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Alistair sourit lorsque le gouverneur le désigna comme un "traître". A son sourire, Heartless comprit que l'assassin se préparait à cracher son venin. Cependant, il ne fit rien, il aurait dû s'y attendre bien avant, c'était inévitable.
- Un traître, oui. Si vous le dites. Mes motivations ne regardent que moi, mais cet acte n'était nullement fait pour mettre en péril l'Ynorie, bien au contraire. Vous êtes le furoncle de cette cité, et tant que l'on ne vous aura pas arraché Fan-Ming sera remplie de pus...
Le jeune homme se mit à critiquer ouvertement les choix stratégiques de Tsukiko, selon lui, Fan-Ming ne saurait résister plus de dix minutes à l'assaut final. Il justifia ses actions, pour lui, il n'était qu'un instrument du destin et la mort de Tsukiko avait été rendue nécessaire à cause de son incompétence.
Puis il se tourna vers Honoka, lui expliquant que toutes ses actions avaient comme but unique la survie de Fan-Ming, mais Heartless n'était pas dupe, un homme capable de telles paroles ne pouvait pas n'avoir que le bien d'autrui à l'esprit. Il poussa même le vice jusqu'à demander à Honoka de lui donner sa bénédiction pour le meurtre du gouverneur.
- Mais tout n'est pas fini. Je ne vous connais que trop peu, mais je pense que vous accepteriez ma proposition que voici : s'il meurt maintenant nous aurons encore le temps de sauver Fan-Ming. Ce n'est qu'un dommage collatéral. C'est malheureux, mais c'est la guerre, et les dommages seront bien plus grands si nous ne faisons rien. Un peu comme le gouverneur, avait-il ajouté en se tournant vers Tsukiko, qui n'est pas à Andel'Ys mais a été enlevé par le faux garde qui tient actuellement mes mains.
Le sang d'Heartless se glaça un instant, mais il s'était attendu à ce genre de révélations de la part du traître. Le nouveau gouverneur, de son côté, s'était retenu de gifler l'homme à la langue bien pendue et s'était tourné vers le faux soldat, lui demandant de s'expliquer. Mais avant qu'il ne puisse répondre, l'attention de Tsukiko se tourna encore une fois sur celui qui avait tenté de l'assassiner, c'était à son tour de tout déballer. Il annonça que la situation désespérée dans laquelle Fan-Ming se trouvait désormais était bien davantage due aux aventuriers yuimeniens qui y avaient mis les pieds et avaient finir par la déserter, la desservir ou même la trahir.
Honoka, de son côté, désapprouvait aussi les dires et actions d'Alistair, mais pour elle, il y avait toujours de l'espoir, du côté des peuples encore libres, dont l'aide allait être cruciale pour le déroulement de cette guerre.
Un silence s'installa, tous étaient plongés dans le silence de la réflexion, un silence encore une fois brisé par le ricanement d'Alistair. Il fit mine d'admettre son erreur, pressé par l'urgence de la situation, puis fit une proposition que même Heartless n'aurait pas osé faire :
- Vous dites que nous ne voulions pas sauver l'Ynorie, mais vous vous trompez. Je suis là à peu près pour les mêmes raisons que vous, et c'est pour sauver Aliaénon de l'assaut d'Oaxaca. Je sais que je viens de tenter de vous tuer et de retourner la Princesse contre vous, mais ne doutez pas de mes intentions. Alors comme je le disais, j'ai une proposition à vous faire, et s'il vous plaît ne laissez pas votre orgueil la refuser en bloc sans d'abord la réfléchir. Mon père était le chef d'une troupe indépendante, j'ai reçu une éducation quelque peu militaire et ai été élevé pour devenir général à mon tour. Je me considère comme un bon stratège et je peux apporter quelque chose à Fan-Ming. Si je vous avais tué, mon plan était de conseiller la Princesse, si elle voulait de moi à ses côtés, pour faire office de chef de guerre. Alors maintenant c'est à vous que j'offre mes conseils. Et, bien sûr, comme vous ne pouvez décemment pas me faire confiance d'un point de vue personnel, je veux bien que vous m'attachiez les mains pour que je ne puisse rien tenter. - Hah ! La bonne blague !
Sirius n'en pouvait plus, il arracha son casque et le jeta à terre, puis parla d'une voix forte, s'adressant à la fois à Tsukiko, Honoka et Alistair.
- Toi le p'tit con, je vois où tu veux en venir, et je sens une boule me serrer la gorge rien qu'à écouter tes âneries ! Au point où on en est, ça sert plus à rien de faire le pitre. Tsukiko ! Tu me fous la gerbe avec ton air supérieur et ton balais dans le cul, mais je n'ai jamais voulu te tuer. Mais tu as le culot de nous blâmer nous, les yuiméniens, pour les problèmes de Fan-Ming ! Comment aurais-tu pu penser une seule seconde qu'on pourrait régler tout ce merdier alors qu'Oranan n'ose même pas divulguer la gravité de la situation ! Vous n'avez réussi qu'à amener une poignée d'hommes et de femmes sur ce monde, vous auriez pu ramener une armée entière si Yuimen avait vraiment décidé de vous porter main-forte ! Clairement, Oranan ne semble pas prendre la menace au sérieux et s'attend à ce que vous régliez tout vous-même ! Je vais vous dire qui je suis, et pourquoi je suis venu : je suis un vagabond à peine sorti des geôles d'Oranan, et j'ai passé le portail pour me couvrir de gloire et de richesses. Comme je suis déçu de vous voir tous en débandade comme des enfants abandonnés ! Et stupides, qui plus est : comment ça se fait que vous n'avez même pas réussi à rallier vos voisins alors que la guerre est à vos portes ? J'appuie mon complice sur un point, vous ne tiendrez même pas dix minutes face à Oaxaca dans un tel foutoir. Je vais vous dire autre chose, cette mauviette dit vrai, c'est moi qui ait fait disparaître cet enfant gâté de gouverneur, et vous savez pourquoi ? Pour que vous vous bougiez le cul. Mais mes efforts sont gâchés, on dirait, maintenant qui peut dire où se trouve l'enfant ? Même moi je ne le sais pas, ce n'est pas moi qui l'ai porté dans mes bras, la personne qui le détient est loin maintenant, et je ne sais pas où elle est allée. Si vous doutez de mes dires, demandez-donc à la femme dans votre lit, elle m'a vu parler à Teruki.
Après avoir parlé pendant deux bonne minutes, le pirate reprit son souffle et acheva :
- Vous me voyez comme une nuisance ? Très bien, je n'ai pas besoin de votre aide. Je ne compte pas rester ici pour crever la queue entre les jambes. Ce que je compte faire est clair : je vais mener une offensive contre ces envahisseurs de mes deux, et faire en sorte qu'ils ne puissent plus ramener leurs gars ici en rendant leur portail inutilisable. Je sais que vous ne me passerez aucun soldat, mais si vous ne savez pas quoi faire de vos prisonniers, vous n'avez qu'à me les confier. Réfugiés, aventuriers, toutes ces "nuisances" qui vous emmerdent, laissez-les partir avec moi, quelle différence ça ferait pour vous ? Sinon, tant pis, j'irais seul. Vous n'auriez aucun intérêt à me garder ici de toutes façons.
Heartless se retourna, ignorant désormais Alistair, il adressa ensuite quelques mots à Honoka.
- Et j'en profiterai pour passer par Andel'ys, faire coucou.
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