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 Sujet du message: Route entre les Duchés des Montagnes et Omyre
MessagePosté: Ven 31 Oct 2008 18:33 
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Route entre les Duchés des Montagnes et Omyre


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Description du trajet à pied ou à cheval :

En allant vers Omyre, vous verrez certainement les montagnes s'obscurcir. Vous franchirez cols et torrents de montagnes mais attention, vous ne franchirez jamais les hauts pics à l'ouest de Mertar, seul le col de Lebennon pourra vous permettre de passer vers Omyre. Si après ce col des routes existent à travers les duchés, nul n'a jamais été assez fou pour tracer une route vers la capitale Orque.

Quel que soit le sens dans lequel vous prendrez ce qui ressemble à une route, vous affronterez les mêmes dangers: gobelins, ours des montagnes, chauves-souris dans les grottes, lynx, caracal. Voilà pour ce qui est des animaux, mais vous affronterez aussi le froid des hauteurs, les éboulements, les tempêtes de neige, en bref c'est un trajet montagneux, avec des dangers propres aux montagnes.

Durée du trajet à pied ou sur monture sur le continent de Nirtim

Basez vous sur les cartes et présentations décrites dans les 4 continents de Yuimen

(Postez ici vos trajets entre les deux villes)

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Chibi-Gm, à votre service !


La règle à lire pour bien débuter : c'est ICI !
Pour toutes questions: C'est ici !
Pour vos demandes d'interventions GMiques ponctuelles et jets de dés : Ici !
Pour vos demandes de corrections : C'est là !
Joueurs cherchant joueurs pour RP ensemble : Contactez vous ici !


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 Sujet du message: Re: Route entre les Duchés des Montagnes et Omyre
MessagePosté: Mar 14 Juin 2011 22:48 
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L'altitude. J'aime plutôt bien ça. Il fait frais, mais mes habits sont assez chaud je trouve et puis nous marchons. En haut d'une petite montagne nous nous arrêtons. Je vois deux monts devant moi, leurs sommets sont enneigés.

"C'est beau."

"Nous franchirons le col entre les deux monts, annonça Galtob. Les duchés sont derrière.

"Pourquoi ne faisons-nous pas le tour ?

"A l'est c'est bloqué, et l'ouest est contrôlé par les orques. Tu peux y aller si tu veux redevenir leurs prisonniers..."

"Ça ira, merci."

On se remit en marche, tous ensemble. Le temps était plutôt rude.

"Combien de temps on aura à marcher ?"

"Environ trois jours pour là où on veut aller nous. Si tu veux poursuivre jusqu'à Kendra Kâr, où une autre ville, ce sera plus long."

"Je ferai sans doute une pose de quelques jours et je rejoindrai Kendra Kâr ensuite."

"C'est un peu plus calme par là-bas."

J'acquiesçai d'un signe de tête. La route était moins morne en compagnie, et moins dangereuse. Sauf s'il prenait à l'un d'entre nous d'attaquer les autres...
On marcha toute la journée, sans relâche, s'arrêtant à peine pour manger. On dormirait plus tard. Dans la nuit. J'étais pourtant épuisé, car j'avais peu sommeillé la nuit dernière. Mais je tenais bon et le soir, je m'écroulai sur une couverture que m'avait donné l'elfe. Je mangeai à peine et m'endormis d'un sommeil paisible cette fois. Sans cauchemar pour me hanter. Sans avertissement. Enfin un peu de repos.

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 Sujet du message: Re: Route entre les Duchés des Montagnes et Omyre
MessagePosté: Mer 15 Juin 2011 18:39 
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Je frissonnai en me levant se matin là, un feu nous avait maintenu au chaud toute la nuit, mais il faisait quand même froid au petit matin.

"Et c'est encore rien, attend d'arriver là où il y a de la neige. Tu sera frigorifié." m'avait dit Laïra d'un ton sec.

Je ne lui avait pas répondu, je ne voulais pas me disputer, gaspiller mon énergie pour une telle futilité alors que j'étais à moitié gelé.

(Pourquoi n'ai-je pas une cape pour me protéger. J'aurais dû aller à Dahràm.)

Je n'y pensais plus, c'était comme ça. On avançait à un rythme rapide, sans parler. L'air devenait de plus en plus froid, mais nous tenions le coup. Dans l'après-midi il commença à neiger, doucement d'abord, puis de plus en plus fort. En soirée le sol était recouvert d'un épais manteau neigeux.

"Où va-t-on dormir ?"

"Sur le sol."

"Très drôle."

"Il y a une grotte pas trop loin, suivez-moi."

On arriva bientôt en face d'une petite caverne. On y entra et je déposai mon sac sur le sol et j'entendis un cri.

"C'était quoi ?"

"Une chauve-souris. C'est rien, elles vivent la nuit et vont pas tarder à s'en aller. Va chercher du bois pour le feu au lieu de discuter !"

Je soupirai, mais obéis, je cherchai de quoi allumer un feu et assez de bois pour tenir quelques heures. J'entrepris ensuite de faire un feu, pas trop loin de l'entrée pour éviter d'être enfumé. J'y parvins sans trop de soucis et assez rapidement.

"Pas si mal." admit Laïra lorsqu'elle s'approcha.

"Enfin un compliment. Je suis pas si nul que ça."

"T'as encore rien prouvé."

Je lui souris et saisis mon sac pour manger un peu. L'elfe nous rejoins et mangea à son tour. Nous nous couchâmes.

"Normalement demain nous arriverons au village d'Akinos. Soit demain en soirée soit après-demain en matinée. Bonne nuit.

Je fermai les yeux et m'endormis presque aussitôt, épuisé par ma journée de marche.

suite

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 Sujet du message: Re: Route entre les Duchés des Montagnes et Omyre
MessagePosté: Ven 11 Jan 2013 12:26 
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Le terrain se fit bientôt de plus en plus escarpé et la route de moins en moins nette. Azra se sentait fatigué et nauséeux, mais il éprouvait encore de la peine à s'arrêter. Il tenta plusieurs fois de demander à Chandakar d'expliquer ce sortilège, sans succès. Il n'obtint aucune réponse.
Le voyage se poursuivit donc, épuisant et pluvieux, et le garçon commençait à ressentir une peur diffuse. Tandis que les montagnes devenaient de plus en plus noires et escarpée, il prenait vraiment conscience qu'il se dirigeait vers la cité où résidait le mal en personne. Il avait beau afficher des doutes sur cette Oaxaca, il n'était pas pressé de se trouver à proximité. Il irait dans cette ville, il ferait ce qu'il avait à faire, il parlerait au prêtre...
… et après ?

C'était la cité des ténèbres. Le havre où les gens comme lui n'avaient plus à se cacher. Un monstre avait besoin d'obscurité pour échapper à la vue des bonnes gens...
Mais sa principale crainte restait la rencontre avec des garzoks. Une fois dans la cité, les habitants ne se poseraient sans doute pas trop de question quant à sa présence, mais dans les montagnes... il restait un kendran, ennemi héréditaire d'Omyre, mieux valait rester discret.
Le soir tomba et il s'installa à côté d'un petit feu soigneusement dissimulé par sa magie. Il sentait un léger tiraillement dans le ventre... et si il était repéré par des garzoks ?

(Alors tu les combattras et les mettra en déroute!)

Pas à dire, l'enthousiasme de Chandakar était navrant.

« Ah oui ? Et comment je fais ? »

« Je te demande pardon ? » gronda Rendrak.

« Excuse, je parle à mes voix... »

« Ah... »

Le liykor laissa échapper un soupir rauque, fataliste. Il peinait encore à se faire à la bizarrerie de son compagnon.

(Tu es un nécromancien, répondit la liche, le nombre de tes ennemis ne te fait pas peur car tu as les morts pour alliés...)

(Ah oui ? C'est bien pratique, sauf pour un détail : ils sont morts ! Comment pourraient-ils m'aider?)

(Il leur suffit de trouver des reste d'ossements pour se réincarner et combattre à tes côtés. Il faut juste que tu leur en donne le pouvoir.)

Azra ouvrit des yeux ronds. Il se souvenait vaguement de l'histoire des lord nécromants et du fait qu'ils pouvaient relever des armées de mort-vivants... Mais cela lui semblait tout simplement... impossible.

(Je pourrait réellement faire une telle chose?)

(Rien ne l'empêche, apprend du mieux que tu peux... essai et tu verras.)

Azra plongea le regard dans le feu. Ce serait assurément un pouvoir très utile mais...

(Est-ce que j'ai vraiment les capacités?)

La liche resta un instant silencieuse.

(Tu maîtrises maintenant ton compagnon. Tu peux l'invoquer et le révoquer. Tu as appris à faire apparaître des spectres... Tu as normalement toutes les connaissances de base. Mais ça sera difficile.)

Après une dernière hésitation, Azra murmura :

« Je vais essayer. »


Rendrak leva ses yeux rougeoyants vers lui :

« Pourquoi est-ce que je n'aime pas ce que je viens d'entendre ? »

Mais Azra ne l'écoutait pas, il était concentré sur les explications de Chandakar. Il allait falloir une fois de plus qu'il convoque des âmes damnés. Il ne l'avait fait qu'une fois et le souvenir qu'il en gardait était plutôt mauvais.
Mais cette fois-ci, il allait falloir les lier à lui tout en leur donnant assez de force pour s'incarner. Selon l'expert en la matière, il y avait tant de morts que le sol était littéralement composé de matière morte et de calcaire naturel. Les âmes pourraient s'assembler des squelettes à partir de ça.

(Évidemment, ce serait beaucoup plus facile avec de vrai dépouilles à porté de main... mais il faudra s'en contenter. Hé hé... bientôt, tu auras fait un nouveau pas vers la grandeur ! Oui, bientôt je reviendrais et j'aurais à mon service l'un des plus puissants nécromancien de ce temps!)

(Ça, on n'y est pas encore alors concentre toi et aide moi!)

Mais la liche était trop occupée à ricaner pour aider le jeune homme à mettre son esprit dans les bonnes dispositions pour former le sortilège. Azra se concentra donc seul. Il alla quérir les âmes des morts environnant. Ils étaient bien là, jamais loin. Les fluides de l'ombre l'enveloppaient de leur sinistres émanations et Azra s'abandonna à cette ivresse morbide, ce sentiment de mourir à petit feu tout en se délectant du fait d'accomplir une action interdite. Les lèvres retroussées, il laissa échapper un gémissement extatique. À chaque fois, l'expérience était plus intense.

Mais était-ce bien lui ? Car il lui semblait maintenant entendre d'autres gémissements. Ceux des morts. Les ombres se rassemblèrent, encore informes, autour du feu de camps. Rendrak siffla :

« Tsss... je sens très mal cette affaire. Ça va encore être à moi de redresser ça... »

Soudain, le squelette fut empli d'une sensation étrange :

« Azra, que se passe-t-il ? Je ne pense pas que... »

Il n'eut pas le temps d'en dire d'avantage. Les fluides d'ombres soigneusement mais imparfaitement modelés fusèrent en une onde furieuse qui le frappa tel une vague mortel. Il se dissout dans le monde invisible et seul son âme désincarnée cria :

« Arrête ! Tu vas trop vite ! »

De multiples nuages s'assemblèrent autour du nécromancien. Il regarda avec un sentiment de doute.

(Euh... ça a marché ? Déjà?)

Chandakar eut un soupir funèbre.

(J'ai bien peur que non. J'aurais été ravi de te connaître, mon gars.)

Deux squelettes auxquels il manquait des morceaux étaient maintenant formés. Ils étaient rabougris et peu impressionnant, l'un d'eux n'avait qu'un bras et l'autre manquait de côtes, mais la lueur de meurtre qui brillait dans leurs yeux était terrifiante.

« Euh... et comment je fais pour les contrôler ? »

(Tu ne peux pas.)


La gorge noué d'angoisse, Azra vit les faces livides se tourner vers lui. Ces squelettes avortons lui en voulaient. Il se précipita sans plus attendre sur le premier, celui auquel il manquait les côtes, et le reversa d'un coup. Le deuxième, qui se trouvait maintenant derrière lui, en profita pour le jeter à terre. Mais le garçon parvint à se rattraper et à lui envoyer le terrible poing d'acier qu'il avait récupérer dans les côtes, les broyant. Mais bon sang ce que cette arme était lourde à manier !
Il frappa encore et parvint à broyer le crâne de son ennemi, mais le premier l'attaquait par derrière et lui serrait la gorge entre ses mains de calcaire. Azra sentit la panique l’envahir. Pas encore ! Fallait-il donc que tous les mort-vivants qu'il rencontre cherchent à l'étrangler ? Il tenta de saisir les phalanges pour les décrocher, sans succès. Ses gantelets ne le rendaient décidément pas habile de ses doigts.

Alors qu'il se croyait perdu et que ses forces l'abandonnaient, il y eut un craquement et l'étreinte se relâcha. Le jeune homme bascula a terre et s'efforça de reprendre son souffle. Tandis qu'un eviolente migraine démarrait, il se retourna péniblement à quatre pattes au milieu des débris d'ossements pour comprendre ce qu'il s'était passé... et faillit s'évanouir de peur.

Une bande de garzok se tenait devant lui.

« Tient tient... un gamin du sud en prise avec des mort-vivants ? Ce serait dommage de gâcher cette bonne viande... »

Le reste du groupe ricana. Celui qui avait parlé était un monstre à la peau vert-noirdâtre et à la face large. Colosse musclé aux crocs bien visibles dans son sourire carnassier, il portait une lourde armure de cuire durcis et tout un arsenal de haches, couteaux et épées. La vue brouillée par la douleur qui lui martelait le crâne, Azra se permit une dernière pensée ironique :

(Bon sang, pas à dire, ma chance est digne de rentrer dans les annales...)


Réveil

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Dernière édition par Azra le Dim 13 Jan 2013 22:25, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Route entre les Duchés des Montagnes et Omyre
MessagePosté: Dim 13 Jan 2013 22:11 
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Le lendemain soir...

« On s'arrête, vermisseau ! »

Une traction sur la chaine et Azra se retrouva à terre. Il heurta de l'épaule une roche noire et gémit. Une journée entière à marcher, à tenter de suivre le rythme des garzoks et à subir leurs coups et brimades... il se demandait s'il pourrait en tenir une autre.
Une journée infinie dans les terres du néant. Un voyage au bout de la nuit vers la terreur et le déclin.
Les poignets liés, il se sentait abattu. Il ne savait plus quoi faire. Il ne regarda même pas quand le chef, qui répondait au nom de Gorak et était de loin le plus porté sur les violences gratuites, planta de piton à l’extrémité de la chaine dans le roc. Sa force était surprenante, autant que sa capacité à sourire de tout ses crocs jaunis.

« Demain on sera à Omyre... Qui sait, je trouverais peut-être quelqu'un qui sera intéressé par ta carcasse. Un marchand d'esclave... ou un cuisinier. »

Il éclata de son rire rocailleux et envoya un coup de pied dans les côtes du jeune homme en piteux état. Puis, il repartit vers ses hommes.
Ils étaient une vingtaine, une patrouille en quête de pillage, sans doute. Ils avaient tenté de lui arracher toute valeur et avaient même envisagé de lui couper le bras en voyant qu'ils n'arrivaient pas à décrocher le bracelet de Phaïtos (ou faudrait-il dire d'Arek?). Gorak avait finalement déclaré que cela ferait perdre de la valeur à leur prise, et ils avaient préféré le frapper jusqu'à ce qu'il s'évanouisse pour lui faire dire comment enlever le bracelet.
Ils s'étaient finalement contenté de sa bourse, et de la bague de Chandakar. La liche avait hurlé quand elle lui avait été retiré - où était-ce Azra lui même ? - et depuis, il se tenait silencieux.
Azra s'allongea par terre, vidé. Il n'avait pas d'autres souvenirs de cette journée infernale. Tout était flou et douloureux. Mal à la tête, mal au corps, mal à l'âme...

(Ne perd pas espoir... ton destin n'est pas de mourir ainsi...)

La voix d'Arek était quelque peu réconfortante mais, avec toute la fatigue qui s'accumulait depuis plusieurs jours, Azra peinait à s'en réjouir. Il n'avait même pas eu le temps de réfléchir à un échappatoire et il ne se posait même plus de question. Minable bouseux il était né, et il avait eu tort de croire qu'il mourrait autrement.

(Allons, je sais que la dernière semaine à été dure, mais tu dois tenir ! Je te dis que tu as les moyens de t'en sortir. Tu es un nécromancien. On n'enferme pas ces gens si facilement.)


Il secoua la tête et ne répondit rien. Si seulement la mort pouvait venir. Oui, venir vite. Lui faire oublier son crime odieux. Il n'avait pas voulu, non, il n'avait pas voulu...

La faera resta silencieuse devant ces sinistres pensées. Elle dût comprendre alors ce qu'il se passait.

(De quel crime es-tu en train de t'accuser ? Tu n'as rien fait ! Oh, tu as tué quelques personnes, mais ça ce n'est pas grave, c'est le destin des mortels.)

(J'ai fais bien plus. C'est moi qui ai révélé à Tal'Raban le moyen de ressusciter, et de faire revenir Oaxaca.)

(Non!)

La voix était furieuse. Comme si nier l'évidence pouvait aider.

(Bon sang, il me semblait bien que cette période de flou n'était pas normale ! Ta fusion avec Chandakar déclenche une nouvelle crise ! Moins violente, certes, mais il faut que tu la combattes!)

Azra secoua la tête. La mort. La mort était la seul chose à laquelle il aspirait. Il ne faisait même plus attention à la faera. Il laissa les ombres envahir son esprit.

...

(Il n'avait pas le droit ! C'était mon parchemin !)

...

Un homme terrorisé autant que haineux :

« Tu n'es qu'une rature, Chanda. J'ai honte d'avoir eu un tel fils ! »

...

« Bon à rien ! Bon à rien ! » criait la foule des gens qu'il avait connu.

« Vous verrez ! Un jour, je serais le plus grand ! »



(Suis-je satisfait ? Comment pourrais-je l'être ? Il y a encore des pouvoirs que je n'ai pas)



« Sache bien que ton épopée s'arrêtera, un jour, de la main de pire que toi ! Et alors, tu comprendras tes erreurs et le regret te rongera ! »

Il fondit sur le vieux devin et lui déchira le visage de ses phalanges. Il fit massacrer tout le village. Il ne voulait pas entendre parler de la possibilité que tout s'arrête. Il voulait croire que sa gloire serait éternelle... mais il savait que c'était impossible. Seul la mort est éternelle.

« NOOONNN ! »



Azra se réveilla en sursaut, nauséeux. Où était-il ? Qui était-il ?

(Tu es Azra ! Un brave garçon né il y a peu et en quête pour empêcher le monstre qui est dans ton esprit de ravager le monde!)

Oui, ça lui revenait. Il regarda autour de lui. Il faisait nuit mais un feu de camps brûlait plus loin. Il était toujours prisonnier des garzoks. Autour, dans la nuit, les pics noirs des montagnes de Nirtim semblaient encore plus sinistres, plongés dans les ténèbres. Plus que jamais, il savait qu'il était proche d'Omyre, et qu'il faudrait s'échapper avant d'y arriver.

(Je... je crois que je vais mieux. C'est passé...)

(Enfin...) soupira Arek.

Le flou se dissipait et il regarda les étoiles. Il était étendu sur le dos et tout son corps lui faisait mal. Hélas, les mauvais traitements qu'il avait subit n'étaient pas un cauchemar, eux. Ni sa fatigue d'ailleurs. Il avait les jambes en feu à force de marcher, mais au fond, c'était bien. Cette douleur n'était-elle pas un juste châtiment pour celle qu'il avait infligé aux autres ? Il se secoua.

(Il faut que je m'échappe!)

(À la bonne heure !)

Azra se retint de lâcher un commentaire bien sentit. Après tout, Chandakar était le grand responsable de tout cela. Et comme d'habitude, il disparaissait dans le fond de son esprit dès que ses conseils seraient souhaitables.
Arek repris la parole :

(Un nécromancien peut-être emprisonné, mais son compagnon...)

Azra sourit et fit un geste. Aussitôt, un nuage de fumée sembla jaillir de nul-part et s'assembler en une ombre sinistre dont seul les yeux brillants se voyaient dans la nuit.

« Rendrak ! Tu étais un voleur, tu pourrais me détacher ? Crocheter les serrures, tu dois connaître... »

Il tendit une patte griffue... et arracha le piton du roc d'une seul main !

« D'une certaine manière, oui... »

Azra se releva péniblement en retenant un gémissement. Si seulement il pouvait faire payer à ces fichus garzoks ! Mais ils étaient trop nombreux... Il n'y avait qu'une seule chose qu'il pouvait faire.

« Rendrak, tu es noir comme la nuit ! Peux-tu te glisser jusqu'à l'endroit où ils ont empilés leurs affaires et récupérer mon argent et mon anneau ? »

Il y eut un sourire dans la voix du liykor :

« Voilà une mission qui me plait ! »

Ce n'était pourtant pas facile car le campement était on ne peut plus simple. En fait, le terme même de campement était abusif pour cet espace à peu près plat où le groupe s'était établi. Il n'y avait pas de tente, seulement un feu à une trentaine de mètres et une pile d'équipements et de nourriture à porté de main.
Rendrak se tapit pourtant à terre et se glissa comme une ombre. La lumière du feu ne semblait pas avoir de prise sur lui et ses déplacement étaient incroyablement silencieux. Sans doute avait-il gardé ses coussinets dans la mort.
En moins de temps qu'il faut pour le dire, il était au tas d'ordure où se mêlait nourriture et produits de razzia. Azra retint son souffle. S'il se faisait voir... non, évidemment qu'il allait se faire voir : il était maintenant à trois mètres de ces saletés ! Donc quand il se ferait voir, ils seraient fichus !

La voix de Gorak s'éleva en un grand rire malsain. Comment quelqu'un pouvait-il exprimer autant de vices dans un rire ? Azra ne se souvenait déjà plus de grand chose ne concernant, si ce n'est qu'il le haïssait et que le besoin de le voir baigner dans son sang était très fort... Tant pis pour lui, il n'avait qu'a pas débarquer dans sa vie pendant une période où il était à demi possédé par ce psychopathe de Chandakar...

L'ombre damné avait maintenant atteint le tas et fouillait délicatement dedans. Il commença à ramasser... et bien tout ce qu'il pouvait. Hélas, impossible de voir s'il avait la bague de Chandakar, vu que celle-ci était essentiellement noire comme la nuit.

(Il a intérêt) grogna la liche.

Pour sa part, le jeune kendran s'éloigna pour se cacher derrière des roches. Par mesure de sécurité, il invoqua son pouvoir pour se dissimuler dans les ombres. L'effet se fit sentir presque aussitôt et il ne put s'empêcher de se féliciter de la facilité de plus en plus grande qu'il avait à lancer ses sorts. Pour éviter de s'inquiéter, il se récita tout ce qu'il avait appris en magie pour être sûr qu'il avait bien tout en mémoire.
Un forme noire. Il sursauta et son camouflage s'évanouit. C'était Rendrak, heureusement, et il lui tendait de sa bourse, sa bague et même un supplément d'or qu'il avait réussi à grappiller. Maigre vengeance mais c'était toujours ça de pris.
Les garzoks étaient trop occupés à festoyer, à boire et à rigoler pour avoir fait attention. Après tout, ils étaient presque chez eux et n'avaient guère besoin de vigilance...

Azra se releva péniblement. Son compagnon nécrotique se baissa :

« Accroche toi à mon dos. On ira plus vite... »

Le garçon, épuisé, n'en demandait pas tant. Il passa ses chaines autour du cou du liykor pour s'accrocher. Avec un peu de chance, ça tiendrait. Il enfouit la tête dans la fourrure et ils disparurent dans les ténèbres.

(J'espère que nous nous retrouverons, Gorak. J'espère sincèrement que nous nous retrouverons...)

Aux portes des ténèbres

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 Sujet du message: Re: Route entre les Duchés des Montagnes et Omyre
MessagePosté: Mar 23 Juil 2013 23:22 
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<-- Les ruelles d'Omyre

Quitter Omyre


N’était point nécessaire d’être connaisseur de chevaux pour constater que la monture sur laquelle je m’étais hissée n’était point un palefroi et encore moins un coursier. Sa carrure robuste correspondait plutôt à un cheval de trait et c’est la conclusion que j’en aurais tirée si la jument avait été attelée plutôt que munie d’une selle. L’accoutrement de son cavalier, fine cotte de mailles agrémentée de plaques métalliques lustrées et épées à la ceinture, confirmait sans aucun doute que j’étais en compagnie d’un destrier monté par un fier guerrier. Me sachant passagère clandestine et ignorant totalement la réaction de l’homme quant à ma présence inopinée, je préférai demeurer silencieuse espérant passer inaperçue le plus longtemps possible. C’est ainsi qu’une partie de la journée s’écoula sans incident sous le pas régulier du cheval de combat.

Puis, le bel équidé s’arrêta brusquement. À la fois inquiète et curieuse d’en connaitre la cause, je me penchai de côté et regardai droit devant.

(Moi qui pensais les avoir semés !)

Alors que je les croyais loin derrière, en travers de la route de terre se tenait deux immondes scarabées géants. Plus larges que haut, ils étaient identiques à ceux qui m’avaient poursuivie dans les rues d’Omyre. Leurs laides antennes vertes frémissantes, leurs affreux yeux rouges globuleux nous fixant, leur vilaine pince avant dressée à la manière d’une épée, ils semblaient attendre le moment propice pour attaquer. Et c’est à ce moment-là que sans se détourner, le cavalier m’adressa la parole pour la première fois.

« C’est de ces deux bêtes de foire que tu te cachais petite lutine ? »

Et sans me laisser le temps de répondre elle rajouta :

« Je t’ai laissé monter sur Dulcinée, mais la fuite est terminée à présent, descend et bat toi comme il se doit. »

Je restai un moment là immobile, surprise que ce guerrier soit une femme et qu’elle m’ait découverte depuis le tout début. Cette dernière avait vu juste, des insectes de cette taille, ça ne pouvait exister que si on les avait modifiés. Il n’y avait aucun doute sur leur origine, elles étaient la création d’Aerq le fou. Ils étaient sa créature et moi leur proie. Honteuse de m’être ainsi cachée, et reconnaissante qu’elle ne m’ait pas chassée plus tôt de sa fière monture, j’obéis à la guerrière à la voix enrouée et ferme, mais trahissant une certaine amabilité. Empruntant le même chemin qu’à la montée, je lâchai l’arrière de la selle, dévalai la croupe, empoignai fermement l’épaisse queue blanche que je lâchai après un court moment d’hésitation.

(Et si je profitais de mon perchoir !)

Je fis donc volte-face et je reconquiers la croupe de la jument pour atteindre la souple selle de cuir. Sans demander la permission de la guerrière, je gravis son dos, profitant des joints entre les plaques de métal pour y insérer mes pieds et monter.

« Mais que fais-tu là, impertinente ? »

À présent debout sur son épaule gauche, j’ignorai son insulte et lui fis une brève révérence accompagnée d’un timide sourire.

« Je suis Guasina Roquin ! » Me présentai-je tout en m’asseyant, juste avant de glisser le long de son bras. Mais contrairement à ses propos, je n’étais point impolie. C’est donc une fois, ma glissade terminée, debout près du pommeau que j’acceptai de bon cœur de lui expliquer mon comportement.

« Je veux bien me battre madame, mais je suis une archère avant tout. Sur la tête de votre cheval, je serai en bien meilleure position et bien moins vulnérable qu’au sol à la portée de ces insectes modifiés. »

Tout en parlant, j’observai la demoiselle qui me faisait face. Cette jolie et mince brunette à la coupe de cheveux en carré coupé juste au-dessus de ses épaules n’était pas plus âgée que moi. Bien que ses yeux bruns démontraient une certaine maturité, les traits de son visage trahissaient sa jeunesse.

Quant aux scarabées, pendant tout ce temps ils n’avaient point bougé, n’étant apparemment pas intéressé à la jument ni à sa cavalière ou encore méfiants des lourds sabots du cheval de combat.

Visiblement contrariée, la dame ne fit pourtant aucun commentaire quant à ma décision, se contentent de me faire un petit signe de tête et me décliner son nom : Hortense.

Ayant suffisamment perdu mon temps, je tournai les talons et gravis le cou de la monture tout en profitant de sa crinière pour faciliter mon ascension. Une fois là-haut, je me couchai à plat ventre contre la nuque de l’animal, ma tête entre ses deux oreilles, croyant que son toupet me dissimulerait un tant soit peu.

Les scarabées n’étaient pas aussi bêtes que je l’imaginais, ils m’avaient repérée et ils s’agitaient de gauche à droite, ouvrant et fermant leurs pinces. L’un des deux ouvrit ses ailes écailleuses afin de déplier les ailes membraneuses sous-jacentes. C’est avec horreur que je le vis se soulever de terre de quelques centimètres. À mon grand soulagement, plus pesant que l’espèce dont il origine, il ne put prendre davantage d’altitude. J’en profitai donc pour prendre mon arbalète et l’armer. Prenant une grande respiration je me mis en joue, et visai l’abdomen exposé de la bête qui tentait de prendre son envol. Je déclenchai aussitôt le mécanisme de mon arme et quatre carreaux filèrent en direction de ma cible et la blessèrent gravement. Coupée dans ses tentatives, l’insecte chut au sol émettant des cris stridents de douleur.

Sa congénère affolée s’avançant à l’avant, un peu trop près des sabots du cheval. Ce dernier intimidé par la taille anormale du coléoptère prenant peur de le voir dans ses pattes, hennit et se cabra. Cette réaction fut tellement fortuite que je n’eus le temps de m’agripper au toupet du cheval. Je tombai donc en chute libre de quelques mètres de haut. J’eus heureusement le réflexe de lâcher mon arbalète et de prendre la position du fœtus. Lorsque je touchai le sol, je roulai de quelques dizaines de centimètres. Le cavalier reprit la maitrise du cheval et j’évitai de justesse de me faire piétiner. Ce qui ne fut point le cas de l’insecte blessé qui étant trop faible pour se déplacer, se fit sauvagement écrabouiller. Un dernier cri d’agonie et puis c’était la fin, la vie venait de le quitter.

Mes malheurs n’étaient pas pour autant terminés, puisqu’il restait l’autre affreuse bibitte qui venait tout juste de me repérer. Mon arbalète étant hors de ma portée, je fouillai rapidement dans mon sac pour en retirer ma petite fronde que j’avais confectionnée à même mes haillons de prisonniers.

J’armai ma fronde d’un petit caillou pointu trouvé à proximité. Puis l’élevant au-dessus de ma tête, par un léger coup de poignet, je la fis tournoyer horizontalement. Peu à peu, mon coude et mon épaule joignirent le mouvement permettant de l’accélérer. Au bout de trois tours, mon engin de fortune avait atteint sa vitesse maximale, mais au moment où j’allais relâcher le brin largable, celui-ci formé d’un tissu usé, céda. Le projectile partit dans une direction quelconque, mais loin de ma cible, alors que le scarabée toujours vivant chargeait droit sur moi.
Par persévérance ou par peur, peu importe d’en connaître la cause, l’important, c’est que je me remis sur mes pieds et partis à courir. Mais il était trop tard, le scarabée trop près venait de m’agripper une jambe. Je tombai aussitôt sur la terre durcie. Sur le dos, apeurée, je vis, de trop près cette immense tête hideuse munie de puissantes mandibules qui semblaient vouloir me dévorer. Tâtant le sol je ramassai quelques cailloux et les lançai au faciès du monstre hideux. Au même moment où je lançais mes projectiles, un puissant jet de sable jaillit de ma cuirasse de fourmilion ce qui déstabilisa l’insecte qui me relâcha. J’allais me relever et courir jusqu’à mon arbalète lorsque je vis un magnifique sabre d’acier s’abattre sur la carapace de mon ennemi et le scinder en deux laissant échapper une visqueuse gerbe de sang noir.

((( Utilisation de la CCAJ tirs multiples. Bénéficie de l’aptitude physique : amortissement de chute. Bénéficie également de la cuirasse du fourmilion qui émet un jet de sable puissant.)))

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 Sujet du message: Re: Route entre les Duchés des Montagnes et Omyre
MessagePosté: Mar 30 Juil 2013 04:13 
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Faire connaissance


Toujours au sol, horrifiée par la vue de cet insecte éventré, mais soulagée qu’il soit décédé, je fis un petit signe de tête en guise de remerciement à la jolie dame qui m’avait sauvée d’une mort certaine.

« Cela faisait partie de mes devoirs, j’augmenterai simplement le total de yus que vous me devez. »
Me répondit-elle calmement tout en me souriant.

Croyant à une blague, je ricanai de bon cœur. Galamment, Hortense me tendit sa main gantée et sans hésiter, je grimpai dessus. Tout délicatement, elle se releva, s’approcha de son cheval, ouvrit de sa main libre une sacoche de cuir et m’y déposa. Elle sortit ensuite une tunique de son sac puis me la tendit.

« Placez ça dans le fond, ce sera plus confortable pour dormir. »

Et sans me laisser le temps de poser des questions, elle chevaucha sa jument et poursuivit.

« Je dors le jour et voyage la nuit. C’est plus prudent dans cette sombre région. Je vais donc galoper jusqu'à l'aube pour me rendre jusqu’à la ville prochaine où je vous y laisserai partir lorsque vous m’aurez payée. »

C’était avec stupeur que je réalisai qu’elle me facturait réellement tous les services qu’elles me rendaient, contrairement à ce que j’avais cru, il ne s’agissait pas d’une farce. Ce n’était pas que je ne trouvais ça opportuniste ou profiteur de sa part, mais cela ne concordait aucunement aux valeurs qui m’avaient été enseignées. Mes grands-parents, autant maternels que paternels, avaient inculqué la charité et le don de soi-même à mes parents qui en avaient fait tout autant avec leurs enfants. Aider mon prochain sans demander rien en retour s’avérait naturel pour moi et je concevais avec difficulté qu’on puisse penser autrement. D’un autre côté, non attachée à l’argent, j’étais prête à lui verser une bonne partie de tout mon avoir puisqu’elle m’avait à deux reprises sortie de mauvais draps et qu’elle m’offrait un gite pour la nuit. La reconnaissance faisant aussi partie de mon éducation.
Avant de se remettre en route, la guerrière se tourna vers moi et m’offrit de fermer ladite sacoche afin de m’offrir plus d’intimités.

« NOOOON ! »

Je n’avais pu m’empêcher de m’objecter si fortement. À deux reprises, on m’avait confinée dans des sacs à provisions. Je craignais, et avec raison, de revivre une telle situation.

Réalisant ma réaction exagérée, je m’expliquai brièvement.

« Non merci, je préfère dormir sous les étoiles. Je n’aime pas l’idée de me sentir enfermée. »

Sans rétorquer, elle se mit en route et je me laissai porter, confortablement installée dans le fond d'un sac de voyage, une tunique de lin me servant de matelas.

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 Sujet du message: Re: Route entre les Duchés des Montagnes et Omyre
MessagePosté: Sam 3 Aoû 2013 22:50 
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Insomnie et questions


Confortablement installée dans ce petit lit improvisé, portée par un vaillant cheval de combat, et protégée par une guerrière émérite, je n’avais qu’à me laisser tomber dans les bras de Morphée. C’est ce que je tentai, mais en vain. Courbaturée de ma chute du cheval, épuisée par les journées passées dans cette meurtrière prison me privant de sommeil, il aurait été normal que je m’endorme sitôt les yeux fermés. Mais ce ne fut point le cas. Ressassant sans cesse les événements de ses derniers jours et même de ces dernières heures, le cerveau en ébullition, je demeurai éveillée bien malgré moi.

Résignée de mon état, je décidai donc de profiter de mon insomnie pour faire part de mes interrogations, de mes incompréhensions à mon hôtesse.

« Dites-moi Hortense, vous ne trouvez pas étrange que ces bestioles, plutôt balourdes, nous aient rejoints au point même de nous dépasser ? Seraient-elles plus rapides que votre jument ? Ou bien seraient-elles dotées de pouvoir magique leur permettant de se déplacer d’un endroit à un autre ?»


Hortense ne se fit point attendre et de bon cœur poursuivit la conversation que je venais d’entamer.

« Croyez-vous vraiment aux possibilités que vous venez de soulever ? »
Me fit-elle remarquer, plutôt sceptique.

Elle n’avait pas tort, mes hypothèses s’avéraient farfelues.

« Non, je sais bien que cela n’a pas de bon sens. Et pourtant elles étaient là, devant nous ! »

On ne pouvait nier les faits, les scarabées géants se trouvaient bien devant nous et non derrière. Hortense, plus pragmatique que moi, m’expliqua son point de vue :

« S’il est impossible qu’ils nous aient rejoints alors ils ne l’ont pas fait. » Sans me laisser le temps de répliquer, elle enchaîna :

« Et si vous, vous ne vous posiez pas la bonne question ? Ou si vous envisagiez la question sous un autre angle, en admettant que nous ayons semé ces bestioles, qu’est-ce qui nous reste comme possibilités ? »

Cette jolie femme qui semblait dotée d’une bonne logique m’obligea à réfléchir et à me poser des questions. Je demeurai ainsi silencieuse quelques minutes me creusant les méninges, puis je rétorquai.

« La seule autre possibilité, c’est que les scarabées que nous avons tués étaient déjà là et qu’ils nous attendaient. » J’hésitai un moment puis poursuivis : « Aerq, leur créateur, dispose peut-être d’un moyen quelconque pour entrer en contact avec eux. Mais ça demeure dans le domaine de l’improbable, non ? »

Cette nuit, sans lune et sans nuage, mettait en évidence toutes ces étoiles que je ne cessais d’admirer tout en discutant avec ma nouvelle connaissance, Hortense. Après quelques minutes de silence, cette dernière reprit la conversation là où on l’avait laissée.

« Peut-être pas ! Quelqu’un de mon entourage, que j’apprécie beaucoup, me raconta un jour que certaines gens peuvent communiquer avec les animaux. Dans le cas cité par mon ami, il s’agissait d’un humain et d’un loup, un seul par contre. Il m’a même confié que sa frangine pouvait se transformer en corneille à volonté ! »

Cette affirmation m’étonna d’une jeune femme qui aux premiers abords semblait plutôt terre et terre, ne croyant pas aux chimères. Et sans la moindre méchanceté, nous naturellement, je lui fis remarquer.

« Et vous croyez ces paroles ? Vous ne pensez pas qu’il vous aurait monté en bateau ? »

Mon interlocutrice ne me répondit point. Elle n’émit qu’un petit grognement. Il était clair que je l’avais insultée. Ne sachant plus quelle attitude adopter, je choisis d’attendre. Quelques minutes s’écoulèrent, puis elle me répondit d’un ton où l’on pouvait percevoir une certaine agressivité contenue.

« Mon ami n’oserait jamais me faire une telle plaisanterie ! Et puis, vous savez petite Guasina, là d’où je viens, si je raconte que j’ai transporté une petite lutine, on me rira au nez ! Il n’est pas rare les gens qui ne croient pas à votre existence ! »


Sa remarque me fit penser à ma mésaventure à Kendra Kâr en compagnie de Sirat. Les habitants de cette ville, surpris de mon existence, cherchaient à me toucher. Certains avaient même proposé de payer le prix fort à mon ami. Par chance, qu’il était là pour me protéger, sinon j’aurais bien fini une fois de plus enfermée dans un sac. De cet exemple, je retins que ce qui est improbable pour certains ne l’est pas pour d’autres. Et puis son hypothèse semblait la plus plausible. Les créatures d'Aerq pouvaient être postées un peu partout et il suffisait à ce bouffon fou de communiquer avec eux.

« Vous avez raison, je dois l’admettre, pardonnez-moi d’avoir douté de vos paroles. »

Hortense accepta mes excuses et le silence s’installa de nouveau. Je poursuivis la contemplation des étoiles, tentant de compter toutes celles qui se présentaient à mon champ de vision. Puis, peu à peu, mes paupières s’alourdirent et un sommeil réparateur m’envahit enfin.

--> Duché des montagnes alentours

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 Sujet du message: Re: Route entre les Duchés des Montagnes et Omyre
MessagePosté: Lun 11 Avr 2016 17:30 
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Localisation: He ho ! On rentre vers l'château !
(Avant)

(6)



Enfin une journée d'voyage qui s'finit ! Pile quand le trio a atteint le sommet du col. Bordel, ça caille ! Heureusement que d'autres avant elles ont bâti une sorte d'abri en pierre. Y'a pas d'porte, mais y'a d'aut' gens qu'ont laissé d'quoi s'faire un feu pour s'réchauffer. N'empêche, c'est quand même con qu'pour atteindre c'terrain plat des marais, avant d'aller dans les bois, faut s'farcir une putain d'grimpette ! Genre, si au moins l'sentier était direct, ça ne la ferait pas chier autant. Mais nan, faut qu'ceux qui ont tracé la route s'soient beurré la trogne d'abord ! Genre ça serpente d'un côté pis d'l'autre, et qu'ça tourne autour d'un massif d'pierre !

Bon, au moins, elles ont bien rigolé quand elles ont croisé la route d'un ours en pleine partie d'pêche dans un ruisseau. Enfin, la peau-verte surtout, parce que la gosse était comme congelée. Et Aro' y était pour rien, en plus ! Zu'Gash s'est calée dans son costume d'ours, a gueulé aussi fort qu'l'autre bestiole, et a entrainé la petiote avec elle plus loin. C'est pas qu'l'idée d'buter cette autre bébête des montagnes l'aurait gênée, mais elle a laissé la plupart d'son matos au château. Et tanner une peau ici aurait pris trop d'temps. D'accord, l'Lord Gwandor leur a pas imposé d'délai, mais la peau-verte a déjà hâte de rentrer. Asad et l'Demi doivent déjà être en train d'tout raconter, et Shaddem doit être aux premières loges, lui.

Les yeux rouges de la peau-verte se posent sur la gosse, assise depuis un moment près du feu. Elle a déroulé le drôle de parchemin qu'elle a acheté. La garzoke voit ses lèvres qui bougent, mais elle ne cause pas. L'aurait fait une rechute ?

"Eh, Maya !", gueule-t-elle avant d'se faire picorer le crâne par son oiseau noir. "Maaaaais euuuuh ! J'veux juste savoir c'qu'elle fout !"

"Chu-Teuh !", persiffle Aroroa.

La garzoke est encore plus curieuse maintenant, mais son bide gronde trop fort pour la laisser tranquille. Pendant qu'elle fout quelques bouts d'viande à réchauffer, elle va s'accroupir devant la gamine. Et Maya ne bronche même pas. La Coureuse lorgne vers le truc où y'a des tas d'symboles qu'elle pige pas.

"Beuh ?"

Elle rêve ou les machins s'effacent petit à petit ? Alors ça c'est pas banal. Maya continue de faire son truc bizarre, jusqu'à ce que rien ne reste sur l'objet. La gosse inspire puis lève la tête. Et elle fait des yeux ronds en découvrant la garzoke pile poil sous son nez.

"Euh... Hum... Il n'y a pas... Quelque chose qui..."

"Hein ? Ah ! Et merde ! Ma barbaque !", beugle l'orque en se jetant vers le feu.

Elle choppe la viande à pleines mains... Et zouh ! Envoyée en l'air parce que putain c'est chaud ! Oh ? Et ben merde alors... Ça a toujours été capable de coller au plafond la bouffe ? Zu'Gash attend comme une conne sous le bout d'boustifaille. Ah ? Ça commence à bouger. Ça va tomber ! Ça tombe ! Elle ouvre grand sa gueule à crocs et...

"Plof !"

Un bout d'viande chaud collé d'sa bouche à son front. Elle tire alors la langue, l'enroulant autour d'l'aliment puis elle le tire avec un bruit dégueulasse avant d'le mâchouiller. Y'a comme un autre goût avec. Pas dégueu mais... C'est quoi ? Elle lève le pif et pige. Il reste un morceau d'toile d'araignée au plafond. Bon, ben elle a eu droit à un plat spécial : bout d'carne chaud et son coulis d'araignée. Faudrait qu'elle en parle aux gars qui s'occupent d'la bouffe au château ! Vu la taille d'la bâtisse, doit y'en avoir partout !

Elle rote un bon coup puis s'rend compte que Maya la mate avec un drôle d'air. Genre, elle hausse un peu le nez, comme si elle avait r'niflé l'pet d'un garzok qu'a bouffé du dégueulis. Et ça vient pas d'la peau-verte, pour une fois !

"Quoi ? T'veux l'reste ?"

Gros non d'la tête. La peau-verte hausse les épaules, s'accroupit et finit sa bouffe. Enfin presque. Aroroa lui tape sur la tête du côté droit, mais quand elle la mate, le piaf a changé de place et lui a chipé sa pitance. L'est rusée celle-la !

"Et tu f'sais quoi, là, Maya ?", fait-elle en se léchant les doigts, puis en choppant une gourde de flotte pour s'rincer la bouche.

"Je... Me formais."

"Gné ?"

"Un conseil de Dame Merilian."

"Pffff !", crache-t-elle brutalement. "Kof. Que... Hein ? Comment qu't'as dit ?"

"Dame Merilian ?", répète la petite en haussant un sourcil curieux.

"Dame Me... Ah ! Tu parles de Meriri ! Bwahaha ! Kof. Pourquoi tu lui sors des Dame à celle-la ?"

Là, la gosse fronce les sourcils.

"Elle est... Mon instructrice... Je la respecte."

"M'enfin, elle est même pas là !"

"Et ?", réplique la gosse en se tenant assise bien droite. Genre... Elle lui lance un regard d'gamine pas contente et qu'est sûre d'avoir raison, là. Ben putain, elle a bien changé la petite ces derniers temps.

"Bwarf. Fais comme tu veux, hein ? J'trouve ça con d's'faire chier à sortir des trucs d'ce genre quand y'a qu'nous deux."

"Rha !"

"Trois."

La gosse a l'air d'se calmer. Elle mate le parchemin encore une fois pis lève la main. Elle fait d'sa magie. Ça s'voit. Y'a comme des fumerolles toutes noires qui sortent d'sa peau.

"Oais... Et alors ? C'était quoi c'truc au juste ?"

"Difficile à expliquer. Je vais... Te le montrer.", dit tranquillement la petite brune en tendant les mains vers le sol.

Les yeux rouges matent, et elle attend un truc. Il s'passe rien... Mais alors, rien du tout... Eh... Mais au fait... Ils étaient là ces crânes tout à l'heure ? Elle y a à peine pensé que deux squelettes ont l'air d'sortir de trous invisibles. Y'en a un qui est vachement grand et voûté, pis il a une queue et une sorte de gourdin en bois. L'autre est un squelette d'humain, plus petit, mais avec un reste d'brassard.

Zu'Gash hausse un sourcil et met la main à son gourdin. Sauf que les trucs en nonos n'ont pas l'air d'vouloir s'castagner. En fait, ils s'tiennent près d'Maya qui s'lève avec d'grands yeux. Elle leur tourne autour doucement, et les crânes suivent ses déplacements. C'est marrant ! L'corps bouge pas d'un poil, qu'il n'a pas d'ailleurs, et la caboche tourne sur le cou. Ils ont l'air d'attendre, mais quoi ?

Maya pointe un coin de la cabane, et en grinçant, les guerriers en os s'y rendent. Et ils font pareil quand elle montre ailleurs.

"Ah ben ça !", lâche la peau-verte avant de sourire et de venir donner une tape dans le dos de la gosse. "Joli ! J'sais pas comment t'as fait mais..."

Un mouvement rapide. La garzoke esquive en faisant un pas en arrière. C'est le gros à gourdin qui a voulu lui en foutre une. Et l'autre a aussi l'air d'se préparer à la baston ! Oh chouette ! Mais quelle mouche s'rait assez conne pour piquer des squelettes ?

"Y s'passe quoi, là ?", demande-t-elle en choppant son arme.

"Un... Accident. Tu m'as presque fait tomber, alors..."

"Oh... Oh ? C'est genre tes protecteurs, ces choses ?"

"Oui...", répond-elle avant d'avancer et de se tenir entre ses trucs grinçants et elle. "Repos."

Et comme de gentils toutous, pas destinés à servir d'en-cas ceux-là, ils s'tiennent tranquilles. C'est bon à savoir, ça. La p'tite pourra s'entourer si y'a du grabuge quand elles s'ront en terre d'Omyre. Mais bon, ça, ce s'ra pas avant encore quelques jours d'marche !

Et dans les montagnes pas chaudes...

Et sur des ch'mins en zig-zags...

Et si ça s'trouve, sans avoir la chance de s'bastonner...

...

Fait chier.


(Après)

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Dernière édition par Zu'Gash le Jeu 17 Aoû 2017 19:21, édité 2 fois.

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 Sujet du message: Re: Route entre les Duchés des Montagnes et Omyre
MessagePosté: Ven 29 Avr 2016 15:59 
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Anastasie tapa l'épaule du paladin de sa botte, doucement. L'intéressé se retourna et leva vers elle des yeux endormis.

« Chef ? » murmura-t-il pour ne pas réveiller les autres.

C'était un grand blond aux cheveux mi-longs en bataille, approchant la trentaine sans la toucher. Il avait une musculature impressionnante malgré son corps élancé, de celles qui permettaient la force brut sans négliger la vitesse. Son équipement, posé à côté de lui pour la nuit, en était d'ailleurs la preuve : une armure relativement lourde, mais qui permettait des mouvements amples, et une claymore légèrement plus petite que la normale. Johan, car tel était son nom, était tacitement devenu le lieutenant d'Anastasie pour cette expédition, et avait vite acquis des responsabilités, ainsi que la confiance de la jeune femme. Il était l'un des plus expérimentés, malgré son jeune âge ; en fait, aucun des membres de la petite troupe n'avait atteint la trentaine d'été. Ca avait été là une décision partagée d'Adam et de la Comtesse de ne choisir que des personnes aux alentours de son âge, craignant tous deux que des vétérans remettent en cause son autorité. Pour autant, tous les participants étaient chevronnés et habitués à l'art du combat, et avaient reçu au moins un semblant d'éducation militaire.

Anastasie s'accroupit près de son lieutenant. Elle venait de prendre le second tour de garde, et tout le monde dormait autour d'eux. Pour autant, elle était en tenue de combat, ce que Johan remarqua immédiatement, lui tirant un regard inquiet.

« J'aurais peut-être dû t'en parler avant, » commença-t-elle à voix extrêmement basse, « mais il y a un intrus parmi nous. »

Son interlocuteur se redressa aussitôt, soudain alerte, mais elle le calma d'un geste de la main.

« Je me suis débrouillée pour qu'il ne puisse rien faire pour nous causer du tort jusqu'à présent. »
« Pourquoi ne pas m'en avoir parlé avant ? » demanda-t-il en regardant nerveusement tout autour de lui.
« Je ne savais pas comment tu te comporterais autour de lui si tu savais, je ne pouvais pas le risquer. Mais ce soir, je dois m'en occuper. C'est le moment parfait pour le faire. Mais je dois le faire seule. »

Il fronça les sourcils, ne comprenant pas ce qu'elle voulait dire par là.

« Pourquoi ne pas prévenir tout le monde ? Il n'aurait aucune chance à dix-huit contre un. »

Anastasie grimaça.

« Parce que c'est Ulric. Les autres ne me font pas assez confiance pour me croire sur parole, ils ne voudraient jamais voir la vérité sans preuve. »

Car l'homme qu'elle savait être un ennemi avait infiltré un groupe de huit. Huit compagnons d'arme, qui avaient déjà participé à de nombreuses campagnes et missions ensemble, et qui ne décideraient jamais de croire Anastasie plutôt que l'un des leurs. Il avait d'ailleurs très probablement choisi l'un de ceux-là pour cette exacte raison. Johan comprit également, et pesta un murmure de mécontentement.

« C'est pour ça, » continua-t-elle. « J'ai besoin que tu prennes mon tour de garde pendant que je l'éloigne. Je m'occuperai de lui, et tu dois faire en sorte que personne ne nous suive. »
« Tu es absolument sûre qu'il est un ennemi ? »
« Certaine, » affirma-t-elle. « Fais-moi confiance. »

Le lieutenant de la jeune femme secoua la tête, réfléchissant. Il semblait vouloir protester, peu à l'aise à l'idée de la laisser s'éloigner seule avec l'ennemi, mais ne voyait pas d'autre alternative.

« Tu vas... le tuer ? » demanda-t-il finalement.
« Il est déjà mort, » rétorqua-t-elle. « Il était déjà mort lorsqu'il nous a rejoint. Je ne vais faire que rendre à son corps l'inertie qu'il mérite. »

Si son interlocuteur ne semblait pas tout comprendre, il ne posa pas plus de question pour autant. Il avait avant tout une confiance aveugle en Adam, tout comme en son jugement, aussi quelques mots de celui-ci et une poignée de jours de voyage avec Anastasie avaient suffis à le convaincre qu'il pouvait avoir foi en elle. Il était également le plus militaire d'entre eux, ayant passé plus de trois ans dans l'armée avant de se tourner vers la branche armée du culte de Gaïa ; lorsqu'un supérieur lui demandait de sauter, il sautait.

« Je vais devoir m'éloigner très loin pour éviter que l'on nous entende. Si quoi que ce soit arrive, tu es en charge jusqu'à ce que je revienne. »

Elle s'apprêta à se redresser, mais il attrapa vivement son bras pour l'en empêcher.

« Lorsqu'il sera... battu, il y aura un moyen de prouver qu'il n'est pas Ulric ? On pourrait s'en occuper dans son sommeil ! »

Mais la jeune femme secoua la tête.

« Effectivement, il laissera des traces, mais j'ai des questions à lui poser d'abord. »
« Mais elles ne peuvent pas être assez importantes pour que tu risques de... »
« Assez ! » le coupa-t-elle avec fermeté. « Ces questions sont importantes. Et de toute façon il ne dort pas. Il ne dort jamais. »

Sans attendre de réponse, elle se releva finalement et se dirigea vers la silhouette de l'intrus. Arrivé à sa hauteur, elle s'accroupit de nouveau et le secoua doucement, comme pour le réveiller.

« Ulric, » appela-t-elle.

L'intéressé tourna vers elle des yeux faussement endormis. Il était censé être l'un des guerriers les plus expérimentés de l'expédition. Cela donnait une excuse toute trouvée à Anastasie pour l'éloigner.

« J'ai besoin de toi, » fit-elle. « J'ai repéré des lumières qui se déplaçaient dans la direction que l'on prend. Il faut aller voir ce que c'est. »

Le guerrier, un grand brun à la barbe foisonnante, se redressa, et attrapa sa cuirasse.

« Il ne faudrait pas réveiller les autres ? » demanda-t-il. Mais la jeune femme secoua la tête.
« Tant que l'on ne sait pas si on doit s'inquiéter, je préfère les laisser se reposer. J'ai demandé à Johan de monter la garde en notre absence, il saura quoi faire si on ne revient pas. »

L'excuse tenait parfaitement la route, et ils se relevèrent tous deux rapidement. Pour autant, elle savait qu'il savait qu'elle savait. Ou plutôt, elle savait qu'il se doutait qu'il était percé à jour. Il avait beau être l'un des guerriers les plus habiles de l'équipée, quelles étaient les chances pour qu'elle le réveille en pleine nuit pour qu'ils s'écartent tous deux du campement sans personne d'autre que son bras droit pour les voir partir ? Mais, tant qu'elle ne disait rien, tant qu'elle ne faisait rien, il n'avait pas vraiment d'autre choix que de la suivre. En fait, régler cela entre eux seulement était une option qui arrangeait autant l'un que l'autre.

Une fois préparé, le faux Ulric fit signe à la jeune femme qu'il était prêt, et ils quittèrent tous deux le campement sous le regard inquiet de Johan. Ils se pressaient, sous le prétexte qu'il fallait rattraper les lumières qu'elle avait vu, mais leur expédition dura cependant de longues minutes, pendant lesquelles ils crapahutèrent à travers les sentiers rocailleux, tâtonnant là où la route disparaissait, escaladant là où elle était barrée d'éboulis, jusqu'à ce que, las, le guerrier aux cheveux de jais ne l'arrête.

« C'est bon, j'ai compris, » fit-il. « Il me semble qu'on est assez loin. »

Anastasie se stoppa et lui fit immédiatement face. Tous deux dégainèrent leur arme.

« J'ai des questions, » lui annonça-t-elle, Perçombre baissée en signe de trêve provisoire.
« Et moi aucune raison d'y répondre. »
« On peut bien en trouver une. »
« Si tu sais ce que je suis, alors tu sais que ma loyauté à Tal'Raban est sans borne. »

La jeune femme leva les yeux au ciel. Elle s'était doutée que ce ne serait pas une tâche aisée. Les Ombres, car telle était son identité, étaient des âmes espionnes du grand Nécromancien qui ne connaissaient que le dévouement pour leur maître.

« Mes questions ne peuvent pas le mettre à mal, » argumenta-t-elle.
« Ce n'est pas une raison suffisante pour y répondre. »
« Tu ne veux pas savoir comment je t'ai percé à jour ? » demanda-t-elle.

Le simulacre d'homme fronça les sourcils. Ces créatures, malgré quelques traits de caractère formatés par leur seigneur, n'en avaient pas moins une personnalité complexe, propre, et similaire à celles des humains. Sa curiosité semblait piquée.

« Pose tes questions, on verra bien si elles sont si inoffensives. »

Anastasie hocha la tête.

« Depuis combien de temps es-tu dans ce corps ? »

Le faux Ulric sembla hésiter quelques secondes, comme jugeant de la confidentialité de l'information, avant de répondre.

« Un peu plus de deux semaines. Quelques jours après que tu aies fait exorciser Alban. »
« Et vous aviez déjà prévu qu'Adam ferait appel à des paladins pour moi ? » s'étonna-t-elle.
« Non, nous n'en avions aucune idée. Tant que tu restais à Kendra Kâr, tu n'étais pas une menace pour Tal'Raban. J'ai justement été envoyé au cas où tu aurais un jour eu besoin d'escorte. Donc au cas où tu serais un jour devenu plus dangereuse qu'une simple noble qui joue à la chasse aux sorcières. »

Anastasie retint un soupir de soulagement. Ce pouvait être un mensonge, mais cela coïncidait avec le moment où elle avait appris qu'un espion tenterait de l'atteindre ; elle pouvait être pratiquement certaine, maintenant, qu'il n'y avait pas d'informateur à l'intérieur du Temple de Gaïa de Kendra Kâr. Et c'était là la raison principale de ses questions. La raisons principale pour laquelle elle ne l'avait pas attaqué par surprise. Il fallait qu'elle sache.

« A moi, » fit-il. « Depuis quand sais-tu que je suis une Ombre ? »
« Depuis que je t'ai vu, » répondit-elle tout naturellement. C'était une information qui ne pouvait pas vraiment lui faire défaut.
« Alors pourquoi ne pas t'être débarrassée de moi plus tôt ? » demanda-t-il en fronçant les sourcils.

Un léger sourire en coin accueillit sa question.

« Deux jours, » déclara-t-elle, son rictus s'intensifiant quelque peu. « C'est le temps qu'il faut à ton âme pour se reconstituer après avoir été éjectée de force d'un corps. Et c'est le temps qu'il nous faudra, à partir de maintenant, pour récupérer le bouclier d'Isaac et nous éloigner assez pour être hors de portée de la plus proche patrouille. »

L'espion hocha la tête, grimaçant. Il comprenait. Si elle l'avait démaqué plus tôt, cela lui laissait le temps de prévenir Tal'Raban avant qu'elle n'arrive. Si elle s'en était occupée plus tard, il aurait pu leur attirer des ennuis, comme en les faisant repérer par une créature ou une patrouille. C'était le moment idéal, au jour près, pour se débarrasser de lui sans qu'il n'ait servi à quoique ce soit. Il ne pourrait informer son maître que plus tard, une fois reconstitué, et si il perdait son duel face à elle, il n'aurait causé aucun dommage.

« Et comment savais-tu que j'étais une Ombre ? » demanda-t-il finalement.

Cette fois, cependant, elle resta muette. Elle l'avait su grâce à Râle de Nuit, un Gentâme qui lui était apparu. Il avait alors fait mention d'un « homme au regard noir ». Elle avait d'abord pensé à une chitine, ces créatures de Vallel qui possédaient, eux aussi, le corps des morts, et avaient les yeux entièrement noirs. Mais bien vite, elle avait décidé de se renseigner sur les Ombres, choix bien plus logique pour Tal'Raban, mais s'était retrouvé devant un problème : ceux-ci, lorsqu'ils intégraient un corps, ne laissaient aucune trace physique tant qu'ils ne quittaient pas leur hôte. En rencontrant Ulric, cependant, elle avait compris le message du Gentâme : ses iris, depuis qu'il avait été touché par un sort d'ombre en plein visage, avaient pris la couleur de la nuit.

« Une question chacun, » fit-elle pour seule réponse. « J'en ai posé une, tu en as posé une, je ne te dois plus rien. »

L'Ombre serra les dents de colère et redressa son arme devant lui.

« C'était pas le marché, sale pute. »

Mais pour seule réponse, Anasasie releva Perçombre. Elle n'avait pas l'intention de révéler sa source d'information à l'ennemi. Tant qu'il ne savait pas que Râle de Nuit l'informait, il ne pouvait pas prendre de mesure contre cela. Et le Gentâme lui avait promis qu'ils se reverraient.

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MessagePosté: Lun 2 Mai 2016 14:23 
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((( [:attention:] Un peu crasseux sur la fin [:attention:] )))



Un coup plongeant de l'épée longue de l'Ombre marqua le début de l'affrontement. Anastasie dévia légèrement l'arme de son adversaire en faisant glisser Perçombre de long de la lame, et se décala d'un pas sur le côté pour contre-attaquer immédiatement. Mais malgré sa corpulence massive, le corps d'Ulric se montra d'une agilité étonnante, et le coup horizontal de la jeune femme ne rencontra que l'air. La Comtesse grimaça. Elle avait toujours combattu à l'épée courte, et si elle avait pu faire quelques moulinets avec sa nouvelle arme avant ce jour, c'était la première fois qu'elle se servait d'une rapière en combat réel. Et les différences étaient nombreuses. L'arme d'Ulric s'abattit de nouveau dans sa direction, mais elle recula prestement, avant d'avancer la pointe de son épée vers l'épaule de son assaillant. L'acier rata l'interstice qu'elle visait, et ripa sur l'épaulette de l'Ombre sans occasionner le moindre dommage.

Les passes se succédèrent pendant ce qui sembla durer une éternité à Anastasie, mais jamais un coup ne vint blesser l'un ou l'autre des opposants. Cependant, il devint vite clair qu'Ulric était légèrement supérieur. Non pas techniquement, car c'était là la spécialité de la jeune femme, mais physiquement. En plus d'être bien plus fort qu'elle, et presque aussi vif, l'avantage du serviteur de Tal'Raban résidait dans son endurance ; après des dizaines d'intenses échanges, la Comtesse commençait à s'essouffler, quand son adversaire affichait encore une forme étonnante. Il l'aurait à l'usure. Ou du moins, c'est ce qu'il semblait penser, et la Comtesse prit bien soin de ne pas le démentir.

Ainsi, pendant la poignée de minutes qui suivit, l'Ombre s'échina à épuiser plus encore la théurgiste, taillant, estoquant, parant, sans jamais prendre de risque inutile, et drainant peu à peu son énergie vitale. Et Anastasie le laissa faire, haletant de plus en plus souvent, de plus en plus durement, alors que son adversaire commençait à montrer quelques signes de fatigue notables. Dans ce corps, il était soumis à la même endurance que son hôte, et si celle-ci était grande elle n'en restait pas moins limitée.

Finalement, lorsque l'efficacité de la jeune femme diminua sous les effets de l'épuisement, la stratégie de l'Ombre changea. En une seconde, il devint plus agressif, plus entreprenant. Et c'est cette seconde que choisit Anastasie pour renverser la situation à son avantage. Elle esquiva un assaut de son adversaire, plaqua sa main gauche contre son buste, et fit appel à sa magie. C'était le même sort qu'elle avait utilisé avant son duel contre la banshee, quelques jours plus tôt. Un concentré pur d'énergie, qui se manifesta sous la forme de fluides le long de son bras, avant de couler sous la forme de magie dans ses veines. Lorsque l'Ombre attaqua de nouveau, sans avoir la moindre idée de ce qu'il venait de se passer, Anastasie esquiva sans problème le coup et contre-attaqua immédiatement avec une vivacité que son ennemi n'avait pas anticipée. La pointe de Perçombre passa dans l'interstice de son aisselle droite.

L'Ombre s'écarta vivement, d'un bond sur le côté, mais il avait été grièvement handicapé par l'attaque, même si la lame n'avait pénétré que peu profondément dans sa chair. Il grimaçait de douleur, et avait du mal à tenir son épée levée de son membre blessé ; des gouttes de sueur coulaient le long de son front pour ruisseler dans son épaisse barbe brune, et ses halètements de fatigue s'étaient intensifiés. De son côté, Anastasie ne montrait plus le moindre signe d'épuisement.

« Tu peux me tuer, » articula l'autre, difficilement, « mais je reviendrai. »
« Toi, un autre, peu m'importe. Il y aura toujours des Ombres pour venir m'emmerder. Ce qui m'importe, maintenant, c'est de te mettre hors d'état de nuire juste assez longtemps pour récupérer le bouclier. »

L'Ombre afficha un rictus, presque triomphant.

« Justement, je reviendrai avant que tu le récupères. Plus fort, tu verras. Et tes ruses ne marcheront plus. »

Anastasie cacha sa surprise. Elle avait calculé son coup pour qu'il ne soit pas en mesure de donner la moindre information à Tal'Raban avant leur départ, mais il semblait avoir une idée en tête.

Chassant ces idées de la tête, elle raffermit sa prise sur Perçombre. Elle aurait bien le temps de s'inquiéter de cela plus tard, et poser des questions serait inutile. Il fallait mettre fin à l'affrontement. Elle s'avança rapidement de son adversaire, qui leva maladroitement son membre blessé pour parer le coup de taille. Elle avait beau nommer cela une rapière, ce n'en était pas tout à fait une, et elle était aussi tranchante que pointue. Pour autant, face à une épée lourde comme en possédait Ulric, ses assauts manquaient de force, et malgré la faiblesse de son bras, il parvint à repousser l'attaque de la jeune femme avec un cri de douleur. La jeune femme recula de deux pas, toujours aussi sûre d'elle. Il avait perdu l'avantage en voulant jouer la prudence et la facilité, elle ne commettrait pas la même erreur. Elle allait finir ce duel avec sa prochaine attaque.

Elle recula sa jambe droite et plia légèrement la gauche, pour se donner à la fois un appui solide et une puissance de propulsion supplémentaire, et colla son bras armé contre ses côtes. En face, l'autre changea son arme de main pour pouvoir parer plus facilement, mais il n'aurait jamais le temps de l'arrêter. Elle appela son énergie vitale, cette puissance physique qu'elle avait appelée pour bénir son épée face aux mort-vivants, quelques jours auparavant, et la contrôla de la même manière qu'elle contrôlait ses fluides. Une partie de sa puissance vint se déplacer jusqu'à sa jambe gauche, celle qui la propulserait. Le reste se concentra dans la bras droit, armé de la rapière. Ses muscles se chargèrent de toute la puissance qu'elle leur avait donné, prêt à s'allonger dans un même mouvement. Elle voyait, dans son esprit, l'énergie raidir ses membres alors qu'ils se détendaient pour mieux s'approcher de sa cible. Leur donner toute la force nécessaire pour l'atteindre en moins d'une seconde, pour que la rapière transperce de part en part le corps possédé d'Ulric. Et c'est exactement ce qu'il se passa. La jambe d'Anastasie la propulsa en avant, et au dernier moment l'énergie apporta sa contribution en accélérant drastiquement sa vitesse. Puis le bras de la jeune femme plongea en avant, alors que cette étrange puissance venait en cadrer à la fois la précision et la force. Et lorsque l'Ombre releva son épée pour dévier la lame sacrée, il était déjà trop tard.

Anastasie retira Perçombre presque immédiatement, alors que son adversaire tombait à genoux, des gargouillis de bave rougeâtre s'échappant de ses lèvres. D'un simple mouvement, elle lui trancha la gorge, éclaboussant les pierres et cailloux du sentier d'une substance visqueuse. Le corps d'Ulric tomba à la renverse, et bientôt c'était une véritable mare de sang qui s'écoulait le long du chemin. Elle semblait noire, ainsi éclairée par la lune.


(((Tentative d'apprentissage de la CCAA : Estoc droit Une jambe en retrait pour stabiliser votre appui, l’autre s’élance vivement en avant. Vous frappez alors avec énergie votre adversaire dans le but de le transpercer (For+2/lvl))))

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Dernière édition par Anastasie Terreblanc le Mar 3 Mai 2016 10:16, édité 1 fois.

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MessagePosté: Lun 2 Mai 2016 14:49 
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« Vous vous foutez de moi ?! »

Anastasie grimaça devant la véhémence de Camille. Elle s'était attendue à pareille réaction, mais ça n'en restait pas moins délicat à gérer.

« Où est-il ?! »
« Calme-toi, » essaya-t-elle pour l'apaiser, mais l'intéressée balaya sa tentative d'un geste de la main.
« Je me calmerai quand vous m'aurez prouvé qu'il était bien possédé ! »

Après son affrontement avec l'Ombre, Anastasie était rentrée au campement, mais elle avait attendu le petit matin pour expliquer la situation à ses compagnons de route. Mais voilà qu'elle était confrontée à Camille, plus ou moins la chef de ce groupe de huit qui voyageaient très souvent ensemble. Par chance, les autres semblaient trop déboussolés et choqués pour dire quoique ce soit, mais la jeune femme n'en restait pas moins un obstacle de taille. Il faudrait la convaincre elle si elle ne voulait pas se retrouver avec tout le groupe sur le dos.

« Je n'ai pas pu le déplacer, » répondit Anastasie. « Je l'ai bougé du sentier, mais il est quand même sur notre chemin. Je vous laisserai examiner son corps puis nous lui ferons une sépulture. »

Son ton était calme et apaisant, mais ferme. Elle espérait le message clair : ce n'était pas une proposition mais un ordre.



Camille inspecta le cadavre de son compagnon d'armes, les dents serrés pour contenir le flux d'émotion qui l'assaillait sans aucun doute. Elle regardait en particulier les traces noires autour de la bouche et des yeux de son ami. Lorsqu'Anastasie l'avait vaincu, l'Ombre s'était échappée par là, laissant des marques bien visibles et spécifiques pour prouver sa présence, avant de s'enfuir vers l'horizon. Après avoir vérifié, suspicieuse, que les traces étaient indélébiles, et n'étaient donc pas un artifice de sa supérieure, la jeune femme se tourna vers la Comtesse, le visage fermé. Elle ressemblait étrangement à une Anastasie aux cheveux marrons, qui était la couleur de sa chevelure avant que les fluides de Lumière ne lui tombent sur le haut du crâne. Le visage de Camille, cependant, était plus dur, et un peu plus masculin, que celui de sa supérieure, signe de son éducation toute martiale. Elle avait, contrairement à Anastasie, toujours porté l'épée, et elle avait dès le début du voyage exprimé tacitement quelques réserves à l'idée d'être dirigée par celle-ci. Cet acte, que la Comtesse s'était sentie obligée d'exécuter dans son dos, était celui qui marquerait la perte totale de confiance de sa subordonnée en ses commandements. Et les conséquences, comme elle allait s'en rendre compte, seraient désastreuses.

L'enterrement, à quelques mètres du sentier, au détour d'un virage pour que la sépulture soit invisible depuis la route, ne dura que quelques minutes. Ils déposèrent le cadavre à même le sol, le couvrirent de pierres, Camille murmura quelques prières à Gaïa, puis à Phaïtos, et ils s'en allèrent.

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Officiellement dans le Royaume de Mertar, officieusement dans l'Empire Oaxien, la route qu'ils empruntaient était un genre de zone intermédiaire. En plein front, les patrouilles thorkins et garzoks s'y baladaient pour débusquer d'éventuels intrus, mais aucune des deux armées ne pouvait y envoyer des troupes trop importantes sous peine d'être immédiatement repérée par les éclaireurs ennemis et d'engager un combat sanglant. Aussi, le sentier était aisément praticable pour une petite escorte de la taille de celle que commandait Anastasie, et les chances de rencontrer des orcs en nombre important étaient infimes. Mais pas inexistantes.

C'était la fin de l'après-midi, et ils s'apprêtaient tout juste à sortir du pied de la montagne Nirtimoise, lorsqu'ils les aperçurent. Des sektegs et des garzoks, à pieds, qui semblaient patrouiller la zone. Ils n'étaient qu'une trentaine, et rares étaient ceux qui semblaient d'une quelconque dangerosité pour une troupe telle que la leur, mais pour plusieurs raisons, les affronter pourrait s'avérer catastrophique pour les paladins et prêtres, Anastasie le savait.

« A couvert ! » leur intima-t-elle à voix basse en se dirigeant elle-même derrière un petit flanc de montagne. Puis, lorsqu'ils furent tous bien hors de vue des éclaireurs Omyriens : « Pieds à terre, nous ferons trop de bruit à cheval, et si nous engageons une escarmouche ils ne nous aideront pas. »

Le terrain, encore trop escarpé et irrégulier, se prêtait en effet bien plus aux infanteries qu'aux cavaliers, d'où l'absence de monture chez leurs ennemis.

« Armand, » appela-t-elle ensuite. « Va voir. »

Le jeune homme qu'elle avait appelé, un petit brun chétif, était le seul de la troupe plus ou moins habilité à se déplacer furtivement. Il était un peu leur éclaireur. A ses ordres, il s'avança légèrement, se collant à la paroi rocheuse et ne faisant dépasser que sa tête pour observer les mouvements des troupes ennemies.

« Ils s'approchent ! Ils vont nous voir en passant ! » murmura-t-il à Anastasie, quelque peu paniqué.

Celle-ci grimaça, avant de lancer ses ordres :

« En formation ! Fantassins devant, boucliers levés, Armand et les mages derrière ! On attend qu'ils lancent leurs premiers sorts avant de venir au contact. »

Cette formation était avant tout basée sur la prudence. S'ils s'en référaient au niveau moyen du péquin lambda des troupes Omyriennes, ainsi qu'au niveau individuel des membres de leur expédition, engager les ennemis eux-mêmes étaient une alternative qui pouvait paraître tout à fait pertinente. Seulement, factuellement, ils ne connaissaient la force d'aucun de leurs ennemis, et ceux-ci étaient probablement bien plus habitués qu'ils ne l'étaient à agir au sein d'une même unité. Ce simple facteur intimait Anastasie, qui comptait bien préserver la vie de chacun de ses sous-fifres, à la prudence.

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 Sujet du message: Re: Route entre les Duchés des Montagnes et Omyre
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((( [:attention:] Attention, un peu gore [:attention:] )))


Terribles sont les conséquences de la perte de confiance d'un lieutenant envers son commandant. En particulier lorsqu'ils surviennent au cœur de la bataille.

C'est cette dure réalité qui allait marquer cet affrontement, car, jugeant Anastasie inapte à commander, Camille prit soin de donner des contre-ordres aux troupes immédiatement.

« Non, ils sont plus faibles, on les aura rapidement si on attaque par surprise ! Suivez-moi ! » fit-elle.

Cependant, seuls ses hommes, qui lui étaient fidèles, la suivirent, et elle se retrouva bientôt menant la moitié de l'infanterie au croisement d'où apparaissaient tout juste les premières têtes garzoks, sous les yeux médusés de la Comtesse, qui leur ordonnait sans succès de revenir. Et si les deux stratégies auraient pu se montrer efficaces, ce mélange improvisé des deux ordres ne résulta en rien de bon. Lorsque Camille se rendit compte qu'elle n'avait emporté avec elle que cinq fantassins, il était trop tard, et l'escarmouche éclatait déjà. Les mages de l'équipée, gênés par la présence de leurs alliés au front, ne purent envoyer leurs sorts les plus puissants, et durent se contenter de faibles attaques guère plus efficace que des flèches. Immédiatement, et pour rattraper la faute de sa subalterne, Anastasie fit signe au reste de l'infanterie de la suivre pour supporter leurs alliés en première ligne, mais en moins de temps qu'il n'avait fallu pour le dire, trois d'entre eux étaient déjà morts, écrasés par des ennemis en nette supériorité numérique. Pour ne rien arranger, lorsqu'enfin toute la troupe de corps à corps se retrouva contre les fantassins garzoks, ils découvrirent les dernières lignes Oaxiennes, une dizaine de sektegs armés d'arcs et d'arbalètes qui les prenaient pour cibles.

Après avoir débarrassé les lignes ennemis de deux épéistes orcs plutôt faiblards, Anastasie de tourna vers les mages et l'éclaireur, restés derrière.

« Ici ! » ordonna-t-elle en pointant une direction en amont du sentier sur lequel l'affrontement avait lieu. « Ecrasez les archers, puis en support ! »

Elle retourna immédiatement à la mêlée, où le rapport de force commençait peu à peu à se stabiliser, et pourfendit un troisième garzok en quelques coups de rapière. Ils étaient, comme elle s'y était attendu, faibles, individuellement, mais ils étaient toujours près d'une vingtaine pour affronter neuf fantassins, affichant un rapport de deux pour un que peu des siens étaient capables de réellement tenir. Cependant, et elle n'aurait su dire si c'était pour le mieux ou non, le plus gros et le mieux armé des orcs, se positionnant comme chef, ordonna à quelques uns d'entre eux de la prendre pour cible, ayant visiblement compris qui dirigeait les opérations. Les archers, eux, s'étaient finalement rabattus sur les mages et l'éclaireur, depuis que ceux-ci avaient commencés à les canarder. Aussi, Anastasie n'avait plus qu'à s'occuper de la supériorité numérique de ses adversaires pour leur assurer une victoire sans plus d'accroc.

Décidant de profiter de l'occasion pour débarrasser quelques garzoks de la mêlée principale, la jeune femme s'écarta du front pour attirer les quatre orcs, armés de haches, vers elle.

« Johan ! » ordonna-t-elle à son lieutenant. « Tu es en charge de la mêlée ! »

En quelques pas chassés, elle avait ramené les fantassins dans le renfoncement dans lequel elle avait caché ses troupes deux minutes auparavant, se mettant ainsi à l'abri des archers, qui ne manqueraient pas de la voir s'isoler pour la prendre en cible, mais en se maintenant à la vue des mages de sa propre équipée, qui pourraient ainsi, en cas de besoin, la supporter.

Alors que les orcs s'approchaient à grandes enjambées, elle engagea le combat d'un trait de lumière, qui toucha le premier au visage, le faisant basculer dans un grognement de douleur. Profitant de leur formation brisée, elle s'avança immédiatement pour toucher par surprise le plus proche d'entre eux aux côtes, plongeant l'acier de Perçombre à travers une interstice de sa cuirasse. L'Omyrien poussa un râle de souffrance mais, vigoureux, contre-attaqua aussitôt d'un coup de hache, obligeant la jeune femme à bondir en arrière pour l'esquiver. Sa rapière l'avait grièvement blessé, mais il pourrait toujours se mouvoir, la laissant à une contre quatre, au vu du dernier qui se relevait péniblement. Elle grimaça. Ils n'étaient qu'amateurs en tant que duellistes, ne sachant que mouliner grossièrement et sauvagement, mais, musclés et endurants, leur condition physique ne permettrait pas de s'en débarrasser aisément.

Bien vite, les trois en première ligne attaquèrent d'un même geste, coupant le fil de pensées de la jeune femme. Leurs mouvements, heureusement, étaient bien patauds, et elle n'eut qu'à s'avancer pour prendre le blessé par surprise et ainsi esquiver leurs assauts, enfonçant son épaule dans les côtes, déjà douloureuses, du plus faible. Celui-ci se plia sous la peine, et elle passa prestement derrière lui pendant que les deux autres se retournaient dans le but de la reprendre en charge. Seulement, elle était maintenant coincée entre eux et le quatrième, complètement remis malgré la brûlure qui barrait maintenant son visage. Choisissant de réitérer sa première attaque, elle envoya un nouveau trait de lumière, à sa puissance minimale, vers le combattant seul. Elle visa néanmoins ses pieds, l'obligeant à bondir en arrière pour l'esquiver, en profita de ce moment pour réduire l'écart qui les séparait, et semer momentanément les trois autres. Seul, et surpris par l'attaque soudaine, le dernier garzok n'eut pas le temps de parer l'attaque qui allait lui être fatale. Il se retrouva bientôt avec Perçombre en travers du crâne, et sa matière grise, rougie par le sang, dégoulina dans un bruit répugnant lorsqu'Anastasie retira vivement la lame. Lorsqu'elle se retourna, les trois orcs étaient presque sur elle. L'un d'eux avait beau être blessé, elle savait que sa ruse de plus tôt ne fonctionnerait pas de nouveau, et l'affrontement s'annoncerait tendu.

( La magie, ) conclut-elle, sereine.

S'en étant servi, jusque récemment, uniquement comme moyen de guérison, elle ne connaissait encore qu'un seul sort offensif, mais elle avait su improviser plus d'une fois, et cela avait toujours suffi à renverser les situations.

Aussi se concentra-t-elle immédiatement. Elle n'avait qu'une poignée de secondes, mais ainsi tournée vers son for intérieur, elle savait que le temps n'avait plus vraiment de prise. Alors elle imagina. Elle imagina ses fluides de manière concrète, palpable, comme une boule de lumière parfaitement sphérique à l'intérieur d'elle-même. Elle extirpa une petite partie de cette boule, et la manipula. D'abord la forme. Dans son esprit, les fluides qu'elle avait récupérés se scindèrent en deux, deux traits de lumière plus ou moins semblables à son attaque offensive. Elle ne parvenait pas à en faire plus avec une telle quantité d'énergie. Ensuite le dessein. Les traits de lumière commencèrent à briller. Plus que son attaque habituelle. Ils scintillèrent, et scintillèrent, et scintillèrent, jusqu'à en devenir si puissants, si lumineux, que regarder en leur centre brûlerait plus encore la rétine qu'un regard direct vers le soleil. Jusqu'à devenir aveuglants. Pour finir, le mouvement. Elle leva son bras gauche devant elle, paume relevée, et imagina la trajectoire de son sort. Il passerait le long de son membre jusqu'à être éjecté par sa main. Scindé en deux, les rayonnements se précipiteraient sur les visages des deux ennemis les plus en forme, n'épargnant que le troisième, au centre, blessé. Mais il lui fallait faire une dernière chose. Sans quoi son sort ne se matérialiserait pas. Sa magie était là pour aider, pour secourir, pas pour blesser. Aussi fallait-il leur « expliquer » le pourquoi de cette action. Et elle ajouta, pour terminer, une intention à son sort. Celle d'aider au plus vite ses compagnons en danger. En les aveuglant, elle pourrait se porter à leur secours, et les empêcher de mourir. Ses fluides le comprirent, et se formèrent. Elle était prête. Enfin.

Elle ouvrit les yeux, prenant juste conscience de les avoir fermés, et appliqua ce qu'elle venait d'imaginer. Son bras était déjà relevé, lui, seule action concrète de sa transe. Au vu de la nouvelle position des garzoks, il ne s'était pas déroulé plus de deux secondes, et ils ne se doutaient encore de rien. Alors elle relâcha les fluides. Ils traversèrent à une vitesse vertigineuse son membre, jusqu'à ressortir, formés tels qu'elle les avait imaginé, par sa paume dressée. Puis, semblables à des éclairs de lumière, ils foncèrent en une fraction de seconde jusqu'aux rétines des deux orcs valides.

Les fantassins s'arrêtèrent aussitôt, se prenant leur visage dans leurs mains en criant de douleur. Le sort leur avait brûlé la rétine. Le troisième, surpris, se tourna vers eux sans comprendre, et ce fut sa dernière erreur. En un bond, Anastasie était sur lui. Et Perçombre en lui. Dans sa gorge. Il éructa du sang, à la fois par le cou et par les lèvres, alors qu'elle délogeait son arme de son corps. Celui-ci tomba, inerte, alors que ses alliés commençaient tout juste à rouvrir les yeux. Elle ne leur laissa cependant pas plus de temps, et s'approcha du plus proche d'entre eux avant qu'il ne reprenne possession de ses moyens. Une première taillade vint mordre profondément son avant-bras, lui faisant lâcher une de ses haches dans un grognement de douleur. Une seconde vint couper son genou juste sous l'os, tapant le haut du tibia ; son membre blessé, sous son poids, plia, ne le supportant plus. La jambe afficha une position particulièrement anormale alors qu'il tombait en un affreux hurlement de douleur.

Le considérant absolument hors d'état de nuire, Anastasie se tourna pour faire face à ce qui aurait dû être son dernier adversaire. Seulement il ne l'était pas. A ses côtés se tenait le chef, armé d'un large espadon et d'une épaisse cuirasse.

« Tu rendre ou tu mourir ! » baragouina-t-il en langage commun.

Mais pour seule réponse, Anastasie envoya un trait de lumière de faible intensité entre eux. Ils se séparèrent d'un bond, et elle en profita pour se précipiter sur le sous-fifre, désirant s'accorder un duel avec ce qui semblait être un adversaire redoutable. Elle ne voyait pas bien l'affrontement du reste des troupes de sa position, aussi aurait-elle voulu en finir au plus vite pour les rejoindre ; d'un autre côté, le chef garzok lui demandait une reddition, aussi pouvait-elle espérer une domination naissante de la part de ses hommes, sans quoi il ne se serait pas embarrassé de tels préambules.

Arrivant à la hauteur du guerrier aux haches, la théurgiste asséna un coup de rapière en direction de son visage. Elle avait cependant voulu être trop expéditive, et son attaque, précipitée, fut déviée sans souci. Elle continua quelques assauts, réussissant finalement à blesser le garzok à l'épaule, mais son supérieur était déjà sur elle, secourant son soldat d'un puissant coup d'espadon, qu'elle évita d'un bond en arrière. Il dépassait certainement les deux mètres, et son armure, bien qu'imposante, ne parvenait pas à cacher la puissance de sa musculature. Pour autant, ses talents de bretteur laissaient clairement à désirer, trop habitué qu'il était à user de sa force. Pour ce qui n'était certainement pas plus qu'un sergent, et affecté à une patrouille le long de la frontière thorkin, ce n'était cependant pas surprenant. Il ne devait que très rarement avoir à se battre, et contre des guerriers qui misaient eux aussi plus sur la puissance que la vivacité. En d'autres termes, ils étaient tombés sur une troupe de seconde zone. Ils n'auraient jamais dû essuyer de pertes contre de tels pantins, et Anastasie jura entre ses dents à l'encontre de Camille. Mais, pour le moment, ce n'était pas à elle qu'elle avait à faire.

A peine l'espadon de son adversaire toucha-t-il le sol qu'elle s'avança de nouveau, pointe vers son visage dénudé. Peu habituée qu'elle était à manier Perçombre, et contre un ennemi si haut, elle méjugea cependant son allonge, et le garzok se contenta d'un petit mouvement de recul pour éviter l'attaque. A ses côtés, le second orc en profita pour l'assaillir, et elle n'eut d'autre choix que de s'éloigner en vitesse des deux Omyriens. Le plus gros des deux bouscula l'autre en crachant quelques mots en patois, l'engueulant certainement de l'avoir loupée, puis ils se remirent en position devant elle.

( Ca commence à m'énerver. Je vais terminer ça dare-dare, tant pis pour les blessures. )

Elle releva Perçombre devant elle, en position de combat, et s'avança à toute allure. Aussitôt fut-elle à leur portée que les garzoks attaquèrent, de leur trois armes. Mais Anastasie bondit sur sa gauche, prenant le chef à revers, et, levant sa main libre vers l'articulation de son genou, manipula ses fluides jusqu'à en faire sortir un trait de lumière d'une puissance considérable. Le sort s'infiltra dans l'interstice de l'armure de l'orc, et lui fit plier le genou dans cri de surprise et de douleur. Son visage ainsi à sa hauteur, elle agrippa son arme à deux mains et effectua un mouvement rotatif de toutes ses forces vers la nuque du sergent, qui craqua sous l'impact. La lame resta cependant coincée en plein milieu du cou de sa victime, et elle n'eut d'autre choix que de la lâcher pour éviter la hache qui s'abattait maintenant sur elle. Le tranchant effleura son bras valide, traçant un sillon dans sa chair et lui tirant une grimace de douleur, mais elle s'en tira sans plus de heurt. Le garzok, ne poursuivant pas ses assauts, se tourna vers son chef, apparemment choqué de le voir ainsi perdre la tête dans un sens si littéral. Il le secoua vivement, comme ne croyant pas à son trépas, et c'est plus qu'il n'en fallut à Anastasie pour mettre fin à l'affrontement. D'un coup de talon dans le tibia de son adversaire imprudent, elle le fit choir, mais lui arracha l'une de ses haches dans sa chute. A peine fut-il à terre qu'elle enfonçait violemment l'arme en plein dans son visage.

( J'ai tué cinq garzoks seule ? ) s'étonna-t-elle finalement. Elle avait décidément bien changé, en quelques mois.

Attrapant alors Perçombre, qui dépassait du cadavre encore accroupi du sergent Omyrien, de ses deux mains, elle tira fort d'un coup sec, délivrant l'arme et manquant de tomber à la renverse par la même occasion. Elle prit une demi-seconde pour soigner sa plaie superficielle au bras d'un tour de magie, puis se rapprocha de l'escarmouche principale. Elle les avait débarrassé à elle seule de cinq des fantassins, dont le plus fort d'entre eux, mais elle les avait cependant laissé, si ses calculs étaient bons, à huit contre quatorze en mêlée, sans compter les archers, dont les mages étaient chargés de s'occuper. Et, le croisement atteint, elle se rendit finalement compte de l'ampleur des dégâts. Il ne restait que sept garzoks, mais sept archers et arbalétriers sektegs, dans le camp adverse. Dans le sien, cependant, les pertes n'avaient pas du tout été épargnées. De ce qu'elle en comprit en quelques regards, les fantassins ennemis avaient foncé sur les mages, obligeant l'infanterie comme les prêtres à se focaliser sur eux pendant que les gobelins effectuaient des tirs de précision. Une attaque suicide qui avait porté ses fruits : des épéistes de l'expédition, il ne restait que quatre survivants, dont deux, à savoir Camille et Johan, étaient grièvement blessés, aux mains des trois seuls mages restants dans leur camp. Armand, seul archer, était ironiquement mort d'une flèche dans l’œil. Le cœur d'Anastasie se serra devant ce triste spectacle. Mais seulement une poignée de secondes. Elle n'avait pas l'occasion de s'apitoyer plus longtemps.

Elle raffermit sa prise sur Perçombre et s'approcha à grande vitesse des sektegs, qui s'étaient approchés à mesure que les autres s'étaient éloignés. Ils étaient maintenant à seulement quelques pas d'elle, et elle n'eut besoin que d'une poignée de secondes pour les rejoindre, avant même qu'ils ne se rendent compte de son retour sur le champ de bataille. Et ce fut un massacre. Absolument inaptes au corps à corps, les gobelins se retrouvèrent face à une bretteuse émérite et bien trop portée sur la vitesse pour espérer lui faire faux bond. A peine fut-elle à leur portée qu'elle envoya valser son arme dans la gorge du premier. Les autres se tournèrent vers elle, mais elle était trop proche pour qu'ils visent correctement. Sa rapière se planta dans le cœur d'un second, avant de vivement se retirer de son buste pour trancher le bras d'un troisième archer. L'estimant trop handicapé pour être dangereux, elle passa à un quatrième, qu'elle fit chuter d'un violent coup de talon dans le visage. Aucun n'était armé pour la mêlée, tous les fantassins avaient foncé sur les mages ; ce n'était pas un combat, c'était une exécution.

Bientôt, les quelques sektegs encore valides lâchèrent leurs armes et prirent leurs jambes à leur cou. Mais elle ne pouvait le permettre. Alors que les derniers garzoks finissaient par tomber derrière elle, elle courut à la poursuite des trois fuyards. Ils étaient étonnamment rapides pour leur taille ridicule, mais elle stoppa bien vite la course du plus éloigné d'entre eux d'un trait de lumière dans la jambe. Il trébucha et entraîna un second archer dans sa chute, lui permettant de les rattraper en quelques foulées seulement. De deux mouvements vifs du poignet, les corps étaient rendus inertes. Le dernier se retourna pour observer l'état de ses compagnons d'armes : ce fut son ultime erreur. Il perdit l'équilibre une unique seconde, c'était assez pour qu'Anastasie ne le rattrape et le décapite d'un geste simple. Les fuyards étaient morts. C'était nécessaire. Pour autant, la Comtesse n'avait ressenti aucune satisfaction à les éliminer un à un. Aucun désir de vengeance n'avait motivé ses actes. Aucun contentement malsain. Elle les avait tué car ils ne pouvaient se permettre de laisser des éclaireurs faire part de leur découverte aux armées Omyriennes. Ni plus ni moins.

( J'aurais aimé pleurer, ) songea-t-elle.

Elle aurait aimé pouvoir les laisser filer. Ces êtres qui prenaient part à une guerre qui les dépassait. Ces êtres nés du mauvais côté d'une frontière. Ces êtres haïs pour leur simple apparence. Ils avaient tué ses camarades, en ce jour funeste, mais elle avait tué les leurs. Elle ne ressentait ni colère ni amertume. Juste... du vide. Elle avait choisi le moindre mal. Éliminer quelques soldats qui fuyaient pour leur vie, qui fuyaient devant le massacre qu'ils subissaient. Quelques soldats qui ne voulaient juste pas mourir. Qui s'étaient juste défendus. Elle les avait exécuté – car c'était le mot – par pur pragmatisme. Parce que si elle les laissait vivre, elle devrait rebrousser chemin, par peur de croiser une autre troupe en allant chercher le bouclier de ses convoitises. Elle les avait exécuté pour une relique. Et elle aurait aimé pleurer.

Mais elle ne prit que quelques secondes pour mesurer ses actes, pour bien les assimiler, après quoi elle rebroussa chemin, rapidement, pour terminer ce qu'elle avait commencé. En quelques enjambées, elle rejoignit les deux gobelins qu'elle avait laissé en vie, et qui rampaient plus ou moins discrètement pour échapper aux regards des autres paladins, qui venaient de terminer leur propre combat. Anastasie appuya son talon sur le dos d'un premier, celui maintenant sans bras, et planta sa rapière entre ses côtes, visant le cœur. Il s'inanima aussitôt, non sans un râle d'agonie. Puis elle s'approcha du dernier, qui, l'ayant remarquée, semblait la supplier de ses yeux embués de larmes. Que la tâche aurait été plus simple s'il avait été un monstre sans sentiment, comme toute son espèce était dépeinte dans les contes et récits Kendrans. Que la tâche aurait été plus simple, si il ne ressemblait pas tant à un enfant difforme, avec sa carrure chétive, sa tignasse étrangement rousse et ses lèvres tremblotantes devant la peur de la mort. Mais la tâche n'était pas simple. Et quelque part, Anastasie s'en réjouit. Il n'y avait pas d'honneur dans le meurtre. Elle ne devait pas en trouver. Elle devait assumer jusqu'au bout ses choix et ses actes, et les porter en son cœur jusqu'à son trépas, et plus loin encore.

« Il n'y a pas d'honneur dans la guerre, » murmura-t-elle.

Et le dernier sekteg perdit la vie.


(((Tentative d'apprentissage du sort de lumière : Lumière aveuglante : Une attaque de jets de lumière concentrée aveugle [lvl/4] ennemis en les atteignant (Esquives et maîtrises adverses -1/lvl pour le tour suivant).)))

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 Sujet du message: Re: Route entre les Duchés des Montagnes et Omyre
MessagePosté: Mar 3 Mai 2016 10:00 
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Pertes : un éclaireur, deux mages, sept fantassins. Voilà ce qu'étaient devenus les cadavres de leurs compagnons d'armes. Des chiffres. Rien de plus que de vulgaires chiffres. Les plaies des blessés soignées magiquement et les derniers garzoks agonisants achevés, il fut temps pour Anastasie de prendre la parole. Elle aurait bien aimé passer un savon à Camille, mais elle lisait sur son visage que celle-ci mesurait parfaitement le rôle qu'elle avait tenu dans ce massacre. Ils n'étaient plus que huit. S'ils s'en étaient tenus aux directives d'Anastasie, nulle doute qu'ils n'auraient essuyé que de maigres pertes, laissant les mages briser leurs rangs avant de prendre le dessus dans la mêlée. Pire encore pour la dissidente, elle était la seule survivante de son groupe. En plus d'elle, seuls Johan et deux autres bretteurs, indépendants, avaient survécus. La jeune femme était défaite.

« Nous n'avons pas le temps pour des funérailles, » expliqua calmement la Comtesse aux survivants. « Nous repartons dans la minute pour camper près des ruines, où nous serons à l'abri. »

Mais Camille sembla se réveiller d'un long rêve, et fit entendre sa voix parmi les rescapés.

« On continue la mission ?! » s'offusqua-t-elle, choquée.

Anastasie lui répondit par un regard assassin.

« Nous avons déjà perdu plus de la moitié des nôtres par ta désobéissance, » fit-elle d'un ton froid et implacable. « Si tu veux discuter mes ordres encore une fois, que ce soit pour partir, pour rentrer à Kendra Kâr, seule, ou en tout cas sans moi. Car c'est la dernière désobéissance que je tolèrerai. »

L'intéressée détourna immédiatement le regard, le regard crispé par la tristesse et la honte. Mais la chef d'expédition continua, à l'adresse de tous.

« Et ça vaut pour tout le monde. Un groupe qui ne connaît pas la cohésion ne court qu'après sa perte. Si qui que ce soit à des doutes quant à sa capacité à suivre mes ordres, ou bien si qui que ce soit ne croit plus en notre mission, ou en la réussite de celle-ci, qu'il se rappelle que cette expédition n'a jamais rien eu d'obligatoire. Vous êtes libres de rebrousser chemin immédiatement, je continuerai avec ou sans vous. Mais que l'on soit bien d'accord : si vous décidez de me suivre, je n'accepterait pas la moindre rebuffade, pas le moindre défi à mon égard. Vous avez tous vu ce qu'il se passe lorsque l'autorité d'un chef est sapé : que ça ait au moins servi à vous mettre dans le crâne que nous mourrons tous si cela se reproduit. »

Elle s'interrompit, sonda le regard de tous ses interlocuteurs. Leurs expressions semblaient mitigées, à mi-chemin entre l'abattement et la loyauté. Tous, sauf Camille et Johan, semblaient peinés de son discours, qui n'avait a priori rien à voir avec eux, mais elle ne le regrettait pas le moins du monde. Elle n'était pas réellement en colère contre eux, et elle aurait voulu les rassurer, les consoler, les laisser pleurer et leur offrir un peu de repos. Mais elle ne pouvait pas, elle devait leur faire passer un message : elle s'était comportée comme une conseillère avec eux, guidant, demandant, et n'ordonnant qu'au minimum ; ce temps-là était révolu. Sa faiblesse, son refus de se positionner en tant que véritable meneuse, avait conduit à une rébellion de la part de l'une de ses subordonnées, et elle se sentait toute aussi fautive que cette dernière. Dorénavant, il n'y avait plus de conseils qui tenaient ; elle ordonnerait, et ceux qui refuseraient pourraient rentrer chez eux, car elle ne l'accepterait plus jamais. Elle s'en voulait de sa faiblesse, de sa façon si peu directive de gérer ce groupe. Lorsqu'il y avait une dissidence dans un groupe, le chef de celle-ci pouvait sembler le plus à blâmer, mais Anastasie considérait que celui qui l'avait laissée naître était tout aussi responsable.

« Si vous n'avez plus d'objection, nous partons. Immédiatement. »

Et, sans un regard en arrière, elle partit chercher Fenrir, resté bien en retrait avec les autres chevaux, prête à se remettre en marche. Tous, sans exception, la suivirent. Sur le chemin, elle ne put cependant s'empêcher de les rassurer ; se faire respecter ne signifiait pas être implacable et muet en toutes circonstances.

« Les vivres des troupes Omyriennes suffisent pour encore plusieurs jours, et nous sommes prêts des campements les plus proches, donc personne ne s'étonnera de leur disparition avant deux grosses journées, au bas mot. Et nous serons à l'abri près des ruines : Adam m'a assuré que les garzoks l'évitaient comme la peste à cause des goules. Nous y serons pour la nuit, et demain soir nous devrons être de retour ici, en direction de Luminion. »

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