La vision qui lui était parvenue au sommet de la falaise chapotant la grotte, ne l’avait déjà pas encouragée à poursuivre son voyage et maintenant qu’elle était à l’extérieur de Dahràm, Oona ne voyait pas l’intérêt de pénétrer dans cette minable cité. Les quelques heures de trajet de la nuit l’avaient amenée suffisamment près pour qu’elle s’autorise une pause avant l’aube et puisse ainsi se reposer de cette escapade éreintante. Conformément à ce que le Surin lui avait dit de la géographie des lieux durant leur traversée des marais, elle suivait les falaises jusqu’à la cité des hommes et plus loin, jusqu’à celle des Shaakts, ne doutant pas qu’elle parviendrait à distinguer l’une de l’autre. Cependant avancer si près du vide, à la portée des embruns poisseux soulevés par la furie des vagues s’écrasant avec fracas en contrebas, n’était pas de tout repos et plus d’une fois un appel d’air vicieux l’avait poussée à la chute ou bien projetée dans les genets crochus gardant sauvagement les extrémités du monde. Ballotée en tout sens, la jeune femme n’avait pas vraiment eut le temps de ce rendre compte du trajet, ni même de mettre au clair les événements passés encore brulants dans son esprit, ce ne fut qu’à son réveil, son corps moins endolori, qu’elle put s’en rendre compte.
Dans la gigantesque crique gisait ce qui aurait dû être sa première étape, une cité tortueuse avançant maladroitement à l’assaut des contreforts rocheux où piallaient des multitudes d’oiseaux rapaces à l’œil aiguisé de méchanceté. Il flottait ici aussi un parfum de chaos mais dont les notes manquaient cruellement d’intensité et de profondeur, c’était une fragrance bon marché qui suait abondamment de la foule de malandrins, brutale et grossière sans aucune touche de raffinement et vaporisée jusqu’à l’apoplexie comme pour masquer cette absence flagrante de raffinement. En effet, Dahràm, ne pouvait faire que copier maladroitement le capiteux et étourdissant parfum d’Omyre, ce maelström immonde hurlant pour sa propre perte, languissante et prostrée devant cette flamme de rédemption vacillant sous les assauts de la nuit. Ici l’anarchie n’avait pas atteint le pinacle de la déraison et partout elle se donnait en spectacle par quelques coups de poignard furtifs, quelques gouttes de poison discret et nombreuses coucheries déshonorantes. De ces motivations venaient la perversion même de ce qui aurait pu être le véritable miroir du chaos et pour l’exilée tout cela sonnait étrangement faux. Elle songea un instant qu’il était peut-être impossible pour les hommes d’engendrer quoi que se soit de plus important qu’eux et qu’au final ils étaient condamnés à copier la grandeur et la décadence des civilisations passées, pâles succédanés, cherchant à jamais à retrouver les sentiments primordiaux auxquels ils avaient tous renoncés au premier instant.
Ainsi donc Oona observait avec une certaine mélancolie ce port énorme, flanqué de murailles presque timides et esseulées ne sachant pas si elles devaient s’enorgueillir de leur stature supérieure ou bien faire profil bas devant les rumeurs de l’océan infini. Quelques tours avaient cependant eut le courage d’imposer leur présence au dédale de la ville et à la forêt mouvante des mats en contrebas. Une bien frêle forêt en vérité qui serrait ses troncs comme un fétu de paille balloté par une houle indifférente. Au final cette bourgade n’était que l’expression have d’un petit peuple bien trop heureux de pouvoir courber l’échine sous le joug de ses nouveaux maîtres et ainsi pouvoir se complaire dans une bassesse dénuée du charme qu’apporte la pureté de la ruine. Oona fit descendre sa petite bouchée avec une gorgée d’eau à peine salée, avalant comme un chagrin et son cortège de larmes, cette vision qui la laissait vaguement dégoutée. Un aperçu de la petitesse de cette race incapable de saisir l’intensité tragique du temps perdu ni même le ridicule de sa propre existence.
Par inclinaison naturelle ou par la force de sa vie d’exil, se fut de nouveau un ballet aérien qui attira son regard, comme si le spectacle de toute créature volante était aussi un peu le sien. Car depuis l’aube, des corbeaux de toutes tailles s’étaient rassemblés sur les toits, clochetons et autres facéties architecturales, très proches de la falaise où la guerrière s’était reposée. De quelques groupes épars, ils finirent par approcher la centaine et bientôt ils s’agitèrent à la vue des disciples ailés de Phaïtos venus clairement pour gouverner leurs subordonnés. Ces monstres volants, vêtus de leur sombre cotte rutilante de plumes tournèrent lentement autour des rangs serrés et soudains silencieux des volatiles, pareils à des généraux passant en revue leurs troupes. Quand soudain, sous l’impulsion d’un ordre muet, ils décolèrent tous dans un froissement d’aile orageux qui tonna avec force dans les ruelles et contre la paroi de la falaise de granit écorché. A ce sinistre signal répondirent aussi de nombreux oiseaux marins qui désertèrent leur poste pour s’enfuir loin au milieu des vagues, à l’abri des sombres et cruels hussards, mais pour la plupart le supplice ne faisait que commencer. Oona, émerveillée devant la vision de ces escadrons funestes fendant l’air, ne rata pas un instant de la scène bien rôdée qui allait suivre.
Braillant comme des agneaux égorgés, les corbeaux aux trois yeux volèrent très haut à la poursuite des proies bien spécifiques qui n’échappaient pas à leur intelligence sadique. Dès que l’un d’eux repérait un oiseau au jabot gonflé de poissons frais rentrant au nid pour gaver ses petits, ils fondaient dessus, utilisant autant leur adresse dans ces courants tumultueux que leur taille imposante pour se faire obéir. Car pendant ce temps, le reste des soldats volants fondaient par dizaine sur les nids désertés ou seulement gardés pas l’autre parent affamé et bientôt débordé par les assauts répétés. Les corbeaux ne s’intéressaient pas directement au nid mais ils obéissaient à la stratégie des serviteurs du dieu sombre en harcelant les oiseaux au sol, en les empêchant de s’envoler ou bien en jouant dangereusement avec leurs œufs et leurs petits. Le but ultime étant de placer l’oiseau ravitailleur devant un ultimatum pervers, soit il nourrissait ces voleurs avec le fruit de sa pêche, soit ces derniers piochaient allégrement dans sa descendance. Harcelés, agressés à grands coups d’ailes et de becs acérés, la plupart des oiseaux cédaient en régurgitant leur repas, à nouveau englouti avant même qu’il ne touche le sol ou aille s’abîmer dans les flots mousseux. Une fois repus de poissons ou d’oisillons, les seigneur de jais n’hésitant pas à transgresser les termes de leur propre accord, ils battaient lourdement des ailes jusqu’à leur perchoir, libérant du même coup les autres corbeaux de leur brève allégeance. L’Aldryde avait observé avec passion chacune des phases de ce pillage en règle y retrouvant une sensation presque familière. En effet, il aurait tout à fait été possible que les affidés de Phaïtos aillent se servir dans les restes de poisson abandonnés sur les marchés comme leurs frères cadets, leur carrure aurait maintenu sans peine les plus gros goélands à l’écart, mais ils se complaisaient dans la rapine et dans l’extorsion. Bien plus que de remplir leur panse, ce spectacle était de l’ordre du rituel, ils communiaient à leur niveau dans une forme de débauche bien au-delà de l’instinct meurtrier et bizarrement, Oona en fut rassurée. Elle se surprit même, au moment de refaire passer la sangle de son lourd paquetage, à songer qu’une pareille monture serait parfaite pour elle. Robuste et inquiétant, la jeune femme était sûre que l’un de ces oiseaux aurait pu l’accompagner et faire un très bon compagnon de voyage.
L’exilée eut tout le temps de repenser à ce projet à mesure que sa route devenait de plus en plus difficile, de plus en plus venteuse et traitresse, bref à mesure qu’elle s’éloignait de la civilisation pour replonger vers une inquiétante virginité sauvage. Bien qu’ayant mieux répartie sa charge, en rangeant son nouvel écu dans l’étui de cuir avec le reste de sa fortune et en ayant serré au plus près le baudrier, la guerrière éprouva durement le premier jour de son voyage, le charme de l’océan s’étant bien vite transformé en une tempête assourdissante qui la rabattait sans relâche au sol. Cependant, Oona ne connaissait pas d’autre chemin que celui de la côte et le maquis infini d’épineux vomissant sans retenue leur teinte jaune lui donnait tout juste l’envie de s’y abriter pendant la nuit, elle se refusait à le traverser. Parfois des zéphyrs marins enragés venaient rebondir sur les falaises de granit en tourbillonnant furieusement, accordant ainsi à une Aldryde fourbue, la joie de pouvoir planer quelques temps au milieu de ces vents propices, avant de reprendre le rythme épuisant des sauts incertains au bord du gouffre. C’est, malgré tout, ainsi que défilèrent les deux premiers jours, la jeune femme se nourrissait d’un reste de fruit séché, de quelques grains de pollens salés et passait la nuit au milieu des épineux torturés par les caprices du vent, dans d’anciennes tanières de rongeur. La guerrière ne craignait pas le retour des anciens occupants, même lorsqu’elle s’allongea le deuxième soir, si épuisée que le sommeil l’avala dès qu’elle se roula dans sa vieille cape, et qu’un étrange son ne tardât pas à l’éveiller.
Plus qu’un son, il s’agissait au commencement d’un long craquement, une vibration basse et lugubre qui faisait se tordre et couiner les arbustes, leurs branches vrillées semblaient même se frotter les unes aux autres pour se réchauffer et chasser cette angoisse. L’écho sinistre s’approchait, posait, puis repartait et Oona savait qu’il s’agissait pas de la marée, elle doutait d’ailleurs d’être encore proche de la mer tant l’atmosphère était lourde, cotonneuse, amidonnée d'une épaisseur nivale. L’épais brouillard avait en effet tout envahi, tout aplati, sa densité surnaturelle n’autorisait pas même le son à se propager et la jeune femme était comme emprisonnée dans une bulle suintante et froide. Puis elle l’entendit clairement sur sa gauche, un feulement sourd répétitif, presque un rire charbonneux, qui s’arrêta aussi net. Le petit ange ne respirait plus, elle ne s’en rendait compte que maintenant mais la peur lui serrait l’estomac et si l’atmosphère n’avait pas été saturée d’humidité, elle aurait senti sa sueur couler dans son dos et coller ses vêtements moites. A nouveau elle l’entendit, plus distinctement encore, la peur aiguisait ses sens et la faisait presque halluciner, mais la jeune était persuadée qu’une chose était tapie juste à coté d’elle. Doucement, elle lança son bras en quête de son arme au moment où elle vit clairement le chaos de racines et de branches jaunâtres percé sa bulle nacrée de brume sous l’impulsion d’une force énorme. La guerrière sentit son cœur battre dans ses tempes, les folles pulsations injectaient la peur et son remède dans tous ses muscles, une nouvelle angoisse la maintenait cependant immobile au risque de la faire imploser. Quelque chose devait appuyer de tout son poids sur les entrelacs pour se rapprocher d’elle, pour la sentir, pour la voir, les branchages tordus se rapprochaient lentement, crissant et geignant sous la sinistre contrainte. Bientôt Oona crut deviner un visage se dessiner derrière ce masque torturé qui emplissait soudain tout son espace, comblant inexorablement la distance qui le séparait du visage du petit ange. Une inspiration rauque et puissante aspira à elle quelques mèches auburn de l’exilée qui frôlèrent le masque d’épine comme des antennes timides et le rire indescriptible retentit à nouveau, faisant même tressaillir chaque gouttelette du brouillard qui fuyait la scène, paralysant l’Aldryde, l’emprisonnant dans une vivante prison de peur infantile là où la raison ne parviendrait jamais à chasser les monstres.
De la suite, Oona ne s’en souviendrait que comme dans un rêve où soudain la conscience s’éveille, car la scène s’effaça aussi terriblement qu’elle était apparue, sans explication aucune, laissant juste planer l’angoisse de son retour. Ses mouvements, ankylosés par le flux et le reflux déchainé de sa peur, se firent lents et maladroits à mesure qu’elle se blottissait dans un coin de son nid, fixant sans ciller la paroi invisible de l’horreur.
Le paysage changea radicalement à l’après-midi du troisième jour alors qu’elle venait de survoler plusieurs petits torrents et que les falaises obliquaient clairement vers le nord, détournant les vents traitres loin à l’ouest. Aussitôt le voyage fut plus aisé et l’Aldryde retrouva une certaine assurance en abordant la forêt qui lentement prenait le pas sur une garigue veule et frustrée. Désormais il n’était plus question de taillis épineux luttant à peine sous les coups de fouets du vent infernal mais d’une assemblée majestueuse de pins verts aux reflets métal faisant onduler avec ferveur leurs bras brousailleux dans les sursauts de la tempête. Peut-être trouvaient-ils même une certaine exaltation dans cette communion élémentaire car même si leur corps ployait sous les bourrasques, leurs branches n’en n’étaient que plus touffues face à l’océan, ardentes à se contorsionner pour la joie capricieuse du dieu du vent. Oona pénétra ce monde nouveau et fut assailli par l’intensité d’une émotion coutumière, ici elle n’avait pas sa place. En effet, à l’abri du cocon verdâtre, s’étendait un monde d’une beauté et d’une rigueur parfaite, quasi divine, chaque créature évoluait dans son immuable rôle générations après générations sans que rien ne vienne jamais perturber cette routine surnaturelle. Le tableau qui se peignait devant ses yeux était un lavis pétillant de roses acidulés, de rouges chatoyants et de mauves lustrés, laqués à même la carapace d’innombrables scarabées ou dans les étonnantes arabesques des papillons tourbillonnants en véritable nuage. L’exilée avança avec ravissement au milieu de ce décor taillé sur mesure par une très ancienne puissance désireuse d’étaler son omnipotence aux yeux de tous jusqu’à ce qu’elle se rende compte de la fragilité de cette entreprise.
Le petit ange fut plus que surpris en voyant se dresser les restes minables d’un vieil arbre à l’écorce lépreuse laissant apercevoir au milieu de ses déchirures blanchâtres son tronc noir de mort. Inclinée mollement au milieu d’une clairière de fougères cuivrées, l’erreur sautait aux yeux et pourtant aucune des espèces d’insectes pléthoriques ne daignait prendre soin du malade, ni même abréger ses souffrances en se repaissant de ses entrailles. L’arbre mourant ne faisait tout simplement pas partie de cette grande œuvre et on le laissait souffrir seul ou milieu des foules aveugles à son désespoir. Plus loin encore, un ratage flagrant fit comprendre à Oona que le formidable architecte de ce lieu enchanteur n’avait certainement pas eut le temps de peaufiner son œuvre, de masquer par de nouvelles débauches de splendeur l’entropie tant haïe. L’exilée contemplait alors un somptueux petit alignement de lacs cristallins, brillants au zénith comme une véritable rivière de diamants, autour desquels des colonies d’araignées bordeaux, recroquevillées en charmant petits croissants de lune, avaient tissé leur mortel et pourtant sublime écrin de mort. S’approchant raisonnablement de la fragile architecture de soie elle vit alors une immonde tache dénaturant le délicat chef-d’œuvre, l’un des lacs s’étant en effet changé en un cloaque purulent, vomissant alentours toute une alchimie de bruns et de jaunes nauséabonds. Tout dans ce formidable jardin se devait être l’expression aboutie, finale, parfaite d’une volonté tatillonne de beauté infinie cependant le dieu créateur de ce lieu n’avait pas eut le temps ou le courage de prolonger son œuvre et elle s’était inexorablement fait rattrapée par un ordre supérieur, plus cruel et plus lourd. L’Aldryde continua à évoluer pendant plusieurs jours au milieu des tapisseries changeantes parfois au stade final de leur décomposition mais parfois aussi préservées du moindre changement, brillant fièrement de couleurs et de formes surnaturelles. Oona gardait approximativement son cap, malgré la fatigue et malgré le poids d’une solitude qu’elle n’avait jamais vraiment connue. Elle s'étonnait elle-même de pouvoir ainsi continuer dans ce décor fantasmagorique sans l'aide de personne, sans personne avec qui partager ses pensées glauques ou des silences contemplatifs. Au milieu des décors chamarrés, la guerrière continua encore pendant de longs jours, dormant difficilement et mangeant des fruits souvent si aigres qu’ils transformaient sa langue en un cuir rêche et noir, comme si tout ce racolage bariolé ne fut finalement qu’un maquillage pervers, une gigantesque mouche poitant sur la plaine poudreuse d'une précieuse fardée. Lorsqu’un soir elle vit se détacher sur un coucher de soleil tout de pastel, diluant son or terne dans un rose soporifique, de hautes tours aux angles agressifs, elle soupira d’aise sentant son voyage toucher à sa fin.
La chance voulut qu’elle trouve un abri pour cette dernière nuit dans une minuscule crique où coulaient les restes encore joyeux d’un petit torrent. Privé des derniers rayons du soleil, l’endroit prenait doucement les formes d’une étrange crypte décapitée et ramenée à la surface, les rochers soudain polis comme autant de sarcophages et les hautes parois, des contreforts baroques soutenant le firmament d’un peintre génial. La jeune femme trouva même un trou d’eau à sa taille, pour s’y relaxer un instant. Elle se dévêtit alors et plongea son corps endolori dans l’eau froide qu’elle trouva cependant fort agréable. Observant les anémones aux tentacules scintillantes de rouge qui s’agitaient sous ses pieds, la guerrière se laissa aller complètement. Immobile, sans rien à penser, sans rien à rêver, massant délicatement ses membres maigres et marqués par ses mésaventures. Ses souvenirs déjà trébuchaient les uns sur les autres pour arriver en vrac à la porte de son esprit, soudain excités à l’idée que l’on puisse enfin les inviter sur le devant de la scène. La lune, pleine et proche, sortit de ses tuniques vaporeuses pour éclairer la scène, Oona pencha la tête en arrière pour accueillir l’invitée puis observa son reflet dans l’eau. L’horreur la saisit.
Il était là, juste sous elle, effaçant l’astre nocturne, sa face et son corps avaient pris forme dans l’entrelacs de tentacules, ses yeux rouges et grands ouverts la fixant avidement, sa bouche s’agitant en silence. Déjà l’Aldryde se sentit happer, elle hurla et battit furieusement des pieds déformant l’image pervertie de son amour perdu de rides qui firent sourirent atrocement le visage avant qu’il ne s’évanouisse, ses paroles captives de l’océan. Elle bondit hors de l’eau, tremblante de peur et bientôt de froid, se rinça en panique au murmure du ruisselet et s’habilla en hâte, quittant sur le champ la sinistre crypte. Car il l’avait bel et bien suivit, où qu’elle aille, il serait là tapi à l’orée de sa conscience, dans ses rêves déjà, dans son reflet maintenant et dans son ombre peut-être. Il la voulait pour les plus obscures raisons et jamais il ne cesserait de la poursuivre, de la harceler, de la traquer pour qu’elle cède. Oona s’était accordée le luxe de relâcher la tension qui lui permettait de conserver son intégrité, de la protéger de toute intrusion en rendant son cœur froid et son esprit aux aguets, jamais plus elle ne réitérerait son erreur.
Durant toute la nuit, elle suivit la ligne des falaises sans faire de pause, sans se retourner, pousser par un vent nauséabond coutumier, ne s’autorisant un arrêt qu’au moment où la grandeur et la magnificence cruelle des contreforts de Caix Imoros la statufièrent presque sur place.
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Et sur moi si la joie est parfois descendue Elle semblait errer sur un monde détruit.Oona
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