|
L'auberge s'offrit à lui, massive, sur deux étages encadrés de ses poutres en bois, au toit de tuiles pourpre s'arc-boutant comme des cils, au détour d'une rue. La marche songeuse se finissait là, peut-être avait, il eut du rab de chimère, car il lui semblait bien être passé déjà par là. Une impression de déjà vue, qui aurait put être éviter s'il avait connue la ville. Il s'était perdu, volonté absconse, car il ne focalisait plus que sur ce gobelin. Il ne pouvait en être autrement, même après plus d'un an d'absence, il était sûr que celui qu'il avait envoyé en quête le retrouvait à la fin de la sienne. Il poussa la porte de l'auberge, une musique mélange de flûte et de shamisen coulait doucement dans l'air feutré.
Il commanda une chambre et un repas, ne se souciant pas du prix ni des explications du gérant. Un homme au demeurant sympathique, un honnête marchand, travailleur, au physique sec mais dur comme un clou. Sirat alla s'asseoir où des nouilles submergé dans un bouillon de bœuf, saupoudré de coriandre et de gingembre bataillant avec des raviolis opale gonflés et chaud, l'attendait sur une table impeccable. Il s'attarda à sortir des parchemins retrouvés dans son sac après son départ. Il les ouvrit laissant un filet de poussière ocre s'évaporer autour de lui. Il huma l'odeur des cendres et celle-ci résonnèrent en lui. Les deux premiers étaient des sorts, il les lut attentivement et leur apprentissage se fit en même temps. Il lui semblait n'avoir jamais vécu sans les connaitre. La magie opérait, coulant dans ses veines, innervant chacune de ses cellules, leur enseignant instantanément ce qu'il devait apprendre. Le dernier était une technique de combat, il prit le temps de la lire et son étude lui prit une semaine. Une semaine où il ne côtoyait personne, hormis l'aubergiste pour ses repas qu'il prenait éloigné loin des autres clients. Il attendait et occupait son temps avec cet apprentissage. Il termina le livre sur Aliaenon. Mais au bout de ce temps l'inaction le réveilla. Comme endolori un soir, il leva la tête hagarde. Tout autour de lui les gens avaient prit l'habitude de le voir et celle de l'ignorer, ce colosse étrange, seul, perdu dans ses lectures ou dans ses pensées entre deux plats de soupe et une chope de bière. Il se frotta les yeux embués. Aveugle rongeur sortant de son trou, ébloui par le spectacle environnant, Sirat plissa les yeux, comme effaré par ce mirage. Rêvait-il ou la réalité qu'il venait de vivre était-elle factice, celle-ci lui apparaissait comme un songe, une somnolence, une veille prolongée dont il venait de s'extirper. Il arrachait le cocon de file engourdissant, il s'étira demanda une pinte qui lui fut servie rapidement et regarda autour de lui à la recherche d'une nourriture plus physique qu'intellectuelle.
La nuit fraîche caressai son corps a demi-nue recouvert du drap, il observait le plafond alors qu'a coté de lui, une femme se prélassait. Ni jolie, ni moche, agréable et chaleureuse, elle l'avait accueilli et il s'était plongé en elle. Cela faisait longtemps et il avait apprécié retrouver ce contact tiède et érotique. Mais, il n'était rien qu'une lichette d'eau dans le désert qu'elle avait créé dans sa disparition. Il y en avait qu'une qui surpassait toutes les autres. N'kpa ses courbes, son parfum frais, sa peau délicate, sa joie pétillante qui l'enveloppait à chaque fois, il l'avait trahie en pensant la sauvé, la condamnant peut-être. Il repensa à Faseilh, le goût de ses lèvres pastel azur et sa peau glabre, Azalée et la vigueur de ses rapports irréelle, Guasina et son sourire malicieux... Il soupira, le vide qu'elle créait lui arrachait l'âme et l’entraînait au fond d'un ravin dont il ne voyait pas le fond. Une chute continue qui le soûlait et le rendait aigre et insatisfait. La femme, inconnue d'un soir, se retourna ennuyer dans son sommeil par les bruyantes méditations de son compagnon d'un soir.
Il se leva, la laissant à son sommeil et se dirigea vers la fenêtre. Elle était ouverte et une légère brise s’engouffrait dans la chambre. Il comprit très vite pourquoi, dans un coin de celle-ci, il était là, immobile gargouille à la peau glauque, scrutant de ses yeux ambrés le couple d'une nuit. Sirat resta interdit, attendant un mouvement du gobelin, il avait mis le temps pour venir, mais il n'était surement pas aisé pour lui d'entrer dans la cité. La créature quitta son état de statue, un air sévère au bord des lèvres et tandis un papier à l'humoran. Sirat observa l'imprimer, jaunie et sale, qui tenait surement la réponse à temps de question. Il voulut reposer les yeux sur le messager, mais il n'était déjà plus qu'un souvenir. La femme se remua faisant grincer le lit, mais il n'y prêtait déjà plus attention, il n'était plus qu'obnubilé par elle... nue, debout dans le noir, à peine éclairé par la lune, il ouvrit le mot d'hermès, suspendu, à ses taches d'encre, maladroitement griffonné... "Sororité de Selhinae" Elle était donc en vie, il était soulagé, mais ce sentiment laissa place très vite à une amertume, lourde et pesante. Pouvait-il la revoir, en avait-il seulement le droit sans risquer à nouveau de la mettre en danger ou la fureur de Zewen. Et si elle était heureuse sans lui? Elle en avait le droit... Le sommeil l'avait quitté cette nuit-là et les autres nuits ce doux compagnon se fit rare... Il ne bougeait plus de l'auberge. Une à deux semaines s'écoulèrent encore sans que le destin ne veuille le délivrer de ses tourments.
Mais la fortune, ne laisse jamais ces enfants au mal trop longtemps et les chemins qu'elle utilise pour les guider sont parfois tortueux.
Il était en train de boire ce jour là, l'alcool de riz perdait la tête dans son verre qu'il remuait machinalement. Il écoutait la musique et noyait son regard dans la foule disparate. Il avait rangé depuis bien longtemps ses armures dans sa chambre qu'il prenait en otage depuis trois semaines. Depuis sa dernière rencontre cependant, il boudait la compagnie de tout le monde. C'était un de ces moments d'inactivité qui lui collait à la peau, qu'il vit la porte s'ouvrir et apparaître une elfe. Une longue et épaisse tignasse rousse, de magnifiques yeux bruns ensorcelants, d’une bouche pulpeuse invitante et d’un corps de rêve, mais surtout doté d'une allure fière et guerrière, il la reconnut tout de suite. Devant lui se tenait Sibelle, comme arraché de son passé...
_________________
Dernière édition par Sirat le Mer 28 Déc 2016 20:49, édité 2 fois.
|