L'Univers de Yuimen déménage !


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 Sujet du message: Oranan
MessagePosté: Sam 3 Déc 2016 12:39 
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Milice d’Oranan – Bureau du Capitaine Atsuhiko. (15h)

    Le bâtiment de la milice d’Oranan fourmillait d’une excitation certaine, en ce beau jour de début de l’hiver, assez clair, lumineux et ensoleillé à l’extérieur, bien que les premiers frimas auguraient un hiver coriace. De nombreux badauds, curieux et aventuriers de tous bords s’étaient présentés dès le matin pour rencontrer le capitaine Atsuhiko, mentionné sur les nombreuses affiches placardées sur les murs des cités de Yuimen. La milice, pour l’occasion, s’était organisée avec rigueur. Les effectifs avaient été doublés à l’entrée, et un poste de passage obligatoire avait été instauré, auquel tous ne passaient pas. Un écrémage des curieux se faisait à cet endroit, et nombreux étaient refoulés. Ceux qui réussissaient néanmoins à passer, jugés suffisamment aptes à répondre à l’annonce par les officiers recruteurs de la milice, habitués à voir du premier coup d’œil la valeur d’un aventurier, étaient menés par un milicien en armes dans un couloir où quelques personnes attendaient patiemment devant une porte close : celle du bureau privé du Capitaine Atsuhiko, gradé milicien mêlé à toute cette mystérieuse histoire. La faune était ici plutôt hétéroclite, diverse et variée. Tous les profils étaient acceptés, pourvu qu’ils aient du potentiel.

    Ainsi, on retrouvait là notamment un farouche guerrier au regard dur et à l’armure impressionnante. Il avait le visage marqué par de profondes cicatrices, et se tenait dans un coin, ténébreux, à l’écart du plus grand nombre, la main appuyée sur une formidable hache à deux mains dont nul ne voudrait se retrouver contre le tranchant. Il y avait également un archer qui, bien qu’arborant une balafre impressionnante sur le visage, ne manquait pas de charme et de charisme. Il devisait, l’air enjoué, avec une jeune femme à la chevelure platine, qui répondait cordialement à ce dernier sans toutefois paraitre pleinement à son aise. Dans l’ombre de l’archer, un guerrier aux traits dissimulés sous une capuche de laine dévoilant une longue chevelure et une barbe bien taillée écoutait d’un air absent la discussion, un espadon apparemment bien aiguisé à la main. Il avait des traits évidents de ressemblance avec l’archer balafré. Le plus proche de la porte était un guerrier rouquin qui semblait impatient que la réunion promise commence, faisant les cent pas nerveusement devant le bureau du capitaine. Non loin, dans le coin du boudoir, une jeune femme au visage masqué suivait ses aller-retour d’un œil scrutateur, analyste. Les deux derniers étaient seuls, eux aussi, mais pas forcément à part de ce petit groupe. Il y avait une jeune femme à l’apparence farouche armurée à la manière des habitants de Nosveris, et dotée d’un formidable bouclier frappé d’une tête d’Olifant. Le dernier n’était autre qu’un nain roux armé d’un énorme marteau de guerre, et caparaçonné d’une armure qu’aucun autre ici n’aurait sans doute pu revêtir. Sa barbe tressée et son air renfrogné, tout comme les tatouages sur son front n’en faisaient pas un être particulièrement engageant.

    Quand les coups de 15h sonnèrent, précisément, la porte s’ouvrit enfin, et les aventuriers furent invités à entrer dans le bureau, où deux êtres attendaient. Le premier, aisément identifiable, était assis au bureau, sur un grand siège recouvert de cuir fauve. Il avait la mine expérimentée et sévère d’un meneur d’hommes expérimenté, et arborait une armure plutôt classe. Un ynorien, à n’en pas douter. Nul ne put ne pas reconnaître en lui le fameux Capitaine Atsuhiko, officier chargé de tout ce qui concernait Aliaénon, de près ou de loin.

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    Il reluqua tour à tour tous les volontaires qui entrèrent dans son bureau, et lorsque tout le monde fut entré, il prit la parole d’un ton officiel.

    « Aventuriers de tous bords, merci d’avoir répondu à l’appel aux volontaires m’ayant été transmis par le Conseil d’Or d’Aliaénon. J’ai l’honneur et le privilège de vous présenter le Seigneur Naral Shaam, héros de la Grande Guerre d’Aliaénon et signataire de l’appel qui vous a été transmis. Je lui donne la parole pour expliciter séant les raisons de votre venue ici. »

    L’être en question, un elfe à la peau pâle et à la longue chevelure violette, vêtu noblement d’une armure d’une qualité et d’une raffinerie rare, ainsi que d’une longue robe masquant ses jambes, darda sur l’assemblée ses yeux d’or perçant, un sourire mystérieusement assuré sur les lèvres.

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    Une fois son tour d’horizon effectué, il prit la parole d’un ton léger. Presque trop léger pour le sens des mots qu’il prononça, en vérité.

    « Autant vous l’annoncer tout de suite : que ceux qui ont peur de laisser des plumes, voire la vie dans cette mission que je vous propose quittent séant ce bureau pour aller couler des journées plus tranquilles dans une taverne. »

    Provoquant, il scruta à nouveau la pièce. Voyant que nul ne bougeait, tous résolus à se rendre sur Aliaénon, il poursuivit.

    « Hihihi. Bien. En cela vous êtes prévenus. Passons au sujet principal : Aliaénon. Si le temps a pu vous paraître court depuis le retour en ces terres des Sauveurs de ce monde, rescapés de la Grande Guerre, il n’en est rien sur le monde où vous allez vous rendre. Près de cinq ans se sont écoulés depuis l’Eveil des Titans, puissantes et gigantesques entités de magie ayant fait fluctuer dangereusement l’équilibre arcanique des vastes landes de ce monde. D’où le décalage temporel, sans doute. Hihihi. De nombreux changements ont eu lieu lors de cette période de reconstruction, mais il reste un problème qui n’a pas encore été réglé : le Sans-Visage, entité traîtresse ayant voici des siècles endormi les Titans pour se faire passer auprès des habitants d’Aliaénon comme leur unique divinité court toujours. Toujours en vie, il parvient même à recueillir des fidèles dans divers peuples, perturbant l’équilibre et la paix ambiante. Un ordre spécifique de chevaliers a été façonné par le Conseil pour mettre fin à cette menace, sans résultat jusqu’ici. Aussi ai-je proposé de faire appel, à nouveau, aux aventuriers de Yuimen, dont on dit que le courage n’a d’égal que la perspicacité. Deux qualités qu’il vous faudra pour mener à bien cette quête. Il s’agira ainsi, dans les grandes lignes, de tuer un immortel. Hihihi. Et plus spécifiquement, de découvrir avant tout comment faire pour le vaincre, et récolter les ressources nécessaires pour ce faire. La tâche sera ardue, sans aucun doute. Probablement dangereuse. Aussi, avant de commencer, je vous invite, si vous êtes toujours partants, à ratifier cette liste de vos noms, prénoms et qualités. »

    Il désigna sur le bureau du Capitaine un parchemin et un encrier à plume d’oie préparé pour l’occasion afin d’accueillir la ratification de tous les volontaires. Les aventuriers, tour à tour, se plièrent à la recommandation, sous le regard soutenu des deux êtres d’importance qui les recevaient dans la pièce.


[HJ : Bienvenue à tous dans la quête 35 ! Pour ce premier RP d’entrée, pas de limite au bonus de longueur. C’est un RP plutôt libre, où vous pourrez indiquer les difficultés que vous aurez rencontrées pour pénétrer le bâtiment de la milice (Plus vous êtes reconnus, plus vous êtes de haut niveau, plus il vous est facile d’entrer), ainsi que la description des différentes personnes en présence et de la situation en général. Terminez votre RP après avoir à votre tour ratifié la liste, en posant ou non une ou plusieurs questions éventuelles au duo qui vous accueille. Je suis disponible par MP si d’aventure, cette semaine, vous désiriez de déjà faire des apartés avec les PNJ présents dans le couloir avant l’entrée dans le bureau de Atsuhiko. Veillez à lire attentivement tous les sujets de la quête, particulièrement le post (un peu long, je l’admets) des règles régissant cette dernière.]

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 Sujet du message: Re: Oranan
MessagePosté: Dim 4 Déc 2016 02:16 
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L'entrée de la millice c'est completement transformé en une nuit. Les effectifs ont doublés et une file d'attente longue comme devant les portes de la cité continuait de s'etirer. Les volontaires sont nombreux mais tous ne sont pas admis.

Ainsi la queue avance, lentement, au gré des admissions ou des refus au sein du bâtiment.

Je contiens un baillement quand c'est enfin mon tour avant de saluer le garde.

Celui-ci arque un sourcil devant ma bouche à moitié ouverte laissant échaper un souffle de fatigue mais l'instant d'après il se lève de sa chaise pour me saluer respectueusement.

"Monsieur Xël ! Ravi de vous voir. Veuillez suivre mon collègue. Il va vous mener au capitaine."

"Ca roule."

Je passe la barrière de millicien tandis que j'entends quelques chuchotements etonnés ou admiratifs derrière moi. Loin de me mettre à l'aise.

"Qu'est ce qu'ils ont ?"

"Certains sont jaloux de voir qu'un homme de votre carrure passe sans problèmes, sans offense, mais vous n'avez pas le physique d'un combattant."

Je lui souris, montrant que je ne suis en aucun cas offensé.

"C'est vrai vous avez plutôt un physique de lâche, de pleutre, du mec qui se noie dans l'alcool tous les soirs avant de s'écrouler dans un caniveau pour vomir ses tripes qui vont le garder au chaud pour la nuit et..."

"Ca va, j'ai compris."

Amusé, je regarde mon guide. Lui, avait une carrure athlètique. Digne d'un fier guerrier. Mais il avait un air endormi, presque blasé, accentué par les cernes qu'il avait sous ses petits yeux et sa démarche aussi nonchalante que la mienne.

"Les autres vous ont sûrement reconnus, y a certains de vos exploits qui circulent en ville."

Il se gratte la nuque tandis qu'il bifurque dans un couloir au lieu d'emprunter des escaliers.

"On ne descend pas aux cachots ?"

"Non le capitaine va vous recevoir dans son bureau vous et les autres aventuriers."

A peine fini-il sa phrase qu'au détour d'un couloir, nous tombons sur un groupe de personnes poirautant devant une porte close.

Huit personnes. Hommes, femmes de differentes ethnies et même un nain qui patientaient en papotant ou un peu à l'écart. Je lève les yeux vers mon guide qui lâche un petit soupir las.

"Il a un grand bureau..."

Je lève ma main libre pour saluer les aventuriers déjà presents en souriant.

"Je vous laisse, je dois remonter acceuillir les prochains."

"Merci mec, a plus."

Il me fait son salut militaire, toujours avec cet air nonchalant avant de s'eloigner.

J'esperais retrouver des têtes connus mais ce n'est pas le cas. D'habitude je n'ai aucun problème à aller vers les gens mais je n'ai pas envie d'interrompre une conversation où d'aller vers certains d'eux qui sont physiquement peu engageant. Pad qu'ils soient laids mais juste peu engageant.

Je me met donc de côté, contre un mur, m'asseoit sur mon sac de Yus et j'attend.

J'attend longtemps. Je finis même par m'endormir.

Je me reveille quand la porte s'ouvre, nous permettant à tous de penetrer le bureau.

Le temps de me lever, de m'étirer, de bailler, je passe la porte en dernier en grattant ma tignasse en bataille.

Je reconnais là deux personnes. L'une est le capitaine Atsukiho l'autre me fait arquer un sourcil, surpris, il s'agit de Naral Shaam.

"Tiens... Salut Naral. Salut capitaine."


Je me met de coté pour eventuellement laissé rentrer des retardataires et m'appuit sur mon baton en les écoutant.

D'abord Atsuhiko qui nous souhaite la bienvenue et nous remercie d'être venu avant de présenter l'elfe aux cheveux violets.

Lui, débute par une mise en garde qui me fait sourire. Hors de question de m'enfuir. Je suis là pour aider Aliaénon et ma réponse est un regard determiné dans sa direction.

Il nous explique enfin pourquoi il a fait appel à nous. Déjà, grosse surprise, ce n'est pas une soirée qui s'est écoulée mais cinq ans.

Je laisse échapper un toussement de surprise. Naral explique que ce décalage est le fait de la fluctuation de l'equilibre arcanique. Je ne comprends pas mais je ne dis rien. Dans ma tête une petite voix me dit simplement que c'est magique et que je ne dois pas revenir dessus.

Le dieu sans visage est toujours present sur Aliaénon et essaie de reprendre sa place de divinité unique et on demande notre aide pour... Le neutraliser.

Je n'hesite pas une seconde et me dirige vers la liste à ratifier. Je soulève mon sac de Yus et le pose sur le bureau tout en m'adressant au Capitaine.

"Comme la derniere fois j'ai un petit service à vous demander pendant que je suis sur Aliaénon."

Je designe le sac.

"C'est la récompense de mon dernier séjour là bas. Environ 20 000 Yus. J'aimerais en faire don au roi de Kendra Kar à condition qu'il s'en serve pour construire un orphelinat. Instruire les enfants qui s'y trouvent et que la direction soit aux mains d'une femme du nom de Méli. C'est une femme qui vit dans les quartiers est de Kendra Kar, une maison toujours ouverte qui acceuille les enfants des rues pour dormir et se nourrir. L'orphelinat pourra vivre du don des citoyens et des miens pour le coup... Si les enfants les plus défavorisés ne sont pas amenés à commetre des délits pour vivre alors le peu de criminalité et de pauvreté de la ville finira par disparaitre. Il pourra construire des hommes au lieu de bâtir des prisons. Vous pouvez transmettre ça pour moi ? J'aimerais aussi que vous disiez à Méli que je vais bien et que je rentrerais quand Aliaénon aura retrouver son équilibre. Enfin j'imagine que vous êtes très occupé mais vous avez sûrement un homme de confiance disponible. Il peut piocher dans le sac pour prendre le Cynore. Il sera revenu dans deux jours comme ça ! Est-ce que vous pouvez faire ca pour moi ?"


J'en demande peut être beaucoup mais garder une telle quantité d'argent sur moi serait trop encombrant et le confier à Méli serait trop risqué, n'importe qui pourrait débarquer chez elle et tout lui voler, personne ne serait là pour la défendre alors qu'aux mains du roi qu'on m'a décrit comme bienveillant, l'argent sera en sécurité et Méli sera en mesure d'assurer la tenue d'un bâtiment qui doit s'occuper d'enfants.

Je lui adresse un sourire pour le convaincre avant d'ajouter pour Naral.

"Je veux bien ratifier votre liste mais je sais pas écrire. Mon prénom c'est Xël et mes qualités c'est d'être mage, beau garçon et d'avoir une bonne droite."

Je lui adresse un clin d'oeil et poursuis à l'attention d'Atsuhiko.

"Si vraiment vous n'avez personne pour le faire, j'aimerais juste que vous gardiez mon argent en sécurité le temps de regler le problème avec le sans visage."



((1120 mots))

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Dernière édition par Xël le Mar 13 Déc 2016 10:20, édité 2 fois.

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 Sujet du message: Re: Oranan
MessagePosté: Dim 4 Déc 2016 07:51 
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Une ruelle et une autre, c'est en trottinant que je me rends à la milice. J'essaye de ne pas faire attention à tous les regards qui se posent sur moi, mais il y en a tellement que je ne peux pas tous les ignorer. Il est vrai que c'est la première fois que je parcours les rues d'Oranan en plein jour sans me cacher sous une cape. Certains me reluquent avec admiration, se touchant les bras comme s'ils s'imaginaient la sensation d'avoir les mêmes que moi. D'autres ayant sans doute eu vent de mon ancienne affiliation me regardent avec dédain voire dégoût. Je ne peux pas les blâmer. Mon passé est ce qu'il est. J'ai été – pendant un temps relativement court certes – à la solde de la Catin d'Omyre, c'est un fait. Il est tout à fait normal que quelques Oraniens me voient encore un ennemi. A dire vrai je suis même étonné qu'ils ne soient pas plus nombreux.

Pour en revenir aux autres regards, il sont choqués, curieux, craintifs, emplis de pitié ou encore légèrement méfiant. Comme celui de cette mère qui tire son enfant par le bras pour ne pas qu'il m'approche alors que ce dernier, avec toute l'innocence et la candeur qui caractérise ceux de son âge, semblait vouloir me voir de plus près. Tout ceux-là je les doit à mon apparence que je pourrais qualifier...D'étrange ? Hors du commun ? Effrayante ? Surprenante ? Tout ça à la fois je suppose. Il faut dire que des grands gaillards blonds avec des yeux noirs et or, des bras en métal et un scolopendre enroulé autour de l'un d'eux, ça ne court pas le rues. La encore, je ne peux pas vraiment leur reprocher de me dévisager. J'assume le fait d'être un montre de foire, comme pourrait l'être un nain sans barbe ou un elfe obèse. Mais je suis fier de ce corps qui s'avère plus que pratique et je sais que je peux faire de grandes choses pour Yuimen avec. Que JE VAIS faire de grandes choses. Enfin Yuimen attendra parce que j'arrive à la milice et là-bas se trouve l'accès à Aliaenon. Ce monde que j'arrive sans mal à considérer comme mon deuxième foyer. Ha, je me vois déjà couler mes vieux jours près d'un arbre à pain à Esseroth en taillant le bout de gras avec Arthès et Finarfin en buvant une bière fraîche tirée d'une de leur fontaine. Enfin, encore faut-il que ce monde arrête d'être plongé dans les emmerdes. C'est là que je compte intervenir.

Plus qu'une petite ruelle. J'entends des voix, des pas. Nombreux, très nombreux et quand enfin j'arrive sur la petite place devant le bâtiment de la milice, je comprends pourquoi. Je n'ai pas le souvenir d'autant de gens il y a une sema...Il y a un an quand Aliaenon galérait avec les armées d'Oaxaca. C'est incroyable. Ce ne sont sans doute pas tous des volontaires mais cela reste proprement incroyable. Ils sont des dizaines et des dizaines. De tous âges, de tous les horizons. Des guerriers nains aux archer elfes en passant par quelques mages en robes les bras chargés de grimoires en tous genre. L'espace d'un instant, je me dis que si tous ces aventuriers avaient été là il y a un an, Vallel aurait sans doute moins fait le malin. Nan mais regardez-moi ce gars, son épée est presque aussi grande que moi ! Et lui. Il porte tellement de lames sur lui qu'il pourrait ouvrir une armurerie et faire fortune en les revendant. Je n'arrive pas à comprendre le pourquoi du comment de cet engouement et pendant quelques secondes, je bloque en lâchant un « Pfiuuu ! » d'étonnement.

Puis reprenant mes esprits, je souris délicatement tant la situation me semble similaire à la première fois. Il y a un an, la ville était en danger et ils ne laissaient entrer personne sans une bonne raison et sans avoir vérifier quelques informations. Cette fois-là, j'avais été un sacré connard irrespectueux. Ici, on nous fait faire la queue pour faire un premier tri parmi les volontaires. Tu m'étonnes, on ne peut pas non plus envoyer tout le monde, ça serait un beau bordel. Mais cette fois, pas question de resquiller et de foutre la merde, je vais faire comme tout le monde sauf que...

Sauf que finalement je finis par me faire remarquer. Parmi les curieux présents juste pour reluquer les volontaires, quelqu'un me fixe. Il prévient son voisin d'un coup de de coude en me montrant du doigt et de fils en aiguilles c'est une bonne grosse dizaines de badauds qui me fixent maintenant, sans d'autre mots prononcés que quelques chuchotements incompréhensibles. Sans me lâcher des yeux, ils finissent par s'écarter au fur et à mesure que j'avance, me laissant accéder au bout de la file d'attente sans difficulté. D'un seul coup je me sens légèrement mal à l'aise. Tout penaud même. Puis alors que je regarde mes pieds, les mains dans les poches, j'entends une voix. La personne devant moi vient de se retourner et de m'adresser la parole. Un gamin, d'une quinzaine d'année tout au plus. Sans arme et visiblement sans expérience, il n'a rien à foutre ici mais ça, ça ne me regarde pas. Toujours est-il que c'est avec un grand sourire et de yeux bleus brillant d'admiration posés sur moi qu'il me dit, d'une voix enjouée :

« Vous passerez sans problème, personne ne vous en voudra de ne pas faire la queue ! Après tout, vous avez déjà sauvé cet autre monde une fois, il est légitime qu'on vous laisse y retourner. »

Visiblement, il sait qui je suis et semble être de ceux qui m'admirent. C'est la première fois qu'un de ceux là m'adresse la parole. Je ne sais pas vraiment comment répondre. Je décide donc de le faire sur le ton de l'humour comme bien souvent.

« La dernière fois que j'ai resquillé dans une file d'attente, ça a failli dégénéré. Cette fois, je compte bien rester sage. »

Les yeux du jeune homme s'écarquillent encore plus, comme s'il ne s'attendait pas à ce que je lui réponde. Je crois bien qu'il me porte une estime bien trop grande. Je n'en mérite vraiment pas tant.

« Chouette, on va pouvoir discuter un peu en attendant du coup si ça ne vous dérange pas. Vous savez, j'ai entendu plein d'histoire concernant les sauveurs d'Aliaenon. Il paraît que l'un d'entre vous a mis K.O un dragon d'un seul coup de poing, il doit être super fort. Puis il y a celui qui a ouvert la terre d'un seul coup d'épée. J'aimerais bien le rencontrer celui-là. Ah et puis il y a celui qui s'est fait pousser des ailes pour créer un soleil... »


Ah ça, je pense que ça doit être moi. Ha, moi qui voulait des légendes, je suis servi. Totalement erronées, complètement exagérées, ce rumeurs n'en restent pas moins terriblement flatteuses et c'est en souriant gentiment que j'écoute le gamin parler. Car ça, pour parler, il parle.

« ...Puis il y a vous, avec vos bras en fer super génial. Certains disent que vous n'êtes qu'un chien de traître à la solde de le Reine Noire, mais si vous voulez mon avis, ce ne sont que des jaloux. Moi, vous m'inspirez. C'est pour faire comme vous que je me porte volontaire. Moi aussi je veux être un héros et créer des soleils en cognant du dragon. »


Ce qui est sûr c'est qu'il ne manque pas d'enthousiasme. Il l'est peut-être un peu trop d'ailleurs et malheureusement pour lui, si les miliciens qui gèrent les entrées ne sont pas des abrutis, il ne passera jamais. D'ailleurs, c'est à son tour de se présenter et...Comme je m'y attendais. Il quitte alors la file, sans un mot, la mine sombre. Il se tourne vers moi, la larme à l’œil, comme s'il implorait mon aide. Je ne peux décemment intervenir auprès du milicien. Je ne sais pas ce qui se passe sur Aliaenon et je ne veux pas avoir la mort du jeune homme sur la conscience. Mais après une courte période de réflexion, il me vient une idée. Je sors quelques pièces de ma bourse et trois flèches de mon carquois avant de faire signe au garçon de s'approcher. Il s'avance. Étrangement, assez timidement. Je lui tends alors le tout.

« Tiens. Je te file quelques flèches et de quoi t'acheter un arc. Entraîne-toi. Entraîne-toi autant que tu peux et la prochaine fois, tu passeras sans aucun problème. Si ta motivation et réelle et si tu ta volonté de protéger les tiens et puissante. Tu progressera et la prochaine fois, tu passeras sans problème. Entraîne-toi. Tu me montreras tes progrès à mon retour et...C'est avec moi que tu poursuivra ton entraînement. Je t'en fais la promesse. »


Ses yeux se mirent à briller de plus belle et il s'incline plusieurs fois rapidement pour me remercier avant de partir en courant. Il deviendra fort, c'est certain.

« Je vous reconnais, vous êtes Karz, un des sauveurs d'Aliaenon. Vous pouvez entrer. Mon collègue va vous menez au bureau du Capitaine. Il sera sans doute heureux de vous voir revenir. »

Le milicien me tire de mon début de rêverie et c'est après un petit éclat de rire franc que je lui réponds.

« Ha. J'en doute. »

Oui, je doute clairement que le Capitaine Atsuhiko soit ravi de me voir. Il ne m'empêchera pas de venir en aide à Aliaenon, mais il ne sera sans doute pas vraiment content de revoir ma trogne de traître. Enfin, ce ne sont que des détails tout ça. Le plus important, c'est tout ce qui va suivre. Sans oublier mon passé, c'est vers l'avenir que je préfère me tourner. Le mien et là, maintenant, celui d'Aliaenon.

Le soldat me guide dans les méandres des couloirs de la milice avant de me laisser dans un couloir où plusieurs personnes attendent. Je n'en reconnais pas une. Je suis étonné. J'étais persuadé qu'il y aurait quelques uns de mes anciens compagnons. Enfin, peut-être suis-je simplement le premier arrivé. Et dans le pire des cas, ceux qui sont présents ne semblent pas dénués de compétences. Ils ont tous un petit quelque chose. Le premier est...un gros bourrin ? Enfin d'apparence. C'est sûr que se fier aux apparences peut-être dangereux ou trompeur, mais quand on voir une telle armure, composée de pièces semblant aussi lourde qu'un nain a qui on aurait volé sa pioche et une face aussi renfrognée, c'est compliqué de l'imaginer avec un petit tablier en train de préparer des tartes plutôt qu'en train de broyer des crânes à mains nues. Remarque l'immense double hache qu'il semble trimballer doit aussi se montrer assez efficace pour un joli massacre de masse. Note à moi-même, ne pas le faire chier.

Non loin, il y a un petit groupe de trois. Un archer, comme moi. Plutôt bel homme...Comme moi ? Blague à part, il a un sacré charisme et son équipement n'est clairement pas en toc. La cicatrice profonde qui lui barre le visage me fait dire qu'encore une fois, comme moi, il a du en voir plus d'une. Je me demande qui de lui ou de moi est le plus précis ? Ça pourrait être drôle de le tester si l'occasion se présente. Bref, l'archer semble discuter avec une jolie demoiselle tellement blonde que ses cheveux tirent presque sur le blanc. Même si elle semble répondre poliment à son interlocuteur, elle ne semble pas franchement à l'aise. Est-ce lui qui lui fait cet effet ? N'est-elle simplement pas habituée à ce genre de rassemblement ? Est-elle juste inquiète quant au fait de voyager sur un monde inconnu ? A dire vrai ça ne me regarde pas vraiment.Tant qu'elle sait se servir de la double lance qu'elle trimballe.

Le troisième du petit groupe se tient derrière l'archer et si j'en crois les quelques ressemblances que je décèle, je pense pouvoir dire que ces deux là sont parents. Frères sans doute. Le frangin de l'archer semble lui, un peu plus timide et se cache à moitié sous un capuche. Et comme avec le gros bourrin, il ne me donne pas vraiment envie de me frotter à lui quand je vois l'espadon qui lui sert d'arme. Un truc comme ça, ça doit faire prendre l'air à tes entrailles en moins de temps qu'il ne m'en faut pour encocher une flèche. Bref se retrouve pour le moment sur la liste des gars à ne pas faire chier.

D'ailleurs, parmi ceux qui restent, j'en rajoute sans hésiter trois de plus sur la liste. En premier, cette femme brune avec une épée et un énorme bouclier sur lequel est peint un oliphant. D'apparence, elle est de ces guerrières franche avec qui on sait à quoi s'en tenir. Courageuse et honorable mais à qui il ne faut pas souffler dans les bronches. Enfin, encore une fois, les apparences...En parlant d'honneur, le deuxième qui rejoint la liste, c'est un nain. Ce fier peuple guerrier et puissant est régi par un code d'honneur très strict et je suis assez content d'en voir un ici. Surtout qu'avec son énorme armure et son marteau gigantesque il ne semble pas être le plus faible des throkins. Un compagnon de taille si je puis dire. Et enfin pour clôturer ma fameuse liste. Pour compléter l'équipe. Il y a cette femme masqué. Même si on visage est à moitié caché, je la devine terriblement séduisante. Mais si j'en crois la forme de son corps – sans parler de sa poitrine attirante – et celle de ses muscles élancé que j'aperçois et me semble aussi terriblement dangereuse. Une rapière et des couteaux de lancer comme armes, elle et de ces combattants rapides et insaisissable, à n'en pas douter. De vraies plaies ceux-là. Le dernier est un rouquin en armure traînant une épée tout ce qu'il y a de plus classique. Il fait nerveusement les cent pas devant la porte. A-t-il peur ? Est-il impatient ? Je n'en sais rien, mais il ne représente clairement aucun intérêt pour moi. Surtout que mes yeux se posent sur une silhouette que je n'avais pas encore remarquée. Un gars, endormi un peu plus loin. Et ce gars, ce n'est pas n'importe qui. Ce gars, je suis heureux de le voir. De le revoir. Au milieu de ce tas de brutasses. Xël. Mon clodo de service a décidé de se porter volontaire une nouvelle fois. Lui qui avait si peur la première fois. Lui qui était empli de doute. Je suis terriblement fier de le voir ici et alors que je m'apprêtais à le réveiller doucement pour le saluer, la porte finit par s'ouvrir.

Tout le monde rentre et je m'installe assez rapidement dans un coin un peu à l'écart. Je n'ai pas vraiment envie de me faire remarquer tout de suite par le Capitaine Atsuhiko qui, fidèle à lui même, n'a rien perdu de son charisme incroyable, de son regard dur et fier, de sa prestance et de sa noblesse Ynorienne. On est pas spécialement en bons termes, mais j'ai énormément de respect pour cet homme. Ce qui n'est pas spécialement le cas en ce qui concerne la deuxième personne présente. Naral Shaam. Cet enfoiré de lézard mauve. Celui qui a bien failli me dissoudre la face avec son haleine pestilentielle. Oui il fait d'une certaine manière partie de ceux qui ont sauvé Aliaenon. Il a œuvré au bien de ce monde à sa manière, mais il n'en transpire pas moins la fourberie. Je ne le considère plus vraiment comme un ennemi, mais il est certain que je ne lui fait pas du tout confiance. Enfin. Cela ne va certainement pas m'empêcher d'écouter ce qu'il a à dire. Je veux vraiment savoir ce qui se passe sur Aliaenon. Certes j'aurais préféré un autre messager, mais bon, faute de merles...on bouffera du reptile.

Pour commencer, j'ignore complètement le passage sur le danger et les risques de morts, je sais à quoi m'en tenir et je suis définitivement prêt à offrir ma vie pour le bien d'Aliaenon, rien ne me fera reculer, par contre, j'accorde beaucoup plus d'importance à la suite de sa tirade, car même si elle est ponctuée de ces petits éclats de rire proprement insupportables, tout le reste est aussi alarmant que difficile à croire. Pour commencer, à cause de la venue des Titans et d'une sorte d'afflux magique de grande ampleur, il semble que le monde et ses habitants aient fait un énorme bon dans le temps. Je trouvais déjà assez compliqué de débarqué sur Yuimen en ayant perdu un an et maintenant je vais devoir retourner sur Aliaenon en en ayant perdu cinq. Franchement, c'est assez perturbant. Tout doit avoir tellement changé. Esseroth doit avoir retrouvé de sa splendeur, du moins je l'espère. Il est même possible que Finarfin ait enfin du poil au menton. Il y en a un qui j'en suis sûr, n'aura pas changé, c'est Thensoor. A moins de s'être fait bouffé un tibia par une meute de loups, je doute franchement qu'il ait changé de face, même en cinq ans...Cinq ans bordel ! Mais le pire dans tout ça, ce n'est pas cette demi décennie de perdue non. C'est le retour de cette putain de feignasse inutile de Sans Visage. Ce glandu qui n'avait pas envie de bouger le petit doigts et préférai laisser les habitant du monde qu'il avait soi disant créé crever comme des chiens. Lui qui avait emprisonné les Titan. Ceux-là même qui ont sauvé ce monde en le remodelant alors qu'ils étaient soi disant supposés le réduire en cendres. Ce putain de dieu complètement naze est donc de retour. Comme un enfant qui se désintéresse d'un jouet mais qui veut le récupérer quand il voit un autre jouer avec. Pitoyable. Pathétique. Il est hors de question que je le laisse faire à sa guise et même si je doute pouvoir affronter un dieu qui a été capable d'emprisonner les abomination que sont les Titans, je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour aider les habitants d'Aliaenon à ne pas retomber sous son joug.

Je m'avance pour me porter volontaire et signer le papier de Naral, mais je suis devancé par Xël qui ne semble pas encore avoir remarqué ma présence. Je vais pouvoir le surprendre et je trépigne d'avance à cette idée. Alors qu'il demande à ce qu'on écrire à sa place puisqu'il en est incapable lui-même, il s'avance vers le Capitaine Atsuhiko pour lui demander un service. Il veut faire un don au roi de la grande Cité Blanche pour que ce dernier créé un orphelinat. Un endroit où les enfants démunis pourraient se sentir chez eux, en sécurité. Un endroit où ils pourraient recevoir une éducation correcte. Cet homme est incroyable et prouve encore une fois qu'il mérite toute mon estime et mon respect. Fouillant dans ma bourse et en retirant quelques pièces et quelques joyaux je m'approche discrètement de Xël avant de déposer mon argent sur la table.

« Et vous en ajouterez 10 000 de ma part si vous acceptez de rendre ce service à mon cher ami. »

Et finalement, me tournant vers mon ami.

« Ça fait plaisir de te voir m'sieur le clodo. Et si tu as besoin d'un coup de main pour l'orphelinat, hésite pas. Je t'aiderai avec plaisir. Ton projet est noble et c'est avec plaisir que je m'y joint si cela te convient. »

Je pourrais toujours me poser en tant que protecteur de ses enfants, ou leur apprendre à chasser, à se défendre ou tout simplement leur raconter quelques unes de mes aventures...Non, c'est clairement un très joli projet.

« Mais pour le moment, j'dois mettre mon nom sur la liste du lézard si tu veux bien m'excuser. »

Je tape amicalement l'épaule de Xël avant de m'approcher de Naral. J'ai beau ne pas vraiment l'apprécier, il faut quand même reconnaître qu'il en impose avec ses yeux d'or et sa chevelure mauve. Enfin, il en impose surtout quand on sait qu'il peut se transformer en dragon et faire fondre un bataillon complet d'un seul souffle pestilentiel. Il est sans aucun doute la personne la plus dangereuse que j'ai rencontré jusqu'à présent si on oubli les Treize...Et encore. Les Treizes lieutenants de la Catin d'Omyre, c'est tous des enfoirés, on le sait. Naral lui est bien plus pernicieux. On ne peut jamais savoir sur quel pied danser avec lui. En ça je le crains beaucoup plus. Toujours est-il que pour le moment, il ne représente pas une menace. Je commence à griffonner les informations qu'il demande sur sa fiche. Mon nom tout d'abord. Karz Enghrim. Puis mes qualités...Archer tout d'abord. Puis mage de lumière. N'oublions pas ma capacité à survivre en milieu hostile en mangeant et dormant peu. J'sais pas si ça peut leur servir, mais sait-on jamais. Par contre,est-ce que je dois parler des particularités de mon corps ? Pour être honnête, je préférerai les garder pour moi. Mais, il y a deux ou trois choses que je pourrais rajouter, juste pour faire tiquer Naral, où tout du moins essayer. Remarque, je peux toujours lui demander si cela vaut la peine. Après tout, j'ai cru comprendre qu'il était du genre à avoir de la répartie et à aimer ces joutes verbales.

« Est-ce que je dois mettre « Résistant à la mauvaise haleine draconique » ou c'est superflu ? C'est que je ne voudrai pas oublier le moindre détail vous voyez Messire Naral. »

Puis je lui donne de la révérence pour appuyer l'ironie de mes propos. Quelques boutades pou faire retomber la tension avant de commencer les choses sérieuses, il n'y a que ça de vrai !

[3612 mots]

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Car celui qui aujourd'hui répand son sang avec le mien,sera mon frère. - William Shakespeare


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 Sujet du message: Re: Oranan
MessagePosté: Dim 4 Déc 2016 13:08 
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Quête 35 : Nouvelles d'Aliaénon
~1~



Okina avait raison. En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, de nouvelles affiches requérant de l'aide sont placardées en ville. Le lieu en quête de secours et le commanditaire n'ont rien d'inconnu à mes yeux. Aliaénon fait de nouveau appel à un soutien extérieur, le Conseil d'Or se manifestant par l'intermédiaire de l'énigmatique Naral Shaam, si je me fie aux initiales sur les parchemins. C'est étrange. Il m'a pourtant affirmé que les forces de cet autre monde allaient sans doute mettre du temps à accomplir leurs tâches, et que refaire appel à nous n'allait pas être immédiat. Que s'est-il donc passé là-bas ? Y'a-t-il eu une crise presque aussitôt notre départ effectué ?

Au moins, aujourd'hui, je pars avec le cœur un peu plus léger. Avec le retour de mes amis et la nécessité de veiller sur leur rétablissement, mon absence ne les laissera pas dans un désarroi profond. Je leur ai laissé une partie de la récompense pour couvrir les frais quotidiens et ai proprement annoncé mon départ, cette fois. Si le grand Hidate n'avait pas l'air ravi de ma décision, il n'a nullement protesté. Mieux, il a semblé flatté quand je lui ai donné la charge de veiller à ce que Ganko, mon étalon, se rétablisse proprement. Je l'aurais bien amené avec moi encore une fois en Aliaénon, mais le percheron s'est foulé un membre en défendant un autre cheval dans les pâturages. Toutefois, les Pâles et les ynoriens ayant des chevaux, je ne doute pas pouvoir trouver une monture sur place si besoin.

Mes pas me conduisent aux abords de la milice, dans une température assez froide. L'hiver est déjà à nos portes apparemment, et mon souffle apparait se figer dans l'air par moments. Pourtant, l'après-midi est déjà bien avancé. J'espère que les membres de ma maisonnée vont penser à faire provision de bois de chauffage et couvertures épaisses.

Ce que je constate en arrivant est surprenant. Est-ce le lot de rumeurs galopantes qui en est la cause ? Le fait que ceux qui ont participé la dernière fois sont revenus en héros ? L'appât du gain ? Toujours est-il qu'une foule se masse aux abords de l'office, canalisée en une file que mes camarades de milice font avancer progressivement. J'ai comme l'impression de deviner certaines silhouettes familières, mais la masse de personnes me dépassant de plusieurs têtes m'incite à ne pas trop tendre le cou. Je patiente donc et finis par remarquer un visage connu parmi les miliciens au faciès sévère. L'un de mes apprentis, Yamanori Daichi, est en train de reconduire sans ménagement un trouble-fête hors de la queue. Dire que ce jeune homme était du genre à dégainer son katana pour un oui ou pour un non. Là, dans son armure d'apprenti, il fait véritablement milicien.

M'efforçant de ne pas le regarder pour ne pas le perturber, je finis par atteindre à mon tour les environs de la porte. Il suffit d'un regard en direction de mon insigne puis d'un autre vers mon visage pour que je reçoive la salutation militaire due à mon rang. J'ai encore du mal à m'y faire. Pourtant, c'est le cas. J'ai légitimement acquis ce grade par mes efforts et ma détermination. Cet objet rivé à ma protection en est la preuve. Sergent, moi...

(Nul ne peut restaurer le temps gaspillé.)

La soudaine intervention de ma faëra me rappelle à l'ordre, empêchant sans doute quelques mécontents derrière moi de se manifester.

"Repos, miliciens. Mes pas me conduisent en Aliaénon une nouvelle fois. Faites votre office."

Il ne faut que quelques instants de plus pour que le passage me soit ouvert, et qu'une voix m'indique de me rendre en direction du bureau du Capitaine Atsuhiko. Tiens donc ? Mon supérieur semble avoir changé de méthode. Peut-être souhaite-il que l'ensemble des aventuriers soit rassemblé avant de franchir le fluide ? Ce serait une bonne idée. Après tout, la dernière fois, j'ignorais à quoi ressemblaient mes alliés, ni n'avais conscience de leurs desseins. Une telle incertitude n'est jamais agréable.

Sans perdre de temps, je longe un couloir connu et parviens à mon tour près de la porte de l'étude du Capitaine. La sélection a été sévère, mais il n'empêche que plusieurs personnes sont parvenues à passer. La plupart des présents sont humains ou en ont l'air, à l'exception d'un nain roux. L'armure de ce dernier me parait massive, au point que je suis quasiment certain de ne pas pouvoir lever un bras si je devais revêtir l'un des gantelets qui la compose. Je dénombre quatre hommes et trois femmes, en plus de silhouettes d'aventuriers que je crois connaitre.

La Dame la plus remarquable a une chevelure platine, une arme qui a quelques similitudes avec la mienne, mais surtout une armure qui m'évoque quelque chose entre la tenue de bataille et de prêtrise de certains ordres. Elle devise avec son voisin, un archer au visage traversé par une balafre impressionnante, mais disposant d'un aplomb certain. Non loin d'eux, un homme encapuchonné semble écouter sans intervenir, mais l'espadon qu'il détient m'incite à croire qu'il n'est pas du genre à rester en retrait au combat.

Aussi impressionnant, un guerrier à l'allure farouche, bardé de cicatrices, s'appuie sur une hache à deux mains. L'armure qu'il porte renforce son apparente férocité, tout comme le regard sévère qu'il porte à la ronde. Le dernier homme est un rouquin, faisant les cents pas à proximité de la porte. Son attitude impatiente n'aide sans doute pas à apaiser l'air des lieux. Je ressens comme une tension dans les environs. Peut-être parce qu'aucun de ces visages ne m'est familier, mais peut-être aussi parce qu'en-dehors du trio, personne ne semble enclin à s'entretenir avec son voisin.

Les deux dernières Dames m'évoquent les mots énigmatique et farouche. La première a le visage masqué, surveillant les déplacements de l'impatient combattant, sa chevelure marron attachée en une tresse pour ne pas gêner sa vision. L'autre a l'air prête à en découdre, et si sa tenue est massive, elle est avant tout épaisse et doit lui tenir chaud. Une idée somme toute logique si le temps froid s'apprête à frapper. Une combattante elle aussi, dotée d'une large épée et d'un bouclier.

J'ai tout juste fini le tour de la pièce que sur les coups de l'heure exacte, la porte s'ouvre. Prenant mon temps pour n'entrer accidentellement en contact avec personne, je me rends également dans la pièce. Le Capitaine Atsuhiko est à son bureau, assis, observant notre arrivée avec ce même air sérieux que lors de mon premier voyage vers Aliaénon. Je m'écarte du passage et effectue une salutation militaire à son endroit. Je ne me redresse que lorsqu'il prend la parole et commence par nous remercier de notre présence. Silencieux, je me contente d'un très léger signe de tête.

(Hum...)

(Qu'y a-t-il, Okina ?)

(Nul trouble vous concernant. Demeurez attentif, mon enfant.)

Suivant les recommandations de ma faëra, j'écoute mon supérieur nous présenter son voisin. Le Seigneur Naral Shaam en personne. Le Dragon mauve n'a plus à se cacher à présent, mais le revoir me cause à la fois apaisement et inquiétude. L'elfe en armure, égal à lui-même, balaye l'assemblée de ses yeux d'or. Il prend ensuite la parole sur un ton bien loin de la gravité de ses propos, pour nous mettre en garde contre le possible danger de mort que la demande nous fait courir. Ce Naral semble apprécier ce genre d'effets, mais nul ne suit sa recommandation ni ne bouge. Tous semblent prêts, ce qui s'avère quelque peut surprenant à mes yeux.

Il enchaine alors par son rire singulier, avant de répondre à une des questions qui me taraudait. Si, pour nous, peu de temps s'est écoulé, en Aliaénon, près de cinq années sont passées. Tout d'abord hébété par la nouvelle, je songe aux implications possibles. Est-ce que le doyen des D'Omble dirige toujours Treeof ? Le Gouverneur Teruki a sans doute beaucoup mûri sous la direction du Conseiller Tsukiko. Et que sont devenus Talia et Khar'Tal D'Omble ? Malgré la surprise, je fais de mon mieux pour ne pas perdre le fil.

L'éveil des Titans est cause de ce changement dans l'écoulement du temps, mais si le Dragon Mauve a fait appel à nous, c'est pour nous pencher sur le problème du Sans-Visage. Malgré la création d'un ordre de chevaliers censé l'arrêter et aux ordres du Conseil d'Or, l'entité continue son œuvre et à rassembler des fidèles. Notre tâche dans cet autre monde est donc... De trouver un moyen pour... Pour...

(Apprendre à un immortel ce que signifie redouter la mort, oui.)

Naral Shaam a l'air à la fois amusé et peut-être un peu plus tendu que dans mon souvenir en évoquant cet objectif. Apprendre un moyen pour vaincre cette entité, rassembler les ressources pour y parvenir, et exécuter le plan. Ce n'est pas l'affaire d'une poignée d'aventuriers. Je suppose qu'il nous faudra nous appuyer sur nos alliés en place. Cinq ans... Vu l'accueil plutôt empli de remontrances que m'ont fait mes proches après un an d'absence, j'ose à peine imaginer celui que je vais avoir une fois en Aliaénon.

Naral Shaam nous invite à ratifier une liste ensuite, en indiquant nos noms, prénoms et qualités. Peut-être compte-t-il lire cela à la ronde ensuite ? Afin que tout le monde sache à quoi s'attendre de la part des autres ? En tous cas, deux personnes se font rapidement remarquer. Le jeune Xël, proposant une partie de ses biens pour la construction d'un orphelinat, et l'étrange Karz aux bras mécaniques. Tous deux sont donc partants pour retrouver cet autre monde. Leur présence m'apaise un peu, car je sais qu'ils n'ont à cœur que l'aide à Aliaénon. Eux aussi font partie des Sauveurs après tout.

Je m'avance à mon tour, indiquant mon identité, mes capacités en magie curative et mon grade de Sergent. J'hésite un bref instant quant à ma qualité de Dragon d'Or d'Ynorie tant l'appellation me parait irréelle. Je finis par l'ajouter, car si les chances de faire appel à cet étrange pouvoir sont minces, elles ne sont pas nulles.

Je tourne mes yeux violets vers le Mauve.

"Il semblerait que vous deviez également compter sur ma présence, Naral Shaam."

Je m'incline légèrement pour le saluer et laisse ma place aux suivants. Un soupçon d'inquiétude nait dans ma poitrine quant aux changements que le Dragon a évoqué. Mais avant de laisser les hypothèses les plus saugrenues m'envahir, la voix de ma faëra me somme de rester maître de moi-même et que je verrai ce qu'il en est en temps et en heure. Je lui en suis reconnaissant. Okina semble être une sommité concernant mon apaisement et mon retour au calme. Il faut pourtant que j'y parvienne seul. Je ne voudrais pas l'épuiser, même si elle-même est soi-disant immortelle.




(1 790 mots)

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Dernière édition par Kiyoheiki le Sam 17 Déc 2016 00:38, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Oranan
MessagePosté: Dim 4 Déc 2016 14:00 
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Sirat fini de se préparer, l'allure fière, l'armure de Nagorin doré luisante et la cape de l'unique sur les épaules. Il se retourna et vit Sibelle sur le seuil de la porte, l'attendant. Ils étaient prêts. Les deux aventuriers, rencontre du passé, prirent la route de la milice. C'est à cet instant et après plusieurs minutes de réflexions que Sirat décida de répondre à la dernière interrogation de la maître d'arme.
Pourquoi les yumeniens étaient-ils entré en Aliaénon, l'explication était simple et valait pour toutes les entreprises de l'homme : le profit.

Les armés noires voulaient un passage pour envahir Oranan et les yumeniens eux rêvaient de comprendre la magie de ce monde. Elle n'agit pas comme ici, elle plus puissante, plus instable...


Il remarqua des badauds qui couraient dans la même direction qu'eux. Malgré le froid naissant de cette journée de prime hiver les rues semblaient être bien vivantes.

Cela a peut-être changé depuis la destitution du Titan de magie, Mais Aliaenon regorge de ressource brute que rêve d'exploiter les peuples libres.

Il prit un instant pour organiser ses pensées et continuer. Sibelle était à coté l'allure toujours aussi déterminée et elle écoutait avec une attention toute professionnelle.

Je dois t'avouer une chose...

Il observa les regards qui commençaient a se poser sur lui, il reconnue la peur, la crainte, la prudence et chez certains, mais peu, une légère admiration.

La première fois que je suis entré sur Alienon c'était part le fluide des forces d'Oxaca. Je porte la marque du dragon de la sorcière et n'ai pas un camp défini comme vous autres. Je sers Zewen et ceux jusqu'à ma mort, il me définit et sculpte mes actes. Je pense que c'est lui qui t'a envoyé vers moi pour que je reparte là-bas.


Il esquissa un sourire taquin à destination de la rouquine.

Ne me fais pas confiance non plus...


elle répliqua que la confiance ça se gagne, et que ce n'est pas encore le , Sirat trouvait cela charmant, la prunelle de la belle brillait avec férocité.


La place qui était vide il y a trois semaines leur apparaissais grouillante, vomissant de monde et de flâneurs cherchant une place pour voir ou satisfaire leur curiosité. La masse informe, anarchique, aux mille bras et jambes, guivre infernale, indiscrète, suintant ses membres par les rues, vivant par procuration, tempêtait. Il resta interloqué devant ce troupeau vagissant, mais très vite une personne se retourna vers lui, le reconnu, un des sauveurs d'Aliaenon, le semeur de chaos et part respect ou peur ou même les deux, il s'écarta. Son geste fit écho et dans un murmure partagé, un bruissement volant au gré des bouches, un chemin se traça dans le bétail. Il jeta un regard anxieux à Sibelle et si le sillon se refermait et si la bête informe décidait de le lyncher...

On y va, suis-moi...

Il prit le chemin jusqu'à un cordon ou une queue d'aspirant faisait les cent pas pour entrer dans la milice. Un poste de passage empêchait les amuseurs de rentrer. Sirat si présenta et personne ne l’empêcha de rentrer, bien que ce n'était pas de gaîté de cœur pour certain soldat. Il avait tué nombres de leur frère là-bas. Quand les regards se posèrent sur Sibelle, il lui attrapa le bras afin de la placer près de lui.


Elle rentre avec moi, je me porte garant de ses aptitudes.


Une moue réfractaire sur le visage du soldat en disait long sur ses intentions.

Je me demande comment vous allez expliquer le refus d'entrer d'un sauveur d'aliaenon et de sa coéquipière a vos supérieur. Si elle ne rentre pas, je ne rentre pas.

La belle se dégagea, son orgueil était à la hauteur de sa beauté. Elle voulait prouvé sa valeur et elle le fit avec brio. Sirat attendait même si elle lui avait demandé de prendre les devants. Les clé de son destin se trouvaient à travers elle.

Le garde du se résigné il aurait aimé les laisser choir, il conspuait l'humoran intérieurement, mais il avait le sens du devoir et de la hiérarchie.
Il expira à travers ses narines en signe de désapprobation et il ouvrit le cordon, découvrant le couloir menant jusqu'à la porte du conseiller.

Une troupe hétéroclite d'aventurier attendaient, faisant les cent pas. Homme archer à la balafre, ou maraudeur encapuchonner, femme armuré et au regard aussi belliqueux que sa compagne, nain aussi roux que lui arborant tatouage de guerre et... Karz, Xel... Ces deux-là étaient déjà présents. Sirat resta en retrait dans l'ombre. Kiyoheiki entra, plein de prestance et de fluidité dans chacun de ses mouvements. La porte s'ouvrit et tous entrèrent dans le bureau du capitaine. Un Ynorien pure souche, digne et noble, les cheveux en chignon et le sourcil broussailleux scruta l'assemblée et présenta Naral Sham. L'elfe au cheveu mauve apparu derrière lui, son rire cristallin résonnant dans la pièce. Sirat ne l'aimait pas. il restait le adosser à un mur et écouta attentivement. Cinq ans c'était écoulé sur Aliaenon pendant ces trois semaines. Le titan de magie contre attaquait et il trouvait des partisans. Sirat en était presque réjouit, le chaos valait toujours mieux que l'équilbre proné par ce dragon. Il voulait mettre fin a cette menace de l'unique et il requierait leur aide, il désigna un parchemin ou il fallait signé pour s'engager. Sirat laissa les autres faire leur du et s'avança à son tour. Il regarda Naral, le défiant presque, un sourire aux lèvres et signa. Il savait que les principales informations seraient donné une fois là-bas. Il se retourna vers les trois autres sauveurs et leur fit un signe de la main en guise de bonjour, ne quittant pas son rictus narquois.


Citation:
672 mots ...

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Dernière édition par Sirat le Mar 6 Déc 2016 17:34, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Oranan
MessagePosté: Dim 4 Déc 2016 19:10 
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Précédemment : ici

La petite fille avait parcouru les rues de la ville, observant avec une certaine lassitude cette architecture trop originale pour elle. Mais après tout, il ne s'agissait bien que de maisons et l'intérieur semblait tout à fait banal. Les formes des toits variaient, certes, ainsi que les divers motifs affichés, souvent géométriques, mais son regard ne parvenait pas à s'attacher à ces choses. Au milieu de la ville, parmi toutes les modes vestimentaires, la sienne n'était pas si originale sans toutefois se fondre dans la norme, mais cela ne faisait rien. On ne se souciait de toute manière que peu d'une fillette qui se balade dans les rues d'une grande ville. Et cela, ça l'arrangeait bien.

Au milieu de cette grande ville, cependant, elle avait tendance à se perdre. Les passants, faute de faire attention à elle, la bousculaient et l'entraînaient dans leur flot compact en cette journée du début de l'hiver. Car la ville semblait en effervescence, bien plus que Dahràm aux yeux de Yurlungur. Il fallait dire que la cité démocratique comptait bien au moins cinq fois plus d'habitants que le port des pirates, bien plus modeste. Partout, les gens étaient pressés, emmenés quelque part, certains par-ci, d'autres par-là. Et la plus grande majorité avait des traits étranges, comme trop allongés, associés à une couleur de peau bien trop jaune pour être normale.

Yurlungur avait déjà pu voir quelques spécimens de cette curieuse race passer à l'auberge de Dahràm, mais ils ne restaient guère et étaient très rares, sans doute à cause de la tension entre la République d'Yronie et l'empire oaxacien. Il était bien décevant pour la petite de voir autant de richesses dans certaines boutiques être surveillées par des patrouilles régulières de miliciens bien armés. Ceux-ci étaient là pour faire respecter la loi et l'ordre et elle doutait qu'ils sachent comment rigoler un peu. En tout cas, il valait mieux ne pas tenter leur humour en cambriolant l'un de ces alléchants marchands. Mais c'était fort dommage.

Elle avançait donc à travers les rues et la fatigue commença à se faire sentir dans ses jambes lorsqu'elle repéra un homme à la forte carrure, couvert d'épées et de lames en tous genres. Elle haussa un sourcil puis remarqua qu'il lisait l'un de ces parchemins affichés partout, indiquant d'aller se présenter à la milice d'Oranan pour se rendre sur Aliaénon. Dès qu'il semblât avoir fini sa lecture - ce qui sembla durer une éternité pour la gamine qui commençait à désespérer des compétences intellectuelles du géant - il commença à se frayer un chemin dans la foule, suivant un itinéraire qu'il devait bien connaître puisqu'aucune hésitation ne transparaissait dans ses pas.

Saisissant la chance, la petite fille se mit à marcher juste derrière lui, profitant de la large tranchée qu'il ouvrait à travers les badauds. Il en avait de la chance, d'être aussi massif, quoique Yurlungur se voyait mal cinquante centimètres plus haut et quarante plus large. Non, ce genre d'existence n'était pas pour elle.

Elle se faufilait donc dans le sillage encore ouvert du colosse jusqu'à distinguer un attroupement d'aventuriers de toutes sortes. Ils étaient aussi nombreux que variés : et on voyait là des incapables finis à côté de chevaliers à l'expérience certaine. Ils arboraient tous un air décidé, des armes flambant neuves - ou non - et, bizarrement, Yurlungur en vint à se sentir intimidée. Elle n'osait plus avancer, apercevant au loin les miliciens qui faisaient barrage et ne laissaient que quelques élus entrer et passer à travers. Il y avait bien quelques enfants çà et là, mais aucun de ceux qui arrivèrent jusqu'au capitaine qui gardait l'entrée ne fut accepté. Elle tressaillit.

Puis reprit une grande inspiration. N'était-elle pas une meilleure oratrice que tous ces gamins ? N'avait-elle pas enduré suffisamment de choses, peut-être plus qu'une partie des prétendants accumulés là en un tas informe ? Et puis, elle, elle n'allait pas faire la queue, non plus. Quitte à être recalée, autant être recalée rapidement, son temps était précieux.

Mais il lui fallait préparer des arguments. Qu'est-ce qui ferait qu'on aurait besoin d'elle ? Elle marchait lentement, évitant de toucher le moindre de ces explorateurs qui souhaitaient changer de monde sans s'interroger elle-même sur ses propres motivations. Elle avait simplement besoin de changer d'air, de ne plus penser à Asmodée du tout, de s'échapper de son emprise mentale qui l'obnubilait et la suivait partout... Mais justement, Asmodée, dans cette situation, aurait parfaitement su quoi répondre au garde qui se trouvait là pour l'impressionner et le forcer à la laisser passer.

Elle pensa un moment à Asmodée. Rien ne vint.

Soufflant un coup, elle essaya de déterminer ce que cette dernière aurait fait en pareille situation, non sans espérer que cela ne causerait pas son retour.
Il fallait mettre en avant ses forces et cacher ses faiblesses. Mais ses faiblesses, le milicien les verrait immédiatement : elle était une enfant, donc de fait bien moins capable de se battre que n'importe qui d'autre. Et même si elle estimait que sa maîtrise de la dague était suffisante pour se défendre d'une bonne partie de ses ennemis potentiels, révéler ce talent ne servirait qu'à la faire passer dans la case “bizarrerie dont il faut se méfier”.

Une autre approche était nécessaire. Non, à sa place, Asmodée n'aurait pas pris les choses ainsi... La dernière nuit terrible que Yurlungur avait passé à Dahràm, l'Autre avait assuré avoir fait tout cela pour leur bien : là était la clé. Bien qu'elle n'ait pas réussi à la convaincre, sa méthode était tout à fait exceptionnelle : faire passer un meurtre sanglant et sauvage pour une bonne action, ce qui n'était évidemment pas le cas... Non, ça ne pouvait pas être le cas.

Mais elle s'égarait. Faire passer ses faiblesses en force... Essayer de copier l'esprit tortueux d'Asmodée... Ce ne serait pas aisé, mais Yurlungur savait qu'elle saurait s'en tirer. Elle lista intérieurement quelques arguments à ressortir, quelles que soient les questions qu'on lui poserait, puis s'avança.

Il fut assez facile de passer les aventuriers les moins attentifs. Guettant simplement un moment où ils étaient pris dans une discussion avec un camarde quelconque, elle leur passait discrètement devant dans la file qui s'était peu à peu formée. Pour les autres, moins loquaces et plus concentrés sur leur tâche, ils étaient souvent bien assez stressés pour que le simple fait de les effleurer sur l'épaule les fasse brusquement tourner la tête d'un côté : et la voie était alors ouverte de l'autre. Ah, vraiment, les gens ici étaient pour la plupart des imbéciles heureux.

Enfin elle arriva devant le maréchal et lui offrit un sourire aussi doux qu'elle le pouvait. Elle était toujours une petite fille et ne l'ignorait pas : on avait toujours tendance à la trouver mignonne lorsqu'elle adressait ce genre de souris à ses interlocuteurs, du moins ceux qui ne savaient pas de quoi elle était réellement capable. Et puis, elle portait toujours la bague d'Enulcard : si, comme le lui avait annoncé Aethalin, cette curieuse croix noire sur la chevalière allait effectivement lui ouvrir la porte de tous les palais, il n'y avait pas de raison de s'inquiéter.

« Euh... Qu'est-ce que tu fais là, ma grande ? demanda le milicien, quelque peu désorienté. »
« Je viens me présenter pour me rendre sur ce drôle de monde, Aliaénon ! affirma-t-elle avec une candeur surjouée qui sembla pourtant atteindre son objectif lorsque le milicien bafouilla quelques remarques. »
« Mais... voyons, se reprit-il, tu es bien trop jeune. Rentre donc chez toi, ce n'est pas pour les enfants. »

Il tenta de la chasser de la main, mais elle s'y agrippa fermement, son regard devenant plus dur alors qu'elle haussait un sourcil, le sourire toujours aussi aimable.

« Je vous demande pardon ? Vous semblez ignorer toutes les qualités que je possède donc je ne vois pas pourquoi je partirais, répliqua-t-elle du tac-au-tac. Croyez-vous vraiment que je sois si naïve que je me sois présentée ici sans arguments pour défendre ma candidature ? Alors. Regardez-moi dans les yeux et dites-moi si je mens. »

Elle le fixa intensément, une expression de gaieté enfantine figée sur son visage.

« J'ai assassiné une dizaine de personnes les deux dernières semaines, commença-t-elle. »

Le milicien sembla quelque peu horrifié, mais elle éclata d'un rire moqueur et rajouta alors qu'il se dégageait :

« Alors, vous voyez, je mens bien, hein ? Je suis certaine que vous aurez sans doute besoin de plus petit que vous, vous aussi. Je suis inoffensive, et c'est bien là ma force, affirma-t-elle en mentant éhontément. »

Il ne restait plus qu'à attendre la réaction du milicien en question pour voir s'il allait la laisser passer. Derrière, quelques aventuriers impatients de passer eux aussi commençaient à pousser des cris d'impatience, aussi ne lui restait-il plus beaucoup de temps pour se faire accepter.

Mais heureusement, le milicien s'écarta, quelque peu, méfiant, la laissant enfin passer. Il fit un signe de la tête à un autre pour indiquer que la petite fille avait le droit de passer, ce qui ne laissa pas celui qui lui indiqua le chemin sans étonnement. Et lorsque d'autres volontaires se mirent à protester derrière le cordon de gardes, elle se retourna simplement et leur tira la langue avant de suivre en sautillant le milicien à travers les couloirs.

Elle remarqua alors que Papillon se tenait à ses côtés, sous la forme papillonesque qu'il affectionnait tant. Ses ailes bleutées lui permettaient de voleter autour d'elle et elle lui parla à voix haute sans s'en rendre compte :

« Mais tu es là, toi ! »
« Qu'y a-t-il ? demanda le milicien en se retournant. »
« Rien du tout, rétorqua Yurlungur. J'ai apprivoisé un papillon que voici, je crois qu'il me suit partout depuis que je lui ai offert un peu de miel, c'est tout. »

Elle semblait énoncer ce fait comme s'il s'agissait d'une banalité, bien que les papillons fussent souvent bien trop éphémères et aux sens trop éloignés de ceux des humains pour reconnaître un maître ou possesseur parmi cette race de grandes choses roses.

(Ah bah bravo, tu m'as fait remarquer,) intervint Papillon. (En plus, je peux plus disparaître sans risque, maintenant...)
(Arrête donc de te plaindre, toi,) lui intima-t-elle. (Qui est-ce qui m'a laissée régler tous mes problèmes seule la semaine qui vient de se passer ?)

Il dut sans doute ressentir une pointe de chagrin lorsqu'elle évoqua à nouveau ces événements et ne répondit pas. Finalement, ils arrivèrent devant une porte fermée devant laquelle d'autres personnes patientaient eux aussi. La fillette eut une moue d'émerveillement feint en observant les diverses figures presque types qui se retrouvaient là : à vrai dire, il n'y avait peut-être bien qu'elle qui se distinguait réellement du lot... Quoique.

Le guerrier isolé qui se tenait dans un coin n'avait rien d'exceptionnel et la fillette l'entendait déjà raconter au coin du feu le récit de ses exploits, marqués à vie sur son visage. Il était affreusement laid à cause de ces cicatrices et elle ne pouvait décemment songer à s'associer avec lui pour d'autres raisons que la certitude d'être protégée en toutes circonstances. Plus loin se tenait un homme plus fin à l'arc bien visible qui lui, osait bien discuter avec ses voisins. Elle estima qu'il serait sans doute moins utile que le premier si elle cherchait à assurer sa survie et passa à la seconde. Sans montrer ses émotions vis-à-vis de celle qui paraissait être fort probablement une servante des Dieux lumineux et béats comme Gaïa ou Yuimen, elle lui accorda à peine un regard.

L'observation aurait pu devenir lassante s'il n'y avait eu cet autre guerrier plus ténébreux dont la longue épée l'attirait déjà. Elle voyait mal comment faire bon usage d'une telle arme, mais cela devait sans doute être impressionnant ! Et la femme à la rapière semblait une personne digne d'intérêt, la seule à avoir songé à camoufler son visage au milieu de cette joyeuse troupe. Alors qu'un énième combattant, rouquin, lui jetait un regard interrogateur sans aller jusqu'à la questionner sur sa présence ici, elle remarqua son stress apparent et son sourire s'élargit légèrement en même temps qu'un voile d'indifférence s'y apposait. Il ne restait bien que cette femme aux apparences de pure roturière sous son accoutrement inhabituel et ce nain à la hache impressionnante avant d'en venir au plus vif du sujet.

Car il y avait encore une sorte de mage bizarre qui dormait dans un coin, tout à fait à son aise, ce qui ne pouvait que plaire à la petite fille : et cet homme aux membres qui semblaient mécaniques. Il faisait peur aux gens, sans doute, aussi tenta-t-elle une mine de stupéfaction en dévisageant un moment l'inconnu avant de passer aux deux derniers. Le premier n'avait d'intérêt que par la couleur peu commune de sa peau et son air tout à fait sûr de lui, tandis que l'autre, c'était simplement un Humoran. Et il semblait fort ! Ah ça, oui, des spécimens comme ça, elle n'en voyait pas tous les jours.

Après cette tournée des visages, elle fit quelques pas vers l'homme qui dort effectivement. Il avait eu l'intelligence de s'asseoir sur son sac, mais elle l'observait comme on contemple une colonie de fourmi : avec amusement et intérêt, jusqu'à ce que le léger ronflement devienne un peu trop répétitif.

Puis elle s'adossa contre le mur à quelques pas de lui, son visage recouvert d'une fausse expression d'assurance et d'ingénuité. Elle semblait rêver à quelque chose, sans que la moindre parole passe à travers ses lèvres, mais secouait doucement la tête en fixant un point dans le vide.

Et enfin on leur ouvrit et elle suivit la masse d'aventuriers, non sans se tenir légèrement à l'écart afin de ne pas attirer l'attention du capitaine sur elle. Ce dernier était un bel homme, assurément : mais sans doute un peu trop vieux pour elle. Elle ne parvenait pas à comprendre pourquoi d'autres femmes étaient si aisément attirées dans les bras de tels balourds qui, bien que charmants, n'avaient que trop de rigueur et de sévérité pour faire de bons amants.

À moitié cachée derrière le guerrier à la hache à deux mains, elle écoutait avec attention les paroles du capitaine qui ne fit, somme toute, que présenter celui qui allait effectivement leur donner leur tâche. Alors elle remarqua en écarquillant les yeux l'Elfe qui se tenait là, à la peau pâle et aux cheveux... mauves. Ils étaient mauves ! C'était tout à fait extraordinaire d'être insensé au point de se montrer avec des cheveux violets de la sorte. Ah oui, elle trouvait cela tout à fait affreux ! Mais elle ne fit aucun commentaire, fixant simplement l'homme avec une expression moqueuse.

Il leur demanda dans un étalage de formalités inutiles de ne pas avoir peur de risquer leur vie. Mais Yurlungur risquait aussi sa vie lorsqu'elle montait un escalier : n'y avait-il pas une chance qu'elle tombe et de se brise les vertèbres ? La remarque acerbe resta confinée dans sa petite caboche et elle écouta la suite. À plusieurs reprises, un rire aigu la fit lever les yeux au ciel, se demandant pourquoi l'homme était obligé de se comporter ainsi. C'était plutôt insupportable mais, dans le cadre de son rôle, il ne fallait en aucun cas qu'elle montre ses vraies intentions ou sentiments publiquement, bien que l'hilarité de ce Naral Shaam ne fut nullement à son goût.

Il expliqua un décalage temporel entre Yuimen et Aliaénon, ce qui ne troubla pas plus que ça la petite fille, puis qu'il y avait une divinité en fuite là-bas, ce qui lui fit arquer un sourcil d'intérêt, et enfin que leur mission était de tuer l'immortel dit. Et là, un sourire d'amusement parut sur le visage de la gamine. Car s'il y avait bien quelque chose qui pouvait la distraire, c'était de se lancer dans une quête apparemment impossible. Tuer un immortel ! Quelle fantastique idée. Elle aurait voulu embrasser le génie qui avait pensé à ça, mais ç'aurait été de trop - et il fallait qu'elle aille signer.

Elle entendit devant elle le mage réveillé et le semi-mécanique discuter sur le ton de la plaisanterie avec Naral Shaam et le capitaine Atsuhiko, tandis que l'Ynorien aux traits sombres affirmait simplement sa volonté de les aider. Mais ils partirent dans un discours larmoyant sur des orphelins de Kendra Kâr, sensibles à leur épanouissement et au fait d'éviter à tout prix qu'ils tombent dans la délinquance - et blablabla... Il fallut qu'elle se force pour ne pas les imiter d'une manière trop insolente. Qu'ils laissent ces pauvres enfants s'élever seuls, elle avait bien réussi quant à elle et se retrouvait maintenant en leur compagnie malgré son jeune âge. Ils tentaient de toute façon de rendre le monde comme ils l'imaginaient idéalement, incapables de comprendre que cette uniformisation du mode de pensée soit-disant “vertueux” car provenant de Gaïa plairait à tous et à toutes et qu'il ne pouvait souffrir aucune exception. Ou bien ils étaient naïfs, ou bien ils tentaient d'imposer leur volonté au monde : mais qu'ils ne s'étonnent pas, alors, de se voir parfois confrontés à des êtres aux intentions contraires.

Mais elle se faufila alors qu'ils surenchérissaient sur des sommes bien trop élevées et s'approcha de la feuille pour y apposer son prénom. Réfléchissant à un nom, elle hésita un moment, puis marqua finalement celui de sa mère : « Yurlungur Louvardent ». Elle ne savait pas trop quelle était l'origine de son père, mais la famille Elvent ne devait pas avoir une excellente réputation au vu de ce que lui avait dit sa tante : au contraire de la branche de sa mère, mère qui avait renoncé à tous ses privilèges pour partir avec son homme. C'était romantique, quoiqu'un peu idiot : mais sans cette idiotie, elle ne serait pas là en ce moment.

Puis, elle réfléchit un moment aux qualités en levant les yeux au ciel, ressemblant en tous points à une enfant cherchant les réponses au contrôle de son précepteur. Et puis, comme unique valeur, elle inscrivit en lettres bien rondes : « Enfant. » Tout était dit sur elle, du moins elle l'espérait. Et, après avoir signé, elle s'éloigna un peu, l'air gentille et doucereuse alors que sa bague vibrait de bonnes intentions.


(((3050 mots environ)))

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Dernière édition par Yurlungur le Sam 10 Déc 2016 20:32, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Oranan
MessagePosté: Dim 4 Déc 2016 21:41 
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L’imposant humoran paré pour le combat quitta l’auberge, accompagné de la guerrière de plus petite stature, mais affichant un air aussi déterminé.

Les deux aventuriers marchèrent quelques minutes dans les rues propres et fleuries d’Oranan recouvertes d’un léger givre avant que l’humoran rompe le silence pour répondre à la dernière question de Sibelle. Sirat expliqua que l’armée noire, celle d’Oaxaca, cherchait un passage pour envahir Oranan et ce monde lui en fournissait un puisqu’il était relié à cette ville par un fluide. Les yuimeniens pour leur part s’intéressaient à Aliaénon en partie pour comprendre leur magie. Cette dernière, précisa Sirat, s’avérait différente, plus puissante et davantage instable. Une grimace non perceptible pour son compagnon marchant à ses côtés se dessina sur le visage de Sibelle. Ne possédant aucun fluide, la magie demeurait mystérieuse pour elle. Et comme tout ce qui nous est inconnu peut nous faire peur, Sibelle la craignait et se méfiait de tous ceux qui possédaient un quelconque pouvoir magique.

Pour se ressaisir, la guerrière respira un bon coup cet air frais de début d’hiver tout en laissant le soleil caresser sa peau blanche d’hinionne.

Plus ils approchaient de la milice et plus une certaine animation se devinait. Les rues calmes de la veille grouillaient à présent d’activité. Des gens de tout acabit, aventuriers et curieux convergeaient vers le même endroit, la milice d’Oranan. Sans perdre de vue, le flux grouillant de gens, Sibelle écoutait attentivement les paroles de Sirat. Lors de son séjour à Aliaénon, ce monde regorgeait de ressources brutes que beaucoup rêvaient d’exploiter. Son grand compagnon cessa un moment de parler avant d’avouer à la belle qu’il s’était rendu à Aliaénon par l’intermédiaire d’Oaxaca.

(Il représentait donc l’envahisseur !)

Il précisa porter la marque du dragon de la sorcière et ne pas appartenir à un camp défini. Il servait Zewen et ce dernier définissait ses actes. Il croyait même que Zewen était responsable de leur rencontre afin qu’il reparte en mission sur Aliaénon. Bien qu’il arrivait à Sibelle de prier Gaïa, elle ne la vénérait pas. Puisque Zewen était le grand-père de la déesse de la lumière, Sibelle connaissait son existence et aussi ses principaux principes. Cependant, il était hors de question pour la guerrière de se soumettre à la volonté de ceux-ci. Contrairement à Sirat, elle aimait croire, à tort ou à raison, qu’elle était la seule maîtresse de son destin. Ainsi, malgré les paroles de l’humoran, elle jugea que leur rencontre n’était rien de plus que le fruit du hasard.
Après avoir jaugé brièvement la foule qui s’accumulait à la porte de la milice oranienne, Sirat prévint Sibelle qu’elle ne devait pas lui faire confiance. Cette dernière, gardant son calme rétorqua :

« La confiance n’est pas acquise d’office, elle doit se mériter. Et on ce qui nous concerne, notre rencontre est trop récente, nos aventures communes presqu’inexistantes. Aucune confiance n’a pu s’établir entre nous. »

Sur ces paroles, ils arrivaient enfin au bureau de la milice qui n’était pas visible, mais dont la présence se devinait derrière la foule qui faisait la queue pour rencontrer le capitaine Atsuhiko. La publicité n’avait pas été vaine et nombre d’aventuriers courageux avaient accouru afin de prêter main-forte au peuple d’Aliaénon. Au sein de cet attroupement se trouvaient aussi des curieux et des habitants qui surestimaient leur capacité. Afin d’éviter des morts inutiles de gens incompétents, la milice avait installé un poste de passage obligatoire qui permettait de trier l’ivraie du bon grain.
Ils venaient à peine de rejoindre la foule que Sirat fut reconnu :

« C’est Sirat ! » Clama une grande femme maigrichonne munie de son rouleau à pâtisserie. « C’est lui qui a participé à la bataille de Fan-Ming» rajouta-t-elle les yeux brillants d’admiration, n’étant apparemment pas au courant qu’il œuvrait alors pour le mauvais camp.

Les têtes se tournèrent ensuite, et un passage se fraya dans la file, certains s’écartèrent par respect alors que d’autres s’exécutèrent par peur, du moins ce fut ce que l’expression de leur visage trahissait.

Sirat profita du passage subitement aménagé par la foule ahurie et intima Sibelle à le suivre. Ce qu’elle fit.

Sans se préoccuper de la file d’aspirants aventuriers, Sirat se plaça au premier rang et se présenta aux miliciens chargés de faire le tri. La voie fut immédiatement ouverte à Sirat. Sibelle nota cependant un certain dédain sur le visage de certains soldats. Sa brève allégeance à la reine noire n’était pas passée sous silence et les opinions sur ce sauveur d’Aliaénon demeurèrent partagées.

Lorsque le milicien porta son attention sur Sibelle, Sirat attrapa celle-ci par le bras pour l’attirer près de lui, tout en annonçant au soldat qu’il était garant de ses aptitudes au combat. Devant l’hésitation de l’officier, Sirat menaça qu’il n’entrerait pas dans les locaux de la milice sans elle, arguant qu’il serait difficile d’expliquer le refus d’un sauveur d’Aliaénon.

Cela en fut trop pour Sibelle qui, d’un coup sec, se dégagea le bras de l’emprise de l’imposant humoran. Son attitude envers elle était trop protectrice, elle ne voulait pas d’une telle association. Elle reconnaissait la supériorité de ce dernier, mais elle se considérait apte à venir en aide aux habitants d’Aliaénon.

Le dardant de son regard courroucé, elle l’apostropha d’une voix ferme teintée légèrement d’amertume.

« Prenez de l’avant, Sirat, sauveur d’Aliaénon, je vous rejoindrai. Je ne suis pas votre poulain, je peux défendre à moi seule ma candidature. »

L’intention du vaillant guerrier n’était pas mauvaise, mais l’orgueil de la guerrière avait été piqué. Prenant une longue respiration pour retrouver son calme, adoptant son habituelle posture fière, elle se présenta à l’officier en charge du tri.

« Je me prénomme Sibelle et je n’en suis pas à mes premières missions. J’ai rendu service aux seigneurs d’Amarante en ramenant le calme dans l’un de ses villages. J’ai débarrassé de ses fantômes un manoir jusque-là hanté dans les alentours de Kendra Kâr. Toujours près de Kendra Kâr, j’ai soutenu la milice, en mettant chaos des bandits en évasion. Les armes à ma ceinture ne sont pas des parures, je maîtrise leur maniement. Je me porte volontaire pour aider ce peuple d’Aliaénon. »

Sibelle avait omis volontairement de parler du sauvetage d’Estë, jugeant ce fait trop mineur pour en parler.

Suite à la présentation de Sibelle, l’officier en poste, un homme d’expérience sachant juger la valeur d’un guerrier au premier coup d’œil, la laissa passer sans trop d’hésitation. L’attitude de la guerrière envers Sirat l’avait-elle favorisée ? L’énoncé de ses faits d’armes avait-il convaincu l’homme ? L’ardeur et le sang froid de la belle, l’avait-il rassuré ? Ou bien avait-il aperçu le pendentif de la guilde des danseurs d’Opale au cou de la guerrière ? Les menaces de l’humoran avaient pesé dans la balance ? Peu importe la raison, Sibelle avait franchi les portes de la milice et rejoignit Sirat, qui contrairement à sa demande l’avait attendu quelques pas seulement de là.

Une fois à l’intérieur, un milicien armé les conduisit dans un couloir où se trouvaient déjà quelques aventuriers. Sirat se plaça en retrait. Sibelle, à moins de deux mètres de lui fouilla dans son sac et en sortit le livre usé relatant l’histoire Esserothien. Adossée à un mur, elle entreprit la lecture du chapitre concernant les colosses fondateurs d’Aliaénon. Tout en lisant, du coin de l’œil, discrètement, elle fit le compte des aventuriers en place. Excluant, elle et Sirat, elle en compta une douzaine. Au bout de quelques minutes, Sibelle referma son livre dans l’intention de poursuivre sa lecture en un autre moment et un autre lieu. Parmi, ses futurs compagnons de voyage, quatre femmes avaient répondu à l’appel. Les trois premières, en apparence humaine, avaient tout de combattantes aguerries, tant par l’équipement que par la posture et l’assurance. En ce qui concerne la quatrième, il s’agissait d’une gamine, portant un ruban rouge dans les cheveux, que Sibelle estima âgée d’une dizaine d’années. Sibelle fronça d’abord les sourcils d’incrédulité, avant de penser qu’il ne s’agissait probablement que d’une messagère à la solde d’un quelconque aventurier. Parmi les hommes, un archer balafré jouissant d’un charisme évident discutait avec la femme aux cheveux platine. Derrière eux se tenait un autre homme encapuchonné, plus discret et ressemblant à l’archer. Devant la porte du capitaine de milice, un guerrier impatient faisait les cent pas. Ces allers et retours incessants commençaient à irriter la guerrière, qui afin d’éviter de perdre patience porta plutôt son attention sur un farouche guerrier au visage marqué de cicatrices et dont le lourd équipement pouvait en faire envier plus d’un. Assis par terre et adossé contre le mur d’en face, dormait un jeune homme à la longue chevelure noire et au visage légèrement bronzé. À première vue, il n’avait rien d’un combattant, mais Sibelle méfiante se dit qu’il devait manipuler la magie. Et puis, un homme aux cheveux courts et blonds aux iris or attira l’attention de Sibelle. Même si ses yeux resplendissaient d’un reflet particulier, c’est plutôt ses bras qui intriguèrent Sibelle. En fait, même si la guerrière ne voulait pas trop fixer l’inconnu, elle remarqua que ses membres supérieurs semblaient constitués seulement de pièces de métal assemblées en une espèce de mécanismes, sans aucune trace de chairs ou d’os. Les deux derniers aventuriers que Sibelle remarqua étaient de petite taille. Le premier avait tout au plus celle d’un nain, mais avait plutôt l’allure d’un elfe si on se fiait à ses oreilles pointues. Et l’autre, un nain, arborant une tignasse rousse et une impressionnante barbe tressée et à l’air farouche, faisait beaucoup plus honneur à sa race que les deux avortons sales et mal fagotés que Sibelle avait vus dans la salle d’audience du roi de Kendra Kâr.

Puis enfin, l’horloge sonna trois coups et la porte s’ouvrit. Les aventuriers pénétrèrent dans la pièce où deux êtres les attendaient. Assis sur un siège de cuir, derrière un grand bureau se tenait un homme à l’allure sévère affichant les traits classiques des ynoriens : cheveux noirs raides et yeux bridés. En meneur d’hommes, il posa tour à tour son regard sur chaque volontaire avant de prendre la parole. Son discours fut très court, se contentant de remercier d’abord tous ceux qui avaient répondu à l’appel transmis par le conseil d’Aliaénon pour ensuite présenter le signataire de la missive, l’énigmatique N.S : Naral Shaam.

Sibelle observait attentivement cet elfe à la longue chevelure mauve dont Sirat avait prétendu avoir la possibilité de se transformer en dragon. Vêtu avec noblesse et raffinement, il examina l’assemblée de ses yeux d’or perçant, un sourire affiché sur les lèvres puis prit à son tour la parole. Il parla plus longuement que le capitaine, annonçant d’emblée que ceux qui craignaient la mort devaient quitter immédiatement cette pièce. Sans broncher, le dos bien droit, Sibelle remarqua que le nombre de volontaires ne diminua point. Tous étant apparemment conscients du danger qui les attendait. L’elfe au regard d’or poursuivit alors son discours mentionnant une certaine distorsion dans le temps. Même si les sauveurs n’étaient de retour que depuis quelques semaines, une période de cinq ans s’était écoulée sur Aliaénon expliquant les nombreux changements. Le sans-visage, celui-là même dont lui avait parlé Sirat, toujours vivant, était parvenu à s’entourer des fidèles de différents peuples perturbant l’équilibre et la paix rétablie. Malgré un ordre de chevalier créé par le conseil, le sans-visage et ses disciples menaçaient toujours l’ordre sur Aliaénon. Ils avaient donc fait appel aux yuimeniens courageux et perspicaces afin de bien mener cette quête : tuer le sans-visage.

La tâche s’avérait ardue et dangereuse, tous étaient prévenus. S’ils désiraient encore participer malgré tout à cette mission, ils étaient invités à l’officialiser en ajoutant leur nom sur un parchemin. Quelques aventuriers semblaient se reconnaître, Sirat en saluant d’ailleurs quelques-uns. Sibelle attendit patiemment son tour avant de s’approcher du bureau du capitaine. Lorsqu’il arriva, l’elfe gauchère prit la plume d’oie de sa main droite, le trempa dans l’encrier, puis d’une écriture fine y inscrivit son nom, et prénom ainsi que ce qu’elle considérait comme ses principales qualités.

(((2 002 mots )))

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 Sujet du message: Re: Oranan
MessagePosté: Lun 5 Déc 2016 00:10 
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En s'approchant du bâtiment de la milice, Laewllyn s'arrête quelques instants pour observer un nombre inhabituel de gardes occupés à effectuer un tri sévère parmi la foule de ceux qui souhaitent visiblement entrer. L'Elfe sent une sourde angoisse monter en elle lorsqu'elle voit un guerrier bien équipé et visiblement compétent se faire refouler, pourquoi la milice accepterait-elle de l'engager elle, au juste? En se posant cette question, elle a l'impression de sentir sur son cou le froid acier de son père et d'entendre sa voix rauque lui dire: "Tu doutes, tu meurs". Un petit sourire en coin étire les lèvres de l'Elfe, qui rectifie mentalement: la milice m'engagera.

Laewllyn s'approche de la file de postulants et y prend sagement place, elle en profite pour observer ceux qui la précèdent, ceux qui outrepassent allègrement la file d'attente, probablement déjà affiliés à la milice d'une manière ou d'une autre. Tous, ou presque, sont harnachés d'équipements plus ou moins hétéroclites, baroudeurs et baroudeuses en tous genres se pressent pour obtenir un engagement, mais peu entrent. Son tour finit par arriver et elle s'approche des deux officiers recruteurs qui la scrutent d'un air d'abord froidement analytique, puis d'un air un peu perplexe en avisant les tatouages et les bijoux d'argent incrustés dans sa chair. Ils la détaillent des pieds à la tête, comme ils examineraient une bête avant de l'acheter. L'Elfe les observe de même, soutenant avec une aimable assurance leurs regards lorsqu'ils le cherchent. Les officiers se concertent brièvement du regard et l'un d'eux remarque:

"C'est une aventure dangereuse, mademoiselle. Vous ne semblez pas armée pour l'affronter, je regrette."

L'Elfe leur adresse un sourire de rare innocence puis elle tourne gracieusement sur elle-même, bras levés afin qu'ils n'en perdent rien, avant de leur refaire face pour les fixer d'un regard ensorceleur et imperceptiblement ironique:

"Chercheriez-vous à m'offenser, messieurs?"

L'un des deux officiers, plus bourru que son comparse, fronce les sourcils et s'apprête à répondre lorsque son collègue soudain pourvu d'un étrange sourire rêveur le coupe:

"Telle n'était pas notre intention, je vous l'assure. Dites-nous plutôt pourquoi nous devrions vous laisser passer."

Laewllyn s'incline à la mode Ynorienne devant l'officier pour le remercier de lui donner une chance et répond aimablement:

"Vous aurez besoin d'une Enchanteresse avant la fin."

Le plus bourru des officiers se penche en avant et rétorque d'une voix dure:

"Je ne sais pas qui ou ce que vous êtes, mais certainement pas une Enchanteresse. Nous avons assez perdu de temps avec..."

"Je le deviendrai, je l'ai déjà été", le coupe Laewllyn en rivant son regard pâle dans celui de l'homme. "Voyez au-delà des apparences, messire officier. La vie nous mène parfois sur d'étranges chemins et celui-ci n'est pas le premier en ce qui me concerne. Je sais me battre, je saurai me rendre utile, faites-moi la grâce de n'en pas douter."

"Eh bien revenez lorsque vous serez Enchanteresse, mademoiselle, nous en rediscuterons. D'ici là..."

"Non."

Les deux hommes la dévisagent avec une certaine incrédulité, surpris de ce non si catégoriquement posé. Le plus aimable fait remarquer à son comparse:

"Elle ne renonce pas facilement."

"Elle ne survivra pas sur Aliaénon, le capitaine a bien précisé..."

"Qu'il voulait des gens courageux, volontaires et audacieux? Alors conduisez-moi à lui, messires, je suis certaine qu'il m'engagera", le coupe l'Elfe.

"C'est sa vie", fait remarquer le plus aimable en jetant un regard entendu sur la file d'attente qui s'allonge.

"Les nuages sont dans le ciel. Soit, mais ne venez pas vous plaindre que vous n'avez pas été prévenue, c'est une mission extrêmement dangereuse," bougonne l'officier bourru. "Allez, circulez, nous avons du travail."

A peine a-t'elle fait trois pas pour entrer dans le bâtiment qu'un milicien en armes s'approche d'elle pour la conduire à l'intérieur, l'amenant dans un couloir se terminant par une porte close devant laquelle attend toute une petite foule. L'Elfe observa à la dérobée la véritable tour humaine, un guerrier balafré bardé d'une lourde et massive armure de plates et portant une monumentale hache à deux mains. Laewllyn jette un regard à son bâton puis à ses fins vêtements de soie, le contraste saisissant l'amuse et elle n'est pas peu fière d'avoir franchi le poste de garde en étant si pauvrement équipée. Elle découvre ensuite un archer charismatique, balafré lui aussi, de haute taille et principalement vêtu de cuir. Il discute avec une jeune guerrière aux cheveux blonds, elle porte des vêtements inhabituels aux yeux de Laewllyn, mi-robe mi-armure, ainsi qu'une redoutable et magnifique lance à deux lames. Derrière l'archer se tient un autre guerrier, il porte une armure bien plus simple que le premier, mais qui n'en doit pas moins être efficace. Il s'appuie sur une énorme épée à deux mains, un espadon capable de trancher d'un seul coup la tête d'un cheval, son visage est en partie dissimulé par une capuche de laine qui laisse entrevoir sa barbe soigneusement taillée. Il écoute d'un air distant les conversations et, lorsqu'il croise le regard de l'Elfe, cette dernière découvre à ses traits qu'il doit être apparenté à l'archer. Plus proche de la porte, un guerrier aux cheveux roux fait les cent pas, visiblement impatient que la réunion commence. Laewllyn s'amuse à l'observer pendant un petit moment, l'air toujours pressé des humains l'étonne toujours mais après tout ils vivent si brièvement, comment pourrait-il en être autrement? Non loin, dans un coin du boudoir se tient une femme, une humaine aux cheveux bruns dont le visage est masqué par un voile. Une guerrière probablement vive et agile, à en juger par sa rapière et son équipement de combattante légère. Son regard scrutateur et calculateur suit les allers et retours de l'homme pressé, L'Elfe se demande quel lien ils ont, mais l'heure n'est pas propice aux questions.

Un peu à l'écart se trouve une autre femme, une guerrière noiraude d'aspect farouche venant sans doute d'une contrée froide et sauvage d'après son équipement. Elle porte un très grand bouclier décoré d'une tête d'Oliphant, ce qui ne manque pas d'étonner Laewllyn qui croit savoir que les Oliphants vivent dans des pays chauds. Elle secoue discrètement la tête, ce monde n'a visiblement pas fini de l'étonner, tout est si différent de son monde d'origine, et si semblable à la fois. Elle aimerait demander à la femme de lui expliquer l'histoire de son bouclier et du symbole qui l'orne mais, un peu mal à l'aise dans cette auguste assemblée, Laewllyn préfère poursuivre sa muette observation. Elle découvre également un Nain, un vrai et authentique Nain barbu et chevelu, portant une armure qui écraserait n'importe qui d'autre sous son seul poids. Cela ne l'empêche pas de porter en plus une véritable enclume à manche, un marteau de guerre capable sans doute d'aplatir d'un seul coup le plus formidable adversaire. Assis dans un coin se trouve un jeune humain d'aspect négligé, mais son visage est sympathique et jovial ce qui rattrape presque le manque de soin qu'il accorde à sa personne aux yeux de l'Elfe. Elle avise ensuite une bien étonnante créature, en partie humaine et en partie métallique. Il n'a pas l'air vraiment méchant mais son étrangeté le rend inquiétant pour Lawellyn, qui se demande si ces mutilations visant à remplacer un membre normal par une...chose en métal sont choses courantes sur Yuimen. Elle frémit en imaginant quelqu'un trancher son bras pour le remplacer par un membre de matière inerte et pesante, les souffrances intolérables que cela induirait.

Un impressionnant guerrier aux traits Ynoriens, quoique étrangement métissés, entre un peu plus tard dans la salle, quelques secondes avant que la porte ne s'ouvre enfin. Ce qui ne laisse guère de temps à l'Elfe intriguée pour le scruter plus attentivement. Enfin, elle songe qu'elle aura certainement le temps de faire plus ample connaissance avec certains d'ici la fin de cette aventure, pour le meilleur ou pour le pire. Une incroyable créature à moitié homme à moitié tigre, à peu près de la même taille qu'elle mais devant peser au bas mot le double ou le triple de son poids, fait son apparition. L'Elfe se fige, interloquée, en l'apercevant. Il se dégage de lui une aura puissante, féline et sauvage, mais aussi imprévisible d'après ce qu'elle croit en percevoir. Une guerrière Elfe l'accompagne d'une démarche fière et martiale bien que fluide, protégée d'un bustier de bronze et munie de deux épées courtes, voilà un duo redoutable songe Laewllyn, qui remarque soudain avec effarement qu'une fillette s'est glissée dans le groupe. Ou plutôt une jeune fille, rectifie Laewllyn après un deuxième regard.

La troupe entre dans la pièce venant d'être ouverte et l'Elfe suit le mouvement sans se presser, remarquant qu'elle n'est pas la seule à tarder un peu. Une fois le seuil franchi, elle découvre un bureau de bonne taille et deux personnes qui les attendent, la première est certainement le capitaine de la milice, Ynorien et doté d'une prestance considérable. Quant au deuxième, il s'agit vraisemblablement d'un Elfe richement équipé à la longue chevelure...violette, plus assuré qu'il n'est permis et indiciblement sardonique. Certains aventuriers le saluent, le petit homme négligé avec une extrême désinvolture qui fait froncer les sourcils à l'Elfe, se connaissent-ils dont si intimement? Laewllyn s'incline brièvement devant les deux personnage puis se faufile souplement et gracieusement jusqu'à une place libre, curieuse d'en savoir plus sur l'aventure qui les attend.

Le capitaine reluque tout un chacun avec sévérité avant de remercier son monde d'avoir répondu à l'appel d'un certain conseil d'or, mentionné sur l'affiche se souvient Laewllyn, et présente de manière très protocolaire l'Elfe violet comme étant le Seigneur Naral Shaam, héros de la grande guerre d'Aliaénon. L'être à la peau pâle darde sur les aventuriers un regard d'or, irradiant d'une assurance subtilement narquoise, puis entame son discours d'un ton léger. Ses mots ne le sont pourtant pas, que ceux qui craignent de perdre des plumes ou la vie retournent se coucher, et sonnent presque dans sa bouche comme une menace prophétique. Nul ne bronchant dans la salle, il éclate d'un petit rire malsain avant de passer aux choses sérieuses. Il explique une curieuse histoire temporelle dont Laewllyn retient qu'il y a cinq ans, des puissances magiques nommées titans se sont éveillées sur Aliaénon et qu'il y a eu une grande guerre. Ces puissances ont fait, ou font, fluctuer dangereusement l'équilibre arcanique du monde, ce qui expliquerait le décalage temporel. Il évoque ensuite le problème principal, un certain "Sans-Visage" ayant tenté de se faire passer pour un dieu unique et ayant endormi les titans dans ce but, ferait encore des siennes, empêchant le monde de se reconstruire correctement après la guerre.

L'Elfe violet explique encore qu'un ordre de chevaliers a été créé pour le traquer, en vain, et qu'il a donc décidé de recruter une fois de plus des aventuriers de Yuimen pour...tuer l'immortel?! Laewllyn sent une goutte glacée descendre lentement le long de son échine, le Seigneur Naral Shaam doit plaisanter, non? A croire que non car, imperturbable hormis son petit rire agaçant, il poursuit son exposé en précisant qu'il s'agit tout d'abord de découvrir la manière de vaincre ce "Sans-Visage" et de trouver les ressources adéquates. Il précise une nouvelle fois que la mission sera risquée, bien inutilement aux yeux de Laewllyn qui peine encore à croire que cet être à la chevelure excentrique vient de leur demander de tuer un Immortel, cela sur le ton de la plus banale conversation. Enfin, il désigne un registre sur lequel les aventuriers et aventurières décidant de s'engager dans cette mission suicidaire doivent consigner leurs noms et qualités.

(Il plaisante?)

(Il n'a pas l'air.)

(Et comment tue-t'on un Immortel? Par définition cela ne se tue pas!)

(Par définition un mortel meurt, pourtant tu es là.)

(Cela n'a rien à voir, ne changez pas de sujet!)

(Tu as peur?)

(Evidemment! Il faut être folle, ou fou, pour s'en prendre à une puissance.)

(C'est vrai. Qu'attends-tu pour signer?)

(Cessez donc vos sarcasmes.)

(Tu sais déjà que tu vas signer, alors fais-le et qu'on n'en parle plus.)

(Vous êtes désolante lorsque vous lisez mes pensées, vous l'ais-je déjà dit?)

(Pas moins de quatre-cent quarante sept fois.)

Laewllyn lève les yeux au ciel et s'avançe d'une démarche souple et altière vers le registre, observant attentivement les deux importants personnages qui dirigent les opérations, si l'on peut parler d'opération lorsqu'il s'agit de tuer un dieu. L'Elfe violet lui fait un peu froid dans le dos mais la présence de l'Ynorien, peuple réputé pour son sens de l'honneur a-t'elle entendu dire, la rassure un peu: il serait étonnant qu'un officier de sa stature se prête à une mascarade. Elle prend délicatement la plume d'oie mise à disposition, la trempe juste assez pour qu'elle ne coule pas et trace rapidement quelques mots d'une écriture fluide et élégante:

Laewllyn d'Outre-Monde, Enchanteresse en devenir.

Elle repose méticuleusement la plume et souffle sur l'encre pour la sécher avant de se fendre d'une gracieuse révérence aux deux prestigieux héros et de laisser la place aux suivants.

(env.2300 mots)

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Dernière édition par Laewllyn le Jeu 8 Déc 2016 17:45, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Oranan
MessagePosté: Lun 5 Déc 2016 17:41 
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Posant enfin ses pieds sur le sol de la République d'Ynorie, Endar se désengagea bien vite de la populace qui s'amoncelait dans les rues et ruelles de la cité. Un instant, ses yeux se posèrent sur l'architecture de ladite Oranan, cité où se réunissait un conseil de sages tout autant que de personnes inutiles selon lui. Le shaakt ne comprenait pas non plus le goût architectural des ynoriens avec leurs longues demeures et masures et leurs toits courbés et allongés comme les poils d'un chat. Tout n'était que bois précieux sculptés avec soin par quelques ébénistes, argent et pierre dans cette cité où la loi devait être respectée de tous et en particulier la voie des samuraïs, ces étranges guerriers qu'il avait croisé aux portes de Fan-Ming et qui, selon les légendes urbaines, pouvaient défaire mille hommes. Comme toutes légendes et ragots en tout genre, Endar n'accordait à tout cela qu'un intérêt limité. S'il fallait écouter tous les peuples guerriers de Yuimen, d'Aliaénon ou de toute autre monde relié à celui-ci, chaque guerre remportée était le fait de quelques hommes aux capacités fantasmées, tous des guerriers aux prouesses martiales presque divines et à la morale parfaite. Ces héros parfumés, Endar n'en voulait guère, il avait toujours préféré la piétaille, celle qui chargeait en première ligne et avait la plus grande chance de périr avant même d'avoir porté le moindre coup d'épée. Ces hommes et ces femmes là avaient donné leur vie pour la gloire ou l'honneur sans comprendre qu'au fond la seule récompense qui leur avait été accordée était la mort.

Il avait rencontré assez de soldats intelligents et de dirigeants ignorants pour se rendre compte que la guerre n'était pas une histoire de gloire ni même de sauvegarder la paix, elle n'était que l'aboutissement du désir de convoiter le bien du royaume voisin ou de survivre. Peut-être était-ce pour cela que l'ancien capitaine de la division d'archerie se sentait dans son élément lorsque la guerre éclatait, que les tambours résonnaient et que les clameurs s'élevaient de part et autre du champ de bataille.

Longeant la rue principale couverte d'une fine pellicule de givre tandis qu'Oranan était enfermée dans le frima habituel en cette période de l'année, il ne ralentit pas se souvenant presque par cœur du chemin en direction de la milice oranienne et de son fameux poste de garde où un shaakt scribe devait en principe contrôler les entrées et les sorties. Tel ne fut pas sa surprise lorsque le shaakt ne vit aucun dispositif de ce genre près de la milice, la situation avait bien évolué depuis leur victoire contre Vallel. Ce dernier n'avait sans doute pas digéré la trahison de Naral Shaam, peut-être que ladite trahison empêcherait celui-ci de repenser à ses manœuvres contre son armée près des ruines elfiques d'Hoto-Huss. Etrangement, Endar en doutait fort.

Une foule s'était amassée près de la milice, cela poussait, cela geignait, cela pleurait dès lors que ledit pleureur se faisait écarter par les miliciens qui géraient les entrées. Il regarda tout cela d'un air détaché et alors qu'il allait prendre la décision de se joindre à la foule, il vit une ombre se dessiner près d'une ruelle adjacente. Il reconnut cette ombre encapuchonnée qui reposait contre la chaux du mur de la maisonnée à ses deux yeux mauve qui le fixèrent intensément, puis elle se cacha de nouveau dans l'ombre. Endar eut un léger sourire en voyant sa chère Félinia continuer à le surveiller plutôt que d'apporter son rapport à la reine de Khonfas.

(L'élève a dépassé le maître à ce qu'il semblerait. J'imagine qu'elle a amplement mérité sa promotion auprès de la reine.)

Se faufilant à travers la foule, il fendit la masse, les écartant d'un revers de la main pour atteindre les miliciens ynoriens. La réaction ne se fit pas attendre, si certains scandaient son nom, d'autres l'injuriaient, tandis que d'autres se demandaient pourquoi accorder autant d'attention à un elfe noir. Au moins, il ne laissait pas de marbre les habitants et les prétendus aventuriers venus en quête de gloire et de richesse.

Il reconnut l'un des miliciens qui avait été jadis un des piquiers du capitane Matsumoto avec l'aide duquel il avait réussi à protéger sa partie de muraille lors de la dernière bataille aux portes de Fan-Ming. Celui-ci renseigna l'autre milicien peu amène et lui indiqua que le capitaine Atsuhiko les attendait dans son bureau. Le shaakt remercia le factionnaire et se dirigea vers le bureau du capitaine. Le discours du capitaine venait quasiment tout juste d'être fini lorsqu'il pénétra dans les lieux où patientaient déjà plusieurs aventuriers. Il y voyait Xël, le dénommé Karz aux bras en métal barrés par une sorte de scolopendre géant et peu engageant sur l'un de ses bras. Il les salua brièvement avant que son regard ne balaye de nouveau la salle. Il y vit Sirat, l'humoran aux côtés d'une hinïonne dotée de deux épées et adoptant une posture plutôt martiale. Il inclina légèrement la tête, arborant un sourire en coin à l'attention de son vieil ennemi. Il y avait également une autre hinïonne qui portait une arme des plus étranges et portait des marques grises au niveau du visage, une fillette tout juste entrée dans l'adolescence mais qui portait une étrange cape qui ressemblait à une queue de scorpion. Cela lui disait quelque chose, mais il ne parvenait plus à se rappeler où il avait pu voir une telle cape. Il y avait également le fameux sang-mêlé, mi-shaakt mi-ynorien qu'il n'avait rencontré que brièvement lors de leurs réveils dans la salle du fluide.

Son regard se tourna ensuite sur un groupe plus lourdement armé et caparaçonné. Tout d'abord chose rare, un nain roux avait décidé de participer à cette petite sauterie, il portait une armure si massive que nul autre n'aurait pu porter une telle carapace et se mouvoir, sans parler d'utiliser le maillet massif qu'il portait sur son épaule comme s'il ne pesait rien. Si l'armure de glace qu'il portait était assez massive et impressionnante, l'armure portée par un autre guerrier, cette fois-ci humain, au regard mauvais et qui s'appuyait sur une hache massif, était d'une toute autre épaisseur. Un autre homme muni d'un espadon gagnait aussi manifestement ce tournoi réservé aux grosses armes, même si son armure n'était pas aussi massive et que son visage était en parti caché par la capuche qu'il portait.

Les autres aventuriers aussi semblaient des mieux équipés et des plus intrigants. Endar loua la présence d'un autre archer dont le visage se voulant charmeur sans doute était barré d'une longue estafilade. Celui-ci parlait avec une jeune femme aux cheveux blond platine armé d'une double lance et manifestement peu à l'aise soit de par la présence de l'archer soit à l'idée de visiter un nouveau monde. Un autre guerrier portant une armure moins massive et une épée d'une taille plus raisonnable comme la sienne faisait les cents pas, manifestement nerveux. Une femme encapuchonnée et équipée d'une simple lame et de quelques couteaux de lancer le surveillait d'un œil alerte et semblait être doté d'un esprit analytique. Enfin, la dernière femme et non des moindres portait une épée et un bouclier avec une tête d'Oliphant et affichait une apparence farouche, Endar ne sut pourquoi, cette dernière aventurière lui plaisait, sans doute était-ce parce qu'il ressentait chez elle le caractère typique des guerrières nées pour guerroyer.

Finalement pour clôturer cette scène, Naral Shaam fit un discours propre à son caractère farceur et désopilant. S'il ne releva pas les promesses d'une mort rapide mais non sans douleur s'ils acceptaient cette mission, il fut désarçonné par l'annonce du paradoxe temporel. Cinq années s'étaient déjà coulées sur Aliaénon, que sont-ils donc tous devenus ? Plus important était l'annonce de la mission qui n'était autre que tuer le Sans-Visage. Oui, cela il s'en doutait un peu à vrai dire, Naral n'avait jamais caché son intention de le tuer depuis leur réveil. Cependant, il doutait fort que cette volonté de le tuer ne soit la résultante de son envie de voir un Aliaénon paisible, cela avait plus à voir avec son statut d'élu de la déesse Brytha.

Il attendit la fin de son discours et après quelques surprises avec Xël, véritable héros des désœuvrés et la participation de l'humanoïde ayant subi des expériences dans la Tour d'Orsan, il finit par s'exprimer sans aucune gêne après s'être avancé pour signer la feuille et en énonçant ses principales ressources: l'archerie, la magie, les stratagèmes.

- Toujours à organiser des stratagèmes et à fomenter des complots à ce que je vois, Naral Shaam. N'utilise pas Aliaénon comme une excuse pour cacher tes véritables intentions, dis-nous pourquoi tu désires depuis toujours à ce point tuer le Sans-Visage au lieu de chercher à l'emprisonner comme l'ont été ses frères.

(1552 mots)

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Dernière édition par Endar le Lun 5 Déc 2016 20:07, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Oranan
MessagePosté: Lun 5 Déc 2016 19:09 
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Harnachée comme j’ai pris goût à l’être, les épaules agréablement réchauffées par la cape qui m’a été offerte sur Aliaénon, je me retrouve une fois de plus devant les portes de la milice. Dans mon sac, tout le nécessaire pour voyager et survivre, dans ma main, le sceptre, et à ma ceinture, l’épine du Raa’ska. J’entre d’un pas calme dans le bâtiment.

A l’intérieur, ils me reconnaissent sans mal et m’indiquent sans délayer la salle qui accueillera mes débuts dans cette nouvelle mission que je m’impose. Je vois que tous ne passent pas cette première sécurité, et j’imagine que mes récentes actions sur Aliaénon me donnent une sorte de passe-droit pour eux. Alors que je monte les marches, un frisson d’excitation me parcours. Aurai-je pris goût au danger, ou simplement à l’attrait de ce monde étranger ?

Loin d’être menée sous terre, vers le fluide comme je m’y attendais, je suis escortée devant une porte close où patientent déjà quelques aventuriers. Leur visage est marqué par les affres des batailles et je devine en eux des êtres ayant assisté à plus que leur lot de douleur et de souffrances. Pourtant chacun d’entre eux semble prêt à ce qui pourrait nous attendre, répondant à la demande d’Aliaénon comme moi. Est-ce que les mêmes rigueurs se lisent sur mon visage ? Je sais que mon corps n’est pas couvert des mêmes cicatrices qui parcourent les leurs, mais je soupçonne mes yeux de ne plus irradier de cette même innocence qui les animait la veille de mon mariage. La veille de cet évènement qui marqua à jamais mes pas. Mes yeux continue de parcourir ces guerriers. Je vois des hommes comme des femmes et tous me semblent humains, possiblement kendrans ou whiels, à l’exception de ce nain soupesant un énorme marteau de guerre.

Je vois également quelques visages connus et mes yeux se plissent imperceptiblement. Je suis étonnement heureuse de les revoir, même si je ne leur ai jamais réellement adressé la parole. J’y vois comme une continuité, une poursuite de ce que j’ai vécu là-bas. Je n’ai cependant pas le temps de me manifester à eux que la porte s’ouvre pour nous inviter à entrer. Là, je vois en premier le Capitaine Atsuhiko, le visage aussi fermé que la première fois que j’ai posé les yeux sur lui et à ses côtés… Mes yeux se plissent de nouveau d’un amusement fugace en apercevant cette silhouette reconnaissable entre mille. Cet être qui aux cheveux violine qui n’est autre qu’un dragon. Les souvenirs de ses actions, de la grâce mortelle qu’il dégageait lors du siège de Fan-Ming sont marqués au fer rouge dans mon esprit. Ils s’accompagnent de tous ces sentiments que j’ai pu ressentir lors de cette guerre. Atsuhiko prend la parole pour nous remercier d’être en ces lieux et nous présente l’imprésentable, Naral’Shaam. J’avais reconnu ses initiales sur le papier qui nous a été envoyé et je dois avouer qu’il a motivé mon empressement à répondre à cet appel. Il manque des cartes au grand jeu d’Aliaénon, et je sais qu’il les cherche.

L’être qui est un dragon s’avance pour nous mettre en garde face à ce qui va suivre, mais ses paroles n’entachent en rien ma volonté de rejoindre sa quête. Il nous apprend, à ma grande surprise, que cinq années se sont écoulées depuis que nous sommes revenus. Cinq ! Que sont devenus mes chers et tendres amis ? Sont-ils parvenus à leurs buts ? J’ose l’espérer, et j’ai déjà hâte de les revoir. Tant de choses peuvent se passer durant ce lapse de temps… Il nous explique que le problème du Sans-Visage n’a toujours pas été réglé. Toujours en vie, il tente de rassembler des fidèles et met à mal la paix qui règne depuis cinq ans sur le monde. Si un ordre de chevalier a été mis en place pour mettre fin à la menace, il ne parvient pas pour le moment à obtenir des résultats concluants, aussi fait-il appel à nous. Il souhaite que nous… tuions l’Immortel. Une promenade de santé, n’est-ce pas, après avoir assaillit un Titan à dos de dragon ? J’en frémis d’avance. Il termine en nous demandant de ratifier la liste de nos noms et nos qualités.

Un homme, que je reconnais être Xël, s’avance pour signer, tout en posant un sac de pièces sur la table, demandant à ce qu’elles soient envoyées à Kendra Kar pour fonder un orphelinat. Quelle bonté de sa part. Peut-être devrai-je agir de même, et envoyer mon argent auprès des miens… L’ennui est que les miens n’existent pour le moment plus. Le Kel Asheara est pour le moment réduit à l’oubli. Mais il refera surface, je le sais.

Xël s’excuse de ne pas savoir écrire et leur demande de l’écrire à sa place. Craignant que la patience d’Atsuhiko ne soit déjà entamée par la demande du jeune homme, je m’avance en disant :

- Laissez, je vais l’écrire à sa place. Et rajoutez cinq mille yus de ma poche, je vous prie.

Je pose la somme indiquée et prends à mon tour la plume pour écrire, d’une écriture plus tout à fait aussi délicate qu’elle l’était autrefois : « Xël, mage, humain ». J’esquisse un demi-sourire en hésitant à ajouter « beau parleur », mais je m’en abstiens. En-dessous, j’ajoute : « Charis Kel Asheara, Cheikha du Clan des Asheara du Désert d’Imiftil. Enchanteresse ».

Pendant ce temps, un homme que je reconnais comme étant Karz alpague Xël et je me retire discrètement. J’avais déjà vu ces deux hommes ensembles, ils semblent bien se connaître. Karz ajoute une petite pique lancée à Naral et je plisse les lèvres en retenant un sourire.

Le petite elfe membre de la milice s’avance à son tour et signe, suivit du grand semi-chat. Celui-ci est un des êtres que j’ai le moins connu dans cette aventure. J’ai le souvenir de l’avoir vu soutenir les troupes d’Oaxaca, mais peut-être que dans la cohue je me suis trompée, aussi décidé-je de lui laisser le bénéfice du doute. Après tout, s’il se retrouve présent ici, je doute que ce soit pour rien. Il est accompagné d’une guerrière rouquine à l’air patibulaire.

C’est non sans surprise que j’avise alors de la présence d’une enfant parmi nous. Onze ou douze ans, tout au plus. Sans doute un page, me disé-je, juste avant de la voir s’avancer pour prendre la plume et indiquer son nom. Je la regarde faire, les yeux ronds. Enfin, ils ne vont tout de même pas laisser une enfant participer à cette quête, si ? Je regarde Atsuhiko non sans effarement, m’attendant à ce qu’il réagisse, mais il n’a pas l’air prêt à le faire. Finalement, je décide de ne pas intervenir, du moins pour le moment. Peut-être que sa venue est sous des hospices particulières, déjà vues auparavant avec le capitaine.

La dernière à signer est une hinïonne qui appose son nom en silence, sans prononcer un mot. Je me garde bien d’aller jeter un coup d’œil au papier afin d’apprendre leurs noms, ce serait fort impoli de ma part. Ce n’est pourtant pas par manque de curiosité.

Me rappelant les bonnes manières, j’ôte le pan de l’armure de Messaliah qui cache la partie inférieure de mon visage, pour le laisser pleinement dévoilé. J’enlève également le capuchon de mon manteau de braises pour laisser mes cheveux pour une fois s’agiter dans l’air ambiant. J’ai toujours eu pour habitude, par les coutumes de mon clan, de me voiler du regard des gens, mais j’ai depuis le temps appris que se montrer à visage découvert est un des meilleurs moyens d’engager d’autres personnes. Je demeure plus à l’aise sous la chaleur de ma capuche et la protection de mon armure, mais que serait la vie sans quelques petits désagréments ?

Je me tourne vers Naral pour dire, en inclinant avec respect le buste :

- Comptez-moi dans vos rangs une nouvelle fois, Seigneur Naral Shaam.

Je me tourne vers les autres membres pour me présenter, n’hésitant pas à croiser leurs regards si ceux-ci se dirigeaient vers le mien :

- Pour ceux qui ne me connaîtraient pas, je me nomme Charis Kel Asheara, du clan des Asheara du Désert d’Imiftil. Puissent vos pas être sûrs.

L’un des membres du premier groupe aperçu à mon arrivée, un archer aux cheveux noirs, grand et à la prestance manifeste, délaisse la jeune femme avec qui il discutait pour s’approcher de moi avec un sourire engageant. Il se présente sous le nom de Celemar Dongho, de Tulorim et prends alors ma main pour l’effleurer de ses lèvres. Si je ne suis pas à l’aise à l’idée de présenter mon visage, je le suis encore moins si l’on me touche. Je le laisse cependant faire, consciente de mœurs différentes. A ma grande surprise, il semble me connaître, ou du moins connaître mon nom pour l’associer aux membres ayant sauvé Aliaénon. Il ajoute que je suis une alliée précieuse pour l’aventure qui s’annonce.

- J'ignorais que mon nom était ainsi connu. J'ai en effet participé à la première mission sur Aliaénon. Puis-je vous demander, messire Celemar, comment vos pas vous ont-ils menés de Tulorim à la milice d'Oranan, prêt à pénétrer sur un autre monde ?

Celemar lève un sourcil amusé en disant qu’il a entendu de nombreuses histoires sur les Sauveurs d’Aliaénon. Sauveurs d’Aliaénon ! Qui aurait pensé que je sois un jour appelée ainsi ? Il poursuit en disant qu’il n’est donc pas étonnant que mon nom soit connu et que ces histoires couplées aux messages placardés aux murs aient fini de le convaincre, son frère et lui, de faire partie de l’aventure. J’adresse un signe de tête à l’homme qu’il m’indique comme étant son frère, bien plus sombre que mon interlocuteur et lui aussi caché sous sa capuche. Comme je le comprends. Je reporte mon attention sur Celemar.

- Et que vous disent ces histoires ?

Il ne me répond pas directement, en me disant que ces histoires contenaient assurément du vrai et du faux. Je fais une moue désolée, j’aurais bien voulu savoir ce qu’il se dit. Il me demande alors si je n’ai pas quelques recommandations à leur apporter. Je hausse un sourcil, étonnée. Jamais on ne m’a demandé des conseils, encore moins des recommandations sur comment aborder un nouveau monde. Enfin, les temps changent, après tout, et je dois m’y faire, d’autant plus que tout ceci a commencé à mon entrée sur Aliaénon et s’est poursuivi alors que je prenais en main les rênes de la bataille sur le flanc est de Fan-Ming.

- Des recommandations ? Je gage que je n'ai pas grand-chose à apprendre à des guerriers tels que vous paraissez être. Néanmoins, prenez garde si vous devez faire usage de magie sur ce monde, lorsque j'y étais, elle ne fonctionnait pas de la même façon que sur Yuimen et j'ignore si cela a changé depuis la disparition du Sans-Visage. Il est de multiples peuples et cultures sur Aliaénon, comme sur Yuimen, et chacun a ses propres codes. Je crains pour ma part de ne connaître que les gens du désert d'Aliaénon, fort peu les autres peuples.

Il hoche lentement la tête avant de hausser les épaules en disant que la magie ne leur causera pas beaucoup de soucis, à lui et son frère. A leur attirail, je m’en doutais, mais j’ai appris depuis bien longtemps à ne pas me fier à un attirail. Il me demande alors si j’ai une idée sur ce qui pourrait nous aider à résoudre la situation avec le Sans-Visage, et ce qu’il est exactement. Une question ardue s’il en est.

- Je crains les êtres qui pourraient souhaiter s'attacher aux pas du Sans-Visage. Je souhaiterai voir comment ont évolué les peuples du désert, notamment les sorciers Cadi Yangin. Une partie d'entre eux nous a refusé son aide lors de la bataille de Fan-Ming, et je crains les mensonges qu'aurait pu leur dire un être tel que le Sans-Visage. Il s’agit, selon Naral Shaam, d’un être qui se serait fait passer pour une divinité et en en ayant les pouvoirs. J’ignore cependant ce qu’il est exactement et j’ignore si quiconque le sait réellement.

L’homme opine du chef et je vois ses yeux descendre. Non pas pour s’intéresser à mon corps, mais pour se poser sur mon équipement d’un air connaisseur et appréciateur. Il tend alors la main pour toucher mon armure, au niveau du bras. Je retiens un mouvement de recul et vois avec amusement ses yeux s’écarquiller de surprise lorsqu’il approche un peu trop sa main de la fournaise qu’est ma cape pour quiconque autre que moi la toucherait. Il ne commente pas directement ce fait, mais me fait remarquer qu’il s’agit là d’un beau matériel et me demander si je le tiens d’Aliaénon.

- Oui, il provient d'Aliaénon et est gorgé de sa magie, réponds-je.

Celemar semble des plus impressionné et intéressé par l’ensemble lorsqu’il me demande si tous les artéfacts sont chargés de cette magie, là-bas, et s’ils sont tous d’une telle qualité.

- J'ignore si tous les artefacts sont chargés de cette magie, mais j'en ai vu d'autres. Quoi que j’aie entendu dire que sur Yuimen il en existait également avec de tels pouvoirs. Quant à leur qualité... et bien, ils sont fort rares, et forgés pour des êtres de renom pour la plupart.

Il rebondit sur mes mots en constatant que je suis semblablement considérée là-bas, comme une précieuse alliée. Il me demande alors la question que je redoutais, celle de mon implication sur ce monde. Je fais une petite moue gênée, le rose aux joues, avant de dire :

- Mes hauts faits ne sont rien à côté de la précédente propriétaire de cette armure. Avec l'aide d'une personne qui m'est chère, nous avons pénétré dans les tréfonds d'une cité enfouie sous le désert, une cité interdite et maudite dans laquelle nous avons éveillé le Cristal de Vision. Je me suis alors rendue auprès des Cadi Yangin et ait aidé le Seigneur des sorciers de feu à sortir de la prison dans laquelle ses pairs le retenaient. Finalement, une moitié des Cadi Yangin a rejoint notre cause et nous a suivi jusqu'à la bataille de Fan-Ming où nous avons affronté les troupes d'Oaxaca. Là, nous avons déchaîné nos pouvoirs, éveillant ainsi le Titan de la Magie, un être aussi gigantesque que terrible, tel que mon esprit peine encore à se le remémorer. Là... et bien, croyez-le ou non, messire Celemar, poursuis-je avec un demi-sourire, une nuée de dragons a brisé les cieux pour nous emporter et, ensemble, nous avons attaqué le Titan de Magie. Nous n'avons su qu'après qu'il s'agissait là d'une machination de Naral Shaam pour éveiller les titans et leur rendre la place qu'il jugeait la leur sur Aliaénon.

Le jeune homme semble alors impressionné par mes propos, ce qui accentue mon rougissement, mais Atsuhiko coupe notre conciliabule. Manifestement, toutes les personnes présentes ont fini de signer et la suite nous attends. Une suite que j’ai hâte de voir. J’adresse néanmoins à Celemar un petit sourire, sans doute aurons-nous le temps de reprendre cette discussion plus tard.

~2500 mots.

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 Sujet du message: Re: Oranan
MessagePosté: Jeu 8 Déc 2016 03:46 
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Localisation: Aliaénon
C’est sans encombre que je me glissai dans la ville, encore épuisé de ma route, mais je n’eus guère le temps de me reposer. Je ne voulais pas risquer de rater le rendez vous. L’affiche que j’avais eue en main était placardée un peu partout dans la cité. La vie grouillait dans les veines d’Oranan, comme à son habitude. Nul aurait pu deviner que cette ville fut menacée, il n’y avait pas encore si longtemps. Le ciel était bleu en ce début d’après-midi, les rayons du soleil sur la peau provoquaient une chaleur agréable, mais les passages à l’ombre des édifices rappelaient la menace de plus en plus proche de l’hiver, en provoquant des frissons à chaque caresse glaciale du vent.

À quelques rues de la milice, le trafic commençait déjà à se faire plus dense, et j’en compris bien vite la raison. Un poste de contrôle avait été installé à l’entrée. Des aventuriers de tout ordre, et de toutes régions s’étaient amassés et attendaient leur tour, pour se faire refouler dans la majeure partie des cas. Un peu plus en retrait, une foule de badauds particulièrement agitée tentaient d’apercevoir ce qui se passait.
Je ne compris pas tout de suite cet engouement avant d’être obligé de traverser cette foule. Parmi elle, des histoires étaient racontées. Mes oreilles captèrent bien des rumeurs sur des héros qui avaient sauvé l’Ynorie et Aliaénon, de retour pour voler une nouvelle fois au secours de cette dernière. D'un coup, je comprenais mieux ce rassemblement. Je me demandais bien ce qu’ils avaient pu y faire ? Bien des légendes devaient circuler sur eux. J’avais déjà hâte d’apercevoir les fameux héros et de pouvoir mettre une image sur les dires.


Le flot des aventuriers était strictement encadré par les miliciens qui faisaient tampon. Parfois, on pouvait entendre un milicien lever la voix pour calmer quelques agités. On trouvait de tout parmi cette masse. Des hommes mal équipés à ceux qui n’arrivaient à tromper personnes transpirants de maladresse malgré leur équipement de qualité. Je fis tout pour rester discret parmi les volontaires sans pour autant vouloir paraître suspect. J’étais paré d’une capuche noire dissimulant en partie mon visage ayant préféré accroché mon casque à mon sac. Il ne me servait pas à grand chose dans l’instant. Mes cheveux étaient devenus si longs après un an en campagne que relâchés, ils formaient un barrage plus ou moins efficace sur les contours de mon visage. De plus, je n'avais pas eu le temps de me raser sur la route. Une barbe de quelques jours ornait mon visage. Je ne savais pas de trop de quoi j’avais l’air, mais je doutais qu'un individu autre qu’un intime puisse me reconnaître aisément. Ce qui ne m’empêcha pas de me tendre lorsque je sentis le regard d’un milicien se poser sur moi. 
En position surélevée, il surplombait la foule avec sérieux. L’arc qu’il avait en main ne se banda pas, mais son attention était bien reportée vers moi. Je tentai de fuir ce regard pesant, mais je compris qu’il était trop tard lorsqu’il me désigna à l’un de ses confrères. Ce dernier traversa la foule encadrée de deux miliciens pour l’écarter et se dirigea dans ma direction. Je ne bougeai pas le moindre orteil, mais mes yeux fixaient avec appréhension ces trois formes se frayant un chemin dans la foule pour m’atteindre.

« Écartez-vous ! Écartez-vous ! » Criaient-ils sans ménagement à ceux qui m'étaient un peu trop de temps à leur dérouler le tapis. 

Un petit homme Ynorien,  au regard perçant émergea des dernières masses le séparant de moi. De son œil sombre et perçant, il m’analysa du haut jusque en bas, observant avec minutie chaque pièce de mon équipement. Je le sentis hésiter un instant lorsqu’il plongea son regard dans le mien, mais il finit par me libérer du suspens qui commençait à devenir pesant.

« Vous n’avez pas l’air d’un amateur qui n’a rien à perdre. Suivez-moi. »

Je suivis l’homme qui me permit de me frayer un chemin à travers la foule. Il marchait d’un pas pressé, et nul doute qui s'il avait d’aussi grandes jambes que les miennes que j’aurais eus dû mal à le suivre. Ses pas nous menèrent à l’intérieur et nous traversâmes les multiples couloirs de la milice. Arrivé au détour d’un énième couloir, il m’intima d’attendre, le temps que le capitaine Atsuhiko daigne nous recevoir dans son bureau. Car je n’étais pas seul. Le couloir bien qu’assez large était déjà plein à craquer d’aventuriers. On pouvait s’assurer d’une chose, ces hommes et ces femmes transpiraient d’une certaine expérience. Rien à avoir avec les « aventuriers » mal aguerris encore bloqués devant l’entrée.

Quitte à attendre, je me décidai à jouer le jeu de l’observation. Le premier homme que j’aperçus était un grand guerrier à la stature plutôt imposante, ou était-ce l’effet de son armure qui avait l’air d’une solidité à toute épreuve. Les cheveux court, le visage parsemé de cicatrices, il attendait impassiblement, appuyé sur sa hache d’une dimension impressionnante.

Près de la porte un guerrier roux avec épée à sa ceinture semblait nerveux. Incapable de rester sur place, il ne cessait de faire des va-et-vient devant la porte du bureau du capitaine. Peut-être cela faisait-il longtemps qu’il attendait. Il avait en tout cas attiré l’attention d’une femme à la chevelure tressée qui suivait ses moindres aller et venu. Elle était intrigante sous son masque qui cachait la partie inférieure de son visage. Je remarquai sa lame qui était aussi fine qu’elle avait l’air tranchante. Elle devait être agréable à manier.

À quelques pas, une femme aux cheveux blonds discutait sans grande conviction avec un archer brun au visage balafré. Un guerrier robuste, légèrement en retrait les écoutait distraitement sous sa capuche.

Non loin, une femme à la chevelure brune bardée d’un équipement impressionnant. Elle avait l’air intrépide derrière son bouclier. Le style qu’arboraient ses équipements laissait penser qu’elle venait de contrées lointaines. J'étais prêt à parier sur Nosveris, sans trop risque de me tromper. Il était étonnant que des aventuriers viennent de si loin pour répondre à cette appel. Il y avait aussi un nain roux au visage tatoué. Il avait l’air aigri. Comme la plupart des nains que j’avais croisés dans mon existence. Parfois, les préjugés…

En parlant de préjugé, un être attira particulièrement mon attention. Il était de petite taille, avait la peau sombre et ses traits tant elfiques qu’humains laissaient deviner un métissage. Un demi-Shaakt, probablement Ynorien à en juger par ses yeux en amande. C’était bien la première fois que j’en voyais un. Je ne fus pas à l’aise. La race des Shaakts était bien celle que j’aimais le moins après celle des Garzoks et des Segteks que je haïssais en tout point. En tout cas s'il était aussi redoutable que son arme en avait l’air, il ne fallait pas se fier à sa petite taille. Un autre Shaakt, un pur race cette fois, faisait aussi parti des choisis, il arborait  un équipement hétéroclite mais de for bonne facture.

Au menu des elfes, on trouvait aussi une Hinïonne au visage tatoué et aux atours précieux. Une de ses compatriotes à la plastique irréprochable rodait au côté d’un humoran massif. Je crus d’abord à un mirage, mais cette bête de muscle, je la connaissais. Sirat. Nous avions combattu ensemble sur l’île volante. Il avait l’air encore plus puissant qu’auparavant en témoignait l'assurance qui transperçait dans son regard. Nous nous étions quittés dans une taverne à Kendra-Kâr après un dernier repas partagé. Cela me fit plaisir d’apercevoir un visage amical, mais je n’osai pas me diriger vers lui. Pas ici. 

Mais le plus étrange d’entre tous était un homme grand, blond, aux yeux d’or cernés de noir. Ce sont ses bras qui m’étonnèrent le plus. Des prothèses d’une technologie qui semblaient avancées. Cela me fit curieusement penser à ma jambe. Elle aussi semblait presque fait du même orfèvre. Cette chose était l’un de mes mauvais souvenirs que m’avait laissé Aliaénon. Je ne savais pas d’où cette chose m’était venue. Seuls des flashes bien peu nombreux d'une amputation me parvenaient. Le plus étrange est que parfois, je sentais encore la douleur de cette jambe que je ne possédais pourtant plus.

Un scolopendre immonde entourait son bras gauche. J'avais l'impression d'avoir déjà vu ça quelque part. Décidément, cet homme me semblait bien intriguant. Il aurait été bien intéressant de me rapprocher de lui, j'étais curieux pour ses bras. Il fixait du regard un homme à la petite barbe qui n’avait franchement pas l’air de grand chose. Et parmi tous ces combattants, on trouvait même une enfant. Il était évident qu’elle n’avait rien à faire ici, mais je n’allais pas commencer à m’occuper des problèmes des autres. C’était son affaire.

J’eus à peine fini de détailler tout le monde que la porte du bureau s’ouvrit pour laisser entrer la longue procession. Je rentrai paris les derniers, cherchant naturellement à me faire discret. Siégeant à son bureau, je pus reconnaitre le capitaine Atsuhiko et son air fier derrière son bureau. Je ne l'aimais pas beaucoup. Je ne me rappelais que trop bien qu’il m’eût frappé au visage avant d’entrer sur Aliaénon. L’une des dernières choses dont je me souvenais d’ailleurs.

Mais lorsque mon regard se posa sur l’homme à ses côtés, je fus estomaqué, et dû vivement baisser la tête pour cacher mes yeux ecarquillés et ma bouche béante sous ma capuche. Je ne le connaissais que trop bien. C’était Naral Shaam. Que faisait-il là ? Ce traitre ! Je l’avais vu. Lui aussi, ce jour-là, avait accepté l’offre d’Oaxaca. Cet homme savait ! Et il était la trônant fièrement avec son sourire narquois aux côtés du capitaine. Cela me semblait être un cauchemar.

Dissimulés au mieux derrière les aventuriers devant moi. J’écoutai attentivement les paroles du Capitaine. Il présenta son invité Naral Shaam comme héros de la Grande guerre d’Aliaénon ce qui m’estomaqua deux fois plus. Je ne comprenais rien à ce qui s'était passé. 

Il prit alors la parole s’adressant à nous. Nous recommandant en guise d’introduction de faire demi-tour si nous avions peur pour notre intégrité physique. De ce côté, j’avais déjà été servi, mais j’hésitai tout de même à faire marche arrière pour une raison évidente. Il était évident que tôt ou tard Naral Shaam finirait par me reconnaître. Et que ferait-il à ce moment ? Me dénoncerait-il ou garderait-il le silence ? Chacune des possibilités me paraissait hautement crédible. Je maudissais cet homme d’être aussi mystérieux et imprévisible.

Évidemment personne n’avait quitté le bureau... Toutes les personnes ici avaient l’air résolument déterminé.

L’elfe gris continua donc son discours. Sans omettre de le ponctuer de son rire que je détestais tant. Je compris bien vite à travers ses mots qu’il y avait effectivement parmi nous des héros de la Grande Guerre d’Aliaénon. Je me demandais bien qui en faisait partie. Cinq années s’étaient écoulées en ce monde depuis la dernière venue des héros. Nous avions comme mission de tuer le Sans-Visage une entité réputée immortel qui rassemblait des fidèles des quatre coins d’Aliaénon. Une sorte de dieu ? Je n’étais pas sûr d’avoir tout assimilé, mais l’enjeu paraissait insurmontable. Tuer un Immortel ? Quel non-sens. En attendant, ce n’était pas ma priorité. Je voulais avant toute chose retrouver mes souvenirs perdus là-bas. C’était le point de départ avant toute manœuvre ici ou sur l’autre monde.

Je fus pris intérieurement de panique lorsque à la fin de son discours, Shaam nous intima de venir ratier nos informations sur un parchemin posé sur le bureau du capitaine. Non seulement, c’était me mettre en plein dans son champ de vision, mais c’était aussi écrire sous ses yeux mon identité. Bonjour la discrétion…

Inutile de préciser que je ne me pressai pas à y aller, laissant volontiers les autres volontaires passer avant moi. J’avais trois choix, faire demi-tour et laissé Aliaénon aux oubliettes, aller ratifier comme tout un chacun et prendre le risque de me faire démasquer, ou ratifier une fausse identité. Que disait déjà cet adage… ? C’est le risque qui paye ? Hé bien, c’est ce que nous allions voir.

Englué dans le mouvement des uns et des autres, je rabattis au mieux ma capuche et tentais de dissimuler au mieux mon visage à l’aide de mes cheveux. Bénissant dans le même temps le temps de ne pas m’avoir permis de me raser. Je profitai de l’intervention du Shaakt qui invectiva le dragon mauve et de la diversion d’une autre femme masquée qui se dévoila en se présentant à l’assemblée. Je m’approchai alors du bureau avec grand calme, même si les battements de mon cœur écrasaient ma poitrine. Je pris la plume et ratifiai une identité complètement fausse. "Kyo Taïki", mon ancien maître. C’est le premier nom qui me vint à l’esprit. Avec raison, il fut ma seule compagnie durant la dernière année écoulée. Une fois ma besogne accomplie, je me retournai pour retourner à ma position initiale.

-2159 Mots

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"L'objet de la guerre n'est pas de mourir pour son pays, mais de faire en sorte que le salaud d'en face meure pour le sien."

- George Smith Patton


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 Sujet du message: Re: Oranan
MessagePosté: Jeu 8 Déc 2016 20:28 
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Une fois arrivée devant la milice, j’eus le plaisir de constater qu’une file formée d’aventuriers hétéroclites s’était formée, voulant partir pour Aliaénon. La milice, propre et efficace, s’était organisée avec minutie. Des postes de passage avaient été installés et l’on devait se présenter devant le milicien pour espérer pouvoir passer. Je n’avais aucune inquiétude sur le fait de passer ou pas, de toute façon au cas où je savais que je pouvais tout à fait prouver que je savais me débrouiller. Et puis, nous aidions régulièrement la milice à attraper les malfrats, quand l’on ne faisait pas la guerre. Je pourrais toujours évoquer cela. Bien que je ne fusse pas une Sauveuse d’Aliaénon, je passerais sans problème.

La question que je me posais était : Devais-je doubler ? Après tout, j’étais venue pour aider, pas pour attendre entre un vieillard impotent persuadé de pouvoir encore aider et un gamin incapable d’utiliser un lance-pierres voulant devenir une légende. Après, leurs intentions étaient louables, mais ils feraient mieux de réfléchir avant de venir ici. Pourquoi perdre du temps à faire la file alors que l’on va se faire refouler à coup sûr ? Seuls ceux confiants en leurs capacités devraient venir. Et non, utiliser une canne n’en est pas une.

Je passai donc discrètement devant, évitant d’attirer les regards. Je touchai l’épaule d’un gamin afin d’attirer son regard et passer discrètement devant lui. Dès qu’il me vit, il comprit ce qu’il s’était passé et se renfrogna. Après tout, il serait refoulé, en me gardant ma place il avait été plus utile. Les aventuriers défilèrent devant moi, certains plus ridicules que d’autres. Quand enfin, et je dis bien enfin, ce fut mon tour, je soupirai de soulagement avant de me présenter devant le milicien.

- « Bonjour. » dit-il en me détaillant de la tête aux pieds.

- « Bonjour. Je suis venue…enfin, il me semble que la raison de ma venue est évidente. J’ai été envoyée afin d’aider Aliaénon. Je sais me battre et me servir de ce katana que vous voyez là. »

- « Et quoi Mademoiselle ? Nous avons refusé d’autres aventuriers qui semblaient bien plus aptes que vous à remplir cette mission. Allez-y, développez. Pourquoi vous et pas d’autres ? » me demanda-t-il, d’un ton blasé.

Son attitude m’agaça et malgré le fait qu’il soit poli, son ton, sa gestuelle montrait bien que tout cela ne le passionnait pas, loin de là. Je me calmai, afin de rester tout aussi polie qu’il l’avait été, même si ma seule envie à l’heure actuelle était de le frapper.

- « Ne vous fichez pas de moi, je vous prie. Dites-moi que vous allez engager ce gamin pour sa maîtrise du lance-pierre et ce vieil homme pour sa maîtrise de la canne aussi. J’ai été envoyée ici, par des personnes qui pourraient vous faire renvoyer. Je suis l’Héritière de la Maison Kusubarachi, celle qui aide régulièrement votre milice. Celle qui forme depuis longtemps l’élite guerrière du pays, celle de ce pays. »

- « Bien, vous voulez vous rendre sur Aliaénon ? Puisque vous en semblez si sûre, je veux bien vous laisser passer, mais comme je ne suis pas non plus stupide au point de vous croire sur parole, je vous demande d’apporter ne serait-ce qu’une preuve de ce que vous avancez. Non pas que votre nom soit un laisser-passer mademoiselle, ne vous y trompez pas, seulement j’aimerais ne pas avoir de problème avec cette famille après. »

En lui souriant, je lui sors le pendentif de notre famille, preuve de mon appartenance à cette Maison.

- « Voici le pendentif des Héritiers. Et si vous ne me croyez toujours pas, je demande à voir votre supérieur qui lui me reconnaîtra. On verra s’il appréciera de savoir que vous avez refoulé l’Héritière de la famille qui les aide… »

Ces paroles sortirent de ma bouche tel du fiel. La menace de faire appel à l’autorité formelle que représente son supérieur hiérarchique est une des seules choses qui pourrait faire bouger ce stupide milicien.

- « Oui, oui bien sûr, je vous en prie. »

Ôtant le ruban pour enfin me laisser passer, je ne me fis pas prier pour y aller et me fis conduire jusqu’à une porte close, que j’ouvris doucement afin d’entrer dans la pièce.

Il s’y trouvait plusieurs aventuriers, dont un homme à l’air dur et la mine sombre, se tenant à l’écart du monde comme s’il lui en voulait, sa main caressant une impressionnante hache à deux mains. Je suis bien forcée de reconnaître que le seul mérite des hommes est leur force, quand ils ne s’en servent pas pour malmener les femmes. De femme, il y en avait trois ici. Il y en avait une à la chevelure aussi blonde que le blé, qui semblait gênée mais qui répondait d’une manière polie à un archer au visage balafré. Elle déformait quelque peu ses traits. Il conservait tout de même une certaine prestance, son charisme étant perceptible. Une troisième personne conversait avec eux, bien qu’elle paraisse absente. Il s’agissait d’un guerrier aux traits masqués par une capuche que sa longue chevelure et une barbe bien taillée. Il ressemblait à l’archer balafré, il était possible qu’ils soient frères. Une autre, une jolie rousse au visage masquée, scrutait l’assemblée, son regard analytique faisant des allers-retours sur chacun d’eux. La dernière présente était une brune à l’air décidé, équipée comme les habitants de Nosvéris, et possédant un bouclier frappé à l’effigie d’une tête d’Olifant. Celui le plus proche de moi était un rouquin qui semblait attendre impatiemment quelque chose. La réunion probablement. Le dernier était un nain roux, possédant une immense hache de guerre, habillé d’une grosse armure.

D’autres étaient présents, comme une Hiniönne aux multiples tatouages et bijoux sur son visage, au port de tête altier, à la chevelure argentée et soignée. Une autre Hiniönne aux cheveux de feu et au corps de rêve, se mouvait aux côtés d’un humoran. Grand, à la musculature développée, une aura de puissance se dégageait de lui. Un homme au teint basané, arborant un grand sourire, entra à leur suite dans la pièce. Il y avait également un autre homme…ou du moins, pouvait-on encore l’appeler ainsi ? Un homme, avec des plaques de métal qui composait ses bras, ses yeux d’or, et une bestiole immonde sur son bras. Je frissonnai de dégoût devant cette immondice de la nature, par réflexe, malgré que je n’en eusse pas peur. Il y avait aussi un semi-elfe, cela se voyait sur son visage, mélange de traits Ynoriens et Shaakts.

Mon étonnement fut porté à son paroxysme quand une jeune enfant, presque jeune fille, passa également avec nous. Elle ne devait pas avoir plus de treize ou douze ans, et même si la valeur n’atteint pas le nombre des années, cela m’étonnait tout de même. Mais si elle était passée, c’est qu’il ne fallait pas la sous-estimer. Un Shaakt était aussi présent, elfe aux cheveux noirs et à la peau olive. Une jeune femme arriva, jeune femme au bas du visage masqué, jeune femme dont seuls les yeux bleus étaient clairement visibles. Le dernier après moi, un homme à la barbe fournie qui cachait ses traits, aux cheveux blonds, encapuchonné, entra également.

Je les suivis, entrant dans une pièce ou sans ceux qui avaient attendu, seuls deux êtres auraient été présents. Un Ynorien, le Capitaine Atsuhiko, que j’avais déjà eu l’occasion de voir, du temps où j’aidais la milice, présent quelques fois ou j’y étais. Je n’avais pourtant jamais eu l’occasion de lui parler, chargé de tout ce qui concernait Aliaénon. L’autre personne présente était un elfe aux cheveux mauves, couleur hypnotisante, et aux yeux d’or. Son armure était d’une raffinerie peu commune, et une robe couvrait le bas de son corps. Le Capitaine Atsuhiko prit la parole, nous remerciant d’être venus et présenta l’elfe à côté, le Seigneur Naral Shaam, héros d’une guerre qui se serait déroulée sur Aliaénon. Il lui laissa la parole, et l’elfe nous gratifia d’un sourire assuré, presque narquois. Il nous annonça que ceux qui auraient peur de laisser la vie dans cette mission devraient quitter ce bureau sur le champ pour aller vivre des jours plus tranquilles dans une quelconque taverne.

Personne dans l’assemblée ne bougea d’un pouce. Je devais personnellement m’y rendre, parce que je devais prouver à mon grand-père que j’étais digne de mon titre, de mon rang, de ma vie. Je ne bougerais pas. Le rire de Naral, un rire désagréable, retentit dans la pièce, rire qui m’énervait au plus haut point. Il précisa que nous étions prévenus, et passa au sujet qui intéressait tout le monde ici : Aliaénon. Il nous expliqua que si le temps avait pu paraître court depuis que les Sauveurs d’Aliaénon étaient revenus sur Yuimen, il n’en était rien là-bas, puisque cinq ans s’étaient passés depuis l’Eveil des Titans, gigantesques et puissantes entités magiques ayant dangereusement fait basculer l’équilibre arcanique de ce monde, d’où le décalage. Explication plausible. Son rire agaçant retentit encore une fois, avant de nous apprendre que de nombreux changements avaient eu lieu sur Aliaénon pendant ces cinq ans.

(Tu m’étonnes, en cinq ans il a dû s’en passer des trucs là-bas. Ce n’est pas comme si en une demi-décennie rien ne pouvait changer.)

Si de nombreux changements avaient eu lieu, une chose restait inchangée : le Sans-Visage, qui d’après le peu que j’en avais entendu était une espèce d’entité divine, qui il y a des siècles endormit les Titans afin de se faire passer pour la seule divinité présente sur Aliaénon était toujours vivante et recueillait des adeptes parmi tous les peuples de ce monde, perturbant l’équilibre et la paix. Même si un ordre spécifique de chevaliers avait été créé par le Conseil pour mettre fin à ses jours, cela restait sans résultat, et il avait alors proposé d’encore une fois faire appel aux aventuriers de Yuimen, dont le courage n’avait d’égal que la perspicacité. Je me retins de m’esclaffer devant cette déclaration. Certains aventuriers après tout n’avaient d’aventuriers que le nom, et n’était pas aventurier qui veut. Je ne prétendais pas à ce titre : c’est qu’il m’irait bien mal, le bougre. Celui d’Héritière me convenait bien pour l’instant.

Naral dit donc que ces deux qualités seraient celles dont nous devrions nous servir pour mener à bien cette quête, qui consistait dans les grandes lignes à tuer un immortel.

(Qui est l’imbécile qui ne s’est pas dit que s’ils n’y réussissaient pas, c’était parce que c’est impossible de tuer un immortel ? Le mot n’est-il pas assez explicite à leur goût ? Et évidemment, demander à d’autres de le faire pour eux est la meilleure solution ? Je veux voir ce génie.)

Son rire, qui commençait sérieusement à m’énerver, retentit encore une fois dans la pièce, atteignant mes pauvres oreilles d’humaine normalement constituée, faites pour entendre la beauté de la musique, des voix cristallines et des rires d’enfants, mais pas pour supporter ce genre de bruitages odieux. Expliquant qu’en fait la tâche consistait surtout à découvrir comment faire pour s’en débarrasser, et récolter les ressources nécessaires pour y parvenir, il nous confia qu'elle serait ardue et nous invita pour commencer à aller ratifier une liste de nos noms et qualités, pointant sur un bureau un parchemin, posé à côté d’une plume d’oie et d’encre d’Ynorie.

L’homme au teint basané s’y dirigea le premier, mais non pas pour ratifier la liste. Il demanda un service au Capitaine, posant sur la table une bourse, dont le contenu tinta quand il toucha la table. Il expliqua qu’il s’agissait de sa récompense, environ vingt mille Yus, et qu’il voulait en faire don au Roi de Kendra Kâr, le Roi Solennel, pour construire un orphelinat qui serait ensuite confié à une femme des bas-quartiers nommée Méli. Il expliqua que si les enfants avaient un endroit ou grandir, le peu de criminels présents dans la ville finirait par disparaître, que le Roi pourrait construire des hommes au lieu de bâtir des prisons. Il précisa que s’il envoyait un homme, il pourrait piocher dans le sac pour le Cynore, avant de changer de sujet, expliquant qu’il ne savait pas écrire mais que son prénom était Xël et que ses qualités étaient d’être mage, beau garçon et d’avoir une bonne droite, puis, revenant à l’orphelinat, dit au Capitaine qu’il pourrait juste le lui garder si vraiment il n’avait personne.

L’homme au monstrueux scolopendre s’avança, ajoutant dix mille Yus de sa poche, et disant à son ami, appelé affectueusement « M’sieur le Clodo », qu’il était heureux de le revoir, puis proposa son aide pour l’orphelinat avant d’aller ratifier la liste, qualifiant Naral de lézard. Il remplit la liste avant de provoquer l’elfe en lui demandant s’il devait rajouter qu’il était résistant à la mauvaise haleine draconique. Cet homme-là, pour autant que sa sale bestiole n’attirait pas ma sympathie, l’avait toute entière. Il semblait honnête et droit, mais pas naïf pour autant. Il n’était pas « trop bon, trop con », comme le disait l’expression.

Ce fut ensuite au semi-elfe de ratifier la liste, puis d’affirmer que Naral devrait à nouveau compter sur sa présence. Discret, j’appréciais ce genre de personne qui ne créait jamais de vague sur son passage, ou rarement. L’humoran le fit ensuite, avant d’afficher un sourire moqueur à l’attention de Naral. La petite fille, se faufilant à sa suite, frêle et presque fragile comparé à l’humoran, massif, la ratifia ensuite. Qu’avait-elle marqué comme qualités ? Je me le demandais. Qu’est-ce que cette enfant, presque adolescente, pouvait bien avoir marqué ? Le tour de l’Hiniönne rousse arriva, qui écrivit elle-aussi, laissant ensuite sa place à sa consœur blanche, qui d’une démarche fluide, presque irréelle, alla ratifier la liste de l’elfe au rire odieux. L’elfe blanche laissa donc sa place à l’elfe noir, qui la signa lui aussi avant d’aller demander à Naral d’arrêter ses stratagèmes, et d’utiliser Aliaénon comme une excuse, l’interrogeant sur ses réels desseins.

Deux personnes n’avaient pas encore ratifié la liste de l’elfe, à par moi. L’humaine mystérieuse aux yeux de saphir et l’homme intrigant aux traits cachés. Rajoutant cinq mille Yus pour le projet de Xël, elle ratifia la liste de son nom et de celui du mage, avant de se tourner vers Naral pour l’assurer de sa présence et de se présenter à nous avec politesse comme Charis Kel Asheara, du clan des Kel Asheara du désert d’Imiftil. Allant discuter avec un des aventuriers qui n’avaient pas eu besoin de ratifier la liste, l’homme alla la compléter de son identité, me laissant la liste, sans rien dire, sans rien faire d’autre.

Alors, c’était à mon tour de la ratifier. Je pris doucement la plume d’oie, plus habituée aux pinceaux Ynoriens, la trempai lentement dans l’encrier et la plume survolant le papier, écrivit, traçant les lettres d’encre sur le parchemin de l’elfe aux yeux d’or :

« Hisaya Kusubarachi, Héritière des Kusubarachi, guerrière. »

Dès que ceci fut fait, je fis un pas en arrière, posant la plume pour ceux qui en auraient besoin.

[2505 mots]

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 Sujet du message: Re: Oranan
MessagePosté: Ven 9 Déc 2016 22:55 
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Je me retrouvai donc bien malgré moi devant l'entrée de la milice d'Oranan, à faire la queue au milieu d'une bande de personnes toutes plus bizarres et patibulaires les unes que les autres, armées jusqu'aux dents pour la circonstance... Si on voulait faire le tour de mon maigre équipement, c'est à dire une simple dague de chasse, je devais vraiment faire tâche... Si seulement j'avais réussi à semer cet odieux bonhomme qui voulait que je le rembourse d'une manière ou d'une autre... Hélas, il se tenait bien là, à quelques mètres de moi, se frottant les mains avec un sourire salace accroché aux lèvres, tenu en respect par un cordon d'admirateurs et de soldats postés en renfort pour l'occasion. Je devais réfléchir vite et bien si je voulais pouvoir m'esquiver aussi discrètement que possible, car il ne faisait absolument aucun doute que j'allais être refusée au poste de passage où chaque personne désireuse de participer à l'aventure proposée devait se présenter au sergent présent afin qu'il puisse juger de l'utilité de chacun... Et à voir la carrure de certains des refusés, un simple regard sur moi suffirait à me faire éconduire...

Tout se bousculait dans ma tête, fallait-il que je baratine le milicien? Fallait-il que je me résigne et accepte mon triste sort? Ou même fallait-il que je pousse un hurlement en criant au viol... ce n'était là que des mauvaises idées et les vivats du public ne m'aidait pas à en trouver de meilleures, ça me donnait même très mal à la tête... Ce fût alors au tour de mon compagnon de marche peinturluré de passer devant l'officier, j'allais être la prochaine et le tournis commençait à me gagner, deux minutes passèrent comme l'éclair et la silhouette farouche de mon prédécesseur disparu dans la foule avec un grognement. Je ne voulais pas y aller... mais ça poussait derrière et je n'eus d'autre choix que de me présenter au sergent. J'essayai donc de reprendre contenance et assurance avant de me lancer, avec plus ou moins de réussite, surtout que comme je m'en doutais, il ne se retint pas de sourire à grandes dents en me regardant de la tête aux pieds...

"Bonjour, soldat! Je souhaiterais moi aussi faire partie de l'aventure!

- Très bien, quelles sont vos qualifications? Et vous avez intérêt à vous montrer convaincante car vous ne partez pas gagnante...

- Je suis fille de diplomate et par conséquent initié aux arts politiques et stratégiques. (pipeau, pipeau! Écoute bien ma flûte!) Par ailleurs je suis également très douée avec les chiffres!

- Mouais, admettons que vos talents politiques puissent nous être utiles, comment pouvez-vous me prouver que vous êtes bonne mathématicienne?

- Hmm... Tenez par exemple, votre bâtiment là, si mes calculs sont bons, il est composé de 16 132 pierres (Au pif!) à moins que... il ne vous manque pas une pierre à la tour Est et une sous une échauguette?

- Comment voulez-vous que je le sache... Soit vous êtes vraiment fortiche, soit vous vous payez ma tête, et je pencherais plus dans ce sens... Allez! Dégagez! Y-a des gens qui bossent ici!


Loupé! Je n'avais plus qu'à me résigner... Les soldats restés sur le côté s'écartèrent pour me laisser dégager la place, et qui se trouvait là, bien en face de moi? Le rondouillard dégarni, avec son sourire à moitié édenté étirant ses lèvres tordues dans un rictus de satisfaction et de victoire totale. Mon mal de tête ne fit qu'empirer, le sang battant mes tempes à tout rompre. Je tentais bien de me faufiler et de lui échapper, mais le tournis commençait à me gagner et il fut plus rapide que moi et m'agrippa le bras pour m'attirer à lui. Une douleur fulgurante me traversa alors de part en part, me faisant lâcher un cri suraigu tandis qu'une force obscure s'expulsait de mon corps, explosant littéralement.
(((hrp : souffle de thimoros)))

Mon agresseur fut touché de plein fouet et projeté au sol, ainsi que les curieux les plus proches. Pour ma part, je m'écroulais également, comme vidée de mes forces, mais étrangement bien dans ma peau, comme si toute ma peur, tout mon ressentiment, s'étaient envolés. J’entendais tout autour de moi un brouhaha indescriptible, des soldats s'approchaient de moi, arme au poing et prêts à s'en servir, alors que leur supérieur hurlait de m'amener à lui. Deux d'entre eux m'attrapèrent par les coudes et me hissèrent sur mes jambes flageolante avant de me trainer jusqu'à la table, sous les regards intrigués, voir même haineux pour ceux qui avaient été touchés par l'explosion d'ombre.

"Alors ma jolie! Je vois qu'on à des talents cachés! On pourra p'tete faire quelque chose de vous si les petits cochons ne vous mangent pas avant! Vous êtes engagée. Allez! Zou, y-en a d'autres qui attendent..."

Les deux miliciens qui me soutenaient me trainèrent donc à moitié vers l'entrée du grand bâtiment, puis à travers différents couloirs jusqu'à une porte qui venait juste d'être ouverte et dans laquelle s'engouffraient une dizaine de personnes. Pour ma part, j'étais totalement extatique, comme un zombie, incapable de réfléchir, juste d'observer avec une sorte de détachement total, comme à travers une longue-vue... Une fois pénétré dans la salle, tout le monde prit place à droite et à gauche, certains allant se caler contre un mur, d'autres restant bien campé sur leurs pieds. Ils avaient en tout cas tous l'air de farouches guerriers rompus au maniement des armes, que la plupart portaient de manière ostentatoire.

Je n'entendis qu'à moitié se qui se disait. Quelques aventuriers parlaient entre eux, jusqu'à ce qu'un personnage haut en couleur prenne la place du soldat qui discourait jusqu'à maintenant. Je captais des mots qui n'avaient pas forcément de sens pour mon cerveau ralenti, des rires horripilants, puis il y eut un peu plus de mouvement dans la pièce, chaque personne présente s'approchant tour à tour du bureau pour écrire sur un bout de papier. Lorsqu'ils furent tous passé, mes gardes du corps me tirèrent jusqu'à ce que je leur fasse signe de me laisser.. Trébuchante, je m'approchais également du parchemin, pour y voir une série de signatures.

Si il y avait une chose que je savais faire, et de très belle manière, c'était écrire. J'avais presque été élevée dans ce but. Je pouvais le faire et je le fis! J'apposais ainsi mon nom au bas de la page, d'une magnifique écriture calligraphiée, avant de retourner d'un pas trainant vers le mur le plus proche pour m'affaler complétement contre lui et me laisser tomber au sol.

Sans m'en rendre compte, je venais de signer pour un long périple auquel je n'avais aucune envie de participer...

((1104 mots))

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 Sujet du message: Re: Oranan
MessagePosté: Sam 10 Déc 2016 03:50 
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Une fois ma transaction avec Wulfin terminée je le saluai avant de quitter sa boutique. Mon accompagnateur montrait des signes d'impatience malgré la crainte que je lui infligeais. Il ne voulait visiblement par faire attendre Tora. D'après mon estimation le rendez-vous du sergent de la milice était dans un quart d'heure et nous avions le temps. Sans doute mon guide voulait se garder une marge en cas d'incident. C'était tout à son honneur et je le suivis sans poser de problèmes.

Après un moment à marcher dans les rues d'Oranan, le garde s'arrêta à un endroit, me signifiant que nous étions arrivés, à un croisement qui me sembla d'abord quelconque. Entre deux rues totalement anodines. En regardant plus attentivement aux alentours je sus que nous étions sans doute au bon endroit en voyant au loin une longue file de personnes. Tous ces gens avaient des allures bien singulières, visiblement des mercenaires de tous bord, et attendaient devant le même bâtiment. j'avais vu quelques affiches dans la ville similaires à celle que Tora m'avait montrée, apparemment les volontaires avaient répondus nombreux à l'appel.

Nous finîmes par apercevoir Tora un peu plus loin dans une autre rue. Le sergent était en pleine discussion avec un groupe de soldats. Lorsqu'il nous vit il congédia les hommes d'armes et se dirigea vers nous avec un air chaleureux. Il remercia mon guide pour ces services en lui promettant qu'il parlerait de lui en bien à ses supérieurs. A mon grand amusement le visage de l'homme s'illumina et je crus même qu'il allait faire un malaise. Au final, après avoir assister sur le fait qu'il était à notre total service, il finit par disparaitre dans la foule pour retourner à la muraille y faire son rapport.

Tora se tourna vers moi et m'expliqua la situation. Nombreux étaient les candidats à la quête et devant le milice, c'était le bâtiment que j'avais repéré antérieurement, un contrôle rigoureux de tous les candidats été effectué. Cependant, en sa qualité de sergent, il avait obtenu de m'épargner ce processus auprès de son capitaine. Je pourrai pénétrer par une porte secondaire dans le bâtiment sans avoir à me soumettre au moindre jugement. Il ajouta d'un air gêné mais honnête que mon aspect physique aurait probablement dérangé si la populace me voyait lié aux affaires de la milice. Silencieusement j'acquiesçais et me mis à suivre qui me montra le chemin avec enthousiasme.

Avant que nous arrivions à ladite entrée détournée, il m'expliqua en quoi je pourrais être utile à la milice une fois sur aliaénon. Si l'organisation gérait les voyages entre les deux mondes elle était dans la plus grande partie dans l'ignorance de ce qui se passait de l'autre côté du portail. Mon rôle serait d'envoyer toutes les informations que je jugerai pertinentes vers yuimen.
En somme une sorte de journal de mes découvertes. Cette mission ne me déranges pas du tout. Coucher les choses sur papier m'aiderait à mieux les assimiler et d'après ce que j'avais compris je n'aurai aucune surveillance directe. Le cas échéant je pourrais toujours reporter voire falsifier mes rapports, personne n'aurait les moyens de vérifier.

Tora conclut en disant que l'étendu de son aide s'arrêtait à partir du moment où je franchirai les portes de la milice. A partir de ce moment il n'aurait plus aucun pouvoir sur ce qui allait arriver. Il avait parlé de moi en des termes dithyrambiques au capitaine mais maintenant il allait falloir que je m'en montre digne. Hochant la tête et le remerciant silencieusement des efforts qu'il avait fait pour moi je poussai sans un bruit la petite porte en bois à l'arrière du bâtiment. Tora me suivit encore un moment pour m'orienter dans l'édifice. Il m'amena jusqu'à une grande salle au moment où un groupe hétérogène pénétrait dans cette dernière par une autre entrée, plus grande.

Il me laissa et je me tapis dans l'ombre pour observer à loisir les personnages qui entraient sans qu'aucun ne semble me remarquer. Les individus semblaient tous avoir des ethnies, des modes de vie et des capacités différentes. Mais tous émanaient une force certaine et avinât des traits particuliers. L'un semblait être un bâtard homme bête, une autre avait des bras métallique dont l'un était orné d'un scolopendre à l'aspect affreusement réaliste, une autre n'était visiblement encore qu'une enfant...Ils y'en avaient encore beaucoup mais mon examination fut interrompue lorsque j'entendis une voix forte prendre la parole. Je dus me décaler un peu et m'exposer à la vue de tous pour pouvoir discerner l'orateur. Cela n'avait pas d'importance car tous avait les yeux rivés sur l'homme et je passai inaperçu.

« Aventuriers de tous bords, merci d’avoir répondu à l’appel aux volontaires m’ayant été transmis par le Conseil d’Or d’Aliaénon. J’ai l’honneur et le privilège de vous présenter le Seigneur Naral Shaam, héros de la Grande Guerre d’Aliaénon et signataire de l’appel qui vous a été transmis. Je lui donne la parole pour expliciter séant les raisons de votre venue ici. »

Lorsque j'étais sorti de l'ombre il m'avait jeté un rapide coup d'œil, que personne ne sembla remarqué, et continua son discours. Tora l'avait visiblement bien averti de ma présence. Au nom du seigneur qu'il évoqua je sentis un léger sentiment de malaise m'envahir. Instinctivement je vérifiai les notes que j'avais prises avec Azra. en effet, avec le sans visage, il était une des deux personnes dot il m'avait dit de me méfier. Savoir que ma mission dans aliaénon se déroulerait probablement sous son commandement me déplut profondément. Il avança un peu pour s'adresser à l'assemblée qui se tenait devant lui.

Je pus alors le voir et je ne pus m'empêcher d'être un peu déçu. Le nécromant m'avait parlé d'un dragon mauve et je m'étais imaginé une créature mythique ou au moins un être y ressemblant. En dehors de ces cheveux couleur mauve rien ne le rattachait à l'image que je m'étais élaborée. Cependant une force redoutable émanait de lui. Il n'était peut être pas un monstre de légende mais il était surement un être d'une puissance terrifiante. J'en vis à me demander pourquoi une telle personne pourrait demander l'assistance, au peu au hasard, d'âmes volontaires lorsqu'après une futile tentative d'intimidation il répondit en partie en ma réponse.

« Hihihi. Bien. En cela vous êtes prévenus. Passons au sujet principal : Aliaénon. Si le temps a pu vous paraître court depuis le retour en ces terres des Sauveurs de ce monde, rescapés de la Grande Guerre, il n’en est rien sur le monde où vous allez vous rendre. Près de cinq ans se sont écoulés depuis l’Eveil des Titans, puissantes et gigantesques entités de magie ayant fait fluctuer dangereusement l’équilibre arcanique des vastes landes de ce monde. D’où le décalage temporel, sans doute. Hihihi. De nombreux changements ont eu lieu lors de cette période de reconstruction, mais il reste un problème qui n’a pas encore été réglé : le Sans-Visage, entité traîtresse ayant voici des siècles endormi les Titans pour se faire passer auprès des habitants d’Aliaénon comme leur unique divinité court toujours. Toujours en vie, il parvient même à recueillir des fidèles dans divers peuples, perturbant l’équilibre et la paix ambiante. Un ordre spécifique de chevaliers a été façonné par le Conseil pour mettre fin à cette menace, sans résultat jusqu’ici. Aussi ai-je proposé de faire appel, à nouveau, aux aventuriers de Yuimen, dont on dit que le courage n’a d’égal que la perspicacité. Deux qualités qu’il vous faudra pour mener à bien cette quête. Il s’agira ainsi, dans les grandes lignes, de tuer un immortel. Hihihi. Et plus spécifiquement, de découvrir avant tout comment faire pour le vaincre, et récolter les ressources nécessaires pour ce faire. La tâche sera ardue, sans aucun doute. Probablement dangereuse. Aussi, avant de commencer, je vous invite, si vous êtes toujours partants, à ratifier cette liste de vos noms, prénoms et qualités. »

Apparemment il y avait déjà eu une expédition dans ce monde. J'en ignorais tout et les détails ne me semblaient pas plus importants que ça. Ce qui attira d'avantage mon attention fut l'évocation du sans visage et des titans. Le premier savait donc réussi à vaincre les autres. Azra m'avait prévenu que les titans étaient un menace ainsi donc par opposition le sans visage serait donc une entité positive? En soit rien dans le discours du dragon mauve ne montrait en quoi le sans visage était une créature néfaste. Si bien que si Azra ne m'avait pas mis en garde aussi bien contre lui que contre le dragon violet j'aurais sans doute assumé que celui qui avait enfermé les titans voulait le plus grand bien. Ce Naral Shaam ne m'inspirait définitivement pas conscience et je me promis que je ne suivrai pas aveuglément ses ordres. Une fois dans l'autre monde je ferais en sorte de me forger ma propre opinion.

Cependant malgré le peu de crédit que je lui accordai une partie de son discours m'intéressa particulièrement. "Tuer un immortel". Par définition la chose était impossible mais pour accomplir mon objectif, la mort du roi des marais, il faudrait également que j'accomplisse l'impossible. J'avais définitivement bien fait de m'engager dans cette mission. J'étais maintenant persuadé que, dans cet autre monde, je pourrais atteindre des niveaux de puissance que je n'aurai jamais pu espérer atteindre en restant sur yuimen.

Répondant à l'appel de Naral Shaam les personnes présentes dans la pièce avancèrent les unes après les autres vers le bureau pour signer la liste comme demandé. Certains parlèrent un peu semblant visiblement se connaitre déjà. Je ne fis pas attention aux conversations, j'étais perdu dans mes pensées. Quand la dernière personne de la salle eut ratifier la grande feuille je me résignerai finalement à sortir de l'ombre.

Malgré l'agitation qui avait suivit les signatures, les aventuriers désœuvrés s'étaient mis à parler entre eux attendant la suite, je ne passai pas inaperçu. Plusieurs visages se tournèrent vers moi alors que je parus soudainement apparaitre dans la salle. En ignorant les regards je me dirigeai droit vers la liste et en dernière position y ajoutai les mots que m'avaient dicté celui que m'avait engagé.

"Algariès des blakalangs. Recommandé par le sergent Tora."

[1686 mots]

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 Sujet du message: Re: Oranan
MessagePosté: Sam 10 Déc 2016 09:37 
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A peine entrée dans la cité Ynorienne, Anastasie prit la direction de la milice, impatiente de découvrir ce nouveau monde. Elle n'avait que peu suivi l'histoire des Sauveurs d'Aliaénon, qui étaient revenus sur Yuimen près d'un an après leur départ, occupée au moment de leur retour avec des affaires plus pressantes, mais avant de se rendre à Oranan elle avait pris soin de rattraper son retard, demandant des explications à ses proches. Seulement il s'était rapidement avéré que son retard sur les événements connus étaient dérisoires, car ceux-ci étaient peu nombreux. Elle avait donc appris qu'Aliaénon était un autre monde... Et que les Sauveurs d'Aliaénon... Avaient sauvé Aliaénon. Elle s'était cependant attardée sur la description de ces aventuriers, espérant en rencontrer quelques uns revenus aider leurs anciens camarades. Mais avant de les rencontrer, un obstacle de taille l'attendait : la file d'attente. Car elle n'était même pas encore en vue de la milice lorsqu'elle aperçut celle-ci, débordant sur la rue perpendiculaire qu'elle empruntait.

( Tous ces gens font la queue pour courir au devant du danger ? ) s'étonna-t-elle.

Ils étaient pourtant généralement une minorité à oser affronter la mort, quel que soit la récompense promise. Mais, alors qu'elle arrivait face à la milice, à quelque vingt mètres de file d'attente plus loin, elle remarqua un détail important : l'immense majorité des gens présents n'étaient même pas armés, ou très légèrement. En somme, la plupart des personnes retardant son arrivée à la milice n'étaient que de simples curieux espérant pouvoir jeter un œil à l'intérieur et découvrir les secrets que cachaient le bâtiment. Il fallait dire qu'une demande d'aide venu d'un monde extérieur était quelque chose d'assez intriguant, surtout après que le monde entier se soit mis à chanter les louanges des héros revenus de ces contrées lointaines. Mais cela n'empêchait pas Anastasie d'être profondément agacée par ce contretemps.

Tâchant de ne pas trop se faire remarquer, elle se plaça ainsi au bout de la queue, attendant sagement son tour. Cette dernière n'avançait cependant que lentement, car si la plupart des badauds étaient éconduits très rapidement, ils restaient souvent pour tenter de négocier, d'argumenter voire de soudoyer dans le seul but d'entrer à l'intérieur, « juste pour observer », disaient certains. D'autres, armurés, armés, n'acceptaient que difficilement le refus des miliciens, tâchant de prouver leurs valeurs pendant, parfois, de longues minutes, à gesticuler dans tous les sens en maniant des épées souvent trop grandes pour eux. Mais quoiqu'ils disent, aucune des personnes présentes ne parvenaient à pénétrer dans l'établissement, tous, sans exception, se faisant refouler par les deux gardes de l'entrée. L'examen devait être particulièrement sévère. Pour autant, Anastasie ne craignait en aucun cas de se voir refuser l'accès à la milice, certaine de ses capacités.

Mais, lasse d'attendre encore et toujours, après près de vingt minutes passées à n'avancer que petit pas par petit pas, la Comtesse poussa un profond soupir et quitta la file d'attente. C'est ainsi qu'elle passa le long de la file d'attente, ignorant les regards courroucés ou étonnés qui se posaient sur elle, jusqu'à arriver à gauche de la personne tentant de faire montre de ses formidables talents aux miliciens.

« J'ai déjà tué une banshee, » se vantait-il.

C'était un jeune ynorien sortant tout juste de l'adolescent, aux muscles inexistants et à la tenue très éloignée de ce que l'on aurait pu attendre d'un combattant.

« Moi j'en ai tué deux, » s'interposa Anastasie en se positionnant devant lui.
« Hey, attends un peu, c'est mon tour, » s'énerva-t-il en lui attrapant l'épaule.

Mais elle l'ignora royalement, gardant son regard rivé sur le milicien ; celui-ci l'observait étrangement, sans qu'elle ne put déchiffrer ses pensées.

« C'est mon tour ! » répéta le gamin en tentant de repasser devant la jeune femme, mais celle-ci le repoussa plus ou moins doucement, l'écartant de la file.

« Tu es recalé, et c'est pour le mieux, » lui fit-elle.
« Elle a raison, » acquiesça le milicien.

L'intéressé protesta quelques secondes avant de finalement s'éloigner en maugréant. Son cas résolu, le garde se tourna de nouveau vers la Comtesse.

« Il faut faire la queue, comme tout le monde, » ordonna-t-il.
« Voyons, vous savez qu'aucun des gens derrière moi ne rentreront dans votre milice, » argumenta-t-elle.

Le soldat sembla hésiter quelques secondes, mais bientôt il abdiqua, s'intéressant au cas de la jeune femme.

« Deux banshees, donc, » lança-t-il.
« Et une goule à deux têtes, » ajouta-t-elle en arquant le dos avec fierté.

L'homme fronça les sourcils avant de continuer, d'un ton plus dur.

« Lorsque l'on ment, il vaut mieux rester simple. »

Ce fut au tour de la Comtesse d'afficher une mine contrariée. Doucement pour ne pas montrer de signe d'agressivité, elle sortit Perçombre de son fourreau et la présenta au milicien, assez près pour qu'il puisse l'observer mais assez loin pour qu'il comprenne qu'elle ne souhaitait pas qu'il y touche.

« J'ai percé ses deux cœurs et ses deux cervelles avec ceci, » annonça-t-elle. « J'ai failli y rester. Plusieurs fois. Et il a causé la mort de cinq de mes hommes. Alors ne dites pas que c'est une invention, je vous prie. »

Son ton s'était fait dur, presque cassant, même si elle ne pouvait lui en vouloir d'avoir du mal à avaler une telle histoire. Après tout peu de personnes dans le monde pouvaient se vanter d'avoir survécu à une rencontre avec une goule à deux têtes, alors ceux disant la vérité lorsqu'ils prétendaient en avoir éliminé un étaient presque inexistants. Mais le garde, après avoir observé la Comtesse pendant quelques secondes alors que, derrière elle, la foule commençait à se faire impatiente, finit par hocher la tête.

« Veuillez m'excuser, » demanda-t-il. Puis, faisant un pas sur le côté, il ajouta : « Entrez, quelqu'un vous montrera le chemin. »

Ce fut au tour de la jeune femme d'opiner du chef avant de s'exécuter, pénétrant dans la milice sous les regards ébahis des badauds derrière elle.

Là, un homme lui fit signe de la suivre avant de la mener à travers quelques dédales de couloirs. Lorsqu'ils arrivèrent à destination, il n'eut pas besoin de le lui préciser, la situation étant on ne peut plus claire ; car là, attendant devant une porte close, se tenaient pas moins d'une vingtaine de personnes, tous, ou presque, très clairement habitués au danger.

Après une rapide inspection, la jeune femme en reconnut quelques uns en se remémorant les descriptions qu'elle avait déjà pu entendre d'eux ; la plupart avait été entendue très récemment. Et pour cause, si elle ne se trompait pas, six d'entre eux faisaient partis des si célèbres Sauveurs d'Aliaénon sur lesquels elle s'était renseignée quelques jours auparavant.

Le premier qui attira son attention fut Kiyoheiki. C'était un très jeune semi-shaakt directement affilié à la milice d'Oranan et qui avait fait parler de lui tant par ses origines que par ses exploits. Ou du moins, c'est ce qu'elle avait entendu Sérénité, sa meilleure amie, lui dire. Une ou deux années auparavant, elle aurait su avant tout le monde ce genre de détails et les aurait bu sans vergogne, faisant partie de ces mégères qui ne trouvaient rien de mieux à faire que de radoter sur ces héros des contrées lointaines à longueur de journée. Il était étonnant de remarquer à quel point elle était loin de ces considérations à ce jour, ayant été obligée de prendre des cours de rattrapage pour s'informer sur des histoires connues du grand public. Toujours était-il que ce Kiyoheiki, par son âge et ses origines, attirait son attention. Et son respect, également.

Rapidement, son regard se porta sur Karz, le plus identifiable d'entre eux. Et pour cause, il n'avait plus grand chise d'humain, étant constitué en grande partie de métal. Elle en aurait presque été bouche bée si elle n'avait pas été prévenue au préalable. Mais, étrangement, ce n'était pas le détail le plus flagrant à son propos. Non, ce qui le distinguait de tous était l'immense insecte entortillé autour de son bras. Anastasie réprima un frisson de dégoût face à cette vision.

Venait ensuite un shaakt qui aurait été tout à fait banal s'il n'avait pas transporté un attirail plutôt impressionnant. Endar, si elle ne se trompait pas. Il n'était pas vraiment celui qui avait le plus marqué son esprit, mais, peut-être était-ce son air, peut-être ses origines, elle avait du mal à voir en lui quelqu'un de bien.

Un peu plus loin venait une femme, probablement des Dunes, au visage partiellement recouvert. C'était Charis Kel Asheara, si sa mémoire ne lui faisait pas défaut. Il n'y avait pas non plus grand chose à en dire, si ce n'était qu'elle semblait très réservée, plus que la moyenne des étranges personnes réunies dans ce couloir.

Il y avait ensuite un jeune homme qu'elle reconnut immédiatement, malgré l'absence de trait distinctif fort, comme étant un certain Xël. De tous ceux présents en ces lieux, il était celui qui avait le moins l'air à sa place. Moins encore que la gamine aux cheveux noirs qui semblait ne même pas avoir entamé sa puberté. Il faisait l'effet de tout sauf d'un aventurier.

Pour terminer venait Sirat, un colosse humoran maniant un énorme marteau de guerre. En plus d'être un Sauveur d'Aliaénon, il était connu à Kendra Kâr – ou du moins au sein de la noblesse – pour ses liens de parenté avec un haut fonctionnaire de l'armée kendraine. Il n'était pas le seul fils bâtard non reconnu d'un gradé trop lâche pour assumer ses responsabilités, loin de là, mais son ascendance worane le plaçait néanmoins dans les plus connus de ceux-ci.

Il n'y avait pas, malheureusement, Lothindil, elfe grise mondialement connue ayant également participé à la première mission en Aliaénon. Ce n'était pas la seule qui manquait à l'appel, loin de là, mais elle était l'unique personne, hormis Sirat, dont Anastasie avait entendu parler bien avant cette histoire.

En dehors de ces célèbres héros, il y avait également d'autres aventuriers à l'allure plus ou moins commode. D'abord deux hinïonnes, dont l'une était pourvue de nombreux tatouages et autres bijoux de métal sertis à même la peau, et l'autre arborait un air peu engageant. Venait ensuite un Ynorienne tout juste adulte au corps sculpté pour le combat et un kendran blond qui dégageait une forte aura guerrière. Il faisait parti des personnages les plus intéressants de la pièce, sans conteste. Mais les autres ne semblaient pas non plus être des petites frappes. Il y avait un homme à l'air asocial qui arborait des cheveux ras et une imposante armure de métal, un guerrier roux faisant les cents pas, une combattante armurée à la manière des Nosvériens, un nain tout ce qu'il y avait de plus typique ou encore un grand ténébreux au visage caché par une capuche maniant l'espadon. Mais ils n'étaient pas ceux qui avaient le plus attiré l'attention de la jeune femme. Elle avait rencontré bon nombre de personnages de leur acabit, portant d'impressionnantes armures de plates ou d'énormes épées à deux mains. Il était cependant plus curieux de voir en ces lieux une jeune femme à l'armure souple et au visage masqué.

Les deux dernières personnes présentes marquèrent l'esprit de la Comtesse d'une autre manière, cependant. Le premier, un archer au visage balafré mais au regard charmeur, par défaut, simplement car il tournait autour de la seconde. Et celle-ci car Anastasie la connaissait. Et pas seulement de réputation, mais également de vue, à une occasion. C'était une femme de son âge à peu près, peutêtre un peu plus âgée, à la chevelure platine et à la lance double. Les points communs ne s'arrêtaient pas là, car Elysea D'Astarnor, puisque tel était son nom, était également affiliée au Temple de Gaïa de Kendra Kâr et cotoyait donc certains des prêtres que la Comtesse connaissait personnellement. Elles n'avaient jamais été présentées personnellement mais, si elle n'avait jamais eu vent de faits précis la concernant, la jeune femme savait que son homologue était loin d'être une amatrice lorsqu'il s'agissait de combattre les morts-vivants.

Désireuse de s'entretenir avec cette femme, Anastasie s'en approcha rapidement. Arrivée à sa portée, elle attendit un trou dans sa conversation apparemment unilatérale avec l'archer pour s'immiscer, offrant un simple hochement de tête poli à ce dernier pour se concentrer sur sa semblable.

« Elysea D'Astanor, n'est-ce pas ? Anastasie Terreblanc. Nous n'avons jamais été présentées, il me semble. »

L'intéressée sembla ostensiblement heureuse de l'intervention de la Comtesse et, sautant sur l'occasion pour échapper aux griffes du charmeur qui tentait probablement de la séduire depuis de longues minutes déjà, s'éloigna de ce dernier, comme pour avoir une conversation plus discrète. Le sourire pincé, elle déclara qu'elles n'avaient nul besoin d'être présentées puisque chacune connaissait le nom de l'autre. Logique implacable s'il en était, mais qui ne faisait pas grand cas de la politesse la plus élémentaire de mise à Kendra Kâr. Non pas qu'Anastasie gardait le moindre attachement aux nombreuses règles sociales régissant la société de son enfance. Elle enchaîna cependant aussitôt vers une formule qui en disait long sur la ferveur de sa dévotion à Gaïa, laissant entendre que la Déesse avait mené ses pas vers Aliaénon. Décidant de ne prendre la question que comme une métaphore, Anastasie hocha la tête avant de désigner Perçombre, dans son fourreau.

« Oui, » acquiesça-t-elle. « Si mes informations sont exactes, c'est là-bas qu'est cachée la dernière relique du Chasseur d'Ombres. Et vous, c'est le simple altruisme qui vous mène dans ces contrées ? »

A ses paroles, son interlocutrice la regarda d'un air sombre avant de lui répondre, sévère, qu'elle avait effectivement eu vent de ses recherches assidues. Ce dernier mot, suivant une hésitation ostensible, était un euphémisme dont la Comtesse avait saisi le sens sans la moindre difficulté. Ainsi Elysea avait entendu parler de son désaccord avec Adam, qui voyait d'un mauvais œil la multiplication de ses expéditions et la réduction de ses temps de repos. La disciple de Gaïa continua néanmoins sur la question d'Anastasie, changeant de conversation pour lui parler des rumeurs qu'elle avait pu entendre à propos d'Aliaénon. Ainsi ce monde serait dirigé par l'Ombre et la Mort, si bien qu'un peuple entier serait composé de morts-vivants. Il était de son devoir d'apôtre du Temple d'apporter la Lumière de la Déesse sur cet univers étranger, selon elle. Des tournures de phrases qui pouvaient tant signifier un altruisme sincère et purement bénéfique qu'un fanatisme religieux dangereux, en somme. Mais il était bien trop tôt pour juger des paroles de son homologue ; elle savait à quel point les fidèles les plus dévots, disposant de leur propre champ lexical, pouvaient paraître illuminés pour les personnes les moins habituées à leurs discours. Revenant d'abord sur le sujet initial, à savoir la recherche de la cuirasse du Chasseur d'Ombres, Anastasie reprit la parole, commençant par une question rhétorique, les sourcils légèrement froncés.

« N'est-il pas notre devoir, à nous, élus de Gaïa, de retrouver des armes terrifiant Tal'Raban lui-même ? »

Puis elle se radoucit et revint sur la seconde conversation, liée aux motivations d'Elysea.

« Evidemment je ne viens pas que pour cela. Mais je mentirais si je disais que l'attrait de l'aventure n'en est pas l'une des raisons. Enfin, je suppose que toutes les personnes présentes sont là par passion autant que par altruisme. N'est-ce pas ? »

Son discours pouvait paraître anodin, peu important, mais il était en réalité une certaine manière de se dédouaner pour la jeune femme. De mettre ainsi tout le monde dans le même panier. Si tous les aventuriers du monde faisaient cela autant pour la gloire et l'adrénaline que pour aider leurs prochains, alors on ne pouvait pas le lui reprocher à elle, personnellement. Et surtout elle ne pouvait pas se le reprocher à elle-même.

Mais immédiatement, Elysea lui donna tort, profitant de l'occasion donnée par Anastasie de discuter plus longuement de ses torts, à elle qui n'avait pas voulu écouter les sages paroles de ses anciens. Car il était, selon elle, de leur devoir de les écouter, à eux qui en savaient plus qu'elles, et de prendre en compte leurs conseils. Un moyen très peu voilé pour reprocher à Anastasie sa désobéissance vis à vis d'Adam. Elle continua même jusqu'à insinuer qu'une passion trop forte, sous-entendue comme celle de son interlocutrice, pouvait mener à l'Ombre, ajoutant qu'être motivée par l'orgueil ne ferait que l'éloigner de Gaïa. Anastasie serra les dents, piquée au vif. Elle venait ni plus ni moins d'insinuer que la Comtesse pourrait se détourner de la voie de la Déesse à cause de sa vanité.

Puis elle continua sur le sujet parallèle, moins subversif, crachant que la plupart de leurs camarades n'étaient là que pour l'argent et non par altruisme comme l'avait suggéré la petite noble. Elle semblait écœurée, et plutôt à raison selon l'avis d'Anastasie, mais celle-ci, restée bloquée sur la conversation précédente, s'en moquait bien. Elle n'avait pas digéré les insultes à demi-mot proférées par Elysea et revint immédiatement dessus, plaidant pour son cas face à ses accusations.

« Que diriez-vous si Adam vous demandait de ne pas vous rendre en Aliaénon parce qu'il a peur que vous fassiez passer votre lutte avant votre vie ? » demanda-t-elle. « Ne pensez-vous donc pas qu'il est nécessaire que certaines personnes se sacrifient pour le bien des autres ? Vous avez dit qu'il était de votre devoir d'apôtre d'apporter la lumière en Aliaénon... Et pourtant vous pourriez en mourir. »

L'intéressée rétorqua qu'elle était effectivement prête à se sacrifier pour cette cause, mais que si Adam l'avait jugée inapte à apporter la lumière sur Aliaénon elle aurait renoncé, préférant écouter ses conseils que de se jeter dans cette lutte. Et, incisive, elle ajouta que le cas d'Anastasie était différent, désignant ses reliques comme les preuves de cet état de fait. La Comtesse serra une nouvelle fois les dents. Que voulait-elle dire par là ? Que les équipements d'Isaac étaient plus importants pour elle que le combat pour lequel ils étaient rassemblés ? C'est en tout cas la lecture qu'elle en fit.

« Adam ne m'a nullement jugée inapte, » rétorqua-t-elle. « Il s'est immiscé dans ma vie personnelle, me demandant de prendre du bon temps plutôt que de repartir lutter contre Tal'Raban. S'il m'avait crue trop faible, peut être l'aurais-je écouté. »

C'était une façon très biaisée d'expliquer les faits, mais les exposer tels qu'ils étaient réellement auraient certainement l'effet de donner raison à Adam, prouvant l'obsession qu'Anastasie éprouvait concernant ses dangereuses escapades. Elle poussa un soupir puis, comme pour se convaincre ellemême, ajouta :

« Nos sages, comme vous dites, ne sont pas omniscients. Et les écouter aveuglément sans essayer de comprendre les choses par nous-mêmes n'est pas plus pertinent que de les ignorer. »

Un argument qui avait beaucoup de sens, mais qui passa complètement sous le nez d'Elysea, qui répondit que si les sages n'étaient pas omniscients, Gaïa l'était pour eux et ils avaient son oreille attentive. Elle continua ainsi que si elle avait tenté de comprendre Adam, elle aurait sûrement saisi que celui-ci désirait qu'elle prenne du repos avant de se lancer à l'assaut d'Aliaénon, qui demanderait plus de ressources qu'elle n'en avait lors du retour de son précédent voyage, particulièrement éreintant. Anastasie voulut rétorquer qu'elle n'avait pas besoin de tant de repos, qu'elle était parfaitement capable de survivre à Aliaénon même après une telle épreuve, mais l'ouverture des portes du bureau du Capitaine Atsuhiko l'interrompit avant qu'elle n'ait pu prononcer ces mots.

Tous les aventuriers furent alors invités à l'intérieur de l'office, dans laquelle les attendaient deux hommes. L'un était très clairement le milicien Ynorien : une armure de première qualité, une pilosité entretenue et la carrure d'un meneur d'hommes, il avait tout du haut gradé militaire. Le second était un elfe, certainement hinïon, à la peau pâle et aux cheveux violets vêtu d'une armure splendide couvrant une longue robe tombant jusqu'à ses pieds. Il émanait de lui une rare aura de puissance et de danger.

Le premier des deux, après les avoir remercié de leur réponse à l'appel à l'aide du Conseil d'Or d'Aliaénon, leur présenta son comparse comme étant Naral Shaam, héros de la Grande Guerre de ce monde lointain et signataire de la demande de renforts. L'intéressé lança un regard à l'assemblée, un sourire mystérieux aux lèvres, avant de s'adresser à tous d'un ton léger, presque anodin. Il leur annonça, selon ses propres mots, que ceux qui avaient peur de ne pas ressortir entier de cette mission, voire de ne pas en sortir vivant, pouvaient s'en aller immédiatement pour se reconvertir en pilier de taverne. Evidemment, tous les aventuriers présents avaient dû subir le jugement des miliciens pour se rendre en ces lieux, ce qui signifiait qu'aucun d'eux n'était le genre de personne assez faible ou sage, selon les points de vue, pour répondre à ce genre de provocations.

Son petit effet passé, le dénommé Naral Shaam continua donc sur les raisons de la demande à l'aide. Il leur expliqua d'abord que, si le temps avait été court depuis le retour des Sauveurs d'Aliaénon sur Yuimen, il s'était en réalité déroulé environ cinq ans sur cet autre monde depuis l'Eveil des Titans. Un terme qui ne disait pas grand chose à Anastasie mais qui fut bien vite explicité par l'elfe, qui leur annonça que c'était là des entités si puissantes que leur retour avait énormément fait fluctuer l'équilibre arcanique d'Aliaénon. Il s'était donc, depuis, déroulé beaucoup de choses, de changements dans ce monde, mais subsistait un problème : le Sans-Visage. C'était, selon ses dires, un genre de Dieu ayant endormi les Titans pour se faire passer pour l'unique divinité des habitants de ce monde, et il courrait toujours, semblant même gagner du terrain en gagnant des fidèles parmi plusieurs peuples. Il perturbait donc la paix et l'équilibre d'Aliaénon. Un ordre spécifique de chevaliers avait même été créé pour tenter de l'éradiquer, mais ils s'étaient jusque là retrouvé dans une impasse, incapable d'éradiquer le danger. Ainsi, les aventuriers de Yuimen avaient été appelés pour réussir là où cet ordre avait failli en trouvant un moyen de tuer un être supposément immortel. Leur tâche était donc de trouver ce moyen, de le créer, de le mettre en place et de l'appliquer. Une mission qui pourrait sembler impossible tant son énoncée paraissait ridicule : il leur fallait éliminer définitivement une déité.

Pour terminer, Naral Shaam invita tous les aventuriers à écrire sur une liste leur nom, prénom et qualités respectives, ce que tous firent, un par un. Anastasie, elle se mordilla l'intérieur de la joue en attendant son tour. Une question lui semblait primordiale avant de se mettre à la recherche de cet immortel. Mais bientôt son attention fut accaparée par le dénommé Xël, qui expliqua son projet de création d'orphelinat avec l'argent de la récompense de ses exploits en Aliaénon. Une demande qui fit chaud au cœur à la jeune femme, qui hocha la tête en sa direction. Elle ne fut pas la seule personne émue, car Charis et Karz vinrent tout deux rajouter une part de leurs gains à ce pécule de base. La Comtesse aurait aimé participé, mais elle venait tout juste de faire un achat colossal qui empêcherait ce genre de folies pendant un petit moment.

Ainsi, après Xël, qui dut se faire aider de Charis, ne sachant écrire lui-même, chacun nota silencieusement son nom et prénom sur la liste, tour à tour, laissant Anastasie l'une des dernières à ne pas l'avoir fait. Même la gamine, que la Comtesse identifia comme se nommant Yurlungur Louvardent en jetant un œil au bout de papier, avait décidé de rester et de s'engager, sans plus de crainte pour sa vie. Elle avait d'ailleurs noté comme qualité un simple « Enfant » qui arracha à la jeune femme un sourire. Mais comment pouvait-on la laisser ici, au milieu de tous ces adultes ? Décidant de garder un œil sur cette petite fille une fois sur Aliaénon, Anastasie attrapa donc la plume d'oie, la trempa dans l'encrier et apposa la mention « Anastasie Terreblanc » à la suite des noms déjà présent. Puis, après un instant de réflexion, elle ajouta le mot « Beaucoup » en guise de qualités, se tirant à elle-même un petit rictus amusé.

Ceci fait, elle se tourna vers Naral Shaam, qu'elle apostropha pour poser la question qui lui taraudait l'esprit depuis la fin de son discours.

« Dites-moi, vous prétendez que cette entité est dangereuse pour l'équilibre et la paix, mais en quoi exactement ? Quel est son crime ? Est-il à l'origine de guerres ? Se sert-il de ces fidèles dont vous parler pour répandre la mort ? Ou essaie-t-il simplement de se prémunir de votre vengeance ? »

Il pouvait être logique de penser qu'après avoir menti à tout un monde, cette déité se serait fait quelques ennemis mortels à la recherche de vengeance, après tout. Il ne fallait simplement pas que ce soit là la seule cause de la guerre que semblait lui vouer Aliaénon.


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