Avec toute la vivacité et la souplesse dont je savais faire preuve, je suivais le défilé de soldats lorsque j'entendis une voix de femme exprimer son mécontentement. Je n'eus nul besoin de me retourner puisque que la femme en colère me dépassa vivement et s'adressa sans tarder au fils d'Astidenix faisant fi de sa corpulence ou de sa musculeuse prestance. J'étais fier de ma compagne de route, elle n'était pas de celles qui tombaient en pâmoison devant un vulgaire tas de muscles. Elle fit comprendre au fils du chef qu'elle avait payé elle-même le bateau et qu'elle ferait certainement partie du voyage, le petit sinari y compris. Pour ma part, je ne me préoccupais pas trop des retardataires, mais force m'était de constater que Rosie avait raison. Nous étions déjà peu nombreux, nous n'allions certainement pas en laisser en chemin.

Tout en poursuivant de mastiquer élégamment ma délicieuse pomme rouge, j'écoutai l'appui d'Azra et la réplique du colosse au crâne partiellement rasé. Mécontent de l'intervention de la demi-elfe, il lui rétorqua qu'il n'y avait pas de place pour les fainéants dans notre convoi et que l'on aurait amplement le temps de faire les présentations dans l'embarcation. Hirotoshi se dépêcha de nous rattraper nous encourageant à poursuivre notre chemin, nous rappelant qu'il était vain de discuter avec un être si entêté.
Tout en reprenant la marche et en tentant de suivre le meneur du moment, je m'exprimai à mon tour d'une voix forte, afin, entre autres, de faire aussi bonne figure.

"Pour ma part, j'accepte de suivre cette folle farandole " dis-je ironiquement avant de rajouter sur le même ton afin d'être entendu de tout le défilé :

"mais une fois dans le bateau payé par Rosie et Azra, nous procéderons aux présentations. Et surtout, nous établirons, par vote s'il le faut, qui devra diriger cette expédition. Et ce ne sera certainement pas le plus grand ou celui qui crie le plus fort."

Cette homme, avait beau être le fils de l'autre, les qualités de meneurs, ne se transmettaient pas nécessairement de génération en génération. Et puis, il s'avérait peut-être imprudent de suivre aveuglément une tête brulée telle que ce géant.

Cela dit, je jetai mon trognon de pomme qui fut vite rattrapé par une corneille qui n'en fit que quelques bouchées, et je marchai de bons pas, trop orgueilleux pour me faire distancer.

« Motivation ou folie ? Il serait sûrement même prêt à partir à bord d’une coquille de noix!»

Voyant que personne ne semblait vraiment s’offusquer de la situation, Rosie ne put s’empêcher de secouer lentement la tête en signe de désapprobation. Les sourcils froncés de consternation et d’incompréhension elle tourna sur ses talons et engagea le pas vers l’auberge dans le but de retrouver Mérové et sûrement Sirop qui y étaient toujours.

Il ne lui fallut pas bien longtemps pour repérer son massif compatriote à l’entré. L’ours suivait patiemment le Sinari à la traîne. Il n’avait clairement pas l’air en état de partir pour une nouvelle journée de voyage et encore moins sur un bateau. Sans se sentir particulièrement pressée, elle l’approcha avec l’idée de ne pas le laisser derrière et encore moins dans cette ville sobre et lointaine.

« Viens, je t’offre un tour. »


Lui dit-elle en s’invitant sur le dos de Mérové qui ne rechigna pas après qu’elle lui ait refilé une pomme. Elle lui tendit ensuite la main pour l’aider à grimper.

« On va les dépasser. »

Il était pâle.

« Du vent frais ne te fera pas de mal non plus. »

Sirop s'emmitoufla un peu plus dans sa cape de fourrure en grommelant. Il faisait frais ce matin-là et si en général il détestait avoir froid, il le supportait encore moins le lendemain d'une soirée arrosée quand il était bien mal. Il se mit ensuite à chercher ses compagnons du regard.
Il ne voyait pas beaucoup plus loin que le bout de son nez avec toute cette foutue brume et bien qu'il percevait encore quelques voix et bruit trahissant la présence non-lointaine du reste du groupe vers l'avant, l'idée qu'ils l'aient oublier dans cette sinistre ville fit battre un peu plus vite son petit cœur fragile. En avait-on rien à cirer de lui ?
Heureusement, avant qu'il n'ait eut le temps de se sentir abandonné, Rosie apparut dans son champ de vision, provoquant en lui un mélange d'émotions contradictoires. Il était content de la voir, bien sûr. Elle était une des rares personne ici à véritablement se soucier de lui ici et elle était ce se rapprochait le plus d'une amie pour lui dans le groupe mais il ne se souvenait pas de grand-chose de la veille, et dans ce genre de cas il savait que c'était généralement les filles comme elle qu'il emmerdait le plus...

Gentillesse incarnée, elle lui proposa de prendre place avec elle sur le dos de Mérové, le seul qui était resté avec lui pendant son temps de redémarrage matinal. Ces deux-là étaient vraiment adorables. Des gens de qualité comme on n'en côtoyait pas assez.
Pourtant, il refusa la main que lui tendait la jeune femme :

"Je te remercie de ton générosité mais mon destrier m'attends je ne sais où et il doit être prêt pour la castagne lui aussi. " dit-il de son ton faussement fier que sa voix cassée rendait peu convaincant. "En revanche j'accepterais ta compagnie avec plaisir pour le retrouver..." acheva-t-il d'un ton plus incertain en jetant un regard autour de lui.

La mélodique voix de ténor du beau jeune homme blond ne passait pas inaperçu auprès de la gent féminine, mais cette fois, ce fut une femelle d’une autre espèce qui l’entendit. Bella la jument de Mathis, confortablement installée dans la stalle qui lui était attribuée, dressa l’oreille lorsque Mathis d’une voix forte s’adressa à ses compagnons de route. Mais la voix s’éloignait et la jument restait là. Comme tout animal de compagnie qui cherche à accompagner son maître lorsque celui-ci s’en va, Bella s’affola tirant sur les cordes qui la retenaient captive dans son petit compartiment de bois.

Soucieux de bien faire son travail, le palefrenier s’empressa d’aller réconforter le cheval à la robe rousse qui avait, pensait-il, aperçu un petit rongeur près de ses sabots. Il ouvrit donc la porte du box, et prudemment, la main gauche tendue vers les naseaux de la jument, pour la calmer, il s’approcha de celle-ci. Il eut à peine le temps de détacher les liens de la pauvre bête que cette dernière sortit précipitamment de la stalle et partie au galop vers la sortie de l’écurie. Le vieil homme à la longue barbe blanche qui venait d’y entrer eut à peine le temps de se déplacer pour laisser passer le cheval.



J’étais perdu dans mes pensées lorsque j’entendis le bruit des sabots de cheval au galop s’approcher de nous. Je me retournai vivement pour apercevoir cette magnifique jument qui accourait vers moi.

(Ma Bella !)

Dans mon empressement de suivre le fils du commandant, j’avais complètement oublié de récupérer ma jument. Cette dernière qui s’approchait à vive allure, ne s’arrêta que lorsqu’elle fut à proximité.

Je m’approchai d’elle, caressai son encolure et lui murmura tout doucement à l’oreille :

« Par chance, que tu ne sois pas une femme, ma Bella, car tu m’en voudrais bien pour le restant de tes jours. »

Puis, je la montai. Chevaucher sans selle ne serait pas de tout repos, mais c’était le prix à payer pour l’avoir oublié.

C’est donc sur ma jument que je suivis plus facilement le fils d’Astidenix dans les sombres rues d’Andel’Ys.

Rosie rétracta son bras, l’air hésitant puis leva les yeux vers la voie qu’avaient empruntée les autres, inquiète de la distance grandissante qui les séparait. Sans quitter du regard les petites silhouettes qui menaçaient de s’effacer à tout instant, elle répondit au hobbit.

« D’accord, je t’accompagne. Je peux bien récupérer mon cheval aussi. »


Elle n’y tenait pas vraiment, n’ayant pas tant apprécié l’expérience sur le dos de cette monture difficile. Toutefois, elle se sentait particulièrement mal de laisser la bête dans cette ville glauque où une barque semble plus utile qu’un destrier. Agile, la semi-elfe descendit de l'ours, non sans éprouver un certain regret de ne pas pouvoir s’empresser de dépasser ce tas de muscle impoli. Elle ébouriffa durement la tête de Mérové comme il aimait si bien qu’elle le fasse.

« Attend nous ici ma peluche, tu vas faire peur aux chevaux. »

Alors qu’elle le disait, une jument rousse sortie de l’écurie en trombe, manquant de bousculer un vieil homme à l’entré. Surprise, Rosie crut reconnaître la précieuse monture de Mathis. La bête agitée prit la direction du groupe. Elle ne put s’empêcher de rajouter à l’intention de l’ours.

«…Tu vois? »

Puis s’adressa a Sirop

« Prend les devants, je te suis. »

Avant que l'homme-pâle n'ait le temps de répondre, un galop retentit et la jument de Mathis arriva, répondant à un appel de son maître. Azra sursauta. Ombos ! Avec toutes ses émotions, il avait bêtement oublié son loup !
Justement, il arriva à son tour. Sans doute avait-il voulu suivre la jument, car il avait encore sa corde attachée autour du cou, à l'extrémité rongée.
Il vint donner un coup de museau à Azra en grognant.

« Oh, ne t'inquiète pas, mon vieux, je n'allais pas t'oublier ! » mentit le jeune homme.

Mais l'animal, avec son infaillible instinct, n'était pas dupe. Il secoua la tête et, quand son jeune maître tenta de lui gratter la tête, il s'écarta légèrement. Il valait sans doute mieux pas le monter maintenant, Azra continua donc à marcher à côté de lui, reportant son attention sur Karin.

A présent à cheval, il me fut beaucoup plus facile de suivre le rythme du trop grand homme impatient. Le confort de la selle me manquait, mais c’était le prix à payer pour avoir oublié ma Bella.

Nous arrivâmes enfin au port d’AndelY’s. Sur les docks, le capitaine nous attendait.

(Oh, jolie surprise !)

De tous les capitaines avec lesquels j’avais navigués, c’était sans conteste le plus séduisant. La plus séduisante à vraie dire, jolie, svelte, de longs cheveux bouclés, le regard de braise, les lèvres charnues, rien à avoir avec les gros et sales barbus que j’avais connus. Seuls ses trop nombreux tatouages faisaient ombrages à sa beauté.
Alors que nous approchions d’elle, elle salua ma beauté et annonça qu’elle avait trois embarcations moyennes à notre disposition et que tout était prêt pour partir immédiatement. Cependant, elle n’avait pas prévu la présence de ma Bella, ni celle du grand méchant loup. De sa voix grave, enrouée, mais toutefois agréable et féminine, elle demanda un léger supplément. La brute sans cervelle voulut monter en prétextant que nous avions une mission importante à mener. Il n’avait pas tort, mais il était naïf de penser que cette femme d’affaire acquiescerait à un tel argument.

Ma Bella m’était précieuse et je n’avais pas l’intention de la laisser sur le quai. Me rappelant qu’à AndelY’s, les yus n’avaient pas de valeurs. De ma belle voix de ténor, je lui fis donc une première proposition :

« Je vais payer le supplément pour le loup du jeune homme et ma précieuse jument. Je tiens à l’emmener, sans elle j’aurais l’impression d’avancer moins vite qu’un caracole.»

J’avais comme première idée de ne payer que pour mon cheval, laissant au nécromant le loisir de payer pour son chien sauvage, mais agissant ainsi, Rosie et Honoka me croiraient pingre et puis Azra et Rosie avaient payé de leur poche mon passage.

Fouillant dans mon sac, je sortis un chapeau. Celui-là même que j’avais porté au tout début de mes aventures et avec qui je me sentais meilleur combattant. J’hésitai un court instant, le regardant sous toutes ses coutures, un tout petit peu nostalgique, puis je lui tendis :

« Voici mon joli chapeau, il est en très bon état, il protège bien du soleil, et il m’a toujours porté chance ! »

(((chapeau qui accélère un peu ta vitesse et te donne esquive AA+10, Esq jet +4 [E=2])))
(((Puisqu’il existait plusieurs définitions pour caracole, j’ai choisi l’escargot ))))

Se détournant du loup boudeur, Azra reporta son attention sur Karin, qui affirmait avoir entendu que le peuple de là-bas était maudit et quasiment éteint, de ce qu'en disait les rumeurs. Le jeune homme maugréa :

« Des rumeurs, encore et toujours des rumeurs... Je sais que je prends le risque de faire ce voyage pour rien, mais ce n'est pas quand l'armée d'Omyre sera aux portes d'Andel'ys qu'il faudra se soucier de se tailler un chemin jusque là-bas. Je préfère y aller maintenant. Et s'il n'y a plus rien, vous pourrez vous foutre de moi pendant que j'irais faire le zouave dans les villes à l'ouest de Jesuir. Avec un peu plus de succès, faudra espérer. »

Sentant la mélancolie, revenir, le nécromancien arriva avec les autres au port. L'endroit était toujours aussi gris et maussade. D'une certaine manière, il aimait bien cette ville qui était en parfait accord avec son humeur.
La capitaine les attendait, comme prévu, mais elle voulut immédiatement faire payer un supplément pour les montures. Était-ce une surprise ? Malgré les maigres efforts du guerrier, elle insista, arguant les lois du libre-commerce, ou un truc comme ça.

« Vous vous étiez engagé à prendre tout le monde. Il va de soi que cela comprenait les montures ! »

Mais Mathis l'interrompit, offrant un chapeau élégant pour payer le passage. Le jeune homme marmonna des mots indistincts avant de dire :

« Merci, Mathis. Il y a au moins une chose qu'il faut vous reconnaître, c'est que votre courtoisie est décidément à toute épreuve ! Bon, pouvons-nous y aller ? Où est la shaakt cinglé, au passage ? Peut-être que si on a un passager de moins, on pourrait négocier une réduction, en vertu des lois du libre-échange... »

Tout en disant cela, il lança un regard vénéneux à la capitaine qui les avait floué.

"Bon, heu...Rosie ? Tu peux te dépêcher s'il te plaît ?" lança le petit Hobbit avec un ton odieux et les poings sur les hanches,"Ils vont finir par partir sans nous avec tes bêtises !"

Il était déjà sur le dos de Crindor et fixait la jeune femme avec un air sévère et réprobateur mais un sourire de gosse apparut toutefois rapidement sur son visage et le trahit aussitôt. Il n'avait jamais réussit à se retenir très longtemps.

"Ahah la tronche !" se moqua-t-il sans se douter que la sienne donnait plus matière à rire à l'heure actuelle. "Blague à part, j'espère que tu sais où est-ce qu'ils sont tous parti par contre." ajouta-t-il plus sérieusement en regardant autour de lui.

(((Il va suivre Rosie bien sagement)))

En entrant dans l’écurie, Rosie avait vite remarqué que la plupart des montures de la veille y était toujours. Bien qu’elle ne puisse pas réellement toutes les identifier, il put au moins en reconnaître quelques une dont celle de la princesse particulière de par sa robe d’un blanc immaculé. Alors que Sirop prenait monture, la jeune fille jugea mieux de laisser sa bête ici comme l’on fait les autres membres du groupe apparemment. C’était plus par pitié que par envie qu’elle s’était résolue à aller chercher le cheval. Soulagée, elle rejoint Mérové, l’ébouriffa à nouveau et entreprit de reprendre place sur son dos.

Le Sinari ne tarda pas à la rejoindre confiant du haut de sa monture et lui jeta une réplique qui fit sourciller la semi-elfe.

« Bon, heu...Rosie ? Tu peux te dépêcher s'il te plaît ? Ils vont finir par partir sans nous avec tes bêtises ! »

Elle resta muette, se contentant de le regarder, les sourcils froncés, les yeux ronds. La jeune femme ne pouvait pas croire qu’il pouvait être sérieux, mais vu le stresse intense qui l’envahissait à l’idée d’être laissé derrière, elle ne put que se sentir insultée.

« P..Pardon? »

Sirop rigola, visiblement fier de la réaction de Rosie. Mais elle, elle ne sourit pas. La situation ne la faisait pas rire. Elle se contenta de pincer les lèvres et de tourner la tête vers l’horizon où la troupe avait disparut avant de soupirer inquiète. Ils avaient tous deux intérêts à se dépêcher à les retrouver.

« Tu semble avoir retrouvé la forme à ce que je vois. On ne va donc pas trainer plus longtemps car ils vont effectivement finir par partir sans nous. »

Elle prit la route, suivant la direction que les précédents avaient prit avec l’espoir qu’elle allait être en mesure de faire le chemin qu’elle avait fait la veille, mais à l’inverse.

La capitaine accepta le chapeau proposé par Mathis. Les chefs, Hirotoshi et le fils d'Astidenix prirent l'initiative de répartir tout le monde. Karin ne serait pas sur le navire principal. Cela gênait le jeune homme car il aurait bien aimé discuter encore avec lui. Il avait toujours de la peine à imaginer pourquoi l'homme en noir s'était si spontanément joint à eux. S'il avait été au service d'Oaxaca il aurait sans doute profité de l'attaque pour essayer de les tuer, plutôt que les sauver, mais quand même... Et puis, ils seraient peut-être compagnons.

« Karin, le mieux serait de décider maintenant si vous m'accompagnez à Jesuir ou non. Je pourrais monter dans le même navire que vous, cela simplifierait alors le débarquement... Personnellement je ne serais pas contre un peu de compagnie dans ce monde qui m'est inconnu. Mais si nous rencontrons des êtres maudits, comment vous et vos hommes réagirez ? Je ne voudrais pas qu'une réaction impromptue fasse avorter toute tentative de négociation... »

Azra regardait l'homme-pâle droit dans les yeux, souriant mais déterminé. Si on lui disait qu'il devait faire sa mission, seul, une main attachée dans le dos et en sautant à cloche-pied, ça ne l'arrêterait pas. La réussite est la seule chose qui compte.

Lorsque l’on connait les femmes aussi bien que moi, on apprend à déchiffrer leur langage non verbal. Bien que la jolie capitaine affirma que mon élégant chapeau n’était pas moche, son empressement à le fixer sur sa tête me révéla qu’en vérité elle le trouvait bien à son goût. Et pour cause, il m’appartenait. Jamais je n’aurais porté un couvre-chef quelconque. Je ne lui fis point la remarque, me contentant de sourire, préservant ainsi son orgueil féminin. Elle était notre hôte après tout, je me devais d’être galant.

L’art de la galanterie n’était pas donné à tout le monde et le fils d’Astidenix en était la preuve vivante. Trop empressé d’arriver au but, il ne jouissait pas du moment présent. Manquant complètement de savoir-vivre, il voulut monter immédiatement à bord de l’une des embarcations. La capitaine ne semblant nullement offusqué par ce manque de délicatesse, libéra la voie pour nous laisser prendre place.

Lorsque qu’il vit Rosie et Sirop pointer le bout du museau de leur monture, en bon officier, Hirotoshi tenta de répartir équitablement les aventuriers dans les diverses embarcations. Outrepassant la hiérarchie, le gros tas de muscles mit son grain de sel tenant à ce que chaque bateau soit occupé par au moins un de ses hommes.

(hum… moins sot que je ne le pensais le fils du chef)

Je me devais de le reconnaître, sa stratégie s’avérait intelligente, lui assurant ainsi une oreille attentive sur tout ce qui allait se dire. Et puis, c’est à ce moment précis que je commençai à avoir des soupçons. Pour quelle raison, ce fils de chef voulait quitter sa petite ville au plus vite ?

C’est donc avec l’idée de lui tirer les vers du nez que je pris place moi aussi dans le même navire que lui. Il est certain que la présence de la princesse et de la capitaine avait aussi influencé mon choix.


Après avoir attaché ma Bella à un mât et m'être assuré qu'elle était calme et ne manquait de rien, debout près du mât de ce solide bateau comportant des voiles, je me plantai devant le fils d’Astidenix et levai légèrement la tête afin de le regarder droit dans les yeux.

« Tel que vous nous l’avez promis aux portes de l’auberge, il est temps pour vous de vous présenter. Et par le fait même de nous expliquer votre comportement ! Qu’est-ce qui est si urgent pour que vous nous pressiez tant. Fuyez-vous des geôliers qui menacent de vous enfermer dans le Tartare ? » Terminai-je ironiquement.


(((Comme définition de Tartare, j'ai choisis celle-ci: Lieu de châtiment. Le Tartare passe pour une prison située dans les Enfers, protégée par un triple rempart d’airain autour duquel coule le Phlégéthon, et bouclé par une porte en fer fabriquée par Poséidon.)))

Le chemin n’avait pas été si difficile à refaire. Dans tous les cas, si la mémoire lui avait fait défaut, elle n’aurait eut qu’à suivre l’odeur du poisson et des algues, tellement elle imbibait l’air. Pire que la veille. Cherchant à se montrer moins distante suite à la blague de mauvais gout, elle fit la remarque à Sirop.

« À croire qu’ils passent la nuit à pêcher à coup de tridents. L’odeur est terrible. »

Dans le soleil pâle d’une matinée brumeuse, ils arrivèrent à port et c’est avec un véritable soulagement qu’ils rejoignirent le groupe. En retrait, la semi-elfe analysa la petite troupe qu’ils étaient parvenus à rassembler. Rien de bien impressionnant, il fallait se l’admettre, mais tout de même quelque chose. Elle ne put s’empêcher de dévisager longuement la brute musclée du groupe, lui en voulant de son manque de manière. Puis, au bout d’un moment à parcourir le groupe des yeux, Rosie remarqua l’absence particulièrement d’une tache sombre dans l’assistance. La Shaakt avait disparut depuis la veille et n’était toujours pas revenue. La jeune femme se souvenait pourtant l’avoir entraperçut dans l’auberge dans la soirée, bien que brièvement. Ce matin là toutefois, Marla manquait à l’appel. Pendant un instant, Rosie crut bon de le signaler au Capitaine Hirotoshi, ne voulait pas nécessairement laisser qui que ce soit derrière, mais elle changea rapidement d’idée. L’elfe noire devait être parfaitement au courant de leur départ en matinée et si cette dernière n’était pas présente c’est qu’elle comptait sûrement faire chemin à part comme elle semblait s’y plaire depuis le début.

(Ça ou bien elle s’est attirée des ennuies.)

Les deux cas étaient fort plausibles, alors il était dur de choisir le plus probable. Rosie ne put s’empêcher de soupirer encore, dépassant largement son quota habituel pour une simple matinée. Elle décida dès lors qu’elle allait cesser de se questionner sur cet elfe noir qui de toute façon, n’avait pas besoin que quelqu’un s’inquiète pour elle. Elle avait jusqu'alors montré une très forte obstination à provoquer certes, mais aussi à se défendre. Marla était très bien seule.

Lorsque le Capitaine Hirotoshi prit parole, la jeune femme reprit attention au déroulement des choses et l’écouta avec intérêt. Bien qu’ils n’aient pour ainsi dire, pas le choix, elle n’appréciait guère le concept de se séparer de la sorte. Elle y voyait toutefois bien l’intérêt de le faire. Voyant les intérêts d’Azra pour Karim, ainsi que celui de Mathis pour la brute musclé, Rosie sentie que sa place serait alors sur le navire qui restait. Bien que sirop aurait aussi bien put occuper cette place en tant que représentant de Yuimen, elle se refusait de le laisser seul sur un navire. Au moins elle, elle avait Mérové.

« D’accord, Soupira t’elle, Je vais donc accompagner la troisième embarcation. »

Elle regarda le Capitaine Hirotoshi avec regret. La semi-elfe trouvait sa présence particulièrement rassurante et se savoir sur une embarcation pleins d’inconnus, vers une destination dangereuse et encore plus inconnue ne la rassurait donc pas. Cependant, ne pas être en la présence du tas de muscle impatient et du manipulateur de sang la consolait un peu. Saluant le reste de l’équipe et plus particulièrement le Capitaine, Rosie rejoignit la petite troupe de l’embarcation qu’elle avait choisit, toujours fidèlement suivis de Mérové. Il y régnait un silence malaisant. Fidèle à eux même, les hommes blancs ne disaient mots, ce qui n’à jusqu’alors jamais vraiment aidé l’ambiance générale. Il y avait aussi les deux soldats du supposé fils d’Astidenix, nommés respectivement Ginfan et Yebik bien que la semi-elfe ignorait lequel était lequel. Elle pouvait reconnaître le garde qui les avais froidement accueillit à l’entrer de la ville. L’autre, bien que semblable, lui était inconnu. Voulant briser le froid qui régnait, elle considéra entamer elle-même les présentations.

« Je me nomme Rosie et voici mon frère d’arme, Mérové. Nous sommes tous deux de Yuimen… »

Elle trouvait cette présentation particulièrement gênante. C’était dans des moments pareils qu’elle regrettait de ne pas avoir sa petite phrase de présentation personnelle préalablement construite comme celle que sortait Mathis à tout bout de champ qui sonnait si bien à l’oreille dans toutes les occasions.

« Enchanté… »

Elle ne put s’empêcher de sourire à son ridicule.