Le lac de Hynim est maintenant derrière moi et je poursuis ma route à dos de cheval en longeant le fleuve. Je suis blessé, mon cheval aussi, et j'ai besoin de me reposer dans un endroit sûr, la faim me tenaille.
Je pensais arriver à une ville en suivant le cours d'eau, les gens se regroupent naturellement là ou il y a de l'eau, il serait logique de trouver un village en suivant le le courant.
A force d'avancer, moi et ma monture entrons dans un bois. La lumière du jour passe au travers des feuilles, le chant des oiseau et l'écoulement de l'eau demeurent les seuls à tuer le calme de la forêt. Je continue ma route, tranquille mais angoissé, je ne sais pas du tout où je me trouve, et je ne suis pas certain de trouver quelconque habitation sur mon chemin.
Je continue encore longtemps, très longtemps...
Le jour vivait ses derniers instants et je devais me coucher, j'étais fatigué, affamé et blessé. Je fais une halte dans un coin qui m'a semblé tranquille, où l'herbe entre deux arbres forme un coin apparemment confortable. Je laisse ma monture près d'un arbre qui faisait face à la rivière, histoire de monter la garde.
Je teste le lit naturel et je sens que quelque chose a changé... mon épée !
Elle n'est pas sur moi, dans ma souffrance je ne m'en suis pas rendu compte. J'ai dû la lâcher lorsque le rouquin m'a...
La pensée de cette nuit me hante à présent, il m'est désormais impossible de dormir.
J'irais à la chasse, mon arc, attaché autour de mon torse, ne m'avait pas quitté, les flèches quant à elles avaient disparues, probablement emportées par les eaux lors de ma "noyade".
Peu m'importe, j'ai une faim de loup, et rien pour chasser sinon un arc sans flèches.
Une idée me vint à l'esprit, qui m'était auparavant venue mais dont je ne voyais pas l'utilité.
Une pierre gisait près de moi, elle était coupante et rigide à vue d'œil. Cela me suffit.
Je passe deux heures le ventre vide à mon labeur qui vient à son terme à force d'efforts.
Avec la pierre coupante, je m'écorche à former des pointes sur les extrémités de mon arc, pointes qui me serviront à empaler mes futurs festins.
Mon sang ne fait qu'un tour, je me mets à chasser. Au bout d'un long quart d'heure, j'aperçois un lièvre qui tout de suite me parait délicieux. Une voix rude me prends de surprise :
"Casse-toi, Sekteg ! Je t'interdis de tuer cet animal !"Un Sekteg ? Moi ? Je lève les yeux et j'aperçois un nain brandissant un coutelas, un commerçant vu l'énorme bagage qu'il porte sur le dos :
"Mais ! T'es pas un gobelin toi ?"Je soupire, ma proie vient de s'échapper.
"Tu sais pas parler ? T'es un Humain sauvage ?"Je me relève, c'en est trop, d'où ose-t-il m'insulter, ce nain grassouillet ? Je brandis mon arc, ou plutôt, ma lance :
"J'ai l'air d'un macaque ?"J'ai des envies de meurtres, une voix m'interromps dans mon élan :
"Holà ! Calmez-vous ! On a encore une longue route à faire !"Je me retourne en direction de la voix :
Un elfe blanc, un Hinion. Le Nain lui obéit sans broncher, surprenant car les Nains et les Hinions sont en très mauvais termes. Il part en écartant des feuillages qui lui barraient la... route !
Je ne rêve pas, une route ! Une route, pour le commun des mortels, ne représente qu'une voie à suivre, mais pour moi, c'est le signe qu'il y a par là une ville !
L'elfe et le nain s'engagent sur la route qu'arpentaient déjà de nombreux commerçants. C'est sûr ! Au bout de cette route, il y a la civilisation !
Mon cheval me pousse vers la route, il était aussi joyeux que moi, mais surtout aussi affamé et épuisé. Le soir montrait son nez à l'horizon. Je chevauche avec ardeur ma monture, l'espoir m'a fait oublier mes cicatrices. Au pas je suis les centaines de marchands dans leur pèlerinage.
Je m'approche doucement du nain de tout à l'heure et, quand j'ouvre la bouche pour lui demander un morceau de pain, il me coupe :
"Ah ! C'est toi Sekteg ?""Je-ne-suis-pas-un-Sekteg !!!"Ça recommence, j'ai envie de charcuter ce gros lard.
"Oh, ça va oui ! Fais pas ton difficile ! On se fait drôlement chier nous ! On n'a pas le droit de rigoler un peu ?"Sa voix autoritaire et sa sagesse apparente ( la barbe y est sûrement pour quelque chose ) me forcent à me calmer. Je soupire un grand coup et lui demande calmement.
"Très bien vous marquez un point. Au fait, cela fait presque deux jours que je n'ai pas dormi et rien dans le ventre..." "Ouais c'est triste. Vous devez regretter la civilisation. Ça fait quoi de vivre comme un sauvage ?""Il se fout de moi ou quoi ?
"Ça fait que j'ai faim ! Vous n'auriez pas... par hasard... ?"Le nain comprend mes intentions et me coupe une nouvelle fois :
"Tu sais ce que je suis ? Je suis un marchand ! Si tu veux me prendre de la bouffe tu montre les yus, rien de plus simple !"Le nain me prend pour un voleur, ce que je suis d'ailleurs. Il s'emporte facilement contre les gens comme moi, en digne commerçant qu'il est, il hait les voleurs.
Entendant la dispute, l'Hinion se dirige vers moi et me tends un morceau de pain :
"Tenez, et arrêtez votre dispute ! On n'entends que vous !"Le nain baisse les yeux, l'elfe blanc avait décidément une grande autorité. Tout en dévorant le morceau de pain qui me parait comme un don du ciel à ce moment là, j'interroge le gros nain :
"Qui eche ?"Le nain me regarde à nouveau, cette fois avec curiosité :
"Décidément t'es pas du coin, toi ! Cet homme est un garde qui a pour fonction de nous protéger durant notre voyage, comme c'est un Hinion, il est mieux placé que quiconque pour protéger les marchands qui s'enfoncent dans les bois."J'avais mangé mon bout de pain à une vitesse phénoménale, soudain je décide de lui poser la question qui me torturait depuis de longues et nombreuses heures :
"Où va-t-on ?"Le nain me regardait avec amusement, il me fait un signe de l'œil :
"Regarde par toi-même !" Je détourne mon regard vers l'endroit qu'il m'indiquait, devant nous. Ma surprise devient immense, de hautes tours gouvernent l'horizon, deux énormes portes, engouffrées dans un mur de pierres blanches nous fait face. Dans un grognement monumental, les portes s'ouvrent lentement devant mes yeux stupéfaits, laissant entrevoir une immense cité, plus belle encore que le soleil qui tombait derrière ses tours, cette cité blanche que je n'avais connu auparavant que de réputation :
"C...C'est impossible ! Kendra Kâr !"Le nain est surpris de mon ignorance mais me regarde avec malice.
Je me retrouve ainsi en face de la plus grande cité du monde :
Kendra Kâr.