"...tar !"

L'instant d'après, le décor sec et rayonnant laissa sa place à la somptueuse et élégante cité des Sylphes. Stupéfait par le concept de la téléportation, Kalas resta muet quelques secondes avant de rire nerveusement en zieutant plusieurs fois le pendentif dans la paume de sa main.

"Wouah... J'y crois pas... Ça a marché !"

Ses doigts rangèrent le bijou dans le col de sa robe pendant que ses yeux se baladèrent sur l'endroit où lui, Guasina et Birhû venaient d’atterrir. Le Shaman fut rassuré de les voir à ses côtés, légèrement angoissé avant le déplacement magique. Ainsi, les hautes marches du palais s'élevaient en face d'eux avec à leur sommet un petit groupe de personnes. Sans aucun mal, le jeune homme parvint à y repérer la Reine des Sylphes en compagnie d'hommes de tailles différentes. Toujours aussi belle et gracieuse, cette dernière fit remarquer aux comparses qui l'entouraient le retour des aventuriers de Barkhane. Kalas la salua d'un signe de main avant de descendre de son cheval, maintenant fermement sa bride. Le destrier regardait les alentours avec des yeux ronds, comprenant difficilement quel miracle était à l'origine de ce changement de décor. Le Shaman se contenta de lui caresser l'encolure pour le rassurer, inquiet de le voir paniquer sous l'effet de l'incompréhension. Ce n'est que lorsque Birhû descendit de sa monture qu'il s'affaira à rejoindre la reine et son entourage, s'habituant doucement au soudain changement de température.

Les deux groupes se mêlèrent l'un à l'autre et Kalas pu reconnaître l'ambassadeur Ekhi aux côtés de deux inconnus, un elfe aux cheveux blancs et un Sinari en embonpoint. Le visage de Cornélius apparut rapidement dans son esprit, tirant les commissures de l'homme-loup en sourire au milieu du visage. La Reine prit le temps de les présenter aux nouveaux arrivants du Palais, laissant Malakbêl attendre dans son coin que les présentations soient faites. Le Shaman prit d'abord soin de saluer la Reine qui les attendait patiemment depuis leur départ vers Barkhane, toujours gêné par l'aura qu'elle dégageait inconsciemment. Ou pas.

"Hem... Ravi de vous revoir..."

Son regard se tourna vers l'Ekhi cornu, le visage imperturbable malgré l'arrivée d'autant d'aventuriers prêt à résoudre la crise en Elysian. Cependant, son sourire malicieux n'avait point changé depuis son départ et Kalas prit le soin de se décaler près de Birhû, trop inquiet du contact qu'aurait le regard de braise de Malakbêl sur la petite carcasse de bois du Golem. Il ne souhaitait pas le vexer de sa bête inquiétude, aussi prit-il le temps de le saluer poliment.

"Ambassadeur."

Ses yeux roulèrent jusqu'à l'elfe aux cheveux blancs, aspect bien trop tape-à-l’œil pour rester discret. C'est au même moment qu'il dévoila des yeux rouges comme des braises, soulignant l'originalité chez cet être pourtant venu de sa planète d'origine. Alors qu'il pensait rencontrer une race qui lui était encore inconnu, Kalas s'étonna lorsque ce dernier mentionna venir de Tulorim, ville dans laquelle son Maître l'avait envoyé après le massacre de la Meute. Son accoutrement traduisait une occupation ou au moins des connaissances dans le domaine religieux, certainement Gaïa d'après son appartenance à la même race que Faëlis, l'être maniéré. Intérieurement, l'homme-loup gagea pour que son caractère diffèrent de ce dernier.

"Je... heu... Ravi de vous rencontrer, Méraxès."

Ce fut finalement au tour du Sinari de subir l'inspection du Shaman. Beaucoup de choses en lui rappelait son ami de Dehant, fier entrepreneur fermier marié à la douce Mélissa. Kalas se demanda d'abord ce qu'un homme aussi calme et peu enclin à transpirer, s'il bénéficiait du caractère primaire des Sinari, pouvait faire pour sauver Elysian. Cependant, avant de se retrouver ici, il n'était lui-même qu'un jeune cuisinier ambitieux parti pour l'aventure. Le jeune homme retint donc qu'il n'avait pas à juger qui que ce soit pour ses ambitions, surtout si ces dernières sont aussi louables que le sauvetage de ce monde merveilleux.

"De même, Tartuffe."

Les présentations faites, la Reine prit la parole pour amener la suite de la discussion entre des murs plus confortables, désireuse de s'installer dans la sale à manger du Palais. Un Sylphe accourut à leurs côtés pour diriger les montures jusqu'à l'écurie et l'homme-loup laissa son cheval partir à contre-coeur tant les retrouvailles étaient fraîches. La compagnie se laissa porter par la grâce des pas d'Aaria’Weïla jusqu'à la dite-salle, bien plus convenable pour fournir explications et instructions aux aventuriers. La table, toujours aussi chargée de victuailles, était prête à recevoir et remplir la panse des arrivants. Kalas marcha doucement et s'installa sur la chaise à côté de Birhû, souhaitant profiter de sa présence autant que possible avant son départ. Là, son regard se balada sur les autres personnes qui s'installaient jusqu'à jeter son dévolu sur un verre de jus de fruits près de lui. Alors qu'il s'apprêtait à faire de même, Guasina fit son rapport à la Reine duquel le jeune homme n'aurait changé aucun mot.

Alors que la Reine fournissait diverses informations afin d'aider les nouveaux arrivants à se trouver une occupation, le jeune Shaman ne prêta pour ainsi dire aucune attention à ses dires tant l'ennui l'envahissait. Il ne trouva rien de mieux à faire que de tournoyer le jus de fruit rougeâtre dans son verre, miroitant son visage déformé par le remous. Un soupir s'échappa d'entre ses lèvres, traduisant son désintérêt total pour la réunion actuelle. Ce n'est que lorsqu'il leva les yeux qu'il s'intéressa davantage au cornu à la peau de feu en face de lui, l'ambassadeur Ekhi Malakbêl. Lui semblait profiter davantage du repas servi non sans rester à l'écoute des probables questions à son encontre. Après tout, le Sinari et l'Elfe blanc pourrait se demander quels genres de mystères Erta'Ale est susceptible de contenir.

(Je me le demande aussi. Une ville dans laquelle dansent des flammes sans interruption doit être sublime, surtout de nuit. Cependant, je doute de pouvoir y rester plus quelques jours. La chaleur doit être étouffante et le lieu est sujet aux éruptions volcaniques... Hm... Quel dommage qu'aucun d'entre nous n'y soit parti, j'aurais beaucoup aimé écouter la description d'un nouveau visiteur.)

Un regard de Malakbêl incita Kalas à stopper son observation furtive et à tourner les yeux sur les différentes personnes attablées. Au milieu des mets fumants sur la table, Guasina s'entretenait avec la Reine au sujet de ses dernières péripéties en Barkhane. Kalas ne jugeait pas utile d'intervenir, la petite rouquine savait faire clair et concis. Aussi, le jeune homme choisit de s'intéresser de plus près aux deux fraîches recrues de la campagne sur Elysian. Un Sinari et un Elfe blanc. Si un homme ordinaire aurait parié sur l'elfe en guise d'utilité au cours de l'enquête, il n'en était pas de même avec Kalas. Certes, l'agilité, le charisme et l'intelligence des elfes n'étaient plus à prouver, surtout d'après leur proximité physique avec les Sylphes et les Niyxiens. Cependant, faible d'esprit est celui qui ira juger un Sinari comme un handicap. Aussi capable que les humains, la bravoure et la justesse d'esprit de ces petits-êtres avaient beaucoup impressionnés Kalas pendant son séjour à Dehant. Cornélius, Mélissa, Ernest... Tous étaient des modèles de force et de courage pour le Shaman, sans l'ombre d'un doute.

(Je suis sûr qu'ils sauront tous deux nous aider. Ils leur suffit d'aller voir les les Esprits correspondants et c'est parti pour Illyria.)

La Reine s'adressa soudainement au jeune homme qui se redressa sur sa chaise en posant son verre en face de lui. Alors qu'elle mentionna les autres aventuriers de Yuimen en direction de la cité humaine, l'homme-loup fut surpris de ne pas entendre le nom de certains d'entre eux. Non pas inquiet, mais troublé, il demanda davantage d'informations leurs sujets.

"Ils ne sont que quatre ? C'est étrange, je n'en connais que la moitié. Qui est cette "Pureté" ? Et avez-vous des nouvelles de cet autre humain, Baratume, ainsi que d'Earnar Corail et Kerenn ? Sont-ils toujours en vie ?"

Au fond de lui, Kalas priait pour qu'il ne leur soient rien arrivés. Il n'était pas spécialement proche d'eux, mais savoir qu'une mission d'ordre diplomatique tourne à la mort de certains d'entre eux aurait matière à l'effrayer. Cependant, il ne pouvait mettre en doute la promesse qu'il avait faite à Ahankarikal au sujet de sa volonté à sauver ce monde. le Shaman était déterminé à la respecter, à tout prix. Mais bien qu'il luttait contre les mauvaises pensées, Kalas ne pouvait s'empêcher d'attendre le pire à leur sujet. Il préféra donc écouter la réponse de la Reine avant de rebondir sur un autre sujet.

Lorsque cette dernière demanda quelles étaient les nouvelles volontés des deux aventuriers de Barkhane, le Shaman fouilla dans sa poche et en sortit la piécette en terre cuite que lui avait donné plus tôt Monta'Kh. Il jeta un dernier regard vers Birhû et exposa son désir de partir pour Aetelrhyt avec Guasina. Du moins, si elle était d'accord.

"Pour tout vous dire, le Gardien de Barkhane nous à demandés de voyager vers Aetelrhyt à la rencontre des lutins et des elfes. Les Golems sont certains qu'ils sauraient nous aider dans notre enquête et je rejoins leur point de vue. Même si ils ne sont pas directement concernés par le drainage, leur aide pourrait nous être précieuse dans la réussite de notre quête. Aussi, je pense que c'est là-bas que nous irons, Guasina et moi. Et puis, si nous avons déjà un groupe en direction d'Illyria, nous devrions pouvoir prendre un peu de temps pour rallier le plus de monde possible à notre cause. Qu'en penses-tu, Guasina ?"

Alors qu'il s'apprêtait à se lever, Kalas resta un instant les bras appuyés sur le siège et rajouta une dernière demande à l'attention de la Reine avant que cette dernière ne réagisse à ses dires.

"Excusez-moi, Jillian est-il parti avec eux ? J'aurais besoin de m'entretenir avec lui."

Où aller

Ayant ignoré la table contre le mur remplis de gourmandises culinaires variées, j’avais pris place sur celle plus centrale où se trouvait encore la carte du monde d’Elysian. En prenant soin de ne pas marcher dessus afin de ne pas l’abîmer, j’en fis prudemment le tour tout en écoutant la reine s’adresser aux deux nouveaux venus Tartuffe et Meraxès. Elle leur expliqua que les esprits du vent et de la lumière les rencontreraient respectivement ici même à Ilmatar sans qu’ils n’aient à se déplacer. Je comprenais que ça leur permettrait de sauver du temps et de commencer leur enquête plus rapidement, mais en contrepartie, ils ne pourraient voir où habite l’esprit portant le fluide dont ils sont désormais investis.

Puis dame Aaria sur tourna vers moi et Kalas. Ce dernier s’était assis non loin du buffet, mais surtout à proximité du golem de terre. Je l’observai quelques instants me demandant si mon imagination me jouait des tours où bien si cet homme-loup s’attachait rapidement aux gens pour qui il avait de l’estime. Et puis dans le fond, cela avait du sens puisque les loups préfèrent la vie en meute plutôt que celle reclu, solitaire. Cette pensée me fit sourire, je ne m’étais jamais imaginé un jour faire partie d’une meute de loups (même si de loups, la bande n’en contenait qu’un seul).

La reine me précisa d’abord qu’elle n’avait de consignes à me transmettre, sinon de précieux conseils et informations. Elle nous parla ensuite des quatre aventuriers qui étaient partis en direction Illyria la veille. Deux dames que je ne connaissais guère : Une dénommée Leykhsa ainsi que Hrist, une elfe. Pour ce qui est des deux autres, il s’agissait de Cromax, le sergent de la milice ainsi que de Faëlis. Tous les deux m’avaient, à des moments différents, portés sur leur épaule. Elle nous proposa de les rejoindre si tel était notre désir. L’idée de me rendre à Illyria, me plaisait, mais je préférai entendre d’abord l’avis de Kalas.

Kalas semblait ne pas comprendre que les autres aventuriers étaient partis eux aussi à la rencontre de l’esprit gardien de leur fluide, et que d’autres nouveaux pouvaient être débarqués sur Elysian à leur tour. Ce monde était grand et toute l’aide supplémentaire pour résoudre l’énigme du drainage de fluide était la bienvenue.

Kalas annonça à la reine d’Elysian qu’il avait l’intention de se rendre à Aeterlrhyt afin d’y rencontrer les lutins et les elfes, et qu’il pensait que j’irais avec lui. Et puis, selon lui, il était moins utile de se rendre à Illyria, puisqu’un petit groupe s’y rendait déjà. En terminant, il tourna son regard dans ma direction tout en me demandant ce que j’en pensais.

« Et bien » commençai-je hésitante.

« Je ne suis pas aussi catégorique que toi Kalas quant à ma prochaine destination. Certes, j’ai bien hâte de rencontrer les lutins et les elfes afin de discuter avec eux et débuter ainsi notre enquête. Mais Illyria est économiquement la ville la plus puissante d’Elysian, celle qui entretient des liens commerciaux et j’aimerais bien voir de quoi elle en retourne. »

Je m’arrêtai de parler afin d’examiner sur la carte où se trouvaient les deux possibles destinations puis levant mon regard, je m’adressai à la reine.

« Si vous pensez que notre présence à moi et Kalas ne serait pas utile sur Illyria, je me rendrai aussitôt au pays des lutins. Mais si vous pensez au contraire que nous pourrions apporter notre contribution à l’enquête, malgré la présence de quatre autres aventuriers, et bien j’aimerais bien me rendre à Illyria d’abord puis Aeterlrhyt ensuite. »

Puis finalement je regardai de nouveau :

« Peu importe la destination que nous choisirons, j’aimerais bien que nous partions ensemble encore cette fois. »

(((629 mots )))

Aaria nous expliqua que les Esprits du Vent et de la Lumière se trouvaient à Ilmatar et que nous pouvions donc les rencontrer dès à présent. Cette fois le moment était venu, j’allais pouvoir rencontrer cette autre facette de Rana… Converser avec elle peut-être, ou au-moins la contempler dans sa majesté aveuglante. Je sentais mon cœur battre à tout rompre, le sang qui irriguait mes veines devenait impétueux. Pourtant mes jambes ne voulaient pas m’obéir, elles étaient de plomb, faisaient partie intégrante du sol.

Que m’arrivait-il ? Pourquoi n’arrivais-je pas à parler, à bouger ? J’étais comme bloqué entre deux feux ardents. La peur de m’être trompé, d’être… Déçu se confrontait avec hargne à ma foi aveugle envers cet esprit de sagesse. Envers celui qui sur ce monde incarnait Rana. Pourtant… Je savais que c’était Rana qui m’avait envoyé ici, et même si ce Terhenetar n’était pas ce que j’escomptais, j’étais investi d’une mission divine et rien ne devait m’empêcher de la mener à terme. Je devais absolument le rencontrer avant d’entreprendre quoi que ce soit, et s’il me permettait de maîtriser ce pouvoir, cela était tant mieux car je pressentais devoir en faire usage.

Je me tournais alors vers Aaria et d’un ton calme lui demanda :

« Ma da… Aaria, pourriez-vous réquisitionner l’un de vos hommes afin de me conduire auprès de Ra… De l’Esprit du Vent ? Je ne puis vous mentir, savoir qu’il m’est possible de le rencontrer m’empêche tout simplement de réfléchir. Je ne peux me concentrer, mon attention étant intégralement préoccupée par Sa présence. »

J’espérais de tout mon cœur ne pas m’être trompé et même si une certaine angoisse se terrait en moi je devais aller au bout. Il fallait que je rencontre la déesse qui illuminait depuis bien des années ma vie, qui m’avait conduit jusqu’ici afin d’accomplir une quête louable.

Je rajoutais à l’encontre d’Aaria :

« Soyez certaine que je prendrais connaissance des éléments importants, et que j’accomplirais ma mission ensuite. J’espère que vous comprendrez ma démarche. »

Et dans la même foulée me tournai vers Guasina, Kalas et Meraxès et proclama d’un ton bienveillant :

« Que la sainte brise de Rana vous guide. J’espère de tout cœur que nos routes se croiseront de nouveau. »

Je terminais par une rapide révérence et attendit le serviteur qui devait me servir de guide.

Les informations de la Reine au sujet de l'expédition en direction d'Ilmatar laissèrent Kalas indifférent. De nouveaux membres s'étaient rajoutés depuis son départ pour Barkhane, remplaçant les disparus partis vers leurs cités. Si l'état de Kerenn ne laissait de place à aucun doute d'après les autres aventuriers qui l'avaient accompagnés, Faëlis et la dénommée Pureté. Cependant, c'est davantage l'absence de nouvelles d'Earnar qui firent douter le Shaman. Il était étrange de perdre la trace d'un envoyé diplomatique, aussi formel et déplacé soit-il, car Kalas se souvint de son impatience à quitter Ilmatar pour Elivagar et ses soupçons concernant l'implication d'un des peuples élémentaires dans la catastrophe qui ravage Elysian.

(Peut-être a t-il voulu enquêter de son côté pour rassurer ses inquiétudes ? Après tout, un diplomate étranger qui doute de ses commanditaires ne risque pas de les aider à résoudre cette période de crise. J'espère tout de même qu'il ne lui est rien arrivé, je suis sûr qu'il doit avoir ses propres raisons de s'inquiéter. Quant à Baratume, il "vole vers le nord" ? Je ne vois que les forêts qui joncent Aetelrhyt, mais je doute qu'il ai été mandé pour rejoindre le peuple des Elfes et des Lutins si les Golems nous en ont déjà chargés. Hm... La carte doit être incomplète. Je doute qu'elle se limite à ce que je peux voir sur celle-ci. La Reine devrait pouvoir m'en fournir une plus détaillée.)

Guasina reprit ses propos concernant la volonté du jeune homme de partir vers le nord-ouest. Cette dernière annonça ne pas avoir de réelle préférence de destination même si elle avoua être curieuse de savoir à quoi Illyria pourrait ressembler. Aussi, elle s'en remit à la Reine concernant le choix le plus judicieux à faire pour participer à l'enquête de façon optimale. Les derniers mots de la lutine firent rougir Kalas, toujours heureux de passer du temps en sa compagnie, si bien qu'il n'osa avouer ne pas vouloir la quitter. Alors qu'il s’apprêtait à lui répondre, la Reine précisa son rôle de simple indicatrice et non de dirigeante pour la suite des événements. Aussi, elle laissait aux aventuriers une totale liberté dans leurs déplacements, les jugeant capables de se débrouiller par eux-même. Kalas en profita pour appuyer les propos de la Sylphe royale en se contentant de préciser ce qui les attendaient dans chacune des destinations.

"Hm... Nous avons le choix entre la cité humaine d'Illyria, point centrale de notre enquête. Il est vrai que la suite logique de notre mission nous amènerait à rejoindre le premier groupe au plus vite. Néanmoins, Aetelrhyt n'est qu'à courte distance d'Ilmatar et il serait sûrement judicieux de profiter de cet avantage, même si nos pendentifs nous permettent de rallier instantanément n'importe quelle destination."

Après de longues secondes durant lesquelles il réfléchit au moyen d'optimiser ses déplacements, le Shaman délivra sa réponse en jetant un rapide coup d'oeil à Birhû, la lèvre pincée.

"Tu as raison, Guasina. Nous partirons pour Illyria quand nous serons prêts. J’espère que cela se fera au plus vite."

Intérieurement, Kalas était tout de même heureux de rester quelques instants supplémentaires à Ilmatar. Alors que la Reine invitait Tartuffe et Méraxès à suivre le Sylphe aux allures de corbeaux qui venait de faire son apparition dans la salle de réunion, le Shaman se releva quand il aperçut la silhouette de Jillian se dégager de l’ombre du mur. Le pas assuré, le Milicien semblait tout juste rentrer d’une balade à cheval de par la poussière qui salissait ses jambières. Son visage s’illumina d’un léger sourire lorsque qu’il se présenta rapidement à l’Elfe et au Sinari, avant de saluer le retour des envoyés de Barkhane. La Reine lui rendit un sourire tout aussi léger que sa démarche et proposa à Kalas de s'entretenir avec lui, comme il le souhaitait auparavant. Invitation à laquelle répondit immédiatement l'homme-loup en coupant court à la discussion à l'aide d'un mélange d'excuses et d'empressement.

"Ha ! Merci, je... J'ai plusieurs choses à demander à Jillian ! On se voit plus tard, Guasina ! Vous de même."

Le Shaman quitta son siège qui racla ses pieds au sol dans un court bruit strident, avant d'attirer l'attention de Jillian d'un signe de main. Alors qu'il s'apprêtait à quitter l'assemblée, le jeune homme s'adressa au Golem, resté silencieux depuis leur arrivée à Ilmatar.

"Birhû, je gage pour que vous restiez au moins jusqu'à ce soir. Je serais ravi de passer la soirée en votre compagnie. Si le temps vous presse, je vous assure de repasser à Barkhane dès que le temps me le permet. Après tout, le pendentif de voyage semble pallier au manque de temps."

Le Milicien attendait patiemment le Shaman en secouant la poussière de ses jambières. Sa cape, légèrement élimée, lui procurait une telle prestance que sa propre maîtrise des fluides venteux semblait la faire voler dans le vide. Jillian accueillit Kalas, curieux des volontés de ce dernier.

"Bonjour, Jillian, ravi de vous revoir. Si vous le souhaitez, je pourrais vous décrire notre séjour à Barkhane durant le petit service que je souhaite vous demander."

Les traits de son visage se resserrèrent jusqu'à la demande du jeune homme qui semblait presque parler d'une banalité pour le guerrier accompli qu'il était.

"Je souhaite que vous m'appreniez à me défendre avec une arme."

Affichant un air toujours aussi serein, une fois de plus la reine prit grand soin de ne pas nous donner la route à suivre. Répondant tout de même à ma question, elle se contenta de dire que Monta’kh était un être d’une grande sagesse. Par contre, elle me précisa que les deux destinations que je convoitais revêtaient un grand intérêt, bien que différent.

L’homme-loup s’accorda un petit moment de réflexion avant de nous révéler ses pensées. D’un côté, il était conscient que la cité humaine d’Illyria s’avérait le point central de notre enquête, et d’un autre, il jugeait que la cité, des elfes et des lutins, était plus près d’ilmatar. Sans mot dire, je confirmai ses dires en observant la carte qui se trouvait plus qu’à ma portée. J’attendais avec impatience sa réponse espérant qu’il ferait le même choix que moi.

Il répondit enfin au bout de quelques secondes qui me parurent des minutes.
« Tu as raison Guasina ! » débuta-t-il alors qu’un sourire s’afficha spontanément sur mon visage.

« Nous partirons pour Illyria quand les deux nouveaux seront prêts à nous rejoindre. J’espère que cela se fera au plus vite. » Le sourire sitôt affiché s’évanouit.

(Mais je comptais partir immédiatement, moi ! )

Je voulus faire part de ma déception, mais sur ces entrefaites, deux hommes entrèrent dans la grande salle. L’un d’eux, un grand elfe portant ses cheveux noirs à mi-longueur s’agençant bien avec ses yeux verts, accompagnait un homme aux yeux de miel d’aussi grande stature. Ce dernier, Guasina le reconnut aussitôt, il s’agissait de Jillian, celui qui les avait emmenés sur Elysian. Il leur souhaita un bon retour à Ilmatar.

Et par un heureux hasard, je vis du coin de l’œil, mon choucas, qui était perché sur une fenêtre attendant probablement aussi impatiemment que moi la prochaine envolée.
Retrouvant mon sourire habituel, je fis une petite révérence au capitaine en signe de salutation tout en lui répondant :

« Le voyage fut très agréable, et j’espère que le prochain le sera tout autant. »

Le nouveau venu dénommé Illmarian conduisit Meraxès et Tartuffe vers les gardiens qui leur présentera les esprits de l’air et de lumière.

Et puis Kalas interpella Jillian lui précisant qu’il avait des choses à lui demander, me précisant qu’on se verrait plus tard. Sans perdre une seconde, je lui répondis :

« Attends ! Avant que tu partes, je dois te dire que lorsque tu reviendras je serai partie. Je voulais bien partir avec toi, mais je voulais le faire immédiatement. Mais nos aventures ne font que commencer, nous nous retrouverons à Illyria ! »

J’aimais bien ce jeune homme-loup, mais je devais le laisser faire ses propres choix et suivre les miens. Il souhaitait la compagnie des deux autre venus et s'entretenir avec Jillian alors que moi, je ne pensais qu'à repartir à dos de choucas explorer d'autres cieux. Je mis deux doigts dans ma bouche et sifflai le choucas qui s’envola aussitôt pour atterrir sur la table, tout près de moi.

Je fis alors un sourire à la reine, l’informant de mes intentions :

« Je vous remercie de vos conseils, je pars donc immédiatement pour Illyria, je veux faire le voyage en haute altitude cette fois à dos de choucas. »

Cela dit, j’enfourchai ma monture ailée et il s’envola par la fenêtre, direction Illyria !

(((567 mots)))

Les sourcils du Milicien se redressèrent lorsque Kalas mentionna le maniement d’une arme. Il fut lui-même surpris d’avoir pu prendre une décision pareille, lui qui n’avait utilisé les couteaux que dans le cadre très fermé de la cuisine. Découper un poulet, peler un citron et hacher des herbes fraîches… C’était ça, son domaine d’excellence. Mais jamais il n’avait envisagé de pointer sa lame en direction d’un être vivant, de même pour une massue ou une hache. Ses poings lui servaient à peine et le Shaman n’avait pour ainsi dire aucune prétention à cogner dans les dents de quiconque. Lorsqu’il fit part de son souhait à Jillian, le Shaman en vint à se demander ce qui l’avait poussé à prendre pareille décision. L’enjeu d’Elysian n’était pas de l‘ordre de la guerre ou du massacre et rien ne justifiait la volonté d’un jeune homme à l’air banal de manier une arme faite pour tuer. Cependant, Kalas avait judicieusement choisi ses mots avant de s’adresser au milicien. Se défendre était une véritable nécessité au vue de la mission commanditée par la Reine des Sylphes. En effet, si les aventuriers devaient dissimuler leur lien avec les élémentaires, inutile de compliquer davantage les choses à dévoiler son appartenance avec un animal aussi sauvage que le loup, plus difficile encore à expliquer. Quoi qu’il en soit, Jillian semblait avoir adhéré aux raisons qui avaient poussé le jeune homme à en faire la demande et il accepta sans demander de réelles explications, avant de l’emmener jusqu’à un endroit propice à l’entrainement. Sur le chemin, le Milicien récupéra quelques informations sur la maîtrise de Kalas qui répondit sans cacher son incompétence.

"Vous devez l’avoir pressenti, mais je suis un genre de mage. Les Golems ont sentis mon affinité avec la Terre et j’ai ainsi pu rencontrer Ahankarikal, l’esprit qu’ils protègent. Au cours de mes années d’études, je ne me suis jamais intéressé aux armes et à leur maniement, mais la situation exige que je paraisse le plus simplement aux yeux des humains d’Illyria. Si nous sommes amenés à devoir nous battre, je ne veux pas trahir notre couverture en usant de Magie qu’ils pourraient facilement associés aux élémentaires."

Pour Jillian, la cause semblait noble et réfléchie, aussi resta-t-il silencieux jusqu’à leur arrivée à la salle d’entraînement. Au fil de leur avancée, les deux hommes traversèrent plusieurs couloirs parfois dépourvue de portes jusqu’à se retrouver en face d’une très large que le Milicien poussa sans attentes. La salle se dévoila dans une forte lumière, générée par les larges et nombreuses baies vitrées. Fort spacieuse, la pièce se prolongeait et offrait une vue imprenable sur les jardins de la cité, vivifiant la superbe de l’endroit. Les quelques Sylphes qui s’y trouvaient prenaient plaisir à échanger des coups sous l’agréable atmosphère qui régnait entre ces murs témoins de nombreux combats. Deux longs râteliers remplis d’armes et d’équipements étaient installés parallèlement dans la salle, vers lequel Jillian pointa son doigt ganté, indiquant au Shaman qu’il pouvait y choisir ce qu’il désirait. Ce dernier s’avança et longea, le pas léger, les meubles chargés d’épées, de masses et d’autres instruments de guerre afin d’y faire son choix.

(Hm… Je pense que je vais m’abstenir de porter une épée ou un sabre. Il ne suffirait que d’un mauvais geste pour me couper moi-même, c’est trop dangereux. Une masse serait peut-être plus adéquate, mais je doute être capable de la manier en aussi peu de temps. Il en va de même pour les haches, les lances et tout ce qui requiert un entraînement long et rigoureux. Je n’ai ni le temps, ni le talent pour ça.)

Tandis que ses yeux balayaient les établis, les pas de Kalas le menèrent jusqu’à l’autre extrémité, contenant toutes les armures et protections de combats. Là aussi, les questions se soulevèrent dans la tête du jeune homme.

(C’est vrai que je n’ai jamais pensé à porter une armure. Ça doit vouloir dire que j’aime à rester agile et maître de mes mouvements. Après tout, je me vois mal me promener enfermé dans une boîte de plaques qu’il suffirait de pousser pour me neutraliser. Le cuir pourrait me permettre d’encaisser quelques coups tout en me laissant une liberté de mouvements correcte.)

Le Shaman s’agenouilla près des protections afin d’en tâter la qualité. Le cuir était souple et d’excellente facture, ce qui répondait parfaitement aux critères du jeune homme. Satisfait, Kalas tourna le regard vers Jillian qui l’observait dans son choix depuis le début. Ce dernier acquiesça avant même que l’homme-loup ne puisse lui poser la question, traduisant son accord.

(Mes gants sont en miettes, je vais enfin pouvoir les changer. Mes bottes sont dans un sale état elles aussi, j’espère qu’ils en auront à ma taille.)

Quelques instants passèrent durant lesquels Kalas prit soin de s’équiper correctement. Il laissa son équipement obsolète dans un coin de la pièce, se promettant de l’offrir à un intendant comme maigre compensation. Après tout, il ne fallait rien jeter de ce qui pouvait être récupérer. Suite à cela, le Shaman se redirigea à nouveau vers l’établi contenant les armes et jeta finalement son dévolu sur une rondache en métal finement travaillée. Celle-ci possédait plusieurs petites imperfections symétriques sur les extrémités de son diamètre, creusé pour bloquer les lames et les repousser efficacement. Le Shaman apprécia son poids léger et sa maniabilité qui en faisait une défense très utile pour un œil aussi vif que le sien. Cependant, son utilisation demandait quelques règles et enseignements que Jillian se proposa de lui offrir en dégainant son épée au centre de la salle.

A ma requête la reine me signifia d'attendre et accueilli alors deux hommes. Ils étaient élancés et arboraient une expression solennelle. Le premier était sans doute natif d'Ilmatar, lui qui avançait d'un pas gracile et aérien. Ses cheveux étaient coupés de sorte qu'ils lui tombent sur les épaules et mettaient en valeur ses yeux d'un vert émeraude resplendissant. Il souria quand la reine le présenta sous le nom d'Ilmarien, un de ses proches conseillers. Le second, se trouvait être le général d'Ilmatar, nommé Jillian. Il était équipé d'un solide armure témoignant de nombreuses batailles, avait des cheveux bruns et une barbe de quelques jours. Ses yeux tels les soupiraux de son âme exprimait une bienveillance bienvenue.

Ils nous saluèrent alors de concert, Ilmarien se contentant d'une formule de politesse élémentaire en adoptant un ton protocolaire, Jillian lui nous souhaita à Meraxès et à moi la bienvenue avant de se détourner pour parler à Kalas et à Guasina.

Pendant ce temps, et alors que je trépignais littéralement d'impatience, la reine demanda à Ilmarien de nous conduire auprès des esprits. Il hocha la tête en exprimant son accord et d'un geste de la main, nous enjoignit de le suivre.

Tandis que je suivais Méraxès et l'ambassadeur, mon coeur était toujours en proie aux doutes et à la joie. Je ne savais plus sur quels pieds danser et préférait me concentrer sur l'essentiel. Que cet esprit soit ou non l"incarnation sur ce monde de Rana, c'était bien grâce à ma Déesse que j'étais arriver jusqu'ici. C'était encore une fois, Elle, qui m'avait conduit en ces lieux afin d'apporter mon aide à ces peuples. Je ne devais pas perdre de vue mon objectif qui restait la priorité absolue.

Nous empruntâmes la sortie pour déboucher dans les jardins. Enfin, était-ce vraiment le mot...? Cet endroit était une œuvre d'art dont je pouvais me délecter inlassablement. Tout ici semblait à sa place, en parfaite harmonie. Je pouvais voir de multiples buissons arborant des toisons verdoyantes surmontées par des roses et des cyclamens. Ces fleurs, délicatement teintées de rose se voyaient accompagné par d'autres fleurs que je n'avais jamais vu. Certaines exhibaient des couleurs vives, d'autres plus ternes mais toutes étaient toujours aussi magnifiques les unes que les autres. De ce tapis floral exhalait une senteur au parfum vivace et enchanteur.

Je me laissais finalement aller, inspiré par la grâce et commença de jouer de la flûte. Les notes prenaient la forme d'une mélodie, devenant un flot impétueux, se transformant finalement en lac paisible. Je me laissais guidé par la magie du moment et n'essayais pas d'imposer ma volonté. La musique coulait en moi, à travers moi et se déversait par mon instrument. Je n'étais plus que le réceptacle d'un art immémorable, un art qui rassemblait les peuples et apaisait les tensions. La mélopée était fluide et bien qu'il manquait une voix pour l'accompagner, je sentais au plus profond de moi que j'avais trouvé là un air magnifique. Pendant quelques minutes encore je poursuivis sans discontinuer mais le souffle commença à me manquer et je termina par un final vibrant.

J'arborais un sourire candide, tout heureux d'avoir pu interpréter ainsi pareille mélodie et continua d'avancer à travers la forêt, ma muse passagère.

Quelques arbres venaient parfaire le tableau, qui tels les gardiens tutélaires veillaient sur les jardins, accueillant quelques oiseaux qui saluaient le jour nouveau par des chants mélodieux. Au vu de leurs majestuosités, ces arbres devaient pouvoir se targuer d'avoir vécu plus que la plupart des hommes qui peuplaient mon monde originel.


"Ah Rana... Si seulement tu avais accordé aux arbres la faculté de parler, le savoir dont ils se voient affublés doit être considérable..."

Je me dirigea vers l'un des colosses végétaux et apposa délicatement ma main sur son écorce. J'essayais de sentir la vie qui le parcourrait, qui irriguait son être tout entier.

Mais me voilà interrompu par Méraxès, qui ne semblait se rendre compte que j'essayais d'entrer en communion avec la nature, d'un ton joyeux il déclama que nous étions chanceux d'avoir l'opportunité d'ainsi rencontrer tant de gens importants.

J'hochais de la tête avant de rétorquer :

"Heureusement Rana nous a guidé ici, grâce lui soit rendue ! Elle qui permet à d'humbles mortels de vivre quelque chose d'aussi important."

Méraxès sembla agacé par ma réponse et décida de ne plus m'accorder son attention, avant de demander à l'ambassadeur des informations sur la ville dans laquelle il officie en représentant d'Ilmatar.

Je devais avoir l'esprit trop préoccupé et me laissa à divaguer, n'entendant pas la réponde d'Ilmarien qui fut sans doute concis car le voilà qui repartait déjà, nous amenant jusqu'à un portique de pierres. Ce dernier conduisait jusqu'à un chemin qui s'enfonçait dans une épaisse forêts de sapins, sur lesquelles la neige se déposait comme un blanc manteau.

Ilmarien nous demanda de l'écouter avec attention et commença d'expliquer qu'il fallait y aller chacun son tour en laissant à l'autre de l'avance. Méraxès sans même me consulter s'engagea le premier et disparut rapidement, avalé par la forêt.

N'ayant d'autres choses à faire je profitais de ce moment afin de questionner quelque peu Ilmarien. Un ambassadeur est une personne disposant de nombreuses ressources et il ne fallait donc pas l'oublier.

"Ambassadeur, une question, si ce n'est plusieurs me taraudent et converser de ces sujets avec vous pourrait m'être profitable."

Voyant qu'Ilmarien m'écoutait, je décidais de continuer :

"Savez-vous s'il y a une possibilité de récupérer monture et équipement afin de parcourir avec célérité les plaines et les forêts ? Je sais que nous jouons contre le temps, je pense donc qu'il serait judicieux de nous fournir de quoi avancer au plus vite. J'ai également une autre question, connaissez-vous l'Esprit du vent, l'avez-vous déjà rencontré ?"

Il n’était pas difficile de remarquer le respect que les Sylphes avaient pour Jillian. Aussitôt son arme glissée hors de son fourreau, il n’en fallu pas davantage pour les quelques néophytes qui observaient le face à face du Milicien et du jeune homme en robe. Les yeux de Kalas ne purent se détacher du fil de la longue et fine épée que le guerrier tenait fermement dans sa main droite, véritable œuvre d’art. Bien qu’il ne fût pas à l’aise avec les armes et autres ustensiles similaires, le jeune homme savait éprouver de l’admiration pour le travail des forgerons. Celui de son petit village près de Dehant passait le plus clair de son temps à ferrer les chevaux, mais il s’occupait quelques fois de commandes plus importantes. Kalas prenait toujours le temps d’observer le travail du fer jusque dans les moindres détails et si la Magie n’avait pas croisée sa route, nul doute qu’il aurait souhaité devenir apprenti-forgeron. Un lien très puissant se créer entre l’artisan et son travail, car ils dépendent tous deux l’un de l’autre. Le forgeron créer la beauté des armes, l’utilisateur la dévoile à tout le monde.

Pour Kalas, il ne faisait aucun doute que Jillian était un guerrier fort accompli. Attrapant à son tour un bouclier métallique similaire, ce dernier commençait par lui faire une démonstration des gestes simples du blocage. Contrairement à ce qu’il croyait, Kalas fut surpris de constater que le maniement des targes et des rondaches demandait davantage de technique et de réflexes que ce à quoi il s’attendait. La position, le lever de bras, l’inclinaison et même le timing, tous ces points étaient à prendre en compte. Ainsi, le Milicien présenta les parties les plus importantes du bouclier à l’aide de son épée pour appuyer ses propos avant de faire de même avec le jeune mage.

Tout d’abord, le Shaman du s’habituer à utiliser la rondache comme une alternative à l’esquive. En effet, les deux pratiques se complétaient dans l’occasion de les utiliser. Jillian lui conseillait d’user de son agilité et de sa souplesse pour esquiver les frappes lourdes et prévisibles telles que les armes à deux mains. La parade permettait de contrer presque tous les types de coups, mais Kalas souhaitait apprendre le maniement d’un bouclier de petite taille, idéal pour repousser les armes courtes comme l’épée ou la dague. Ainsi, il apprendrait à combattre à l’aide d’un style de combat très complémentaire, ses mains restant libres pour manipuler ses fluides. La seconde étape demandait au débutant de s’habituer à la sensation du bouclier. Après une parade, l’impact de l’arme sur la surface métallique pouvait laisser des fourmillements dans le bras, déstabilisant grandement le défenseur pendant le combat. Ainsi, Jillian lui expliquait qu’il était vital d’apprendre à amortir les coups et non à les encaisser pleinement sous peine de subir un désavantage à chaque attaque. Pour ce faire, le Milicien proposait au Shaman de subir un assaut simple à l’épée pour mettre en pratique les explications précédentes.

« Hem… Et bien, si vous pensez qu’il est temps de passer à la pratique, alors allons-y. »

Légèrement anxieux à l’idée de l’affronter, le Shaman rajustait les sangles de sa rondache à plusieurs reprises avant de les resserrer une bonne fois pour toutes plus fermement. La sensation était assez désagréable, mais le Milicien lui expliquait que l’habitude allait rapidement suivre. Arme en main, Jillian fendait l’air de son épée pendant que le jeune homme rajustait ses nouveaux gants. Fin prêt, le Shaman fit signe à son professeur qui commençait à attaquer en variant sa technique tout en conservant le niveau d’un apprenti. Les coups restaient lents et précis, à base de coups droits et d’estocs en direction du bouclier. Aussi Kalas pu-t-il facilement les anticiper avant même que l’arme ne s’abatte sur lui, se protégeant rapidement comme s’il avait su le faire toute sa vie. L’échange dura plusieurs instants pendant lesquels le bras du général Sylphe gagnait progressivement en force et en vitesse, jusqu’à une situation similaire à un combat réel. L’éclat de la lame étincelante glissant le long de la surface métallique firent plusieurs fois couiner le Shaman tant son ouïe s’était développée. Il ne comprit pas de suite d’où lui provenait pareille capacité surhumaine, mais le jeune homme-loup fit rapidement le rapprochement avec sa capacité de métamorphose.

(Je n’y avais jamais fait attention, auparavant… Mon corps change peu à peu depuis mon arrivée sur Elysian. J’espère pouvoir contrôler ces pouvoirs avec le temps.)

Les frappes devenaient plus fourbes, plus dangereuses. Usant de feintes et de coups rapides, Jillian testait les réflexes de son adversaire jusqu’à leurs limites. Le bouclier ne les repoussaient que de peu, jusqu’à finalement laisser passer le fil de l’épée à travers sa défense. La pointe effleurait le dos de sa main et Kalas s’échouait sur les fesses, incapable de suivre le rythme. Alors qu’il tentait de reprendre son souffle, Jillian lui tendait une main amicale en souriant pour l’aider à se relever, satisfait de la tournure que prenaient les choses. Il félicitait son adresse naturelle, heureux de savoir qu’il n’avait pas autant à lui apprendre.

« Ho, heu… Merci… Je ne pensais pas y arriver aussi rapidement. »

Au même moment, le Milicien pointa du doigt l’un des spectateurs du groupe qui les entouraient. Plusieurs Sylphes s’étaient joints au cercle observateur, chacun restant très attentifs à l’adresse du Général et à la vitesse d’apprentissage du jeune Shaman. Certains n’hésitaient pas à chuchoter entre eux, attirant l’attention de Kalas lorsqu’on fit mention de son nom de Meute. Légèrement gêné, l’homme-loup rajusta sa rondache pendant que Jillian donnait quelques instructions à la recrue qui préparait rapidement son équipement. Le visage clair et illuminé d’un sourire, le Sylphe rajusta son casque et dégaina son épée d’entraînement dans sa main droite. Dans l’autre, un petit bouclier similaire à celui du Shaman, principalement constitué de bois et d’armatures métalliques. Le Milicien expliqua à Kalas la nécessité de tester son niveau en situation réelle. Pour ce faire, il avait demandé à l’un de ses meilleurs jeunes de l’affronter dans un duel soumis à quelques règles. D’abord inquiet à l’idée de passer aussi vite à un tel niveau de pratique, le Shaman s’abstint finalement d’ouvrir la bouche, conscient qu’un combat était une excellente opportunité de progresser et s’inclina le saluer.

Le groupe se déplaça jusque dans les jardins afin de ne pas abîmer la salle d’entraînement. Là, Kalas pouvait utiliser ses fluides sans risque d’être trop à l’étroit comme il l’avait été il y a longtemps face à Sharold. Il se souvint de la difficulté d’invoquer son pilier de terre et des manipulations magiques qu’il avait dû faire pour réussir à le toucher, ce qui avait demandé des efforts particulièrement éprouvants pour le débutant qu’il était l’époque. Il ne se voyait pas comme un expert ou un maître en la matière, loin de là, mais plusieurs mois de pratiques et les dons des Golems lui avaient donnés une certaine maîtrise de la Magie. Dorénavant, il était à même d’affronter le psychopathe une nouvelle fois sans craindre la mort ou la défaite.

Sous un soleil radieux, le cercle d’observateurs s’écartait en une large zone de combat dans laquelle prirent place le Sylphe, Kalas et Jillian. Les deux combattants semblaient obsédés par leurs équipements, n’ayant de cesse de le rajuster ou de resserrer les sangles et lanières de cuir qui les maintenaient. Le jeune homme observait rapidement les protections du guerrier, similaires aux siennes en tous points, à l’exception d’un casque en métal recouvrant la surface de son crâne. Même s’il soutenait les capacités défensives d’un tel objet, Kalas n’avait jamais souhaité en porter.

(C’est si lourd, je ne comprends pas comment ils font pour se battre avec tout en conservant agilité et vitesse au cours d’une bataille. Ça doit sûrement s’apprendre pendant leur entraînement militaire.)

Jugeant qu’ils étaient fin prêts, le Général des Sylphes s’écartait jusqu’à se mêler aux observateurs attentifs et laissait les deux duellistes s’affronter dans ce qui allait être un combat d’exception. Particulièrement concentré, Kalas ne pouvait détacher le regard de son adversaire qui venait tout juste d’abaisser la lisière de son casque avant de se mettre en posture de combat. Les yeux étincelants d’une lueur de défi, le Sylphe frappait son épée sur le plat de son bouclier afin de canaliser l’excitation qui montait en lui, prêt à se jeter sur le Shaman au moindre signe de faiblesse. Ce dernier ne prêtait guère attention aux spectateurs impatients, s’espaçant largement pour laisser une place de choix au Général parmi eux. Malgré sa réticence d’origine, Kalas prit finalement la chose au sérieux lorsque son adversaire fit son premier pas dans sa direction. Il émanait de son corps un genre de brume semblable au Muutos de Jillian, mais nettement plus nette que la Magie d’Elysian. Le jeune homme ne put s’empêcher de faire le rapprochement avec son propre Muutos qui était en totale contradiction avec les élémentaires d’Ilmatar, cependant semblable au conflit de fluides entre l’Air et la Terre qui régnait sur Yuimen.

Ni une, ni deux, la marche du Sylphe se changeait brusquement en course, écourtant rapidement la distance qui séparait les deux combattants. Prêt à l’accueillir, Kalas levait son bras armé à hauteur de torse, s’attendant à recevoir le premier coup de la charge dans cette partie du corps, tout en étirant sa main libre pour manipuler les fluides qui commençaient déjà à s’exciter dans son bras. La charge était parfaite et même s’il perdait l’avantage de la surprise avec une telle attaque de front, le Sylphe frappait d’un puissant coup droit vers l’épaule de l’humain qui parvint à intercepter sa trajectoire à l’aide de sa rondache. La lame rebondit bruyamment dans un écho métallique qui fit grincer le Shaman des dents, avant de répliquer en repoussant l’arme et le guerrier par la même occasion. L’épreuve de force surprit ce dernier qui profita du manque d’attention pour riposter d’un habile coup de pied dans l’estomac du Shaman, incapable de répondre. Le souffle coupé, Kalas ne put que se maintenir l’estomac en repoussant l’assaillant une nouvelle fois à bout de bras, plus faiblement cette fois. La garde de son adversaire largement ouverte, le Sylphe profitait de l’occasion pour enfoncer son pied droit dans les côtes de l’homme-loup qui perdit toute notion d’équilibre avant de s’échouer face contre terre. La poussière se mélangeait à la salive qui lui recouvrait les lèvres et Kalas recracha un surplus de sang qui était douloureusement remonté depuis son estomac après les frappes vicieuses du Guerrier.

(Bordel, ça fait mal, putain… Il m’a complètement retourné l’estomac…)

Sa vue s’affinait doucement, ses oreilles sifflaient encore et ce n’est qu’après quelques secondes d’une longue et bruyante respiration que le jeune homme fixait dans le blanc des yeux l’élémentaire qui semblait prendre la chose trop au sérieux. Jillian avait sélectionné l’un de ses jeunes pour son talent, il semblait vouloir prouver qu’il avait fait le bon choix. Cependant, le Shaman ne souhaitait pas se faire ridiculiser devant autant de personnes pour finalement perdre la confiance que ses commanditaires avaient placés en lui. Certes, il ne s’agissait que d’un simple duel d’entraînement entre deux apprentis et sa mission sur Elysian n’était pas d’ordre militaire, mais il n’était pas nécessaire de s’afficher comme un perdant aux yeux de tous. Pour Kalas, le combat prenait un tout autre sens que celui prévu à la base.

« Alors ça, tu vas me le payer ! »

Assis à même le sol, le jeune mage puisa dans l’énergie qui lui picotait le bras depuis le début de l’affrontement. La quantité de fluides qui glissait de sa main jusque dans la terre fut telle qu’elle dégageait une très fine levée de poussière dans l’atmosphère qui se dissipait presque immédiatement. Surpris, le Sylphe n’osait agir pendant l’étrange rituel qui se déroulait sous ses yeux ébahis, avant de s’autoriser à soulever maladroitement son bras armé pour tenter d’y mettre un terme. Malheureusement pour lui, il était trop tard pour interrompre le sort de Kalas qui arrivait déjà à maturité. L’esprit du mage l’ordonnait et, lorsqu’il se décalait d’un rapide mouvement sur le côté, le sol vrombissait un court instant avant de vomir droit vers le Guerrier une longue colonne de terre compacte qui s’écrasait droit sur son torse. L’impact fit l’effet d’un coup de bélier et renversait violemment sa cible, incapable de se protéger contre la puissance de la Terre elle-même.

(Je… C’est la première fois que j’utilise ce sort comme ça, mais c’était presque… instinctif. Je… Je commence vraiment à m’améliorer !)

L’assemblée réagissait par de grandes exclamations, mais aucun des spectateurs ne semblait vouloir mettre un terme au spectacle de combativité que leur prodiguaient les deux duellistes. Même Jillian, qui s’attendait à un entraînement des plus simples, observait l’affrontement avec un intérêt certain. Tentant de retrouver un semblant de souffle, le Sylphe se redressait sur ses coudes en massant son torse douloureux dont même l’armure avait été endommagée. Il était certain que chacun des combattants savaient maintenant de quoi l’autre était capable, renforçant l’adrénaline déjà bien concentrée depuis le premier coup porté. Kalas se relevait sans grande difficulté, le regard aussi perçant qu’une pointe de lance. Très à cheval sur les règles, il laissait son adversaire se relever à son tour sans tenter de l’attaquer. La victoire bête et méchante n’était pas ce qu’il désirait et l’assemblée pensait certainement de même. Après quelques secondes de repos, les deux combattants étaient prêts à se faire face une nouvelle fois, chacun réfléchissant à leur prochain coup. Pour le Guerrier, le concept restait simple. Il fallait harceler le Shaman au corps à corps, peu habitué aux passes et autres techniques d’escrimes. Cependant, Kalas ne tenait pas à se laisser faire. Il était sur le terrain d’entraînement pour apprendre à se défendre face à ce genre d’individu, maniant bien mieux l’épée que les mots, qui confirmait parfaitement les faits en chargeant une nouvelle fois bouclier levé. La course était rapide et dangereuse, mais cette fois, l’homme-loup savait comment réagir.

D’un mouvement mariant Magie et grâce artistique, le jeune mage soulevait dans les airs un amas de poussière qui dormait sur le sol, perturbant presque toutes les personnes présentes dans la zone. Seul Jillian, sensiblement habitué à ce genre de Magie, ne semblait pas subir les affres du sortilège incapacitant. Quoi qu’il en soit, le sort eu parfaitement l’effet voulu sur le Sylphe en pleine charge qui s’interrompit à une longueur de bras de Kalas en balayant son visage de la poussière qui lui recouvrait la peau et s’infiltrait dans sa gorge sèche. D’éternuements à crachats de salive, le Guerrier fut particulièrement perturbé par l’effet du sortilège et se débarrassa rapidement de son casque devenu inutile compte tenu des circonstances. Le visage découvert, il était devenu une cible de choix pour le jeune homme qui souriait de voir son plan parfaitement exécuté. Ne laissant passer pareille occasion, Kalas jetait son bras armé droit vers le nez du Sylphe, incapable de savoir à quoi s’attendre. L’impact résonnait jusque dans son épaule tandis que la surface métallique de son bouclier fit craquer le nez de l’apprenti, complètement abasourdi par la violente riposte de l’homme-loup. L’une de ses dents tombait à terre, signe de la puissance du coup infligé, alors que son corps peinait à se maintenir debout. Après quelques instants de lutte, le Guerrier crachait une gerbe de sang qui vint éclabousser la robe de Kalas avant d’attraper son bras toujours collé à son visage. Là, puisant dans toute l’énergie qui lui restait, le Sylphe balayait habilement la jambe du Shaman qui parvint tant bien que mal à conserver son équilibre. La prise lui fit néanmoins perdre suffisamment sa concentration pour ne pas repérer le coup de poing qui se rapprochait dangereusement de son visage. Les doigts gantés de son adversaire vinrent embrasser sa lèvre supérieure et le jeune homme reçu l’attaque de plein fouet, complètement sonné par la surprise du coup. Parvenant tout de même à se dégager de l’étreinte, Kalas fit quelques pas en arrière pour mettre un terme au corps à corps qui le désavantageait avant de parvenir à reposer les yeux sur son adversaire qui entamait une nouvelle charge accompagnée d’un véritable cri de guerre.

Peu intimidé, le Shaman trouvait la force de se remettre en posture de combat, bouclier levé et esprit imperturbable. Le sang qui lui noyait la bouche n’avait aucun effet et l’adrénaline était telle qu’aucun des deux combattants ne semblaient souffrir de ses blessures. L’épée rencontrait le bouclier encore une fois, avant d’entamer un véritable ballet avec celui-ci. Les deux apprentis dansèrent ainsi pendant un court instant, cherchant chacun à profiter d’une ouverture pour mettre un terme à ce combat. Kalas bloquait l’une après l’autre les frappes de son adversaire qui jouait de vitesse et de force pour le déstabiliser, mais sans effet. Une rapide estoc l’obligeait à esquiver, parvenant à le faire sourciller un court instant, avant de reprendre rapidement sa défense de fer. Doucement, la fatigue se fit sentir dans l’esprit de chacun et les mouvements se firent tous plus lents. Les gestes du Guerrier prirent de la lourdeur et la lame glissait plusieurs fois jusqu’au sol, l’obligeant à soulever la poignée pour assurer sa prise. De son côté, le Shaman sentait son bras s’alourdir à force d’encaisser les coups les uns après les autres. Tous deux mal en point, il ne leur restait bientôt plus assez de force pour garder arme en main. Le Sylphe lâcha son épée qui s’échouait au sol avant de tenter une malhabile frappe du poing en direction de Kalas. Les sens en éveil, la main sifflait devant son visage avant de continuer dans le vide au-dessus de son épaule.

(Maintenant !)

L’ouverture était parfaite et la distance suffisante. Dans un grognement de rage, le jeune homme rassemblait ses dernières forces dans son bras armé qui s’écrasait à nouveau sur le nez de son adversaire, incapable de parer sous cet angle. La vue de ce dernier se brouilla, il vit noir, puis blanc, pour finalement perdre connaissance en s’échouant au sol de tout son long en soulevant la poussière.

L’affrontement était désormais terminé.



Tentative d'apprentissage de la CCAA Coup de bouclier : Peu distinguée bien que parfois utile contre un ennemi coriace, cette capacité consiste à tenter d'assommer son adversaire d'un coup de bouclier dans le visage. La force éventuelle d'une arme tenue en main n'entre pas dans le calcul, l'attaque se faisant sans cette arme. L'attaque du bouclier fait for+1/lvl. 20+[lvl]% de chance d'assommer son adversaire. S'il est assommé, il a initiative-1/lvl, esquives et maîtrises-2/lvl, minimum 0, durant [lvl/4] tours, minimum 1).
Condition : être équipé d'un bouclier

(((878 + 924 + 3 014 = 4 816 mots au total)))

A mes questions Ilmarien consenti à répondre. Mais sous le couvert de son ton affable je sentais pointer une légère pointe de désapprobation. Il arguait le fait que demander ceci à la reine aurait été plus judicieux, ce qui n’était pas sot, mais il termina en ajoutant qu’il était surement prévu de nous pourvoir en montures, vivres et équipements. Quant à l’Esprit du Vent il ne daigna pas me répondre, m’invitant à faire cette expérience et à la vivre seul, sans autre regard que le mien. Il me pria de pénétrer dans la forêt enneigée, je respirais un grand bol d’air et d’un pas décida franchis le seuil de pierre blanche.

Les arbres étaient couvert d’une épaisse couche de neige et le vent en charriait toujours plus. Certaines branches des arbres ployaient sous le poids mais aucune ne se brisaient. L’air glacé qui balayait le chemin était brutal, vivant et vivifiant ! Il remuait mes rares cheveux, m’enveloppait entièrement. Je bougeais et voyais mes bras, ils s’effaçaient, se confondaient dans l’atmosphère et reprenaient de leur consistance peu après. Une joie folle m’envahissait, me donna envie de courir et ce malgré la neige qui m’obligeait à sautiller, petit bond par petit bond, pourtant j’arrivais à avancer avec célérité. Je savais que ce monde appartenait à l’Esprit du Vent, peut-être une puissante magie était à l’œuvre et m’avait fait passer d’Ilmatar au royaume de l’Esprit…

Je fus coupé dans mes pensée en arrivant dans une clairière où de rares buissons subsistaient. En son centre trônait un grand rocher, il demeurait insensible face aux furieux assauts du vent qui n’avait aucune prise. A ses côtés gisait une étendue d’eau dont la surface était gelée, il y avait également quelques rares roseaux d’un blanc immaculé qui semblaient statufiés.

« Que tout ceci est beau... »

Une brusque rafale de vent fit soudain voltiger le tapis neigeux, disséminant les flocons tels des nuées d’oisillons constitués de givre.

C’est à ce moment que je remarquais que je n’étais pas seul. Quelque chose de gros se tenait sur le rocher, ça avait l’envergure d’un poney et se tenait sur quatre pattes. Je me rapprochais en mettant l’une de mes mains en visière afin de pouvoir le distinguer.
Un loup somptueux se dressait devant moi. Son pelage opalin était irisé de fugaces teintes céruléennes qui rappelait ses yeux pareils aux cieux azurées. Ses poils s’agitaient au gré du vent, voletaient avec légèreté.

Il était d’une beauté transcendante, incarnait la grâce du Vent tout puissant mais… Je ne parvenais pas à croire que cela puisse être Rana. Je ne remettais pas en question l’honneur des animaux mais… Non je ne pouvais pas me faire à une idée aussi saugrenue. Il devait s’agir d’un être tout autre, mais sa sagesse devait être grande et l’élément qu’Il incarnait prouvait sa valeur. Je décidais donc de voir le bon côté des choses. J’avais la chance de pouvoir rencontrer l’Esprit du Vent ! Grâce à Rana j’avais l’opportunité de converser avec une puissante entité que je n’aurais jamais connue si je n’étais pas venu sur ce monde.

J’afficha un rayonnant sourire et m’approcha tandis que l’Esprit du Vent se posait sur son postérieur et me bravait du regard, la malice luisait dans ses yeux.

« Quelle joie de vous rencontrer honorable Esprit du Vent ! Mon nom est Tartuffe. J’ai été envoyé ici par Rana, la Déesse du Vent de mon monde. » je tâchais de trouver les bons mots et continua dans ma lancée « Je ne serais peut-être pas d’une grande aide pour sauver ce monde mais je ferais tout mon possible pour l’être ! »

Je terminais en m’asseyant devant lui, sa gueule juste au-dessus de mon visage potelé.