L'Univers de Yuimen déménage !


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 Sujet du message: Re: La forêt des Faera
MessagePosté: Mar 19 Juin 2012 19:40 
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"Depuis quand frappes-tu, Athanaë ? Entre." dit Isilmas sans bouger de sa chaise.

À mon grand étonnement, la porte resta close, mais une petite boule de lumière verte la traversa, suivie d'une autre, bleue ciel. Elles s'approchèrent de nous et je reconnus alors dans la deuxième apparition mon faera, Toal. Quelque peu soulagé, je lui offris un grand sourire heureux. L'étrange feu follet tournoya un instant au-dessus de ma tête avant de se poser sur la table, aux côtés de ce que j'imaginais être une consoeur.

"Reprenez une forme normale. J'ai horreur de ça." déclara le vieux mage d'un air las.

Toal fut le premier à prendre sa forme féérique, arborant fièrement ses couleurs absurdes, ce qui me fit sourire l'espace d'une seconde. La deuxième boule de lumière sembla hésiter un instant mais finit par se transformer lorsqu'Isilmas hocha la tête. Sous mes yeux se matérialisa alors une petite fée d'une allure bien étrange. Très peu vêtue, elle affichait des formes généreuses à peine dissimulées par des sous-vêtements en feuillages. Ses bras et ses jambes n'étaient ni plus ni moins que des branches d'arbuste étrangement taillées pour ressembler à des membres humains. Et, comble de l'extravagance, ses cheveux ainsi que ses ailes semblaient faits de multiples petites flammes jaune-orangées.

Je m’émerveillai devant la beauté de cette apparition, puis jetai un oeil à Toal qui était bien moins présentable. Ce dernier s'en aperçu et dû comprendre à quoi je pensais puisqu'il me tira discrètement la langue, l'air vexé. Mon enchantement ne fut pas de longue durée puisqu'Isilmas ne perdit pas une seconde pour reprendre la parole.

"Bien. Alors qu'elles sont les nouvelles ? Qu'avez-vous appris ?"

La faera aux cheveux flamboyants répondit au vieux mage d'une petite voix fluette et quelque peu hautaine.

"C'est la panique dans la forêt. Nous avions raison, le phénomène a touché toutes les faeras, et pas seulement celles de la forêt, mais aussi de tout le continent et même des autres îles. La première à revenir d'Imiftil était à Hidirain et il s'est produit exactement la même chose, voire plus puissamment encore."

La faera marqua une pause pour reprendre son souffle, si du moins ces choses-là respiraient. Le lutin à la barbe grise hochait toujours de la tête, se grattant le menton, comme s'il réfléchissait. Toal me regardait d'un air abattu, ce n'était pas bon signe.

"Nous avons de plus en plus de nos consoeurs qui débarquent ici, pour savoir ce qu'il se passe. Nous n'avons pas encore fait le recensement, mais il semblerait que l'altération des fluides n'ait rien engendré de mortel pour nous, heureusement. Seulement un grand bouleversement, selon les sensibilités et ... Enfin, nous pensons savoir d'où vient la source de tout ceci."

La dénommée Athanaë s'arrêta de parler soudainement, ce qui fut plus que frustrant. Je voulais absolument savoir ce qu'elle pourrait bien dire après. Isilmas semblait être dans le même état que moi puisqu'il ajouta :

"Oui. Alors ?"
"L'une d'entre nous se trouvait à Yarthiss, près du Lac Brumeux et elle ..."
"Le Lac Brumeux !" laissai-je échapper soudainement. Je venais de faire le rapprochement avec mon rêve. "Je ... Je l'ai vu en rêve cette nuit. Il y avait cette armée, et cette magnifique femme ... terrifiante. Ils chantaient son nom et ..."

Le vieillard attrapa tout à coup le col de ma tunique d'un mouvement extraordinairement vif pour son âge et me tira vers lui.

"Comment ça ? Qu'est-ce que tu as vu ? Tu es qui au juste ?"

Dans sa main, brûlaient à présent de petites flammes. Je cherchai un soutien vers Toal, mais ce dernier me regardait aussi étrangement que les deux autres.

"Non ! Je ... Ce n'était qu'un rêve que j'ai fait cette nuit ! Je vous l'assure !"
"Il dit la vérité. J'étais avec lui cette nuit et on n'a pas bougé de la forêt." rassura Toal d'une voix calme.

Le flammes s'éteignirent.

"Raconte-moi ce que tu as vu et Athanaë confirmera ou infirmera tes dires."

J’acquiesçai avant de m'éclaircir la gorge et de commencer mon récit.

"Ce n'était qu'un rêve, mais il me semble à présent, que c'était plus que ça. Une vision ? Je n'en ai jamais eu avant."
"La forêt est riche en fluides. Cela peut arriver, surtout pour ceux qui ne savent s'en servir, comme toi. Mais oublie ça et concentre-toi sur ton récit." affirma Isilmas d'un ton sévère.

Je contai alors mon rêve de cette nuit en essayant de retranscrire le plus de détails possibles. J'essayai de faire abstraction des trois paires d'yeux posés sur moi afin de me concentrer sur mes souvenirs. Lorsque je prononçai le nom de Brytha, le vieillard haussa ses épais sourcils.

"Je crois que ça suffit. Athanaë, tu confirmes ?"

Les deux faeras acquiescèrent en même temps.

"Oui, c'est bien ce qu'on nous a rapporté. Bytha la purificatrice ... Il s'agirait d'une demi-déesse d'un autre monde. On l'appelle la déesse de la neutralité et de l'équilibre. Apparemment, elle est venue avec son armée. Nous ne savons pas encore pour quelle raison. Toujours est-il que son arrivée sur Yuimen a provoqué ce changement dans les fluides. Elle est connue pour ça. C'est une sorte de monomaniaque de l'équilibre et de la neutralité, reniant tous les éléments magiques et par là même, les dieux élémentaires eux-mêmes."
"C'est inquiétant. Préviens-les."
"D'accord" ajouta la faera avant de quitter les lieux en traversant le mur.
"Attendez !" m'exclamai-je subitement. "Une déesse d'un autre monde ? Ça ne vous choque pas ? Qu'est-ce que ça signifie exactement ?"

Toal se tourna vers moi et me lança :

"Je t'expliquerai plus tard"
"Mais je ..."
"Plus tard, oui." me coupa le vieillard. "Il y a plus important pour le moment. La vision que tu as eue n'est pas une coïncidence. Tu as une sensibilité ... Même si tu n'es encore qu'un piètre novice en matière de magie ... Je vais devoir te former."
"Comment ça, me former ?"
"Je vais t'apprendre à servir les fluides au lieu d'essayer de t'en servir. Je dois le faire car tu vas devoir jouer un rôle. Un rôle peut-être important."
"Je ne comprends pas."
"Ce n'est pas ce que je te demande. Je te demande d'écouter ce que j'ai à t'enseigner et de travailler pour arriver au but que je te fixerai. Tu auras le temps de comprendre plus tard. Si tu veux devenir un grand mage, il te faudra apprendre à écouter."

Il marqua une pause, attendant que je réponde. Que me voulait-il exactement ? Que signifiait tout ceci ? Ce vieux fou apprenait l'arrivée d'une nouvelle divinité sur Yuimen et voilà que sa nouvelle lubie était de m'apprendre à utiliser la magie ? Et puis d'abord, je savais déjà faire, je n'avais pas besoin de lui !

"Non, mais attendez, on ne se connait que depuis quelques minutes ! Je vous suis très reconnaissant de m'avoir sorti de la forêt, mais je ne saisis pas l'intérêt de tout ceci. ET puis, en quoi devrais-je vous écouter ? Je ne vous dois rien."
"En effet, tu ne me dois rien. Mais c'est une offre que je te fais là. Comprends bien qu'apprendre la magie au premier venu n'est pas l'un de mes passe-temps préférés, mais je devine en toi un potentiel et cette vision ... comme je l'ai dit, ce ne peut être une coïncidence. Fais-moi confiance, j'en sais assez pour être sûr. Tu as un rôle à jouer et ce sera pour le bien de tous, c'est pourquoi il est en mon devoir de te former."

(Toal ... Par Moura, que dois-je faire ?)
(C'est à toi de prendre la décision. Il te laissera partir si tu le souhaites, j'en suis sûr. Mais cela ne m'étonnerais pas qu'il ait raison.)
(Pourquoi tous ces secrets, tu sais pourtant s'il a raison ou tord ? Pourquoi ne pas me le dire ?)
(Car cela déformerait ton futur. Je ne peux choisir à ta place, j'en suis désolé.)
(Mais je devais aller voir les parents de Milyah ...)
(Ils attendront.)
(Tu restera avec moi, hein ?)
(Bien entendu, je ne peux pas te quitter, de toute façon.)

Je soupirai, terrifié à l'idée de prendre la mauvaise décison.

"Très bien, j'accepte."
"L'entraînement commencera demain, à l'aube."

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 Sujet du message: Re: La forêt des Faera
MessagePosté: Mer 20 Juin 2012 03:31 
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J'avais passé le reste de la journée avec Toal. Il m'avait parlé un peu plus des faeras et de leur forêt. J'avais compris que cet endroit que l'on appelait "La forêt des faeras" à juste titre, était en quelque sorte leur fief. Toal ne sut, ou ne voulut me dire combien elles étaient en tout, mais j'avais appris que la plupart d'entre-elles, celles qui n'avaient pas de maître et ne préféraient pas vagabonder ailleurs, résidaient ici.

Bien entendu, il n'y avait pas que les faeras qui peuplaient cette forêt et mon compagnon m'avait affirmé que de nombreuses autres espèces y vivaient. Mis à part les bestioles courantes dans ce type d'habitat, il n'était en effet pas rare de croiser des camps de Segteks ou encore de Garzoks.

Puis, j'avais lancé le sujet des "autres mondes", qui m'intriguaient depuis que j'en avais entendu parlé plus tôt. Il s'était alors lancé dans une explication compliquée de laquelle j'avais difficilement retenu les grandes lignes. Il existait donc, au-delà du monde connu que l'on nommait Yuimen, d'autres contrées. Situées sur d'autres planètes, ces mondes extérieurs pouvaient êtres rejoins par des "fluides spatiaux", en comparaison aux fluides élémentaires qui régissaient Yuimen. Ces fluides étaient très rares et difficiles d'accès en plus d'être très compliqués à utiliser. Aussi, me conseilla-t-il d'oublier tout cela et de me concentrer sur ma future tâche, celle d'en apprendre d'avantage sur les fluides élémentaires.

Le soleil avait alors décliné et j'étais rentré dans la hutte d'Isilmas qui, vraisemblablement, allait faire office de chez-moi pour un certain temps. Après un dîner des plus spartiate, j'étais donc allé me coucher dans le lit de fortune qu'Isilmas m'avait fait installer aux pieds du sien. La lumière solaire venait à peine de s'éteindre derrière l'horizon lorsque je m'étais endormi.

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Comme je le lui avais demandé, Toal me réveilla à six heures. Lorsque j'ouvris les yeux, le vieux lutin était déjà debout et préparait le petit-déjeuner. Contrairement à la veille, le repas était copieux. De nombreuses tartines, du miel, de la confiture et du fromage. La table de la petite bicoque croulait sous les mets, ne laissant que peu de place pour y manger. Encore une fois, nous nous sustentâmes en silence, ce qui me convenait parfaitement puisque je n'étais que peu bavard le matin et de mauvais poil, qui plus est.

Le repas fini, Isilmas m'ordonna de me préparer à quitter la maison en emmenant le moins de choses possible, ce que je fis. Quant à lui, il enfouit dans un baluchon une bonne poignée de vivres ainsi que quatre grandes gourdes. Puis, nous quittâmes la petite cabane pour s'enfoncer dans la forêt.

La balade dura une bonne heure et j'éprouvai quelques difficultés à suivre le vieil homme qui marchait à vive allure. Malgré son grand âge en apparence, le vieillard dissimulait des ressources inattendues. De plus, il ne m'attendait pas le moins du monde, se contentant de tourner la tête de temps en temps pour s'assurer que j'étais toujours à portée de vue.

Au bout de cette heure harassante, nous débouchâmes sur une petite clairière abritant une pierre angulaire et plantée dans le sol en son centre. J'en conclus que c'était l'endroit où nous allions procéder à ce fameux "entraînement". Je jetai donc mon sac ainsi que le baluchon que m'avait fait porter Isilmas par terre et m'y assis, essoufflé.

"Debout, ce n'est pas encore le moment de se reposer." me lança le vieillard.
"Je peux quand même boire un peu d'eau, non ? Na !" rétorquai-je.

Le lutin secoua la tête, mais ne dit mot. Je pris donc ma gourde personnelle et en avala une grande goulée. Pendant ce temps, le vieux mage se mit à léviter littéralement, devant mes yeux ébahis, pour atterrir en haut du rocher. J'en recrachai le peu d'eau qui restait dans ma bouche.

"Comment ..."
"Les fluides ne sont pas au service du mage, mais c'est bien le mage qui doit les servir. Ce sera ta première leçon."

Encore une réponse à côté de la plaque ... Mais sa petite démonstration avait tout de même eu l'avantage de m'intéresser à ce qu'il avait à m'apprendre. Toal qui nous avait suivi, voletait allègrement dans la petite clairière.

"Très bien, apprenez-moi tout ce que vous que vous savez, puisque c'est pour ça que nous sommes ici."
"Si je t'enseignais le quart de ce que je sais, ta cervelle exploserai, jeune lutin."
"Espèce de pustule de rogneur putréfiente ! Na ! Tu crois que tu peux me ..."

Le mage leva les deux bras vers le ciel et un cercle de feu m'entoura instantanément, faisant monter soudainement la température à une chaleur à peine supportable. Je plaçai mon bras devant mes yeux pour me protéger de la lumière.

"Si tu t'en sens capable, jeune novice, montre-moi ce que tu sais faire. Éteins ce feu avec à l'aide des fluides."

Je remontai mes manches tout en murmurant pour moi même : "Très bien vieux machin, tu me lances un défi ? Tu veux voir de quoi je suis capable ? Tu vas être servi !" Concentrant le maximum de fluides dans mes deux bras, je les projetai ensuite contre le mur de flammes. J'étais sûr de moi. Ce sort, je le connaissais bien, je l'avais utilisé à maintes reprises. Deux énormes jets explosèrent depuis la paume de mes mains pour aller s'écraser contre le feu magique. Un nuage de vapeur s'échappa, m'empêchant de voir si mon sort avait fait mouche. Lorsque la brume se dissipa, je pus m'apercevoir que les flammes étaient intactes.

"Ok, tu veux jouer à ça ?"

J'augmentai encore la pression en concentrant toujours plus de fluides vers mes deux membres. La force des deux jets me fit reculer des quelques pas avant que je toruve une stature d'équilibre, penché vers l'avant. Je voyais le feu diminuer petit à petit. Reprenant alors espoir, je jetai un oeil vers mon "maître". Erreur. Une boule de feu frôla mon oreille.

"Concentre-toi sur ton but !"
"NAN MAIS VOUS ÊTES MALADE ?" hurlai-je alors en sa direction.

Je fis converger mes deux jets d'eau vers le vieillard pour me venger. Le cercle de flamme disparut alors pour se re-matérialiser sous la forme d'un bouclier devant lui. Les deux jets s'écrasèrent sur ce mur magique et y disparurent sous la forme d'un petit nuage de brume qui s'estompa aussitôt. Les flammes quant à elles se désagrégèrent aussi.

"Ne te détourne jamais de ton but ... Et ne refais jamais ça." dit-il me dardant de son regard gris.
"Vous l'avez fait exprès ! Vous m'avez fait croire que mon sort fonctionnait pour que je vous regarde ! Na ! Éteindre ce feu était impossible !"
"Et pourtant, tu y arriveras. Il suffit d'avoir foi."
"Je ne vous crois pas !"

Le vieillard tandis alors un bras vers Toal qui s'était posé tout près de lui sous sa forme de luciole. Sous mes yeux horrifiés, la petite lumière bleue s'embrasa tout à coup.

"NOOON !"

J’accourrai vers mon faera, ivre de colère.

"Vous êtes un monstre !"
"Si tu veux le sauver, éteins le feu !"

Lançant un regard foudroyant au vieux lutin, j'armai mon bras de fluide et lançai un jet droit sur la luciole enflammée. Une nouvelle vapeur s'éleva, mais le brasier persista. J'hurlai de douleur et de colère et préparai un nouvel assaut. Réunissant mes deux mains ensemble pour former un jet encore plus puissant. De la même manière que précédemment, la pression me fit reculer et je dus mettre à mal tous mes muscles pour parvenir à rester debout. Le geyser traversa mon faera, englobant la totalité des flammes, mais lorsque j'arrêtai le tir, les flammes reprirent de plus belle.

"Aie foi ! Par Meno !"

Je fermai les yeux et penchai la tête vers le sol.

(Moura, déesse bien aimée, je te prie de me prêter ta force et tes fluides. Aide-moi à sauver mon ami.)

Quelque soit la conséquence d'une telle prière, elle me donna la force de tenter une dernière fois. Je réunis tout ce qu'il me restait d'énergie magique à l'intérieur de mon corps et fis claquer mes mains. Puis, je les apposai sur le sol, lançant un dernier regard déterminé envers mon "maître". Un grondement se fit entendre, un bruissement de vague s'éleva dans l'air et, avec l'odeur iodée de la mer, une immense vague surgit de nulle part et s'éleva à une dizaine de mètres du sol pour venir s'écraser sur le rocher où brûlait mon camarade.

Lorsque l'eau se fut quelque peu dissipée, je constatai avec un soulagement modéré que les maudites flammes avaient disparu. J'accourrai alors au chevet de mon ami qui, et j'en fus plus que surpris, se mit à voleter dans tous les sens comme si de rien n'était. Toujours perché en haut de son maudit caillou, le vieux mage me toisait.

"Il faut être ignorant pour ne pas savoir que les faeras ne peuvent mourir, ni souffrir. Ces animaux extraordinaires sont faits de fluides et seulement de fluides, l'aurais-tu oublié ?"

Je rageai intérieurement. Tout ceci n'était qu'un coup monté, et qui plus est, Toal était dans le coup !

"Cependant, tu as réussi l'épreuve. Tu as éteint le feu. Tu as compris ce que signifie servir les fluides. Ainsi s'achève notre première leçon." il sembla esquisser un vague et furtif sourire.

J'étais épuisé, essoufflé. La totalité de mon énergie magique avait quitté mon corps et je pestai contre ce vieux fou furieux. Par dessus tout, j'avais peur que tout cet "entraînement" se déroule de la même manière. Mais tout au fond de moi-même, j'étais satisfait car j'étais sûr de l'avoir vu sourire.

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 Sujet du message: Re: La forêt des Faera
MessagePosté: Mer 4 Juil 2012 22:32 
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Magic Kid (Partie II : Les fluides)


J'eus à peine le temps de m'asseoir quelques minutes et de consommer la moitié de ma gourde d'eau que le vieil Isilmas m'ordonnait déjà de me relever et de continuer l'entraînement.

"Quoi ? Na ! Mais je ne suis pas encore prêt ! Et puis, je n'ai même plus d'énergie magique ! Je ne peux plus utiliser de fluides. Na !"

"Les mages ne sont que des catalyseurs. L'énergie magique n'est qu'un mythe. Les fluides sont le monde et le monde n'est que fluide. Toi, moi, la forêt, notre planète. Tout ne fait qu'un et les dieux surveillent. Ce sera ta deuxième leçon."

De nouveau le mage répondait étrangement, en énonçant ce qu'il semblait vouloir être des vérités absolues. Je commençai à comprendre comment cet enseignement allait se dérouler. Il me lancerait une phrase sans aucun sens, m’annonçant que c'était ma leçon, puis ce serait à moi d'en comprendre la signification, sur le terrain. Autant dire que cette méthode était bien différente de ce que je connaissais déjà. Dans mon village, on passait surtout beaucoup de temps à lire des bouquins et très peu à s'entraîner, finalement. La première fois que j'avais lancé un vrai sort, c'était pour remplir une bombe à eau. Mais c'était tout de même amusant ...

"Mais ... Je ne comprends pas. Pourquoi ne m'expliquez-vous pas ce que vous attendez de moi au lieu de faire des énigmes ?"

Il ne prit pas la peine de répondre et se contenta de lever la main. Une minuscule flamme apparut alors à mes pieds, sur une grosse pierre plate. Elle était ridicule par rapport à celles qui s'étaient élevées plus tôt, mais contrairement à ces dernières, elle émettait une douce chaleur réconfortante.

"Éteins le feu avec les fluides."

Et voilà qu'il s'y remettait, toujours cette rengaine. Comment pouvais-je éteindre ce feu alors que j'étais incapable d'utiliser la magie ?

"Mais je vous ai dit que je ne pouvais plus ..."

"Les mages ne sont que des catalyseurs. L'énergie magique n'est qu'un mythe. Les fluides sont le monde et le monde n'est que fluide. Toi, moi, la forêt, notre planète. Tout ne fait qu'un et les dieux surveillent. Ce sera ta deuxième leçon."

Il se répétait. Le vieux devenait-il sénile pour radoter ainsi ? Il me fixait sans cligner des paupières, comme s'il voyait en moi. Je ne saisissais pas le but d'un tel exercice ... À quoi bon ? Il était impossible de lancer un sort dans cet état, on me l'avait toujours dit !

"Oublie ce que tu sais ... Ressens."

Le vieux changeait enfin de disque, mais c'était pour énumérer une nouvelle devinette. Comment espérait-il que j'arrive à mes fins s'il ne m'expliquait rien ? Tout de même, ces mots étaient étranges, j'avais l'impression qu'il parvenait à lire dans mes pensées. "Oublie ce que tu sais ... Ressens.". Était-ce une réponse à mes pensées ? Je n'en savais rien et cela me paraissait peu probable.

(Très bien, ressens ... Ressens ... Ressentir quoi nom d'un Harvey en gelée !?)

Je tentai de faire fi de mon exaspération et fermai les yeux un moment. Après tout, c'était bien comme cela que j'arrivai le mieux à me concentrer, en me privant de l'un de mes sens. Cela me permettait de percevoir les fluides qui parcouraient mon corps, mais à présent, ils ne gigotaient pas comme à leur habitude. Ils semblaient lassés, épuisés et traversaient lentement mes vaisseaux au rythme des lourds battements de mon coeur.

Je devais me focaliser sur les fluides, rien que les fluides. Les multiples gazouillis d'oiseaux qui voletaient autour de la clairière m'en empêchaient. Je me bouchai les oreilles avec mes deux index. Les aigus disparurent, réconfortant mes tympans d'un calme inattendu mais les graves parvenaient toujours à franchir le mur de chair pour se répercuter dans mon crâne. Fronçant les sourcils, je m'efforçai de faire abstraction de ses sons superflus. Quelques secondes supplémentaires et j'étais enfin privé d'un second sens : l'ouïe.

C'est alors que je ressentis enfin. Je les sentais, là, ils étaient présents partout autour de moi, les fluides. Circulant anarchiquement dans la terre sur laquelle je reposais comme dans l'air que je respirais. Je ne pouvais pas les identifier précisément, mais ils étaient là, dans les arbres qui m'entouraient, dans la vie qui peuplait la forêt, dans la pierre en face de moi et dans le feu qui la recouvrait. Mon sang ne fit qu'un tour et des picotements envahirent mes extrémités. Une telle sensation pour un mage était sans aucun doute difficile à percevoir. Je ne doutais pas que peu de mes compères l'eurent un jour sentie.

Le vieux disait donc vrai, ce n'était pas une énigme. Tout était fluide, seulement, le commun des mortels ne pouvait le percevoir et seuls les mages arrivaient à ressentir les leurs. Je souris. C'était une chance de savoir cela, j'avais l'impression de toucher du doigt une part de connaissance divine.

La leçon d'Isilmas prit alors tout son sens. Je devais utiliser ces fluides qui m'entouraient pour lancer mon sort. Je devais être leur catalyseur, les faire circuler à travers moi, les transformer et les relâcher sous la forme d'un jet d'eau. Ce n'était finalement pas si différent de d'habitude une fois qu'on était au courant que ces énergies magiques circulaient partout et qu'on était capable de les sentir.

Confiant, j'étendis les bras de chaque côté de mon corps et, d'un mouvement ample, les fit revenir lentement vers moi, comme si j'essayai de m'envoler. Je devais avoir l'air plus qu'idiot, les yeux fermés en train d'agiter les bras dans l'air, mais cela fonctionnait. Tournoyant autour de moi, les fluides les plus proches de mon corps se resserraient et s'unissaient. Je les appelai, leur ouvrant les portes de mon corps pour les laisser entrer.

(Venez ... Venez)

Finalement, une infime partie d’énergie magique s'engouffra à travers ma chair, mais cela suffit. Je sentis presque instantanément mes fluides se réveiller, reprendre de la fougue. J'ouvris alors brusquement les yeux et tendis le doigt vers le minuscule brasier devant moi. Je déchargeai mon énergie nouvelle sur le pauvre incendie. Les fluides traversèrent mon doigt à une vitesse fulgurante et en ressortirent sous la forme d'un petit jet d'eau qui s'écrasa sur le foyer. La flamme s'éteignit. L'épreuve était terminée.

Je me tournai vers Isilmas, un grand sourire accroché aux lèvres, heureux de ma réussite. Mais lui était impassible, mon sourire s'effaça.

"Bien, tu as réussi. Repose-toi maintenant et bois dans l'une des gourdes que j'ai amené, nous allons pouvoir passer aux vraies épreuves."

Ces derniers mots m'arrachèrent une grimace d'horreur et je voulus contester, mais le vieux lutin avait déjà fermé les yeux et s'était assis en tailleur sur la grosse pierre, méditant.

(((Apprentissage RP de la capa de Magicien : Maître des fluides ; acquise automatiquement)))

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 Sujet du message: Re: La forêt des Faera
MessagePosté: Jeu 5 Juil 2012 02:48 
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Magic Kid (Partie III : L'esprit)


Le contenu de l'énorme gourde d'Isilmas me fit le plus grand bien. Le liquide qui coula dans ma gorge était sucré et désaltérant. Mais plus que cela, je sentis mon énergie magique se restaurer rapidement. La nature du contenu était sans équivoque, c'était ce que mon instructeur à Haälekti nommait "une potion de mana". L'effet était des plus agréable, comme un bon repas suivit d'une bonne nuit de sommeil. Je regorgeai alors d'énergie et avais plus qu'envie d'en revendre.

J'essuyai ma bouche d'un revers de la main et, d'un hochement de tête, signifiai à mon instructeur que j'étais prêt à reprendre l'entraînement avant de me rappeler que ce dernier avait toujours les yeux fermés. Pour me donner encore un peu de courage, je repris alors avec plaisir une nouvelle gorgée de cette fabuleuse boisson, puis lui lançai :

"Allez ! Je suis prêt à résoudre une nouvelle énigme de votre esprit tordu ! Na !"

"L'esprit n'est qu'un ensemble d'idées et les idées sont ..."

"Des fluides ?" le coupai-je, insolemment.

Il ouvrit immédiatement les yeux et me foudroya de son regard perçant. Je baissai les miens tout à coup, comme un petit enfant que l'on venait de surprendre en train de faire une bêtise. J'en ressentais d'ailleurs la même gêne. Sans un mot de plus, comme si son seul regard suffisait à me faire comprendre que je devais la boucler, il reprit :

"... régies par les fluides. Il referma les yeux. Le mage, en tant que catalyseur, peut s'immiscer dans les idées en interférant dans les fluides. Ce sera ta troisième leçon. Interfère dans mes idées."

Il se tut alors, restant dans l'exacte même position, me laissant seul avec son éternelle énigme à résoudre. Cependant, je commençai à comprendre de mieux en mieux le sens de ses phrases, même si tout n'était pas tout à fait clair.

(Bien. L'esprit est régi par des idées, idées qui sont elles régies par les fluides. Donc, logiquement, interférer dans les fluides permettrait d'interférer dans l'esprit. C'est donc sur ses fluides à lui que je dois me concentrer ...)

Mais comment faire cela ? Ce que je venais d'apprendre me serait certainement utile. L'énergie magique était capable de se déplacer dans l'air et dans toutes choses par la même occasion. Pouvais-je alors faire en sorte que mes fluides se déplacent jusqu'aux siens ? Ainsi je pourrai les contrôler à l'extérieur de mon corps et surtout, à l'intérieur du sien. Je décidai d'essayer.

Fermant de nouveau les yeux, j'appréciai les vives ondulations de mon énergie intérieure nouvellement rechargée. Mes fluides bouillonnaient, prêts à être lancés à tout moment. Mais la difficulté ici était que je devais les expulser sans pour autant les transformer, comme j'avais pris l'habitude de le faire avec mes sorts normaux. En partant du centre de mon estomac, j'expulsai mes fluides à l'extérieur de mon corps, lentement. Rien ne se passa pendant un moment, jusqu'à ce que soudainement, je me mis à suer abondamment, puis de l'eau jaillit de ma bouche et de mes narines en un flot puissant et ininterrompu. Je criai de surprise, offensé par une telle réaction, mais l'effet s'arrêta au bout d'une poignée de secondes.

"Par le con de Gaïa !" jurai-je alors en laissant échapper un horrible blasphème sous le coup de la colère.

Je crus voir la commissure des lèvres du vieux se rehausser légèrement, mais chassai simultanément cette idée de mon esprit. Je devais me concentrer à ma tâche, cet échec bien qu'horriblement vexant et humiliant avait fait naître en moi une raison de plus pour y parvenir. Je réitérai alors la démarche en prenant bien soin de ne pas transformer mes fluides cette fois-ci.

Au bout d'un certain temps, je pus ressentir mes fluides d'eau irradier lentement de mon corps sous une forme vaporeuse. C'était une sensation bizarre. Je pouvais les contrôler alors qu'ils étaient à l'extérieur de moi, comme si une partie de moi-même, un membre, avait quitté mon corps et pouvait se balader tranquillement à l'extérieur. Lentement, je les poussai alors vers l'avant, en direction du vieux mage assis. Je pus sentir leur avancée laborieuse ... jusqu'à un certain point. À à peine un mètre d'Isilmas, je perdis le contact avec mon "membre fluidique". Je grognai d'exaspération. J'étais si près du but !

(Aller ! Encore une fois !)

Les fluides se séparèrent de mon corps et se déplacèrent lentement, invisibles, à travers la clairière. Je pouvais percevoir les autres fluides, ceux de la forêt, altérer les miens pendant leur voyage, mais je tins bon. Alors que mon front perlait de sueur sous l'effort mental et physique que j'exerçai, ils atteignirent enfin le lutin. Je provoquai alors une ultime poussée vers l'avant pour qu'ils entrent en lui et relâchai finalement la pression, essoufflé.

J'observai alors mon faux ennemi du moment. Il n'avait pas bougé d'un poil, et pour cause, rien ne s'était passé. En réalité, mon "membre fluidique" s'était heurté juste avant de pénétrer dans son esprit à une sorte de bouclier, fait de ses propres fluides à lui. Je commençai à comprendre que la difficulté n'était pas le voyage jusqu'au mage, mais plutôt d'y faire survivre mes fluides en sous-nombre. Je soupirai de désespoir. J'étais las.

--------------------------------


Après presque un demi-litre de potion de mana et une bonne vingtaine d'essais infructueux, je finis enfin par trouver la quantité optimale de fluides à envoyer pour parvenir à percer le bouclier mental qu'érigeait Isilmas dans son esprit. Une fois à l'intérieur, mon énergie magique se confondait avec la sienne et j'avais du mal à discerner mes propres fluides. Je tins tout de même bon et réussit à faire s'installer mon énergie dans son cerveau. Il me suffit alors de libérer mes fluides pour qu'ils se mettent à voyager anarchiquement dans son esprit, interférant dans ses idées. Je perdis alors le contact et m'agenouillai par terre, épuisé.

Cependant, je n'eus pas le temps de me réconforter bien longtemps puisque le vieux mage eut une réaction bien étrange. Il se mit à hurler tout à coup, son écho résonnant à travers les chênes et les bouleaux de la forêt. Une volée de Harneys s'éleva bruyamment dans le ciel en réaction de cette clameur effrayante. Ses paupières s'ouvrirent sur des globes blancs injectés de sang. Cela dura quelques interminables secondes pendant lesquelles je n'eus le courage ni l'esprit de bouger avant qu'il ne lève enfin la main et d'un geste, stoppe cette affreuse démonstration. Il s'écroula sur la pierre et j'accourus pour le relever. Alors que je le tirai par le bras afin qu'il se remette sur pieds, il murmura :

"Comme tu peux le constater, cette façon de procéder peut être très efficace. Seuls les mages les plus talentueux peuvent se permettre d'y parvenir. Elle permet au lanceur de sort d'interférer avec l'esprit de son ennemi, dans ce cas précis, tu as provoqué une hallucination."

Il toussa tandis que je lui lançais un regard anxieux.

"Ta leçon est terminée pour aujourd'hui. Tu as mérité du repos ... Aide-moi à faire le chemin du retour."

C'est alors que nous quittâmes la clairière pour retourner à la bicoque d'Isilmas. Inquiet pour la santé de mon mentor et des effets des nouveaux pouvoirs que j'avais acquis, je ne sentais plus le poids du sac de provisions ni celui du vieux mage sur mon épaule bien que mon état de fatigue était avancé.

(((Tentative d'apprentissage du sort évolutif neutre : Hallucination collective)))

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 Sujet du message: Re: La forêt des Faera
MessagePosté: Ven 6 Juil 2012 21:49 
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Deuxième lettre à la mater


Chère Maman,

Cela fait bien longtemps que je ne t'ai pas écrit. J'espère que ma dernière lettre que j'avais rédigée pendant mon premier voyage en mer t'a plu et t'a permis de tenir sans nouvelles de ma part pendant tout ce temps.

Comme tu peux t'en douter, il s'est passé énormément de choses durant ces trois mois. Tout d'abord, le jour après notre arrivée, Bab m'a lâchement abandonné, ne me laissant qu'un mot d'au-revoir, prétextant une affaire urgente et dangereuse. Je peux te dire que si je le retrouve, je lui ferais payer ! J'ai néanmoins visité Kendra-Kâr, une ville fabuleuse. Il y a énormément de gens qui y vivent, s'en est presque étouffant. Et que dire des constructions impressionnantes que les grands-dadais sont capables d'ériger ! C'est presque aussi beau qu'une caravelle en mer.

Cependant, j'ai remarqué que ces humains sont tous plus ou moins dérangés, et pas dans le bon sens du terme. Je veux dire, pas comme Thülu qui se met à pousser des hurlements stridents dès qu'on s'approche de ses cultures ou comme le cousin Kiilÿ qui ne peut pas s'empêcher de voler tous les lacets de chaussures et les boutons de chemise qu'il voit. Non, non, les grand-dadais, ils ont vraiment un grain ! J'ai passé une nuit dans une de leurs maisons, à Kendra-Kâr et je peux te dire qu'ils ont tous un problème. À tel point, qu'en fait, j'ai pas compris la moitié de ce qu'il s'y passait, mais bref, j'en suis sorti maintenant.

J'ai aussi rencontré de bonnes personnes, une Ynoriene du nom de Milyah et un gentil segtek qui se nomme Fenouil (t'as vu, c'est bizarre, hein ?). Enfin, c'est pas vraiment un segtek, s'il m'entendait, il se vexerait, il dit lui-même être un "petit homme vert". J'ai fais un bout de chemin avec lui jusqu'à Oranan pour retrouver Milyah qui avait disparue, mais malheureusement, j'ai appris sur la route que mon amie était décédée. J'étais affreusement triste, tu ne peux pas savoir ! Milyah était l'une de ces grand-dadais avec qui je pouvais m'entendre, elle m'a même laissé grimper sur son épaule ! J'ai alors voulu rejoindre Oranan, seul, pour annoncer la nouvelle à sa famille. Seulement, je me suis perdu sur la route et je me suis retrouvé dans une forêt étrange dans laquelle j'ai dû camper.

À mon réveil, je me trouvais dans la hutte d'un vieux lutin bizarre. Je te jure, il est super bizarre, il a vraiment l'air vieux, tout ridé et tout ! Tu as déjà vu ça toi ? Moi je croyais que les lutins ne pouvaient pas vieillir physiquement ! Et puis, c'est la première fois que je vois un lutin si peu drôle. Franchement, je ne l'ai vu qu'à peine sourire une seule fois pendant presque trois mois ! J'ai tout essayé, des blagues, des acrobaties, des petites farces toutes mignonnes, mais rien ! Au lieu de se bidonner, il se met en colère ... Bref, il s'avère que ce vieux lutin qui porte le nom d'Isilmas (ça aussi c'est bizarre comme nom de lutin, d'ailleurs) est un super méga mage trop fortiche. Enfin, je crois car il ne montre pas trop ses talents. Toujours est-il que le vieux fou (c'est comme ça que je l'appelle, en cachette) est devenu une sorte de mentor pour moi et il m'apprend plein de choses super géniales en matière de magie !

Sans entrer dans les détails, je peux te dire que ma vision du monde et des fluides a totalement changé depuis que je suis son enseignement. D'après lui, j'aurais des dispositions pour devenir un grand mage, mais y'aurais du boulot (franchement, je le montre pas, mais je suis trop content qu'il dise ça !). Il faut bien avouer que sa manière d'enseigner est vraiment marginale, mais j'apprends vite. Bon, c'est vrai que ça fait depuis la fin de l'été que nous sommes en train de rabâcher les trois premières leçons (et c'est la fin de l'automne au moment où je t'écris), mais j'ai l'impression de progresser de jour en jour ! D'ailleurs, je suis tout excité aujourd'hui, car il m'a dit que dès demain, nous entamerons une nouvelle leçon !

Je dois finir ma lettre ici, Isilmas sert le repas et il n'aime pas attendre. J'espère revenir en ville assez tôt pour donner cette lettre à un messager, aussi je ne sais pas quand tu la recevras, mais je vous embrasse (toi et papa).

Bises,
Psylo.

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 Sujet du message: Re: La forêt des Faera
MessagePosté: Ven 6 Juil 2012 22:51 
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Le baptême du feu (Partie I)


Comme à mon habitude depuis plusieurs mois, je m'éveillai à l'aube, étirant mes bras au-dessus de ma tête en lâchant un long bâillement sonore. J'entendis grogner derrière moi, Isilmas détestais quand je faisais cela, ce qui m'encourageai bien sûr à continuer, poussant même le vice jusqu'à me forcer, parfois.

Je frissonnai et remontai au-dessus de mes épaules l'épaisse couche faite de multiples couvertures qui s'était déplacée durant la nuit. Le froid de plus en plus glacial de cette fin d'automne annonçai le début de l'hiver et, l'isolation de la vielle cabane du mage étant déplorable, nous avions dû survivre en ajoutant toujours plus de couches sur nos vêtements et nos paillasses respectives. Cependant, cela ne me gênait guère, car avec l'hiver, venait les nuits plus longues et donc, comme le vieux fou tenait absolument à ce que nous nous levions avec le soleil, des nuits plus reposantes.

Comme à son habitude à lui, Isilmas était levé avant moi et ravivait déjà le feu dans la cheminée salvatrice. Comme toujours, le petit-déjeuner attendait déjà sur la table et nous nous attelâmes donc à notre petit rituel du repas silencieux. Puis, comme chaque jour, nous nous apprêtâmes à sortir pour rejoindre la clairière où s'effectuai mon entraînement depuis maintenant presque trois mois.

Cependant, ce jour là était différent. En effet, il était enfin venu le temps d'attaquer la "quatrième leçon", comme me l'avait signalé Isilmas la veille. Habillé chaudement d'un manteau prêté par le vieux et chargé de l'éternel sac de provisions pour la journée, je suivis donc mon mentor jusqu'à notre lieu forestier fétiche.

---------------------------------------


Grelottant et suant à la fois, je lâchai le sac de provision en grimaçant avant de me masser le dos dans un grognement de douleur. J'avais la nette impression que ce foutu sac était plus lourd de jour en jour et je suspectais le vieux d'y être pour quelque chose.

Depuis quelques semaines déjà, l'entraînement commençai par une séance de méditation pendant laquelle j'étais censé m'imprégner des fluides naturels environnants, m'entraînant à réutiliser de mieux en mieux chacune des leçons précédentes. Ne dérogeant pas à la règle, je m'assis donc en tailleur, les yeux fermés, au beau milieu de la clairière juste en face de mon mentor qui tenait la même position sur son rocher. Mais cette fois-ci, je fus interrompu par la voix grave et sévère de mon unique interlocuteur.

"Pas de méditation aujourd'hui. Nous avons beaucoup à faire. Cherche dans le sac une fiole de couleur orangée."

Interloqué par un tel comportement de la part du vieux lutin, je le fixai béatement. Il m'avait tanné pendant des semaines avec l'importance de cette fichue méditation pour me dire qu'aujourd'hui, elle ne serait pas nécessaire !? Non mais y'avais de quoi se taper la tête contre les murs, moi je vous l'dis !

Néanmoins, tout en grommelant dans ma barbe, je m’exécutai et fouillai dans les provisions à la recherche de cette fameuse fiole. Lorsque je mis enfin la main dessus, je découvrais avec étonnement qu'elle était étrangement chaude. J'examinai alors de plus près ce curieux flacon pour y apercevoir, flottant à l'intérieur, une brume orangée. Cet admirable volute semblait danser et rougeoyer anarchiquement dans sa prison de verre. Les reflets étincelants me rappelaient les flammes d'un foyer lointain et rassurant. Curieux de cette nouvelle découverte, je demandai à mon mentor :

"Qu'est ce que c'est ?"
"Une portion de fluide de feu. Je considère que tu es à présent prêt à l'absorber."
"Un fluide de feu ... C'est génial !"

Tout excité à l'idée de tester une nouvelle forme de magie pure, je débouchais le flacon d'un mouvement du pouce et portais fébrilement le goulot à mes lèvres pour en boire le contenu. Mais, à ce moment précis, Isilimas, plus vif que l'éclair, fit s'écraser son bâton de marche sur le haut de mon crâne, provoquant une douleur vive et brutale. La fiole de fluide faillit m'en échapper des mains pour aller se briser sur le sol.

"Aïe ! Mais ça va pas !"
"N'as tu rien retenu de tes leçons précédentes ? Les fluides ne sont pas des choses à prendre à la légère ! Le fluides sont ..."
"Tout et tout n'est que fluide. Je sais."

Il me lança un regard torve et accusateur.

"Alors tu devrais savoir qu'absorber ainsi une partie divine de notre monde serait un horrible pêché !"
"Que dois-je faire alors ?"
"Pose la fiole sur cette pierre et prie Meno. Demande-lui la permission d'utiliser une partie de son pouvoir, s'il t'en juge capable, alors tu seras exaucé. Sinon, tu auras échoué à ta destinée."

Comme j'en avais l'habitude, je ne comprenais pas l'entièreté des mots d'Isilmas, mais cette fois-ci, l'ordre était assez clair pour être correctement exécuté. Aussi, je reposai la flasque ouverte sur une pierre plate devant moi, m'agenouillai et priai le dieu du feu comme mon mentor me l'avait demandé.

Un long moment s'écoula pendant que je priais sans relâche et sans quitter des yeux la fiole de fluide, lorsque soudain et sous mes yeux ébahis, la brume s'éleva comme par magie, (enfin non par magie) pour s'évader de sa prison de verre. Puis, lentement, elle se dirigea vers moi avant de s'engouffrer violemment dans mon corps par mes narines.

Mes poumons se gonflèrent brusquement, m'obligeant à relever la tête et mon corps se réchauffa instantanément. Chatoyante et enivrante, je sentais brûler au creux de mon estomac comme une vague de chaleur. Ma peau était ardente et une fièvre torride semblait s'être emparée de mon corps. Je vis avec une certaine frayeur ma peau rougeoyer quelques secondes, puis, plus rien. Tout redevins au point de départ, comme s'il ne s'était rien passé. Des gouttes de sueur perlaient de mon front et je sentais un filet glacial dégouliner le long de mon échine.

Anxieux, je lançai un regard implorant à mon mentor qui répondit simplement :

"Félicitations."

(((Absorption du fluide 1/4 de feu )))

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 Sujet du message: Re: La forêt des Faera
MessagePosté: Sam 7 Juil 2012 00:08 
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Le baptême du feu (Partie II)


Le réconfort apporté par la vague de chaleur du fluide ignescent fut de courte durée et bientôt, je grelottais de nouveau. Refermant mon manteau encore un peu plus pour tenter de conserver encore un peu de cette chaleur magique, j'essayai laborieusement de m'ériger sur mes pieds flageolants.

"Mon jeune élève, c'est un grand moment pour toi, comme pour tout mage. Aujourd'hui, tes fluides corporels définissent deux éléments de notre monde. Jouis des nouvelles possibilités qui s'offrent à toi, respire et sens le pouvoir de tes nouveaux amis."

Il marqua une pose, conservant le mystère tandis que je tremblais de plus en plus sous l'effet du froid et de l'expérience que je venais de vivre.

"Les fluides sont les éléments, les éléments cohabitent et s'unissent même parfois, mais en tant que catalyseur, le mage doit apprendre à faire la différence. Ce sera ta quatrième leçon. Pour combattre le froid, allume un feu à l'aide de tes nouveaux fluides."

L'épreuve était claire, cette fois-ci, et elle semblait simple. Mais je ne doutais pas qu'apprendre à dompter mes "nouveaux amis" comme il le disait, allait être bien difficile.

(Tout d'abord, apprendre à faire la différence. Je présume que c'est faire la différence entre ces deux éléments : l'eau et le feu. Je dois parvenir à utiliser les uns sans faire appel aux autres, sans quoi, cela n'aurait pas l'effet désiré, j'imagine.)

Je repris ma position de méditation : à genoux, les yeux fermés et tentai de ressentir mes nouveaux fluides. La sensation était étrange. L'eau, semblable à des vagues déchaînées à l'intérieur de mon corps naviguaient le long de mes membres et s'entrechoquaient au niveau de mon estomac. J'avais toujours cru que les fluides se ressentaient ainsi puisque je n'avais jamais eu d'autre sensation élémentaire au préalable, mais je pouvais pressentir un récent intrus. Le feu, vague chaleureuse d'un foyer puissant, s'inondait dans mes vaisseaux comme une boisson brûlante l'aurait fait dans mon oesophage. Là où les éléments se rencontraient, c'est-à-dire à d'aléatoires endroits de mon corps, je ressentais comme une ébullition, sensation désagréable d'une vie qui naît en mon intérieur.

L'idée me vint assez rapidement de tenter de les séparer et d'isoler chaque élément sur un côté de mon corps. Je choisis le gauche pour l'eau et le droit pour le feu. Alors, me concentrant tour à tour sur la moindre cellule de ma peau, de mes os et de mes chairs, je déliais les éléments, envoyant les vagues sur mon côté gauche et la chaleur sur mon côté droit. Ceci fait, et après une bonne vingtaine de minutes, j'ouvris alors les yeux pour constater avec émerveillement que mon corps avait changé physiquement. Ma main gauche, était presque transparente et ondulait, mes chairs étant devenues semblables aux eaux calmes d'un lac soufflé par un léger vent. À droite, mes doigts étaient incandescent, émettant une placide lumière rougeâtre et une douce chaleur réconfortante.

Sans que je pusse me l'expliquer, j'éprouvai alors l'envie de relâcher les deux éléments, de laisser les fluides se rencontrer, de les libérer de leur geôle mentale. Inspirant alors profondément, je m'exécutai et appréciai alors les retrouvailles du feu et de l'eau. Ils s'entrechoquèrent, puis tournoyèrent une fraction de seconde en un manège désordonné avant que tout se calme finalement. À présent, mes fluides corporels se tournaient autour dans une danse infinie, sans pour autant se mélanger. Chaque élément restait lié à lui-même comme à son voisin, le tout circulant dans mon corps dans une harmonie presque incompréhensible.

Je me sentis alors à la fois apaisé et muni d'une nouvelle force inexploitée. Mon pouvoir de magicien venait de doubler. Calme, sans hargne ni précipitation comme j'en avais autrefois eu la coutume, je fis appel à mes nouveaux fluides en priant Meno.

(Meno, dieu du feu. Prête-moi ton pouvoir, confie-moi ton savoir et la force de maîtriser ton divin élément.)

Puis, isolant de sa danse une partie de l'énergie ignescente qui sommeillait en moi à présent, je levai la main droite vers le ciel avant de l'abaisser violemment en direction du sol. À ma grande surprise, un véritable champ de flamme vint s'installer sur le sol de la clairière ne laissant sans incendie qu'un petit cercle d'un pied de rayon autour de ma carcasse.

L'effet ne dura que peu de temps, mais réussit à me réchauffer amplement. Ou peut-être que, trop heureux de ma réussite, j'avais oublié le froid qui le glaçait les os.

"La leçon est terminée." se contenta Isilmas avant de descendre de son rocher et de reprendre la route de notre fief à grands pas.

(((Tentative d'apprentissage du sort de feu : Champs de flammes)))

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 Sujet du message: Re: La forêt des Faera
MessagePosté: Sam 7 Juil 2012 11:03 
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Racrapoté sur lui-même, Pépin faisait semblant de dormir. C’était une vraie torture pour ce petit lutin de garder les yeux fermés, alors qu’au-dessus de sa tête les étoiles du firmament brillaient de mille feux. Mais toute cette petite magouille faisait partie de son plan pour échapper aux deux orques, et puis n’empêche que c’était vraiment magique d’appréhender les choses avec les sons et les odeurs !

Ils n’avaient pas bougé depuis qu’ils étaient arrivés, et ce qu’il croyait être la forêt d’Ynorie avait piaillé tout son soûl à la tombée de la nuit. Si Pépin s’en sortait, il se ferait un devoir d’aller prier Yuimen : d’abord parce qu’il serait en vie, argument notable et non négligeable, et puis aussi parce que sans toute cette aventure il n’aurait jamais eu la chance d’entendre des grues ! (Des gruuues… Wouahouuuu !) Et en plus de tout ça, l’atmosphère embaumait le bambou et les fleurs de cerisiers, des senteurs délicates qui bouleversaient le lutillon plus habitué à l’odeur capiteuse du tilleul et du chèvrefeuille.

Pépin se gorgeait de toutes ces bonnes effluves, en attendant que les deux orques s’endormissent. Il entendait Karl et Frank – ces deux pauvres garzoks à qui il allait honteusement fausser compagnie – jouer aux dés près du feu.

- Mais qu’est-ce qu’elle va en faire ?!
- Arrête de poser des questions et joue.
- C’est un moucheron. Même pas.
- Tu crois que tu vas m’avoir ? Allez, joue, maintenant que t’as parié.

Le lutin entendit le carambolage des dés dans le gobelet de fer dont ils se servaient.

- Et pis tu me feras quand même pas croire qu’il a l’air d’un nécromancien, hein. Pis ses copains pas mieux.
- Ben tu peux me dire, toi, qui c’est qu’a fait venir les zombies, si c’est pas eux ?
- Mais ils se battaient même pas avec de la magie ou quoi !
- Ouais, et si c’est pas eux c’est qui ? Quand l’arrière-garde est passée y’en avait pas trace.

Frank, Karl et Pépin, tous trois se laissèrent submerger par le silence. Ce qui rendait perplexe les orques rendait perplexe le lutin, à coup sûr – si les orques avaient assez de jugeote pour être perplexes, mais voilà un raisonnement qui n’effleura même pas l’esprit de Pépin. Et dire qu’ils croyaient réellement que c’était à cause du régiment de Fauche-le-vent que les zombies avaient poussé comme des champignons ! (Ça voudrait dire que quelqu’un serait venu au village après le passage des gobelins ? Hum…)

Une heure plus tard, après s’être disputés pour savoir qui prendrait le premier quart, les orques s’endormirent tous les deux l’air de rien. Ce fut donc sous la douce mélodie de leurs ronflements que Pépin rouvrit les yeux, fin prêt à se sortir de là. Enfin… prêt, c’était un grand mot. Une idée par-ci, une idée par-là, et si on secouait le tout ça pourrait peut-être donner quelque chose de grandiose !

(Hihi, sans les mains, même !)

Il roula sur le côté pour observer la scène. Baignés par les halos lunaires qui voulaient bien traverser la canopée, les deux orques dormaient comme des bienheureux. Ce n’était pas parce qu’ils étaient de farouches créatures belliqueuses et passablement cruelles qu’ils n’avaient pas le droit de se lover par terre, et de sucer leur pouce comme ils voulaient ! Sûr qu’ils n’allaient pas lui courir après de sitôt, en tous cas. C’est pourquoi Pépin bondit sur ses pieds en actionnant tous ses muscles. Mais dès qu’il fut sur pieds il se retrouva derechef par terre : les bras ligotés, il n’avait pas réussi à rétablir son assiette. Il dut réessayer au moins (au moins !) dix fois avant d’y arriver, et tout ça sans réveiller les bandits. Et puis, déjà épuisé par l’exploit héroïque qu’il ne manquerait pas de raconter – amplifié et déformé, bien sûr – à ses amis, il entreprit de bondir jusqu’au milieu du campement. Folie ? Peut-être. Il avait le ventre creux, et il n’en pouvait plus de l’entendre gargouiller comme un petit monstre. Il fallait faire vite, avant qu’ils ne se réveillassent… et surtout avant que le feu s’éteignît pour de bon. (Haha, comme quoi les courses en sac, ça a du bon ! Et toc ! Prends ça dans les dents, Fauche-le-vent !) Elles lui avaient permis d’apprendre à se dandiner rapidement, ce qui l’émerveillait assez, finalement. Il s’approcha suffisamment de la broche à rôtir pour qu’elle vînt taper contre la noisette qui le bâillonnait, et qui lui écartait tellement les mâchoires qu’il n’y avait rien à faire pour l’en déloger. Pour son plus grand bonheur, la branche la fit tomber dans les dernières braises, et le lutin fit tranquillement – quoique plutôt difficilement – son dîner de la noisette ainsi grillée. Quand il fut bien repu, il reprit son entreprise de fugue, mais un faux mouvement de sa part fit tomber la broche sur la tête de l’orque le plus proche – lequel se dressa d’un coup en hurlant et s’écroula aussitôt assommé. Pépin, affolé, regarda son comparse se retourner de leur côté et changer le pouce qu’il avait dans la bouche. Il aurait soupiré d’aise si, en s’abattant, le bras vert et couvert de pustules n’avait pas fait basculer la poêle, poêle qui fit s’envoler les saucisses, saucisses qui vinrent frapper le visage du lutin…

- HAAAAA !

Il plaqua ses deux mains sur sa bouche, effrayé d’avoir réveillé l’autre orq… ses deux mains ? Pépin contempla ses deux mains libres, sidéré d’être aussi chanceux et aussi un peu vexé d’avoir si bêtement chu dans le foyer. Certes, les braises avaient consumé ses liens, mais enfin il ne leur avait rien demandé, lui ! En réalité, il se trouvait un peu bête de ne pas y avoir pensé lui-même…

Quoi qu’il en fût, il défit les cordes qui maintenaient ses pieds et partit en courant sans demander son reste. Et grand bien lui fit car, comme il l’apprendrait plus tard – ne me demandez pas comment – un troupeau de centaures ravagea le campement un quart d’heure après son évasion, et les gens qui passeraient par-là verraient le lendemain deux têtes d’orque fichées sur des piques…


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Dernière édition par Pépin le Dim 8 Juil 2012 16:53, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: La forêt des Faera
MessagePosté: Dim 8 Juil 2012 16:52 
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^^

- Hihi, oh mais c’est drôlement joli, par ici !

Après avoir passé le reste de la nuit sur un matelas de feuilles très douillet, à contempler les étoiles et à faire des rêves un peu bizarres, Pépin s’étira en bâillant de manière très distinguée. C’était le petit matin, et désormais sans son sac le lutin avait dû improviser un couchage de fortune, mais il n’en était pas moins de très bonne humeur. Les yeux grands comme des soucoupes, il sautilla un peu partout, avide de tout observer, de tout humer, et impatient que ses amis lui bondissent dessus en criant qu’ils l’avaient retrouvé. Un vétéran comme Fauche-le-vent saurait forcément suivre la piste des deux orques, puis la sienne, et à partir de là lui mettre la main dessus avant qu’il n’eût le temps de dire ouf !

Le lutillon se gratta les fesses très élégamment en se disant qu’il n’avait pas du tout de provisions, et pas plus de Gaudriole pour faire le marmiton – leur premier relais étant Âne-aux-Nîmes, ils avaient plus ou moins loupé le coche du ravitaillement. Et puis il devait avoir une de ces haleines ! Un vrai bouquetin de Mertar, sans aucun doute ! D’ailleurs, il fit fuir une grenouille qui passait par là juste en lui souriant.

- Mais… Heu… ? s’écria-t-il, confus de la voir bondir loin de lui. Où est-ce que tu vas ?

Il se mit en devoir de suivre cette petite rainette verte, curieux de voir si elle rejoignait une mare où il pourrait se baigner un peu. Traversant les bambous aux jeunes pousses brillantes, glissant sur les mousses verdoyantes, courant entre les ginkgos et les érables tortueux, Pépin ne se laissa pas distancer d’un pouce et tomba bien vite sur un petit étang. En un clin d’œil il avait enlevé ses vêtements, et l’onde se brisa quand il fit la bombe en riant, soulevant de grandes éclaboussures qui éclatèrent sur les galets du rivage. Il se fit un matelas flottant d’un nénuphar qui traînait par là, se laissa porter quelques temps par les vaguelettes à l’ondulation apaisante, puis entreprit de se décrasser lui et ses habits avant de se faire sécher au soleil. Il avait quand même de la chance, dans sa déveine : il n’avait peut-être plus son sac à dos, et du coup ni tapis de sol ni sac de couchage, et pas plus de nourriture, mais quand il s’était fait prendre il portait encore sur lui son casque-noisette, son plastron et ses brassards en écorce, et puis son kunai, quand même ! Il aurait été bien triste, sans son équipement, petit héros en devenir. Et un peu dans la panade aussi, il fallait bien se l’avouer.

Petit à petit, à mesure que le soleil lui chauffait la peau, Pépin se demanda quand ses amis comptaient surgir, plonger à leur tour et venir bronzer avec lui. Les heures défilèrent, le laissant seul à seul avec ses pensées – ce qui ne lui était jamais arrivé ! Il y avait toujours quelqu’un avec lui, à Bouh-Chêne bien sûr, mais aussi en campagne avec ses compagnons de route. Aussi finit-il par se demander s’il n’allait tout simplement pas prendre congé de cette clairière certes jolie tout plein, mais bien solitaire. Il devait être à deux pas d’Oranan, et il lui restait quelques yus… Là-bas, il pourrait demander son chemin et reprendre la route pour les Duchés, trouver le Monastère de Khan et ses amis par-dessus le marché. Et puis, il pourrait manger, aussi, ce qui n’était pas le moindre de ses soucis, à l’heure actuelle. Alors il tenta de se relever, et se laissa choir aussitôt, trop heureux de rester oisif encore un petit peu. De toute façon ses vêtements n’étaient pas secs, alors autant lézarder ! Il n’allait pas rentrer dans Oranan tout nu, quand même ! Un sourire béat illumina sa face de petit lutin quand il croisa les bras sous sa tête et se laissa aller à une petite sieste. Après tout c’est bien connu : qui dort dîne !


vv

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Dernière édition par Pépin le Mar 10 Juil 2012 15:28, édité 2 fois.

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 Sujet du message: Re: La forêt des Faera
MessagePosté: Dim 8 Juil 2012 17:16 
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Hermai



Schrats




Agadesh avançait dans la flore blanche sans véritablement savoir comment trouver ce qu'il cherchait. Comment trouver un de ces guides ? Où pouvez donc se cacher ces faëras et leurs pouvoirs ?

Il marchait et marchait encore, ne voyant autour de lui que cette végétation toujours plus blanche et compacte lui ôter toute notion de distance. Il perdait quelquefois de vue Enkidu, dont la fourrure pâle aurait été un parfait camouflage dans cette végétation s'il n'y avait pas eu l'obscurité de ses yeux pour l'y trahir. Celui-ci semblait particulièrement s'amuser ici avec de petits insectes blancs qui sautaient et voletaient ça et là.

Le bédouin continuait sa route avec méfiance. Il ne savait rien de cette forêt. Il ne savait pas où il allait et sur quoi il pourrait tomber. Il avait aussi la dérangeante impression d'être suivi mais, lorsqu'il se retournait, ne voyait personne. Il marcha ainsi une heure, puis deux, puis trois. Le soleil était haut et il commençait un peu à désespérer. Il s'y était sans doute mal pris. Il continua sa recherche sans succès, encore fallait-il qu'il puisse savoir à quoi ressemblait ce qu'il cherchait.

Il se fit la réflexion qu'il serait peut-être bon pour lui de trouver quelques autochtones qui pourraient l'aider dans sa quête. Peut-être en sauraient-ils plus sur les faëras et comment les domestiquer. Aussi entreprit-il de rejoindre la route là où il l'avait laissé et de chercher sur son chemin quelques signes de vie, se repérant grâce au soleil. Sa marche lui paraissait longue et harassante, à devoir lutter contre ses mauvaises herbes, semblables à des orties, qui s'accrochaient à sa tenue bleue. Et toujours cette sensation d'être suivi, encore... Quelqu'un le regardait. Il en était sûr. Mais qui ? Pourquoi ne le voyait-il pas ? Pourquoi n'attaquait-il pas ? Attendait-il qu'il tombe dans un piège ?

C'est dans une certaine paranoïa qu'il essayait tant bien que mal de retrouver son chemin. Mais il n'y avait rien à faire, il ne se trouvait aucun repère. Pourtant, il avait toujours eu un bon sens de l'orientation mais là... Il se dit un instant que Bes aurait déjà sans doute retrouvé son chemin dans une telle situation. Ce maudit compère aurait été capable de ressortir par la gueule d'un chameau si on lui aurait enfoncé la tête dans son arrière-train. Cette pensée le fit pouffer. Il repensa à ses compagnons avec tristesse et perdit le fil de ses pensées en se rendant compte qu'il continuait à marcher sans réfléchir au chemin qu'il parcourait.

Il commençait à se sentir de plus en plus menacé, piégé dans ce labyrinthe blanc et végétal qui n'en finissait pas. Les heures s'écoulaient, le soleil continuait sa ronde et le moment de la relève se faisait toujours plus proche. Lorsque le crépuscule arriva et que le ciel prit une teinte sanguine, Agadesh en avait plus qu'assez. Il était hors de question de dormir dans cet endroit.

Puis, en plein milieu de la végétation, il vit ce bâtiment qui se détachait du reste de l'environnement. Une vieille petite maison au toit en tuiles d'ardoise. Une cheminée branlante, sur le côté droit, était envahie par les plantes grimpantes. Les deux fenêtres qui se trouvaient de part et d'autres de la porte avaient été barricadés par des planches. Mais la porte elle-même semblait avoir été défoncée, les gonds arrachés de l'embrasure.

Ce n'était guère avenant. Il s'était passé quelque chose ici, c'était certain.

Il se rapprochait doucement de l'entrée lorsqu'il entendit bouger derrière lui. Il se retourna rapidement mais il ne vit toujours rien. Il chercha Enkidu du regard et le vit juste à ses pieds, regardant en arrière, les oreilles dressés, à l'affût. Il avait aussi entendu. Il y avait bien quelque chose, mais pourquoi le suivre ? Cette cabane était-elle le piège dans lequel on attendait qu'il tombe ?

Sur ses gardes, Agadesh pénétra dans la salle en empoignant son sabre. Sur sa gauche, il vit un grand lit miteux accompagné de deux tables de chevet poussiéreuses sur lesquelles se trouvaient des bougies éteintes à moitié consumées, un livre et une dague. Juste avant le lit, une rondache mi-blanche mi-verte aux rebords noirs qui semblait avoir été déformés par des coups de masse gisait sur le sol. Non loin, une épée courbée au pommeau sombre, garnie de tout son long d'un ornement dorée, traînait là à côté d'une barbute de même facture. C'était un bel équipement de qualité, qui devait avoir été conçu par une seule et même forge. Tout cela avait dû appartenir à quelqu'un de particulièrement important. Il avait dû s'installer ici pour fuir une menace quelconque, mais vraisemblablement celle-ci l'avait rattrapé...

Le reste de la salle ne relevait pas d'un grand intérêt. Quelques meubles tout ce qu'il y avait de plus commun, un tonneau rempli d'eau croupie dans laquelle s'agitaient des larves de moustiques, divers objets usuels et une cheminée envahie d'araignées blanches qui y tissaient leurs toiles. Il se dit que s'il ne trouvait toujours rien avant la nuit, il pourrait au moins venir s'abriter ici. Il se dirigea donc vers la sortie lorsqu'il entendit un bruit métallique et strident derrière lui, comme si on avait doucement frotter une lame contre une autre. Il se retourna aussitôt, mais ne vit rien. Enkidu, lui, aboyait comme un beau diable, se précipitant en dirigeant ses cris vers le bas du tonneau.

En effet, le bédouin n'avait pas remarqué la trappe sur laquelle celui-ci était posé.
Il posa son sac non loin et poussa le lourd conteneur avant de s'abaisser pour l'ouvrir. Prudemment, l'épée à la main, il regardait ce que la luminosité sanguine du soleil tardif lui permettait de voir... C'est-à-dire absolument rien excepté un escalier en bois qui donnait contre une paroi. Le gros de la cave devait être en arrière... Puis le bruit se fit entendre une nouvelle fois, plus distinctement. Il le fit sursauter, mais pas Enkidu qui se rua dans l'obscure pièce.

"Enkidu ! Non !", criait-il à demi-voix.

Mais celui-ci y ne l'écoutait pas. Il descendit les escaliers pour le rattraper, mais c'était sans compter que celui-ci s'effondre sous ces pas, le bois ayant été moisi et usé par le temps. Dans sa chute, il laissa tomber son sabre et se cogna l'avant du crâne contre le mur d'en face.

Un peu déboussolé, il entendait Enkidu aboyer de toutes ses forces avant de lâcher un couinement aigu. Alors que du sang lui coulait sur le front, Agadesh n'arrivait pas à distinguer quoi que ce soit dans l'obscurité de la salle. Enkidu était silencieux maintenant. Des bruits de respirations saccadés et éraillés, entrecoupés de mastications, se faisaient entendre. Ce n'était pas bon signe.

Agadesh gisait encore laborieusement contre le sol terreux, incapable de bouger suite à son choc, lorsqu'il vit la créature se dévoiler dans la lumière. C'était un être humanoïde, très pâle... Il était nu et sa peau, dépourvue de toute pilosité, était ridée par un nombre incalculable de cicatrices. Sa tête abominable affichait des globes oculaires vides. Il n'avait pour office de nez que deux trous inégaux qui s'enfonçaient dans sa chair dont les parois vibraient à chaque expiration. De sa bouche sans lèvres coulait grossièrement sur son menton et son torse du sang sombre dans lequel on pouvait distinguer des touffes de poils blancs. Enkidu était mort, dévoré par cette bête immonde. C'était une fin indigne pour cet être du désert qu'il avait fini par apprécier en tant que compagnon.

Il vit cette abomination, cette vision cauchemardesque, se mettre à marcher dans sa direction. Pris d'effroi, le nomade trouva la force de ramasser son sabre et parvint à se lever en s'appuyant contre le mur.

S'approchant comme en le reniflant, la créature leva doucement ses mains auxquelles les ongles semblaient n'être que lames incrustées sous la peau et les porta à son visage. Lorsqu'il les ouvrit pour laisser apparaître ses paumes, il vit ses yeux incrustés en dedans. C'était des yeux incolores, injectés de sang, qui l'examinaient avec curiosité en se mouvant nerveusement au creux de ses mains.

Soudain, ses yeux se fixèrent sur les siens, ses bras se tendirent vers lui et les muscles de ses mains se raidirent. Brusquement, Agadesh sentit une douleur atroce s’abattre à l'intérieur de son crâne. Comme si tout vibrait en dedans, comme si sa tête était sur le point d'exploser. Alors qu'il ramenait sa main gauche à sa tête à cause de la douleur, il n'avait qu'une envie. Envie de s'effondrer, que cela cesse enfin. Après ce qui lui parut une éternité, le nomade rassembla ce qu'il restait de ses forces pour résister. Il avait une quête à mener et il était hors de question de céder face à ce monstre absurde. Il ramena ses deux mains contre le pommeau de son sabre et l'empoigna solidement. Il se décolla du mur et, dans un cri de rage, leva sa lame avant de l'abattre de son tranchant. La manœuvre s'était faite à l'aveuglette. Le nomade était bien trop préoccupé par le fait de résister à cette torture psychique et la faire cesser plutôt que de viser.

L'humanoïde lâcha un hurlement atroce alors que plusieurs doigts de sa main gauche et la moitié de sa main droite avaient été soustrait à son corps. Le fracas des ongles de métal sur le sol était presque inaudible tant son cri strident étaient aussi fort qu'insupportable. Puis il fit le silence, semblant furieux. Son œil droit ayant subi le verdict du sabre bleu, il relevait son bras gauche en sa direction. L’œil restant, qui se noyait sous le sang noirâtre qui coulait de ses phalanges mutilées, se remit à le fixer et il sentait la sensation troublante renaître en lui. Agadesh détourna ses yeux et se pressa d'attaquer à nouveau la créature, qui, dans un nouveau cri, se vit perdre son bras au niveau du coude. Le membre tranché giclait de sang et la créature, devenu totalement aveugle et désarmé, finit par s'effondrer sur le sol.

Le bédouin commençait à peine à souffler lorsqu'il vit deux autres créatures arriver dans sa direction. Semblable au premier monstre, celle-ci affichaient pourtant quelques différences. Elle était semblable en tout point. Moins grandes, plus maigres, quelques touffes inégales de cheveux blancs plus ou moins longs sur le cuir chevelu. Il pouvait aussi remarquer la présence d'une poitrine dépourvue de mamelons. Celles-ci avançaient avec une démarche malaisée mais rapide vers lui, en hurlant de plus belle.

C'était une véritable malédiction. Puis, soudain, le bédouin se souvint du don que lui avait fait les ancêtres et, avant qu'elles soient à sa hauteur, fonça dans l'ombre. Il ne l'avait encore jamais utilisé, mais Balamon lui avait dit qu'il suffirait de le vouloir. Mais il était impossible pour lui, dans cette obscurité, de savoir si cela marchait ou pas. Agadesh s'efforçait donc de ne pas faire le moindre geste ou le moindre bruit, attendant une bonne occasion. Les créatures, surprises par une telle initiative, semblaient à l'affût du moindre son. L'une des deux disparut soudainement dans un éclatement de sable gris. C'était une fichue sorcellerie. Il n'y en avait jamais plus qu'une. Il pensa rapidement à juste s'enfuir et condamner une nouvelle fois cette créature damnée dans son tombeau souterrain, mais un regard sur l'escalier effondré lui suffit pour comprendre que ce n'était pas envisageable, même en étant invisible. Non, s'il voulait sortir d'ici, il devait l'éliminer. Il n'y avait pas d'autres alternatives. Il comptait attendre que celle-ci passe assez près pour qu'il puisse l'éliminer une bonne fois pour toute, mais il remarqua un bruit. Un sifflement. De l'air qui sifflait, comme lorsque l'on bouge rapidement ses mains. Cette monstruosité ratissait la salle en agitant ses mains devant elle et elle venait droit vers lui.

Il n'avait pas le choix, il devait bouger. L'humanoïde entendit ses pas et se lança vers sa source. Revenant vers la lumière qui s'étouffait avec la venue de la nuit pour ne pas être totalement aveugle durant le combat, Agadesh put alors remarquer qu'il n'avait absolument rien d'invisible. Pourquoi les ancêtres s'amuseraient-ils à lui faire des dons inefficaces ? La question attendrait.

Elle était encore dans l'ombre lorsque la souffrance recommença. L'intérieur de son crâne qui lui paraissait écrasé d'une pression immense. C'était une véritable géhenne de douleur. L'extrémité de son calvaire était telle qu'il ne put s'empêcher de lâcher son sabre pour rabattre ses mains contre ses tempes. Et alors qu'il s'égosillait de son tourment, sa vue se floutait et son ouïe encombré par un sifflement strident qui semblait venir de l'intérieur-même de son crâne. Il ne la remarquait même plus, mais la créature marchait doucement vers lui, les bras tendus vers le nomade. Agadesh, dont cette torture faisait perdre la raison, s'était effondré au sol et se balançait de manière autistique entre les membres amputés du précédent monstre. Soudain, la douleur se fit moins forte. Ne comprenant pas, Agadesh rouvrit les yeux et vit la créature, le bras levé, prête à l'achever. Sans réfléchir, le bédouin chercha le moindre secours à sa portée. Un des doigts du précédent monstre, avec l'ongle métallique qui allait avec. Il l'empoigna et l'enfonça dans le pied de la créature. Criant de douleur, il profita de ce moment de répit pour ramasser sa lame et, avant qu'elle n'eût pu réagir, la décapita.

Agadesh resta un moment idiot, son esprit étant loin de s'être remis de ce traumatisme. Il lâcha de nouveau son sabre, plaqua son dos contre le mur puis, glissant, se retrouva assis contre le sol, la tête entre les bras en se balançant. Il marmonnait dans sa barbe ce qui devait être des souvenirs d'enfance :
"Mère, mère, le scorpion m'a piqué le doigt. Il m'a piqué le doigt mère, il me l'a piqué."
Il répéta ces mêmes phrases une cinquantaine de fois sans discontinuer, sanglotant puis pleurant comme un enfant.
"Père ! Le scorpion il m'a piqué, regarde ! Il m'a piqué le doigt ! Ça fait très mal. Je veux pas mourir, je veux pas mourir. Le scorpion m'a piqué le doigt mère... Où est-ce qu'on va ? Pourquoi on va au palais, j'ai peur et j'ai mal mère ! J'ai mal au doigt ! Le scorpion m'a piqué... Père ! Je... Mais le scorpion m'a piqué et ça fait très mal ! Oui père. Je serais fort. Oui... Père... Je... Je serais fort. Je serais fort. Je serais fort. Je serais fort."

Puis il sembla s'apaiser dans quelques derniers reniflements, sécha ses larmes contre ses manches et releva la tête en cessant ses hochements. Il considéra autour de lui les deux cadavres avec tristesse. Doucement, il finit par tendre son bras pour récupérer son sabre et entreprit de se lever.

En effectuant ce geste, il fut comme pris de vertige. Cette sorcellerie l'avait fortement affectée. Il mit un moment avant de s'accoutumer et pouvoir penser à une manière de sortir de cet endroit. L'escalier s'était effondré, la trappe se situait bien à deux mètres du sol et il doutait de trouver la force de se hisser. Il jeta d'abord son sabre et dût s'y reprendre à cinq fois, s'énervant à chaque fois un peu plus avant de réussir à remonter.

Il se retrouva étalé au sol à côté de son sac, dont il extirpa sa gourde pour en boire une bonne rasade. Il resta un temps ainsi, regardant le ciel du crépuscule qui laissait apparaître quelques belles étoiles brillantes. Il était fatigué, là, au milieu de nulle part, se sentant coincé par la nuit dans cet endroit maudit d'où il craignait que d'autres vices s'y cachent encore. Mais il était trop exténué pour reprendre sa marche. Se relever représentait déjà un défi, alors explorer une forêt blanche et damnée sans rien y voir...

Il se leva bon gré mal gré, laissant ses affaires gisantes sur le sol et s'effondrant sur le lit poussiéreux. Respirant ses particules, il se mit d'abord à tousser avant d'enfin sombrer dans le sommeil.



Ephialtès

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Playlist d'Agadesh

Quand on voyage vers un objectif, il est très important de prêter attention au chemin.
C'est toujours le chemin qui nous enseigne la meilleure façon d'y parvenir, et il nous enrichit à mesure que nous le parcourons.

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Paulo Coelho, Le Pèlerin de Compostelle


Dernière édition par Agadesh le Ven 3 Aoû 2012 13:54, édité 4 fois.

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 Sujet du message: Re: La forêt des Faera
MessagePosté: Lun 9 Juil 2012 00:22 
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^^

Il courait sur une route de briques d’un bleu très pâle. Elle sinuait entre de petits parapets qui la séparaient d’une plaine où les sucres d’orge ondulaient sous la brise. Mais leur intense couleur rouge, malgré l’idée qu’on avait de leur goût délicieux, alertait quiconque voulait les croquer. Un grand danger rôdait là, alors que le ciel bleu à peine voilé promettait une fabuleuse journée. Tout à coup, un muffin volant fila dans les airs avec un sifflement effrayant, et, juchées dessus, deux femmes des plus étranges… et pourtant familières. La kender dans son millefeuille de tulle, et puis son hennin bleu à paillettes et sa baguette magique – Trixie. La semi-elfe au visage poupin et aux bouclettes blond-roux, mince, élégante dans sa robe rose poudrée – la Loutre-Etoilée. Toutes ces couleurs pastelles étaient d’un ravissement infini, et pourtant… pourtant, l’atmosphère semblait saturée de peur, l’angoisse suintait de partout. Le muffin se fracassa sur la route, et dans la collision il fut transformé en corbeau. Les deux femmes avaient disparu, ainsi que la route de briques bleues et la plaine écarlate. A la place, le village calciné d’Âne-aux-Nîmes et deux zombies qui se battaient férocement contre le corbeau. Des plumes chatoyantes volaient dans tous les sens, mais on ne pouvait que se rendre compte que les deux zombies étaient en réalité Trixie et la Loutre-Etoilée. La lutte fut terrible, le corbeau perdit des flots de sang carmin, et finit par fondre en des myriades de diamants noirs qui se répandirent avec de petits bruits cristallins.

Pépin fut sorti de sa petite sieste par le clappement régulier d’une galopade, et quand il ouvrit les yeux, se retrouva face à face avec la plus jolie créature qu’il eût jamais vue. La mine étonnée, ses grands yeux bleus écarquillés, une petite centaure à la robe légèrement rosée l’observait en se peignant les cheveux avec les doigts. Elle était étendue auprès de l’étang, et en deux temps trois mouvements deux de ses camarades de jeu la rejoignirent en bondissant des fourrés et en riant. Le petit, blondinet, l’œil gris pétillant et la robe blanc immaculé, s’était attaché deux feuilles de ginkgo dans le dos pour former des ailes – (Trop mignoooon !) L’autre centaurette, quant à elle, avait les flancs pommelés et la crinière brune frisée… et elle portait un lé de tissu pour cacher sa féminité naissante, ce qui rappela à Pépin que la première ne portait rien du tout, et que lui non plus.

Rougissant, il sentit tout à coup tous les regards tournés vers lui et essaya de se cacher de toutes les manières qu’il put, en se tortillant et en se retournant sans arrêt – sachant très bien que quoi qu’il fît il en montrait toujours plus qu’il ne voulait.

- Heu… Bonjour ! gémit-il en tâtonnant pour trouver ses vêtements éparpillés à côté de lui.
- Salut, fit de son soprano de fillette la petite centaure qui venait d’arriver. Tu es qui, toi ?

Avec le petit, ils avaient arrêté de rire mais ils n’en avaient pas perdu leur sourire lumineux. Pépin sautillait sur place pour enfiler son pantalon, essayant tant bien que mal de conserver sa dignité… en vain, pour sûr.

- Je… Je m’appelle Pépin ! Je suis, euh, un lutin de Bouh-Chêne.

Il ne savait pas sur quel pied danser – dans tous les sens du terme, en l’occurrence. C’étaient des créatures sauvages que les centaures, mais ils étaient tellement… (… choupinouuuus !) Le petit s’approcha d’un pas moelleux et des étoiles dans les yeux.

- Oh ? Mais tu connais Luneoh, alors ? Lui aussi, c’est un lutin de Bout-d’Chaîne.
- Hééé ! Bien sûr que je le connais !

Voilà un nom qu’il n’avait pas entendu depuis quelques années, maintenant, il y avait quelques temps que le lutillon était parti à l’aventure. Un peu comme le fils de Bobine Verdoyant, Eucalyptus. En tous cas, entendre ce nom familier abattit d’un coup toute la méfiance qu’il avait conçu à l’égard des centaures.

- Verrepenché ? De qui tu parles ?
- Mais si, Luneoh de Bout-d’Chaîne ! Tu sais, Sèmeparole n’a pas arrêté d’en parler l’an dernier. C’est un peu un héros, en fait.
- Peut-être, mais pierre qui roule n’amasse pas mousse !

Pépin ne comprit pas vraiment l’intervention de la centaurette aux cheveux roses, mais il fut absolument charmé par sa voix mélodieuse. Elle était tellement belle, avec son diadème de fleurs, et elle devait sentir tellement bon ! Le lutin se ressaisit en secouant la tête et il fourra prestement sa chemise dans son pantalon. Au moins il se sentait mieux, comme ça, et ses vêtements étaient tout chauds d’avoir séché en plein soleil. Il était tout propre, il ne lui manquait plus qu’un chouillat de parfum pour être parfait.

Les deux autres centaures acquiescèrent doctement à l’assertion, et puis la brunette tendit sa main comme une grande. Quand Pépin lui serra l’index, elle se présenta :

- Mon nom c’est Courlalune. Elle, c’est Contefleurette, et lui Verrepenché.

Pépin hocha la tête avec virulence, impressionné par sa stature : bien qu’un bébé, elle faisait déjà bien la taille d’un géant. Mais s’il acquiesçait vigoureusement parce qu’il voyait bien le rapport entre le nom de Contefleurette et son apparence, il saisissait déjà moins pour le petit. Celui-ci parut s’en apercevoir :

- Mes parents auraient bien voulu une fille, ils l’auraient appelée Pervenche.

Pépin se gratta la tête avec une moue dubitative. Il ne comprenait pas bien où il voulait en venir par-là, mais ça avait l’air important pour lui alors il recommença à hocher la tête.

- Mais dis-moi, Pépin de Bout-d’Chaîne, déclara pompeusement Courlalune, tu n’as pas froid aux yeux pour t’aventurer comme ça en territoire centaure !
- Euh… Ben en fait j’ai pas fait exprès, je suis un peu perdu. J’étais avec mes amis, le régiment du Capitaine Fauche-le-vent, et on devait aller dans les Duchés des Montagnes…
- En effet, tu es un peu perdu, fit Verrepenché.
- Mais un tien vaut mieux que deux, tu l’auras !
- Euh, oui, certainement ! assura Pépin qui voulait faire bonne impression. En fait j’ai été lut-nappé par deux orques.
- Ah ! Ces boulets-là ?
- Leur sort n’est pas enviable, mais peu importe, continue.
- Je voudrais que mes amis me retrouvent…
- Haha !
- … et je vais peut-être me rendre à Oranan…
- Pouah !
- … pour les attendre là-bas.

Pépin ne comprenait pas vraiment les réactions de Courlalune. Sûr que ce n’était pas rassurant pour un yu !


vv

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Itsvara magic work - Thanks


Dernière édition par Pépin le Mar 10 Juil 2012 01:02, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: La forêt des Faera
MessagePosté: Mar 10 Juil 2012 00:17 
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Chapitre V : Prouver sa valeur


L'épreuve du feu (Partie I)


Je suivais Isilmas sur cette longue route jusqu'à la clairière. Pendant les quelques mois qui s'étaient écoulés depuis que j'étais entré pour la première fois dans cette forêt, je m'étais grandement amélioré en ce qui concerne le déplacement en forêt. J'avais appris à éviter les ronces, les branches et multiples autres pièges que pouvaient procurer les sous-bois pour un lutin. Aussi, j'arrivai à présent à suivre aisément le vieux mage dans nos balades matinales.

Mais pas aujourd'hui. Aujourd'hui, je divaguais lamentablement, je zigzaguais laborieusement, tenant à peine debout sous le poids du sac de provisions. Aujourd'hui, ou plutôt cette nuit, j'avais mal dormi. En effet, la nuit avait été courte à cause des évènements de la veille et j'avais écoulé une bonne moitié de mes précieuses heures de sommeil à penser à mon entraînement précédent. Un énorme changement s'était effectué en moi et j'avais apprit beaucoup de choses à propos de la magie.

Sans pour autant en avoir l'air, l'enseignement d'Isilmas était extrêmement efficace. Mes pouvoirs avaient augmenté de façon exponentielle en quelques mois alors qu'après plusieurs années d'entraînement ordinaire dans mon village natal, je n'avais su que maîtriser médiocrement les plus basiques secrets de la magie. À cette pensée, je remerciai mentalement le vieux fou.

Au bout d'une demi-heure, nous débouchâmes enfin sur la fameuse clairière où nous avions prit l'habitude de procéder à l'entraînement. Cependant, cette fois-ci, Isilmas ne s'arrêta pas. Il continua sa route en passant juste devant la grosse pierre sur laquelle il avait coutume de s'asseoir, sans même y jeter un oeil. Interloqué, je m'arrêtai de marcher pour lancer au vieux lutin :

"Mais où allez vous ?"

Le mage ne répondit pas, ni même se retourna et poursuivit sa marche soutenue.

"Hé !"

Mais déjà, il avait traversé la clairière et s'était enfoncé dans le sous-bois, je commençai à le perdre de vue. Replaçant alors la sangle du sac de provision sur mon épaule, je piquai un sprint pour rattraper mon retard. Une fois sorti de la clairière, je pris peur l'espace d'une seconde à m'apercevant que je ne voyais plus le mage. Mais finalement, je pus d'entrevoir le bout pointu d'un chapeau rouge entre deux feuillages. J'accourus alors en hurlant :

"Mais attendez-moi !"

"Tais-toi !" me chuchota alors sévèrement Isilmas. "Ne t'éloigne pas et reste sur mes pas, nous entrons dans un territoire hostile."

Je cessai alors de me plaindre et entrepris de cheminer à travers la forêt en faisant un minimum de bruit. Nous crapahutâmes ainsi pendant plusieurs dizaines de minutes avant que le lutin s'arrête derrière un épais buisson de fougères. Il s'accroupi et me fit comprendre d'un geste que je devais en faire autant. Il m'ordonna ensuite dans un murmure de poser le sac et de prendre avec moi mon équipement.

Nous rampâmes ensuite une dizaine de secondes avant de s'arrêter au pied d'un magnifique hêtre qui s'élevait presque au-delà du visible. Isilmas me fit signe de m'approcher et, lorsque je fus assez près, me susurra à l'oreille :

"Il est plus que tant pour toi de mettre en oeuvre ce que tu as appris. Je pense que tu es prêt à faire face à un vrai danger à présent." Il marqua une pose. "À quelques mètres devant nous, se trouve un camp de segteks. Leur présence est inacceptable ici. Tu vas devoir tous les tuer. Pas de prisonnier."

J'eus un vif mouvement de recul pour l'observer. Ses yeux ne mentaient pas, il était tout à fait sérieux (d'ailleurs, il était toujours sérieux). J'avais ouvert la bouche mais aucun son ne sortait tellement cette demande m'inquiétait et me révulsait à la fois. Les segteks étaient mauvais, des sales bêtes sans aucun respect envers la vie, ni la mort d'ailleurs. Enfin, c'est ce que je savais d'eux puisque finalement, je ne les connaissais que peu mis à part Fenouil qui n'était pas vraiment un segtek. Mais en tuer plusieurs, comme ça, de sang froid, si tant est que j'y parvienne, sur la seule décision d'un lutin que, malgré tout, je ne connaissais à peine, cela n'avait aucun sens.

"Mais ... Pourquoi ? Je refuse de tuer des gens, fusse-t-ils mauvais, pour rien !" finis-je par murmurer sur un ton quelque peu outré.

"Te rappelles-tu de ce que je t'ai dit avant que tu n'acceptes mon enseignement ? Je ne te demande pas de comprendre, je te demande d'agir. J'ordonne, tu agis, c'est comme cela que ça se passe. Si tu veux achever ton entraînement, tu dois obéir."
"Non."
"Alors, tu as échoué ..." chuchota-t-il en arborant une mine déconfite et en faisant mine de s'en aller.
"Attendez ..."

Il s'arrêta et m'observa, attendant la suite.

(Toal, j'ai besoin de toi. Dicte-moi la bonne conduite à suivre.)
(Je suis désolé, mon ami, mais c'est un choix que tu dois faire toi-même. Quoique tu fasses, je te soutiendrais, sois-en assuré.)

Je me tournai vers Isilmas pour finalement lui annoncer en regardant mes pieds :

"D'accord, je le fais."

Il sembla prendre un air satisfait lorsqu'il s'approcha de nouveau de moi.

"Très bien. Ils sont cinq, normalement. Ils ne devraient pas être très difficiles à maîtriser, surtout avec tes ... nouvelles compétences. Je serais en haut de cet arbre et je t'observerai, mais ne compte pas sur moi pour te venir en aide, c'est une épreuve que tu dois franchir seul. Il en est de même pour Toal, interdiction de lui demander quoique ce soit, si tu lui parles, je le saurais, crois-moi. Bonne chance."

Ses deux derniers mots me surprirent, c'était la première fois qu'il me souhaitait de la chance. J'eus comme un frisson d'appréhension tout d'un coup. Tout cela n'était pas rassurant. Cette épreuve surprise, aussi bien dans la forme que dans le fond était étrange. Cela ne lui ressemblait pas et n'avait aucun sens. Cependant, j'avais appris qu'au début, peu de choses avaient un sens en ce qui concerne Isilmas et ce n'est qu'après que celui-ci se dévoile.

Soufflant pour détendre le noeud qui tordait mon estomac tandis que le vieux grimpai laborieusement mais silencieusement jusqu'à une haute branche du hêtre, je brandis finalement le bâton que m'avait offert Fenouil et m'avança dans les fourrés.

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 Sujet du message: Re: La forêt des Faera
MessagePosté: Mar 10 Juil 2012 01:00 
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- Enfin bref, mieux vaut pour toi que tu ne t’approches pas trop de la Curie.

Pépin écoutait, attentif mais surtout inquiet. Il ne s’était pas trompé : les onomatopées lâchées au petit bonheur par Courlalune alors qu’il énonçait son plan n’étaient pas pour le rassurer. (Tombez sur les créatures les plus mythiques qui soient, vous serez servis en bizarrerie !) Mais enfin, si lutin s’était pendu aux lèvres des centaures pendant au moins deux heures, c’était bien parce que tous leurs contes étaient vraiment hyper-fascinants ! Et tout ça, finalement, pour s’entendre dire qu’il devait quitter les lieux sur-le-champ s’il ne voulait pas se faire empaler illico presto par ces charmantes créatures.

- Et vous n’auriez pas pu commencer par me dire ça ? s’étrangla-t-il en déglutissant, les mains serrées autour de son cou qu’il préférait conserver intact.
- C’est vrai qu’un aldron averti en vaut deux…
- Alors comme ça t’es un trouillard, Pépin de Bout-d’Chaîne ?
- Le fait est que sans avoir préalablement exposé les circonstances, tu n’aurais pas pu comprendre l’ampleur du danger.
- Euh, ben oui…

Bon, alors oui, il était vrai que les centaures vouaient une haine plutôt indéfectible aux humains et homologués, mais au final tout ce qui n’était pas doté de quatre pattes et deux bras était plutôt mal vu aux abords de la Curie centaure. Et en même temps… Pépin n’était pas très au fait de tout ce qui se rattachait de près ou de loin à la colère et tout ça, mais là il y avait de quoi en avoir ras le bol, quand même ! Les centaures, à ce qu’il avait compris, avaient été pourchassés durant presque toute leur existence, depuis les Premiers Hommes jusqu’à cette Sème-la-poisse dont Calembour leur avait rebattu les oreilles pendant le voyage. Celle-là, elle leur avait tout simplement envoyé un dragon-squelette qui les avait forcés à abandonner leur Centaurée de la forêt d’Ynorie pour migrer vers la forêt des faeras (dont, honnêtement, Pépin n’avait jamais entendu parler). (Les Fahéras ? Hm, c'est pas les chutes d'eau pas loin ?)

Soudain, Verrepenché se racla la gorge, et contre toute attente cela eut pour conséquence d’emballer le cœur de notre pauvre Pépin – et pour cause :

- Je crois que nous allons avoir des problèmes.
- Qu’est-ce que tu as vu ?
- Courlalune, tu sais que je ne peux pas en parler.
- Hm, en gros ils arrivent, quoi ? Pépin de Bout-d’Chaîne, cache-toi.
- Quoi ?!! s'écria le lutin qui ne comprenait rien à rien.
- Qui s’y frotte s’y pique.
- Cache-toi, c’est tout.
- Tremblepensée, lui, il le transformerait tout bêtement en buisson…
- Et puis après tout mieux vaut prévenir que guérir !
- Vous savez faire ça, vous ? Moi non, en tous cas !
- C’est bon, c’est bon, je vais me cacher !

D’un bond, Pépin se glissa dans les fourrés les plus proches. Une mousse délicieusement moelleuse sous les fesses, sous les yeux une vue à couper le souffle tout droit sur l’étang où se pressaient les petits centaures, il ne manquait qu’un petit cornet de maïs soufflé au caramel pour assister à l’arrivée des adul… (Haaa ? Ohhh… Pfff.) D’un coup de sabot, Verrepenché venait de rabattre un rideau de cerisier pleureur devant le lutillon, qui ne voyait plus rien, à présent ! Il se concentra de toutes ses forces pour entendre ce qui se tramait de l’autre côté de son rempart végétal, et autant vous dire qu’il ne fut pas déçu du résultat. Le centaure devait être un colosse, car ce fut d’une voix de stentor qu’il fit vibrer la terre en s’adressant aux galopins :

- Ne vous éloignez pas de la Curie. C’est dangereux. Des humains dans la forêt… On ne sait pas ce que les bipèdes sont capables de faire.
- Oui, ô vénérable Chef !
- Des héros… Je t’en foutrai du héros ! Bons qu’à mettre Yuimen en pièces ! ajouta le centaure avec ce que Pépin perçut comme un crachat.
- Nous savons cela, ô vénérable Chef !
- Méfiez-vous surtout de ceux qui se disent des fidèles du Grand-Cornu…

Pépin entendit la voix s’éloigner, il risqua un coup d’œil à découvert… ce qui lui valut immédiatement un coup de queue aux crins blonds en pleine figure. *KeuuUUuff-keuuf !* Mais le temps d’une seconde, il avait entr’aperçu un popotin équin surmonté d’un tas de muscles considérable – et avec ça ? Une hache d’arme dont la hampe à elle seule pouvait faire la taille d’un géant comme Barbanfeuille… Pépin faillit défaillir seul dans son coin rien qu’en y repensant.

- Ecoutez le Chef, les petits, reprit une voix de femme ferme et posée. Il sait de quoi il parle. Vous n’êtes plus des enfants, aujourd’hui, vous devez savoir ce que Yuimen avait prévu pour nous aux origines du monde.
- Nous irons voir Destinétoile, Lustrecrin.
- Bien. Le Chef a du souci, ces derniers temps. Avec ces raids orques qui se préparent… Les marches d’Omyre, ha ! La forêt d’Ynorie était bien plus proche, certes, mais nous ne sommes pas à l’abri. La fille de Thimoros est sur le point d’ouvrir ses portes.

Ces paroles n’étaient plus que des murmures, mais quand il put enfin sortir de sa cachette, Pépin était en nage. Il s’éventa avec ses mains, ce qui lui donna l’air passablement stupide. La Noire Reine préparait ses forces, alors, c’était bien vrai… Barbanfeuille lui avait déjà dit, et l’elfe Pégasiel pareil. Mais il y avait un je-ne-sais-quoi chez les centaures qui rendait ce qu’ils disaient plus vrai.

- Mais dites donc, vous avez vraiment un problème avec les humains ! C’est fou ! C’est comme Gaudriole qui s’est fait toute une montagne de l’elfe qu’on a croisé en route !
- Tu avais besoin d’avoir une preuve ? Tu ne nous croyais pas ?

Pépin resserra son plastron d’écorce d’un mouvement un peu angoissé, et puis il essuya prestement la sueur qui perlait de son front en vissant son casque-noisette jusqu’à ses sourcils.

- Heu, ben si si, j’avais bien compris, mais heu… Dites, qu’est-ce qu’elle voulait dire par "ce que Yuimen avait prévu pour nous, blablabla" ?
- Hé bien… Verrepenché eut l’air un peu gêné un court instant. Quelque chose comme faire le lien entre les mortels et la nature, c’est à peu près ça, mais nous on n’est encore petits, hein.

Le lutillon ne comprenait pas vraiment, mais il savait une chose en revanche :

- Je vais devoir partir, alors ?

Il lança un coup d’œil humide aux petits centaures. Il avait peut-être un peu peur… mais en même temps il était tellement ému ! Ces bébés-là l’avaient couvert ! Le lutillon avait plus envie de jouer à cache-cache-toi-dans-les-arbres avec eux que de leur fausser compagnie. Mais ses amis lui manquaient cruellement, et il ne manquerait pas de passer voir ces petits choux dès qu’il viendrait sur Oranan, et Yuimen savait qu’il reviendrait bien vite et bien souvent.

- Nous allons demander à Onigiri de t’emmener près de la ville. Tu vas voir, c’est moche, en pierre et tout, mais ils aiment un peu plus la nature que le Chef le dit… Onigiri, il aime bien, lui, mais ce sont les humains qui ne nous aiment pas trop.

Pépin fit un câlin à la jambe de Courlalune qui semblait somme toute émue elle aussi, et il eut même le droit de faire du toboggan dans le dos de Verrepenché. Mais il voulait surtout un bisou de Contefleurette, chose qu’il obtint sans mal. Bien sûr accompagné d’un dicton un peu à côté de la plaque. Mais enfin, il ne lui en voulait pas : elle était tellement belle !


vv

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Dernière édition par Pépin le Dim 22 Juil 2012 15:28, édité 2 fois.

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 Sujet du message: Re: La forêt des Faera
MessagePosté: Mer 11 Juil 2012 00:46 
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L'épreuve du feu (Partie II)


Derrière les joncs épineux et les fougères, j'aperçus enfin le fameux campement segtek. Deux tentes étaient posées autour d'un reste de feu qu'un cercle de grosse pierres entourait afin de préserver le camp d'un quelconque incendie. Une broche, actuellement vide, avait été construite au-dessus du foyer avec d'épais morceaux de bois, sans doute pour faire cuire les repas. Deux segteks mâles étaient accroupis près des cendres, un bouquet de brindilles à la main. Caquetant dans leur horrible langue maternelle, il semblaient vouloir faire repartir le feu. Sans doute était-ce pour faire dorer la prise du matin. Chacun d'eux portait un arc grossièrement forgé dans un métal crasseux ainsi qu'un court sabre à large lame recourbée. L'un deux, celui qui soufflait sur le départ de feu, portait un casque cabossé, tandis que l'autre avait un bras enroulé dans une écharpe. Mis à part cela, ils ne portaient aucune armure, Casque-Cabossé arborait une jupe de lanières en cuir dissimulant à peine ce qu'il avait à dissimuler ainsi qu'une chemise grise trouée tandis que Bras-Cassé était muni de plusieurs peaux de bêtes informes mais sûrement très chaudes.

J'avais l'avantage de l'effet de surprise, je devais frapper maintenant si je voulais avoir une moindre chance. Je pris alors mon bâton bien en main et le leva au-dessus de mes yeux ... pour le rabaisser presque tout de suite. Changeant alors mon plan, je sortis de ma cachette, me rendant visible aux yeux des gobelins. Cependant, les deux peaux vertes étaient bien trop occupés à leur besogne pour faire attention à un lutin débaroulant au beau milieu de leur campement. Je notais mentalement que mes deux vis-à-vis n'étaient pas très malins.

"Hé ! Les pas beaux ! Je suis là !"

Ils se tournèrent alors vers moi et s'apercevant qu'un intrus les observait, montrèrent des dents en sifflant et crachant.

"Oui, voilà. Y'a un lutin."

Ils commencèrent alors à s'approcher de moi, dégainant leurs sabres, l'air belliqueux. Je levai les mains en signe de paix.

"Ecoutez, on m'a dit de vous tuer, mais je n'en ai pas l'intention. Je ne sais pas si vous connaissez Isilmas, ni si vous savez que cette forêt a quelque chose de sacré, mais je pense que le mieux pour tout le monde serait que vous partiez. Je suis prêt à vous y aider même. Tout ceci peut se régler sans violence."

Soit ils ne comprenaient pas un traître mot de ce que je leur disais, soit ils n'en n'avaient cure, puisqu'ils continuaient à s'approcher dangereusement. Alors qu'ils étaient à un peine deux mètres de moi, le segtek au casque bosselé se jeta soudainement sur ma pauvre carcasse, toutes griffes dehors. Mais, prévoyant, j'avais préparé mes fluides et tendant mon bâton vers son visage, je lançais un jet d'eau assez puissant pour l'arrêter, mais trop peu pour lui faire réellement mal. Il retomba mollement sur les fesses en couinant.

"Je suis sérieux. Vraiment, réglons tout ceci diplomatiqu..."

Mais déjà, l'autre gobelin au bras cassé hurlait et brandissait son sabre dans ma direction tandis que l'autre se remettait debout et ne semblait pas plus enclin à engager les négociations.

(Au moins, j'aurais tenté) pensai-je alors.

Cherchant à l'intérieur de moi-même les fluides de feu nouvellement acquis, j'élevai mon bâton au-dessus de ma tête pour l'abaisser ensuite violemment. Comme la veille, un authentique champ de flamme s'éleva tout autour de moi, me protégeant ainsi des assauts ennemis. Les gobelins crièrent leur surprise d'un glapissement aigu, mais j'étais loin d'avoir tout prévu et mes ennemis ne se dégonflèrent pas le moins du monde. Casque-cabossé décrocha son arc et le banda avec une flèche de bois tandis qu'un poignard lancé par Bras-cassé me frôla le bonnet.

Les flammes magiques étaient hautes et m'empêchaient de distinguer correctement les mouvements de mes ennemis. Ce sort avait l'avantage de créer une excellente protection offensive, mais il m'était alors difficile de prévoir les assauts adverses. Les segteks, de part leur stature plus imposante, ne semblaient pas avoir ce souci car j'entendis bien vite une flèche siffler dans l'air. Elle traversa le mur de flammes et je ne la vis que trop tard, lorsqu'elle n'était qu'à une dizaines de centimètres de moi.

Dans une tentative désespérée, je fis un bon pour éviter le carreau, et à mon plus grand étonnement, je m'élevai dans les airs. J'avais bondit d'un peu plus de deux mètres au-dessus du sol et je voyais s'éloigner sous mes pieds le champ de flammes que j'avais créé ainsi que mes deux belligérants tournoyant autour.

Je souris bien que je ne comprenais pas la cause de tout ceci, avant de me cogner violemment la tête contre la branche d'un arbre qui était sur ma trajectoire. Grognant de douleur je retombai alors en chute libre. Comprenant la supercherie, Casque-cabossé m'accueillit dans ses bras avec un sourire carnassier. Il m'empoigna par le buste, m’enserrant tout entier dans sa poigne de fer puis dit quelque chose en segtek à son compère.

Je me débattis un petit moment avant d'abandonner l'idée. Cherchant des yeux un échappatoire, je découvris que j'avais laissé tomber mon bâton lors de mon extraordinaire bond. Je jurai mentalement et tentai de concentrer mes fluides, mais la force qu'exerçai le gobelin m'empêchait de contrôler quoi que ce soit. J'allais finir embroché et cuit sur mon propre feu magique avant d'être englouti en guise d'apéritif par ces deux crétins. Je faisais finalement un piètre combattant, je ne méritais pas la formation d'Isilmas.

(Autant que cela se finisse ainsi.) pensai-je, résigné.

Mais un coup du sort fit tourner la roue de la fortune à mon avantage, alors que je m'étais débattu, mon collier s'était détaché et le pendentif était, sans vraiment que je sache comment, tombé dans ma botte. Un évènement aussi inattendu que le précédent se déclara alors. Sous mes yeux ébahis, mes mains et mes bras se mirent à grandir et à grossir soudainement, atteignant plus de deux fois ma taille normale.

Le segtek émit un cri strident de surprise et me lâcha subitement, me laissant retomber violemment sur le sol tandis qu'il reculait de quelques pas, la lame pointée vers moi. Allongé par terre et incapable de bouger avec mes bras atrophiés, j'essayai de comprendre ce qu'il m'arrivait, mais déjà, mes jambes subirent le même sort que les membres supérieurs. Je ressemblais à présent à l'une de ses araignées qui ont un corps minuscule, mais de longues et fines pattes. Cependant, alors que je roulais lamentablement sur le sol, j'étais loin de pouvoir me déplacer avec autant d'agilité que ces arachnides. Enfin, ce fut au tour de mon buste et de ma tête d'enfler et de prendre une forme presque dix fois plus volumineuse. J'avais alors retrouvé des proportions normales, mais mon corps était celui d'un humain, ou en tout cas, en avait la taille. J'étais devenu un ... grand-dadais.

Je me relevai difficilement et fus soudain pris d'un vertige. Le monde me parut bien plus petit et je n'étais pas habitué à voir le sol aussi bas. Je tanguai un bon moment pour trouver mon équilibre avant de faire un pas en avant. J'affichai un sourire narquois lorsque le segtek leva les yeux pour me regarder. Une voix plus grave que d'habitude s'éleva lorsque j'ouvris la bouche pour m'adresser à mes adversaires :

"Alors ... Vous voulez toujours me bouffer ?"

Casque-cabossé avait l'air apeuré d'un tel tour, mais c'était sans compter Bras-cassé qui n'était nullement impressionné. En effet, ce dernier, dans un hurlement guerrier, se jeta dans mon dos et enfonça ses canines effilées dans la chair de ma nuque. J'hurlai de douleur, mais fort de ma nouvelle stature, j'empoignai le gobelin et lui fit lâcher prise, tandis qu'il m'arrachait un lambeau de peau. Il tomba au sol mais se releva bien vite pour m'assaillir de nouveau. Il bondit droit sur mon visage, me faisant perdre l'équilibre et nous roulâmes sur le côté, avant de nous cogner contre l'une des deux tentes. Le rondin de bois qui soutenait la toile s'écroula et nous nous empêtrâmes dans le tissu, provoquant râles et grognements.

J'entrevis finalement une sortie et m'y engouffra tandis que le gobelin se débattait toujours avec son tipi écroulé. Lançant un regard circulaire pour trouver le second belligérant et fus parcouru d'un spasme douloureux. Une flèche venait de se planter dans mon épaule. La douleur parcourut l'entièreté de mon bras pour venir s'élancer jusque dans mon coeur. Je voulus crier, mais aucun son ne sortit de ma bouche, je tombais sur les genoux.

Tandis que ma vue se troublait, je me rappelais de mon combat contre le frère de Fenouil, un segtek, lui aussi. J'étais arrivé à le maîtriser en invoquant une immense vague qui l'avait alors assommé. C'était ma seule et dernière chance. J'appelais les fluides d'eau présents en moi et les fit remonter jusqu'à mes bras, puis, les apposant sur le sol, libérais mon énergie magique. L'odeur iodée, le bruit des remous et une vague apparut, emportant les deux gobelins sur son passage. La quasi totalité du camp fut rasé, seule la dernière tente fut épargnée puisque la vague s'arrêta juste avant.

N'ouvrant qu'un oeil, j'aperçus les deux segteks sonnés, allongés l'un sur l'autre, immobiles. Dans un élan d'espoir, je cassai le bois de la flèche plantée dans mon épaule en émettant un grognement de douleur puis me traînait tant bien que mal jusqu'à mes deux adversaires. Une voix s'éleva alors dans ma tête.

(Tue-les ...)

Je reconnus la voix d'Athanae, la faera d'Isilmas.

(Non, je ne veux pas ... Je ne peux pas ...)
(Tue-les, c'est le seul moyen d'obtenir le pouvoir que tu recherches !)
(Non, ce n'est pas ... Peut-être, oui ... Mais ...)
(Tu dois le faire)
(Je ... Oui, tu as raison.)

Ramassant alors le sabre de Bras-Cassé, je le levai au dessus de lui de ma main valide lorsqu'un pleurnichement s'éleva à l'intérieur de la tente. J'arrêtai mon geste pour tendre le sabre en direction de l'entrée. Une tête à la peau verte apparut suivie de près par deux autres, plus petites. C'était une femelle segtek, accompagnée de deux enfants. Elle cracha en ma direction, montrant des dents.

"Je suis désolé." dis-je alors. "J'ai tenté de les raisonner, mais ils n'ont pas voulu m'écouter ... Je ne veux pas vous faire de mal ..."
"Alors que fais-tu en ce moment ?" me lança-t-elle d'une voix nasillarde et méprisante en hochant la tête vers la lame que je tenais. Je baissai la tête puis la secouai.

"Je ... Je suis désolé."

Puis, laborieusement, je tournai le dos à la segtek et à ses enfants pour m'enfuir dans la forêt. À peine eus-je fait une dizaine de mètre hors de la clairière où se trouvait le campement que je m'écroulais par terre. Mes paupières se fermèrent toutes seules et je sombrai dans le néant.

Lorsque je me réveillai, j'étais dans la clairière au rocher, celle où Isilmas et moi-même avions l'habitude de nous entraîner. Le vieux mage se trouvait à mes côtés et j'étais allongé par terre. Je portai la main à mon épaule puis à ma nuque, aucune blessure ne s'y trouvait et je ne souffrais plus. J'observais ensuite mes membres, ils étaient tout à faits normaux, leur taille était redevenue celle que j'avais toujours connue.

"Mais qu'est-ce que ..." dis-je en me mettant brusquement en position assise.
"Bravo, tu as réussi."

Isilmas souriait. Pour la première fois depuis que je le connaissais, pour la première fois depuis plusieurs mois, ce vieux fou souriait réellement.

"Allez-vous m'expliquer ?"

Il hocha la tête en signe d'approbation en me tenant l'épaule amicalement.

"Tout n'était que fluide. Te rappelles-tu de ta deuxième leçon ? Celle où tu as appris à interférer dans l'esprit d'autrui ? C'est ce que j'ai fait avec toi. Le campement, les gobelins, ce n'était qu'une illusion pour tester, non pas ta force, mais ta valeur, ta morale. En réalité, tu t'es battu tout seul, ici ... J'ai été surpris par les capacités de tes objets, il ont donné du fil à retorde à la cohérence de mon hallucination."

Je secouai la tête, prenant le temps de bien comprendre ce que venait de me dire Isilmas. Je me sentais trahi et désorienté, tentant en vain de revenir dans la réalité.

"Et ... Pourquoi j'aurais réussi ? J'ai échoué, je ne les ai pas tués, il y avait cette mère et ces enfants ... Je ne pouvais pas."
"Au contraire, c'est ce que j'attendais de toi. J'attendais que tu contrarie mes plans. Dans tous les cas, quelque soit la personne qui te dictes une chose à faire, tu dois suivre ton coeur et ton esprit. Tu dois trouver ta propre voix. C'était ta dernière leçon."

Je clignai des yeux, incrédule, mais déjà, le lutin m'aidait à me relever et m'entraînait vers la maison.

"Rentrons, tu vas avoir besoin de repos. Une ultime tâche t'attend."

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 Sujet du message: Re: La forêt des Faera
MessagePosté: Jeu 12 Juil 2012 02:33 
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La Quête


L'hiver avait ensevelit la forêt des Faeras dans sa robe immaculée depuis plusieurs jours. La neige recouvrait le sol, transformant chacun de mes pas en un crissement agréable. Sporadiquement, de fin flocons blancs filtraient à travers le mur naturel que nous offraient les arbres. Arbres qui avaient presque tous perdu leurs feuillages, s'exhibant nus à nos yeux comme pour nous prendre en pitié. Les quelques arbustes et plantes qui avaient eu la chance de conserver leur parure feuillue, la voyait se courber sous le poids de cette mousse blanche et gelée.

Enroulé dans mon manteau d'hiver et muni de grosses bottes en fourrures que j'avais enfilées par-dessus les miennes, je maniais tant bien que mal la petite hache qui me servait à faire du petit bois pour la cheminée. Ma faible force physique ne rendait pas la tâche plus facile, mais je ne rechignais jamais à exercer cette corvée. Cela me permettait de me vider dans tête, d'arrêter de penser. L'entraînement d'Isilmas, bien qu'efficace, demandait une énorme concentration et un effort mental considérable, aussi l'exercice physique quel qu'il soit, me faisait le plus grand bien. Abaissant mon outil presque aussi régulièrement qu'un métronome, je faisais couler ma sueur le long de mon échine.

Lorsque le petits tas de bois me parut assez haut, j'abaissai une ultime fois ma hache pour la planter dans l'épais tronc qui me servait de socle. Il y avait bien trop de bûches pour que je puisse toutes les emmener dans mes bras. J'avais déjà vu Isilmas s'adonner à la télékinésie, parvenant à soulever de petits objets (et d'autres un peu plus gros) sans le moindre effort, avec seulement l'aide des fluides. Aussi, décidai-je de m'y essayer, rechignant à faire plusieurs aller-retours les bras chargés de bois pour les ramener à l'intérieur.

Je fermai les yeux et essayai de ressentir les fluides naturels environnants. Comme d'habitude, le flou indistinct que générait la valse des fluides ambiants m'empêcha de discerner convenablement la natures de ceux-ci. Cependant, je percevais leur présence dans les morceaux de bois, mais aussi en-dessous. Je tentai de faire appel à ces derniers, leur commandant de se déplacer vers le haut afin de combattre la gravité. J'ouvris les yeux pour apprécier le résultat de ma tentative, mais aucun des bouts de bois n'avait bougé. Isilmas apparut dans l'embrasure de la porte d'entrée de la cahute à ce moment là.

"Pas la peine de te fatiguer, je m'en occupe."

Il leva alors la main et sous mes yeux émerveillés, les bouts de bois s'empilèrent tous seuls les uns sur les autres, alors qu'il se concentrait puis, ils lévitèrent lentement jusqu'à la porte et disparurent dans la maison. Isilmas me fit signe de le suivre et je m’exécutai. Une fois à l'intérieur, je lançais un oeil vers le bûches de bois qui étaient déjà entreposées dans un petit panier prévu à cet effet près du foyer.

"Assis-toi, nous devons discuter"

Je pris alors place autour de la petite table qui nous servait à manger, boire, cuisiner, lire, écrire et nous reposer. Je me mis à jouer avec les multiples rayures qui parcouraient la table, restes de couteaux ayant été un peu trop loin. Je passai machinalement l'index le long de ces cavités, prenant soin de ne pas me planter d'échardes dans le doigt.

"Cela fait plusieurs années que je suis à la recherche d'un ancien temple qui avait été construit dans cette forêt il y a bien longtemps. C'est d'ailleurs en partie pour cela que je me suis installé ici. J'ai bien essayé de tirer les vers du nez des faeras et plus particulièrement d'Athanae, mais autant te dire que c'était peine perdue." Il lança un regard sévère à sa faera qui voletait au-dessus du lit en compagnie de Toal. "Bref, il y a six mois, le jour où je t'ai trouvé en réalité, j'ai déniché une carte menant à ce temple. Ne me demande pas comment, ça a peu d'intérêt et de toutes manières je ne te le dirais pas. Bref, je voulais y aller tout seul, mais il faut dire que je me fais vieux et puis, c'est parfait pour ta dernière épreuve. Donc, t'es parti."
"Vous voulez encore me filer un vieux truc que vous ne voulez pas faire ?" rétorquai-je arrogamment.

Il envoya sa canne s'écraser sur ma tête d'un vif mouvement du poignet.

"Aïe !" lâchai-je en me frottant le dessus du crâne avec la paume de la main.
"Du respect, jeune lutin. Ton entraînement n'est pas encore terminé."
(Vioque ahuri !)
"Tu vas donc partir à la recherche de cette ruine où tu devrais trouver un objet magique. Tu me le ramèneras, mais fais attention car dans ce temple, la magie te contemple et les pièges seront nombreux."
(C'est donc ça !)
"Voilà la carte, tu as la journée pour te préparer, je t'accompagnerai jusqu'à la clairière demain."

--------------------------------------


Le voyage jusqu'au point indiqué sur la carte, bien que long, ne fut pas difficile pour autant. La carte n'était pas des plus récentes et il était difficile de s'orienter dans une telle forêt, mais les indications étaient très claires et avec l'aide de Toal, j'arrivai enfin à destination. Heureusement pour moi, je n'avais croisé aucune résistance sur la route et mis à part quelques bêtes sauvage qu'une petite flammèche réussit à faire fuir, rien ne vint entraver mon voyage.

Un immense chêne millénaire s'élevait là où un point tracé à l'encre rouge signalait la présence du temple sur le plan. Ses racines, presque aussi grosses que les arbres aux alentours émergeaient du sol, semblables à des anguilles bondissant hors de ce lac de neige immaculée. Je fis le tour du tronc plusieurs fois, ce qui me prit un bon quart d'heure vue son épaisseur, mais aucune entrée digne de ce nom ne s'offrit à mes yeux.

Déçu, je m'assis aux pieds de l'arbre, mais mon arrière-train, au lieu de rencontrer la résistance du sol, amorti par une épaisse couche de neige, s'enfonça d'un bon mètre, me laissant dans une position tout à fait ridicule. Les jambes et les bras en l'air, je m'efforçai de me sortir du trou où je m'étais fourré. Après plusieurs secondes de combat interrompu avec la poudreuse, je m'extirpai enfin du cratère.

La neige s'était enfoncée de plusieurs mètres à présent. Une ouverture semblait être ensevelie dessous, mais un bonne quantité de poudreuse m'en empêchait l'accès. Qu'à cela ne tienne, je concentrai mes fluides un petit instant et fit apparaître un minuscule cercle de flammes. L'épaisse couche blanche eut tôt fait de fondre pour former une flaque d'eau qui disparut sous les racines du chêne.

Prudemment, je pris sa suite et chuta de quelques mètres pour atterrir sur un coussin de mousse qui amortit ma chute. Autour de moi, éclairée par la faible lumière du soleil filtrant à travers les racines, une minuscule caverne naturelle s'étendait. Au fond, une magnifique porte aux reliefs stylisés s'ouvrait sur un mur d'obscurité, telle une bouche accueillante mais effrayante. Des glyphes avaient été gravés de chaque côté de la construction et en haut, huit petites boules de diverses couleurs encerclaient l'image d'un oiseau déployant ses ailes. Deux simples piliers soutenaient l'ensemble alors qu'une des racines de l'arbre millénaire entravait presque l'entrée ainsi que la volée de marche qui menait à la porte.

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"Te voilà donc. Voyons ce que tu as dans le ventre, ô mystérieux temple."

J'allumai alors l'une des torches que m'avait donné Isilmas pour y voir plus clair et après avoir gravit le petit escalier, m'engouffrai dans la bouche béante de l'antique temple.

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