Asitnor vient à peine de plonger dans le fleuve que je sens que quelque chose ne va pas, elle n'a pas la dextérité dans l'eau qu'elle aurait sur terre. Mais il y a autre chose, quelque chose de plus... puissant. Soit ce fleuve est nettement plus rapide que prévu, soit...
(Les failles !) (Quoi ?)
La pensée d'Astinor reflète en un seul mot une véritable peur panique. Les muscles de la panthère se contracte tant bien que mal, cherchant à se diriger tandis que nous nous perdons dans les flots. Je sens le fleuve qui s'écoule autour de nous, nous menant comme si nos trois âmes et ce seul corps n'était qu'une minuscule brindille.
(Non... Pas vers la chute d'eau !)
Le courant semble nous déporter vers le titan et l'espace gigantesque qu'il a creusé dans le sol. La pensée d'Anouar ne fait que confirmer cet état de fait et bientôt, dans le tourbillon et chahuter par l'onde, nous perdons la notion des secondes, du temps, mais surtout toutes les informations sur les directions. Il est impossible pour Astinor de retenir sa respiration, mais tout autant de retrouver la surface pour émerger le temps de trouver une goulée d'air. Nous allons nous noyer, c'est certain...
(Je suis là...)
Cette voix, lointaine et diffuse, je la reconnais, c'est la voix de la mort, du coma. A chaque fois que je l'ai vu, j'étais à l'extrême frontière qui sépare Yuimen de Phaïtos.
(A part qu'elle est vivante, et qu'elle te protège !)
Son ruban, bien sûr... J'ai découvert cette magie quand j'ai failli me noyer au Noara, dans le lac de l'oasis de mon sanctuaire. Grâce au pouvoir de Moura, dont il est empreint, je vis, je respire, même sous l'eau. Tout n'est pas perdu, je ne mourrais pas noyer !
(Tu préfères crever après une chute de cinquante mètres ?)
Le fleuve continue de m'emporter vers ce qui sera très certainement ma fin. J'ai toujours su que j'allais crever à cause de l'eau, écrasé contre un rocher comme ma soeur, comme si son sacrifice d'il y a un siècle n'avait rien changé à l'histoire ni au destin. Je renonce et m'endormirais bien là, juste avant de tomber pour ne rien ressentir. Il paraît que les elfes plus âgés peuvent le faire, s'endormir comme le font les humains, à part que nous autres à la vie si longue, nous ne nous éveillons plus jamais après. Cela serait bien dans un cas comme celui-là, me laisser partir, simplement, sans douleur.
"Aïeuhhhhh !!!!"
(Les premières douleurs sont déjà là... Adieu, monde cruel, adieu ma soeur... Pardonnez-moi, tous, pour ce temps que j'ai gâché. Pardonne-moi Yuimen, je n'étais pas à la hauteur...)
Je verserais bien des larmes, tellement je suis triste et déçue, mais je ne peux pas. Je mourrais sous cette forme de panthère.
(J'compte pas crever, moi !) (Comme si on avait le choix...) (Tu sens la douleur à la patte arrière ?) (Hum ?) pensé-je même pas intéressé par les puissantes brûlures qui émanent de la patte en question. (Yuimen, Zewen ou qui que ça soit, y veut pas qu'on y passe.) (Hum ?) songé-je vaguement intriguée, ayant une drôle de sensation par rapport à la verticalité de nos mouvements... (On est bloqué. Notre vie tient à une branche !)
Une branche ? Le destin est bien moqueur et doit se complaire à reproduire ce qui s'est déjà fait. A nouveau c'est une branche qui me sauve la vie, à nouveau, quelqu'un va venir me sauver, c'est certain, ça ne peut que ce passer ainsi. Sarya ? Heramë, mon père ? Ou même Yuimen. Viendrait-il pour sauver sa gardienne sur un monde lointain ? Viendrait-il lui qui m'a envoyé sauver ce monde du joug d'Oaxaca ?
(Personne ne viendra.) (Mais si, quelqu'un viendra, quelqu'un doit venir !) (J'compte pas attendre !)
Je sens le corps puissant d'Astinor qui tente de se raccrocher à la racine qui nous maintient sur le fil étroit de la vie. Ses muscles se battent contre un courant bien trop fort pour lutter, qui est-elle pour lutter contre Moura ? C'est une bataille déjà perdue que je ne peux gagner seule.
(Oh, bordel, t'es pas seule !) (Tu te souviens des paroles de la matriarche !)
Comment pourrais-je oublier cette rencontre dans le désert et cette séance de divination sur les bords du lac ? Ces ossements et cette gamine au regard violet plus profond que celui de nombreux adultes ? Comment oublier une femme qui m'a prédit la paix ou les tourments de l'Enfer, sentant Astinor dans mon coeur avant que moi-même sache l'écouter ?
"La prochaine fois, tu seras peut-être seule... Apprends à connaître tes failles, fais un avec toi-même, parce que tu n'auras pas toujours des gens près de toi."
Ces paroles résonnent en moi comme si cette femme était là entrain de les prononcer. Trop de fois j'ai côtoyé Phaïtos en comptant sur d'autres pour me sauver la vie. Entourée de Sektegs et de géants en panique, je n'ai plus que moi, et chaque gorgée d'air qu'Astinor parvient à arracher au prix de son impressionnante force est comme une gorgée d'eau dans le désert, un espoir infime de vivre. (Fais un avec toi-même) (Tu n'es plus seule...) (Nous sommes du même sang, toi et moi, Gardienne. J'ai promis de vaincre les éléments pour toi. Mais je peux pas lutter, le courant est trop puissant ! Souviens-toi la rivière !) (Nous sommes du même sang, toi et moi, esprit ancien. Je vaincrais l'eau pour toi !)
Sarya est vivante, je l'ai vu. Moi aussi je suis vivante, je dois vivre ! Phaïtos n'est pas près de me rencontrer à nouveau !
Je récupère mon corps, lâchant une touffe de poils qui s'en va dans la chute d'eau grondante derrière moi. Comme si je sortais d'un trop long coma, la première goulée d'air est revigorante, me donnant toute la force et l'espoir qu'il me faut. Lâchant brutalement mes fluides dans la branche, je la force à pousser, à grandir, à rejoindre l'autre rive, ou même la rive où elle est amarrée, à m'emporter n'importe où, me traînant par le pied jusqu'à la berge, jusqu'à la terre ferme. Je serre dans ma main l'arcane d'orme chétive, pour diriger ma magie, mon pouvoir et toute ma connaissance druidique sur cette unique plante, comme si elle était la dernière existant dans l'univers entier, comme si le sort même du Dieu Yuimen ne dépendait plus que de cette seule branche.
(Je suis là moi aussi, je vais aider !)
Sortant de je ne sais même pas où, Anouar se mue en boule verte qui va dans la branche empreinte de fluide, dirigeant ma magie, la contrôlant.
(((utilisation de mon sort rp de pousse de plante + pouvoir rp du druide pour diriger la plante vers le sol + pouvoir de l'arcane d'orme + pouvoir de ma faera qui peut modifier la forme de mes sorts.
- en espérant que ça suffise-)))
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Je suis aussi GM14, Hailindra, Gwylin, Naya et Syletha
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