Kerkan a écrit:
À travers les hautes sphères glaciales, j'avais l'impression de partir vers un autre monde, j'avais déjà perdu beaucoup de sang. Mon corps, de plus en plus faible, commençait à cesser de se débattre face au monstre toujours plus effrayant. Le temps ne s'écoulait plus, j'ignorais où j'étais, les cieux étaient envahis de cris et de gémissements horribles marquant la souffrance terrible que je ressentais. Je ne savais pas si je tiendrais le coup encore longtemps, mais je faisais mon possible pour rester conscient. Les bribes d'une pensée vinrent caresser mon esprit, une simple vision gravée dans mon cerveau : le bateau volant. Les passagers devaient me regarder me faire déchirer entre les griffes de cette créature sans pouvoir faire quoique ce fût. Je leur offrais un spectacle de taille pour un vol aussi monotone, j'aurais au moins eu le plaisir de les distraire quelque peu.
(Quelle horreur ! Je ne veux pas me donner en spectacle...)
Derrière nous, j'entendais Helce glapir toujours plus fort, il ne voulait sûrement pas m'observer en train de me faire dévorer. Néanmoins, je ne pouvais pas agir, j'étais trop faible et le griffonneau lui-même n'aurait pas la force d'affronter un tel monstre, possédant une violence tant sanglante. La fin était proche malgré une course poursuite qui se produisait dans les airs, une course inutile qui ne servirait qu'à affaiblir encore plus le griffon. Je ne désirais pas que Helce devînt après ma mort, une nouvelle proie pour cette créature, je ne voulais pas attirer ses foudres sur un animal aussi innocent. Que pouvais-je faire pour le sauver une nouvelle fois ? Je n'en avais aucune idée... Pourtant, une résidait dans les abîmes de mon esprit, mais, je ne pouvais me résoudre à l'adopter, je ne réussissais qu'à la repousser toujours plus loin de moi. J'aurais pu me donner la mort moi-même, mais je n'en avais pas le courage, la lâcheté s'empara de moi, j'étais certains que les dieux préféraient attendre que mon heure fût arrivée. Ils m'avaient sûrement prévu un autre destin, toutefois, je ne voyais pas lequel, j'étais perdu sans aucun doute.
(Oh Moura ! Oh Gaïa ! Mes déesses je vous prie de pardonner mon incompétence ! Je n'étais pas l'élu comme l'avait dit ce shaman, il s'était trompé, j'en suis maintenant certains.)
Pourquoi tant de personnes avaient placé autant d'espoir en moi alors qu'ils savaient tous que j'étais inexpérimenté ? J'aurais aimé ne jamais rencontrer toutes ces personnes, je comprenais maintenant mon frère qui avait choisi la voie du mal, elle possédait des puissances bien plus grandes que celles que les dieux altruistes avaient créées. Peut-être aurais-je dû le suivre dans les recoins sombres de ce monde, je n'avais sûrement pas fait le bon choix en m'opposant à ses convictions... Qu'étais-je en train de dire ? Moi devenir une ombre à la recherche de désirs macabres ? Pourquoi étais-je en train de déblatérer ce genre d'inepties ? La souffrance, sans doute, jouait sur ma conscience, elle s'amusait à me tirailler, à me faire affronter les sinistres démons qui se cachaient en moi. Je n'en pouvais plus, tout devenait insoutenable, mon corps se déchirait, voulait s'ouvrir, imploser... Les maux s'acharnaient à me détruire à petit feu, il fallait que cela cessât le plus tôt possible...