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 Sujet du message: Re: Les Rues et les Ruelles
MessagePosté: Dim 23 Nov 2014 20:14 
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Hrist quitta bien vite la milice. Son supérieur lui avait rendu après examen, la totalité de ce qu'elle avait ramené du corps de Garry, la Shaakt qu'elle venait de tuer. Les documents encore cachetés placés dans la besace, elle avançait déjà dans les ruelles étroites et sinueuses de la ville. Tout en progressant lentement, elle observait à la faveur des torches et de la faible lueur du jour naissant la dague Shaakt ainsi que son nouvel emblème, le dragon de métal, assez lourd, il était probablement fait à partir d'un bronze refondu si on en croyait les petits éclats sur son profil. L'œil brillant de la broche avait un côté hypnotique, symbole de sa récente progression au sein de la ville, elle remplaça bien vite la petite aiguille d'acier qui nouait sa cape par le petit dragon qui serait désormais en évidence sur sa poitrine.

La Sindel se dépêchait, elle savait que la mort de Garry risquait de précipiter des choses dont elle n'avait pas encore connaissance, arriver au plus vite à Caix Imoros était donc capital pour son investigation. Les laisser-passer soigneusement conservés, elle se rendit vers les portes de la ville, non loin se tenait les écuries et elle y trouverait une monture pour le voyage.

« Tu comptes faire réparer tes gants ? Et te trouver des provisions pour la route ? Remarque, un peu de chasse ça te fera pas de mal. En tout cas, je suis ravie ! Nous avons une longueur d'avance, cette fois-ci. Tu veux savoir comment sont les geôles Shaakt ? »

« Avec grand plaisir. D'après ce que j'ai vu, les Shaakts sont de viles saloperies vicieuses et fourbes, on pourrait s'entendre à merveille, mais je crois que je les préfère morts. »

« Tout le monde, préfère les Shaakts morts. »

Enfin, elle arriva en face des écuries.

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La petite ombre de la Mort à Elysian.

Alors, j'ai établi ma couche dans les charniers,
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Où la Mort Noire tient le registre des trophées qu'elle a conquis.


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 Sujet du message: Re: Les Rues et les Ruelles
MessagePosté: Mer 26 Nov 2014 21:57 
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La bête était moins forte que son cheval, Calpurnia. Elle se déplaçait avec moins d'aisance dans les ruelles usées et boueuses de la ville. Après une descente qui menait aux portes de la ville, Hrist ralentit doucement la cadence. Elle était perdue dans ses songes et ne voyait pas comment, à l'heure actuelle, elle réussirait à débusquer les auteurs de ce complot.

Autour d'elle, il n'y avait que des orques et des ombres sournoises qui se glissaient partout au travers des ruelles. Violeurs en exils, menteurs, traîtres, tueurs et déserteurs, esclavagistes et races dites "maléfiques". Tous ici oeuvraient dans le même but ultime, reprendre ce qui autrefois leur appartenait. Oaxaca avait misé sur la soif de sang des orques mais les Shaakts eux, semblaient avoir d'autres objectifs. Omyre était une ville pleine de complots, songea la tueuse tout en passant les portes noires de la ville.

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 Sujet du message: Re: Les Rues et les Ruelles
MessagePosté: Sam 29 Nov 2014 14:38 
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-> Le Réveil

Baarghul mène la marche. Arrogant, roulant des épaules, fier et impatient de la tuerie qui se prépare. Deux orcs m'encadrent. Baarghul sait peut-être que je suis potentiellement dangereux. Je peux quand même tourner la tête, une grande évolution en comparaison à mes premières années de service. L'orc sur ma droite est calme, sûr de lui.(Un nouveau dans la bande de Baarghul). Sa mâchoire est cassée, un combattant féroce je suppose. Il lui manque une oreille, et son torse nu est couvert de cicatrices. D'ailleurs il bombe le torse pour les exposer. Sur ma gauche, un orc sans expressions. Il marche et souffle comme un taureau, mais c'est tout ce qui fait de lui un être vivant. Je l'ai déjà vu auparavant. Je me souviens, et mon dos aussi, de son fouet fait de cuir et de lambeaux de peau. Cet orc est une bête encore plus féroce que celles que j'ai pu affronter. Heureusement, il est extrêmement loyal à Baarghul, qui l'a recueilli lors d'une bagarre de rue. Baarghul avait brillamment triché lors d'un combat contre cet orc, et idiot comme il était, il ne l'avait pas remarqué. Ces puissants muscles dépassent sous sa tunique légère. Nirrg ferme la marche, et s'amuse de temps en temps à me faucher une jambe, pour que je tombe, ce qui les fait rire, lui et le nouveau. Baarghul sourit, mais continue sa marche, pressé. Quant à l'orc-monstre, il se contente de me relever violemment, et nous continuons notre marche. La rue dans laquelle nous sommes est sale. Elle est aussi bien remplie, de nombreux orcs se bousculent, des bagarres éclatent un peu partout. Un râle se fait entendre. Les orcs regardent rapidement et rient grassement. Sur ma droite, je vois l'éclat d'une lame rougie. Au début, je m'en détournais, mais plus maintenant. Cette couleur rouge métallisée me happe, tout mon esprit est concentré sur les quelques gouttes de ce précieux liquide qui tombent sur les pavés gris. Mes pupilles se dilatent légèrement pour voir encore mieux malgré le temps nuageux très sombre. Une légère bruine commence à tomber.

« Magnez-vous les gars, j'ai horreur de la pluie ! »

La marche s'accélère sous le commandement de Baarghul. Mon absorption, mon évasion s'en va en même temps que le sang essuyé sur les vêtements de l'assassin. Je me perds dans les pavés irréguliers qui défilent sous mes pas. La rue est bruyante, je l'avais presque oubliée pendant ces quelques instants magiques. Je relève la tête. Dans cette rue, il n'y a que des voleurs, des brutes et quelques tueurs qui agissent sous contrat. Je m'amuse à imaginer le flot des différents fluides vitaux s'écoulant sur chacune des gorges de ces êtres. On croise des esclaves qui se font fouetter. Ils sont torses nus, mais n'ont aucune fourrure. Comme je les plains, le froid les tuera sans doute. Ils courent à côté de nous, suivis par des contremaîtres à dos de loups gris. Le fouet claque. Ce bruit hérisse mes poils, ce que Nirrg remarque à cause du frissonnement dans mon dos.

« Hé Baarghul, je crois que ta bête se souviens la dernière fois qu'elle s'est dressée contre toi ! »

Quelques rires gras. Le nouveau rigole lui aussi sans savoir pourquoi.

(Nirrg, je m'occuperais de toi aussi, ne sois pas jaloux, ton tour suivra celui de Baarghul, et je jouerai avec toi. Mes griffes vont courir sur ton corps, non pas pour te tuer tout de suite, mais pour jouer. Tu deviendras ma marionnette jusqu'à ce que je décide de couper tes fils.)

La conception et le rêve de ce que je ferais me troublent la vue. La bruine n'est plus grise, mais rouge. Cette perception me plaît beaucoup. Je crois bien que ces dix ans à Omyre m'ont changé en une bête féroce, avide de sang. Je ne m'effraie pas, je suis presque enthousiaste à l'idée de mettre à mort ce qui saigne. Ma conscience me rappelle que j'ai tué de nombreux esclaves déjà, et que je m'apprête à réitérer. Mais mes griffes, elles, bien que je ne les vois pas, tremblent. Ce n'est qu'une impression, mais je sens déjà comme un liquide s'écouler de mes mains. Ma vision troublée me fait voir des tâches rouges grossissantes sur les bandages.
Ploc, Ploc, Ploc. La pluie qui dégouline de mes pattes est rouge. Je souris à cette vision. Ploc, Ploc. Je suis obsédé, primitif. Primitif ? Non, j'ai une éducation : j'ai appris à tuer, heureusement, et à ne pas me faire voir non plus. Ploc.
La maison de Gropill est devant nous, Baarghul s'avance, et sans ménagement, écrase plusieurs fois son poing sur la porte.

« Gropill, je t'amène mon chat inoffensif ! On va voir lequel de nos deux jou-jou est le plus apte à se battre ! »

La porte s'ouvre. Ploc, Ploc, Ploc... Bientôt ma vision de ces gouttes de pluies ne sera plus troublée.


-> Le jouet de Gropill

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 Sujet du message: Re: Les Rues et les Ruelles
MessagePosté: Mar 2 Déc 2014 13:24 
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La pluie ruisselle sur mon long vêtement. Cela doit bien faire quelques temps maintenant que je suis sur ce toit, à regarder autour de moi. Je discerne vaguement les murailles entourant la ville. Les faibles lueurs sur ces remparts signent la présence de vie. (Je ne pourrais jamais sortir de cette ville par la porte, encore moins en escaladant les murailles.)
Je dois pour l'instant trouver un endroit où me réfugier de la pluie, le moins dangereux possible. Je me redresse et commence à me déplacer telle une ombre sur les toits rapprochés. Je ne sais pas ce que je cherche, mais au moins je me déplace, j'ai l'impression de faire quelque chose d'utile. La pluie rend les toits glissants, je dois être précautionneux. Au travers des lames d'eau qui tombent du ciel, une ombre noire se déplace, sautant de toits en toits. (Une bâtisse abandonnée fera l'affaire).
À force de sautiller de toits glissants en toits glissants, mes pattes ne trouvent pas une surface assez stable pour continuer ma course. Je glisse et tombe lourdement sur les pavés flottants presque dans l'eau. Je me relève péniblement, la douleur, cumulée aux affrontements de tout à l'heure, ne m'arrange pas. Je m'emmitoufle sous mon manteau, frigorifié, trempé et endolori.

« Brrr... Sale temps. »

Les rues sont désertes, seulement quelques fous ou des poivrots sortent par ce temps. Des rires et des râles s'échappent de ruelles non loin, au travers du foudroiement des gouttes de pluie sur les pavés. Je reste sur mes gardes, les assassins pullulent la nuit. Au bout de la rue, j'aperçois difficilement entre les gouttes une habitation qui semble en mauvais état.

« Il ne devrait y avoir personne là-bas. »

Je parle tout seul, pour réchauffer l'ambiance. Je me rassure en même temps, et me donne la force d'avancer sous cette pluie torrentielle. La bâtisse n'est qu'à quelques pas, et est effectivement terriblement délabrée. Le toit est effondré à certains endroits. La porte est défoncée, les vitres brisées. Des rats se déplacent, leurs griffes sur le sol de la maison se font entendre malgré la pluie.

« Les souris ont peur des chats, je devrais être tranquille ici. »

Cette pensée me fait sourire et j'entre dans l'endroit sordide. J'avais raison, les rats s'enfuient en sentant cette présence féline. A l'intérieur, quelques bouts de viandes pourries, des meubles renversées, une table brisée et un foyer de cheminée noyé par la pluie et les cendres. Le sol est humide, certains endroits sont sous l'eau à cause des trous dans le plafond. Des gouttes tombent d'entre les planches du dessus. Au fond, un escalier brisé, avec des marches manquantes. Je décide de m'y engager avec attention, sautant par dessus les trous et me hissant avec les bras quand l'escalier était effondré. A l'étage, même spectacle qu'en bas, sans la nourriture. Des meubles brisés, des flaques d'eau. Une douche de pluie tombe verticalement depuis un trou dans le toit, laissant la fraîcheur de la nuit entrer dans la pièce. Des trous dans le plancher laissent apercevoir le rez-de-chaussée. Il y a au fond une porte entrouverte. Je m'y dirige, pousse la porte et observe la petite pièce. Je ne sais pas à quoi servait cet endroit, trop grande pour être un placard, trop petite pour être une chambre. Elle est vide et plus ou moins au sec.

« Parfait. »


Je me déshabille et étends mes vêtements trempés par la pluie sur le sol pour les laisser sécher un peu. Je pose mon sac non loin de moi et laisse la porte entrouverte, j'entendrais mieux les bruits et pourrait plus vite sortir en cas de besoin. En plus, je préfère dormir avec la porte ouverte. Mon odeur est répugnante. Je sens l'animal mouillé et blessé. Je commence un brin de toilette sur la totalité de mon corps. Je passe beaucoup de coups de langue râpeux sur mes plaies encore fraîches. Mon sang entre dans ma bouche, ma salive va aider à cicatriser. Avant de me coucher, je refait un tour dans la maison pour chercher n'importe quelque bout de tissu. Il y a dans la commode tombée quelques morceaux de torchons déchirés et autres pièces de vêtements. Je les assemblent entre-eux pour ne former qu'une grande bande de tissu. Je passe ce bandage sous la douche de pluie à l'étage pour l'humidifier et le nettoyer de toute la poussière. J'enroule ensuite ces bandages humides autour de mes côtes brisées. J'ai d'autres morceaux en plus. Je refais la même chose mais sur l'entaille de mon bras.

« Voilà, ça ira mieux maintenant. »


Mon corps pansé et lavé, je me dirige de nouveau vers la petite pièce du fond. Je vais contre un mur et me mets en boule, pour me réchauffer et prendre le moins de place possible. Je ferme les yeux et m'endors dans ce refuge de fortune.


-> Pensées réconfortantes

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Dernière édition par Noogah le Mar 2 Déc 2014 18:16, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Les Rues et les Ruelles
MessagePosté: Mar 2 Déc 2014 18:14 
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-> Pluie battante

J'ouvre les yeux, je ne sais pas combien de temps j'ai pu dormir. Il pleut encore, mais la pluie tombe à une cadence normale comparée à la dernière fois. La lueur, tombant du toit avec les gouttes, est faible. (Aube ou crépuscule ? Peu importe.) J'étire mon corps, réactive mes muscles avec quelques petits exercices. L'habitude de se réveiller pour se battre, ou tout simplement habitude de mon ancienne vie. J'essaie de me rappeler la vie dans la forêt. Je revois quelques visages, flous. (À croire que dix ans ici ont effacé mes souvenirs.) Toilette du matin, affûtage des griffes, flexions, tout mon corps passe à l'étude minutieuse de mes yeux. Je dois être le plus irréprochable possible. (Pourquoi fais-je cela?) En y pensant, je ne sais pas trop moi-même. Aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours agi de la sorte. Une sorte de tradition peut-être. Je jette un coup d’œil à l'amulette autour de mon cou. Une longue griffe ivoire, entourée de deux plus petites. Elles sont toutes gravées par des ornements représentants des scènes de chasse, de danse. Il y a des noms un peu partout. Ollyh est gravé sur le dos de la griffe, collé contre ma peau. Cette amulette a traversé les âges avec mes ancêtres. Mon père me l'a donné dès ma naissance. Les Worans n'ont généralement qu'un seul enfant, mes parents ont eu ma sœur après moi. En repensant à ma famille, je souris et serre un peu la griffe qui est accrochée à mon cou. (J'aimerais tellement tous vous retrouver...)

Le bruit de la pluie et de la vie qui s'active dehors m'arrachent à mes songes. (L'aube.) Je reprends mes vêtements, encore humides. J'enfile le tout, prends mon sac et avance vers l'escalier. Je rabats la capuche sur ma tête et cache mon corps et mes bandages dans le vêtement. (Si je suis vu en temps que Woran, je serais encore esclavagé.) Les rats se sont adaptés à ma présence, ils ne s'enfuient pas en me voyant. Je sors dans la ruelle, déjà un peu plus active. Des gens passent, d'autres courent. Quelques brutes torses nus, des corpulences plus maigrichonnes longent les murs sous de grands vêtements noirs. Je vais faire parti de ces gens là. Marcher au milieu de la rue, c'est signer son arrêt de mort. Entre les orcs et les voleurs, les chances de se faire tuer sont importantes. Je ne sais toujours pas comment m'y prendre pour sortir de la ville discrètement. (Peut-être qu'au marché certains anciens esclaves peuvent me renseigner.) L'idée me paraît bonne et réalisable. J'emprunte un dédale de ruelles, bifurquant à droite ou à gauche rapidement. Je me déplace vite et sans faire de bruit. J'arrive dans une des artères de la ville, elle est bondée de monde. Des esclaves, des orcs. Il y a aussi des prostituées près de ruelles sombres, des ombres épient chaque individu qui passe. De temps à autres, des têtes tombent, les corps passent d'une masse forte à un bout de tissu. Des souffles sombres se faufilent entre les gens, quelques lames de couteaux dépassent. (Heureusement, les assassins ne tuent pas pour le plaisir... enfin je crois...) Je cache mon sac sous mon vêtement. Des miliciens avancent dans la rue, à contresens, et briment ceux qui s'interposent. Ils ont derrière eux une grande cage en fer, pleine d'individus de tous genres. Des esclaves en fuite, des assassins, des voleurs, des bagarreurs, des innocents. La pluie donne une atmosphère écrasante et grise sur cette rue. Je suis malmené, poussé, éjecté. Des pickpockets tentent de me voler en me donnant des coups d'épaules rapides. (J'ai bien fais de cacher mon sac.)

Je pourrais voler moi aussi,, tout le monde est collé ici, personne ne sentirait une bourse tomber. Seulement ceux qui se font attraper se font rapidement éclater le crâne. Et puis je n'aime pas voler, le terme est laid. Je me sers quand j'ai besoin, voilà ce que je devrais dire. Pour moi, rien n'appartient à personne, à part la vie. Et depuis quelques années j'y pense, et hier cela s'est réalisé. Je peux voler la vie des gens. La mort m'a attrapé et m'a plongé dans un bain noir, enivrant et apaisant. Je sens comme sa présence tout autour de moi, son aura. Beaucoup ont peur de la mort, elle me rassure. Je sais qu'un jour je la rejoindrais, mais je comptes lui faire don de plusieurs centaines de vies avant. Ce sera mon remerciement pour sa présence réconfortante auprès de moi. Le temps n'a plus d'importance des ces moments là, je n'entends plus que les battements de cœur des gens, et dans cette rue, le roulement de tambour constant me motive au même titre qu'une marche guerrière.

Le marché n'est plus très loin maintenant. Je dévie sur la droite de la rue, en me collant à toutes sortes de personnes, rebroussant chemin de temps en temps, ou, au contraire, en étant emporté dix mètres plus loin. Enfin, après m'être faufilé entre toutes sortes d'épaules, j'aperçois enfin la première échoppe de marchand.


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Dernière édition par Noogah le Jeu 4 Déc 2014 22:44, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Les Rues et les Ruelles
MessagePosté: Mer 3 Déc 2014 23:27 
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En sortant du marché, j'ai emprunté une voie moins peuplée, pour être à mon aise dans mes déplacements. Je déambule sur les pavés gris d'Omyre et de ses innombrables rues. La pluie est fine et claire. Les nuages sont moins gris qu'hier. Je m'abrite quelques instants sous le porche d'une maison. Appuyé contre le mur en bois sombre, je contemple les gouttes qui tombent de manière anarchique. La pluie est une chose magnifique. Chaque gouttelette est unique, et pourtant agit de la même sorte que toutes les autres. Elle part d'un nuage gris, puis tombe inexorablement, plus ou moins vite. J'y vois là une allégorie de la vie. Mon esprit se perd dans cette idée. Chaque vie est unique, et pourtant nous avons tous une vie tracée, avec un début et une fin commune. Que la goutte s'écrase plus tôt que les autres en tombant sur un toit était prévu. Nous cherchons tous à atteindre le long fleuve, composé des milliards de gouttes tombées dedans ou à côté. Certaines réussissent facilement, d'autres passent par différentes épreuves avant d'atteindre la tranquillité. (Je ne suis qu'une goutte parmi d'autres. Peu importe ce que je compte faire, je finirai toujours par rejoindre un fleuve.) Cette sombre idée traverse ma tête. Quoi que je fasse, la goutte ne pourra jamais partir du sol et tomber dans un nuage. Seuls les ignorants croient cela, leurs âmes seraient des gouttes essayant de remonter vers un nuage. Les pensées moroses m'accablent. J'ai l'impression que les gouttes tombent de plus en plus fort. (Ma perception est encore troublée.)

Me mettre en tête que ma vie est déjà tracée en vue d'un accomplissement me fait peur. La mort me rattrapera, je le sais, mais ce qu'il m'arrivera avant cette libération m'effraie. Si je meurs de vieillesse, je verrais plein de petites gouttes, plus faibles, s'écraser avant moi. (Ne t'attache pas aux gens, ne te concentre que sur ta survie et le rétablissement d'un Équilibre.) Il a raison, ou plutôt j'ai raison. Mais je ne peux pas, du moins ne veux pas. J'ai trop peur de la bête qui sommeille en moi. Je sais que si je perds contact avec les autres êtres vivants, elle prendra pleinement possession de mon corps. Je deviendrai une machine de mort sans émotions. Un pantin bien ficelé. Mon nuage a peut-être prévu cela, mais j'en suis effrayé. Maintenant que je recouvre ma liberté, il ne faut pas que je sombre dans ma folie. Omyre m'a rendu fou, j'en suis sûr. (Le fou peut facilement croire que les gouttes zigzaguent avant de tomber, peut-être même ne tombent-elles jamais ?)

J'essaie de qualifier mon existence, mon essence même. Je suis un Woran. (D'apparence seulement.). La voix a encore une fois raison. Le Woran n'est qu'une coquille, mais la chose qui la remplit est bien trop sombre pour être perçue. En regardant mes griffes sortir de mon vêtement, si aiguisées et mortelles, je ne peux qu'être fier. Fier de ce que je suis devenu, mais une part de mon être reste attachée à sa vie passée. Aucun meurtre inutile, aucune rancœur, une tribu bien articulée, mais hélas en autarcie. Le monde autour m'avait brutalement arraché à mon idylle, et j'ai dû m'adapter au cauchemar entourant ma bulle. (Je donnerai tout pour revenir en arrière, revivre quelques temps encore parmi les miens..)

Ma vision s'embue, des gouttelettes perlent mes yeux. Une goutte salée se mêle avec une goutte de pluie tombant de ma capuche, et coule sur ma joue, avant de s'écraser au sol. Je frotte le revers de ma main sur mes yeux, renifle légèrement et secoue la tête. (Arrête de te morfondre, ton esprit et tes souvenirs ne te feront pas sortir de là, tes griffes par contre oui.) Vrai. Toutes ces réflexions ne m'aideront pas à sortir d'Omyre. Avant de partir de sous le porche, j'affûte mes griffes contre le bois le soutenant. Le bois s'épluche comme un fruit sous les passages de mes lames naturelles. Je rajuste la capuche sur mon visage et m'engage vers une nouvelle rue, déserte et étroite. (Je devrais être tranquille ici. -Sauf si des assassins se pointent.) Je m'assure à droite et à gauche que je suis seul dans cette ruelle de deux pas de large. Les toits des habitations sont assez proches mais ne se collent pas. Le bois utilisé est sombre, attendri par la légère pluie. Les poutres qui signent le premier étage dépassent un peu des bâtisses qui me tournent le dos. Elles ne dépassent que de quelques centimètres du mur. Je m'assure une dernière fois que personne ne me regarde. (Personne.) Je fixe mes yeux sur les quelques centimètres qui accueilleront mes griffes. Premier saut, comme prévu j'arrive à m'accrocher, mais la trop petite surface ne me permet pas d'être suffisamment soutenu. Je retombe sur mes jambes, esquissant un petit rictus de douleur. (Comment j'ai pu grimper et me battre avec mes côtes qui se baladent dans mon corps ? -L'adrénaline du combat mon ami, tes instincts de meurtre t'ont privé de douleur.) Certes. Je reprends mon souffle, mains sur les genoux. Je reprends mon élan, et refait l'exercice une bonne dizaine de fois, jusqu'à ce que le maigre bout de bois qui dépasse soutienne parfaitement mon corps. Je reste accroché une trentaine de seconde, suspendu au dessus du sol par la seule force de mes bras. Je retombe, fatigué. Mes côtes me font horriblement mal, la contraction de mes abdominaux ne m'ont pas fait tant de bien que cela. Je m'assois et reprends mon souffle pendant une bonne douzaine de minutes. (Il faudrait que je demande au nain une adresse pour me faire soigner.) Une fois la douleur passée et mon souffle repris, je me redresse et retourne vers le bout de poutre, marqué par les encoches de mes griffes. (Nouvel exercice.) Je réchauffe mes muscles : penche la tête des deux côtés, sautille et fais faire des cercles à mes bras. Mon corps prêt, je bondis de nouveau sur la poutre. J'y reste accroché normalement, mais au lieu de tenir, je force sur mes bras pour laisser la place à mes pattes arrières. Je ne me suis pas lancé assez haut, ainsi mes pattes arrières ne trouvent que le mur et je retombe, de pas trop haut heureusement. (Deuxième tentative.) Je m'accroche, me propulse. Cette fois, mes pattes arrières atteignent la poutre, mais mes mains ne savent pas quoi faire à part s'accrocher vainement au mur. Je tombe de haut cette fois, sur les fesses. « Mmpfh » Je serre les dents et souffle fort, je me suis fais mal cette fois. Tant mieux, la douleur me motive à réussir. Je respire longuement, de plus en plus calmement. Une fois la douleur gérée, je me relève et ressaute sur le mur. Cette fois, mes pattes arrières, ayant trouvées la poutre, me propulsent à leur tour en hauteur, permettant à mes griffes de se planter dans le gros morceau de bois qui tient la charpente. N'ayant que peu de connaissances en charpenterie, je ne pourrais nommer ce gros bout de bois. De toutes manières, il m'est fort utile, car je suis maintenant suspendu au dessus de la rue, accroché par les mains à ce morceau de toit qui dépasse. Je regarde vers le sol, je dois être à environ trois mètres cinquante, voire quatre mètres. Mon corps entier pend dans le vide. Je force une dernière fois sur mes bras pour me soulever. Je suis maintenant sur le toit de la maison.

Je crie de joie, j'ai réussi à escalader une maison comme un vrai félin ! (Comme cela m'avait manqué !) J'écarte les bras et regarde le ciel, souriant. Les fines gouttes tombent sur mon visage et mes bras légèrement dénudés. Ma capuche glisse, me laissant pleinement profiter de la pluie. Je respire encore rapidement suite à l'effort, je suis heureux. Cette escalade m'a ramené en mémoire les nombreux souvenirs de la forêt. Quand j'étais capable d'escalader des arbres gigantesques de cette manière, en courant contre le tronc. Je viens de courir sur une légère distance, quelques mètres, mais le bien mental que cela me prodigue est indescriptible. Je ne vois plus les autres toits, mais des manteaux de feuillages verts, jaunes, oranges. Je ris de joie. Jamais Omyre ne m'avait autant réjoui. Les gouttes martelant ma peau d'une douceur incomparable me rendent si joyeux ! La pluie est l’élément le plus pur qui continue de me suivre partout. J'essaye même d'attraper quelques unes de ses perles si parfaites avec ma langue, ce qui me replonge en enfance. Je me revois, courant dans les branches avec ma sœur. On faisait la course, on riait. On était heureux. L'euphorie se calme doucement, je revois les toits sombres d'Omyre. Les nuages sont sombres, à moins que ce ne soit seulement le ciel. L'air s'est rafraîchi. Quelques torches illuminent la ville. (Le soir approche. -Et notre rendez-vous aussi.) C'est vrai, le nain. Bientôt je devrais être en mesure de sortir d'ici, de retourner vivre dans la forêt, avec les miens. Je me lève sur cette poutre, surplombant la rue. Je rabats ma capuche, évitant ainsi aux regards indiscrets d'apercevoir mon visage. (Il y a quelque chose d'autre qui me manque.) Un frisson d'adrénaline me remonte l'échine, passe par mes bras et converge vers mes lèvres en un grand sourire. Je me mets dos au sol, je souris de plus en plus. Je ferme les yeux, inspire longuement. Le vent me caresse le visage, je ne sens plus la ville mais la nature sauvage de la forêt. La poutre est devenue l'extrémité d'une branche, le toit un tronc d'arbre. Quatre mètres sous moi, un tapis de feuilles. J'écarte les bras, les étirant au maximum. J'expire, et mon corps penche vers le sol, dos en avant. Je tombe, les yeux toujours clos, revoyant les différentes teintes de vert et de marron se mélanger à la vitesse de ma chute. Mes réflexes enfouis remontent à la surface. Mon corps se recroqueville sur lui-même, en boule. Mes jambes passent au-dessus de ma tête, puis mon corps s'enroule, faisant basculer ma tête vers le ciel, mes jambes vers le sol. Je retombes, telle une plume. Je suis accroupis, un genou à terre. La douleur de mes côtes m'a forcé à poser une main à terre, pour amortir un peu plus. Mon autre bras est posé sur mon genou dressé. Je m'appuie dessus et me relève sans grandes difficultés.

Mes yeux jaunes pétillent de joie dans le crépuscule. J'ajuste ma capuche, puis pars en direction du Campement, mon rendez-vous approche. (La liberté...) J'inspire une grande bouffée d'air, heureux. (La liberté n'a jamais été aussi bonne.) Mes instincts et réflexes reviennent petit à petit, j'ai finalement une chance de reconquérir mon être. Je ne suis pas qu'une coquille à l'image d'un Woran, je suis un Woran. Je sers l’Équilibre.


-> Le Deal

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 Sujet du message: Re: Les Rues et les Ruelles
MessagePosté: Lun 15 Déc 2014 22:08 
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« Alors, c'est quoi ton petit discours ? »

« Je n'en sais trop rien. Je vais mentionner l'histoire des poisons mais je ne peux pas me rendre à Caix Imoros pour l'instant. C'est du suicide. »

Hrist passa devant l'écurie et n'oublia pas de baisser la tête et de mettre sa capuche. L'orque qui louait les montures se rappellerait peut-être d'elle et ne manquerait pas de remarquer l'absence de sa monture. Elle ne baissa sa capuche qu'en tournant au coin de la rue, même si Hrist estimait ne pas avoir de compte à lui rendre sur l'existence de ce pitoyable cheval, elle préférait éviter les altercations avec les Garzoks qui avaient un goût prononcé pour la rixe générale.

« En tout cas, les Shaakts concernés sont morts. Morts en engloutis même. Scalpés, éventrés et pendus avant d'être donnés aux requins et aux poissons. La matriarche elle, est au fond de l'océan... Le projet des elfes noirs sera certainement mis à mal, même si une personne plus haut placé se trouve derrière. »

« Et si elle n'était pas toute seule ? Tu y as pensé ? »
« La personne derrière tout ça ? »
« Non. Enfin, presque. Si la matriarche que tu as tuée faisait partie d'un groupe, et qu'il y avait d'autres groupes avec d'autres matriarches qui étaient à la botte d'une autre matriarche, plus haut placé. Pour être bénéfique, une telle organisation ne doit rien avoir à envier aux pieuvres. »
« C'est à dire avoir plusieurs... Oui non, j'ai compris. D'autres navires, d'autres complots, d'autres esclaves. »
« Des humains. Surtout des humains, il y a un complot derrière ça oui, l'idée du poison n'est pas à laisser de côté. Enfin, peut-être que ton capitaine en sait quelque chose. »

Hrist arrivait au bout du trajet.

« On sera vite fixée. »

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 Sujet du message: Re: Les Rues et les Ruelles
MessagePosté: Mar 23 Déc 2014 21:53 
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Au crépuscule, nous sortîmes de l’obscur bâtiment qui nous avait vus captifs. La ruelle était, par miracle, déserte mais les bruits de la ville nous indiquaient que nous aurions bientôt à nous mêler aux hordes d’orques pour fuir de la cité. Nous empruntâmes diverses ruelles, évitant toujours les axes les plus peuplés. Les capes que nous avions revêtu puaient la mort et masquaient notre odeur au flair des garzoks. De plus, notre taille pouvait nous confondre avec deux gobelins, pour peu qu’aucun peau-verte ne s’approche d’un peu trop près. Bientôt, nous vîmes les murailles d’Omyre qui se dressaient, noires sur l’horizon, tel un voile de désespoir. Les créneaux saillant du mur évoquaient autant de dents acérées garnissant la gueule d’un ogre. Nous longeâmes l’imposante enceinte, têtes baissées, nous faisant le plus discret possible. Une route un peu plus large que les autres serpentait au pied des fortifications. Divers boyaux plus étroits, parfois tellement réduits qu’ils ne permettaient pas à deux hommes de marcher côte à côte, débouchaient sur celle-ci.
Après plusieurs minutes d’une marche éprouvante, nous vîmes apparaitre un peu plus loin devant nous un groupe d’orques qui se dirigeait vers nous. Peut-être une dizaine d’individus. Miklar et moi nous jetâmes dans une ruelle et nous colères au mur, dans l’espoir de ne pas être vus. Nous attendions dans un silence de mort que le groupe s’éloigne. Nous entendions les peaux-vertes parler entre eux, mais il nous était impossible de comprendre un traitre mot de ce qu’ils racontaient. En effet, ils ne s’exprimaient pas dans la langue commune, non, mais dans l’ignoble idiome propre aux garzoks. Une langue horrible, aux sonorités immondes, que seuls les fous osaient parler. La bande d’orques s’éloigne enfin, sans nous avoir remarqués, et nous pûmes reprendre notre errance dans la ville, dans l’espoir de trouver un endroit d’où nous pourrions fuir la cité noire.
Après quelques minutes de marche, nous aperçûmes deux tours qui, très certainement, devaient encadrer la porte de la ville.
« Les murailles sont trop hautes pour qu’on puisse sauter par-dessus, me confia Miklar, les portes de la ville me semblent être la seule issue. »
« Nous n’avons pas le choix, de toute façon. »

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 Sujet du message: Re: Les Rues et les Ruelles
MessagePosté: Ven 2 Jan 2015 00:38 
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« Quoi... On repart déjà ? »
« Il faut immédiatement partir pour Kendra Kâr. »
« Suicide surprise ! Tu es trop crevée pour faire la route, et puis ton poney est à Caix Imoros, ça m'étonnerait que le ronchon de l'écurie t'en prêtre un autre. Et même s'il est mort depuis une semaine, il doit puer moins que toi, après des jours à bord de la Laide-les-Maines... »

« Il y a une solution à tout. Mais là, c'est d'une importance capitale. Xenair est l'assassin. Un des officiers d'Oaxaca. Une fois la mission effectuée, je pourrais avoir une audience avec lui. »

« Et le bain dans tout ça ? Et la nuit de sommeil ? Un plat chaud éventuellement ? »

« Tu as raison, je me sens faible. Il me faut un cheval ! »

Hrist remuait la tête comme une girouette en espérant retrouver l'écurie dans laquelle elle avait trouvé sa monture il y avait quelques jours. Ce n'est qu'au bout de quelques minutes qu'elle se rendit compte qu'elle ne retrouvait plus son chemin dans les ruelles sombres et étroites.

« T'es perdue, ma grande. Et d'ailleurs... Kendra Kâr. Tu es certaine que s'y rendre est une bonne idée ? »

La tueuse monta une petite rue au hasard et tomba sur un garzok qui attachait de lourdes bandes de cuir à un canasson moisi. Elle lui tapa sur l'épaule.
« C'est ton cheval ? J'en ai besoin sur le champ, tu iras le réclamer à la mi... »

« Que dalle à foutre. Dégage, j'travaille. »

Hrist resta bouche bée un instant et décida qu'elle ne souhaitait pas supporter ça, certes, elle devait passer pour une misérable avec ses vêtements couverts de boue et de poussière, son odeur immonde et ses cheveux sales, sans parler de son état de fatigue. Sans trop réfléchir, elle tira son arme. Le Garzok lui avait déjà tourné le dos, il avait du la prendre pour une folle et continuait à ramasser le cuir pour le rouler et le ficeler avant de le charger sur son canasson déjà épuisé du poids qui pesait sur chaque côté de sa selle.

Hrist frappa deux coups de dague dans le dos du Garzok qui s'écroula sur sa marchandise. Il y avait bien deux ou trois témoins dans la rue, mais ils tournèrent le regard. Il y avait même fort à parier qu'ils attendraient que la tueuse passe le coin de la rue pour aller fouiller le cadavre.

Hrist découpa la corde qui maintenait le chargement de la monture et grimpa sur le canasson insouciant de savoir qui pouvait bien grimper sur lui. Il réagit à peine lorsqu'elle frappa de ses bottes sur ses flancs et finalement se décida à avancer. Lentement.

« On est pas rendus, avec pareille bourrique.»

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 Sujet du message: Re: Les Rues et les Ruelles
MessagePosté: Sam 14 Mar 2015 19:02 
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[:attention:] Message à caractère très violent. Public non averti éviter toute lecture.

    Massacre au détour d’une ruelle.

Le pas lourd, lent et vaste, Gurth parcourait les rues sombres de la capitale d’Oaxaca. Errant sans but autre que de découvrir les délices macabres d’une cité du mal, entièrement dédiée au chaos et au désordre, il cherchait sans trop le vouloir à affirmer sa présence en ces lieux. Jamais il n’avait senti aussi fort la présence de Thimoros en un endroit. Véritables cloaques sanguinolents, certaines ruelles n’étaient qu’un conglomérat hideux de corps défunts mêlés à la fange et au sang. Des mendiants, à peine vêtus de frusques élimées et trouées, gisaient sur leur séant, n’osant réclamer l’aumône aux passants effrayants, sous peine de ne récolter que des coups. La peau sur les os, fêlée de blessures infectées aux odeurs nécrosées, ils attendaient que la mort vienne les cueillir, d’une manière ou d’une autre.

Au détour d’une ruelle, un cadavre avait attiré son attention. Sur le dos, la peau livide et boursouflée, il était nu et offert aux regards. Le visage fermé, les yeux vitreux baignant à moitié dans la boue noirâtre qui couvrait le sol. Son ventre était enflé, comme s’il avait ingéré quelque poison avant de passer de vie à trépas, ou que la maladie inondait son être et l’enflait d’infection.

    Les mouches bourdonnaient sur ce ventre putride,
    D'où sortaient de noirs bataillons
    De larves, qui coulaient comme un épais liquide
    Le long de ces vivants haillons.

Gurth s’était un instant ému de la beauté que pouvait revêtir la mort. Une beauté dépassant toute autre, et qui ne pouvait être égalée que par la violence de la mort en question, juste avant que le corps ne tombe en paix, se déchirant de l’âme damnée et en colère qui alimentait la magie de l’ombre. Il caressa les crânes à sa ceinture, en guise de prière muette et respectueuse envers le grand Phaïtos, détenteur des secrets de cet élément qui lui plaisait tant.

Il avait donc parcouru ces ruelles nocturnes et pluvieuses, à la recherche d’autres spectacles d’une telle qualité. Et il n’avait pas été déçu. Une bagarre sanglante de garzoks en pleine lutte de pouvoir, un shaakt méprisant qui corrigeait un esclave à coup de fouet aux queues barbelées. Il s’était arrêté, un instant, pour voir ces lambeaux de peau et de chair virevolter dans les airs et retomber mollement sur les pavés rougis de sang, au rythme des plaintes effrénées de l’homme – mais en était-ce encore un ? – qui se faisait ainsi torturer.

Plus tard, il s’était retrouvé dans un quartier plus paisible, en apparence du moins. Aux heures les plus sombres de la nuit, sous ce ciel masquant toute lumière, sous cette pluie occultant toute envie, dans cette ville emportant toute vie, il s’était retrouvé face à un importun, qui allait sans aucun doute lui permettre d’à son tour donner un coup de pinceau à cette œuvre globale et infinie qu’était devenue pour lui, en si peu de temps, cette capitale. L’individu était posté à l’entrée d’une ruelle où semblait se dérouler une échauffourée. Sombre et étroite, il fallait s’en approcher pour visualiser la bagarre en cours, chose que Gurth avait fort envie d’ajouter à son panel de visions agréables. Rien de tel qu’un brin de violence sanglante, au cœur d’une nuit sans lune. Un spectacle que le malotru ne semblait pas à-même de le laisser participer en qualité de spectateur averti. Sans considération pour sa grande taille, ses mains immenses et son air patibulaire, le jeune humain à la gueule couverte de cicatrices boursoufflées apostropha l’Ogre sans ménagement.

« Hé, gros lard, fous-le-camp d’ici tout de suite. T’as rien à faire là. »

Peu impressionnable, le larron dégaina une vieille dague pour accompagner ses mots, menaçant. Prenait-il Gurth pour un obèse infirme et impotent ? C’aurait été là son ultime erreur en ce monde, car un sourire carnassier, dévoilant des dents larges et blanches sur des gencives trop rouges, se dessina sur la face du géant. Les sourcils broussailleux se froncèrent sur les yeux pâles, dans un rictus mêlant haine et satisfaction. Le bandit ne vit pas la main énorme de Gurth qui lui retourna une gifle en revers sur la joue, puissante, terrible. Le jeune homme fut projeté par terre par la force du coup, et il s’en tira à bon compte de n’avoir tout simplement pas eu la nuque brisée sous le choc. Le coup, Gurth l’avait senti raisonner dans ses doigts, dont le derme épais picotait encore un peu. Un délice. Il grogna sous sa capuche de cuir, la rabattant vers l’arrière pour que son adversaire un peu trop téméraire voit qui il avait osé attaquer. Le crâne chauve révélé, le mioche d’une vingtaine d’années se releva, énervé.

« Putain mais t’es un gros malade toi ! J’vais t’planter, fils de pute. »

Sa mère, bien qu’il ne l’ait jamais connu, n’était pas une prostituée. Mais il l’avait pourtant toujours considérée comme telle. Quoi d’autre, sinon, pour une femme qui n’avait fait que mourir en le mettant au monde, l’abandonnant entre les griffes d’un père cruel qui lui en voulait ? Il cueillit l’injure sans que ça ne lui fasse rien, et se réjouit d’avance de la menace proférée par le jeune abruti leste qui n’avait pas saisi la menace qu’il représentait. Un gros en robe, apparemment désarmé. Oui, il avait des mains comme des battoirs, et des bras plus épais qu’un gourdin garzok, mais ce n’était qu’un vieil obèse barbu. Un infirme, à bien des égards. Le jeune coq le voyait comme ça, en tout cas, lorsque fébrile et hargneux, il se lança, dague à découvert, sur la carcasse verticale de l’Ogre. Et sans doute cet assaut, vif et violent, aurait-il abouti, si Gurth Von Lasch n’avait pas en lui le sombre pouvoir des fluides d’Ombre. Aussi lorsque le tulorain invoqua son pouvoir de main sombre, laissant apparaître une main ténébreuse et fumeuse formée des âmes tourmentées des défunts du coin, la surprise cueillit le téméraire en pleine course, et lorsque ses pieds se soulevèrent de terre, il ne put retenir un couinement douloureux.

La main de Gurth s’était levée en même temps, mimant les gestes de sa paluche magique qui enserrait la gorge du brigand. Sa dague était tombée par terre dans un bruit métallique, et à part les trois autres gredins dépouillant une cible facile, il n’y eut plus comme bruit dans cette ruelle que les suffocations ineptes du balafré. Sa gorge, serrée par des doigts brumeux, ne libérait ni ne laissait entrer la moindre parcelle d’air. Des borborygmes baveux sortaient de cette bouche intrépide et insultante, semblables à ceux qu’un roquet ayant mordu sa proie et ne voulant la lâcher ferait. La panique se lisait dans ses yeux révulsés, qui tournaient frénétiquement dans leurs orbites en cherchant une issue qui ne viendrait pas.

Ses potes se rendaient compte que quelque chose clochait. Leur guetteur était en train de se faire pulvériser par un gros inopportun. Deux d’entre eux délaissèrent leur victime déjà vaincue, apparemment, et se ruèrent vers l’entrée de la ruelle.

« Eder, qu’est-ce que tu fous ? »

Ils le surent bien vite, se tournant vers l’ogre avec terreur, voyant le corps de leur compagnon s’effondrer inerte, mort dans sa propre urine, le visage crispé de peur dans une dernière expression horrible, la gorge marquée de marques noirâtres, stigmates de la cruelle magie d’ombre. Un dernier gargouillis sortit de sa bouche grande ouverte et sans tonus, qui sonna la charge des deux autres. L’un fut plus rapide que l’autre, qui avait du mal à courir avec le plein potentiel de ses jambes, puisque ses braies avaient une tendance certaine à lui tomber sur les genoux, du fait de la ceinture qu’il avait débouclée, témoignant de la nature ses activités envers la victime, sans doute féminine, de leur petit quatuor. Un spectacle dont Gurth se serait pourtant régalé, et dont les cris échappés auraient illuminé cette journée déjà fort agréable. Le premier qui fut sur lui était plus âgé que le jeunot mort de l’avoir trop ouverte. La trentaine bien tapée, il était borgne et un nez enflé et rougeaud attestaient de son penchant avéré pour la vinasse des bas quartiers. Une tignasse poivre et sel teigneuse et parsemée de poux et de trous d’un cuir chevelu crouté d’avoir été trop gratté. Une bague encore rougie du sang de la demoiselle brillait à son annuaire. Un homme marié ? Un noble gradé ? Un riche déchu d’une longue lignée ? L’Ogre n’en avait que faire. Le sang qui coulait dans ses veines allait à son tour se répandre sur le sol de la ruelle. Il avait dégainé une petite épée une main, au tranchant douteux qui aurait mérité plus d’entretien. Il jeta, à son arrivée, un regard effrayé vers la montagne de chair qui stagnait devant lui.

Il attendit le second, qui avait appelé le jeunot, et qui arriva à leur hauteur en remontant son pantalon et en en raccordant les bords pour ne plus qu’il tombe. Celui-là, du même âge que son confrère, n’était pas plus beau à voir. Une tignasse noire et grasse attachée en queue lâche à l’arrière de sa nuque, une barbe hirsute tombant sur un buste poilu révélé par une chemise crasseuse entrouverte sur un torse néanmoins puissant. Des mains aux ongles longs et noirs de crasse. Celui-là maintenait entre ses doigts un bâton noueux servant autant d’arme que d’appui. Il semblait que son pantalon nait pas été pas la seule raison de son retard : quelques pansements poisseux entouraient l’une de ses jambes, où une vieille blessure devait s’être infectée, et commençait à puer la rage. Celui-là s’écria :

« Merde, c’est toi qu’a fait ça à Eder ? Tu vas l’regretter, aussi grand qu’tu sois. »

Et il arma son arme pour en frapper le flanc de Gurth, qui se laissa faire sans bouger. Le coup lui meurtrit la graisse, et laissa une ecchymose à hauteur des côtes de l’Ogre, mais il n’en avait cure. La douleur était superficielle. Il l’aimait. Elle faisait partie de lui. Lorsque le bandit vit que son coup avait à peine ébranlé le géant, il tenta d’en redonner un, mieux placé, droit dans le genou du monstre. Son point faible : ses jambes déjà trop fatiguées d’avoir à soutenir sa carcasse toute la journée. Le choc fut plus cinglant, douloureux, et Gurth se sentit vaciller. Dans un grognement, la masse de son corps s’effondra sur le genou blessé, qui à la rencontre du sol se meurtrit encore davantage, la peau éclatant et le sang giclant sur les pavés mouillés. À la merci de ses adversaires, il n’allait pas se laisser faire. La colère montait en lui, la rage du combat. La trique de bois s’abattit à nouveau sur son dos, à deux reprises, et le plat de l’épée du premier vint le cueillir à l’épaule. Trop lent pour réagir physiquement, mis à mal par les ruées de coups, il grogna une fois de plus, avec davantage de hargne. Et voulant faire souffrir ces crétins ayant cru bon de s’attaquer à un fervent servant des dieux de l’Ombre, il déchaina une fois de plus sa magie.

Quoi de mieux que la cruelle obscurité pour cueillir ces deux hères agressifs ? Un sortilège puissant, qui nécrosait la chair de ses ennemis, la faisait flétrir dans une douleur atroce. L’épéiste eut le bon réflexe de se reculer sitôt les premières sensations de douleurs musculaires apparaître. Il se jeta en arrière, tombant sur son arrière train, et se soustrayant à la magie de l’Ogre qui l’aurait fait couiner. L’autre, en revanche, fut pris en plein dans le sombre sortilège, et vit sa propre chair se chiffonner sous ses yeux, se tordre, se creuser, de marquer de stigmates noirâtres alors qu’elle se flétrissait. Un cri s’échappa de sa gorge, alors qu’il tombait à plat ventre. Et le cri se prolongea en un second, de détresse, alors qu’il roula sur le dos, étreint par le mal.

Gurth eut un moment de répit pour se relever lourdement. Il appuya une main sur son genou, et força sur ses muscles pour retrouver une position debout, douloureuse. Boitant, il approcha de l’homme à l’épée qui s’était reculé à temps. Touché partiellement par sa magie, il semblait craindre l’être capable de lui asséner de telles douleurs. Ses compagnons, l’un mort, l’autre agonisant, lui firent lâcher son épée alors que des larmes coulaient toutes seule sur ses joues.

« Pitié, m’sire, pitié m’tuez pas. »

Lâche. Il ne méritait aucune pitié. Son épée tomba sur le sol, et il joignit les mains pour implorer Gurth de l’épargner. Il n’en était pas question. Mâchoires serrées, le grand chauve assembla ses deux mains sur le crâne du brigand repenti, et le souleva de terre pour le plaquer contre le mur d’une maison. Une pointe rouillée dépassant dudit mur écorcha le dos de sa victime, déchirant ses chairs, mais il ne s’en rendit que top peu compte. Il serrait, serrait la tête de l’humain entre ses deux mains puissantes. Il serrait de toutes ses forces, faisant geindre de douleur sa victime se débattant vainement en donnant de maladroits coups de poings et de pieds dans le gras de son ventre et de ses cuisses. Dans un ultime espoir d’en réchapper, il plaqua ses mains sur les avant-bras de l’Ogre pour les écarter. Mais la force elle-même venait de ses mains. Et tremblant sous la pression, il entendit les premiers craquements du crâne qui cédait sous la pression. La calotte crânienne, sous cette chevelure tonsurée et mal entretenue, se fendillait. Il pressa encore, plus fort, alors que l’autre saignait des yeux et des oreilles. Les bruits sortant de sa bouche n’avaient plus rien d’humain, et ses membres pendaient déjà mollement, privés de toute force ou combativité.

Lorsque le crâne céda finalement dans un sinistre craquement, et que sa cervelle fut broyée entre les paumes de Gurth dans un son de succion répugnant, répandant sang et matière grise sur le mur, il lâcha enfin prise, et le cadavre à la tête explosée glissa contre le mur, la pique finissait d’arracher la peau de son dos en une ultime, et bien inutile, plaie ouverte.

Ainsi, il restait celui qui agonisait à moitié, sa chair nécrosée. Sa cane noueuse ne lui servirait plus, ni comme arme ni comme soutien. Il ne se relèverait pas, Gurth s’en fit la promesse. Il était celui qui avait osé le frapper, le mettre à genoux. Il souffrirait. Ô combien il souffrirait, avant de trouver la mort rassurante. L’ogre s’agenouilla à son côté, et l’homme tenta de protéger son visage en ramenant ses bras malmenés par-dessus. Le monstre sanguinaire s’empara de ces mains, les salissant du jus de cervelle de son ancien allié, et les écarta du visage de sa cible. L’effort soufflé chassa la morve de son nez, qui vint s’étaler sur les joues de sa victime. Lâchant une main en l’envoyant se fracasser contre le sol, il se saisit d’un doigt de son adversaire allongé, et le retourna dans un nouveau craquement. Un cri inhumain résonna dans la ruelle. Et un second, lorsqu’un deuxième doigt vint rejoindre le premier.

Maintenant toujours cette main, il rudoya l’estomac du presque-mort d’un violent coup de poing, qui vint s’écraser de tout le poids de l’Ogre dans le ventre du violeur. Le souffle lui fut coupé. Une bonne baffe le cueillit sous la mâchoire. Puis une autre, d’un revers de la main, et le poing de Gurth finalement fermé vint le frapper sur le coin de la joue, faisait exploser sa pommette sous la violence du choc.

« Meurs, ordure ! Meurs ! »

Von Lasch hurla sa colère, en avançant à genoux contre sa victime. Il grimpa dessus, écrasant son torse de ses deux-cent kilogrammes de chair, d’os et de graisse. Les côtes cédèrent sous le poids, perforant cœur et poumons, et arrachant les derniers soubresauts de vie de cet être mauvais, qui avait mal choisi la personne à qui il s’adressait. Un rire lugubre sortit de la gorge déployée de l’Ogre de Tulorim, alors qu’il se relevait péniblement dans la ruelle, ensanglanté.

Ses yeux laiteux injectés de sang cherchèrent la victime du viol dans la ruelle. Il lui semblait qu’un quatrième luron était resté avec elle…

La torpeur onirique d’une balade au cœur du mal,
La cruauté sans nom d’un massacre pas banal.

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Gurth Von Lasch - l'Ogre de Tulorim

Je hais les testaments et je hais les tombeaux ;
Plutôt que d'implorer une larme du monde,
Vivant, j'aimerais mieux inviter les corbeaux
A saigner tous les bouts de ma carcasse immonde.
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Dernière édition par Gurth Von Lasch le Dim 15 Mar 2015 21:49, édité 2 fois.

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 Sujet du message: Re: Les Rues et les Ruelles
MessagePosté: Dim 15 Mar 2015 21:48 
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    L’elfe anthracite.

Dans la ruelle ensanglantée, sous une pluie diluvienne, dont les assauts incessants faisaient ruisseler les hautes tuiles des habitations en petites cascades débordant des gouttières peu entretenues, après avoir été l’acteur d’un massacre gratuit de trois larrons malintentionnés, qui avaient cru bon de se dresser contre lui, de l’empêcher de voir ce qu’il voulait voir, il passa en spectateur d’un nouveau massacre, qui, lui sembla-t-il, allait à l’encontre de ce que l’ordre naturel des choses avait prévu ce soir-là. Car dans ce passage sombre, une elfe, avant qu’il n’arrive, s’apprêtait à se faire salir et déshonorer par un quatuor de vipérins satyres aux mœurs aussi basses que l’hygiène dont ils avaient attesté. Et cette elfe, profitant de l’assassine diversion de l’Ogre, avait tiré son épingle du jeu, et s’acharnait maintenant à prendre la vie de celui qui croyait se vider en elle pas si longtemps avant. Avec une hargne magnifique, une colère pure sortie des tripes, la demoiselle aux habits arrachés, à la poitrine découverte et maculée de boue et de sang, s’acharnait à massacrer le cadavre déjà mort de son agresseur. À califourchon sur sa victime, elle donnait frénétiquement des coups de dague dans la tronche du violeur perfide. Elle frappait, frappait cet amas de chair méconnaissable qui, juste avant, avait été bien vivant.

Nul ici, pas même la mère de ce rebut dégueulasse, n’aurait pu le reconnaître, quand enfin elle eut fini son œuvre. Sa tête semblait aussi explosée que celle de son comparse au crâne éclaté. Et l’elfe, essoufflée laissant l’adrénaline vengeresse retomber, s’était adossée contre le mur, ses seins se soulevant au rythme effréné de sa respiration rapide. Il s’approcha, lentement, d’un pas qui traîne. Son genou le faisait souffrir, mais il restait debout malgré tout. La douleur était en lui. Elle était lui.

Avant qu’il ne soit parvenu jusqu’à elle, elle se releva et ramassa une cape boueuse pour cacher à la vue de tous son intimité bafouée. Gurth n’avait jamais apprécié les choses de la chair, qui rendait nombre d’hommes bien bêtes. Il ne connaissait rien à l’amour, sinon celui de ses dieux, et n’avait pour seuls désirs que celui de leur plaire, de remplir sa panse et de tuer, tuer encore en semant la peur, la haine et le chaos. Il n’avait cure de ses seins tressaillant, ou de la croupe de l’elfe épuisée et blessée. Mais il s’en approcha. Avait-il suffisamment tué, ce soir ? Se pouvait-il que sa soif de sang soit réellement rassasiée un jour ? Il en doutait. Mais il ne la tuerait pas. Pas tout de suite, en tout cas. La tristesse, la rancœur et la colère allaient habiter son être frêle, les mois qui allaient venir. Les années peut-être. Et il allait la laisser s’y installer confortablement. Car il reconnaissait une vie joyeuse qui ne méritait que d’être arrachée, et une autre, désabusée et pleine de rage, qui servait ses propres préceptes de haine.

La demoiselle aux cheveux d’argent et à la peau aussi sombre que la nuit se tourna vers lui, et parut impressionnée. Qui ne l’était pas, en vérité, devant un tel monstre ? Il avait l’habitude de ces regards effrayés, dégoutés, ou juste hargneux envers sa personne. Et il les appréciait aussi. Il adorait qu’on le déteste. Il adorait cette première impression macabre et terrorisante qu’il laissait. Aussi saugrenu que soit cette pensée, elle remercia l’Ogre. D’un simple mot, qu’il ne connaissait que trop peu. Jamais ne l’avait-on remercié pour rien qu’il ait fait sur cette planète de merde. Sa mâchoire se crispa. Il ne savait comment réagir, à part par un nouvel élan de colère… Mais il la contint, lorsqu’elle s’enquit de savoir si le sang le maculant était à lui ou non… Il renâcla un grognement sombre, et recouvrit son crâne chauve de sa coule de cuir large et sombre. D’une voix qui semblait droit sortie d’un tombeau, aussi grave et profonde que les abysses infernaux, il répondit.

« Qu’importe à qui le sang appartient, pourvu qu’il ait coulé. Ne remerciez que les Dieux Noirs de vous avoir appris la colère et la rage de tuer. Vouez leur cette fureur, et ne voyez en moi que leur serviteur. »

Il inspira, puis expira longuement. Avec la difficulté d’un être trop lourd et ayant souffert trop d’années. Puis, d’une voix toujours plus ténébreuse, il avoua son nom à la chair fraiche et violente qui lui faisait face.

« Gurth Von Lasch, l’Ogre de Tulorim, venu à Omyre pour semer le désordre et porter haut les couleurs sombres de la Mort. »

Une présentation de rigueur. Cette elfe qu’il ne connaissait pas allait peut-être pouvoir lui indiquer quels gens contacter pour parvenir à son but.

_________________
Gurth Von Lasch - l'Ogre de Tulorim

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 Sujet du message: Re: Les Rues et les Ruelles
MessagePosté: Lun 16 Mar 2015 17:22 
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    L’elfe antracite. (2)


Ne cédant pas à la raison qui lui murmurait sûrement de déguerpir de cette ruelle, l’elfe noire répondit à l’Ogre par sa propre présentation. Ashen Hródvitnir, fille de grands prêtres des Jumeaux de l’Ombre, messagère, sans doute, de leur volonté sur cette terre. Les signes ne trompaient pas, et Gurth aimait à s’y attarder, lorsqu’il s’agissait de sa religion. Il l’avait sauvée, ce soir. Ce n’était pas vain. Les Dieux Noirs lui avaient murmuré de le faire, c’était certain. Ils l’avaient placé là pour qu’elle survive. Il hésita même un instant à conclure que si c’était lui qui devait la sauver, c’était que leurs destins étaient liés, immanquablement. Mais cela aurait été accorder trop d’importance à son être servile. Il avait beau être grand, il n’était qu’un insecte pour ses Dieux, et ne devait pas céder à la tentation d’un orgueil déplacé.

Il contempla la jeune femme. Elle était sans doute plus âgée que lui, mais proportionnellement parlant, il paraissait plus vieux qu’elle. Elle ne se doutait sans doute pas du plan qui animait cette ruelle, ce soir. Celui que Gurth avait mis à jour, de son analyse liturgique. Il répondit néanmoins à ses présentations.

« Alors ces gredins n’avaient aucune chance. Leur mort était écrite. »

Elle le questionna sur ses intentions, à Omyre. Ou plus précisément sur la manière dont il allait mettre le chaos dans tout Nirtim à partir de cette sombre capitale. Gurth n’en savait trop rien. Il avait pensé rejoindre le Temple de Thimoros, ici en ville… mais peut-être valait-il mieux se renseigner sur des organismes actifs aux buts semblables aux siens. Le Temple serait sur sa route, mais ne lui offrirait qu’une partie des contacts qui lui seraient nécessaires. L’elfe pouvait peut-être l’aider.

« Je ne mènerai pas seul mes plans à leur finalité. Le chaos est une vaste entreprise, que beaucoup ici devraient viser. Dans un premier temps, il me faut trouver des contacts qui partagent mes objectifs. Peut-être en connaîtriez-vous ? Peut-être en seriez-vous ? »

Sa voix, toujours sépulcrale et intense, était moins menaçante. Un peu. Même si son apparence n’arrangeait rien, et ne pourrait jamais inspirer sympathie ou confiance. Jamais.

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Gurth Von Lasch - l'Ogre de Tulorim

Je hais les testaments et je hais les tombeaux ;
Plutôt que d'implorer une larme du monde,
Vivant, j'aimerais mieux inviter les corbeaux
A saigner tous les bouts de ma carcasse immonde.
(Baudelaire - Le mort joyeux)


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 Sujet du message: Re: Les Rues et les Ruelles
MessagePosté: Mer 18 Mar 2015 15:00 
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    L’elfe anthracite. (3)

Les impressions de l’Ogre sur le rôle précis de l’elfe dans le récit de sa sombre histoire venait de faire un nouveau pas en avant. Après avoir ostensiblement hésité à lui répondre, la dénommée Ashen Hródvitnir évoqua un groupement au nom étrange, la Caste des Murènes, qui œuvrait ici dans l’ombre en vue de l’embrasement de Kendra Kâr. Ces mots créèrent chez Gurth une lueur de convoitise dans le regard. Une ferveur intense, dans ses yeux morts et trop pâle. C’était exactement ce qu’il cherchait. Un groupe indépendant, mais fidèles aux puissants de la ville, en la personne des Treizes Sergents d’Oaxaca. Les maudits liés à la fille de Thimoros jusque dans la mort.

Comble de la chance, la sombre devait s’y rendre, et proposait à l’Ogre de l’y mener. Il leva le menton, humant l’air ferreux et sanguinolent de la ruelle embourbée sous le déluge de flotte qui tombait des cieux. Son regard se porta à droite, à gauche, avant de revenir vers l’elfe tremblante.

« Oui, menez-moi à eux. »

Inutile d’être plus expressif. Elle avait sa réponse, toute condensée en ces mots clairs et directs. Quand ça ne concernait pas ses divins, Gurth mettait généralement peu d’emphase dans la communication. Il s’apprêtait à la suivre, qu’importe où elle le mènerait.

Il était temps de faire face à sa destinée.

_________________
Gurth Von Lasch - l'Ogre de Tulorim

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 Sujet du message: Re: Les Rues et les Ruelles
MessagePosté: Mer 22 Avr 2015 23:28 
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La nuit était déjà avancée. Les rues s'étaient presque vidées et ne restait que quelques mendiants ou dormeurs qui gisaient à même la boue et les pavés mouillés. Hrist aimait Omyre mais la préférait de nuit. Même sans oublier qu'il était plus dangereux de croiser quelqu'un dans une des ruelles la nuit, elle savait désormais qu'elle pouvait être un danger plus grand que les malandrins et voleurs. Quelques patrouilles de milice croisèrent son chemin et se saluèrent mutuellement d'un bref signe de tête.

Elle croisa des gobelins qui essayaient de lui revendre des trouvailles ou encore quelques garzok qui, ivres morts, l'interpelaient d'un geste brusque avant d'oublier jusqu'à sa présence et retourner cuver un alcool artisanal au degré puissant.

Omyre était belle, ses maisons écrasées aux tuiles paniquées qui tombaient parfois au grès du vent, ses murs tordus rongés par le lierre ou par quelques champignons retapés à grand renfort de bois et de poutres. Ces marches noires et ses égouts creusés à la pioche dans lesquels se déversaient de immondices aux relents abominables. Les mouches qui se terraient sous un renfort de bois non loin d'un cadavre pour se protéger d'une pluie soudaine, qui grouillaient sur le bois sombre telle une nuée infernale prête à retourner sucer la peau d'une quelconque charogne.

La tueuse y trouvait une jolie poésie, surtout quand la lune, cet astre de rêve illuminait un quartier entier de sa pâle lumière. C'est ainsi qu'elle reconnût le quartier des Murènes. Von Klaash lui en avait parlé pendant des heures, elle l'avait déjà traversé par le temps mais il ne lui appartenait pas encore. Elle n'était pas en terrain connu mais aujourd'hui, tout ça allait changer.

Pendant son absence, Von Klaash avait dit avoir fait le nécessaire pour monter sa petite organisation qui profiterait à la ville ainsi qu'au trio de Keresztur. Katalina, Von Klaash et Hrist elle même.

Cela dit, la tueuse s'était absentée plus longtemps que prévu et elle espérait ne pas arriver en pleine guerre de territoire ou pire encore, y trouver les vestiges d'un carnage si abject qu'elle n'aurait pas été capable de reconnaître l'un des siens.

Elle poussa la porte des thermes après y avoir lu un passage d'une des citations préférée du Capitaine.

_________________
La petite ombre de la Mort à Elysian.

Alors, j'ai établi ma couche dans les charniers,
Au milieu des cercueils,
Où la Mort Noire tient le registre des trophées qu'elle a conquis.


Némésis d'Heartless


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 Sujet du message: Re: Les Rues et les Ruelles
MessagePosté: Jeu 7 Mai 2015 00:59 
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Après de nombreux remous durant le début de la sinistre existence d'AcreeXer, il avait enfin trouvé un peu de calme dans la ville noire. La belle nuit qu'il attendait était enfin tombée, elle n'était pas des plus sombres, à cause des quelques bougies illuminant les intérieurs des bâtiments se confondant avec le ciel étoilé. Le mince croissant de Lune rassurait, en ce soir banal, les habitants d'Omyre, dans ces ruelles si souvent plongées dans les ténèbres. Une simple silhouette se dissimulait dans l'ombre des murs projetés sur le sol.

Seuls les rires des tavernes lointaines, étouffés par la ville désertée, résonnaient. AcreeXer décida alors de faire un tour. En marchant dans les rues vides, dont par moments une mare de sang colorait les pavés, et par d'autres, un timide rat rongeait des ossements, l'elfe encapuchonné se demanda qu'est-ce qu'il pouvait bien ajouter à sa misérable vie, qui ait une réelle raison. Tout en continuant ses réflexions, il arriva devant une maison abandonnée.

Il s'était retrouvé devant la demeure de sa mère sans s'en rendre compte. La bâtisse, légèrement en retrait par rapport au trottoir, était bien intégrée dans le décor. Typique des habitations d'Omyre, les murs étaient délabrés, couvert par endroits de moisissure. La porte de la maison était entre-ouverte et apparemment personne n'avait élu domicile, il y régnait une forte odeur de sang mélangée à la puanteur ambiante. AcreeXer pensa que ça ne pouvait pas être le hasard qui ait pu le guider jusqu'ici, cela faisait bientôt dix-huit ans qu'il n'avait pas remis les pieds dans cette ruelle. Après la dette de sa mère payée, il avait erré tout ce temps dans le froid de la ville, vivant grâce à elle pour être vrai, Omyre est la cité parfaite, il y a toujours de tout : de la nourriture en « self-service » sur la grand place, des amis d'un soir à la taverne, des vêtements et équipements laissés généreusement par les morts jonchant les rigoles, ... Bref, c'est ainsi qu'il vécut ici.

AcreeXer restait là planté devant la porte de son premier chez lui, là où il avait vu le jour un siècle plus tôt. Il se remémorait ses sales souvenirs passés ici : un matin, où une de ses demi-sœurs lui avait fait croire qu'elle avait mis ses vêtements dans la boue, alors qu'en réalité, ils avaient été plongés dans les latrines. Il essaya de se rappeler d'un bon souvenir, en vain. C'est alors que le sourire aux lèvres, il posa un pied à l'intérieur, pour voir ce que ses demi-soeurs étaient devenues.

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Acreevog Xeren

Shaakt, Voleur


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