Je considère un instant mon gibier, puis commence à procéder à une fouille de quelques minutes pour trouver des racines, ou des ronces, qui me serviraient de cordes. Je trouve difficilement ces objets, qui doivent avoir une taille assez considérable pour encercler un tronc, mais, après quelques fouilles infructueuses, je dégote enfin un arbre me fournissant assez pour attacher les pattes du cadavres à deux arbustes me paraissant plus ou moins robustes ainsi que parallèles. J'entame alors la chaire quelques centimètres au dessus des sabots, faisant un tour complet des pattes mais ne coupant pas les os. Je part de cette incision, puis remonte pour les pattes avants jusqu'à la cage thoracique, et pour les pattes arrières vers le bassin. Pour finir, Je coupe brutalement la tête de l'animal après plusieurs coup violent, puis descend de la coupure encore fraîche jusqu'à l'entre jambe. C'est lors de cette opération d'une précision chirurgicale que des cris aiguës, provenant sûrement d'enfants non woran, suivis de claquements de fouets se font entendre. La soudaineté de ce bruit me fait déraper, pas de quoi en faire un plat, mais ce trouble dans le calme apparent de la forêt m'intrigue, si ce n'est me révolte, aussi, d'un bond agile, je me hissais sur une branche et me dirigeais-je vers le : nord-ouest. Une deuxième série de claquements de fouets, suivis cette fois d'un cri unique d'où une douleur déchirante perçait, vint me conforter dans la position de mes agresseurs. Je m'arrête sur une branche assez haute, devant laquelle un épais feuillage me camoufle tout en étant assez éparse pour me laisser distinguer la procession. Ce sont des enfants, comme je l'avais présumé, qui marchent en file indienne. Ils vont pieds nus, beaucoup courbent l'échine et ceux levant encore fièrement la tête sont marqués par nombre de coups de fouet. Je remarque que la tranche d'âge ne dépasse, à vu d'oeil, jamais 12 ans sur des critères humains, quoiqu'il y ai quelques elfes, sûrement atteignant les 30 ans. Je regarde donc ce défilé macabre, n'étant pas spécialement sûr de la conduite à tenir : les voyageurs n'ont jamais parlé de cela à mon clan, mais il se peut qu'ils veuillent taire cette coutume ethnique des plus infâmes, qu'aucun woran, toute race confondue, se permettrait d'appliquer. Je compte rapidement le nombre d'enfants, puis le nombre de gardes ... une quinzaine pour seulement six brutes sanguinaires, me paraissant peu abordables. Je reste figé, ne voulant pas révéler ma présence à ces gaillards costauds qui me réduiraient en bouilli, et ne voulant pas non plus perdre une miette de la conversation qui se déroule.
Bordel, où qui sont ! T'as raison Horl, faut pas vingt ans pour aller chercher une gamine ! Y rentrent, je leurs passe un savon, c'pas possible ça de prendre autant de temps ! Si ça s'trouve, y s'sont perdus !
Les autres s'esclaffent en coeurs, je ne vois personnellement pas ce qu'il y a d'hilarant dans cette phrase : si l'on ne connaissait pas cette forêt, y tourner en rond était chose facile, moi même en avait fait l'expérience à mes frais.
- Ouais, ben merde ! Moi c'est qu'jen ai marre d'les attendre, au pire on engagera un aut' archer à Lùinwe, et pis on se passera de la morveuse, vu les gains qu'on aura ! - Bon, maintenant vos gueules les gars, faudrait pas s'faire trouver par les elfes !
Nouveaux rires gras, mais légèrement empreint d'anxiété cette fois ci. C'est ce que je veux savoir : cette activité n'est pas légale, tout du moins pas en ces terres. Si des enfants elfes sont parmi eux, ces personnes peuvent payer gros si elles se font attraper. Je m'étonnais par contre de la passivité de grands nombres de ces enfants, les coups de fouets sûrement, à moins que ... Mes yeux plongent dans ceux d'un des esclaves, puisqu'il s'agis apparemment d'un trafique d'esclavage - des plus odieux soit dit en passant. - Le gouffre sans fin que j'y trouve confirme mes soupçons : drogués, sûrement aux spores d'alnathea. J'étouffe un grognement, cette substance que je méprise au plus haut point ne m'est pas inconnue, chaque jeune ayant atteint l'âge adulte en consommait lors de la cérémonie d'initiation, afin d'entrer en osmose avec la nature, pour qu'on lui décerne sa plante-totem. Je frissonne à l'évocation de cet épisode, peu glorieux pour moi puisque j'avais obtenus ... non, ce n'est pas le moment d'y penser, cette honte fait partit de mon passé. Je me reconcentre sur le moment présent, tentant à nouveau de me plonger dans les événements. C'est alors que je me rend compte que, tout à mes pensées, j'avais laissé le cortège prendre de l'avance. Pas grand chose, 10 bons mètres seulement, mais ces 10 bon mètre les mettait de manière à ce que je me retrouve dans le dos de mes adversaires. Ils sont six, armés et forts. Je suis seul, ne peux sûrement pas compter sur une quelconque aide des enfants, et n'ai que pour seul connaissance du combat la chasse. Mon seul atout : l'effet de surprise, ainsi que le fait qu'ils ne me connaissent aucunement. Je réfléchis un instant : foncer ne me sert à rien, les attaquer frontalement non plus, et si j'allais prévenir à Cuilnen, ils seraient partit avant que quiconque n'arrive. Que puis-je faire ? Je jette un coup d'oeil vers la direction qu'ils suivent. Je les regarde encore une fois, puis reviens à mon point de départ, c'est à dire la biche. Là, je termine grossièrement mon travail, puis attache les racines qui m'ont servies de cordes entres elles, formant des bretelles sommaires. Je hisse ensuite le tout sur mon dos, les racines vont sûrement me lacérer légèrement les épaules, mais ce n'est rien par rapport à ce qu'ont subit les enfants. Leur image flotte un instant dans ma tête, celles de petits martyres, de multiples marques de fouet saillant leur dos. Mon ascension est gênée par ce poids nouveau, cela ne m'étonnerait pas qu'une branche casse. En chemin, je ramasse des branchages, sûrement totalement inutiles, mais qui sait.
J'arrive enfin à l'arbre où je les ai vu la dernière fois et suis leur piste encore fraiche. Moins de 5 minutes plus tard, je les voie. Leur progression a sûrement était freinée par le rythme des enfants, qui traînent les pieds sans émettre une seule plainte. Tout comme eux, je me tait, adoptant une respiration ample et mesurée. Je cherche du regard une branche assez solide pour me supporter tout en passant au dessus de leur tête. Par chance, il y en a une à quelques mètres seulement. En deux-trois acrobaties aériennes des plus silencieuses, je m'engage sur celle ci, appartenant à un jeune frêne. Arrivé au milieu, elle commence à courber sous mon poids, et je m'arrête là, craignant de trop la faire bouger, ce qui entraînerait sûrement une légère réaction en chaîne légère mais qui avertirait tout de même les esclavagistes de ma présence. Le cortège passe, j'ai plus de temps pour distinguer leur disposition : deux à l'avant, deux autres encadrant les enfants et enfin deux fermant la marche. Mon dévolu ce jette sur ces derniers, faciles à atteindre et difficiles à couvrir par leurs camarades. Je défais mes bretelles, puis, pendant les quelques secondes d'attente que me permet leur procession, médite sur leur sort : mort ou blessures et immobilisation ? Les deux me paraissent inconvenant, et je sais qu'il n'est pas à moi d'en décider : dans la bataille, mes gestes seront guidés par la fureur et le hasard. Je frapperais, que faire d'autre ? Mes maigres capacités en matière de combat ne me permettront pas de viser précisément. Enfin, ils sont à ma portée. D'un geste brutal, je jette ma proie et mes branchages sur eux, puis saute à mon tour. Je plis légèrement les jambes, afin de me réceptionner ... sur la tête d'un des leurs. Je commence tout de suite à frapper au hasard ou presque en dessous de moi. Par cinq fois, mon couteau et mes griffes s'enfoncent, je distingue le visage de mon adversaire : une plaie sanguinolente, puis regarde un instant l'autre, touché au ventre et à l'épaule. Je bondis, l'action n'a pas durer 3 seconde, mais déjà je suis visé. Une flèche se plante sur la masse informe et rouge qu'est le daim. Du rouge, du rouge et encore du rouge. Je me sens défaillir, des instincts primaires resurgissent en mon sein, rugissant et assoiffés de sang. Je leur laisse libre court, bondissant à la recherche d'un adversaire. Je dois faire peur à voir, car les cris stridents des enfants emplissent la forêt, exacerbant ma fureur. Je me précipite vers un des esclavagistes. Il tient un sabre, mais qu'importe. D'un saut, je suis sur lui, et lui, d'un coup, il me lacère un bras. Rouge, encore et encore. Je le frappe au visage, je frappe, frappe encore. Je fais taire la douleur, je frappe toujours, de mon couteau cette fois, lui lacérant la poitrine. 2 autres sont sur moi, le troisième est à l'arrière, entrain de tirer maladroitement des flèches. Je me jette sur l'un d'eux, le plus proche, et lui mord sa jambe. Il frappe, martelant mon dos de coups ... de poings, cet idiot n'a pas dégainé son arme ! Dans le rouge qui emplit mon esprit et ma vue, une part de logique subsiste. Je m'empare du glaive, et le frappe avec à plusieurs reprises. Il hurle, un cris teinté de douleur et de peur à en casser les tympans, mais déjà je me désintéresse de lui, me retournant vers un autre. Il me regarde un instant, je lis la terreur dans ses yeux, un sentiment de puissance m'envahit, je souris de ce plaisir malsain, dévoilant des crocs rouge de leur sang ... et du mien. Je ne réagis pas, lui non plus ... mais l'archer si, ce momment d'acalmie lui a permit de me viser. Je gémit, émettant un miaulement de douleur : une flèche est plantée dans mon flanc droit. Le rouge commence à refluer, mais mon adversaire à avancer. Il brandit au-dessus de sa tête une masse d'arme. Son bras s'élance, et dans le sillage du baton, chaine et boulet suivent. Cette scène se déroule au ralentit, comme dans certaines histoire, mais défaut de voire ma vie défiler, c'est du métal que je vois passer devant mes yeux. Je le regarde s'écrouler avec fracas devant mon nez, suivis du corps de l'homme. Je le fixe un instant sans comprendre, puis voit du sang s'écouler de sa tempe. Le temps reprend son cour. Je comprend rapidement : à quelques mètres de moi se trouve un petit elfe, le bras encore tendus. Cette être à l'attitude si chétive avait lancé une pierre afin de me sauver. Je tourne ensuite ma tête vers l'archer, recouvert de trois quatre enfants le frappant à coup de leurs poings frêles ou de petites pierre. Si le feu de la bataille ne brûlait pas en moi, j'en aurais ri. D'ailleurs, j'en rit, enfin je tente. Ma gorge se contracte, mais à la place du rire chaleureux, peut être légèrement stressé, qui m'est propre, c'est du sang qui sort part ma bouche. Du rouge, et maintenant, du noir ...
Du rouge, a cédé la place au noir, et le noir au blanc. Je flotte dans un blanc lumineux et cotoneux, et à côté de moi, elle. Elle, mon totem, ayant pour cheveux des feuilles de chêne cascadant jusquà ses reins, une peau rugueuse et pourtant douce à mon goût ... c'est elle. L'oudio me berce, indirectement, mon totem est le chêne ... directement, c'est toute la nature. J'ai était destiné à devenir druide ... et je suis partit. Mes yeux se remplissent de larmes, elle m'appelle, me berce, elle, source de mes malheurs et pourtant restant chère à mon coeur. Elle entonne une berceuse en langage elfique, que, malgré ma connaissance de cette langue, je n'arrive pas à déchifrer. Je ne veux pas la déchifrer. Je me laisse entraîner par ce refrai lancinant, triste et noble à la fois, puis, je l'entend prononcer d'autres mots, que je comprend parfaitement eux :
- Woran, gentil woran, youhou, woraaaaan !
J'ouvre les yeux, et voix. Elle ne me fait plus face, mais à la place me surplombe des têtes d'enfants inquiètes. La réalité ce projette à moi violement, d'un bond, je tente de me lever ... mais n'arrive qu'à tousser du sang sur leur visage fin et où l'innocence aurait dut demeurer. Il fronce les sourcils, soudain inquiet. L'un d'eux me dit, comme si il était ma mère.
- Enfin, méchant woran ! Tu bouge pas, sinon tu va avoir très bobo !
À sa voix, je comprend que c'est lui qui m'a réveillé.
- Enfin gamin, laisse moi ... - Non ! Méchant woran ! Pas bouger ! - il énuméra ensuite les endroits où j'était touché avec une aisance étonnante, pour un enfant je veux dire. - Le méchant woran a eut de la chance de n'avoir que son bras d'endommagé ! La flèche ne t'as presque rien fait, mais tu as une côte de cassée, oh, c'est pas très grave, peut être une légère hémorragie interne, c'est pour ça que tu crache du sang. - Mais, il faut bien que quelqu'un vous allume un feu, chasse pour vous, fasse le guet et ...
Un elfe m'interrompt alors
- Tu as entendus l'enfant humain, woran : ne fait rien qui puisse te nuire. Nos malfaiteurs sont on ne peut plus mort, et nous savons nous débrouiller. Maintenant reposes toi, nous sommes certes des enfants, et certains seraient mieux dans les robes de leur mère qu'ici, mais d'autres sont moins imbéciles, et d'autres ... - Il jeta un coup d'oeil vers le troisième enfant, un elfe lui aussi – D'autres sont familiers à la magie, ne prend pas cette air la : nous ne sommes pas des benets, et malgré notre apparente juvénilité, nous avons 45 ans, woran.
Je ferme ensuite mes paupières, mais mes oreilles restent ouverte.
_________________ Koetil, woran sombre et rôdeur
Mes crocs ont des raisons que la raison ne connaît pas.
Dernière édition par Koetil le Sam 10 Avr 2010 22:42, édité 4 fois.
|