La hauteur de l’arme, l’angle, la force de l’impact, tout était parfait et Virina aurait réussi à frapper et blesser ce corpulent grognon si une sordide fourmi ne s’était pas placée en travers de son chemin. C’est sous cet angle en tout cas que notre guerrière interprétait les faits. Cette dernière, déçue de l’intrusion subite de la fourmi, ne vit pas venir Gurth qui n’avait pas apparemment pas l’intention de se laisser agresser ainsi sans réagir. C’est ainsi que la grosse main boudinée de l’ogre empoigna avec force la mâchoire carrée de la guerrière et la rapprocha brusquement de lui. Puis, d’une voix ferme, profonde et surtout sans équivoque, il intima Virina de cesser les hostilités. L’odeur putride des mains de l’obèse s’avérait désagréable, mais endurable, sa rude prise sur la mâchoire de la guerrière était douloureuse, mais tolérable, sa position de soumission, dans laquelle elle se trouvait, était par contre insupportable. La lueur dans les yeux de Virina n’était plus la même, alors que quelques minutes plutôt on pouvait y lire la passion pour le combat meurtrier, on n’y voyait maintenant qu’une violente rage, celle de la défaite. Chez les garzok, la loi du plus fort régnait et déterminait le dominant et le dominé. Il était clair pour Virina qu’elle venait tout juste de passer dans le clan des soumis et c’est ce qui l’horripilait. Elle n’en avait aucunement envie, mais elle savait qu’elle devait obtempérer.
Après avoir déglutie pour faire descendre la boule qui lui oppressait la gorge, prit quelques lentes respirations pour contrôler sa colère, Virina se décida enfin de répondre sur un ton qui se voulait neutre, non agressif, mais en aucun cas soumis.
« Ça va j’ai compris, tu peux me lâcher à présent. »
Après que Gurth l’aie lâchée, Virina se détourna de lui. Elle avait quittée jadis son clan pour éviter une vie sous la dominance d’un autre orque, et avait ainsi préférée la solitude et la liberté à une vie de servitude. Ce douloureux souvenir de vie de groupe venait de ressurgir à la surface. D’un hochement sec de la tête, l’orque, désormais vieille, tenta de chasser ces lugubres fantômes de sa vie passée.
Puis soudain, elle se sentit faible, très faible, comme si le chauve lui avait volée toute l’énergie dont elle disposait quelques secondes plus tôt. Et voilà que la terre se mit à trembler augmentant ainsi sa difficulté à se tenir debout. En scrutant au loin du regard , elle ne mit pas grand temps à comprendre ce qui causait tous ces tremblements : une horde de fourmis deux fois plus imposante que la précédente foulait le chemin et se dirigeait tout droit sur eux.
Notre guerrière était faible, mais pas à bout de ressources. Elle aimait se battre plus que tout, mais n’était pas suicidaire, pas à ce point en tout cas. Avec ses forces soudainement diminuées, elle savait qu’elle ne pourrait combattre, il pourrait tout au plus tenter de se camoufler en attendant que ses forces reviennent.
C’est ainsi que chevrotante, elle se dirigea vers le groupe de pimpapoum qui s’étaient regroupés en formant un étrange dôme avec leurs feuilles un peu avant l’arrivée de la première escouade de fourmis. Virina avançait difficilement, souhaitant qu’il lui reste assez de forces pour se rendre jusqu’à l’attroupement des Petits-êtres et se cacher derrière eux.
_________________
|