Route entre Kendra-Kâr et Cuilnen

Description du voyage à pied et/ou sur monture :

A partir de Kendra Kâr, une route pavée suit la côte de l'océan, elle est parsemée de cinq relais dont le deuxième n'est plus qu'un tas de cendres. Il faudra donc dormir à la belle étoile à cette étape et se méfier des bandits qui rôdent continuellement dans le coin.

Le chemin traverse trois gros fleuves et quelques petits cours d'eau de temps à autre, puis vous bifurquerez vers le nord pour vous diriger vers l'Anorfain et sa grande forêt. Il vous faudra très vite vous y aventurer, après vous être reposé dans le dernier relais de la route. Attention, si vous n'avez pas de guide Elfe (Vert ou Blanc) ou si vous n'avez pas eu l'habitude d'y vivre, vous n'avez aucune chance de trouver Cuilnen car il n'y a plus vraiment de route : il s'agit de petits chemins formant un incroyable réseau et qui ne sont absolument pas balisés ! Vous arriverez dans la cité Elfique après quelques jours de marche en forêt, si tout se passe bien.

Il n'y a que de rares Gobelins sur la route, en plus des bandits de grand chemin évidemment mais, dans la forêt, il y a aussi de grandes araignées, des serpents, des esprits. Par contre, vous n'y trouverez pas d'Orques !

Durée du trajet à pied ou sur monture sur le continent de Nirtim

Basez vous sur les cartes et présentations décrites dans les 4 continents de Yuimen

Ils marchaient cote à cote d’un pas vif et souple, l’Aniathy bien plus rapidement que l’elfe noir parce qu’elle était vraiment très courte sur patte. Seulement, elle, elle avait un considérable avantage sur lui, puisqu’elle n’était jamais à bout de souffle, ni à court d’énergie.
Keynthara était un bouillon de magie plein de vigueur qui ne tarissait jamais, on ne savait pour quelle raison d’ailleurs. C’était la nature, ou plutôt sa supposée créatrice, qui l’avait voulu ainsi, et dans le fond, elle ne se posait même pas de question, ça lui était bien égal du moment qu’elle pouvait en tirer profit. « Doucement, la route sera longue ! », qu’il lui avait simplement dit en regardant droit devant lui, à peine avaient-ils eu quitté pour de bon la Cité Blanche que la mignonnette commençait à bien connaître. Évidemment, elle, elle était capable de faire le trajet en courant, mais avec tout l’attirail militaire en possession du Shaakt, ce voyage promettait de durer car il ne fallait pas lui en demander trop… « Tu sais, moi, j’ai pas besoin de dormir, je pourrais courir, parler, rire et sauter toute la journée, et le tout en même temps aussi, si tu me le demandais ! Mais je suis sûre que tu voudras pas, pasque je te fatiguerais encore plus à faire ça autour de toi. Alors donc, je le ferai pas, parce que j’ai pas envie que tu te mettes à faire une sieste en plein milieu de la journée par ma faute ! Non non, je serai sage… Une petite image... ou une muette ? Pas muette, ça, je sais pas être ! » La petiote voyait le Shaakt jeter des coups d’œil plutôt inquiet sur l’arrière alors qu’ils distançaient les portes de Kendra Kâr, laissant s’étaler les remparts sur toute la longueur de l’horizon dans leur dos. C’était que probablement, la vision et le souvenir de cette abjecte elfe le tourmentaient encore, mais Keynthara ne l’entendait pas de cette façon. « Hey ! Tu pourrais m’écouter quand je te parle ! C’est bon, elle nous suit pas ! Elle a de toute façon trop peur de moi ! » Fière d’elle alors qu’elle repensait encore à son intervention brillante, la mistinguette rejouait cette palpitante scénette dans sa petite tête de linotte. Elle revoyait son compagnon courir vers elle avec une expression d’intense désespoir, tremblant comme elle n’avait jamais vu personne le faire auparavant. Même si sur le moment Keynthara n’avait pas cherché à comprendre son étrange comportement face à une congénère bien moins imposante que lui, elle était maintenant bien déterminée à comprendre le pourquoi du comment de sa réaction.
La poupée retournait des tas et des tas de formulations dans sa tête, mais comme c’était quelque chose qu’elle n’avait vraiment pas l’habitude de faire, elle s’y perdait presque, oubliant le début alors qu'elle arrivait enfin à la fin. Il fallait alors tout recommencer, un peu comme quand on s'atteler à la construction d'un château de cartes pour la toute première fois...
Pauvre d’elle, sa mémoire était défaillante sur bien des points, allez savoir pourquoi. Au moins, ça lui donnait de quoi s’occuper en silence pendant que l’imposant guerrier soufflait comme un bœuf à ses côtés pour rester en forme sur le long terme.
La verdure défilait le long de cette interminable route, et les ombres devenaient de plus en plus imposantes, offrant aux deux comparses des abris réguliers face à ce cuisant soleil qui régnait en maître sur l’immensité de ces côtes en terre Kendrânes. Les passants, parfois perchés en haut de leur chariot lorsqu’il s’agissait de marchands, osaient à peine saluer ces deux drôles d’individus, et c’était d’ailleurs bien mieux ainsi : personne pour leur demander le chemin et leur faire perdre du temps inutilement. « Dis-moi, au fait, c’est un peu bête de te le demander si tard, mais c’est que je n’y avais même pas pensé plus tôt. C’est quoi le nom que ta maman elle t’a donné quand t’étais petit ? » Non, ce n’était pas ça, sa question principale, mais puisqu’elle avait l’intention de s’attaquer à un élément un peu personnel, il fallait d’abord commencer par les banalités. On n’aurait pas dit comme ça, mais tout ce raisonnement un peu bancal avait été particulièrement dur à élaborer. Sans doute était-ce l’influence des aventures de ces derniers mois qui l’avait fait un peu évoluer en lui permettant de prendre du recul sur ses propos, mais toujours était-il que ça n’était pas encore gagné…
L’elfe restait de marbre, peu enclin à révéler son identité, seulement, il devait bien évidemment savoir que s’il ne donnait pas satisfaction à la sauterelle à ses côtés, il allait courir au-devant de grands dangers autant psychiques que moraux. Aussi capricieuse qu’elle l’était, Keynthara était capable de bien des chantages. « Le Shaakt de Caix Imoros n’est plus, Petite… » Énoncer ce tout premier début d’explication coûtait cher pour lui qui était très sujet aux réminiscences du passé, bien plus encore que ne l’était la Petite qu’il devait escorter. Il déglutît bruyamment avant de soudain baisser sa tête en direction de la môme, une expression soudainement bien plus vivante sur le visage qui, hélas, libérait toute la peine qui l’habitait de toute part. C’était à se demander si parfois, il ne valait pas mieux garder les émotions enterrées au plus profond de soi-même plutôt que de devoir les subir jusqu’à la fin des temps.
L’Aniathy quant à elle l’observait avec ses grands yeux ronds emplis d’incompréhension. Il était à côté d’elle pourtant, alors qu’est ce qu’il était donc en train de lui chanter là ? Bon, déjà, elle venait d’apprendre qu’il était originaire de cette cité bien qu’au final elle ne savait absolument rien sur cette dernière. Probablement une ville d’elfes noirs, et encore, elle n’en était même pas sûre. Ce n’était par ailleurs vraiment pas le moment de l’interrompre et elle le laissa donc continuer sans en demander plus à propos de Caix Imoros. « Je ne veux plus me rappeler qui j’étais avant, là-bas, alors ne m’oblige pas. » Le visage de la poupée magique s’éclaircissait à mesure que les propos de son compagnon se donnaient du sens. Ainsi donc, son passé n’était effectivement pas très plaisant, et la Petite comprenait qu’elle allait avoir beaucoup plus de mal que prévu à le faire parler de lui. Sans doute devrait-elle donc changer de stratégie, et essayer de parler d’elle-même. C’était la chose qu’elle aimait le plus faire, de toute façon, alors ça n’allait pas forcément être très difficile.
Puis soudain, il se mit à sourire, timidement, puis plus franchement. Keynthara en venait à l’imiter, l’invitant d’un petit rire frais et coquin à poursuivre sans aucune hésitation. Elle n’aimait pas quand les gens étaient tristes parce qu’après ils n’étaient plus très enclins à se soucier d’elle, alors, le voir ainsi lui mettait du baume au cœur et la rassurait… « Mais tu peux m’appeler par mon nom de cœur, ça sera de toute façon bien mieux ! Répète après moi… Krae…Mer ! Voilà, c’est joli non ? » L’Aniathy essaya d’articuler son nom du mieux qu’elle le put, se faisant un devoir de ne pas écorcher ce nom. Pour sûr que ce n’était pas quelque chose de très elfique, du moins, pas comme elle se représentait leur nom. Au moins, ce n’était pas très dur, et elle n’allait avoir aucun mal à s’en souvenir, pas comme son patronyme à rallonge ‘Keynthara’ qui, le croyait-elle, était sortie de l’esprit mauvais et farfelu de son ancienne et redoutable maîtresse. « Oui, j’aime bien…Nan ! J’aime beaucoup ! » Plutôt satisfaite de sa réponse bien que devant garder en réserve ses questions sur l'incident de tout à l'heure, la demoiselle commença à s’agiter des mains, faisant un peu comme les hirondelles qui voletaient ça et là au dessus de leur tête sans jamais s’arrêter. Leur destination était inconnue de la Petite et elle se plaisait à les imaginer les guider jusqu’à la mystérieuse forêt de Cuilnen. Sautant du coq à l’âne, elle se risqua à un commentaire posé là comme un cheveu sur la soupe… « Si j’étais une toute petite fée, encore plus petite que je n'le suis, j’apprivoiserais un oiseau pour voler sur son dos ! Comme ça, je pourrais faire le tour de Yuimen en un battement d’ailes ! » Ils éclatèrent de rire sans plus se soucier de rien devant tant d'innocence, l’esprit libéré par ces quelques instants de rêverie. Le Shaakt avait pu oublier l'angoisse qui se faisait de plus en plus présente à l'idée d'aller vers la cité des elfes blancs, et déjà, on voyait les débuts d’un petit lien encore chétif et tout fragile prendre vie entre ces êtres ô combien différents, mais tournés vers un même but qui les allait les unir doucement mais surement…

Puisque l’heure n’avait pas été à la baignade nocturne, la Petite n’avait plus qu’à espérer avoir droit à un bon bain lorsqu’ils arriveraient au relais. Elle s’imaginait déjà à l’intérieur, dans une agréable chambre douillette, à rêvasser pendant que le Shaakt entrerait en méditation. Elle avait envie d’un lit bien matelassé, rebondissant et l’enveloppant comme un petit nuage cotonneux.

Un sourire béat aux lèvres alors qu’elle était immergée dans ses délires fantasmagoriques, elle ne se rendait même pas compte qu’ils arrivaient déjà à hauteur de l’auberge, qui somme toute était vraiment très petite et vieillotte. Il y avait gros à parier que Keynthara allait vite désenchanter, et c’était justement la réflexion que venait de se faire Kraemer…

« Mamzelle…Pst… On arrive, et c’est pas le grand luxe…ça ira quand même ? »

Il voyait bien qu’elle n’était pas tout à fait les pieds sur terre, à cause de son regard perdu dans le vide et de son expression peu appropriée à la situation. Ce cher guerrier n’était vraiment pas au bout de ses surprises, en compagnie de ce drôle de minuscule personnage deux fois plus petit que lui…

« Chut ! », fut la seule réponse de la poupée qui ne démordait pas de son petit plaisir intellectuel, s’imaginant immergée dans un petit bac plein de mousse amusante comme si elle y était vraiment. Pour elle qui n’avait jamais connu que de l’eau croupie ou de l’eau de mer salée, ce qu’elle était en train de vivre dans un rêve tout éveillé était réellement idyllique et merveilleux. Il était donc hors de question de sortir de ce délicieux état second maintenant, n’en déplaisait au Shaakt.

Au pied de la modeste bâtisse éclairée par une faible lanterne, il y avait deux jeunes gens qui échangeaient bruyamment. Peut-être s’agissait-il d’une histoire d’argent ou d’un litige quelconque, mais il semblait les occuper depuis un bon bout de temps déjà. Pourquoi fallait-il toujours que les hommes se fâchent pour quelques petites piécettes sans grande valeur ? C’était quelque chose que la poupée ne comprenait jamais, et ce n’était sûrement pas ce soir qu’on allait pouvoir lui faire entendre raison sur la chose alors qu’elle se trouvait maintenant passablement agacée par l’interruption de sa machine imaginative, à cause de leur braillement intempestif.

« Qu’est ce que tu fais ? Non mais, doucement ! », ordonna l’elfe noir en voyant la petite impétueuse se diriger d’un pas décidé vers les deux autres gens. Elle avait envie de mettre un terme à tout ça de peur de les entendre encore s’exciter de la sorte toute la nuit sous leur fenêtre. Sans répondre, elle s’approcha du plus agressif…

« Coucou ! Vous venez ici pour vous chamailler ? Personnellement, et avec mon ami le Shaakt, on vient ici pour trouver un peu de repos sur la route, alors ça serait gentil que vous alliez faire vos règlements de compte ailleurs, voui ? »

Elle s’était retournée en pointant du doigt Kraemer et arborait un sourire un peu niais, comme si elle espérait que son intervention opportune passe comme une lettre à la poste et que tout allait vite rentrer dans l’ordre. Évidemment, leur première réaction fut de la dévisager sans rien dire, parce qu’ils étaient encore sous le choc du toupet de la gamine. Ce n’était pas tous les jours qu’on avait à faire avec une forte personnalité incarnée dans un si petit corps mignonnet.

« De…de quoi je me mêle, Mademoiselle ? C’est… mon établissement ! J’y fais ce que je veux, si ça ne vous plaît pas, libre à vous de continuer, ou alors, peut-être préféreriez-vous payer à la place de cet escroc qui est venu prendre un repas sans argent ? J’aurai dû m’en douter, avec ces haillons, j’aurai dû le mettre à la porte dès le début ! À la porte ! »

Et voilà, encore un pétrin dans lequel elle s’était fourrée par manque de lucidité et de réflexion. Kraemer arriva tout prêt de la Puce insolente alors qu’ils étaient prêts à continuer leur dispute. Il se tenait là pour prendre sa défense, mais n’avait nullement envie de prendre parti, surtout qu’il savait à présent qu’il avait à faire avec l’aubergiste.

« Et d’abord, je…je ne prends pas d’elfe noir dans cet endroit, l’affaire est close ! »

La chose à ne pas dire avait malheureusement été dite, et le mauvais commerçant lançait directement à son interlocuteur :

« File-moi ton amulette…tu payes en nature ou alors… »

L’heure n’était apparemment plus aux négociations, et il s’était montré formel : le bijou qu’il portait à son cou, ou alors… ou alors quoi ? Le Shaakt ne lui avait pas laissé le temps de finir car il se rapprochait de lui de façon oppressante, serrant avec force son bâton qu’il avait envie de lui balancer sur le sommet du crâne. L’aubergiste avait certes l’air bien costaud, mais pas assez pour pouvoir tenir tête à un Kraemer mal mené. S’il y avait une chose qu’il ne supportait pas, c’était qu’on se montre raciste à son égard, et contre toute attente, il se devait de le remettre en place…

« Hep hep hep ! Il suffit ! Pas de bataille, j’ai de quoi arranger tout le monde, d’accord ? Kraemer, ne le touche pas sinon il ne sera plus en état de nous donner les clés ! »

L’idée qui venait de poindre dans l’esprit de la petite poupée était de loin la plus étonnante. Si elle ne comprenait pas que l’on puisse se battre pour de l’argent, elle ne comprenait pas non plus que l’on veuille à tout prix l’économiser, et puisqu’il fallait rentrer dans le jeu de ces humains cupides pour résoudre tous les problèmes, Keynthara plongeait généreusement sa main dans sa bourse gonflée.

« Voilà pour le repas de Monsieur ! », qu’elle dit avec le sourire, et presque en rigolant tellement elle était contente d’avoir trouvé le remède miracle à cette dispute qui pouvait rapidement tourner au pugilat. Elle laissa tomber deux pièces d’abord dans la main du gérant du relais, et puis, le regardant droit dans les yeux, elle piocha encore beaucoup d’autres avant d’ajouter : « Pour la nuit de mon ami Kraemer, pour la mienne…ainsi que pour celle de ce pauvre homme s’il le souhaite ! »

Ils échangèrent tous les quatre des regards amplis d’une expression différente, chacun essayant de remercier à leur manière la petite poupée qui était maintenant aux anges. Le Pauvre ôta discrètement sa vieille amulette pour la glisser dans la main de l'Aniathy en guise de présent pour la gratifier du geste qu'elle avait eu à son égard. C'était la seule chose qu'il pouvait faire, et ça représentait beaucoup pour lui, alors qu'il n'avait pas voulu s'en séparer pour le donner à l'aubergiste...

« Puisse-t'elle te protéger, toi et ton innocente gentillesse ! Tu la mérites vraiment...»

Seul l’elfe noir semblait encore empreint d’une tristesse manifeste, mais l’égo flatté de la Petite ne lui laissait pas beaucoup l’occasion de se soucier du Shaakt. C'était que se faire refuser dans une auberge sous prétexte que sa peau était trop sombre avait de quoi faire mal, et même si la tension était retombée parce qu'il avait accepté de le faire dormir dans son relais pour quelques pièces de plus, il n'en resterait pas moins susceptible.

Sans plus attendre, ils entrèrent ensembles dans la bâtisse, et une chambre des plus rudimentaires leur fut donnée pour la nuit.

( Quoi ? C’était quoi ça ? Un cri ? Mais…)

La Petite se redressa subitement sur le lit alors que le soleil commençait timidement à apparaître à l’horizon, tous les sens en éveil, et surtout, paniquée. Il était encore très tôt, mais le Shaakt méditait toujours à côté d’elle. Assis en tailleur, il n’avait pas bougé depuis de nombreuses heures : apparemment, sa fatigue avait été un peu plus grande que celle qu’il s’était imaginée la veille au soir.

« Tu as entendu ? Il faut descendre, quelque chose se passe…Fin de la méditation ! »

Ce cri qui avait brisé la quiétude de cette nuit claire désormais achevée n’avait pourtant pas réussi à tirer l’elfe de sa torpeur, et il fallut quelques secondes à Keynthara pour réussir à l’en sortir. Elle trépignait sur place, bouillonnant de l’intérieur parce qu’elle avait peur et qu’elle était passablement énervée par l’absence de réaction de Kraemer se décidant à peine à pousser un petit grognement…

« Debout bon-à-rien ! Prends ton arme, vite ! J’espère que c’est pas ce tavernier à la noix qui fait des histoires au mendiant encore un coup ! »

La Petite ne prit même pas la peine de remettre ses chaussures, se saisissant à toute vitesse de sa baguette magique qui manqua de lui échapper des mains alors qu’elle essayait d’ouvrir la porte fermée à clé. Évidemment, tout avait été fait pour les gens de taille normale, et à cause de ça, elle, elle avait toutes les difficultés du monde…

« Ouvre toi saleté de serrure à deux sous ! », finit-elle par hurler tandis que son vœu s’exhaussait sur le champ. Dans un grand fracas, la porte s’ouvrit, laissant la voie libre pour cette furie prête à tout pour en découdre avec les gens qui faisaient des histoires, telle la justicière qu’elle aimait à incarner quand elle s’estimait un peu en manque de considération et d’attention.

Le chevalier du chaos finit par reprendre totalement ses esprits au moment où la petiote déchaînée s’élançait déjà dans le couloir. Il se jeta à sa suite presque aussitôt, la sommant de bien vouloir s’arrêter, mais comme toutes les autres fois, rien n’y fit…

« Tu vas pas recommencer ! Ne te mêle pas des affaires des autres, olala ! Keynthara, tu vas avoir des gros ennuis un jour ! Ça t’a pas suffi hier soir ? »

Tout dans sa façon de lui courir après et de s’exprimer montrait qu'il avait peur pour elle, c'était évident. Sa voix tremblante ne parvenait d’ailleurs pas à couvrir celle de l’Aniathy qui criait comme si elle avait perdu la tête en dévalant les escaliers imprudemment.

« C’est quoi ce cirque ! Tout le monde se calme ! On est dans une auberge… »

Et elle se figea sur place, saisie de plein fouet par l’horreur qu’elle voyait sous ses yeux, ou peut-être par l’effet du sort que le mendiant venait de lui jeter en se retournant, même si ça, elle l’ignorait totalement. Aucun son ne parvint plus à sortir de sa bouche, et elle se contenta de penser très fort ce qu’elle avait voulu dire pour conclure son arrivée…

(…pas dans une arène…)

Un monstre de métal ténébreux se tenait là, armé d’une incroyable hache semblant plus aiguisée que toutes les armes qu’elle avait pu croiser jusqu’à présent. Tout son être respirait le mal, et l’Aniathy était terrorisée par sa seule vision. Elle n’était bien sûr pas la seule, à en juger par la présence de l’aubergiste caché derrière son comptoir, osant à peine laisser dépasser la moitié de sa tête. De toute évidence, il devait avoir peur de se la faire trancher. C’est à ce moment-là que Keynthara comprit : le cri qui l’avait alerté l’instant d’avant avait été poussé par ce bougre finalement aussi couard qu’avare. Face à cet individu carapacé de plaques et de piquants métalliques, il faisait moins le malin…

La Petite était en train de détailler le mendiant protégé par une incroyable armure magique luisante lorsqu'elle se sentit partir vers d’autres horizons émotionnels, abandonnant à la fois ses craintes et son envie de justice. La force qui grandissait en elle était en totale contradiction avec la scène dont elle était témoin, tandis que le sort de paralysie semblait perdre de son efficacité. Il se dissipa très vite, et ce ne fut pas forcément une bonne chose étant donné ce qui suivit...

« Ohhhhh ! Je suis si bien, je… je plane ! Je suis un papillon ! Un ravissant petit papillon de nuit…Oui, c'est ça ! »

L'enchantement magnifique que venait de lui jeter l’homme de lumière était d’une puissance sans pareil, et Keynthara se sentait envahie par un bien-être absolu et divin. Plus de peur, plus d’angoisse, plus de désir. C’était l’annihilation totale de tous manques et de toutes envies.

La Petite semblait, en apparence, regarder la scène, mais ses yeux étaient vitreux, ils ne lui montraient plus la réalité des choses, et elle se mettait à ignorer totalement le combat qui était sur le point de commencer. Oublié, le prêtre, oublié, le vilain gros méchant, et même, oublié, le Shaakt. Il n’y avait plus qu’elle et son bonheur artificiel qui comptait. La bataille ne l'intéressait plus le moins du monde.

La poupée magique était comme sous l’emprise d’une drogue, irrésistible et qui savait la combler au plus haut point. Elle en bavait presque, remuant d’une façon tout à fait singulière en battant des bras au rythme des bouffées de plaisir qui explosaient en elle. La prêtresse ne tenait presque plus sur ses jambes, toute chancelante, et elle finit par chuter ridiculement contre le mur, atterrissant la seconde d'après lourdement sur le sol en bois vermoulu. Ça fit du bruit, évidemment, mais ce n'était rien en comparaison du rire empreint de folie de la poupée magique. Il était d'une profonde indécence, et totalement inopportun, mais heureusement elle n'était pas la seule dans cette situation cocasse : Kraemer avait subi exactement le même sortilège puissant, et il se roulait lui aussi par terre...

Au milieu de la grande salle mal éclairée, les tables plus ou moins bien entretenues étaient doucement mais sûrement écartées. Les deux êtres opposés cherchaient tour à tour à se rapprocher et à se fuir, lentement, très lentement, et la tension naissant de cette violente harmonie était poignante pour qui assistait consciemment au spectacle. Ces ennemis avérés tournaient en rond, sans un mot, hypnotisé par leur combat qui avait d’ores et déjà commencé sans aucun échange de coup, du simple fait de cette affreuse chorégraphie improvisée. Et puis ce qui devait arriver arriva, et la première attaque fut lancée, une attaque du noir personnage, une attaque brève et emportée. Quelques chaises furent entrechoquées et une cruche en bois fracassée au passage rependit son vin sur le parterre. Le prêtre avait esquivé la hache tranchante, pourtant, ce rouge n'allait pas tarder à se mêler à celui, plus chaud et plus précieux, du sang...

Mais tout redevint à nouveau lent, lourd, et intense. Cette danse macabre durait encore et encore, leurs pas souples, presque gracieux, semblaient calculés pour que jamais leur corps ne se rencontre...

« Tout est tellement magnifique ! C'est merveilleux, fantastique ! »

Les commentaires futiles et déplacés de la Petite étaient rejoints par ceux de l’elfe noir allongé à ses côtés tout près de l’escalier, venant donner une note encore plus malsaine à l’ambiance des lieux. La confrontation entre le ravissement extatique ressenti par les deux compagnons et la violence du combat qui ne cessait d’augmenter et qui se déroulait en parallèle formait un paradoxe terriblement dérangeant.

Mais rien de tout cela n'était malheureusement accessible à l'Aniathy qui, telle une étoile de mer, continuait de battre des mains et des jambes avec frénésie en balayant le sol. Elle était si gravement atteinte qu'elle n'essayait même pas d’éviter les combattants. Ils passaient pourtant parfois à quelques centimètres à peine de ses membres agités. Pour sûr que l'intrus de ces lieux se serait fait un plaisir de l'écraser au passage s'il n'avait pas été aussi absorbé par ce qu'il était en train de préparer...

Une seconde attaque terrible fut portée par le guerrier sombre à l’épaule du prêtre, et elle atteint sa cible titubante sous l'extrême puissance du coup. Son armure de lumière se mit à briller d'une lueur magique puissante à l’endroit touché, mais en quelques instants, le mendiant, qui n’en était apparemment pas un, reprit du poil de la bête, et s’arma de courage pour contre-attaquer plus violemment encore. Il avait réagi avec une vivacité digne des plus grands combattants, et cet exploit lui aurait sans nul doute valu tous les applaudissements de la Petite si elle avait été en mesure de réagir à ce qu'il se passait autour d'elle. Mais elle n'était malheureusement plus en état...

Il venait d'abattre son fléau d’arme sur le flanc droit de l'individu carapacé, les yeux plissés, la main crispée sur cette solide arme, et le vacarme qui en résultat fut plus terrible encore que le tonnerre. L'armure s'était fendue, mais il n'y avait pas de blessure. Aucune. Le coup n'avait pas été assez redoutable pour en venir à bout de cet ennemi qui cria d'une voix gutturale au moment où la poupée vagissante de plaisir sentit tout son corps parcouru d'un étrange frisson. L'effet du sort commençait-il déjà à se dissiper, doucement mais sûrement, ou s'agissait-il là d'une coïncidence ?

Derrière son comptoir, on entendait de temps à autre le tavernier gémir en voyant le saccage qui était fait dans son humble établissement. Il n'était évidemment pas au bout de ses peines, le carnage ne faisait que commencer.

Le gérant du relais, encore tout tremblant et blême de ce qu'il venait de se passer dans son établissement, contourna son comptoir pour se mêler à la salle dévastée. Il parcourait les lieux d'un regard livide, et passant sa main sur les tables renversées et parfois même très abîmées, il encaissait le choc. Comment est-ce que les choses avaient pu en arriver là ? Trop de questions tournoyaient dans sa tête pour qu'il ne s'apaise de lui-même, et soudain, la vue des deux individus allongés par terre, toujours aussi remuants et piaillant des énormités plus grosses qu'eux, vint déclencher en lui la plus grande des révélations...Ils étaient fautifs de tout ce qui s'était passé.

« Debout ! Debout », hurlait-il en agitant ses mains frénétiquement.

Brisant le rythme lent avec lequel il s'était déplacé entre les chaises jonchant le passage et les tables mises sans dessus dessous, il s'élança en direction de Keynthara et de son cher Shaakt qui étaient en proie à un réveil des plus rudes, avec une vigueur toute nouvelle. Il était en colère, paniqué et surmené. C’en était bien trop pour lui qui s’acharnait maintenant à secouer la petite poupée par les épaules, alors qu’elle semblait retourner en ce triste monde tragique…

« Hein ? Qu’est ce qu’il y a ? Doucement ! »

, et d’ouvrir sa grande bouche, elle laissa échapper de cette dernière un incroyablement braillement de gamine colérique. Le sort qui s’était emparé d’elle pendant des dizaines de minutes avait cessé de faire effet, c’était définitif, et la disparition de ce bonheur extrême laissait en elle une désagréable sensation, à la limite du supportable, renforcée par la sollicitation pas forcément très amicale de l’aubergiste. Elle était elle aussi paniquée, il n’y avait qu’à entendre ses pleurs qui déchiraient la pièce et qui avaient également tiré l’elfe noir de l’enchantement dont il avait été prisonnier lui aussi.

« Vous allez la lâcher, oui ! »

Sans réfléchir, le Shaakt avait bondi sur ses jambes certes un peu engourdies, mais qui ne tremblaient pas devant ce bon à rien couard. Il se faisait des plus menaçants, repoussant avec rage l’aubergiste un peu plus loin, avant de se pencher au-dessus de Keynthara qui était assise en train de sangloter. Elle avait du mal à se remettre de ses émotions qui avaient changés si rapidement, et se trouver sous le couvert de l’attention de Kraemer était la seule chose qui parvenait à apaiser la petite créature magique.

« Je veux partir…Qu’est ce que c’était ? », chuchota-t-elle en plongeant son regard intensément bleu dans les yeux du chevalier du Chaos. Il fut particulièrement perturbé par cet échange et sur le coup, il eut un peu de recul avant de se ressaisir, reportant sa paranoïa sur l’homme qui n’avait plus osé se rapprocher. Il était prêt à le bousculer à nouveau si jamais il lui venait à l’idée de retourner à la charge, et c’était avec une expression furieuse qu’il s’afférait à défendre sa petite Protégée des grosses paluches de l’aubergiste.

« Personne ne partira d’ici ! C’était une attaque, maudite soit-elle ! Et c’est vous qui avez laissé rentrer ce…prêtre mendiant dans mon relais ! C’est entièrement à cause de cette petite sotte ! »

Il la pointait du doigt d’un air dénonciateur, et Keynthara se recroquevilla sur elle-même en se remettant à pleurer de plus belle. En son for intérieur, elle songeait au fait que ce gros méchant pas beau avait atterri entre ces quatre murs parce qu’elle avait permis au gentil grand monsieur de passer la nuit à l’auberge, et ça, elle ne pouvait se le pardonner.

« Tout est de ma faute, c’est vrai… »

Elle était désespérée, et ne savait vraiment plus où elle en était. C’était à son tour de regarder les dégâts occasionnés par la bataille à laquelle elle n’avait même pas pu assister, et encore moins participé.

« Et si il n’y avait pas eu ce drôle de sort, j’aurais peut-être pu changer le cours des choses, et mettre à la porte le…méchant en carapace ! Je lui aurai montré ma baguette, et je lui aurai fait peur ! Et aussi, je lui aurai dit de partir tout loin et de plus jamais revenir, et l’auberge, et bien elle n’aurait pas été détruite…Je suis si désolée… »

Essuyant ses yeux mouillés d’un revers de manche, elle renifla un grand coup et resta interdite l’espace de quelques instants, le temps que Kraemer la remette sur ses petites pattes de poupées pleurnichardes.

« Mais non, tu dis des bêtises. Viens, on s’en va…Allons récupérer nos affaires en haut… »

La voix grave, le Shaakt se tourna vers l’escalier et prit la main de Keynthara pour la mener vers l’étage, là où leur matériel d’expéditions les attendait avant de partir. Leur course fut néanmoins stoppée nette par l’aubergiste qui se jeta en travers de leur chemin, déclamant les requêtes qu’il avait à leur faire d’un ton condescendant. C’était qu’il avait envie de profiter de la culpabilité de la fillette…

« Je vous pardonnerais tout et vous laisserais reprendre votre route si vous m’aidez à remettre sur pied l’endroit. Il y a certains pieds de chaises à revisser, les tables à remonter, les cruches à recoller, le sol à laver et les bougies à allumer là en haut. Vous me devez bien ça, surtout toi, la môme… »

Keynthara baissa les yeux, sentant qu’il avait raison, mais l’elfe noir ne l’entendait pas de cette façon. Lui n’avait qu’une seule idée en tête, reprendre leur route en direction de cette forêt qui lui faisait pourtant si peur. Plus vite ils seraient en route, plus vite ils seraient arrivés et plus vite ils toucheraient leur récompense pour avoir apporté leur aide au royaume Kendran.

« Trop bon, trop con ! », se mit à chantonner le Shaakt d’une voix légèrement aigu qui ne lui ressemblait absolument, mais alors absolument pas. Et puis, il commença à siffloter en regardant les oiseaux de cette fin de matinée piailler. Même si cette petite pique était lancée sur un ton humoristique, il n’en restait pas moins que le fond de sa pensée était mis au grand jour.

« Peut-être bien, mais tu ne sais pas si un autre jour, on n’aura pas besoin de retourner ici, et je suppose que si on n’était pas resté pour… faire… les fées du logis, jamais plus nous n’aurions eu de chance de remettre les pieds un jour. »

En parlant de fées du logis, Keynthara eut la vision de l’elfe noir transformé en un petit elfe de maison, avec pour seule couverture vestimentaire un long tablier à poix rouge, et un petit plumeau à la main. Que c’était grotesque, et hilarant à la fois. La Petite ne put résister à l’appel du rire qui avait pris possession de tout son être minuscule.

« Tu n’as jamais pensé à te reconvertir dans le ménage, dis-moi voir ? », et son fou rire continuait de plus belle. Déjà, elle était sortie de la discussion, et Kraemer n’y comprenait pas grand-chose. Tout ce qu’il savait, c’est qu’au fond, la poupée, elle avait eu raison de rester, même s’il lui était impossible de renoncer à l’idée qu’ils avaient été un peu beaucoup exploités.

L’après-midi était déjà bien entamée, et les minutes s’étalaient derrière eux comme les cailloux du Petit Poucet, traçant un chemin qui trouvait ses origines déjà bien loin, entre les murs de Kendra Kâr qu’ils avaient quittée depuis une bonne journée déjà. La monotonie du trajet commençait largement à se faire sentir pour le grand guerrier qui n’ouvrait la bouche que pour prendre de fausses nouvelles de sa petite protégée visant à lui suggérer plutôt de s’économiser, ou pour se plaindre du statut d’esclave abusé qu’il leur avait été collé sur le front pendant cette demi-matinée passée. Si Keynthara n’avait de cesse que de s’agiter encore et toujours, le Shaakt, lui, passait tout son temps à ressasser toujours les mêmes tracasseries, comme si remettre le sujet sur le tapis allait pouvoir le libérer de son apparente tourmente. C’était que visiblement, il ne lui en fallait pas beaucoup pour se mettre dans tous ses états…

« Tu me donnes le tournis, Keynth, et à force de jouer la Bouloum sauteuse, méfie-toi, y’en a un qui va venir te chercher et il t’emmènera loin avec lui ! On dirait que cette longue marche et ce boulot de titan ce matin ne t’a pas encore assez…»

Le Shaakt esquissa une grimace d’horreur en réalisant toute l’ampleur de ses propos. Si la Petite venait à disparaître, qu’adviendrait-il de lui et de cette périlleuse mission à Cuilnen, cette ville d’elfes blancs qui l’effrayaient tant? Non, il devait vite chasser ces idées de son esprit avant d’atteindre un point de non-retour. Il avait réussi à tenir des heures, des heures et des heures, durant cette après-midi de marche, sans être habité par la moindre crainte de l’avenir, et ce n’était pas maintenant qu’il devait céder à ses angoisses et à sa paranoïa aiguë qui lui jouait si souvent des tours. Non, il devait se reprendre bien en main, et se concentrer sur la route, et sur Keynthara qui venait d’ailleurs de lui couper la parole, tout en le coupant également dans son début d’angoisse qu’il n’avait donc plus besoin de canaliser et d’évacuer…

« Tiens c’est bizarre, tu as vu le ciel, il est tout sale, pas comme des nuages qu'on a l'habitude de voir là-haut…nan c’est peut-être du feu tout rouge qui fait des flammes ! », lâcha-t-elle mi-inquiète, mi-étonnée. S’approchaient-ils d’une ville hébergeant des gens tellement frileux qu’ils allumaient déjà des énormes cheminées pour se réchauffer? Ou peut-être qu’il s’agissait là d’un véritable feu de forêt ? Toutes sortes d’hypothèses virent le jour en l’espace de quelques fractions de secondes dans la tête de la linotte. Des hypothèses toutes plus abracadabrantes les unes que les autres, et finalement, elle n’avait même pas encore fini de dérouler sa liste à son compagnon de route que déjà la nuit se faisait épaisse, et ils traversèrent le second fleuve qui les séparait de la grande forêt de l’Anorfain un petit quart d'heure plus tard.

Les sacs furent alors jetés à terre, sous le couvert d’un petit groupement d’arbres aux branches et au feuillage plutôt bas peu après le passage du grand fleuve. Le Shaakt s’installa à même le sol, commençant son repas sous le flot incessant de parole de la poupée. En tailleur, il finit son frugal dîner, et en tailleur, il ferma ensuite les yeux, prêt à entrer dans une profonde méditation qui se chargerait de le remettre d’aplomb pour la route qu'ils voulaient reprendre bien rapidement, d'ici quatre bonnes heures tout au plus, puisque Kraemer ne comptait pas passer plus de temps que ça à réstaurer son drôle d'organisme elfique.

« Keynthara ? »

Mais elle ne se laissa pas interrompre pour autant…

« …ou alors ça pourrait être un gros nuage, un tout grand tout gigantessssqqquueeee nuage d’insectes miiiiiiinusculllles, qu’est ce que tu en penses ? Et de loin du coup, on a l’impression que c’est un nuage de fumée, mais en réalité, ça en est pas un…Quoi ? Tu as trouvé ce que c’est ? »

C’était d’un naturel presque insupportable que la mistinguette finit par s’intéresser à ce que Kraemer avait à lui dire, ne se rendant pas bien compte, voire même pas du tout, que son ami n’attendait qu’une seule chose, c’était qu’elle se la ferme une bonne fois pour toutes.

« Mets-la en veilleuse, je veux me reposer, et fait en de même… Bonne nuit…Ne le prends pas mal surtout...»