Après quelques heures passées à flâner sur le pont, à observer les paysages multiples, et à me moquer intérieurement des autres passagers, je sens l’enfin amortir sa descente vers le sol. Les vibrations sont plus intenses et je m’interroge réellement sur les mécanismes qui permettent à l’appareil de s’envoler.

(La magie, je ne vois que ça !)

Lentement, mais non sans secousse, nous glissons vers les terres du comté de Whiel. Tulorim se dresse devant moi, bien plus sombre qu’Eniod. Je me demande quels secrets peuvent bien y être enfouis. Mais la visite ne sera pas pour aujourd’hui. Je ne dois pas me laisser distraire par toutes ces nouvelles choses que je découvre. Mon objectif est, et restera, Oranan. Là, peut-être aurai-je le temps de flâner un peu ?

Je quitte le cynore, saluant d’un signe de tête l’elfe gris qui me souhaite une agréable journée. Il est rudement poli, je trouve. Un peu trop à mon goût. Mais peu importe.

La zone d’embarcation est bien plus grande que celle d’Eniod. Et je comprends alors, ce que sont les aynores. Tout au fond de la zone, se dresse, majestueux, un aynore. Il est bien plus imposant que les cynores qui le précèdent. Il n’y en a qu’un seul. Je suppose qu’il m’emmènera à Kendra Khâr, celle que l’on surnomme la citée blanche, paraît-il.

Intervention PNJ pour Elylia

(((HRP : Yus retirés de ta bourse.)))

Alistair tendit la missive à la guichetière.

« Vous voyez, il est dit ici que le trajet pour Kendra Kâr sera pris en charge par la République d'Ynorie. »
« Effectivement, » acquiesça finalement l'elfe grise, visiblement quelque peu contrariée. « Bien, voici votre billet. Il sera réutilisable pour le cynore entre Kendra Kâr et Oranan. Vous arriverez à Kendra Kâr aux alentours de midi, une correspondance pour l'Ynorie partira environ vingt minutes plus tard, veillez à ne pas traîner. Votre aynore, lui, décolle dans dix minutes. La société Air Gris vous souhaite un excellent voyage, un agréable séjour en Nirtim ainsi qu'une bonne journée, au revoir. »

L'assassin rangea soigneusement le billet dans une poche de sa veste et retourna auprès de ses compagnons. Pour l'occasion, Lin, Emeraude et Saphir l'avaient accompagné. Le premier, fidèle à son poste de garde du corps, pour s'assurer de sa sécurité, les deux autres par sentimentalisme.

« Tu es sûr que tu ne veux pas que je t'accompagne ? » demanda une énième fois l'Ynorien, inquiet.
« Oui, Lin, je suis sûr. Je vais là bas pour me faire une réputation, si l'on entend dire que j'ai eu besoin de toi tout le long pour me protéger tout ce voyage aura l'effet inverse. »

Saphir, quant à elle, serrait les dents pour ne pas pleurer. Elle avait beau essayer d'afficher une image de femme forte elle n'était au final qu'une adolescente fragile et influençable. Au moment de dire au revoir, elle ne put retenir quelques larmes en sautant au coup de son supérieur et amant. Elle l'embrassa fougueusement, comme effrayée à l'idée que ce puisse être la dernière fois, et murmura quelques mots à son oreille.

« Si c'est trop dangereux, va-t-en, s'il te plaît, ça ne vaut pas le coup. »

Alistair acquiesça, mais seulement pour qu'elle le laisse tranquille. Vint le tour de Mariella – que le voleur n'appelait Emeraude qu'en privée, lors de leurs quelques moments d'intimité. Celle-ci sembla se retenir de l'embrasser à son tour, à cause de la présence de Saphir, et se contenta d'une tendre accolade.

« Vous me regardez tous comme si je partais au casse-pipe, » s'amusa Alistair. « S'il faut c'est même pas dangereux »

Après un voyage des plus déplaisants pour le jeune Shaman, le cynore arriva à destination et se posa rapidement à son point d'encrage. Une bref secousse indiqua aux passagers que l'appareil s'était stabilisé et qu'ils pouvaient maintenant descendre.

« Tulorim, tout le monde descend ! »

En entendant l'annonce du contrôleur, Kalas se pressa au milieu des gens, n'hésitant pas à en bousculer quelques-uns pour regagner la terre ferme le plus rapidement possible. Une fois le pied sur le sol, il tomba à quatre pattes en haletant après avoir passé plusieurs heures dans les airs. Il se promis de ne recommencer qu'en cas d'extrême nécessité, disposé à faire plusieurs jours de voyage s'il le fallait.

« PLUS… JAMAIS ! »

Le jeune mage reprit son souffle et se redressa pour ne pas se tourner au ridicule plus longtemps. Il quitta la zone d'embarcation de nombreuses questions en tête.

(Bon, Tulorim… Par où vais-je commencer ? Il va falloir m'expliquer pourquoi je n'ai pas payé mon ticket, d'ailleurs. Et pourquoi il fait si chaud ici ?!)

Indécis, le Shaman se posa sur un banc à proximité en mâchouillant un reste de pain qui se trouvait dans son sac, signe que ses provisions touchaient à leur fin.

« Qu'est-ce que je vais faire, maintenant…. ? »

Un milicien qui semblait oisif lui aussi s'approcha de Kenra, la démarche nonchalante. Sa charge était manifestement d'observer les allées et venues de la zone d'embarcation de Tulorim, mais face au faible afflux de passager, il semblait s'ennuyer ferme.

- Alors jeune homme, comme ça on se pointe à Tulorim. Z'avez pas l'air d'avoir beaucoup apprécié le transport... Vous v'nez faire quoi ici ?

Terminant d'avaler le croûton qu'il mâchait, Kalas tourna le regard vers le milicien qui s'avançait vers lui d'un pas flegmatique. Les deux mains pendues à la ceinture, il s'arrêta à courte distance du Shaman qui se releva pour lui parler à la même hauteur.

"Je ne viens pas causer d'ennuis, ne vous en faites pas."

Kalas rajusta son la lanière de son sac et tapota son pantalon pour nettoyer les dernières miettes de pain coincées. Pensant que le garde allait reprendre le fil de la discussion, le jeune homme précisa le but de sa venue.

"J'ai entendu dire que la ville offrait des opportunités à ceux qui savent les saisir. Je suis venu tenter ma chance, en réalité."

Le milicien éclata d'un rire sonore et se gratta ostensiblement le nez.

- Ah bah pour sûr qu'si vous voulez de l'aventure, vous pouvez en avoir autant qu'vous voulez ! Parait même qu'y a d'l'argent à la clef et que ça se passerait sur un autre monde... Mais si vous voulez vous renseigner, allez donc à la milice, c'est là-bas qu'ils recrutent !

Un autre monde... Ces paroles résonnaient dans la tête du Shaman comme un appel divin. Sa nature curieuse d'élève appliqué prit le dessus et l'obligea presque à en savoir davantage. Aussi, il demanda la localisation de la milice avec un enthousiasme qui fit sourire le garde.

"Ca m'a l'air d'être tout à fait ce que je recherche ! Vous pourriez m'indiquer où se trouve la milice, s'il vous plaît ?!"

Après quelques gestes dans le vide pour expliquer le trajet à emprunter, Kalas remercia son interlocuteur et se mit en route, heureux d'avoir écouter le conseil de son maître.

L'engin elfique se posa à terre. Le voyage de courte durée avait traversé les mers et les terres à une vitesse qui épatait toujours Hrist. Elle aurait même apprécié avoir ce genre d'engins dans l'armée d'Oaxaca. Avec un tel avantage, il aurait été possible de distancer sans mal des troupes Kendrannes et les harceler au moyen de flèches et de pics de fer qu'on pourrait lancer par dessus bord au dessus de leurs positions.

Mais les rêveries cessèrent, les voyageurs se levèrent en silence et ne tardèrent pas à se disperser dans les ruelles qui entouraient le lieu d'embarcation. Hrist fut la dernière à se lever. Elle traversa avec un rien d'appréhension les postes de gardes mais aucun d'eux ne semblaient reconnaître la femme pourtant recherchée et mal venue dans ces lieux.

Hrist traversa les quelques ruelles et arriva sans mal à la milice, elle n'avait encore rien oublié de cette ville pour laquelle son coeur était mitigé entre une haine et de l'amour.

La guichetière regarda de nouveau dans son gros volume et dit :

- Voyons, deux fois 45 yus, cela vous fera un total de 90 yus, s’il vous plait.

Elle empocha l’argent et les échangea contre les deux billets et souhaita de sa voix mécanique un bon voyage à la sindel et dans la volée : « suivant, s’il vous plaît ».

[Avant]




C'est un peu nerveusement que Tina pousse du bout du doigt son maigre pécule. Elle qui avait prévu de prendre le navire pour Bouhen a malheureusement appris que celui-ci était déjà parti. Mais contre mauvaise fortune bon cœur, la voilà à observer l'un des immenses vaisseaux d'Air Gris. Elle a beau en avoir vu décoller et atterrir des dizaines au cours des dernières années, savoir qu'elle va y entrer pour la première fois la fascine.

Toutefois, lorsqu'elle approche du guichet de paiement, elle est envahie par la certitude qu'elle n'a pas assez de yus. Mieux vaut toutefois s'en assurer. L'elfe grise qui la salue lui renvoie un sourire poli.

"Bonjour. J'aimerais me rendre rapidement à Bouhen, je vous prie. Une affaire particulière à y traiter.", dit-elle comme si elle confiait un dangereux secret.

Dans son dos, un autre passager semble avoir les oreilles qui trainent, car il l'interpelle.

"Tiens ? Encore une petite dame intéressée par les ragots ?"

La belle se tourne légèrement, offrant un visage curieux et amical à cet intrus. Un bon bruit de couloir ne se refuse jamais, surtout s'il n'y a rien à donner en contrepartie.

"Pardon, mon brave ?"

"Vous allez aussi à Bouhen voir ce campement au sud, non ? Il parait que de drôles de gens se sont établis là-bas, et ont besoin d'aide. Et puis pas n'importe qui ! Des types qui se seraient déjà rendus aux tables de rois et de gens importants !"

La sindel au guichet ne se défait pas de son sourire, et regarde Tina avec un intérêt un peu moindre. Elle lui apprend que la compagnie soutient l'appel à l'aide de ces gens, en offrant le voyage jusqu'à Bouhen. Tina se sent plutôt en veine. D'accord, son idée n'est pas à la base d'aider ces inconnus mais... Une fois son petit travail effectué chez l'érudit, pourquoi ne pas en profiter ? Avec de la chance, elle pourra lier connaissance avec de potentiels amis.

La jeune femme n'hésite donc pas à mentionner ce projet à la guichetière, qui lui donne un ticket en retour. Les pas légers de la wiehl la font s'éloigner vers l'immense appareil, puis elle se tourne vers l'autre passager. Quand à son tour il arrive près d'elle, Tina n'hésite pas à lui offrir son plus beau sourire. Maintenant qu'elle le voit, il ressemble à un homme assez âgé, quelque peu voûté, et qui tire un petit chariot à bras. La belle l'aide en se saisissant d'une poignée pour tracter le bagage en direction d'un transport.

"Je vous remercie pour votre aide."

"Nul ne saurait être gentilhomme s'il n'aidait pas une demoiselle en détresse. Charmante, qui plus est."

Un échange poli démarre entre eux, le temps que l'embarquement se fasse. D'ici quelques heures, elle sera donc sur Nirtim, puis à Bouhen. Elle est petit à petit gagnée par l'impatience, et également curieuse. Que peuvent faire ces gens au Sud de la cité ?

Je me crispe imperceptiblement à l'approche du comptoir d'Air-Gris, voilà tant d'années que je n'ai côtoyé les miens, hormis bien sûr les quelques marginaux de l'Opale. Tant d'années aussi que je n'ai volé dans un de ces engins, quand était-ce d'ailleurs la dernière fois? A la fin de ma formation d'Hirdam, en y repensant, lors du retour à Nessima. Un temps auquel je préfère ne pas trop songer toutefois, mieux vaut que je me concentre sur notre destination, notre mission.

Nous attendons bien sagement notre tour, puis je m'approche de l'hôtesse impersonnelle au possible, professionnelle jusqu'au bout de ses ongles soigneusement ripolinés et vernis.

"Bonjour, nous devons aller à Bouhen, j'imagine qu'il nous faut passer par Kendra-Kar?"

La Sindel me dévisage avec, dans le regard, une petite lueur qui la rend vaguement plus elfique. Sans doute ne voit-elle pas des Sindeldi tous les jours, dans ce royaume humain bien éloigné du Naora, mais elle me répond cependant d'un ton aussi poli qu'il est neutre:

"En effet, il faut prendre un Aynore jusqu'à Kendra-Kar, et de là un Cynore à destination de Bouhen. Allez-vous vous engager auprès de ces étranges humains qui ont lancé un appel à l'aide?"

Je plisse les yeux à cette dernière demande, hésitant fortement à lui répondre que cela ne la regarde en rien, mais un peu d'amabilité n'a jamais fait de mal à personne, et puis si méfiant que je sois par rapport à l'influence du Clergé, il me semble fort improbable qu'elle puisse me reconnaître. Tout de même, je suis étonné que la présence de ces étrangers soit de notoriété publique, mais je décide de répondre simplement:

"En effet, c'est la raison pour laquelle nous allons là-bas."

"Dans ce cas, j'ai le plaisir de vous informer que le trajet vous est offert par la compagnie Air-Gris. Je vous souhaite un bon voyage."

Je hausse un sourcil à cette annonce, me demandant bien ce que la compagnie, et donc le royaume du Naora, peut avoir à faire avec ces étrangers alors que l'hôtesse nous tend deux billets. Mais comme je doute qu'elle possède la réponse à ma question, n'étant qu'un simple pion dans la machinerie bien huilée de l'administration Sindel, je m'abstiens de la poser et me contente de prendre mon billet avant de me diriger vers la zone d'embarquement proprement dite.

Quelques instants plus tard nous embarquons dans un monstre volant, merveille de technologie aux allures de vaisseau océanique issu d'un esprit dérangé, ou génial, au choix.