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La marche nocturne fût longue mais Eden fit de son mieux pour suivre avec le peu de lumière provenant des lumières célestes qui filtraient au travers de la forêt. Kurgoth fut cependant contraint de le porter pour la fin du trajet et en profita pour le cacher à quelques centaines de mètres de la route, là où le combat ne l'atteindrait pas. Suivant les ordres de Baronk, les garzoks se répartirent de part et d'autre de la route. Ils secouèrent les sapins les plus proches du chemin de montagne pour en faire tomber la neige en un talus le plus naturel possible afin de se dissimuler entre ce dernier et les branches les plus basses des résineux. Alors que le soleil commençait à poindre à l'horizon et que les derniers pisteurs les plus doués finissaient d’effacer au mieux les traces à l'aide de branches, les autres s'allongèrent dans la neige épaisse et commencèrent l'attente.
Après une petite heure, le convois arriva enfin. Il y avait tout au plus une trentaine de gardes pour près de cinquante garzoks. Les marchands semblaient de toute évidence s'attendre à rencontrer des ennemis dans la régions et les mules transportant sur leur dos de lourdes caisses ou tirant des charrettes étaient au centre du cortège, encerclées par les hommes d'armes. Kurgoth aperçut également ses cibles, elles marchaient à l'avant du convois juste derrière un cavalier un cavalier en armure. Il y avait un homme d'âge mûr, portant une barbe et des cheveux grisonnants, et deux jeunes kendrans, un homme et une femme, arborant tous deux les yeux bleus et la chevelure blonde des ennemis jurés de son peuple. Regardant Baronk pour ne pas louper son signal, il vu qu'il se relevait lentement l'arc à la main. Il le banda, pris le temps de viser et laissa la corde glisser hors de ses doigts. La flèche, jaillissant du couvert forestier, se planta dans la gorge du cavalier en tête de file et, tandis que son cheval se cabrait et que son corps chutait vers le sol, les soldats de la reine noire surgirent des talus enneigés. Une vive lumière explosa dans les airs alors que la vague de guerriers à la peau verte commençait à déferler sur les humains. Grâce au sortilège ainsi lancé par le prêtre, les gardes purent se mettre en position pour accueillir de leur lances les soldats désorientés qui se ruaient sur eux tandis que les acolytes commençaient à les renforcer par leurs bénédictions. Le fanatique, qui ne s'était jamais entraîné à charger ainsi, se laissa distancer par ses semblables qui, bien qu'hébétés par la vive lumière, ne ralentirent qu'en s'écrasant contre le mur de boucliers qui les attendait.
Alors qu'il s'élançait pour les rejoindre, il vit que le prêtre s'attelait maintenant à soigner magiquement les gardes l'escortant pendant que ses acolytes continuaient leurs bénédictions. Cela ne sembla pas suffisant pour arrêter Baronk qui, de sa hache énorme, se créa une brèche dans laquelle Kurgoth essaya lui aussi de se faufiler. Un violent coup de coude au visage, qu'il reçu accidentellement de l'un de ses alliés tant le chaos régnait sur ce minuscule champ de bataille bien trop surpeuplé, le projeta en arrière. Se relevant sur le talus, légèrement au dessus de la mêlée, il aperçu Baronk attraper le prêtre par le col de la bure, se tenant entre les lignes ennemies au niveau des religieux et au milieu des mules paniquées. Il vit également un fantassin se ruer, la lame au clair, dans le dos du capitaine. Comprenant que neutraliser les utilisateurs de magie permettrait de conclure l'affrontement au plus vite, il tenta d'aider celui qui l'avait accueillit dans son campement en neutralisant le soldat humain. Pointant dans la direction souhaitée avec son bras gauche pour l'aider à viser, il rassembla ses forces dans son bras droit pour projeter son arme avec un maximum de puissance. Lorsque ses doigts laissèrent filer le manche de la kitranche, celle-ci fendit l'air en tournoyant au dessus des lignes défensives qui résistaient difficilement devant le nombre des assaillants. Le fantassin visé aperçut la lame volante se diriger et plongea pour l'éviter in extremis alors que cette dernière finit sa course dans le crâne d'un acolyte qui, le dos tourné à la scène et trop occupé à bénir les gardes de la ligne de défense opposé, n’eut aucune chance d'esquiver le coup et s'effondra, tâchant de son sang la neige immaculée entre les lignes de combat.
Kurgoth se mordit les lèvres, de déception d'avoir loupé son lancé mais pas seulement. Il réalisa à quel point il pouvait être compliqué de faire des prisonniers dans une telle mêlée. Des trois sacrifices potentiels qu'il pouvait ramener, il venait d'en abattre un par accident et il avait peur que les autres ne connaissent le même sort. Passant sa deuxième arme dans sa main forte, il se revint au contact des boucliers adverses pour passer au travers de la défense. Avant de revenir au niveau où son champ de vision était obstrué, il vit toutefois le capitaine lâche le prêtre de Gaïa pour se tourner vers le fantassin qui se relevait. Kurgoth se jeta l'épaule en avant pour pénétrer la défense à la manière de Baronk. Il réalisa cependant que ça technique n'était pas au point quand il s'écrasa contre la plaque de métal en ne faisant reculer son porteur que d'un pas. Sonné par le coup, il faisait à présent une victime facile pour le garde qu'il venait de percuter. Heureusement pour lui, les garzoks avaient une grande supériorité numérique dans cette bataille et, sans même accorder d'attention au fanatique, un soldat à la peau verte profita de l'ouverture dans la garde de l'ennemi pour l’abattre de son arme.
Se faufilant à quatre pattes à l'intérieur du cercle d'humains armés en train de céder, Kurgoth senti un corps percuter son flanc droit alors qu'il approchait d'une charrette du convoi. Se relevant dans cette direction en s'agrippant à la roue de bois, il n'aperçut pourtant que le capitaine affronter un soldat à quelques mètres de lui. Se retournant pour voir si la personne n'avait pas basculé par dessus lui, il se rendit compte qu'il se tenait à présent devant sa cible, le prêtre de Gaïa. Celui-ci tentait apparemment de se mettre à l'abris sous la charrette. Se jetant à sa suite pour l'empêcher de fuir, le fanatique lui attrapa la jambe. Le religieux humain tenta alors de se débattre en reculant sur les fesses. Mais lorsqu'il s'agrippa aux rênes entre les montures et la charrette pour se hisser, trop concentré sur le garzok qui le retenait, il ne pu esquiver la ruade des équidés qui, déjà paniqués pas le combat, réagirent à la pression exercée sur les sangles qui les retenaient par un puissant coup de sabots.
Kurgoth senti alors la résistance de l'humain faiblir et, toujours couché sous la charrette, vit ses genoux vaciller faisant ainsi s'effondrer le corps du prêtre juste devant lui. Attirant le corps inconscient à lui dans le but de sécuriser sa proie, le garzok esquissa un geste de recul en voyant l'agencement anormal de la tête et de la nuque. Il tenta vainement de tâter le pouls de l'humain mais cela ne fit que confirmer que le coup de sabot de l'équidé lui avait brisé la nuque et l'avait tué sur le coup. Le monde semblait s'effondrer dans la tête du garzok. Il venait déjà de tuer par accident deux des trois cibles potentielles qu'il pouvait ramener. Thimoros voulait-il donc continuer de le voir ronger son frein en servant son temple ? Où est-ce Gaïa, ennemie jurée du dieu de la souffrance, qui, refusant de voir ses enfants souffrir mille morts des mains du serviteur de son némésis, préféra les envoyer elle-même auprès de Phaïtos par une mort rapide et presque indolore?
Le garzok chassa ces idées de son esprit, il n'avait plus le temps de réfléchir. Il ne restait plus qu'un acolyte en vie et il pouvait mourir d'une seconde à l'autre au milieu de cet affrontement armé. Alors qu'il émergeait de sous la charrette où il avait poursuivit le prêtre, ce qu'il vit en premier lieu était ce qu'il redoutait. Les lignes humaines avait enfin cédées devant la vague de peaux vertes et celle-ci se déversait à présent autour de lui, achevant au passage les gardes qui avait rompu le rang en espérant pouvoir fuir. Levant les yeux vers le ciel de dépit, il aperçu le dernier acolyte escalader une pile de caisses entassées sur un chariot proche et se lança à sa poursuite. Il se rendit malheureusement compte qu'il n'était pas le seul à avoir localisé le dernier humain en vie et que d'autres avaient eu la même idée.
Alors qu'il commençait à grimper, il vit de la lumière se concentrer dans les mains de la jeune humaines. Bien qu'il pensait que cela lui était destiné il n'essaya pas d'esquiver et préféra avancer. Alors que sa main arrivait enfin au niveau des pieds de sa cible, il senti le ciel s'obscurcir, un autre garzok l'avait devancé et brandissait sa kitranche dans les airs. Kurgoth hésita un instant, il avait été particulièrement malchanceux avec les deux autres serviteurs de Gaïa et ne pouvait plus se permettre de perdre ce dernier. Fort heureusement, la jeune humaine repoussa l'ombre menaçante en utilisant le trait de lumière que le fanatique l'avait vue concentrer. Ce dernier poussa un soupir de soulagement en voyant cette menace disparaître. Mais lorsque deux nouveaux guerriers apparurent, il se résolu à tenter le tout pour le tout. Il agrippa ferment la cheville de la demoiselle et l'attira dans le vide du côté où il se trouvait. Lâchant également sa prise sur les caisses pour la suivre, il réussit à atterrir sur ses pieds et, alors qu'il abattait le plat de sa kitranche en direction de la tempe de l'humaine pendant que celle-ci tentait de se relever, il lui lâcha simplement:
"
T'as intérêt à rester en vie."
Avait-elle réellement intérêt à rester en vie? Après réflexion pas du tout, mais peu importait à présent car elle était allongée inconsciente dans la neige boueuse et entourée de garzoks armés, son sort ne lui appartenait plus. Baronk ordonna ensuite que ses troupes se regroupent et chargent un maximum de cadavres dans les chariots et traînent les restants jusqu'au camp, dans ces montagnes les cadavres des convois fournissaient en effet un apport de nourriture que les garzoks ne pouvaient se permettre de gaspiller. Après avoir déposé sa prise auprès du capitaine, le seul en qui il avait à peu près confiance, il alla chercher sa kitranche sur le cadavre du second acolyte puis retourna dans les bois pour retrouver Eden. Après avoir retrouvé son compagnon, ils retournèrent auprès du capitaine et cheminèrent jusqu'au camp en gardant un œil sur la prisonnière.
Une fois arrivés au campement, les soldats restés sur place firent leur rapport au capitaine, apparemment rien de notable ne s'était passé ici, et aidèrent leurs camarades à emmener les corps vers les réserves de nourriture et à rassembler armes et armures devant la grande tente centrale. Baronk et ses lieutenants prirent ensuite soin de répartirent et distribuer ces équipements martiaux équitablement entre les différents soldats, y compris ceux restés au camp dont le rôle était reconnu. Même Kurgoth reçu quelque chose pour sa participation. Une fois la distribution finie, le fanatique vint remercier la capitaine pour son aide et, emportant son sacrifice, pris la route en direction d'Omyre suivit de son jeune compagnon.
2008mots