité de blessures et autres douleurs, mais celle-ci se propulsait directement dans son top trois des plus ridicules. Sans faire attention à sa Faëra qui se moquait ouvertement de lui d'un rire cristallin, Akihito se remit en route en grommelant, une esquisse de sourire quand même sur les lèvres.
Le couloir se poursuivit sur une quinzaine de mètres et se finissait sur un gouffre insondable. Il n'y avait rien d'autre que le trou, dont les parois étaient aussi lisses que du verre. Sortant un yus de sa poche, Akihito le lança dans le trou pour estimer sa profondeur. Dans le silence de la grotte, il n'entendit jamais le son de la pièce touchant le fond. Pourtant, en se penchant, il pensait apercevoir une petite lumière au fond du trou. Mais peut-être était-ce sa vision qui lui jouait des tours. Il examina plus en profondeur les murs qui fermaient le couloir, dans l'espoir de trouver un indice, quelque chose qui indiquerait un passage secret caché. Mais de ce qu'il voyait, rien ne semblait indiquer la présence d'un quelconque passage de ce type. Il apposa sa main sur toutes les parois, mais aucun pan de mur ne daigna se baisser. Il dut enfin se résoudre à l'évidence.

« Je dois sauter là-dedans c'est ça ?

- Exacte. Le test du Courage est le plus simple, mais également le plus difficile. Tout ce que tu as à faire, c'est de sauter dedans.

- J'imagine qu'il y a un coussin d'air en dessous... » murmura Akihito en repensant au saut qu'il avait fait dans les montagnes de Mertar après avoir rencontré Foé la Sylphe. La créature avait amortie sa chute avec un drôle de coussin d'air qu'il avait créé pour l'occasion.

L'enchanteur avait déjà vécu ce genre de situation, aussi avait-il moins d'appréhension. Il n'en restait pas moins que le saut était d'une hauteur plusieurs fois plus élevée, dans une obscurité presque totale. Un saut dans l'inconnu en soit. Même s'il se doutait également que la Faëra ne l'aurait pas amené jusqu'ici pour le faire s'écraser au fond d'un trou. Et le contexte de tester son courage était lui aussi crédible. (Même si ça tient plus de la folie que du véritable courage.)

De toute manière, se dit ensuite Akihito, il pouvait faire confiance à ça Faëra. Et le meilleur moyen de ne pas arriver à sauter, c'était de continuer à se poser des questions. « Allez ! » cria Akihito en sautant dans le vide.

« AAAAAAAAAAAH » hurla-t-il en regrettant instantanément son choix. Il avait décidé de faire confiance à Amy, mais il ne put s'empêcher de sentir la peur lui tenailler les entrailles. Il voyait la lueur qu'il avait vue plus haut se rapprocher à une vitesse effrayante. Se résignant à sûrement finir en bouillie informe sur le sol, l'enchanteur vit sa vie défiler devant lui. Cependant, il n'eut pas le temps de dépasser son adolescence quand il vit quelque chose de particulier sous ses pieds. La lueur des gemmes de San Divyna qu'il avait entre-aperçut du haut du trou se reflétait dans quelque chose... Quelque chose de liquide...

(De l'eau !)

Rapidement, Akihito rabattit ses bras le long de son corps, joignit ses jambes et essaya de rentrer dans l'eau le plus droit possible. Il n'eut pas le temps de rabattre complètement sa main droite contre sa cuisse avant de percuter l'eau : le froid qui le frappa l'engourdit aussi rapidement que le sel présent dans l'eau de mer lui brûla les yeux. Sa main droite avait frappé la surface de l'eau avec une partie de la paume et lui brûlait atrocement en étant engourdie. Enfoncé de plusieurs mètres dans l'eau salée, le jeune homme essaya de rejoindre la surface le plus vite possible. Au bout de longues secondes, il creva enfin la surface et prit une longue goulée d'air. D'une rapide brasse, il rejoignit la rive et se hissa sur la berge de pierre. Détrempé, il remarqua que si sa main droite lui faisait si mal, c'est parce qu'une partie de la peau de sa paume avait éclatée sous la force de l'impact, saignant à travers une plaie sans grande conséquence.

« Eh non, ce n'était pas un coussin d'air ! » fit Amy en venant voleter autour de Akihito qui secouait sa main en grimaçant.

Il darda un regard furieux sur elle, puis se releva en soupirant. Il était en vie, relativement en bon état et cette histoire de coussin n'était que des suppositions de sa part. Il ne pouvait donc pas lui en vouloir. Il leva alors les yeux pour continuer sa route, quand il vit ce qui se trouvait en face de lui.
La salle taillée dans la pierre qui se trouvait en face du bassin d'eau n'était pas bien grande. Elle faisait une dizaine de mètres de long et le symbole de la Kizoku Rana était gravé dans la paroi de pierre au-dessus d'un autel de pierre blanche. Les gemmes de San-Divyna incrustées dans les murs étaient également présente, bien qu'elle aient là la forme de la Kizoku-Hana. Sur cet autel, un présentoir reposait, soutenant une arme au fourreau noir. Une certaine noblesse semblait s'échapper de l'arme. Avec beaucoup de respect, Akihito grimpa les quelques marches qui menaient à l'autel, sous le regard de sa Faëra. Elle eut un sourire lorsqu'il posa la main sur la garde, l'autre sur le fourreau, puis dégaina l'arme.
Akihito sourit à son tour en voyant son reflet sur le fil de la lame.

A suivre…

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 Sujet du message: Re: Temple de Rana
MessagePosté: Ven 30 Mar 2018 23:25 
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Chapitre IX.1 : Nouvelle célébrité


Ce qui étonna le plus Akihito, se fut la légèreté de la Kizoku Rana. Certes, elle était faite de Faerunne, métal le plus léger du monde connu, mais également de Gravilay, le plus lourd. Il s'attendait à une arme plus légère que la moyenne mais pesant un certain poids tout de même. Il n'en était rien. La lame fendit l'air aussi vite que si elle était faite d'air elle-même. Une légèreté à toute épreuve lui permettait de pouvoir se mouvoir sans être handicapé par le poids de l'arme qu'il magnait comme une extension de son corps. Son tranchant était incroyablement effilé et coupait le vent lui-même.

(Je comprends mieux pourquoi on dit que les porteurs de la Kizoku dansaient avec celle-ci...) Un ballet mortel de métal tranchant. C'était ce que permettait la lame légendaire aux adversaires de son propriétaire. De plus, esthétiquement parlant, le sabre n'avait rien à envier au Marteau de Valyus : la poignée sobre noire filée de dorée se terminait par des cordons écarlates au bout. Sur le pommeau ainsi que sur la base de la lame, on pouvait apercevoir la Kisoku-Hana gravée, rappelant les trois valeurs fondatrices de la relique. Son fourreau restait quant à lui un parfait support de la noble lame qu'il gardait : sobre, fait de bois sombre laqué et des Kizoku-Hana dorées l'ornant tout le long.

Le baudrier que portait Akihito pour attacher son Marteu à la ceinture était le même que celui qu'il utilisait avant pour attacher l'épée de son père dans son dos. S'il fut tenté de l'attacher dans son dos, un problème se posait : l'arme était plus longue que la précédente, rendant la dégaine peu aisée. C'est là qu'Amy intervint.

« Bravo Maître, tu es le quarante-cinquième porteur de la Kizoku-Rana. Cette arme est désormais votre, tout autant que moi. Sache d'ailleurs que ce fourreau est un peu particulier : s'il est fait de bois et solide de prime abord, je peux à volonté le rendre intangible pour que la lame puisse être dégainée sans restriction et fendre l'air comme un vent tranchant. »

A ses paroles, Akihito plaça la lame dans le fourreau, le mit à la ceinture et dégaina rapidement, coupant l'air devant lui. Il ne sentit pas la moindre résistance et vit effectivement une bonne partie de la lame passer à travers le haut du fourreau, comme si de rien n'était. Une petite inspection l'informa que le bois était intact, sans la moindre éraflure. Satisfait et bien arrangé, Akihito détacha son baudrier et attacha la Kizoku aux boucles de celui-ci. Une fois équipé, il avait de nouveau le sentiment rassurant d'avoir une poignée d'épée dans son dos. (De sabre.) se corrigea-t-il. Les quelques dégaines qu'il fit le satisfirent sur la fluidité de ses mouvements et le fourreau réagissait également sous l'impulsion d'Amy pour lui permettre de rengainer tout aussi simplement.

« Merci, Amy.

- Mmmhmmh, pas de quoi me remercier.

- Oh, si tu savais à quel point tous les enfants d'Oranan ont tous rêvé de porter ce sabre une fois dans leur vie. C'est quelque chose que je n'aurai jamais imaginé possible.

- Il y a eu quarante-quatre personnes avant toi, tu te doutes bien que je sais comment vous réagissez tous ! lui répondit moqueur la petite humanoïde dont les ailes jaunes brillantes trahissaient sa satisfaction. Tu comptes circuler avec ou la cacher pour ne pas attirer la convoitise ?

- Pourquoi la cacher ? Je vais m'en servir pour rendre la Justice et améliorer le monde autour de moi : on finira bien par le découvrir.

- Simple, mais tellement réfléchis... Je sens que te suivre sera une aventure des plus excitantes ! Regarde sous la Kizoku-Hana sur le mur derrière l'autel, il y a un passage. Prends-le, il te ramènera à la surface dans le Temple de Rana.

- Quand je pense à la tête que vont tirer Hïo et papa en me voyant débouler... Rien que d'y penser, je sens qu'on va bien rigoler. » s'amusa Akihito en prenant le passage indiqué.

- - - - - - - - - - - - - - - - -

Quelques minutes plus tard, Akihito sorti par un passage mural dans le rayonnage à l'extrême opposée de celui dans lequel il avait pénétré dans le souterrain. Le vieux prêtre était toujours là, plongé dans ses livres. Akihito se dirigea vers la sortie et traversa la foule des prêtres. Lorsqu'ils aperçurent la lame légendaire, la plupart des prêtres originaires d'Oranan se turent. Ceux qui s'étaient groupés autour des Missionnaires semblaient avoir perdu tout intérêt pour les péripéties enjolivées du Missionnaire barbu. Des murmurent s'élevèrent dans le dos de Akihito alors qu'il progressait vers la sortie. S'il n'était pas là pour se cacher aux yeux de tous et punir les injustes, il n'était pas là non plus pour pavaner. Bien qu'il soit fier d'un artefact aussi puissant, se vanter n'était pas dans ses habitudes. Il ne l'avait pas fait à Mertar avec le Marteau alors il n'y avait pas de raison qu'il en soit ainsi en territoire allié (Bon, sauf pour faire enrager Numéro 3, mais c'était un cas particulier.).

Alors qu'il s'apprêtait à sortir du temple, les murmures qui avaient enflées retentirent aux oreilles du Père Roland, alors submergé de paperasse dans son bureau. Voulant en savoir plus sur ce qui agitait tant ses ouailles, il sortit de son bureau et traversa la foule qui s'ouvrit devant lui. Il vit Akihito et reconnu le sabre qu'il portait au dos. Pressant le pas, il posa une main sur son épaule pour l'interpeler.

« Akihito mon garçon, te voilà avec une bien belle arme sur toi. Dis-moi, ce ne serait pas le...


- Kizoku-Rana ? SI c'est bien lui, répondit le plus naturellement du monde le jeune homme.

- Rana toute puissante... ! Où as-tu bien pu trouver un tel artefact ? souffla le Grand Prêtre, alors que le brouhaha dans le temple commençait à prendre de l'ampleur.

- Vous vous doutez bien que c'est un secret mon Père, lui répondit Akihito dans un sourire. Néanmoins, la Noble Rana est entre de bonnes mains. Je saurai m'en montrer digne, ne craignez rien.

- Eh bien, eh bien... » murmura le Père Roland alors qu'enfin la foule encerclait le jeune homme, l'assaillant de question.

Le nouveau porteur de la lame légendaire fut bombardé de questions, comment il avait pu la trouver, si c'était vraiment la vraie, s'il pouvait faire la Danse Aérienne de la mythique guerrière Shioma et, accessoirement, qui il était. Malgré l'intérêt que la foule lui portait, l'espace autour de Akihito était relativement vide, la foule se mouvant autour de lui dans la même direction que lui. Il tenta de répondra à l'avalanche de questions qui lui tomba dessus. Finalement, devant le flot incessant de questions qui revenait, il décida de remédier à ce fait. Sur la route du retour à Oranan, Akihito monta sur un rocher et s'adressa à l'ensemble des personnes qui l'avaient suivi, une grosse centaine.

« Et bien, mmh, pour faire court, je suis Akihito Yoichi, fils de Marcus et Hitomi Yoichi. A mon retour de Mertar pour le compte du temple de Rana, la Kizoku est entrée en contact avec moi. Après plusieurs épreuves éprouvantes, elle m'a reconnue comme son porteur légitime. Evidemment, je ne peux pas vous indiquer où je l'ai trouvé.

Sur tout l'honneur que mon sang d'Ynorien me permet, je vous jure solennellement qu'en tant que nouveau détenteur de la Kizoku-Rana, je saurai me montrer digne de sa grandeur et de celle de Rana. ».


Après avoir retiré sa protection de bras gauche et dévoilé la marque sur le dos de sa main, Akihito tira l'arme de son fourreau et comme pour prouver la véracité de ses propos, se mit à fendre l'air de sa lame. Même pour les profanes du combat, l'aisance avec laquelle Akihito mania l'arme de par sa légèreté finit de convaincre les quelques derniers rares sceptiques.

« Et enfin, pour ce qui s'agit de la Danse Aérienne... »

Fermant les yeux, Akihito senti la puissance majestueuse de la Kizoku l'envahir. La Danse Aérienne n'était pas si exceptionnelle en soit : dans les histoires concernant les porteurs de l'arme, le fait qu'ils puissent tous user d'une célérité explosive durant un bref un instant dans leurs attaques était connu de tous. La Danse était justement l'apanage de la légendaire Shioma qui avait poussé cette capacité à son paroxysme. La marque sur le dos de la main se mit à luire alors que les fluides d'air d'Amy se déversaient dans la lame. Mouvant son épée comme si elle était le vent, Akihito découpa le vent avec une telle rapidité que ses mouvements parurent flous pour la plupart. Un brouillard d'acier se matérialisa devant lui alors qu'il enchaînait les moulinets et autres coups de taille devant lui.

« .. Je pense qu'il me reste encore un peu de travail pour la maîtriser. »

Dans des cris de joies et en tapant frénétiquement leurs mains l'une contre l'autre, les enfants se rassemblèrent autour du jeune homme qui descendait prudemment du rocher en ménageant ses blessures. Les quelques enfants l'entourèrent des étoiles dans les yeux alors qu'ils se redirigeaient tous vers la ville. Les adultes étaient légèrement en retrait, assistant à la scène avec des regards approbateurs.

(Ils doivent forcément penser qu'à l'âge des enfants, ils auraient probablement fait partie des enfants.)

(Et oui. Que de célébrité mon cher Akihito !)

(Porter la Kizoku, c'est presque m'élever au rang de héros d'Ynorie. C'est aussi galvanisant que lourd sur mes épaules.) confia Akihito à sa Faëra.

(C'est ce qu'on appelle la rançon de la gloire mon cher. Tu n'es pas le premier ni le dernier à être vu ainsi crois moi.)

Escorté par la farandole d'enfants, Akihito arriva devant les grandes portes d'Oranan. A la foule qui se tenait sur les remparts et à l'entrée, il ne put retenir un sourire.

(Les nouvelles vont vite décidément !)

A suivre…

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 Sujet du message: Re: Temple de Rana
MessagePosté: Lun 8 Oct 2018 23:52 
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Chapitre IV.1 : Une faveur


En cette fin de matinée, Akihiko se dirigeait vers le temple de Rana. Il s'était déjà rendu chez les Himatori pour parler de la proposition de cargaison d'acier feuillu, qui s'étaient montrés plutôt enthousiastes à cette idée. La suite de l'accord était entre les mains du capitaine Hertann. (Je ne sais pas trop comment ça se déroule ce genre de négociations mais lui doit être habitué.)

Le temple de Rana fourmillait d'activités comme à son habitude et on pouvait apercevoir les allés et venues aussi bien des oranais que de quelques missionnaires discutant avec quelques prêtres. L'arrivée du porteur de la Kizoku Rana ne passa évidemment pas aperçu et nombre de fidèles s'inclinèrent respectueusement sur son passage. Certains le regardaient avec envie, d'autre avec respect : ils étaient plus nombreux à s'intéresser à lui que lorsqu'il se déplaçait en ville ce qui le perturba un temps avant qu'il ne regagne sa composition. Il entra dans le temple, s'inclina humblement devant la statue gracieuse sensée représentée la déesse du vent puis héla un prêtre passant à proximité.

« Excusez-moi, pourriez-vous dire au grand Prêtre Roland que Akihiko Yoichi souhaite s'entretenir avec lui ?

- Le porteur de la sainte lame… ! Oui bien sûr, je vais le chercher tout de suite ! » s'enquit le prêtre âgé d'une quarantaine d'années avant de partir d'un pas rapide à l'intérieur de l'édifice, sa silhouette grassouillette disparaissant entre les colonnes. Akihiko resta quant à lui où il était, attendant patiemment. Les personnes autour de lui murmuraient en le regardant, le qualifiant parfois de « Quêteur de Faerunne », titre qu'ils avaient obtenu avec Hïo pour avoir ramené avec succès de la Faerunne pour la cérémonie du Premier Souffle quelques semaines plus tôt. A ce souvenir, il sortit le Marteau de Valyus qu'il avait obtenu au cours de ce même voyage. Le Marteau n'avait rien à envier à la Kizoku, car il était aussi majestueux par sa richesse que le sabre noble par sa sobriété. Observant les runes gravées sur toutes l'arme, Akihiko se rappela qu'il avait toujours en sa possession plusieurs runes qu'il n'avait toujours pas pu identifier. Profitant du temps libre qu'il avait, il en sortit une et tenta de l'identifier en faisant résonner ses fluides avec la mystérieuse pierre pour essayer d'en déduire la signification.

Tentative d'identification de rune :
  • 1 rune "Phu"


A suivre…

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 Sujet du message: Re: Temple de Rana
MessagePosté: Mar 9 Oct 2018 00:45 
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Tentative d'identification de la rune Phu:

Résultat D100: 86, échec de l'identification.

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 Sujet du message: Re: Temple de Rana
MessagePosté: Mer 17 Oct 2018 21:46 
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Deuxième Arc : L’art de faire parler la Foudre

Chapitre IV.2 : Une faveur


Malheureusement, son identification échoua. Mais loin de s'en décourager, il décida tout simplement de remettre cela à plus tard comme d'habitude. Après avoir rangé les runes dans son sac, le jeune homme attendit une petite minute avant de voir le prêtre revenir. A son teint rougeâtre, il avait dû courir sur une partie du trajet et lui demander un effort auquel il n'était pas habitué. Il arriva, prit quelques secondes pour récupérer son souffle avec peine, puis releva la tête en essuyant du revers de sa tenue blanche les quelques gouttes de sueurs perlant sur son visage glabre.

« Monsieur Yoichi… Ha, ha… Le Grand Prêtre Roland s'excuse mais il n'est malheureusement pas disponible pour le moment, il est retenu par une affaire quelque peu urgente.

- Ah ? Ce n'est pas grave, peut-être que vous vous pourriez me renseigner dans ce cas ? demanda simplement Akihiko.

- Oui ? Oh, tout ce que vous voudrez ! Enfin, j'essayerai de vous aider dans la mesure de mes compétences ! bafouilla le prêtre.

- Il se trouve que je suis à la recherche d'un prêtre. Enfin du moins, d'un puissant aéromancien et je pensais que je pourrai trouver parmi vous quelqu'un susceptible de m'aider.

- Des prêtres aéromanciens ? Ce n'est pas ce qui manque ici en effet.

- Le souci, précisa Akihiko, c'est que j'en cherche un relativement versé dans ce domaine.

- Suivez-moi dans ce cas. »

Le prêtre le guida alors à travers un petit réseau de couloirs tout en lui expliquant leur destination : il s'agissait de la zone d'entrainement allouée à la maîtrise des fluides d'air. Bien que cet enseignement soit loin d'être obligatoire au sein du culte de Rana, de nombreux prêtres voyaient dans l'aéromancie une manière d'approfondir leur communion avec la déesse de la sagesse et des vents.

« Je pratique moi-même ma maitrise de la magie, mais je n'ai jamais su montrer plus que de maigres capacités. Nous ne sommes pas tous nés avec la faculté de pouvoir bien maitriser ces pouvoirs, mais la sagesse de Rana nous l'indique : nous avons tous nos propres forces, il ne nous reste qu'à les trouver plutôt que chercher à les créer.

- C'est une réflexion pleine de sens. » approuva son jeune invité.

Ils arrivèrent finalement dans une petite cour attenant à l'aile gauche du temple, bordé d'épais arbres. Là, une douzaine de prêtres s'entraînent à déplacer des objets sans les toucher, ce qui impressionna un temps le jeune homme. Puis il remarqua les discrets petits tourbillons de vent en dessous des objets et compris le secret de cette télékinésie. Les élèves devaient se faire passer entre eux plusieurs lourdes bûches de bois sous l'œil sévère d'un prêtre à la chevelure grisonnante mais au regard perçant. Du coin de l'œil, il aperçut les nouveaux venus et ordonna d'un ton sec de poursuivre l'exercice, puis se dirigea vers eux.

« Frère Sito, Ser Akihiko, que me vaut le plaisir de votre présence ? » demanda le prêtre après avoir légèrement incliné la tête à son intention.

(Malgré les apparences, il n'a pas l'air de particulièrement m'apprécier.) fit mentalement remarquer Akihiko à sa faera.

(Il n'a pas vraiment l'air d'être là pour se faire des amis en même temps.) répliqua Amy.

(Ca doit jouer un peu oui.)

Le prêtre qui l'avait mené ici et qui s'appelait donc Sito fit les présentations.

« Monsieur Yoichi, voici le prêtre Gam et notre plus talentueux instructeur en ce qui s'agit de l'enseignement de l'aéromancie. Frère Gam, Monsieur Yoichi est à la recherche d'un aéromancien compétent, c'est donc pour cela que je l'ai amené ici.

- Mmh. Que cherchez-vous exactement ? demanda le prêtre Gam en se tournant vers lui.

- Pour tout vous dire, il se trouve que mes compagnons et moi, nous sommes à la recherche d'artéfacts qui sont très probablement au fond de la mer, dans une épave. Et comme aucun de nous n'est capable de rester aussi longtemps sous l'eau, nous cherchons un aéromancien capable de créer une bulle d'air ou quelque chose de similaire pour nous permettre de respirer sous l'eau.

- Il existe effectivement des prêtres capables de faire ce genre de sorts effectivement… Mais pourquoi devrions-nous vous aider ? questionna l'instructeur d'un ton peu agressif mais cassant.

- Ce sont des artefacts relativement puissants, qui reposent dans une baie entre Oranan et Bouhen. Si les mauvaises personnes venaient à tomber dessus, ils pourraient s'en servir contre des innocents et les plus proches sont ceux de notre cité ou les villages de pêcheurs à proximité. Et c'est quelque chose que je veux éviter. De plus… » Akihiko pointa du doigt la Kizoku dans son dos ainsi que le Marteau.

« … J'ai rendu un grand service au temple, ainsi qu'ai été reconnu digne de porter la Noble Rana. J'espère que ces deux faits pourront témoigner de mes bonnes intentions.

- Il est vrai que votre contribution pour Rana est grande, c'est indéniable. Néanmoins… Pouvez-vous en dire autant de vos compagnons ? Sont-ils dignes de confiance ? »

(Aie.) Le globe d'Amy se teinta d'un violet aux reflets bleu foncé, signe de son inquiétude.

« Vos Inquiétudes sont légitimes, mais je me porte garant d'eux. De plus, j'ai confiance en ma capacité à pouvoir les gérer si le pire venait à arriver.

- Mmmh… grommela le Prêtre Gam avant de se tourner vers son collègue qui s'était tut durant toute la conversation. Et qu'en pense les Grands Prêtres ? Le Père Roland ?

- Le père Roland n'était pas disponible quand je suis allé le quérir, mais je pense qu'il ne devrait pas y voir d'inconvénient. Je vais voir s'il a fini de s'acquitter de son problème.

- Bien… En attendant qu'il revienne, parlez-moi un peu plus en détail de ces artefacts. »

Akihiko expliqua alors au prêtre ce qu'il savait de la femme qu'avait été Talia Van Solinnahe. Au fil de son exposé, son interlocuteur semblait de plus en plus curieux sur la vie qu'avait pu mener la jeune femme. Il posa plusieurs questions mais l'enchanteur ne put pas y répondre pour la plupart. Le prêtre SIto revint enfin accompagné du père Roland qui accueillit le jeune homme avec un grand sourire.

« Akihiko ! Cela me fait plaisir de te revoir.

- C'est un plaisir partagé mon père.

- Frère Sito m'a fait part de ta demande. Le temple de Rana t'est redevable et aider le porteur de la Kizoku Rana serait pour nous une grande fierté. Je ne vois donc aucune raison de te refuser l'aide demandé, mais sache que nous n'obligerons personne à participer. Nos prêtres t'apporteront leur soutien s'ils estiment qu'il est sage de le faire, ce sera donc à toi de le ou les convaincre.

- Je vous en remercie mon père, acquiesça Akihiko. Je comprends également votre volonté de laisser le choix aux personnes susceptibles de nous aider.

- Très bien, dans ce cas… Frère Gam, avez-vous des suggestions à nous faire ?

- Oui mon père. Les frères Fuyido, Tula, Kimi et sœur Wani et Sarina sont les personnes les plus à mêmes possédant les capacités de créer plusieurs bulles d'air de respiration aquatique. Cependant, les deux premiers ainsi que sœur Wani sont actuellement en pèlerinage vers d'autres temple de Rana pour transmettre les ordres de vous-mêmes et des autres Grands Prêtres. Il ne reste donc que frère Kimi et sœur Sarina, mais je pense que sœur Sarina sera plus encline à vouloir s'embarquer dans une telle expédition que frère Kimi.

- Et qu'en est-il de vous-même frère Gam ? demanda Akihiko, pensant que sa position d'enseignant de maitrise fluidique faisait de lui un puissant aéromancien.

- J'aurai pu venir de par mes capacités mais j'ai un devoir à accomplir en temps qu'instructeur. De plus, je n'ai pas le pied marin.

- Je crois savoir que c'est également le cas de frère Kimi, intervint le prêtre Sito.

- Bon et bien je vais aller voir sœur Paloma dans ce cas-là. Merci de votre aide, je vais maintenant prendre congés. Prêtre Sito, pouvez-vous me guider.. ?

- Avec plaisir, suivez-moi. »

Suivant de nouveau le prêtre à travers d'autres couloirs, il parvint à la bibliothèque que Akihiko connaissait bien pour y avoir notamment trouvé le chemin menant à la Kizoku. Il se posait la question de à quoi pouvait bien ressembler la prêtresse en question, n'aillant jamais entendu parler d'elle auparavant. Les deux hommes longèrent plusieurs rayonnages pour voir si elle était présente et s'arrêtèrent enfin. Akihiko suivit le prêtre grassouillet qui s'engouffrait dans une allée à la rencontre d'une femme assise devant une petite table un livre à la main. Sa tenue de prêtresse blanche se fondait avec le teint pâle de sa peau. La peau grise attira l'attention du jeune homme et lorsque la femme se tourna vers eux, il vit que ses lèvres se fondaient dans la couleur de la peau, arborant la même teinte cendrée. Les cheveux qu'il avait d'abord pensé blond de loin étaient en réalité blanc, quoi que plus terne que celui immaculé de ses habits. Son visage lui donnait l'apparence d'une personne âgée d'une grosse trentaine d'années mais…

(C'est toujours difficile de donner un âge à un elfe.)

Autrement, elle faisait honneur à la race des sindeldis pour ses traits gracieux et fragiles mais n'arboraient pas pour autant la beauté surréaliste que les hommes leur prêtent un peu trop volontiers. Elle était simplement une jolie femme.

« Frère Sito, Iliar'el. Que me vaut le plaisir de votre venue ?

- Bonjour sœur Serina, voyez vous… »

(Iliar'el ?)

(Dans la langue des Sindels, cela signifie « Porteur ». C'est un titre honorifique qui est donné aux personnes détentrices d'objets de grande importance.) expliqua Amy.

(C'est un titre applicable même aux étrangers ?) demanda Akihiko pendant que le prêtre expliquait la situation à la sindeldi.

(Disons qu'ils tolèrent lorsque leur langue et leurs titres ne sont pas utilisés à tort. Dans ton cas, l'importance attribuée par les Ynoriens à la fonction de porteur de la Kizoku suffit à l'emploi de ce titre.)

Akihiko resta alors silencieux pour attendre la fin des explications et lorsque ce fut fait, Sœur Serina se tourna dans sa direction puis se leva. Assise, elle paraissait déjà grande mais debout, elle déployait toute la hauteur inhérente à sa race, atteignant facilement les deux mètres dix. Pour l'une des rares fois de sa vie, Akihiko dû se reculer et lever la tête pour faire face à son interlocutrice.

« Iliar'el. Ce serait un grand honneur de vous aider dans cette tâche, mais pourrai-je vous demander une faveur ?

- Une faveur ? Je suppose que oui, ce serait un échange de service.

- Il se trouve que j'ai une lointaine cousine en Naora. Je ne l'ai pas vu depuis des décennies mais nous étions plutôt proches étant jeunes. Cependant j'ai décidé de me mettre au service de Rana et je suis partie de ma ville natale, Nessima. Evidemment, je n'ai jamais revue ma cousine mais c'est devenu une femme influente dans cette ville, alors il n'est pas si difficile d'avoir des nouvelles d'elle via les pilotes de cynores et d'aynores. Et j'ai notamment appris qu'elle allait bientôt se marier. Même si cela fait près de 280 ans que nous ne nous sommes pas vus, j'aimerais lui offrir quelque chose pour son mariage.

- Et vous voudriez que j'aille lui apporter ? demanda Akihiko qui commençait à comprendre ce que l'elfe voulait lui demander, mais plusieurs points étaient nécessaires pour lui d'être éclairci.

- Oui. Je l'aurais bien fait moi-même, mais certaines personnes parmi le clergé de Sithi n'ont pas vu d'un très bon œil mon départ pour suivre ma foi. Y retourner serait à la limite du suicide. »

(C'est presque du suicide pour toi aussi.) intervint Amy. (Les Sindeldis ne sont pas très amicaux envers les étrangers, pour ne pas dire xénophobes pour une partie non négligeable.)

Prenant note de la remarque d'Amy qu'elle devait tirer de son savoir centenaire, l'enchanteur demanda « Et moi ? Ne risque-je pas d'être mal accueillit par les membres de votre peuple une fois là-bas ?

- Il est vrai que vous avez des chances de rencontrer des problèmes… Mais je sais que vous avez la force de pouvoir vous défendre, et c'est pour cela que je vous le demande humblement à vous. Averren'tar Thëlwë, grand prêtre de Sithi à Nessima, me tuerait sur-le-champ s'il apprenait que je revenais en Naora. Et cela malgré mes pouvoirs…

- Bien… dit Akihiko après avoir réfléchi un instant. Et comment dois-je m'y rendre ? A qui dois-je parler ?

- La barrière naturelle qui ceinture Naora empêche toute approche maritime, c'est pour ça qu'il vous faudra passer par les airs avec les Aynores. Ils relient Kendrâ-Kar à Tahelta et de là, vous pourrez rejoindre Nessima. Vous risquez d'avoir des soucis à rentrer, donc dites que vous êtes venus apporter un présent à Sylënn'tar Thinel, ma cousine. Et si cela s'avère utile, son futur mari s'appelle Tanaëth Ithil il me semble.

- Sylënn et Tanaëth… Très bien, je tacherai de m'en souvenir.

- Je vous en suis infiniment reconnaissante. » dit la jeune (?) femme en s'inclinant profondément devant lui. Elle lui remit alors un médaillon fait de Faerunne grise en forme de lune stylisée. Le bijou, bien que sobre, était remarquablement bien réalisé. Akihiko pensait d'ailleurs se souvenir que la Lune était le symbole de Sithi, la déesse vénérée par les Sindeldis. Alors qu'il rangeait le médaillon dans la bourse et s'apprêtait à prendre congé, la prêtresse Serina lui donna un dernier avertissement.

« Faites attention à vous lorsque vous donnerez ce médaillon à ma cousine… Elle a un tempérament disons, volcanique lorsque cela touche au mariage de ce que j'ai entendu dire. Et bien que je ne doute pas de vos capacités à vous défendre, elle ne ferait qu'une bouchée de vous. »

Sur cette dernière mise en garde, Akihiko salua la prêtresse, le gros prêtre qui l'avait guidé après l'avoir remercié et sortit du temple. Sa prochaine destination n'était autre que la plus grande ville de Nirtim, Kendrä-Kar, pour rejoindre un autre continent.

Le jeune homme ne put réprimer un frisson d'excitation.

A suivre…

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 Sujet du message: Re: Temple de Rana
MessagePosté: Ven 14 Déc 2018 00:27 
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La route qui mène au temple est très fréquentée. Malgré l’hiver naissant, ce jour ne fait pas exception. Les pèlerins ne se marchent pas sur les pieds, mais l’affluence est suffisamment importante pour ralentir la progression de Vohl. Les conversations des croyants tournent autour de tout et de rien, d’inquiétudes communes, de tracas de la vie, mais aussi de sujets plus politiques ou plus profondément ancrées dans la culture oranienne.

Vohl apprend ainsi qu’une recrudescence des affrontements contre les Garzoks a été observée ces derniers mois. La présence militaire aux frontières a été renforcée, et il semble que certains citoyens de la République d’Ynorie soient inquiets pour les membres de leur famille vivant hors des murs protecteurs.

Le temps que Vohl arrive au temple, la journée est bien entamé, le ciel est couvert de lourds nuages qui laissent tomber une pluie froide et bruyante. Il est transi de froid, et ses vêtements épais, enfilés à la sortie de la ville, ne lui procurent qu’un maigre réconfort.

Il entre avec soulagement dans le temple. Le lieu semble si délicat qu’il impose le respect. La végétation est encore verte, ici, et si les fleurs sont depuis longtemps tombées, l’atmosphère reste plus accueillante que la route. Les arbustes qui délimitent le jardin retiennent l’humidité, et le toit de vigne forme un écran bienvenu contre la pluie.
Seul le vent glacial, chariant l’air pur des montagnes, vient encourager les croyants à s’avancer jusqu’au temple pour y trouver un refuge. Ce vent est une aubaine pour les prêtres. Il leur permet méditation, calme, sérénité, mais également des bénéfices mieux compris par un grand nombre des citoyens : une santé de fer, la conservation des aliments,…

Les cornes retentissent. Les cornes : une autre manifestation de l’ingéniosité de ce temple, qui a su tirer parti de chaque caractéristique qui lui permettait de rendre grâce à Rana. De longs tubes parcourent le temple en des circuits alambiqués que plus personne aujourd’hui ne saurait reproduire. Lorsque le vent souffle, sa force et sa direction transforment alors le temple en un orgue géant, chantant la gloire passée, présente et à venir de la déesse du changement.

Le temple invite aussi le pèlerin à méditer sur la protection offerte par ce vent glacial. Le toit végétal, dont les feuilles aujourd’hui vibrent dans le froid, se transformera bientôt en une plaque glacée, rempart contre les intempéries.

Vohl a beau connaître depuis longtemps ces dispositifs aussi ingénieux que simples, il ne se lasse pas de s’en émerveiller.

(D’habitude. Parce que là…)

Parce que là, l’ynorien est frigorifié. La pluie l’a trempé jusqu’aux os, et le vent n’arrange rien. La protection offerte par les buissons épais en bordure du jardin ne suffisent pas à l’homme pour arrêter de trembler.

En se joignant à la foule qui se presse à l’entrée du temple, Vohl est soulagé de sentir la chaleur d’autres corps contre lui. Plus par habitude que par réelle volonté, il accompagne les chanteurs dans une ode à Rana exaltée. Chanter le réchauffe un peu : il enchaine sur plusieurs poèmes scandés, dont un qu’il affectionne particulièrement, et ce depuis son enfance.

***

Gloire à toi Rana, légère et sage
Pleins de clarté sont tes présages.
D’entre toutes tu es la première
Des divinités à ouïr la prière
Qu’à chaque pas entonnent
Les fidèles en qui ta voix résonne.

Mère des vents aide nous à comprendre
Les principes qui par ton cœur tendre
Dévoilent la face du monde
Et chassent loin de nous ces immondes
Bêtes au visage changeant
Tantôt tristes, en colère ou charmants.

Derrière chaque instinct nous savons
Que se cache la conséquence d’une opinion
Après chacun de tes souffles nous prions
Que de notre âme s’efface ce poison.
Rana, devant l’âtre ou dans le froid,
Que l’on soit maitre, mendiant ou roi
Aie confiance autant que nous avons foi
Tes enfants cherchent les vents qui mènent vers toi
Une quête dont même la mort ne nous écarte pas.

***


C’est en chantant cette prière que Vohl pose son premier pas sur le sol en marbre blanc et bleu du temple. Cet endroit est si apaisant…malgré le nombre incroyable de gens qui s’y pressent, seul des murmures se font entendre, les bruits étant soufflés comme des bougies par la déférence des croyants. Des bruissements d’étoffes frottées et la musique de l’orgue à vent. Des voiles diaphanes dansent au plafond, dans une fluidité magique, et frôlent du bout de leurs bras les colonnes de marbre qui soutiennent la structure aérienne du temple. A ce ballet toujours changeant se mêlent des volutes de fumées qui sortent des lampes ouvragées en de fins fils argentés. Le feu des lampes, maintenu par le vent qui tournoie dans le temple, émet une odeur forte de menthe et de lavande. Entre les voltiges des volutes et celles des danseuses de soie, on peut apercevoir les salles de prières du deuxième étage. Cet étage est accessible par plusieurs escaliers, situés sur les bords circulaires de l’édifice, dont les rampes immaculées sont patinées par d’innombrables caresses. Plus haut encore, on devine un troisième étage. Et au centre de cette construction, un pilier cristallin maintient une coupole du même matériau qui protège le temple des intempéries. Soutenant l’énorme cristal, une ligne argentée s’enroule autour de la colonne, depuis le haut jusqu’à la base, et semblant même s’enfoncer dans le sol.

L’atmosphère est légère. On est loin des bâtiments militaires, qui du haut de leurs créneaux écrasent l’individu par leur hauteur titanesque. Le temple semble encourager les visiteurs à se dresser, à essayer de toucher, de frôler du bout des doigts la coupole transparente.

Les larmes coulent sur le visage de Vohl sans qu’il ne les sente ni ne les efface. Ce lieu est beau. Et il perd connaissance. Pas le lieu. Vohl.

_________________
"Enchanté: Vohl Del'Yant, Humain d'Ynorie, Voleur...Pour me servir!"


Dernière édition par ValdOmbre le Sam 15 Déc 2018 01:36, édité 2 fois.

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 Sujet du message: Re: Temple de Rana
MessagePosté: Ven 14 Déc 2018 00:38 
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Lorsqu’il revient à lui, Vohl est sur une couche sommaire, auprès duquel est posé un petit tabouret. Un homme est près de lui, et lui sourit avec gentillesse.

« Voilà longtemps que je ne t’avais pas vu, Vohl Del’Yant. »

Le visage de ce bonhomme lui est familier. Il s’agit du prêtre qui lui avait été attribué comme précepteur.

« Bonjour, prêtre Shimei. »
« Tu as eu un excès de fièvre. Je pensais t’avoir répété suffisamment que prendre soin des autres passe par le fait de prendre soin de soi-même. »
« J’ai peur d’avoir du enfreindre quelques règles, prêtre Shimei. »
« Et pas de mon seul enseignement, si ce que l’on m’a dit est vrai. »
« J’ai hésité à me laisser tuer, mais allez savoir pourquoi, j’ai eu une soudaine envie de cueillir des Magicae dulcem, prêtre Shimei. »

L’homme laisse un sourire apparaître au coin de ses lèvres, une lueur amusée pétille dans ses yeux.

« Toujours aussi cynique, jeune Vohl Del’Yant ! »
« Parfois, prêtre Shimei. »
« Je vais te laisser te reposer. Tu es libre de repartir dès que tu le souhaites. »
Le vieil homme s’éloigne d’une démarche digne, comme si les années n’avaient fait que glisser sur ses épaules, épargnant son dos, ses articulations et son esprit.
« A dire vrai…je suis venu partager un fardeau. »

L’homme s’est immobilisé avant de franchir le seuil de la pièce. Il se retourne doucement. D’un air doux, il souffle :

« C’est ce que tous viennent faire ici, jeune homme. »
« Je sais…j’ai besoin de conseils, d’une aide. »
Le prêtre ne dit rien, il se contente de hausser les sourcils.
« J’ai foi en Rana. Je la loue chaque jour que ma vie voit. Même quand les changements me sont défavorables, je garde confiance. Mais aujourd’hui, j’ai besoin de parler… »

Toujours pas de réaction. Le prêtre semble attendre que Vohl cesse de tourner autour du pot.

« J’aurais voulu voir le Grand-Prêtre. »
« C’est le cas de bien des gens, encore une fois. »

L’homme s’éloigne, laissant Vohl un peu perdu, comme à l’issue de chaque discussion avec lui. Le jeune homme avait cessé de compter les fois où il sortait des cours, exténué et horripilé par l’infernale patience du prêtre. Un rire incongru s’échappe : si c’était cela pour la simple récitation de cours d’histoire militaire, Vohl n’osait imaginer son état s’il s’acharnait à vouloir voir le Grand-Prêtre. Il finirait dans une maison de fous. Il prit son mal en patience.

(Qu’importe. Etre ici me fait du bien. C’est avant tout de cela dont j’ai besoin. De cela et de repos.)

Vohl reste sur assis sur le lit pendant un moment, à regarder alternativement le vide et le mur en face de lui.

(Il ne faut pas que je reste là pour ne penser à rien. Je dois bouger.)

Le jeune homme se lève en poussant un soupir. Il se sent plus détendu, mais chaque fois qu’il tente de repenser à ces derniers jours, la rage l’envahit. Le souvenir d’Aliep, les pavés maculés de sang, la boucherie qui s’en était suivie, presque contre sa volonté, puis l’infiltration dans la Maison Rouge. Les souvenirs se succèdent, certains avec une netteté terrifiante, d’autres plongés dans un brouillard malsain. Une seule chose reste constante : la colère. Cette colère, qui ne l’a pas quittée depuis le meurtre de son père.
Il soupire de nouveau, pour évacuer ces idées et la tension qui tétanise ses muscles.

(Bon sang…)

La fatigue revient. Il s’allonge de nouveau sur le lit inconfortable. Il s’endort presque instantanément, bercé par la mélodie des orgues de vent.

***

Deux jours s’écoulent ainsi, sans que Vohl ne cesse de penser aux évènements récents. Il ne ressent plus de fatigue, et grâce aux soins que lui prodiguent avec parcimonie les prêtres, ses blessures ne le font plus souffrir. Chaque fois qu’il reçoit des soins, il demande à voir le Grand-Prêtre. Une même réponse, sous différentes formes, lui est apportée : « Pas maintenant. ».

Plus les jours passent, plus ses réflexions avancent sur les évènements récents et sur la domination de ses pulsions meurtrières. Ses actions étaient justifiées, il n’en doute presque plus. Mais c’est le presque qui le gène. Tuer les soldats qui avaient traqué et provoqué la mort d’Aliep ? Justifié. Tuer un innocent est un crime puni de mort par la loi. Alors pourquoi cela serait-il injuste ?

Tuer les fidèles d’Oaxaca qui torturaient et planifiaient le meurtre de Daïgo Genkishi ? Justifié. Les fidèles d’Oaxaca méritent la mort car ils sont contre les libertés, et qu’ils veulent imposer leur domination.

Mais lorsqu’il regarde son parcours avec un œil le plus neutre possible, il revoit aussi la mort de ce marin, de ce messager, de cette prostituée. Il ressent la haine contre Sombre, la haine contre d’autres personnes, qui l’ont gêné sans mauvaises intentions. Sur le coup, il avait une excuse parfaite : il le fallait. Pour lui. Mais ces jours de réflexions remettent en cause ce principe. Ce principe qui découle a priori d’un complexe de supériorité. Se sent il supérieur aux autres ? Pas consciemment. Décortiquer toute sa vie serait trop long…alors puisqu’on lui refusait toujours de voir le Grand-Prêtre –ou comme il le surnommait après de longues heures à pester contre l’impassibilité des prêtres, le Grand Plat – il entreprit de faire le bilan de sa courte existence de traître déserteur, de voleur innocent, et d’assassin paternel. Les jours passaient sans qu’il arrive à savoir s’il était un pédant aristocrate rebelle ou un homme qui se voulait juste et exigeait en retour la même volonté chez ceux qu’il rencontrait.

Il finit par statuer que chaque homme est composé de valeurs. Ces valeurs ne sont pas les mêmes que celles de son voisin. Il n’est pas légitime de tuer, mais il n’est pas non plus illégitime de tuer. Cela dépend des valeurs de ceux qui fixent les règles. Les siennes l’ont fait épargner un certain nombre de personnes que d’autres auraient tuées, et inversement. Il n’y a pas de bonne conduite. Il y a la conduite, c’est tout. Chacun cherche à instaurer ce qui lui semble juste – ou justifié.

Ainsi, les victimes qu’il avait faites étaient justifiées par la lutte pour l’émergence de son idéal. Rien de plus. Son idéal – la loyauté, l’honneur, la vie – valait que ces hommes meurent. Restait la question de culpabilité ou de joie qu’il éprouvait à ces morts. La culpabilité lui était dictée par son idéal.

Une semaine après le début de ses réflexions, la joie qu’il avait ressentie lors de certaines morts lui posait toujours problème. N’ayant plus de problèmes pour se déplacer, il entreprit de penser en se promenant dans la forêt, non loin du temple, lors de longues ballades où il s’enfonçait profondément loin de la civilisation oranienne. Chacune de ses promenades l’amenaient de plus en plus profondément dans la montagne, et puisqu’il était résolu à attendre le jour où le Grand Plâtre daignerait lui adresser la parole, il recommença les entrainements.

Bien moins technique que ceux qu’il avait réalisés lorsqu’il apprenait de Sombre, il courrait à s’en faire exploser les poumons, brulés par l’air frais et pur des montagnes. I trouva des troncs et des roches auxquelles il tentait de grimper en se liant les pieds d’une corde, en se plaçant une main dans le dos ou divers autres handicaps. Il réussissait à peu des challenges qu’il se fixait. Vohl s’en fichait : il ne voulait qu’essayer au maximum. Lorsqu’enfin il réussit à se hisser au sommet d’un bloc de pierre une main derrière le dos, il entreprit de chercher un bloc plus haut. Au moins, cela le maintenait en forme. Sa remise en forme lui fit le plus grand bien. Sa force et son endurance, déjà bien développées par ses entrainements dans les égouts, continuaient d’augmenter.
Il avait trouvé, à quelques heures de marche du temple, une petite bassine naturelle alimentée par un cours d’eau glacial. Il s’y jetait, non par courage, mais par sens du défi, l’envie irrépressible de se laver, mais aussi – et surtout- parce qu’il n’arrivait pas à rentrer progressivement dans cette eau terriblement froide. L’hiver était à présent installé, et la neige bruissait à chacun de ses pas. En revenant vers le temple, il était toujours stupéfait de la majesté de l’édifice, même couvert d’une couche de coton neigeux.

Il arrivait également mieux à réfléchir lorsqu’il sortait des entrainements. Puisqu’il avait laissé sa chambre une fois capable de courir sans avoir mal, il s’endormait dans la salle commune du temple, le plus souvent pendant ses réflexions, agenouillé sur un des appuis de bois utilisé pour la prière. Il affichait désormais un air serein. Malgré tout, ses nuits étaient mouvementées, peuplées de fées ricanantes et de scènes de morts. Il lui arrivait de se réveiller en sueur, agité par une frénésie incontrôlable et un effroi proche de la panique. Quel que soit son raisonnement, une part de lui semblait rejeter cette violence du plus profond de son être, comme s’il reniait cette débauche furieuse.

(Ces cauchemars deviennent de plus en plus violents.)

Ces derniers jours, une tempête semblait approcher du temple. Les cors de l’orgue soufflaient à en devenir assourdissant, et les prêtres avaient décidé d’obturer les tuyaux avec d’épaisses toiles. Les pèlerins se faisaient de plus en plus rare : le chemin d’accès au temple était difficilement praticable, et même Vohl avait abandonné ses escapades naturelles. Le matin, il s’était levé avec un mal de crâne intense et l’impression d’une centaine de fées furieuses, aux yeux injectés de sang, avaient tambouriné toute la nuit sur son occiput.

La journée passa lentement. Vohl trompa l’ennui en martyrisant quelques tas de neige bien inoffensifs et en jouant contre lui-même au Shôgi, un exercice complexe qui eut le mérite – outre celui de ne pas savoir, en définitive, s’il avait perdu ou gagné – de renforcer son mal de crâne.

Il fut presque soulagé de voir la nuit tomber. Il eut toutefois un mal fou à s’endormir, les images de son cauchemar de cette nuit lui revenant immédiatement en tête.
Il se retrouvait face à l’être malicieux qu’il retrouvait chaque nuit en rêve.

Une femme miniature, vêtue de rouge.

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 Sujet du message: Re: Temple de Rana
MessagePosté: Lun 17 Déc 2018 21:04 
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Vohl la voit, de loin. Comme toutes les nuits avant que n’explose son cauchemar en un kaléidoscope de violence et de joie macabre, il ressent une irrépressible envie d’avancer vers cette silhouette. Une curiosité pourtant assouvie des dizaines de fois, pour un résultat qu’il connaît déjà. Et malgré tout, il est comme tracté par une force invisible vers le dos lacé de bandes de tissu rouge. Il progresse dans une nuit d’encre, le long d’une rue aux contours flous, comme couverte d’un brouillard de sang.

Même s’il ne peut pas en être certain, il a l’intime conviction de connaître cette allée. La silhouette, devant lui, dégage une détresse si lourde qu’il en ressent le poids. C’est plus fort que lui : il doit aider cette femme. Elle semble sentir sa présence, et tourne légèrement la tête, comme pour confirmer sa venue du coin de l’œil. Elle l’observe entre ses cheveux qui forment un voile, masquant son visage.

Vohl s’approche encore. L’aura de tristesse s’est amoindrie, et s’est mêlée de regrets, de colère et d’un autre sentiment dont il ne comprend pas la nature. Il est désormais à un pas de la femme, et les contours de la ruelle ont gagné en netteté. Une lune pleine éclaire les pavés sur lesquels Aliep a perdu la vie.

Est mort. A été tué.

Vohl inspire. Il pose doucement sa main sur l’épaule de la jeune femme. Elle le comprend. Sans savoir comment, il sait qu’un lien précieux unissait cette demoiselle et son protégé. Il ressent une part de la peine immense qu’elle dégage. Il se sent le devoir de porter pour elle une partie de sa souffrance. Sa main effleure à peine l’épaule nue de celle qui partage son rêve, qu’elle superpose sa propre main à la sienne. La douceur de sa peau est irréelle. Et sa main réellement prise dans un étau. La femme lève lentement la tête.
Une grimace haineuse déforme son visage aux traits pourtant fins. Des larmes d’une pureté infinie dévalent les courbes de ses joues, sans que l’on sache s’il s’agit de larmes de colère ou des pleurs d’une indicible tristesse. Elle fiche son regard dans le sien. Tant de sentiments sont présents dans ces yeux…trop pour un homme, trop pour une femme. Son visage s’approche du sien. Alors qu’elle lui transmet ses émotions, il a l’impression que ce ne sont en fait que les siennes propres, qu’elle se contente de ramener à la surface. Au-dessus de la peine se place une fureur irrépressible, l’envie de justice frôlant la démence et l’envie de vengeance.

La souffrance le déchire tandis que ses intestins se répandent sur le sol. Il tombe à genoux, la tête maintenue droite par la seule poigne ferme de la jeune femme. Du sang perle de ses yeux, qui le regardent toujours avec la même intensité. Elle est perdue. D’un geste vif, elle l’égorge, sans qu’il puisse réagir d’une quelconque façon. Et tandis que la souffrance se mêle à l’asphyxie, il tombe face contre terre, dans la mare de sang. Loin de heurter les pavés, il traverse le liquide rouge comme un caillou crevant la surface de l’eau. Et les scènes se succèdent : toutes les morts qu’il a causées. Tout lui revient au travers d’un filtre rouge. Les détails, le sentiment de dégoût. Tout se pare aussi d’une exaltation vengeresse. Et de l’effroi se mêle à cette folie : la peur de lui-même. La partie raisonnable de son être est terrifiée par ce sentiment de triomphe. A chaque mort qu’il revoit, il se sent plus fort.

Puis c’est la chute : ce sont les morts de ses amis, de sa famille, de ses proches. Retenu par des chaines invisibles, il ne peut qu’assister à l’extermination des siens. Encore possédé par la folie meurtrière, il hurle de rage et de peine. Il hurle, et se démène. Contre tout, contre rien, tentant de fendre la réalité de ces scènes. De déchirer, de tuer ceux qui menacent les êtres qu’il aime.

Et il ouvre les yeux. L’aube pointe et la faible lueur lui dévoile une scène digne d’une bagarre de taverne. Autour de lui, les bancs de prières sont renversés, voire cassés pour quelques-uns. Ses bras, ses mains le font souffrir. Des prêtres et prêtresses l’observent de loin, les paumes orientées vers lui. Il est debout, même s’il ne sait pas quand il s’est levé, et qu’il ne s'en rend compte qu'une fois tombé à genoux dans des éclats de bois. Les serviteurs de Rana s’approchent alors de lui, et le prennent par les aisselles pour le soulever. Dans une semi-inconscience, il voit qu’on l’emmène au sous-sol du temple.
On le place avec précaution sur un matelas rembourré, si doux qu’il semble à Vohl d’avoir été allongé sur un nuage couleur sable. De menus soins lui sont apportés, après quoi les prêtres se retirent. Vohl les suit d’un regard épuisé. Des résidus d’émotions le traversent, mais la peine, la colère, la rage ne sont que des reliquats ténus de ce qu’il ressentait dans son sommeil. Il ne ferme pas les yeux : il a peur de se rendormir. Une crampe à l’estomac le saisit, et il se tourne précipitamment vers le bord du lit. Il vomit un mélange de bile et de sang sur le sol, n’apercevant qu’après coup la bassine qu’on lui avait déposé au bord du matelas.

Il reste ainsi plié, protection instinctive qui soulage un peu son ventre. Et il pleure. Quelques larmes seulement. Le contrôle de ses émotions reprend le dessus avant qu’il ne puisse s’épancher. Alors qu’il essaie de se lever, une main se pose sur son épaule.

« Reste assis. »

(Le Grand-Prêtre ?)

« Tu sais que je préfère discuter autour d’un manuel d’histoire, mais tu n’es pas tout à fait en état. »

Prêtre Shimei.

« Je…je n’y arrive pas. »
« A quoi donc ? »
« A me convaincre…que tout cela…ait le moindre sens. »
« Tu te laisses peut-être bercer par tes émotions ? »
« Bien sûr…que non ! J’ai décortiqué mes actions, je les ai observées sous tous les angles… »
« Sauf un, n’est-ce pas ? »
« Pardon ? »
« Tes sentiments font partie de ta vie, Vohl. Analyser la situation en écartant tout sentiment t’ôte une partie de l’équation. La bonne réponse à ma question sur tes émotions était simplement 'Oui'… »
« Je…Pour avoir une vue claire, il faut se débarrasser de… »
« S’en débarrasser pendant l’analyse, Vohl. Pas les oublier, encore moins les renier. Ce qui s’est passé ce matin est de ton fait. Tes sentiments doivent être exprimés, même si tu as toujours eu du mal pour ça. A force d’être relégués au second plan, ils ont enflés sans que tu ne t’en soucie. Et aujourd’hui, ils sortent en force. »

Le vieil homme marque une pause. Puis il pointe un doigt accusateur vers le jeune oranien.

« Te juges-tu meilleur que Rana ? »
« Comment ? »
« Pour les hommes, la colère ne saurait être ignorée. Cette imperfection nous rend humains. Nier cette émotion est impossible : même les plus sages d’entre nous peuvent ressentir de la colère. Rana elle-même pleure. La compassion, la tristesse, ces sentiments sont bons et ne peuvent causer que peu de dégâts. »
« Qu’en savez-vous ?! Est-ce une trouvaille de votre sagacité, ou Rana vous a confié personnellement ses soucis ? »
« Insolent ! Rana nous parle à tous, mais ce dont il s’agit est autre chose. Rana pleure, et le vent parle assez pour nous emplir parfois de mélancolie : c’est ainsi qu’est transmise la tristesse de notre déesse aux initiés. D’après une légende de notre culte, Rana a versé une larme, un jour. Une larme unique, dit-on, plus pure que l’eau des montagnes. Les affrontements contre les garzoks étaient à cette période de grande ampleur, et alors que le champ de bataille prenait toute la plaine sur laquelle nous sommes aujourd’hui, elle assista à la mort atroce d’un soldat qui la vénérait plus que tout, et pour lequel elle avait une affection particulière. La force des larmes de Rana est grande, et elle le sait. Elle cacha donc au plus près d’elle le corps sur lequel était tombé la larme, afin de veiller l’âme du mort et de protéger ce que son deuil avait produit. »
« Ce n’est pas exactement ce que j’appellerai une preuve… »
« Tu veux une preuve ? Eh bien, à toi de la trouver ! Sans faire d’effort pour prouver tes dires, tu maintiens que nier ses émotions et les ôter de son jugement est la conduite à tenir pour se rapprocher d’une bonne conduite aux yeux de Rana… Eh bien, prouve-moi que j’ai tort. Si cette larme n’existe pas, et que tu l’as vraiment cherchée, alors tu pourras considérer que cette légende n’est qu’un racontar de vieux bigot. Pour l’instant, ta théorie est aussi fumeuse que peut paraître la mienne. »

(Par Rana que cet homme m’agace ! Si je ne trouve aucune larme, il aura beau jeu de me dire que je n’ai pas assez cherché… Mais s’il dit vrai… Trouver cette larme me permettra peut-être…)

La paix intérieure. L’objectif du fidèle de Rana. Cette perspective, plus que celle de contrarier son ancien professeur, le motive.

« Très bien. Je chercherai. Si vous dites vrai, prêtre Shimei, je réviserai ma position. »

Vohl se redresse. Autant trancher cette question au plus vite. Il ne tiendra pas beaucoup plus longtemps. Si de nouvelles crises se déclenchent, il pourrait faire des morts sans le vouloir. Vohl ramasse les affaires qui ont été déposées dans un coin de la pièce, et sort de la pièce, laissant l’irascible grand-père dans son dos. Il fait quelques pas dans le couloir avant de se plier de nouveau en deux. Son mal de ventre doit avoir une autre origine que son rêve. Il s’appuie contre la cloison. La voix presque goguenarde du prêtre retentit. Le ton en est amusé, quoi que sérieux.

« Il y a là de quoi soigner tes aigreurs, garnement. »

(Garnement…ai-je si peu grandi depuis le temps…ça l’amuse, ce vieux crouton !)

« Manger les baies que tu trouves dans les bois, c’est bien, mais à cette saison celles que tu trouveras seront acides. N’oublie pas de boire, et de mâcher un peu d’argile de temps en temps. »
« Oui, prêtre Shimei. »

(Peste soit de ce vieux bouc !)


Vohl revient d’un pas rageur dans la chambre, saisit le paquet qui avait été déposé à son chevet puis, aussi calme qu’une tempête, repart sans croiser le regard du serviteur de Rana.

_________________
"Enchanté: Vohl Del'Yant, Humain d'Ynorie, Voleur...Pour me servir!"


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