IshikawaJOUR 1
Silinde, quittant tout juste le petit village d'Ishikawa après y être resté de nombreuses années, ne se retourna pas une fois. Il était redevable à ses hôtes de l'avoir trouvé, agonisant, son corps arborant les seuls vestiges lui restant de la grande guerre de Pohélis, mais il n'avait finalement passé que deux semaines conscient dans ce village.
Deux semaines passées à méditer et s’entraîner pour récupérer le contrôle de son corps, et ce même si à cause des changements dus à ses muscles qui s'étaient atrophiés, plus tout ce poids perdu à être resté allongé pendant proche de sept ans, Silinde avait presque l'impression d'être dans un nouveau corps.
Un nouveau corps qu'il allait devoir apprendre à connaitre et à utiliser, pour pallier à la perte de l'ancien.
Abandonnant force et muscles, pour gagner à la place vitesse et agilité.
Miyamoto, le maître du dojô où il était hébergé et soigné, l'avait entraîné dans cette optique, lui enseignant quelques bases de son propre style de combat.
Style que Silinde allait améliorer, et peut-être même modifier à sa guise, pour créer le sien, plus approprié à ses goûts, à sa personnalité.
L'elfe avait même déjà appris une nouvelle technique de combat, le Iaijutsu, frappe tout aussi mortelle que rapide d'un katana qu'on sort de son fourreau.
C'est une chance qui lui avait été donnée, d'être en mesure de combattre à nouveau, malgré l'état de son corps, et sans avoir à passer de nombreuses années à tenter de récupérer peut-être même vainement sa musculature d'antan.
Ce serait du temps perdu, du temps que Silinde préférait utiliser pour atteindre ses buts, le pourquoi il était en vie, et le pourquoi il se battait.
L'elfe n'était pas stupide. Même si ses buts ne changeraient pas, il savait aussi qu'il avait tord en grande partie.
Ce que recherchait Silinde avant tout, c'est la vengeance.
Vengeance envers cette mystérieuse guilde d'assassins, venus d'un autre monde par le système des fluides, pour anéantir jusqu'au dernier membre de sa famille.
Pourquoi une attaque aussi ciblée, aussi précise, aussi cruelle?
Il n'avait jamais eu pour réponse que quelques rares bribes d'informations, qu'il ne put que compléter par ses propres spéculations.
Mais ce n'était pas le plus important.
Bien sur, ces informations pourraient le conduire plus facilement vers son Némésis; mais elles ne changerait pas son avis.
Ils mourront, tous autant qu'ils sont.
Déjà nombreux sont ceux qui sont tombés sous ses lames, assassins envoyés pour le tuer lui, lorsque la guilde s'était rendue compte qu'elle n'avait pas fini le travail, qu'il restait encore un survivant, un dernier, dans sa lignée...
Mais pour continuer son office, le vengeur avait besoin d'une chose : d'indices.
Comment trouver, comment pister ses proies, sans même savoir où elles se trouvent? Un détail, de taille cependant, allait lui conférer un certain avantage : après sept ans écoulés, et de fortes chance pour que des rumeurs fussent lancées quand à sa mort probable, au moins dans la grande cité blanche, l'elfe était comme revenu d'entres les morts.
Mais ça, les assassins ne le savaient pas.
Pour la première fois, il avait la chance de frapper le premier, et de laisser une profonde cicatrice dans cette organisation en étant victorieux.
Il était sûr de lui.
Peut-être venaient-ils d'un autre monde. Mais ils devaient forcement aussi avoir ne serait-ce qu'un avant poste, une base située quelque part sur celui-ci. Il ne lui manquait plus qu'à trouver cette base...
Et la rayer de la surface de cette planète.
Bien entendu, ceci n'étaient que suppositions, et quand bien même il pouvait accomplir un tel exploit, cela ne ferrait qu'alerter le gros de la guilde situé quelque part ailleurs dans l'univers.
Et c'est exactement ce qu'il souhait à l'instant présent. Utiliser cette occasion rare pour leur dire deux choses, pour leur crier : "Je suis vivant!", et "Je viens pour vous!".
Il était prêt. Décidé. Il ne changerait pas d'avis.
Secouant la tête, ne souhaitant pas garder juste ses intentions de vengeance, et marcher tout le trajet avec un ton morose, Silinde finit par sortir le long paquet tubulaire emballé dans un tissu qui lui avait été précédemment laissé comme souvenir par Miyamoto.
La forme du dit paquet, et la personnalité de son ancien propriétaire lui laissa facilement deviner son contenu; et il ne se trompa pas.
En ouvrant le cadeau, il découvrit un katana.
Il tira la lame du superbe fourreau rouge, et l’observa à la lumière du soleil quelques instants, avant de faire quelques mouvements dans le vide pour en tester les capacités.
Légère et pourtant robuste.
Rapide et flexible.
L'elfe n'avait pas encore l'habitude d'utiliser des katanas, mais il pouvait déjà affirmer une chose.
"Magnifique... C'est un ouvrage de maître. Je ne sais pas si je suis digne de ce présent, mais je compte bien le devenir en me montrant à la hauteur de l'enseignement que j'ai reçu en utiliser cette lame."Rengainant le sabre dans son fourreau, il attacha ce dernier sur le côté gauche de sa ceinture, pour être paré à utiliser son Iaijutsu à tout moment, rangeant au passage sa précédente épée dans son sac.
(Désolé de te séparer de ta lame jumelle... Tu m'as bien servi... Mais je ne suis plus en mesure de t'utiliser à plein potentiel aujourd'hui.)Continuant de fouiller dans son sac, se remémorant quelques souvenirs à chaque objet redécouvert, Silinde finit par tomber sur un petit objet inhabituel dont il n'eut nul souvenir : un petit médaillon à la couleur sombre, entre le noir et le violet très foncé.
(Tiens...? Avais-je un tel bijou comme possession...?)Lorsqu'il se saisit du bibelot, il ressentit un frisson et compris immédiatement que l'objet était magique, même en étant totalement inapte aux arts profanes.
(Qu'est ce que...?)Quelques secondes s'écoulèrent, avant que le mystère fut résolu de lui même.
Lentement, le petit objet en question changea de forme, pour laisser place à une petite silhouette d'une vingtaine de centimètres tout au plus, dotée d'ailes lui permettant de planer.
Puis, une fois le changement de forme fini, tout devint clair.
De longs cheveux sombres aux mêmes couleur que le médaillon tantôt.
Une petite taille, et une paire d'ailles.
Pas de doutes, c'était une Faera!
(... Ma Faera !)Focalisé sur plus important, et sur la disparition de ses compagnons, Silinde avait totalement oublié celle qui était pourtant l'une d'entre eux.
Mais...
Tout simplement l'elfe n'avait il peut être jamais considéré ce petit être comme tel, et l'avait juste utilisé comme un vulgaire outil pour traverser les fluides lors de la grande guerre.