L'Univers de Yuimen déménage !


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 Sujet du message: Re: Treeof
MessagePosté: Jeu 29 Mar 2018 19:43 
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La femme se contenta de lui dire d'y faire quelque chose avant de repartir. Les hommes-pâles étaient choqués et, après quelques courtes tractations, ils se décidèrent à partir. Les harpies qui les avait aidé venaient d'Arothiir, apparemment, et n'avaient pas de mauvaises intentions. Ce pouvait-il que ce peuple songe à trouver une certaine unité ? Azra n'y croyait guère, mais de toute façon, cela se ferait sans lui. Il n'y avait pas longtemps avant qu'on se rappel que le monstre avait pendant un temps combattu avec son propre corps !

Alors qu'il était plongé dans ses réflexions, Azra sentit une présence derrière lui. Il se retourna juste à temps pour voir la figure malicieuse de Daemon. Bon sang, ce semi-elfe était pire qu'un gamin ! Azra se souvenait avoir perdu le contact avec lui. Il en avait déduit qu'il était mort... comment ? Impossible à dire, mais la surprise était de taille. Le nécromancien se leva péniblement tandis que le jeune homme lui demandait des explications. Il resta d'abord silencieux. Après plusieurs jours de folie, par où devait-il commencer ? Il se contenta d'un :

« J'ai étudier l'obélisque et j'ai découvert ce que c'était. Belle réussite. Mais mes pouvoirs de contrôle des mort-vivants n'ont pas été suffisant pour elle... Et toi, je peux savoir comment tu as pu te débarrasser de mon sortilège et revenir malgré tout d'entre les morts ? »

Il avait comme dans l'idée qu'il avait déjà la réponse, et il n'aimait pas ça...

Le semi-elfe affirma ne pas savoir. Il avait été tué dans la bataille, puis était revenu à cause d'une puissante lumière. Azra ne put s'empêcher de ricaner :

« Finalement, tu as eu ce que tu voulais éviter. C'était la magie de Kiyoheiky, le prêtre ynorien. Il a bien failli me tuer, cet imbécile ! »

Alors que son compagnon s'asseyait à terre, la liche fit de même.

« Enfin... maintenant, je suppose que je suis griller. Si je rentre à Treeof, il risque d'y avoir bien vite quelques questions gênantes... Maintenant que tu es revenu à la vie, il vaudrait peut-être mieux partir, j'ai assez combattu de dieux pour les prochains mois ! »

Un peu troublé, Daemon lui demanda où il comptait aller. C'était une bonne question...

« Je ne sais pas. Rentrer chez nous ? Il y a de grands pouvoirs à s'approprier, ici mais... hé bien les risques sont conséquents également. Tu avais peut-être raison. Les messagers m'attendent... mais en même temps, je ne m'imagine pas les diriger. »

Il soupira :

« Honnêtement, je ne sais pas. »

Le fanatique, curieusement, ne sembla pas si emballé ; Certes, il souhaitait ramener la liche avec lui mais, à présent, il se sentait intrigué et concerné par le sort des hommes-pâles. Talia, notamment, l'avait particulièrement intrigué. Un début d'amourette ? Ils n'avaient vraiment pas besoin de ça ! En tout cas, le garçon rappela la magnanimité de la reine, assurant qu'il pourrait sans doute rester. Azra soupira :

« Je la connais, et j'ai déjà combattu à ses côtés. Néanmoins, je préfère éviter les ennuis. En outre, il y a une guerre qui se prépare, ici. D'après toi, que devrions-nous faire ? »

La demande le surpris lui-même. Il était sensé être le chef ! Mais il était fatigué. Le monde était rempli d'absurdité et cette guerre en faisait parti. Une guerre qui ne le concernait pas. Mais en même temps, un adepte de Phaïtos pouvait-il vraiment tourner le dos à une guerre ? Mais le gamin ne trouva rien de mieux à faire que le traiter de peureux ! Il était intrigué par les harpies et par la dague qui avait servi à sceller la démone. Apparemment, il souhaitait la voler...

L'idée n'était pas mauvaise. Cet artefact pourrait s'avérer utile.

« Hum... j'imagine que ce serait un atout, en effet. Sache que cela ne me ferait pas peur, en temps normal, mais je suis gravement affaibli. Et je risque d'attirer de mauvaises questions. Enfin, nous pouvons essayer... »

Daemon se contenta de répondre qu'il suffisait de se déguiser un peu pour passer inaperçu, et qu'après tout, peu avaient du deviner son implication. Azra en doutait, mais avait-il vraiment le choix ? Il se contenta de hocher la tête pendant qu'ils avançaient la suite du groupe qui commençait à rentrer vers la ville, laissant le chaos de destruction derrière lui...

Mais le semi-elfe ne pu s'empêcher de demander ensuite pourquoi le titan combattait dans on corps pendant un certain temps. Azra laissa échapper un petit rire :

« Cette chose à tenté de m'envahir avec son esprit. Je lui ai livré une bataille mentale particulièrement rude ! Je l'ai blessé mais, ne pouvant la vaincre, j'ai profité d'une attaque mentale plus puissante pour la pousser dans mon corps pendant que je prenais le sien, avant de l’ensevelir. Malheureusement, elle est assez vite revenue à la charge... »

Il se figea, comme s'il avait vu un fantôme. Impressionné par l'exploit ? Peut-être, mais Azra ne pouvait s'empêcher d'en douter. Son récit était un peu court, sur ce combat, aussi, il ne put s'empêcher d'ajouter :

« Ne serais-tu pas en train de me cacher quelque chose ? Même si nous ne sommes plus lié, ne crois pas que ton esprit me soit totalement opaque... »

Pour toute réponse, il se contenta d'assurer avoir juste la mémoire troublée par sa résurrection, et ignorer ce que signifiait ce sentiment de peur qui l'avait envahi. Azra grinça :

« Mauvaise réponse... S'il y a bien une chose que j'ai constaté dans les nombreux combats d'esprit de mon existence, dont celui que j'ai traversé il y a deux jours, c'est que l'esprit n'a de mystère que pour ceux qui se voilent la face. Cherche en toi et tu trouveras. Ou au moins, tu trouveras la révélation que tu n'as pas vraiment envie de me cacher quelque chose... Bon, allons en ville. Il va falloir trouver où est cachée cette dague. »

Ils suivirent donc le groupe de loin, afin de rester discret. Azra ne perdit pas des yeux Talia et sa dague. Tout en la suivant de loin, il comptait bien découvrir où elle la cachait...

Arrivée à la ville, les harpies prirent la direction du château, dans le lac. Azra emboîta leur pas. Le groupe, ainsi que plusieurs aventuriers, montèrent dans des barques jusqu'à arriver sur l'îlot cerné de brume. Les lieux lugubres étaient décidément fort approprié à un mort-vivant. Ce pendant, à peine débarqué, le nécromancien alla trouver Talia pour lui demander s'ils pouvaient discuter. Celle-ci semblait avoir déjà eu pas mal de difficultés avec Daemon, ce qui le fit sourire.

« Au moins, il n'est pas comme ça qu'avec moi ! Mais nous sommes des gens habitué à rechercher les ennuis et poser des questions dérangeantes... ce sont les seules dont la réponse vaille la peine. Cela dit, je préférerais vous parler en priver, si possible. »

Elle sembla surprise, assurant que personne ne pouvait les entendre ici. Azra balaya d'un geste son objection, ainsi que ses moqueries envers le semi-elfe :

« Dehors ? Je ne connais pas de meilleur endroit pour des oreilles mal intentionnées... Il se trouve que j'ai une hypothèse à vous expliquer, et je préférerais être sûr qu'elle soit secrète car ses implications pourraient être source de panique... de plus, votre bibliothèque pourrait nous être d'une grande aide. »

Malgré ses doutes, elle accepta finalement de l'emmener dans sa chambre. Un couchage fort luxueux, du moins selon les standards du mendiant qu'elle venait d'y conduire ! Là, le nécromancien commença à s'expliquer :

« Vous savez sans doute que j'ai un lien... particulier avec la mort. Je vous avouerais ne pas être totalement étranger au retour de ce monstre, ma venue à l'obélisque à achever de le réveiller, mais je suis presque sûr que le processus avait déjà commencé. Cette chose... se nourrit de la mort et des ténèbres. Elle était sur le point de revenir car elle a sentit le massacre venir. C'est entre autre la guerre qui l'a réveillée. Vous même, vous en savez plus que vous ne l'avez prétendu. Vous avez une arme qui a permis de la sceller. Vous pouvez sûrement m'en dire davantage ! »

Talia révéla alors une histoire fort intéressante. Apparemment, il s'agissait d'une démone qui avait jadis dévoré d'antique héros, avant que de la chair de ceux-ci, ne naissent les ancêtres des harpies. Ces dernières avaient vaincu la créature avant de donner naissance aux grandes lignées des hommes-pâles. L'une d'entre elles était l’ancêtre de Talia, dont la mère avait encore le secret de l'emplacement de la dague. Elle avait utilisée l'arme sans savoir, ni espoir. Elle ne s'attendait pas à une quelconque réussite.

En revanche, elle s'interrogea sur le lien entre son retour et l'intervention d'Azra, menteur éhonté depuis bien longtemps maintenant, il n'eut aucune peine à broder sur sa fable, y mêlant le vrai et le faux :

« Hé bien, elle s'est nourrit de moi, bien sûr. De l'essence même de mon être et de mon lien avec la mort ! Mais on n'apprend pas à un vieux signe à faire des grimaces. Puisqu'elle était venue en moi, je l'y ai enfermé tandis que moi-même, la rejetait en dehors de son corps. Pendant un temps, je fut elle-même. »

Pour une toute autre raison, il n'eut aucune difficultés à paraître embarrassé en expliquant :

« Malheureusement, ce singe là était plus vieux que moi, elle est revenue et à fini par reprendre son corps... la suite, vous la connaissez. »

Il poursuivit :

« Mais vous devriez prendre garde. Les enfants amènent la mort des parents et les parents sont la mort des enfants. Le cycle de la vie peut prendre une tournure étrange avec les créatures divines immortelles. Vous devriez garder cette dague à portée car si la guerre éclate entre les herbivores et les carnivores, la démone pourrait bien revenir... »

Elle ne comprenait pas vraiment ce qu'il voulait dire, mais assura qu'elle garderait l'arme en sûreté. Bon, au moins, elle n'allait pas la planquer à un endroit inconnu... Le nécromancien ajouta :

« Votre ignorance de la magie et de la mort est votre plus grande faiblesse. Il est regrettable que vous ne compreniez pas mieux mes paroles. Si mon hypothèse est juste, votre peuple est en danger. Il va vraiment falloir empêcher la catastrophe d'arriver. Je sens la mort... elle approche. Si rien n'est fait, tous les hommes-pâles partirons pour la lande thanatéenne bon-gré mal-gré. Et pour l'avoir visité, je ne suis pas sûr que vous appréciez... Hélas, je n'ai pas de solution. Votre peuple ne m'écoutera pas. »

Comme elle s'interrogeait sur la conduite à adopter, il insista :

« Vous devez les avertir vous-même. Peu importe les tractations qui sont en cours, vous aurez plus d'influence que moi. Expliquez-leur que le retour de la mère n'était qu'un avertissement. Je sais que ce sera dur à croire, mais nous n'avons pas vraiment d'autre choix. »

Manifestement, elle ne comprenait pas. Pour elle, il n'y avait aucune solution, et seulement la mort au bout du chemin. Azra, quelque peu excédé, insista :

« Il faut convaincre tout le monde d'éviter la guerre. Envoyer des émissaires, dire aux carnivores qu'ils peuvent revenir et les informer également de la menace. Les forces qui se sont réveillées d part le monde vous ont transformer et il faut accepter cette magie et la différence qu'elle amène. Sinon, il n'y aura que des perdants. Je n'ai pas d'autre conseil à vous donné. Si vous avez une idée de ce que je pourrais faire pour vous aider à être convaincante, je le ferais, mais il faut déjà que vous soyez convaincu vous-même de la nécessité d'agir. »

De plus, bien sûr, elle doutait des affirmations du nécromancien, celui-ci précisa :

« Je vous l'ai dit : j'ai un lien particulier avec la mort. Je la sens rôder, mais elle ne s'approche pas de cette démone. Ce monstre est revenu une fois, il pourra recommencer, encore et encore, tant que la mort l’appellera, car pour sa part, elle se refuse à lui... il était le dernier d’une espèce : trop bizarre pour vivre, mais trop rare pour mourir. Je ne peux avoir de certitude, mais allez-vous parier la survie de votre peuple là-dessus ? »

Mais pour elle, c'était impossible. La paix était compromise depuis longtemps et aucun des groupes ne cesserait le combat. Elle semblait même assez d'accord avec l'image sauvagerie des carnivores... Il n'y avait donc rien à faire. Rien qui ne puisse les faire changer d'avis. Plus que jamais, Azra se dit qu'il aurait aimé que sa fable soit vrai juste pour les voir mourir ! Il se contenta de répondre :

« Vous pouvez aussi aller à leur devants et expliquer la situation, convaincre la reine de vous assister... Je n'ai pas dit que ça serait facile. Juste que c'était probablement nécessaire. Mais si vraiment vous voyez dans vos compatriotes des bêtes assoiffées de sang, alors j'imagine que rien ne pourra l'empêcher. J'ai tenté de vous avertir... les Puissances de la mort décideront de la suite. Mais si vous changez d'avis, vous pourrez toujours revenir me voir. »

Finalement, elle se décida à agir, à condition qu'il l'accompagne. Parfait. C'était plus qu'il n'espérait ! Il lui assura qu'il se ferait un plaisir de l'escorter. Restait à trouver les carnivores. Ils se quittèrent donc enfin, tandis que le nécromancien espérait avoir pris la bonne décision.

Azra n'avait pas trop envie de se faire repérer, aussi, il ne pouvait guère demander aux gens autour de lui. Les jours suivants furent donc assez tranquille. Il parvint à se trouver une place dans le manoir où il passa ses journées en méditation pour essayer de reconstituer ses forces durement éprouvées par le combat. Dans cet état, le temps semblait s'écouler plus vite, au point qu'il fut presque surpris quand il sortit pour apprendre que deux jours s'étaient écoulés et que des mouvements de troupe avaient été repéré dans les environs. Les carnivores seraient finalement venu ? En soit, cela réglait un problème, mais il allait falloir agir vite avant qu'ils n'attaquent...

Il alla trouver Daemon, qui créchait aussi au manoir, pour lui apprendre ce qu'il savait. Le semi-elfe avait profité de ses journées pour se faire une nouvelle garde-robe, et il fallait admettre qu'il avait meilleure mine maintenant qu'il était vraiment vivant ! Il expliqua donc rapidement :

« J'ai discuté avec Talia. La dague semble être uniquement destinée à vaincre la démone que nous avons vu... Cela dit, je l'ai convaincu de ne pas s'en séparer, ce qui peut donner l'occasion d'en apprendre plus. Je lui ai fait croire qu'une guerre pourrait réveiller le monstre et elle a accepté de venir avec nous au devant des carnivores. Nous allons tenter d'empêcher ce massacre... même si cela ne me plaît pas, je dois quand même cela à ce peuple. Je vais l'escorter pour tenter de rendre visite aux ennemis, tu peux venir aussi... »

Le semi-elfe se montra assez dubitatif sur leurs chances d'influencer les carnivores, mais Azra haussa les épaules :

« Nous allons essayer. Si ça échoue... hé bien nous aurons toutes les morts dont des adeptes de Phaïtos peuvent rêver. »

Daemon expliqua alors qu'il avait appris de Sibelle, la guerrière elfe, que les harpies étaient peut-être venues trahir la reine, et qu'il comptait donc rester pour enquêter là-dessus. La liche hocha la tête, intéressé :

« Tu deviens un véritable messager de Phaïtos... Étudie donc ce problème, mieux vaudrait éviter ce genre de mauvaise surprise, en effet... Bon courage. »

Le semi-elfe accepta et lui conseilla de garder contact par les pierres de visions, et ils se séparèrent là-dessus. Cette nouvelle était pour le moins intrigante. Si une trahison se préparait alors que l'armée ennemi était déjà en approche, cela ne pouvait qu'amener des ennuis. Mais il n'avait pas vraiment le choix. Il devait faire confiance à Daemon pendant que lui-même menait sa propre mission.

Il parti donc à la recherche de Talia, décidé à aller au devant des troupes avant qu'elles n'arrivent. Il avait un mauvais pressentiment au sujet de tout ça, mais le temps était contre eux. Il allait falloir agir rapidement.

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David le nerd


Dernière édition par Azra le Sam 7 Avr 2018 10:43, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Treeof
MessagePosté: Jeu 29 Mar 2018 23:15 
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Daemon tourna définitivement le dos à Talia D’Ombles, agacé par son air supérieur. A ce moment des bruissements d’ailes se firent entendre, venant d’en haut, de toute part, pour se regrouper non loin sur le torse de la carcasse. Les harpies se rassemblaient en cercle. Une étrange apparition se joignit à eux, une créature inédite, qu’il n’avait jamais vu avant : un dragon d’Or. Il ne ressemblait pas à Naral, ou au dragon du fleuve qu’il avait rencontré précédemment ; premièrement par sa taille, très inférieure aux autres, mais aussi par la forme de son corps, élancé comme celui d’un serpent. Il avait un long museau et de longues moustaches de poisson chat, flottantes, qui imprimaient chacun de ses mouvements avec un retard indolent. Le dragon félicita l’union qui avait permis de vaincre la créature, avant de s’adresser aux nouvelles, entendant que leur venue n’était pas sans arrière pensée. Elles s’offusquèrent immédiatement, et la reine, qui avait repris sa forme initiale, apaisa les tensions en conviant ses congénères dans sa demeure.

Il comprit qu’un lourd passif unissait les harpies du royaume. Celles-ci avaient surement pris parti pour les carnivores et leur arrivée présageait une évolution, dans le bon sens, ou le mauvais.

Il s’en tint à cet épisode et jugea bon de partir quérir des nouvelles de son compagnon. Alors qu’il descendait de la carcasse métallique, une voix féminine l’interpela. L’elfe rousse l’attendait en contrebas. Elle lui demandait ce qu’était cette chose, le géant. Il lâcha prise et glissa sur une large plaque pour atterrir à ses côtés.

« Vous êtes Sibelle, n’est-ce pas ? »

Elle acquiesça, lui renvoyant la question.

« Je suis Daemon, de Dahràm. Le nom exact de cette chose m’échappe. La reine l’a prononcé, je ne m’en souviens plus. C’est une Démone, une créature des temps anciens, qui fut vaincu par les ancêtres des harpies. »

Il réfléchit un instant en regardant ses pieds. Il n’était peut-être pas prudent d’évoquer la réelle raison de son retour en ce monde. Azra avait commis une grosse bourde et ils avaient bien failli tous y passer. La jolie rousse n’avait pas l’air querelleuse, cependant ce genre d’information sensible se répandait comme un feu de brousse. D’autres ne seraient pas aussi magnanimes et il était en quelque sorte lié au premier messager. La faute pourrait lui retomber en partie dessus…

« Nous enquêtions sur l’obélisque de cette forêt avec mon compère Azraël, nous pensions qu’il était à l’origine de la transformation subite des habitants, et surement aussi à l’éveil des titans. Nous n’étions pas si loin de la vérité finalement. Cependant, une fois arrivé sur les lieux, il semble que l’influence des titans avait déjà éveillé cette créature qui a pour glaive ce fameux obélisque. Nous fûmes tous paralysés, à l’exception de la reine, qui put contenir l’abomination assez longtemps avant votre arrivée.

Le peuple de Treeof tient son pouvoir de transformation de cette créature. Elle semble être à l’origine de tout ici et son apparition scelle l’ouverture d’un nouveau chapitre dans l’histoire des Hommes Pâles. »


Une renaissance si Treeof survivait à sa guerre intestine. La menace séculaire avait eu pour vertu d’unir les forces en présences, tournées vers un seul objectif, mais une fois le pire évité, la résurgence des anciennes querelles fut immédiate.

« Je vous ai vu partir vers la forêt avec l’homme lion, vous avez trouvé les carnivores ? »

Elle avait en effet trouvé les carnivores, ou plutôt, ils les avaient trouvé et apporté des soins. Le groupe d’aventurier avait du essuyer une mauvaise rencontre ; elle n’entra cependant pas dans les détails, se concentrant sur les harpies qui les auraient transporté jusqu’à la bataille. Leurs plumes eurent permis se protéger de la malédiction pétrifiante, ainsi que d’en délivrer les prisonniers. Daemon se remémora alors l’intervention qui l’avait sorti de sa torpeur, juste avant qu’il ne retourne au trépas.

« Oui, je m’en souviens… l’une d’elle est venue à mon aide. »

Sa mémoire avait été sérieusement endommagée, cependant, les souvenirs revenaient graduellement. La discussion entre les harpies, celle qui vint à sa rencontre, avant le commencement de la bataille, avec l’homme bouc…

« Je viens de surprendre une conversation entre les harpies et… un dragon d’Or sortie de nulle part. Sa présence n’étonne personne, sauf moi, faut croire. Il accusait nos libératrices de collusion avec les carnivores. De ce que vous avez vu, la rumeur est-elle vérifiée ? Une armée est en route ? »

L’elfe rousse ne manifesta aucune alarme à ce sujet, pas comme il se l’attendait, car sa réponse fut surprenante. Les carnivores étaient bien décidés à reconquérir Treeof, mais elle déclara que les harpies étaient plus à craindre. Elles auraient imposé leur présence. L’une d’elle voulait massacrer les victimes de la malédiction, mais ses deux sœurs l’auraient raisonné. Daemon s’en souvint, des quelques bribes de discussion…

« Les carnivores veulent reconquérir le village, mais nous devons nous garder des harpies ? » Il baissa la voix. « Devons nous craindre qu’elles trahissent la reine ? »

Sibelle fronça les sourcils, l’air grave, n’en doutant pas une seconde. Elle avait d’ailleurs l’intention de dire tout ce qu’elle savait. La reine allait donc être mis au courant et rapidement. Il avait bien senti une tension entre les femmes oiseaux, mais il ne s’imaginait pas que de réelles intentions s’y tapissaient.

« Très bien. Je vous remercie pour ces informations. »

Sibelle acquiesça d’un signe de tête, avant de s’éloigner, vers les femmes oiseaux qui prenaient congé, en direction du château. Il l’a retint un instant.

« Attendez ! Avez vous vu Azra ? »

Elle lui répondit sans s’arrêter qu’il était à l’orée du bois, et en un seul morceau. Elle fit un dernier signe de main, avant de poursuivre son chemin.

Daemon se dirigea donc vers la forêt, l’esprit habité par les mises en garde de la guerrière. Il était étrange de ressentir à nouveau le calme après toute cette agitation, après ses passages qu’un monde à l’autre. Le bruissement du vent dans les feuillages le transportait dans le temps long d’une accalmie. C’est alors qu’il aperçu une silhouette adossée à un arbre, dans l’ombre, dissimulée sous une longue capuche. Il s’en approcha discrètement, avant de prendre la parole avec brusque.

« Puis-je prétendre à quelques explications, Premier Messager ? »

Azra eut un mouvement brusque, fugitif, le temps de constater son identité. Il resta d’abord interdit, reprenant sa position, avant de déclamer avoir étudié l’obélisque, mais que ses pouvoirs furent insuffisants contenir l’âme qu’il y trouva. Sans s’embrasser de plus amples explications, il lui demanda comment avait-il pu se débarrasser de son sortilège et revenir malgré tout.

La remarque amusa le semi-elfe, qui en rit de bon cœur. Il semblait qu’il plaisait au nécromancien de posséder son âme au creux de ses mains et sa curiosité avait bel et bien causé cet incident notable. Il vint s’asseoir en face de lui.

« J’ignore comment je suis revenu. Je me souviens de l’interminable paralysie, puis d’une délivrance, que je ne dois pas avoir supporté. Je crois avoir perdu la vie… mais je ne m’en souviens pas distinctement. Il eut une grande lumière et je me suis éveillé au cours de la bataille, c’est tout ce que je sais. »

Azraël ricana à son tour, constatant qu’il avait finalement eut ce qu’il voulait éviter. Il expliqua ensuite que c’était la magie de Kiyoheiky, le prêtre ynorien, qui avait d’ailleurs bien failli le tuer. Il est vrai que les liches supportent mal les assauts lumineux.

Le nécromancien s’assit à son tour, avant de s’appesantir sur son sort ; rejoindre Treeof était une mauvaise idée après ce qu’il avait fait, les choses allaient se savoir, et il préférait éviter ce genre de déconvenue. Puisque Daemon était ressuscité, il l’invita à prendre un nouveau départ, à partir… Le truand hocha lentement de la tête, plus en signe de compréhension que d’acceptation.

« Où comptes-tu aller ? »

Il lui proposa de rentrer chez eux, sur Yuimen, chez les Messagers. Il y avait sans doute beaucoup à gagner sur Aliaénon, mais aussi beaucoup trop à perdre. Cependant, le fait d’être attendu par la guilde ne l’attirait pas. Il ne s’était toujours pas défait des méfiances abordées lors de leur rencontre.
A ce moment, Daemon aurait du sauter de joie, mais son sentiment fut tout autre.

« Ma mission est de te ramener à l’ordre, coûte que coûte, et je désire ardemment rejoindre Yuimen et le royaume de Phaïtos. Pourtant, j’éprouve un étrange sentiment à quitter la région comme ça. J’aimerais connaître l’issue de toute cette histoire. Talia D’Omble a tué la Démone… elle m’intrigue de plus en plus. »

Il s’arrêta un instant, pour consulter les novas bleues aux fond du regard de la liche, avant de reprendre.

« La reine ne semble pas avoir tenu compte de tes écarts. Elle est une dame magnanime. Tu pourrais te risquer à revenir à Treeof, ou au moins chez les D’Ombles, pour assister à la suite des événements. »

Azra déclara apprécier la reine, mais pas les ennuis. Une guerre se préparait, il ne savais pas quoi faire et lui demanda même son avis. C’était une chose rare qu’il le consulte.

« Je ne te savais pas aussi peureux. » fit-il en se fendant d’un sourire mutin. « Nul besoin de participer à la guerre activement. Nous n’aurons qu’à quitter les lieux lorsque les combats éclateront, ce qui est immanquable. Pendant ce temps, j’aimerais m’intéresser aux harpies. Elles ont un grand pouvoir et Talia D’Omble possède un artefact puissant, une dague avec laquelle elle a pourfendu la Démone ! Si je pouvais mettre la main dessus… »

Son compère grinça imperceptiblement, mais il ne le manifesta pas son mécontentement de manière manifeste. La dague l’intéressait, il disait ne pas craindre de se lancer à nouveau dans ce bourbier, mais il prétexta être sérieusement affaibli.

« Avec la reine et son bras droit, seul quelques aventuriers ont du comprendre que tu as ramené la Démone. Les habitants de Treeof ignorent tout de ton identité. Reste donc discret, reprend ton masque et trouve toi une autre tenue. »

Ces dernières paroles furent impératives, mais Azra ne s’éleva pas contre ses indications. Un silence pesant suivit, puis Daemon reprit sur ses interrogations.

« Il y a quelque chose que je ne comprends pas… Que tu aies ressucité la créature, d’accord, mais pourquoi habitait-elle ton corps ? »

Un rire de dépit accueillit sa question. La créature avait tenté d’envahir son esprit et Azra s’était défendu dans une formidable bataille mentale, où des assauts successifs, il avait profité d’une charge visant à l’investir, pour s’extraire de sa propre carcasse, contourner et s’approprier celle du géant. Ce qui expliquait pourquoi il avait ensevelit son corps, même si cela ne fonctionna pas longtemps… A l’écoute de ce récit de bataille mentale, Daemon se pétrifia. Le souvenir évanescent de son contact avec l’âme de la créature traversa son esprit. Sa mémoire affectée, il n’en compris pas la signification, mai la terreur était bien présente.

« J… Je vois. »

Il ne comprenait pas ce qui lui arrivait. L’air égaré, il reprit une assurance bancale. Son trouble souleva quelques soupçons chez son compère, qui lui demanda s’il ne lui cachait pas quelque chose.

« Rien, ce n’est rien. La résurrection a troublé ma mémoire ; des images éblouissantes et une peur incompréhensible me traversent… S’il s’est passé quelque chose, moi même je l’ignore. »

Azra ne trouva rien de mieux à lui dire qu’il se voilait la face, qu’il ne prenait pas le temps de chercher, de savoir, sans quoi les grands secrets resteraient toujours hors de sa portée. Mais Daemon n’avait pas le cœur à pousser la réflexion. Il était fatigué, trop fatigué.


[…]


Alors qu'Azra suivit les notables jusqu'au château, Daemon rejoignit le manoir à l’écart de la ville, où il put se loger en toute description, évitant les questions indiscrètes sur la mésaventure. Le matin du lendemain, ne pouvant rester en place, Daemon rejoignit cependant la ville pour prendre ses marques. Il était important pour lui d’approfondir sa connaissance des lieux, qu’il n’avait traversé que très brièvement. Le village était cependant décevant, si ce n’était le deuil qui avait frappé cette nouvelle journée. Plusieurs habitants avaient eu la bonne idée de se trouver en dessous de la Démone lors de sa chute.

Il se baladait donc paisiblement, mémorisant chaque passage et chaque ruelle, avant de s’arrêter devant une bâtisse curieuse. Il s’y engagea et rencontra un vendeur, un homme bouquetin, qui lui demanda s’il pouvait l’aider. Les étoffes et mannequins de pailles exposés indiquaient qu’il était chez un tailleur.

Il constata sa piètre allure, et se dit qu’une mise au jour ne serait pas un mal.

« Je suis à la recherche d’un vêtement, un manteau ou une cape. J’ai sur le dos une étoffe de Mertar… enfin… confectionnée par les nains, mais elle a un peu morflé ces derniers temps. »

L’artisan le constata sans mal, et imagina qu’il cherchait un truc solide, qui tienne les voyages et les combats, avec son allure d’aventurier. Daemon suspecta un compliment douteux, ou une tentative pour lui refourguer de la camelote.

« J’ai beaucoup voyagé ces derniers temps, mais j’ai aussi appris que la vie était courte. J’aimerais me faire plaisir et, puisque je dois me rendre au château, pourquoi pas changer mes habitudes… Vous avez de belles étoffes ? »

Le bouquetin lui fit un clin d’œil assez malsain, se retirant dans son arrière boutique, demandant s’il avait une couleur de prédilection.

« Quelque chose de sobre, quelque chose de sombre. »

Une palette sommaire lui fut dressé.

« Du noir serait parfait ! »


Un rouleau de velours noir apparut devant ses yeux, d’une qualité qu’il n’aurait jamais imaginé dans une pareille boutique. Il ne lui restait plus qu’à préciser sa commande. Inspiré par le faste du velours, son esprit commençait à embrasser quelques rêveries vestimentaires.

« Un tissu très urbain, mais qui me convainc. Faites en une cape d’apparat, assez longue pour s’y perdre, quelque chose de cérémonieux, avec une longue capuche… évidemment. »

L’herbivore accéda à sa demande et demanda des détails supplémentaires sur sa longueur, supposant qu’il ne la voulait pas trainante. Daemon hocha de la tête, avant de coopérer passivement à ses prises de mesures. Lorsque vint l’inévitable question, il répondit sans détour.

« J’ai de l’argent, des yus. »

Cependant, le tailleurs lui demanda si c‘était de l’argent, des bijoux ou des galons, avec une certaine insistance ; il n’en voyait pas d’intérêt, il n’était pas orfèvre et il déclara que ce n’était pas avec cela qu’il allait nourrir sa famille. Daemon lui adressa un regard en coin, légèrement contrarié :

« Je n’ai pas grand chose à vous offrir. »

Il fouilla dans ses poches et en sorti la gemme offerte à la tour d’Or, ainsi que deux runes, des vulgaires cailloux aux yeux d’un non initier. Il ne tenait pas à se séparer de son pendentif en forme de crâne, il décida donc d’ouvrir son sac : un rouleau de corde, un vieux livre de magie noire, un briquet, une potion… et une longue vue qu’il avait trouvé à Endor. L’objet était vieux, mais les lentilles avaient pour vertue d’être toujours intactes. Il réfléchit un instant, puis il retira son manteau.

« Malgré l’état calamiteux de mon manteau, je peux vous assurer qu’il est rare. Il s’agit d’une étoffe travaillée par les nains, un tissu bouilli et renforcé avec des minéraux, ce qui lui donne cet aspect si brillant. Vous ne trouverez rien de semblable en ce monde. »

Mais le marchand ne manqua pas d’ajouter qu'il n’était pas de la première fraicheur. Il y inclus la lorgnette et déclara que c'était bon. Daemon réfléchit un instant, hésitant à se désister d’un objet pouvant s’avérer utile, puis son regard s’arrêta sur le rouleau aux reflets blanchis.

« Marché conclu. » fit-il en acceptant l’affreuse main poilue du marchand, non sans réfréné une grimace.

Satisfait de l’affaire, le marchand lui indiqua qu’elle serait prête au soir, avant de le laisser partir.


[…]


Le lendemain, Daemon ne quitta pas le manoir. Profitant du service des domestiques, il avait légèrement repoussé ses obligations et sa présence dans le château se faisait désirer.

Azraël arriva enfin à sa rencontre, fort de ses nouveaux desseins. Il s’était entretenu avec Talia D’Omble - Daemon ébaucha une grimace - au sujet de sa dague. Cette initiative surprit le semi-elfe. Qu’avait-il dans la tête ? Si son objectif était de ravir la dague, leur convoitise était maintenant établis auprès de la concernée… A cela s’ajouta la réponse de la jeune harpie, qui avait précisé que le pouvoir de la dague était exclusivement destiné à vaincre la Démone.

Vérité ou mensonge, ce chapitre était maintenant clos. Azra en ouvrit alors un autre, car à l’issu de la discussion avec l’héritière, il l’avait enrôlé pour partir à la rencontre des carnivores et user de diplomatie. Il lui proposa ainsi de le suivre. Le truand tenta de se figurer un genre de diplomatie nécrotique, sans trop y parvenir ; enroulé dans sa nouvelle cape, il répondit d’un air détaché.

« Alors l’armée approche… Talia pourrait réellement influencer les carnivores ? »

Le Premier Messager répondit qu’il pouvait essayer, ce à quoi il ajouta qu’en cas d’échec, un massacre servirait bien la grandeur de Phaïtos.

« Oui, qu’ils s’entretuent, cela m’est bien égal. Cependant, je ne vais pas te suivre. Sibelle m’a confié ses craintes : elle pense que les trois harpies projettent de trahir la reine. Je vais donc rester à Treeof, trouver la place forte, pour surveiller la situation. »

Malgré son refus, sa réponse satisfit le nécromant, qui trouva judicieux de garder un œil sur les trois sœurs. Ils échangèrent de brèves salutations, avant de se séparer à nouveau.

Daemon sortit alors de sa torpeur, s’étirant, se levant, pour partir en direction du château pour retrouver la reine et ses invités.


- 3000 mots -
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Dernière édition par Daemon le Ven 30 Mar 2018 19:54, édité 3 fois.

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 Sujet du message: Re: Treeof
MessagePosté: Ven 30 Mar 2018 08:32 
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...

Si elle avait témoigné à Celemar une forme de condoléances, sobres et infâmes condoléances en vérité, il finit par tourné un regard d'homme brisé vers elle et elle se redressa, tentant de fortifier son âme contre cette vision - cette vision d'une détresse qu'elle ne pouvait que comprendre, pour l'avoir elle-même subie, autrefois. Son cœur se serrait mais elle gardait, extérieurement, une mine neutre, impassible. Le combat était derrière eux, ils avaient gagné - c'était l'histoire qu'elle se répétait, l'histoire d'une victoire amère, mais une victoire quand même. Et, aux yeux de la Trinité, il n'y aurait que la victoire qui compterait... non ?

Un seul mot franchit les lèvres de l'archer et vint la frapper, avec tous les sous-entendus qui s'y trouvaient. Un mot de colère, de colère abattue plus que vive. Il ne comprenait pas cette mort, cette énième mort : d'ailleurs, qui pouvait réellement comprendre la perte d'un proche ? Oh, elle ne savait que trop ce qu'il ressentait à ce moment, comment se tournait le monde autour de lui, et ces souvenirs désagréables lui revenaient aussi : elle voyait à nouveau le monde se ternir, se vider de toute beauté, de toute grandeur - et de tout sens, aussi. C'était cela, le pire : l'incompréhension latente, l'absence de toute raison pour justifier le drame. Personne ne pouvait expliquer la mort.

L'archère et ses hommes leur lièrent les poignets. Yurlungur suivait ce qu'il se passait sans grand intérêt, se laissant faire en attendant la suite. Celemar, à ses côtés, ne pouvait faire que de même.

Une petite voix lui disait qu'elle avait échoué. Que tout cela ne lui avait rien appris, finalement : qu'elle s'était tout de même attachée à lui, quand bien même elle saurait qu'elle le trahirait un jour ou l'autre. Qu'elle n'était que futilité absurde, que même ses propres sentiments lui échappaient, que durcir son cœur était ardu, mais pas aussi difficile que de soutenir le regard de cet homme, ce regard empli de toute la tristesse du monde...

Elle ne savait plus où elle en était tout à fait, donc elle regarda distraitement les Carnivores se faire attacher, les mains nouées, liés les uns aux autres le long d'une corde qui leur ferait prendre une formation longue et sinueuse. C'était un peuple qu'on enchaînait comme un troupeau d'esclave : et ce n'était peut-être que ça, finalement, un ensemble de bêtes qui dérivaient lentement vers la sauvagerie, songeait-elle, tentant par là en vain d'ignorer que les barbares et les traîtres, finalement, c'était plutôt son camp à elle.

Le sens de tout cela lui échappait. Il était visiblement d'importance que les Carnivores soient amenés à Treeof, mais quant à savoir pourquoi... Et ils commencèrent à marcher, vers le nord, vers la capitale de la Forêt qui les attendait, inconsciente du péril qui s'approchait. Par reconnaissance pour leur unique action lors de la bataille peut-être, ni elle ni Celemar n'étaient attachés au cordon central, leur laissant toute latitude pour se déplacer autour de la troupe : mais quelques soldats arothiiriens les surveillaient en permanence, souhaitant évidemment éviter toute fuite indésirable.

Elle-même, elle regardait l'archer de loin, constatant son abattement et la déprime qui l'entourait. Peut-être se muerait-elle en colère sourde, peut-être le détruirait-elle lentement de l'intérieur. Elle avait l'étrange certitude, alors qu'elle savait qu'il ne parviendrait jamais à lui pardonner complètement son geste, qu'il fallait qu'elle aille vers lui, qu'elle essaie de s'expliquer. Mais expliquer quoi ? Elle ne pouvait pas dire qu'elle l'avait trahi, qu'elle les avait tous trahis pour la Trinité. Elle ne pouvait rien faire d'autre que mentir, mentir éhontément comme elle l'avait toujours fait. Elle prit une grande inspiration et finit par s'approcher, lentement, pour annoncer d'un ton aussi neutre que ses traits :

« J'ai été égoïste. Je... ne m'attends pas à ce que tu me pardonnes, ni maintenant, ni jamais, même. Mais ce n'était pas mon intention de... de le tuer comme ça. »

Un léger poids se dérobait - elle attendait à présent avec une courte angoisse sa réponse. Mais cela changerait-il quoi que ce soit ? Elle parvenait à peine à le reconnaître. Enfin si : c'était lui, physiquement, mais il avait perdu tout ce qui avait charmé la jeune fille, jusqu'ici - il n'y avait plus ce sourire en coin, cette assurance invincible, cette bonne humeur et ce caractère de pur aventurier. Il n'y avait plus rien de séduisant chez lui, en fait. Au contraire, elle avait peur de lui, peur de sa réaction face à elle et elle se tenait à une certaine distance, l'observant, essayant de guetter chez lui des signes précurseurs de colère.

Mais il n'y avait plus rien chez lui, effectivement - pas même la force de lever son regard vers elle. Il se mit à se plaindre, considérant qu'il aurait dû l'empêcher de se rendre au combat et qu'il aurait dû se rendre compte que quelque chose n'allait pas après la réaction violente qu'il avait eue contre lui. Et, secouant la tête, il se lamenta encore une fois sur la mort de ce frère.

Elle restait stupéfaite, à vrai dire. Si cet abattement lui avait semblé compréhensible dans un premier temps, continuer dans cette voie sans aucune forme de protestation active ne lui apparaissait que comme une pure faiblesse. Il ne voulait même plus se battre, dénué de toute combativité... Et, sans s'énerver, lui demanda seulement quelle avait été, alors, son intention tout à l'heure.

« Je te l'ai déjà dit... Je voulais seulement... te protéger d'eux. »

Elle détourne le regard vers les soldats arothiiriens, fronçant les sourcils. Non, c'était tout de même trop gros - il n'allait pas gober ça. Qu'il s'énerve, bon sang, qu'il se jette sur elle et qu'il se batte - et ils s'expliqueraient avec les poings !

« D'elle, surtout, précisa-t-elle. Elle aurait évité ta flèche... puis elle t'aurait tué. »

C'était possible. Ou alors elle n'en aurait rien fait. Elle était suffisamment habile pour vaincre un adversaire sans le tuer et elle se montrait bien présomptueuse à supposer ainsi quelle aurait été sa réaction. Mais elle ne pouvait pas laisser les choses aller dans ce sens. Non, il fallait qu'elle le pique un minimum, qu'elle essaie de voir s'il lui restait une part d'ardeur. Ce serait tellement plus simple pour elle s'il pouvait seulement s'énerver, si elle pouvait alors se laisser aller, avec lui, à des instincts bien plus primaux...

« Je pense que... que de toute façon, Edmar n'aurait pas survécu, avec ou sans notre intervention. »

Et à nouveau, son regard se braqua sur lui, guettant la rage qu'il aurait dû exprimer s'il était vraiment un homme. Et, fronçant d'abord les sourcils, il finit par s'exclamer, se tournant franchement vers elle, qu'elle cachait des choses. Il voulait savoir, tout simplement : savoir qui était cette femme - la “meurtrière” d'Edmar.

Yurlungur soutint le regard de l'archer et conserva son masque d'intense gravité. (Enfin...) susurra-t-elle pour elle-même. Un écho de rire bouscula ses pensées, un écho étrange et inconscient, mais qui restait lointain, enfermé derrière une expression de marbre.

« C'est une Ombre d'Arothiir. Un groupe d'assassins au service de la Trinité. Les meilleurs d'Aliaénon, je suppose, ou pas loin... »

Elle soupira pour donner à son discours une certaine ampleur dramatique.

« J'en ai rencontré un, et vu le corps d'une victime d'un autre, lorsque j'étais à Arothiir. Ils sont... terriblement dangereux. Ladite victime n'a même pas eu le temps de crier, puisque ce sont d'autres Pâles découvrant son corps qui ont donné l'alerte. Et la dague avait découpé la chair autour du cou d'une façon extrêmement précise, nette... »

Voilà : elle se reposait sur des faits, des faits tangibles et réels. Il n'y avait pas grand-chose, mais Celemar était avide de renseignements à ce propos, elle le sentait : et justement, son rôle à elle, c'était de donner les informations qui le guideraient là où elle voulait qu'il aille.

« Évidemment, cette Ombre-ci s'était volatilisé. De ce que je sais, leur seule maîtrise des lames est déjà mortelle, mais ils savent de plus user d'une forme de... magie ? Je ne sais pas trop comment décrire ça. Mais tu l'as vu toi-même : tu as vu cette archère se changer en ombres et réapparaître juste derrière Börte. »

Et puis, après un bref instant de silence, elle conclut :

« Voilà. J'ai dit tout ce que je savais à leur propos. »

Il n'avait pas l'air bien, le frérot. Ces révélations dont elle lui faisait grâce, il les absorbait avec peine et, aussitôt, demanda consterné comment il serait possible de combattre des ombres - et pourquoi, pourquoi cette scène avec Börte, pourquoi ces morts. Pourquoi cette mort, voulait-il probablement dire. Elle sentait sa colère gronder et cela lui allait. Cela lui allait car la rage lui semblait une caractéristique fondamentalement inaccessible au Celemar qu'elle connaissait : et ici, tout ce qu'il faisait, c'était se déshumaniser lentement. Elle commençait à se détacher de lui, à ne voir derrière son visage pleutre qu'un homme brisé qui n'avait plus que sa gorge pour crier. Et cela la laissait indifférente. Mortellement indifférente.

Quel plaisir.

Elle fronça néanmoins les sourcils, répliquant :

« Je n'en sais rien. Tu sais, ces morts, ce n'est pas grand-chose pour elles, osa-t-elle. Elles laisseraient leur peuple mourir de faim sans sourciller... Quant aux ombres, il vaut mieux ne pas s'opposer à elles. C'est tout. »

Qu'il sente sa rage monter : qu'il se détache encore un peu de celui qu'il avait été et elle n'aurait plus aucun scrupule. Peut-être n'en avait-elle déjà plus, d'ailleurs : tout ce qu'elle avait d'enfant, elle l'avait perdu, morceau après morceau, pour ne laisser qu'une coquille nacrée enveloppant les ténèbres et son cœur. Adoptant un masque plus neutre, elle reprit :

« Je suppose que, pour leur armée, surprendre celle des Carnivores à un lieu qu'ils auraient choisi était le mieux. La Trinité, en s'envolant ce matin et en survolant la Forêt, a dû donner le signal que les Carnivores arrivaient : et comme ils ne se doutaient de rien, il fut facile de les vaincre. »

Elle tourna son regard vers le brancard de Börte, qui n'avait pas montré signe de vie depuis le début de leur marche, et rajouta :

« Je présume qu'elles ont quelque chose derrière la tête. Sans doute préfèrent-elles régner sur une Forêt et ses habitants que sur une parcelle de territoire seule. »

Cela sonnait faux. Ce n'était probablement pas l'intention de la Trinité, qui pourrait tout aussi bien coloniser la Forêt avec des habitants fidèles une fois celle-ci purgée de ses habitants devenus monstrueux. Mais autant tromper Celemar... Elle releva son regard vers l'archer, encore une fois : un regard qui ne lui faisait plus peur, et dont elle appréciait presque la douleur qu'elle y lisait.

« Ou peut-être qu'elles ont un véritable projet qu'elles comptent mettre en œuvre lorsque nous arriverons, proposa-t-elle sans pouvoir s'en empêcher. »

Et, après un instant de réflexion, elle lâcha enfin :

« Dans tous les cas, notre avancée est sérieusement ralentie par tous les prisonniers et les blessés. Nous n'arriverons pas à Treeof dès ce soir, alors que la Trinité y est déjà, puisqu'elles ne sont pas ici avec leur armée. »

Elle laissa sa réflexion en suspens, semblant attendre de Celemar une forme d'assentiment ou de correction. Sibelle et Sirat n'étaient pas connus pour leur discrétion : mais la Trinité avait un plan, la Trinité avait toujours un plan... Elle ne s'inquiétait pas. Pour le moment, tout marchait comme elles l'avaient prévu - et rien ni personne ne pourrait les empêcher d'atteindre leur objectif.

Celemar, n'ayant rien à apporter, confirma seulement qu'ils n'y seraient pas le soir même. Et il conclut sobrement par la volonté qu'il avait de tuer toutes ces Ombres, la voix emplie d'une détermination froide, glaciale. Une détermination risible, devant les capacités de l'archer. Lui, tuer une Ombre ? Il pourrait à peine en érafler une qu'il serait déjà mort trois fois. Non, c'était ridicule : il ne se rendait pas compte.

Et pourtant...

Elle avait la possibilité, à présent, d'utiliser sa rage à son avantage. Elle se souvenait fort bien de cette Ombre renégate qu'Arsok poursuivait, à Arothiir. Il n'avait qu'à commencer par celle-ci, puis on l'éliminerait.

Cette idée de voir l'archer mort ne l'attristait même pas. En fait, il était déjà mort à moitié dans la clairière tout à l'heure : à présent, il était devenu un autre, un petit concentré d'amertume et de haine. Une petite boule de noirceur, un peu comme elle - mais infiniment moins concentré et infiniment plus malléable.

« Tu devras t'entraîner. Tu devras devenir plus puissant, infiniment plus puissant que ce que tu es devenu jusqu'ici. »

Elle se rapprocha un peu de lui, baissant la voix. Ils entraient dans une conspiration sournoise, car l'une des parties comptait tôt ou tard trahir l'autre. Mais une telle conspiration... Ça la rassurait. Elle le comprenait, elle le comprenait tout à fait : et il n'y avait rien qui lui fît plus plaisir que de le savoir entièrement entre ses mains et de n'être plus attachée à lui d'aucune façon. C'était... un délicieux sentiment de pouvoir.

« Il te faudra être plus rusé, plus patient que ce que tu imagines sans doute, rajouta-t-elle. Elles sont nombreuses et dangereuses, vives et organisées. La seule façon de les vaincre, une par une, sera sans doute de les tromper, de les abattre par des moyens qui n'auront plus rien de moral, plus rien de loyal ou d'honnête. »

Il suffirait de si peu pour qu'il bascule à présent... mais il n'y avait pas de place pour l'hésitation : il fallait qu'il accepte immédiatement ou il n'en aurait jamais le courage. Elle laissa un instant le suspens flotter dans les airs puis conclut :

« Es-tu prêt pour tout ça ? »

Elle ne savait pas s'il n'allait pas, par un énième coup du sort, lui échapper lui aussi - tout comme la situation avait dérapé tout à l'heure, tout comme sa tentative de convaincre Börte de se diriger vers une solution diplomatique à Treeof s'était finalement retournée contre elle lorsqu'il s'était jeté à l'assaut des troupes arothiiriennes, emportant avec lui ses Carnivores. Elle le fixait, donc, avec intensité et une forme de mépris avancé, comme si elle s'attendait déjà à ce qu'il se dégonfle.

Mais il n'en fut rien. Il se renforça dans sa haine, il se durcit et se raidit et acquiesça, répliquant qu'il vengerait coûte que coûte la mort de son frère. Ce n'était finalement que la vengeance qui le guiderait et son objectif - irréalisable - était de tuer toutes les Ombres... L'expression de Yurlungur se détendit et une satisfaction douce la combla.

« Dans ce cas, j'ai une esquisse de plan. »

Ce n'était pas tout à fait un plan : ou plutôt, si, c'en était un, mais pour lui qui n'avait pas toutes les clés en main, ça n'apparaîtrait que comme une action prévue à la va-vite, tentée comme ça avec des chances de succès ridicules. Mais il allait l'aider à faire ce qu'elle souhaitait : mieux, elle pourrait fricoter avec cette Ombre sans qu'il ne se doute de rien, faisant mine de servir sous chape ses desseins à lui. Il était naïf, il était jeune et incapable de contrôler ses propres sentiments. Ce serait facile.

« Je vais me rapprocher d'elle. »

Elle laissa un court laps de temps pour le laisser comprendre de qui elle parlait.

« Il faut utiliser le seul avantage qui est encore nôtre : que la flèche ait empêché Edmar de la tuer. Je peux essayer de m'infiltrer auprès d'elle si tu m'y aides, mais nous ne pourrons plus nous parler avant la bataille de Treeof. »

Voilà qui lui permettrait de prendre contact avec cette Ombre qui l'intriguait. Elle ne jouait même pas sur deux tableaux à la fois : le rêve de Celemar était voué à l'échec, de toute façon. Elle ne faisait que l'utiliser.

« Le plan est simple. Tu te mets à me frapper, aussi fort que tu le peux, en criant que je suis une traîtresse, que j'ai assassiné ton frère pour la sauver elle, jusqu'à ce que les soldats nous séparent. Ça me servira pour lui parler en privé et je me ferai bien voir. »

Elle soupira.

« Ce ne sera drôle pour aucun d'entre nous. Mais lorsque Treeof sera prise, je suppose qu'on nous détachera. Nous aviserons alors pour la suite. J'aurai éventuellement besoin de toi pour éviter que tous les Carnivores me tombent dessus... »

Et puis, laissant le temps à Celemar de comprendre tout ça, elle conclut :

« À toi maintenant. Frappe. »

Elle ne semblait pas prête à en dire davantage et attendait seulement, ses deux grands yeux bleus tournés vers l'archer. Cela la détendait, au fond. Qu'il frappe et brise à jamais le souvenir de cette tendresse qu'elle avait eue pour lui : qu'il la frappe elle, une jeune fille, et cesse enfin d'être l'ancien Celemar, celui qui voulait l'effrayer avec une histoire au coin du feu. Qu'il révèle sa part sombre, pour qu'elle l'assassine sans remords.

Il ne réagit dans un premier temps pas, réfléchissant seulement. Et puis, enfin, avec une rage et une ardeur nouvelle, il se rua vers elle, rugissant. Elle se laissa faire, un sourire sur le coin des lèvres : il lui asséna un coup violent sur le haut du crâne, l'étourdissant un instant, avant de la faire chuter au sol d'un coup de pied et il se jeta sur elle, les mains encore liées, pour la frapper aussi fort qu'il le pouvait. Et il hurlait, hurlait : il hurlait ce qu'elle lui avait dit d'hurler, il hurlait sa rage et il hurlait la perte de son âme, qu'il avait troquée contre une vengeance illusoire, contre une esquisse de sombre réconfort.

Les gardes finirent par accourir et les séparer, avant d'emmener Celemar et de l'attacher le long de la ligne des Carnivores. Il l'avait rudement cognée, le bougre : elle aurait sans doute des contusions le long de son corps - rien de bien dramatique - et, autour de son œil droit, elle sentait une douleur qui lui laissait présager un coquard en formation.

Elle se releva lentement, sans croiser le regard des soldats qui lui étaient venus en aide, et reprit sa marche.

Une petite heure passa. L'incident n'avait pas fait grand bruit, ou alors elle ne l'avait pas entendu. Celemar n'en avait probablement pas parlé avec ses voisins de cordée : quant aux Carnivores qui avaient assisté à l'incident, elle se fichait de leur avis. Les soldats, quant à eux, n'avaient pas grand intérêt non plus. La seule qui comptait vraiment, et qui finit par s'approcher d'elle, visiblement pas peu fière de son coup, lui annonça alors avoir reçu par la pierre de vision un message d'importance, sans en révéler pour autant le contenu.

(Tant mieux,) songea-t-elle. Si ça pouvait l'aider à prendre Treeof plus facilement... Elle demanda cependant, avant que l'archère ne reparte rejoindre le groupe de tête :

« Pourrais-je vous parler en privé, ce soir par exemple ? »

Elle ne souhaitait pas que trop soient au courant de ce qu'il se dirait. L'Ombre se retourna et la saisit sans ménagement par les poignets, l'entraînant à l'écart avant de lui laisser la parole. C'était fantastique : il ne transparaissait dans les yeux de cette femme aucune empathie, pas la moindre touche d'humanité ou de compassion. Mais elle avait accepté cette entrevue, malgré tout... Yurlungur ne la craignait pas - ou du moins, pas autant qu'Arsok, étrangement. Elle avança simplement :

« Je suis également aux ordres de la Trinité. Il est inutile de me garder attachée. »

Elle montrait avec cela une certaine assurance, attendant toutefois la réaction de l'archère qui ne se fit pas attendre. Sans trahir la moindre émotion, elle ne la détacha pas et demanda seulement ce qui faisait croire à la jeune fille qu'elle était elle-même obéissante à la Trinité.

Elle la prenait vraiment pour une bleue. Certes, tout son corps était couvert et il n'y avait nulle trace du tatouage dont la signification lui avait été expliquée par Arsok - mais tout de même. C'était trop gros, alors même qu'elle menait à travers la Forêt d'Émeraude une armée arothiirienne. Elle sourit donc, amusée par le sous-entendu évidemment faux de la générale.

« Ce serait étonnant. Il n'y a à ma connaissance qu'une seule Ombre d'Arothiir qui soit ouvertement opposée à la Trinité, donc je suppose que ce n'est pas vous. »

Elle secoua la tête davantage avant de répondre simplement :

« Pourquoi cette armée vous suivrait-elle, si vous n'étiez mandatée par elles ? »

Cela eut au moins le mérite de déclencher chez son interlocutrice une certaine réaction, demandant vivement qui pouvait être cette Ombre, comment elle savait cela, la tirant à elle par les poignets avant de remarquer la marque apposée par Arsok et de comprendre un peu. D'un coup de dague, elle coupa les liens qui obstruaient jusqu'ici les mouvements de la jeune fille et, gardant toujours ses émotions invisibles, demanda ce qu'elle faisait ici pour la Trinité. Elle se les frotta quelques instants avant de répondre :

« J'agis à mon niveau. Tout à l'heure, j'ai empêché l'autre archer de vous tirer dessus, par exemple. »

Elle laisse un temps de silence puis ajoute :

« Je transmets des informations, aussi. Par la pierre, ou directement. Il y a à Treeof des individus qui ne sont pas plus d'ici que vous ou moi et qu'il ne faudra pas sous-estimer. »

Et puis finalement, concernant l'Ombre renégate, elle précise :

« Vous devriez vous adresser au poseur de cette marque, puisque vous le connaissez : c'est lui qui traque actuellement l'Ombre qui a trahi la Trinité. »

Voilà qui en disait suffisamment pour attiser la curiosité de cette Ombre sans trop en révéler. Elle opina du chef et, évitant le sujet sensible de l'Ombre renégate, elle reprit sur le “contact” qu'elle avait et qui aurait donc transmis l'information comme quoi une partie des défenses de Treeof auraient été anéanties. Comment ? Par quoi ? Yurlungur cacha tout signe de surprise face à cette femme dont elle sentait le regard l'enrober, prêt à s'introduire dans la moindre brèche : avant qu'elle n'ait le temps de répondre, l'archère piquée demanda si elle pensait que la flèche aurait réellement été d'un quelconque danger. La jeune fille sourit simplement, indolemment.

« Non, bien sûr. Mais on n'est jamais trop prudent, n'est-ce pas ? Une amie commune souhaite éviter qu'un miracle ne se produise en faveur de nos ennemis et j'exécutais simplement ses ordres. »

Son visage redevient plus sérieux et elle répond :

« J'ai de nombreux contacts et, comme vous avez réceptionné le message à ma place, je ne peux pas savoir de qui il s'agit. À quoi ressemblait sa voix ? Qu'a-t-il dit précisément ? »

Elle décrit la voix comme profonde, masculine. Ça restreignait déjà les choix : mais quand elle entendit le qualificatif employé, “petite”, elle identifia l'humoran. Et l'Ombre prit l'information au mot, pensant les contacts “sûrs” et, surtout, considérant un tel réseau comme une imprudence monumentale. C'était étrange. Ça n'avait jamais fait de mal à personne de se tenir informé. Et puis, avec un peu plus de légèreté, sans doute piquée par la curiosité, elle demanda qui était la mystérieuse “amie commune”.

Yurlungur prit conscience d'une possible bourde quant à l'emploi des mots. “Amie” n'était probablement pas correct pour parler d'une des Harpies, tout compte fait : et si elle l'avait employé comme ça, c'était avec ironie, pensant que l'archère la comprendrait, ce qui la plaçait désormais dans la situation déplaisante de l'humoriste qui a raté sa blague et doit s'attendre à recevoir des tomates pourries.

« Je suppose que c'est Sirat, alors, répondit-elle à propos du fameux message. Un homme-tigre, ou quelque chose comme ça... Il est relativement peu sûr, comme allié, mais il avait l'air de vouloir aider la Trinité... Aucune idée de ce qu'elles ont conclu avec lui. »

Et puis, concernant les contacts, elle rétorqua seulement :

« Sûrs ? Aucun n'est sûr. Je ne les connais que depuis quelques semaines, et certains ne m'ont jamais adressé la parole. Sans les connaître, vous ne pourrez pas les contacter via la pierre, bien que vous pourrez recevoir les messages : mais j'ai déjà prévenu mes contacts les plus sûrs, justement, que je remettais cette pierre à Börte. »

Elle haussa les épaules, l'air insouciante. Au moins avait-elle indiqué qu'une telle pierre était inutile pour tout autre qu'elle et que, comme elle était une alliée, on pourrait peut-être la lui rendre...

« À vous de voir. »

Et puis, elle osa un sourire pour répondre à l'interrogation sur cette “amie commune”.

« Je suis certaine que vous pouvez trouver par vous-même. »

Ce n'était franchement pas dur, mais l'Ombre fronça les sourcils, rétorquant qu'elle n'avait pas que ça à faire et que le jeu des devinettes, c'était très peu pour elle. Dommage. Puis elle ordonna d'obtenir une description détaillée des différents acteurs qui se trouveraient à Treeof.

« Bon, bon. »

Elle reprit une expression plus sérieuse, bien qu'un peu attristée par le manque d'esprit joueur chez l'archère.

« Les Pâles ont dressé une barricade de bois autour de la cité, décrit-elle. Lorsque j'y étais, il y a trois jours, elle était encore ridicule. Elle ne vous causera aucun souci. En revanche, le château est situé sur le lac et sera sans doute plus difficile à prendre. »

Elle croisa les doigts devant elle et poursuivit :

« Quant aux différentes personnalités présentes, ils sont six à être venus dans la Forêt en même temps que moi et à se trouver là-bas. Deux d'entre eux me sont parfaitement inconnus : un type dans une sorte de robe noire et son suivant, des mages je suppose.

Deux autres ont été emmenés sur place par la Trinité ce matin, par voie des airs, Sirat et une autre guerrière elfe. Ils ne sont pas à sous-estimer mais, de ce que j'ai vu, n'excellent qu'au corps-à-corps. Je ne connais pas bien leurs objectifs. Sirat est l'un des Sauveurs d'Aliaénon, d'ailleurs.

Enfin, deux autres Sauveurs : un mage humain et un soldat. Le premier est rigolo mais pas très dangereux : quant au second, il souhaite protéger la Forêt à tout prix.
»

Son regard devint un peu triste.

« Il vous opposera probablement une certaine résistance. Parmi les Végétariens, le seul véritable guerrier que j'aie croisé était Astidenix, mais vous devez déjà le connaître. »

Voilà qui était une description fidèle de ce qui les attendait. Les Végétariens, si de plus une grande partie de leur armée avait été décimée ce matin, n'auraient de toute façon guère pu opposer de résistance : les seuls à véritablement prendre en compte, c'étaient ceux qu'elle avait cités.

Mais l'archère était surprise des présupposés de la jeune fille, rétorquant qu'elle n'avait pas forcément l'intention de prendre la cité par la force. Elle avançait que le château n'avait aucun intérêt, pas plus que le village en lui-même. Et, intéressée, elle demanda alors qui était celui qui était concerné par la protection de la Forêt.

Yurlungur cacha sa surprise et ne répondit pas aux indications de l'archère sur les objectifs de la Trinité. Le puzzle n'en devenait que plus complexe à mesure qu'il s'éclaircissait - mais ils sauraient bien assez tôt...

« Son nom est Kiyoheïki, Sauveur d'Aliaénon, donc, lâcha-t-elle enfin. Je ne l'ai jamais vu combattre, mais il a l'air puissant, ou au moins expérimenté et, comme je l'ai dit, déterminé. »

Elle sembla hésiter puis rajouta quand même :

« Néanmoins, je pense qu'il voudra éviter d'avoir une mort sur la conscience. Je pense qu'il est possible d'éviter la confrontation avec lui... Il tient à ses valeurs. Placez-le face à un dilemme et vous le vaincrez sans combattre. »

Elle releva la tête et précisa :

« Par exemple, utilisez-moi. »

C'était une mauvaise idée et elle le sentit immédiatement. Mais ça n'échappa pas à l'archère qui, même si elle connaissait visiblement de nombreuses manières de vaincre sans combattre - vaincre sans péril et donc sans gloire, aurait critiqué un vulgaire “héros” qui ne connaîtrait rien à la réalité de la guerre -, elle lui demanda instantanément en quoi elle, Yurlungur, pourrait représenter un dilemme pour l'Ynorien.

Elle hésita à nouveau. Kiyoheïki... Et lui, ne tenait-elle pas un peu à la protection qu'il lui avait offerte, le temps du voyage ? Il était noble, elle le reconnaissait : noble et valeureux. En fait, c'était un peu comme un prince charmant, inaccessible et lointain, qui se battait pour des idéaux alors qu'elle ne faisait que tout cela que pour elle-même.

« Peut-être qu'il tient à moi... osa-t-elle. Vous pourriez menacer de me tuer. Je ne pense pas qu'il supporte d'être responsable de cela... »

Elle secoua la tête.

« Mais je ne le connais pas suffisamment pour savoir ce qui l'emporterait entre sa loyauté à la Forêt et son code moral personnel. Si vous avez un meilleur plan, ça vaudra mieux. »

Elle ne savait plus bien. Après tout, l'aurait-elle abandonné en pareille circonstance ? Elle ne savait même pas. Mais elle savait qu'il tenterait de se dresser en travers de l'avancée arothiirienne et cela ne lui convenait pas. Cela ne conviendrait pas à l'archère et c'était surtout cela qui la gênait : l'idée effroyable que le noble Ynorien puisse en venir à être tué par l'une de ces flèches était terrible.

Elle avait déjà perdu Celemar ce matin et il lui fallait à présent songer à la perte de Kiyo...

Elle ne savait même pas pourquoi elle tenait à lui. Il y avait quelque chose, dans toute la prestance, le charisme subtil qui émanait de son être - une forme d'assurance, de maintien. L'idéal d'un père qu'elle n'avait jamais eu ou qu'elle avait perdu trop tôt, quelque chose de ce genre peut-être. Et en même temps, elle craignait qu'il ne s'intéressât qu'à peine à elle, qu'il la prît pour un petit monstre de cruauté, après les quelques paroles qui lui avaient échappé devant lui - elle craignait, surtout, qu'il lui en veuille pour sa complicité avec la Trinité.

Jusqu'où pourrait-elle aller pour la gloire et le pouvoir ? Quelque chose en elle ricana sobrement, se moquant de sa propre fragilité.

Et l'archère renchérit avec un sérieux atroce qu'elle ne prononçait jamais une menace de mort sans être prête à passer à l'acte. Elle demandait, finalement, pourquoi Yurlungur souhaitait mettre sa vie en péril pour lui, alors qu'il serait bien plus simple de le tuer lui, ce qui pourrait se faire, précisa-t-elle, sans douleur pour lui - sans même qu'il ne voie la mort lui tomber dessus.

Elle réprima un frisson affreux qui montait en elle. Elle était dure, pensait-elle - tentait-elle de se convaincre, plutôt, tandis qu'une moue mal assurée déformait ses traits derrière lesquels elle cachait son dilemme.

Lui, l'aurait-il fait pour elle ? C'était toute la question de savoir s'il tenait à elle et elle ne savait pas, justement, si elle était prête à tenter le coup. Elle n'osait pas - il y avait quelque chose de profond, un instinct de survie, qui lui disait de faire attention, qu'il y avait toujours un risque, un risque absurde face à la solution si facile que lui proposait l'Ombre. Et il y avait cette part d'elle qui voulait y croire, qui surgissait à nouveau et qu'elle n'osait plus réprimer.

D'une voix faible, ne trouvant rien à dire d'autre, elle annonça :

« Vous le sous-estimez, je pense. »

Elle ne savait même pas de quoi il était capable. Peut-être avait-elle raison : peut-être n'avait-il aucune chance de la voir venir, peut-être ne pourrait-il même pas lutter. Et puis, après quelques instants, elle céda.

« Si vous pouvez faire ça sans douleur... C'est sans doute le mieux. »

C'était horrible. Pour la seconde fois, elle se sentait vulnérable. Combien lui faudrait-il briser de liens qu'elle avait noués à moitié avant de devenir complètement indifférente à tous ces gens qui l'entouraient ? L'archère restait toujours enfermée dans son sérieux indolore et répliqua sèchement que c'était Yurlungur qui la sous-estimait.

Elle se força à sourire, prenant une mine plus détendue en songeant avec l'abandon du condamné que c'était trop tard, à présent.

« Très bien. Je vous fais confiance... »

Et puis, après un court silence pendant lequel elle se laissa porter par une vague de tristesse confuse, elle reprit :

« Au fait, moi, c'est Yurlungur. »

Le silence coula autour d'elle. C'était un sujet si badin, un nom : elle ne s'était pas présentée, jusqu'ici, préférant parler de morts et de meurtres. Un sujet si sensible et un sujet si connu des Ombres et de leurs lames. Mais l'archère répondit seulement qu'elle le savait déjà. La jeune fille arqua un sourcil et, comme l'Arothiirienne ne poursuivait pas, reprit :

« Bon, éventuellement, j'aurais apprécié connaître le vôtre, de nom, mais passons. Vous saviez ? »

Elle était à vrai dire intriguée. Un nouveau pouvoir de lecture dans les pensées, ou quelque chose du genre, comme Jess ? C'était peu probable, à vrai dire : même Arsok n'avait pas réussi à comprendre quelle était sa véritable identité - croyait-elle. Mais l'archère répondit qu'elle était venue après s'être informée sur les enjeux et les ennemis qu'elle risquait d'avoir à rencontrer. Elle n'avait pas été choisie à la légère et savait déjà ce qu'il y avait à savoir sur Sirat, Sibelle, Kiyo ou même Xël.

Et, en ayant fini, laissant Yurlungur sur un vague sentiment d'inutilité, elle se retourna et fit quelques mètres avant de se retourner à nouveau pour souffler son nom. Un nom murmuré dans le vent, qui atteint les oreilles de la jeune fille. Un nom visiblement peu connu, vu la réticence qu'elle avait eue à le donner, mais qui fut enregistré profondément. Un nom porteur de gloire et, de fait, apportant une certaine satisfaction à la jeune fille, comme si cela justifiait tout d'un coup toutes ses manipulations.

L'Ombre savait déjà tout, donc elle savait que Yurlungur n'avait pas menti : ainsi, cette dernière venait de se faire, sinon une alliée, du moins une relation avec laquelle une certaine confiance était instaurée. L'essentiel était que l'archère tînt la jeune fille pour une présence amicale et franche - pour le reste, on aviserait...


...

_________________


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Dernière édition par Yurlungur le Sam 31 Mar 2018 10:00, édité 4 fois.

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 Sujet du message: Re: Treeof
MessagePosté: Ven 30 Mar 2018 13:48 
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Une fois retrouvés, presque simultanément, les deux combattants, réalisant probablement leur manque de retenue, se séparèrent brusquement. Sirat se retourna vers les harpies, et Sibelle scruta le sol faisant mine de chercher quelque chose tout en écoutant les paroles de ces dames ailées. Jess, celle-là même qui la première avait cédé deux de ses plumes pour protéger Sibelle et Sirat de la paralysie, répondit aux questions accusatrices du petit dragon. Elle lui rappela sèchement qu’elles venaient de les sauver comme elle l’avait fait cinq ans plus tôt lors de la Grande Guerre. Elle affirma avoir toujours œuvré pour l’unité de son peuple. Cette harpie, qui semblait la plus sage des trois, était également celle qui avait trouvé un compromis lorsque Guigne refusait de libérer les végétariens.

(Peut-être que Jess est sincère, mais je me demande si Guigne est du même avis)

Pendant qu’elle simulait chercher un objet quelconque au sol, Sibelle aperçut des plumes d’harpies. Sentant encore celle coincée dans son corsage, elle se dit qu’en posséder quelques-unes de plus pourrait s’avérer utile. C’est ainsi qu’elle se mit à la recherche de plumes intactes en portant toujours une oreille attentive à ce qui se disait. La reine Sheela tentait de calmer la discussion argumentant avec raison que suffisamment de sang avait coulé dans la journée. Plus diplomate que les autres harpies, elle se tourna vers elles, les remerciant et les invitant dans son château. L'offre fut acceptée et elles se mirent en route. Contrairement à Sirat, Sibelle ne les suivit point.

Alors qu’elle venait de ranger dans son sac six plumes d’harpies à peu près intactes, elle avisa Daemon qui descendait tant bien que mal du bras du géant de pierre.

Elle savait qu’il était là au début du combat et pensait qu’il pouvait répondre à quelques-unes de ses questions. Elle s’approcha donc de lui pendant qu’il achevait sa descente et sans préambule lui demanda, tout en pointant le titan du menton :

« Dites-moi qu'elle était cette chose ? D’où vient-elle ? Et comment est-elle arrivée ici ? »

Agile, Daemon glissa sur une large plaque et atterrit près de l’hinionne. Plus avisé que celle-ci sur les règles de l’étiquette, il lui demanda si elle était bien Sibelle. Ce à quoi elle répondit :

« Oui, effectivement je suis Sibelle et vous Daemon ?»


Il confirma son identité après quoi, il répondit aux premières interrogations de la maître d’armes. Il ne se souvenait plus du nom exact du monstre de pierre, même si la reine le lui avait dit. Il savait par contre qu’il s’agissait d’une créature des temps anciens vaincus par les ancêtres des harpies. Il s’arrêta un instant, ses yeux fixés sur ses pieds avant de reprendre. Lui et Azra enquêtaient sur l’obélisque de la forêt. Ils pensaient qu’il était responsable de la transformation subite des habitants de Treeof et peut-être lié à l’éveil des titans. Ils en vinrent à la conclusion que le peuple de Treeof tenait leur pouvoir de transformation de cette démone. Par contre, une fois sur les lieux, ils réalisèrent que cette créature était déjà éveillée et que l’obélisque n’était rien de moins que son arme. Ils furent alors paralysés. Il s’arrêta là sachant que Sibelle connaissait la suite.

Puis ce fut à son tour de questionner Sibelle. Il l’avait vu partir vers la forêt en compagnie de Sirat, il lui demanda donc s’ils avaient trouvé les carnivores. Ayant pu bénéficier d’informations précieuses, la guerrière répondit à son tour de bon cœur.

« Oui, nous avons trouvé les carnivores.... où ce sont plutôt qui nous ont trouvés. Nous étions mal en point et ils nous ont transportés et soignés. »

Puis elle rajouta :

« Les trois harpies étaient déjà là. Ce sont elles qui nous ont transportés jusqu'à la clairière. Lorsque nous sommes arrivés, vous étiez en effet paralysés. Elles vous ont libérés en vous offrant une plume. Elles nous en ont offert également à moi et Sirat afin que nous ne subissions pas le même sort que vous. »

Pour ce qui est de l’arrivée des harpies, il se souvint que l’une d’elles était venue à son aide.
Daemon avoua avoir surpris une conversation des harpies. Sibelle l’écouta sans lui dire qu’elle avait entendu la fin de la conversation. Il parla du dragon d’or ne sachant pas davantage que la belle d’où il sortait. Mais il affirma que ce dragon avait accusé les trois d’Arothir d’être de mèches avec les carnivores. Il demanda alors si c’était vrai et si une armée était en route.

À cela Sibelle répondit :

« Croyez-moi, les harpies sont plus à craindre que les carnivores. J'étais d'ailleurs avec eux, mais je suis arrivée avec les harpies par la voie des airs. Ces trois femmes ont imposé leurs présences. C'était un ultimatum, sinon elles menaçaient de tout massacrer. Et l'une d'elles ne voulait pas vous libérer, ce sont les deux autres qui ont réussi à la raisonner. Pour ce qui est des carnivores veulent reconquérir leur village d'où ils ont été injustement expulsés. »

Tout comme Sibelle, Daemon semblait douter des harpies, et c’est en chuchotant qu’il demanda à Sibelle, si la reine d’Arothir pouvait trahir la reine de Treeof. À cela, Sibelle, les sourcils froncés, répondit sans hésiter :

« Je n'en doute pas une seconde et j'ai bien l'intention de dire à la reine tout ce que je sais.»

Dameon prit congé de Sibelle en la remerciant. Elle lui fit donc un signe de tête en signe de salut et tourna les talons.

Alors qu’elle n’avait fait que quelques pas, Daemon l’interpella, s’informant si elle avait vu son compagnon Azraël. Elle se tourna la tête dans sa direction et sans s'arrêter répondit :

« Oui, il était à l'orée des bois et en un morceau. »

Daemon sourit à cette nouvelle et fit signe de la tête en guise de salut. L’hinionne fit alors un signe de la main et poursuivit son chemin.

La guerrière prit le chemin du château. Il allait franchir les portes lorsque Astidenix l'apostropha. Sibelle ne s'en offusqua point, il trouvait normal qu'une certaine sécurité soit exercée afin de protéger la reine. Lorsqu'elle lui dit désirer un entretien avec la reine, celui-ci lui accorda, la reconduisant jusqu'à celle-ci. Dès qu'elle vit l'hinionne la reine lui souhaita la bienvenue.

Sibelle répondit par un signe de tête militaire au mot de bienvenue et engagea la parole.

« Je suis Sibelle, aventurière de Yuimen. J'étais avec les carnivores et j'aimerais vous faire part de quelques faits qui m'inquiètent au sujet des Jess, Sable et Guigne. »

Cette reine à l'allure plus jeune et fragile salua la maître d'armes tout en précisant qu'elle se souvenait de l'avoir aperçu dans la clairière. Elle l'avait vu arriver avec les Trois d'Arothiir. Elle la pria de parler sans crainte d'être entendu par d'autres oreilles que les siennes.

Jugeant qu'elle pouvait faire confiance en la reine, Sibelle poursuivit:

« Moi, Sirat, Yurlungur et Celemar cherchions le clan des carnivores. Après une journée de marche, nous avons établi un campement et des animaux monstrueux nous ont attaqués dans la nuit. Nous avons pu vaincre ces bêtes, mais nous étions blessés gravement. Les carnivores nous ont transporté sur des brancards jusqu'aux villages des hommes-rats où nous reçûmes des soins. Les carnivores voulaient récupérer leur droit sur Treeof. Les hommes rats acceptaient de les aider dans leurs entreprises... Mais les trois d'Arothir étaient là également. Elles annoncèrent vouloir apporter leur aide.... Mais en fait, elles imposèrent plutôt leur présence. »

Sibelle s'arrêta un instant pour remettre ses idées en place et poursuivit:

« En fait, elles disaient que leurs armées étaient déjà en place et qu'elles massacreraient tous ceux qui n'étaient pas leurs alliés. Elles voulaient marcher sur Treeof et tout détruire. Sirat a discuté avec elle et a conclu un marché. Il était prêt à discuter avec vous et si vous acceptiez de céder votre poste de reine aux Trois harpies, elles n'attaqueraient ni les végétariens ni les carnivores et s'arrangeraient afin que la paix soit rétablie.»

Sibelle n'aimait pas ces trois harpies et ça se devinait par le ton qu'elle prenait lorsqu'elles parlaient d'elles ... mais elle en avait encore beaucoup à dire.

« Le soir avant notre départ, elles vinent nous retrouver et nous offrirent de nous transporter jusqu'à Treeof. Moi et Sirat avons accepté l'invitation alors qu'Yurlungur et Celemar l'ont refusé. Moi je me méfiais de ces femmes et je ne voulais les surveiller de près.... donc nous sommes parties à vol d'oiseau. Mais les carnivores sont partis bien avant nous... car ils partaient à pied...Je ne connais pas beaucoup votre région et le temps qu'ils auraient dû prendre pour se rendre jusqu'ici, mais il me semble qu'ils tardent.»

Ayant remarqué les expressions changeantes sur le visage de la reine, Sibelle se tut enfin impatiente d'entendre la position de la reine. D'un ton calme, digne d'une reine, elle remercie la maître d'armes pour ce rapport détaillé et inquiétant sur plusieurs points. Börte-a-Tchino, à la tête des carnivores, l'avait déjà prévenu de leur retour, ce qui expliquait qu'ils avaient érigé des palissades pour protéger Treeof. Les intentions des trois harpies la surprirent grandement. Elle n'était pas sans ignorer leur souhait d'indépendance, mais elle n'était pas convaincue qu'elles iraient jusqu'à détruire Treeof, village du Peuple pâle. Elle les savait prudentes et rusées. Et elle rappela à Sibelle, qu'elles avaient aussi participé au combat contre la démone venue du passé, sauvant ainsi la reine et ses habitants. Il serait mal avisé de les expulser soudainement mettant en danger Sirat et Sibelle les seuls pouvant posséder une telle information.

La reine avait prononcé de sages paroles et la guerrière ne pouvait faire autrement qu'être d'accord avec elle.

« Je tenais seulement à vous prévenir de vous en méfier... Lors de notre arrivée, Guigne ne voulait pas délivrer les végétariens de leur paralysie, ce sont ses sœurs qui l'ont persuadée. Mais moi, je m'inquiète pour les carnivores. Ils sont partis plusieurs heures avant nous. Rassurez-moi, c'est normal qu'ils tardent ainsi ? »

Fronçant les sourcils, la reine rappela à Sibelle qu'elle s'était rendue sur Treeof rapidement parce qu'elle avait voler jusqu'ici, il en était autrement lorsqu'il s'agit de voyager à pied et en grand nombre. Et puis, elle aurait dû le savoir puisqu'elle s'était rendue chez les carnivores à pied.

La réponse de la reine rassura Sibelle, du moins en partie.

« Nous avons voyagé plus d'une journée certes, mais sans connaître le chemin, sans savoir où aller et sans bénéficier de leur endurance...
Mais vous avez raison, mes inquiétudes sont non fondées, je vous demande de m'excuser de vous avoir dérangé pour ça.»


Levant un sourcil la reine remercia Sibelle des informations précieuses qu'elle lui avait fournies. En ce qui concernait les carnivores, elles n'étaient pas aussi impatientes que Sibelle de les voir arriver, puisque cela signifiait de nouveau la guerre.

Sibelle demeura silencieuse un moment... une information lui échappait et elle le savait bien, mais ne réussissait pas à mettre le doigt dessus.

Elle fronça ses sourcils, réfléchit un moment, puis se détendit et reprit la parole :

« Vos paroles m'ont rassurée, mais je me demandais pourquoi le retard des carnivores me surprenait autant... et là je me souviens... lorsqu'elles sont venues nous proposer de voler avec elles, elles nous ont précisé que les carnivores disposeraient de Thiir et de potions de hâte et d’endurance des alchimistes-rats, ce qui les ferait arriver en des temps records.... des temps records ! Ce sont là leurs propres paroles !.. Pour ce qui est de la guerre qu'ils amènent, je pense que les carnivores ne souhaitent que retrouver leur chez-soi, vous arriverez peut-être à parlementer avec eux.»

La reine n'était pas aussi optimiste que Sibelle. Suite à l'attaque-surprise des végétariens au campement des carnivores, elle lui semblait peu probable que ces derniers désirent négocier, leur réaction serait davantage la vengeance.

Sibelle écouta attentivement les réponses de la reine, elle ne connaissait rien aux stratégies de négociation, mais elle avait des valeurs auxquelles elle tenait.

L'hinionne croyait avoir tout dit lorsqu'elle se souvint soudainement d'une information que lui avait donné Daemon.

« Daemon ne se souvenait plus du nom exact de cette démone qui avait intégré ce géant corps de pierre, mais il m'a dit que vous l'aviez nommée. Vous acceptez de m'en dire davantage au sujet de cette démone ? Quelle était son origine et pourquoi vos plumes annulaien-elles ses pouvoirs ?»

C'est ainsi qu'elle apprit que la démone se nommait Esh'Erlish Shala'arth. Et ce que Sibelle avait vu n’était pas un corps de pierre, mais plutôt le squelette de son corps original. Autrefois terreur des bois, de cette démone, de sa chair et de son sang, sont issues la lignée d'Aurum, celles des trois d'Arothiir, la lignée d'Omble et la lignée de la reine, celle d'Argentar. Elle supposa enfin que leurs plumes annulaient probablement les pouvoirs de la démone parce qu'elles étaient du même sang.

Bien attentive aux propos de la reine, Sibelle posa une dernière question.
«Et vous avez une idée de ce qui aurait pu la réveiller ?»

Mais la reine n'en avait aucune idée. Elle ne se l'expliquait pas.

N'ayant plus de renseignements à donner ou à collecter, Sibelle termina donc la conversation ainsi.

«Je tenais seulement à vous donner des informations importantes au sujet des trois reines... pour ce qui est des carnivores, s'ils attaquent ici, je ne les combattrai pas...»

Cela dit, Sibelle hocha la tête en guise d'au revoir, mais attendit l'accord de la reine avant de quitter les lieux. Celle-ci comprenait la position de Sibelle, elle-même ne pourrait lever les armes contre son propre peuple, il ne restait qu'à espérer une solution pacifique. Tout en remerciant Sibelle d'un signe de tête, elle lui permit de quitter la salle.

Sibelle traversa les longs couloirs d'un pas déterminé, quitta le château et prit le chemin en direction du manoir. Elle ne se rendit pas à sa chambre, préférant plutôt se diriger vers celle de Sirat. Une fois devant sa porte, elle s'arrêta hésitante, le bras en l'air. Il s'était passé beaucoup de choses dans cette clairière et la belle voulait connaître l'interprétation que l'humoran en avait tirée. Elle était consciente qu'un lien s'était tissé entre eux, mais ne pouvait ni ne voulait pour le moment en évaluer la teneur. Après leur brève étreinte sur le champ de bataille, l'humoran s'était reculé froidement et était demeuré silencieux tout le long du chemin le menant au château. Sibelle baissa donc son bras, et fit demi-tour...Mais elle n'avait pas franchi trois pas, qu'elle se retourna vivement et frappa trois coups ferme à la porte, pas un de plus, tout en s'identifiant sobrement : «Sibelle»

La porte s'ouvrit et l'humoran se présenta face à elle. Ses cheveux mouillés , son torse nu et sa serviette sur les épaules témoignaient qu'il venait tout juste de prendre un bain. Il dégageait une odeur agréable qui parvint aux narines sensibles de la rouquine. Celle-ci demeura figée dans l'encadrement de la porte, fixant l'humoran dans les yeux, attendant qu'il prenne la parole. Ses premiers mots seraient déterminants et lui permettraient de savoir si elle faisait un pas à l'avant ou si elle se rendait immédiatement à sa chambre.

L'humoran l'invitant à entrer avoua qu'il avait pensé justement à lui rendre visite.
Sans dire un mot, Sibelle obtempéra, elle était visiblement contrariée. Lorsque Sirat eut fermé la porte derrière lui, tout en le regardant dans les yeux, elle lui demanda:
«Par où commencer?»

Contrairement à lui, elle ne s'était pas encore lavée. Elle ressentait toujours cette pression sur les épaules . Elle voulait discuter avec l'humoran, éclaircir certaines choses avant de se rendre à ses appartements.

Il ne savait que répondre à sa question. Il tenait à elle, il évoqua leur destin, lui parla de la possibilité qu'ils se retrouvent face à face, et que si c'était le cas, qu'elle ne devrait pas hésiter une seconde, car lui ne le ferait pas en respect à leur profession de guerrier.

Sibelle fronça les sourcils, elle ne comprenait pas où Sirat voulait en venir et cela la contrariait. Elle aimait les propos clairs et sans chichis, elle avait horreur des sous-entendus.

Elle alla donc droit au but :
«Beaucoup de gens sont morts écrasés sous ce titan, j'ai craint un moment que ce soit ton cas.»

Elle se tut un instant, trop orgueilleuse pour avouer et s'avouer elle-même qu'elle commençait à s'attacher à lui.

Cela dit elle passa à autre chose:

«Je ne crois pas au destin. Je crois en l'honneur et au courage... Plusieurs points m'ont fait réfléchir sur ce champ de bataille et j'aurais aimé en discuter avec toi.
Tout d'abord, à notre arrivée, Guigne ne voulait pas réveiller les gens paralysés, je n'aime pas cette femme, elle est rusée et malhonnête...Puis ce titan a été réveillé par quelqu'un et je vais tenter de savoir par qui. Et enfin, les carnivores...ils devaient prendre de la potion pour se rendre plus rapidement ici, leur retard m'inquiète. »


Cette fois-ci, songeuse, elle se croisa les bras et attendit les commentaires de Sirat.

La gorge nouée, redoutant ce que l'humoran allait répondre, elle le regarda se diriger vers la table basse où étaient déposés quelques rafraîchissements. Ce dernier se servit un verre et en proposa un à Sibelle qui fit un signe négatif de la tête.

Sirat expliqua que dans le trio, c'était Jess qui commandait, Guigne n'était rien. Il nourrissait lui aussi les mêmes inquiétudes au sujet du retard des carnivores et il était d'accord que Sibelle mène son enquête. Puis d'un air grave, pesant ses mots, il rajouta honnêtement qu'il allait œuvrer pour l'unique.

Cette déclaration troubla profondément Sibelle.
(Il veut rejoindre l'unique... l'unique, le sang visage, celui que nous traquons...)

Décroisant les bras, et les laissant pendre le long de son corps, elle serra ses poings, tenta de contenir sa rage, modérer son rythme respiratoire, mais il n'y avait rien à faire... elle était en colère.

Après avoir dégluti avec peine, elle réussit à prononcer ces quelques mots: : «Tu ... nous trahis ?» Ce n'était pas un cri, ni un reproche acerbe, mais à peine un murmure. Des mots simples, arrachés de force, d'une voix étranglée. Des mots douloureux à prononcer, puisqu'ils énonçaient une fatalité... leur séparation. Ses yeux remplis de larmes, elle recula d'un pas, posa sa main droite sur le dossier d'une chaise afin de ne pas perdre l'équilibre.

Sibelle ne partageait pas l'opinion de Sirat. Pour lui, leur différence d'allégeances ne pouvait affecter leurs sentiments réciproques. Pour elle, il était impossible de concevoir une relation avec quelqu'un qui œuvrait pour le camp opposé.

Torse nu, il s'approcha d'elle et l'entoura de ses bras. Toujours en colère, elle demeura cependant immobile sans faire un geste pour s'éloigner de cet homme tout en muscles. Puis il expliqua qu'il avait pourtant toujours été clair, qu'il avait toujours cru en l'unique.
Aveuglée par la colère, Sibelle ne pouvait croire ses paroles et éprouvait de plus en plus de réticences à rester dans les bras de cet humoran, malgré l'attirance qu'elle avait ressentie auparavant. Dans un murmure, il lui dit respecter son choix, ne l'obligeant pas à le suivre, puis tendrement, il baissa sa tête et présenta ses lèvres à sa compagne d'armes.

Les larmes coulant à présent sur ses joues, Sibelle se défit rapidement de l'étreinte de l'humoran, en le repoussant de toutes ses forces, refusant catégoriquement de répondre à ce baiser.

Bouillonnant de rage et blessée, elle lui cria:
«Je ne peux séparer ma tête de mon coeur ! C'est tout ou rien ! Puisque tu as choisi le clan ennemi, tu seras le mien. »

Il ne lui restait qu'à partir, mais elle ne le fit point, incapable de détacher ses yeux rougis de l'humoran, se retenant pour ne pas lui marteler le ventre à coup de poings bien sentis.

Apparemment surpris de la réaction de sa compagne, ce fut un humoran affichant un air triste qui recula. Il dit la comprendre et tenta une fois de plus de lui expliquer qu'il ne la considérait pas comme une ennemie. Il croyait fermement en l'unique, en la capacité de ce dernier à ramener la paix sur Aliaénon.

Il était calme et résolu alors qu'elle aurait préféré qu'il se déchaîne à son tour. Au moins, elle aurait eu un bon prétexte pour expulser sa colère et le frapper de ses poings. À bout d'argument, elle empoigna le dossier de la chaise à deux mains et l'envoya valser contre le foyer, la réduisant en morceaux. Puis, elle fit volte-face et sortit de la chambre de son ex-compagnon d'armes en faisant claquer la porte.

Elle ne se rendit pas à sa chambre qui était malheureusement située dans ces circonstances, juste à côté de celle de Sirat. Elle sortit à l'extérieur du manoir, profita de l'air frais du soir et marcha des heures avant d'y retourner pour se laver et se coucher.

***


Le jour suivant Sibelle ne descendit à la salle commune que pour prendre les repas, écoutant les discussions de chacun sans y prendre vraiment part et repartant ensuite se réfugier dans sa chambre prétextant le besoin de méditer.

Puis le lendemain, alors que Sibelle venait de terminer de dîner et se préparait à prendre l’air, histoire de garder la forme, un messager se présenta au manoir des d’Omble. Des hommes en factions avaient remarqué la présence de troupes non identifiées dans les alentours de Treeof. Il venait les prévenir, mais surtout les convaincre de quitter le manoir pour se réfugier dans la ville qui s’avérait être mieux protégée. Les maîtres du manoir prirent la décision de demeurer chez eux, enjoignant leur serviteur à se rendre en ville.

Pour Sibelle, il n’y avait qu’une option, mais puisque désormais, elle ne pouvait plus compter sur Sirat, elle avisa Nastya et les autres aventuriers en place et leur demanda :

« Je veux me rendre dans les bois à la rencontre des troupes inconnues afin de constater de visu de quoi il en retourne. Qui m'accompagne ? »

(((3 671 mots)))

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Sibelle, Maître d'armes


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 Sujet du message: Re: Treeof
MessagePosté: Ven 30 Mar 2018 18:46 
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Mon corps s’allège et s’approche du colosse vaincu. Je regrette mon altruisme instantanément. Morts, mourants, écrasés, ensevelis, broyés, tranchés. Je plaque une main contre ma bouche, retenant un cri d’effroi. Mes bras retombent, mon effroi devient colère. Une colère contre moi, contre les excuses que mon esprit me chuchote. Que je n’avais pas eu le choix, que j’ai fait ce qu’il fallait. Que je ne pouvais pas savoir qu’ils étaient là, en dessous. C’était faux. J’étais ivre de magie, de puissance, je voulais voir de quoi j’étais capable. Une envie, un besoin que j’avais eu à Esseroth, à Fan-Ming, à Ouesseort. Mon seul désir était de tester mes limites et à chaque fois j’avais répandu des cadavres. Des orcs, des gobelins et cette fois, des hommes. Mi- bêtes certes mais bien plus proche d’un humain que ne l’étaient, pour moi, les combattants de l’armée de Vallel. En cherchant mes limites je venais de découvrir autre chose ou plutôt de le reconnaître. Immobile, face à mon fait, les yeux hagards, fixes, perdus. La réalité perce un mur qui entourait ma personnalité. Elle m’attrape, me secoue et me le fait admettre. Je suis un meurtrier. C’est un coup de poing dans l’estomac, douloureux. Je ne plie pas, je reste stoïque, acceptant la vérité. Aucune larme, je reste droit, le menton dressé, assumant mes crimes en ne détournant pas le regard de celui des victimes de ma magie.
Je ne peux plus me détourner comme un enfant. Je suis un adulte, un aventurier, un combattant. Mon esprit s’embrume, virevoltant entre les décisions à prendre à présent. Je me laisse emporter par la foule de végétariens survivants reprenant le chemin de la cité.
Ma première envie est de laisser tomber, de rentrer à Kendra-Kar, de reprendre ma vie d’avant. Quelque chose en moi me ramène à la raison. Rien ne sera plus jamais comme avant. En se perçant, le mur avait laissé passer une autre part de moi. Celle-ci n’acceptait pas de rentrer et de se prélasser au soleil toute l’année, pas plus que je ne tolérais, moi, de fuir comme un lâche. Je suis ici et je resterais jusqu’à ce que les choses s’arrangent. Mais je ne pourrais pas passer à côté des batailles et du sang. Je devais m’y faire, cela faisait partie de moi à présent. Mon cœur se serre, il me met en garde en me rappelant le visage des végétariens écrabouillés. Trouver autre chose que la magie pour combattre, la canaliser, la maitriser. Apprendre à combattre autrement, d’une autre façon. Ce sont maintenant mes doigts qui me rappellent qu’ils sont présents. Crispés sur mon arme, mon bâton. Je savais que pour aider Aliaénon je devrais recourir à la violence mais je ne voulais plus de dommages collatéraux, plus de victimes innocentes. Je devais maitriser mes flux magiques et pouvoir faire sans quand la situation l’exige. Mon corps se révèle petit à petit, douleur par douleur. Je reviens sur terre, la brume dans mon esprit se dissipe et me laisse apercevoir, dans la lente file, ceux qui sont encore en vie. Loeding, Dromi, Sirat et son amie, Kiyo et Nastya. Je suis content de la voir saine et sauve même si mon visage a du mal à le montrer. Je regarde par-dessus mon épaule. Un dernier adieu à la clairière où j’ai perdu une part de moi-même pour en découvrir une autre. Je dirige ensuite mon regard droit devant. Triste mais convaincu que je suis un nouvel homme pouvant maitriser ses émotions et ses forces.

Nous parvenons tous à Treoof sans plus de mauvaises surprises. Les aventuriers sont invités à logés dans le manoir d’Omble. J’accepte volontiers et accompagne ceux qui s’y rendent sans dire un mot. Je n’en avais d’ailleurs pas prononcé un seul de tout le voyage. Je trouve la salle d’eau et m’y décrasse, perdant de longues minutes, immobile, à me ressasser les visages des cadavres coincés sous le colosse. Une fois l’eau trop froide pour y rester sans trembler, je m’extirpe du bain pour me sécher. Là encore, mon esprit divague. Il me pousse à repenser au carnivore pendu, celui qui avait tué sa femme dans un excès de rage. Je repense alors à la menace qui pèse sur la cité. J’avais presque oublié que nous étions sur le point de participer à une guerre civile. L’urgence me rend à nouveau actif bien qu’épuisé par trois jours éveillés. Je rentre dans ma chambre pour rejoindre mon lit. Le sommeil me gagne avant que je ne puisse réfléchir d’avantage.
Je me réveille le lendemain, à peine reposé. Hanté par des visages, des corps et un sale pressentiment au sujet du conflit qui oppose les carnivores et les végétariens. Toujours silencieux, je m’étire, me lève, enfile des vêtements propres. Je sors de ma chambre, en quête de nourriture. Je me guide à l’aide de mon odorat et retrouve facilement le chemin jusqu’aux cuisines. D’une main, je salue le jeune cuisinier et m’installe pour manger un morceau de pain et boire un jus de fruit. Dromi, le cerf blanc avait accepté de m’apprendre à combattre, c’est lui que je devais trouver aujourd’hui. En plus, il pouvait peut être m’en dire plus sur ces fameuses réunions.

Je termine mon petit déjeuner et quitte le manoir pour rejoindre la cité. En me promenant dans les rues je tombe sur Dromi et son ami Gleipnir, le bouc. Les deux ont le regard vide et rougis et semblent épuisés. Je ne suis pas le seul à avoir passé une mauvaise nuit. J’adresse un bref regard au bouc avant de demander au cerf s’il était toujours d’accord pour m’apprendre le maniement de la lance. Il gémit et me demande à quoi bon puisque nous allions tous mourir. Etonné, je lui réponds.

"Tu as survécu à un titan. De quoi peux-tu avoir peur de mourir après ça ?"

"Un titan ? En était-ce vraiment un ? La Reine serait descendante de titan ? Cette bataille nous a surtout rappelé à tous comme nous étions faibles."

Une chose incompréhensible se passe avec mon corps. J’ai l’envie difficilement contrôlable de lever ma main pour l’abattre sur la joue poilue de l’homme bête. Une soif de violence couplée à une colère soudaine. Ma conscience me ramène à la raison et me permet de contrôler mon bras. Je rétorque cependant :

"Sans déconner là, j'ai envie de vous mettre une gifle. C'était un ennemi de taille gigantesque que nous avons vaincu. Une autre menace s'approche encore de votre cité et je ne veux pas recréer une catastrophe en me servant abondamment de magie alors apprenez moi à me battre sans ou allez-vous terrer dans un coin comme un lapin. Moi je suis prêt à mourir mais pas sans combattre."

Visiblement, mon commentaire fait mouche car il me regarde avec une lueur d’hésitation avant d’accepter ma demande. Il me donne rendez-vous cet après-midi au bord du lac, il ajoute après un instant qu’un seul entrainement ne fera pas de moi un maître du bâton. Je le sais, évidemment, mais il faut bien commencer. J’incline la tête et le remercie avant de m’éloigner.

Difficile d’expliquer pourquoi je me suis montré si brutal. Probablement le fait que je sois plus motivé à défendre leurs cités qu’ils ne le sont. Je chasse cette réflexion de mon esprit. Peu importe au final, le principal c’est qu’il accepte de m’aider. Je passe le reste de la matinée à flâner en attendant l’heure de rejoindre Dromi. Je me promène dans la cité, mange un morceau. J’en profite aussi pour utiliser ma pierre de vision pour prendre et donner des nouvelles au Conseil d’Or.

" Salut. Le titan est vaincu. Qu’avez-vous découvert à ce sujet ? "

Je garde ma pierre en main, en attendant une réponse. Je m’installe finalement près du lac en attendant le cerf. Il me rejoint plus tard et nous débutons l’entraînement. Je suis très attentif et écoute avec une concentration accrue ce qu’il m’explique, ce qu’il me montre. Il commence à me montrer comment m’échauffer. Il m’explique que c’est important de préparer ses muscles car on peut vite se faire mal. Bon élève, je suis son exemple. Echauffe ma nuque, mon dos, mes épaules, mes poignets, mes chevilles. Il m’exerce ensuite aux mouvements de base. Je dois me fléchir pour avoir mon centre de gravité plus proche du sol et éviter d’être déséquilibré. Pendant plusieurs minutes il m’accompagne dans mes déplacements, dans le mouvement de mes jambes et de mes pieds. Il prend ensuite son propre bâton pour exécuter les mouvements de bases tout en m’expliquant que les mouvements peuvent être horizontales, verticales ou en biais. Ils cherchent d’abord à éloigner l’adversaire et établir une distance de sécurité comme me l’avait déjà expliquée Charis. Cependant la dissuasion n’est pas toujours suffisante et il est nécessaire d’utiliser des frappes. Pour cela, dit-il tout en faisant bouger son arme, il faut accumuler de la vitesse et donc de la puissance qui sera utile au moment de porter le coup. Il me le montre en frappant dans le vide et la puissance du coup est évidente. Il explique enfin que quand je contrôlerais suffisamment mon déplacement et mes frappes il me montrera des techniques de désarmements et de projections. J’incline la tête et lui obéit quand il me fait signe de me mettre en face de lui. Nous échangeons alors quelques passes. Il me montre, je l’imite, nous travaillons le mouvement, il me remet en place quand je marche de travers et soupire lourdement quand je fais tomber mon arme ou m’emmêle les bras.

Une fois l’entrainement bien avancé, je lui demande :

"Pourquoi m'avoir dit que nous allions tous mourir ?"

Son désespoir m’avait tout de même très surpris, j’avais envie d’en savoir plus. Il me répond, son regard perdu sur le sol, qu’ils avaient de base peu de chance, des proies contre des prédateurs. Mais maintenant après autant de pertes, comment pourraient-ils résister ? Il prétend que les carnivores sont sûres de leur victoire et qu’ils n’auront aucune pitié après ce qu’ils leur ont fait. J’hausse un sourcil.

"Vous avez l'aide du trio d'Arothiir maintenant non ?"

Il me regarde incrédule avant de rétorquer qu’elles ne sont que trois. Trois oui, mais capable de faire face à un monstre de plusieurs mètres de haut. Il doute aussi qu’elles nous aideront quand les carnivores seront là.

"Vous m'aviez l'air tout à fait capable de botter des culs quand vous vous en preniez à nous dans la clairière."

J’essaie de lui remonter le moral, de lui redonner espoir mais son regard va se faire plus dur en rappelant, excédé, qu’a dix contre un avec une créature immense, il n’y a pas eu une seule perte chez nous. Il rajoute après un instant que c’était tant mieux mais que ça a prouvé leur incapacité au combat.
Sa reprise m’amuse légèrement mais le souvenir de cette bataille et des autres auxquelles les Yuiméniens étaient présents m’assombrit rapidement la face.

"C'est juste nous qui sommes fort en bain de sang..."

Il va renifler avant de demander si au moins nous serons du côté des végétariens. J’ai presque l’impression qu’il me supplie.

"Je t'accompagnerai à la bataille si bataille il y a."

Il incline la tête avant de déclarer qu’alors il se battrait à mes côtés. Qu’il ne peut pas laisser quelqu’un se battre pour lui s’il ne le fait pas lui-même. J’incline la tête à mon tour avant de déclarer.

"Faut m'aider à m'améliorer par contre."

Nous poursuivons l’entrainement en silence et c’est bien plus tard que nous nous arrêtons pour nous rafraîchir dans les eaux du bord du lac pour épancher notre sueur moite. J’en profite pour lui parler de ma courte enquête.

"J'ai découvert quelque chose sur le crime qui a fait déborder le vase l'autre jour."

Il me regarde, curieux, sans rien dire.

"J'ai même retrouvé le meurtrier."

Il reste silencieux mais va froncer les sourcils tout en arrêtant de passer sa main dans sa nuque hérissée.

"Je l'ai retrouvé pendu dans la maison juste à côté. La victime était sa femme."

La mâchoire crispée il grogne le mot carnivore.

"Oui. C'est une dispute qui a mal tourné. "

Il m’observe, soupçonneux, avant de me demander s’il me l’avait confiée.

"En quelque sorte. Il a laissé une lettre."

Il hausse les épaules en disant que ça ne fait que prouver la dangerosité pour la communauté. A mon tour j’hausse les épaules.

"Chez moi il n'y a pas besoin d'être à moitié carnivore pour que des hommes en tuent d'autres."

Je soupire avant d’ajouter.

"Mais ce que j'ai découvert ne va pas contre ce que tu dis non plus."
Il renâcle, explique qu'avant ils étaient une communauté paisible et pacifique. Je fouille dans ma poche et lui tend la fameuse lettre d’adieu tout en lui demandant s’ils avaient choisis en quoi se transformer et j’apprends que non, que du jour au lendemain ils se sont changés. Pas tous en même temps mais en une petite semaine, tous étaient changés. Il hausse les épaules quand je demande si c’est lié à l’Obélisque et répond que oui, sans doute.

Je rentre dans le vif du sujet après avoir soufflé que j’avais senti la magie de ce bloc de pierre.

"Loeding m'a parlé d'une réunion assez discrète qu'il y avait entre végétariens. Tu sais quelque chose là-dessus ?"

Son regard s’assombrit et il déclare que Loeding devrait tenir sa langue.

"Je ne cherche pas les ennuis. Mais cette réunion c'était quoi au juste ?"

Il répond nerveusement que Loeding ne sait pas ce qu’il dit et qu’il n’y a jamais eu de réunions. Sa tentative de fuite m’amuse et je rétorque que je connais des enfants qui mentent mieux que lui. Ca ne lui plait visiblement pas. Il se vexe, fronce les sourcils et annonce que l’entrainement est terminé avant de me dire d’éviter de poser trop de questions. Il s’en va et ne me répond pas quand je lui demande s’il sera de retour demain.

Une réaction tout à fait étrange. Ca crève les yeux qu’il sait quelque chose et qu’il se cache quelque chose derrière cette réunion. Mais il n’est pas le seul. L’homme-chouette aussi ne m’a pas tout dit et maintenant je m’inquiète qu’on cherche à le faire taire. Je sens encore une profonde colère gonfler ma poitrine. Je me redresse, ramasse mon bâton et prends la direction du centre-ville.

En me renseignant un peu on m’indique une maison voisine à celle du pendu. La porte est close mais de la lumière s’échappe de sous la porte. Malgré l’heure tardive je frappe à la porte, trop inquiet que quelqu’un soit passé avant moi. Loeding ouvre la porte, m’apportant un certain soulagement. Il semble surpris mais m’invite à entrer sans rien dire. Je jette un dernier regard derrière moi avant d’entrer. Il me fait ensuite signe de m’asseoir à sa table ou son repas de souris fraîchement tuées est à peine entamé. Je m’installe face à lui sans commenter le repas et déclare directement.

"J'ai parlé à Dromi des petites réunions secrètes. Il semblait nerveux."

Lui aussi devient nerveux d’un coup. L’homme cerf serait plutôt anti-carnivore et que ça ne lui semble pas être une bonne idée de lui parler de ça. Soulagé de le voir en pleine forme je sens à nouveau la colère monter en moi. Le fait qu’il ait menti et d’avoir l’impression qu’il me prend pour un idiot ne l’aide pas à me calmer.

"Oui il n'avait pas l'air content. C'est pour ça que je suis venu tout de suite. Je m'inquiétais."

Il me demande si je m’inquiétais pour lui.

"Oui. Désolé d'ailleurs de t'avoir... Enfin tu sais à la clairière..."

Je suis sincère malgré tout, je suis vraiment navré d’avoir dû le faire valser au loin. Il baisse la tête vers ses souris et rappelle qu’il n’était pas lui-même là-bas et que j’avais bien réagis. Je conclus ce sujet d’une grimace, n’étant pas convaincu d’avoir bien agi pour reprendre sur ce qui m’intéresse.

"Il a dit que tu devrais apprendre à fermer ton bec et je t'assure qu'il avait l'air vraiment nerveux. Mais je pense aussi que tu en sais plus que tu n'as voulu m'en dire."

Il secoue la tête en disant qu’il n’en savait pas plus et que ça ne rimerait à rien d’avoir parlé de la réunion sans plus en dire. Sauf si il s’est rendu compte qu’il allait trop loin. Il prétend ensuite qu’il recherche une solution raisonnable.

"Pourquoi il n'avait pas l'air étonné que tu sois au courant alors ?"

C’était certain qu’il mentait et ça me mettait de plus en plus hors de moi. Il hausse les épaules et déclare qu’il n’en sait rien. La rage est trop forte et sans que je puisse le contrôler, mon poing s’abat sur la table, faisant voler les souris.

"Pourquoi j'ai l'impression qu'il y a un tas cadavres planqués sous tous les tapis ?!"

C’était clair. On me cachait quelque chose. Quelque chose de grave. J’étais bien décidé à trouver quoi. Loeding, surpris, sursaute et reste silencieux, choqué. C’est à cet instant que la porte s’ouvre avec fracas pour laisser entrer Dromi et son pote Gleipnir. Armés et visiblement énervé. Il m’ordonne d’arrêter de poser des questions et de foutre le camp d’ici. Loeding tente de s’interposer, expliquant que je n’ai rien fait de mal. Malgré mon sursaut, je reste assis, contenant ma rage. Dromi pointe son bâton vers l’homme chouette, lui disant qu’il devait vraiment apprendre à la fermer et lui demandant ce qu’il avait raconté. Cette fois, mon poing qui frappe la table est tout à fait sous contrôle. Je me lève et empoigne mon bâton. Je dirige un regard noir sur les trois hommes-bêtes en m’exclamant.

"A quoi vous jouez ici ?! Vous tenez tant que ça à ce qu'une guerre civile éclate ?! De vous entre tuer entre anciens voisins, amis, compagnons ?!"

Ma voix prend de l’ampleur au fur et à mesure que je m’exprime. Mais pas de larmes cette fois, pas de tristesse. Seule la colère m’anime.

"Les événements de la clairière ne vous ont pas suffi ?! Il vous faut plus de morts ?! Plus de sang ?! Plus de chaos ?! Mais bordel qu'est-ce que vous cachez à ce point ?!"

J’avais peur de commencer à comprendre. Loeding recule devant ma colère alors que le cerf d’un coup agile me désarme et me menace du bout de son bâton avant que je n’ai le temps de réagir. Ce qu’il me dit alors finit de me faire comprendre ce qu’ils tentent de me cacher. Il déclare qu’ils voulaient juste protéger ce qu’ils aiment. Ceux qu’ils aiment. En éloignant le chaos, les carnivores, les étrangers qui défont la paix qu’ils construisent. J’ouvre grand les yeux avant de demander.

"Vous n'aviez pas prévus qu'ils partent pour ensuite revenir pas vrai ?"

Est-ce que c’était ça ? Un coup monté ? Ils auraient osés faire ça ? Créer ce meurtre pour que l’opinion publique chasse les carnivores ou pire ? Il répond, teinté de tristesse, que rien n’était prévu, rien de tout ce qui est en train d’arriver. Il m’implore ensuite de partir.
Abasourdi par la théorie qui venait de pénétrer mon esprit je ne pouvais plus me montrer vindicatif.

"Vos cachotteries ne pourront que finir mal. Je m'en vais."

Je me baisse lentement pour ramasser mon arme, sans gestes brusques, sans hostilité avant de pointer l’homme chouette du doigt.

"Mais il vient avec moi. Je ne veux pas qu'il lui arrive malheur."

Loeding lève les bras, convaincu que ses amis ne lui feront rien.

"Est-ce que le pendu et sa femme était leurs amis aussi ?"

Impossible de me retenir. Leur silence était trop coupable. Dromi reprend un ton encoléré pour me chasser d’ici. Je ne suis pas effrayé. Il ne me fait pas peur. Je réponds simplement.

"Très bien. Je retourne au manoir. Mais il vaudrait mieux pour vous deux que je recroise Loeding en pleine forme demain en revenant en ville."

Car je comptais bien revenir même si Dromi ne m’aiderait sûrement plus à m’entrainer. Je quitte la maison de Loeding dans le silence qui semble perdurer entre eux quand je m’éloigne. Je rejoins le manoir d’un pas lent. Répétant encore et encore ce qui venait de se passer chez Loeding. Ces trois végétariens avaient un lien avec le meurtre. J’en étais sûre. Tout ça pour que les carnivores soient visés, dénigrés, chassés.

De nouveau, je me lave, me couche et dort, épuisé. Rêvant encore de ce que je venais d’apprendre.

Le lendemain matin, je répète les mêmes gestes que la veille. Je rejoins les cuisines. Un bout de pain, du jus de fruit. Puis je prends le chemin de la cité pour rejoindre le bord du lac et m’entraîner. Je répète les mêmes mouvements que hier, soupirant à la place du cerf quand je me frappe moi-même avec mon bâton et m’autocritiquant sur mon jeu de jambes. Je m’arrête juste un instant à l’heure du déjeuner puis reprends avec la même détermination.
Au beau milieu de l’après-midi, c’est Sirat qui interrompt mon entrainement en me demandant si j’avais décidé de devenir un guerrier. Je lui adresse un signe de tête et lui répond avec une certaine gravité, encore secoué par les évènements de chez l’Homme-Chouette.

"Il faut bien un plan B si la magie ne fonctionne pas ou si ce n'est pas le moment de l'utiliser."

Je reprends mes mouvements alors que l’Humoran s’approche, restant tout de même à bonne distance de mes gestes encore maladroits. Il me demande avec un certain cynisme si je serais prêt à aller jusqu’au bout, à tuer de mes mains mes adversaires. Il explique que tenir une arme et frapper avec et diffèrent de tuer avec la magie. Il ne cesse de me rappeler les horreurs que j’ai commis. Au bord des larmes, je cesse tout mouvement pour me cacher les yeux. Je reprends mon souffle. Je ne veux pas pleurer. Je ne veux plus pleurer. Je retiens mes larmes, secoue la tête pour chasser les images dans mon crâne. Je me dirige ensuite vers mes affaires pour boire un peu d’eau. Une fois hydraté je lui réponds.

"Je te crois. Cela dit je me suis rendu compte que j'étais un tueur. Me défendre avec un bâton tueras moins de personne qu'une tornade au milieu d'un champ de bataille."

Il hausse les épaules et me demande qui est mon ennemi.

"Je ne sais pas encore. J'ai juste compris que ce serait inévitable."

Il désigne mon bâton en rétorquant que si je veux me défendre il faut une autre arme que cette brindille. Je regarde mon bâton, perplexe.

"Ca augmente la force de mes vents."

Je plisse les yeux, me rendant compte de ce que je venais de dire et je précise.

"Ceux de ma magie."

Sirat fait une moue et me demande si le but n’était pas, justement, de pouvoir me passer de magie.

"Pas complètement. J'ai conscience qu'elle peut être utile. Mais j'aimerais pouvoir me défendre sans. Plutôt que de trimballer une masse j'ai pensé qu'il serait plus censé d'apprendre à me battre avec une arme que je porte déjà."

Il regarde son marteau avant de m’observer de haut en bas et d’esquisser un sourire. Il me conseille plutôt de trouver quelque chose qui coupe et qui blesse. Il ajoute ensuite qu’il a parfois l’impression que je suis un enfant enchevêtré dans un corps d’adulte.
J’hausse les épaules.

"Une lance pourquoi pas. Quand je serais certain de pas me blesser. Et tu as raison, c'est sûrement ce que j'étais. Depuis la dernière bataille je me sens... Diffèrent."

J’ai perdu mon insouciance. Tout me semble si grave à présent. Il garde le sourire et me tape dans l’épaule. Il a hâte de voir ma prochaine mutation. Je ne l’étais pas autant que lui. Il scrute le ciel, soucieux et déclare que finalement elle semble se rapprocher avant de reprendre une bonne humeur habituelle en déclarant qu’il va boire un coup. J’ignore de qui il parlait mais quelque chose m’étonne soudain. Je me rends à nouveau comte qu’il s’agit aussi d’un homme bête, plus proche d’un carnivore que d’un végétarien. Je lui demande, l’air simplet.

"Tu n'as pas de problèmes avec les végétariens en ville ?"

Il s’arrête, un peu surpris avant de me répondre qu’il a l’habitude de ne pas être apprécier à sa juste valeur. J’esquisse enfin un maigre sourire.

"Je n'y avais pas pensé en arrivant mais je viens de me souvenir que tu ressemblais à un énorme tigre. J'apprécierais de boire un verre avec toi un jour."

Il déclare que le rendez-vous est pris que d’ici là je devais faire en sorte de rester en vie. J’incline la tête respectueusement avant de reprendre l’entrainement. Je ne savais jamais quoi penser au sujet de Sirat. Il était sans doute un type sympathique mais on ne savait jamais dans quel camp il se trouvait. C’était difficile de lui pardonner l’explosion du mur de Fan-Ming mais je n’avais pas de leçon à lui donner après avoir écrasé des alliés sous un titan.

Fatigué. Je fais une pause et vais m’asseoir près de l’eau pour me reposer. Je ferme les yeux juste un instant et m’endors finalement pour me réveiller bien plus tard.
Une certaine agitation règne dans la cité. Les gens s’arment, s’équipent, se préparent. Je vois plusieurs serviteurs des Ombles quitter le manoir pour rejoindre la cité. Ca ne pouvait signifier qu’une chose. Les Carnivores seraient bientôt là. Sans attendre, je me précipite vers les remparts et scrute les environs. En attente de mouvement. Si une bataille devait arriver, j’étais prêt.


(( environ 4200 mots.
Message de Pierre de vision :
Destinataire : Ibn Al'sabbar
Message : " Salut. Le titan est vaincu. Qu’avez-vous découvert à ce sujet ? "
Xël choisi d'aller sur les remparts pour défendre la cité.))

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 Sujet du message: Re: Treeof
MessagePosté: Sam 31 Mar 2018 00:57 
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Les Dames d'Arothiir se tournent vers moi. Une seule laisse entendre sa voix, mais ses mots n'apportent aucun éclairage à la situation. Je voulais connaître les raisons premières de leur venue et me vois agressé par leur verbe à la place. Les harpies affirment œuvrer pour l'unité des Pâles et m'accusent d'être seul à l'origine de nouvelles tensions. Leurs cœurs demeurent clos et obscurs. Le constat ne fait que m'inciter à demeurer méfiant à leur endroit. L'innocent apporte des preuves ou tente de s'expliquer. Il ne tend pas le doigt vers celui qui cherche simplement à comprendre, en lui prêtant des intentions qu'il n'a pas. La Reine, épuisée, intervient pour offrir le toit de son palais à ses consœurs. Je choisis ce moment pour détourner mon corps du cadavre gigantesque et le ramener gracieusement au sol.

Ma vue embrasse un spectacle accaparant mon attention. De nombreux végétariens demeurent prostrés ou chancelants sur leurs jambes. Ma forme reptilienne s'avance dans la clairière puis s'abaisse auprès d'eux. D'un lent signe de tête, j'invite les plus affaiblis à prendre place sur mon dos, ne leur donnant comme consigne que de bien tenir mes crins d'or. Alors que la marche silencieuse vers Treeof est entamée, je jette un dernier regard vers la scène cauchemardesque de cette clairière méconnaissable puis m'avance lentement aux côtés des survivants.

Les palissades de la cité franchies, je regarde d'un œil le groupe se séparer. Les nobles harpies se dirigent vers le château accompagnées de quelques aventuriers, d'autres yuiméniens s'éclipsent dans la clarté blafarde de la soirée. Quant à moi, je conduis les êtres que je porte jusqu'au seuil de leur demeure, veillant à ce que chacun regagne son foyer. Peu à peu, la ville se nimbe de silence. Seuls demeurent à mes côtés les Pâles Dromi, Gleipnir et Loeding, dont les esprits semblent ailleurs. Nos pas nous conduisent à un espace suffisamment large entre quelques habitations, où pousse un arbre esseulé, pour que je puisse y poser mon long corps en un demi-cercle autour du végétal. Le crépuscule approche, ajoutant sa mélancolie à la scène. Les trois hommes ont l'air indécis mais surtout abattu de ceux qui ont survécu à un drame. Le Cerf blanc et le Bouc sont assis près de mes pattes avants, l'Homme-Chouette s'est placé plus loin, dans la pénombre accrue par la présence de l'arbre. Ma voix caverneuse met fin à ce moment d'inertie.

"Le peuple Pâle est fort et digne. Mais surtout vivant. Il ressent. Vous aussi. Parlez."

Je tourne la tête vers les trois hommes, les couvant de mon regard violet.

"Des mots sur des idées pour avancer."

Le premier à s'exprimer est l'homme-bouc, qui réfute mes paroles. Nombre des leurs sont morts aujourd'hui sans qu'ils puissent rien y faire. Ils ne doivent leur survie qu'à des étrangers et aux harpies. Sa voix sombre se teinte de fatalisme. Il estime n'avoir été qu'un danger pour la forêt. Je tends mon museau vers lui, soufflant lentement dans l'air frais avant de lui répondre que sa peine éclipse la conscience de sa valeur. L'impétuosité dont ils ont fait preuve n'était au final qu'inconscience car dénuée de la sagesse adéquate. Cependant, sans cette force, la sagesse n'est que beaux discours peu utiles en période de conflit.

J'avise les autres présents.

"Vous êtes le peuple de la Forêt d’Émeraude. Vous l'avez simplement perdu de vue."

Si le bouc laisse percevoir son chagrin, c'est un fort agacement proche de la colère que le cerf blanc exprime. Je laisse les mots couler en torrent et charrier son avis sans l'interrompre. Il estime que les siens ont tout tenté pour défendre leur patrie, leur forêt et leur cité, mais doivent faire face à des menaces de plus en plus grandes. Trop peut-être, et la venue des Carnivores décidés à purger la ville le conforte dans l'idée que les Pâles de Treeof courent à leur perte.

Mes yeux se plissent. Lentement, un souffle émane de mes naseaux, chassé par une brise dansant au même rythme que mes moustaches.

"Il n'est point mon rôle que de porter un jugement sur ce que vous pensez légitime. D'aucun ne peut qu'être témoin de l'ardeur des vôtres à protéger ce qui leur est cher. Mystère donc à mes yeux que cette guerre civile entre les enfants de la Forêt."

Je redresse la tête, toisant légèrement le trio et augmentant mon aspect intimidant.

"Si Carnivores ne sont plus que bêtes sanguinaires, leurs violents crocs ne rencontreront qu'écailles robustes."

Masqué par la pénombre, l'homme-chouette intervient avec prudence. Il a l'espoir que ma présence à leur côté rendra les hommes du Loup plus réticents à engager le combat. Toutefois, il n'exclut pas la possibilité que cela ne les arrêtera pas. Dromi reprend la parole, convaincu que ceux dont il est question ne sont que sauvagerie, incapables d'autre chose que de brutalité. Il me questionne sur ma capacité à faire preuve de violence envers eux, non sans m'avoir appelé par le nom de Kiyoheïki de Yuimen. Ce nom m'est familier et me fait presque ressentir quelque chose, mais cela demeure fugace. Je comprends alors que le cerf blanc se méprend sur ma nature. Il fait erreur en pensant que cela me désigne, base de ses doutes à mon endroit certainement.

Ma tête se tourne vers lui et je l'abaisse jusqu'à ce que mon oeil arrive au niveau des siens. Je demeure immobile quelques instants à le fixer ainsi sans rien dire. Seul le vrombissement des ailes d'un insecte trouble l'instant. Mon devoir n'inclut pas de donner d'explications concernant chaque fait et geste que j'exécute. Pourtant, de nouvelles paroles résonnent depuis ma mâchoire.

"Le Dragon d'Or d'Ynorie n'existe que pour protéger le peuple qu'il considère comme sien, Dromi, Cerf Blanc de Treeof. Ses écailles recevront les flèches ou les lames vous étant destinées. Il acceptera l'ire dirigée vers les vôtres, et il ripostera si la menace est avérée."

Nos regards restent rivés l'un à l'autre et au moment où je redresse mon crâne orné de cornes, le museau blanc se relève aussi. Fièrement, sa posture attestant qu'il est assuré d'être dans son bon droit, Dromi me lance d'un air de défi et par questions rhétoriques que la menace est réelle. Il me prend à témoin puisque j'ai entendu par moi-même Börte-a-Tchino annoncer sa venue avec des troupes en vue de reprendre la cité par la force.

Immobile, j'accueille la frustration du cerf à mon endroit. Il souffre et cherche un bouc émissaire. Il serait indigne de le laisser s'enfermer dans cette croyance et être aveuglé par son mépris. Les éléments de la scène me reviennent et, sur le ton dénué de sentiments superflus que j'use depuis ma venue, je précise certains points. La menace proférée ne se concrétisera que si les portes restent closes aux exilés, et n'est qu'en réaction de l'assaut sur les membres les plus fragiles de son groupe. Afin de lui faire comprendre où je souhaite l'amener, j'utilise une comparaison simple : un animal désespéré et affamé ne prendra pas le risque de grogner sur sa proie quand il a pour dessein de lui sauter à la gorge. Mon but n'est pas de dicter sa conduite mais de lui offrir d'autres pistes.

"Les mots d'autrui ne sauraient changer un cœur convaincu. Je ne peux qu'orienter votre esprit sur une possibilité. Libre à vous d'accorder ou non le bénéfice du doute."

Dromi n'apprécie guère mes paroles, mais c'est son confrère cornu qui enchaine. Il déclare avec justesse que si eux-mêmes n'ont pas participé à l'assaut, l'attaque possible condamnerait toute la ville et pas seulement les fautifs. Mon cou s'abaisse, faisant faire à ma tête un signe d'approbation. Toutefois, je prends la décision de ne pas pousser plus loin la mise en doute de la situation. L'heure n'est pas à cela. Le violet de mon regard se reporte sur le discret Loeding, que j'invite à s'exprimer. Lui n'aspire qu'à la paix et ses idées vont dans le sens des miennes. Il est Pâle à laisser une chance à leurs frères et sœurs exilés.

La discussion arrivant sur une impasse, Dromi prend les devants et incite ses frères à boire en sa compagnie en souvenir des morts. Les deux autres prennent un instant puis se relèvent à sa suite. Je les imite en reprenant appui sur toutes mes pattes puis les regarde. La place d'un Dragon n'est pas parmi ceux qui vont pleurer les leurs. Ma tâche de protection prend fin. Mon museau se tourne vers la perle d'or à mon cou, que ma patte amène à mon regard. Dans le bijou, une forme familière à peau assombrie et oreilles en pointe apparait fugacement. La simple vue de ce détail dans ma perle amène une autre question à mon visage écailleux.

"Laisserez-vous un non-Pâle se joindre à l'hommage rendu ?"

Si Dromi affiche ouvertement ses soupçons, ses compagnons échangent d'abord un regard avant que Gleipnir ne donne son accord. Après m'être écarté d'eux et avoir enroulé ma forme sur elle-même, je concentre mon esprit sur la perle dorée. Des images défilent devant mes yeux. Je connais ces scènes et ces êtres. Je reconnais ces bribes d'histoire. Ce sont des souvenirs, des échos d'un passé étroitement liés à des sensations, des émotions. Ce n'est pas qu'un récit. C'est toute une vie. Toute ma vie... Lorsque je rouvre les yeux, je me tiens debout, mains sur une gorge que je sens nouée. Il me faut lever la tête pour apercevoir les visages des trois hommes. Aussitôt, je suis assailli par un déferlement de pensées, de souvenirs étranges tant ils me paraissent éloignés de moi. Une chose est sûre : je m'en veux de leur avoir dit tout cela et de façon aussi... Distante. Pourtant, les trois hommes ne reviennent pas sur leur décision et me permettent de les suivre jusqu'à une demeure. J'ignore duquel elle est la propriété, mais j'estime avoir bien assez dépassé les bornes comme cela.

L'habitation de bois est sobre et modestement meublée. Quelques bougies sont allumées et placées sur un meuble éloigné de la table. Je me joins à eux après avoir laissé mes affaires dans un recoin de la salle. En quelques mots succincts, j'apprends comment les Pâles honorent leurs morts. Dans un silence absolu, en-dehors des paroles de recueillement, il nous faut boire un alcool très fort. Le seul conseil que l'on me donne est de ne pas garder la liqueur trop longtemps en bouche si je ne veux pas me brûler la langue.

Quelques minutes plus tard, les godets d'une taille honorable sont remplis et vidés en une poignée de gorgées. Cet alcool n'a rien de festif. Il engourdit les sens avec une rapidité impressionnante, et c'est là son but. J'ai du mal à me retenir de tousser lors du premier verre, mais le second est plus simple à avaler et le suivant enserre ma poitrine de plus en plus douloureusement. Je perçois la chaleur monter à mes joues, mais impossible de voir ce détail sur les visages des autres. Par contre, leurs expressions gagnent en netteté. Des mâchoires qui se crispent, des respirations se faisant irrégulières. Pas un mot, pas besoin.

Le poing fermé de Dromi s'abat une fois contre le bois alors que ses dents se dévoilent. Un second coup résonne dans la pièce alors qu'il se met à renifler. Lorsque sa main frappe à plat la surface, elle manque de peu renverser son récipient. Le cerf rattrape sa boisson maladroitement et penche la tête dessus, se voûtant comme s'il portait le poids d'Aliaénon sur les épaules. Lorsque son regard lui est rendu par le liquide, il pousse un râle animal qui accompagne la chute de ses larmes. Sa détresse me perce le cœur et je tente de détourner pudiquement les yeux. Gleipnir fixe le cerf un moment, les deux mains entourant son godet. Ses yeux sont embués, et je devine les efforts qu'il fait pour ne pas céder. Il renifle, boit à chaque fois que sa peine menace de s'échapper. Il se mord la lèvre à plusieurs reprises, contrôlant ses réactions d'une façon remarquable.

L'homme-chouette remplit les verres de tout le monde avec des gestes lents et las. Parfois il me fixe et la vision me noue la gorge. Ses yeux ronds ne clignent pas, maintenus constamment humides par les larmes ruisselant le long de son plumage. Je sens la douleur tenter de percer le barrage de mon éducation ynorienne. Loeding a-t-il seulement conscience de son état ? Il a l'air si détaché, si distant, si... Abattu. Les verres s'enchainent, les tonnelets aussi... À combien j'en suis ? Aucune... Idée... Je ne sais même plus... Si mes entrailles sont encore... Toutes là, tant l'alcool amoindrit mes sens... Flou. Sincère. Sans retenue.

De silence, il ne reste rien. Un grondement irrégulier et violent. Dromi râle et racle des bois un mur proche. Il ne tient plus debout lui non plus. Plus depuis qu'il a tant fracassé son siège sur le sol qu'il n'en reste que des débris méconnaissables. Ma vue se trouble... Nausées... L'homme-chouette serre sa pinte... On dirait qu'il câline un proche... Un proche... Leurs proches... Les miens... Me manquent... Tout ce voyage et cette... Peur... Pour... Pour perdre les Pâles bêtement ! Cela m'énerve ! Et me désespère... Et Talia qui comptait sur moi... Qu'est-ce qu'elle va penser ? Sauveur ? Ha ! Il sonne bien ce titre maintenant, hein ? L'était où c'sauveur... Pour les arrêter avant ? Pour convaincre les ynoriens d'pas impliquer les locaux... Dans leur conflit ? Pour sauver la vie... D'son seul vrai parent ? ... Je n'arrive plus à repousser ces idées... Gleipnir. Regarder Gleipnir pour ne pas... Ah... Je les vois. Il a les mains sur le visage, mais il n'y arrive pas non plus... L'eau coulant de ses yeux. Il a mal... Tous les trois souffrent tellement... Et dans leurs maisons, les autres Pâles aussi... Ma vue se brouille. J'ai du mal à réfléchir... Ce peuple blessé pendant la Grande guerre... Et qui continue de souffrir. Ce n'est pas juste ! C'est pas juste... Je lève mon verre, regardant le liquide qui brille... Le rebord est froid... Tellement froid... Je ne peux pas... Je ne peux plus... J'suis sur Aliaénon... À Phaïtos mon éducation ynorienne ! Ce soir, je bois ! Je bois pour moi... Je bois pour eux... Fait chaud. Un poids contre moi. Je ne sais pas qui s'appuie dans mon dos, mais je m'en fiche. Je tiens... Je soutiens... Et... Je pleure... Comme l'un des leurs...

***


La lueur du jour me tire cruellement de mon état. Je n'ai plus besoin de dormir donc je sais que j'ai du m'évanouir. Je ne sais pas comment j'ai fait, mais je me réveille empêtré dans ma cape, enroulée autour de mon bras droit et de ma jambe opposée. Quelque chose me gêne, mais ma vue est encore trop floue pour me dire ce dont il s'agit. Je ferme les yeux, gêné par la luminosité ambiante. Je n'ai pas envie de me lever alors que je sens parfaitement mes côtes me signaler être sur quelque chose d'inconfortable. J'ai la langue et les yeux gonflés, la gorge douloureusement sèche, mais le pire c'est la pression dans mon crâne. J'ai déjà bu de l'alcool, mais jamais au point d'en perdre mes moyens.

Un pas près de moi envoie subitement une décharge de bruit aussi désagréable qu'un coup de gong, et droit dans mes tympans. Une plainte m'échappe. Me redresser sur un coude exige une énergie colossale, tout comme l'exercice inhumain de relever les paupières. Mes yeux violets tombent sur le visage très proche de Gleipnir qui me tend quelque chose d'une main, et me fait signe de garder le silence de l'autre. Le gobelet de la veille, mais rempli d'un liquide transparent. Un simple verre d'eau que je vide lentement tant déglutir m'est difficile. L'homme-bouc ne me semble pas être dans le même état que moi, jusqu'à ce que je regarde ses yeux. Ils sont rouges et sa fourrure est terne. Il n'est pas très frais non plus. Je cherche les autres du regard jusqu'à ce que je me rende compte de ma situation. Dromi et Loeding sont encore assoupis, le cerf se servant de ma cuisse comme oreiller, la chouette basculant sur le dos et révélant que c'est son bras qui est logé sous mon torse. Avec l'aide du bouc, je parviens à m'extraire de cette étrange situation sans les déranger. Nous n'échangeons pas une parole, mais je quitte la demeure avec la certitude d'avoir fait le bon choix.

(Loin de là, mon...)

(Ack ! Doucement Okina ! Votre voix résonne deux fois plus !)

(Que cela vous serve de leçon ! Tss... Comment vous sentez-vous ?)

(Vide. Et sale. Comme au fond d'une mare de boue.)

(Un fond qui permet de rebondir... Sage est celui qui retient les conseils et les emploie à bon escient. Si le cœur fait souffrir, il faut savoir... )

(Le laisser dans son écrin. Je sais... Merci Okina.)

Gardant la tête basse, je me rends au manoir des D'Omble en quête de Talia. J'ai besoin de la voir, de lui parler, de l'entendre après tout cela. Première déception, ma tendre amie est restée au château. La nouvelle me donne un coup qui finit de saper mes forces. Je prends donc la décision de me retirer dans la chambre que j'occupe habituellement afin d'y faire quelques ablutions et d'y prendre un peu de repos.

Une poignée d'heures de difficile méditation et de prise de tisane plus tard, je me mets en route pour le château. Aux abord du lac, j'aperçois les silhouettes de Xël et de Dromi visiblement en plein exercice martial. Je ne m'attarde pas, empruntant un bateau pour atteindre ma destination. Arrivé aux portes de ce dernier, je suis accueilli assez froidement par le Général Astidenix, venant me demander ce qui m'amène. J'imagine qu'après cette tragédie et l'occupation des lieux par des invitées peu appréciées, il est plus tendu que jamais. Je ne manifeste aucune émotion particulière tandis qu'il m'indique une tour jouxtant la cour, me contentant de le saluer et d'y orienter mes pas.

Au détour d'un couloir, je croise une silhouette devenue familière et qui me fait instinctivement me mettre sur mes gardes. Le grand humoran Sirat. L'imprévisible guerrier. Traître ou fou selon les versions. Je m'apprête à passer mon chemin quand sa voix m'interpelle. Il me faut faire appel à tout le stoïcisme de mon peuple pour ne pas hausser un sourcil à l'amabilité de sa salutation. Il m'expose même son problème : il veut mon avis sur toute la situation et me demande si les Pâles pourront survivre à ce qui se profile.

"En toute honnêteté, j'ignore vers quoi l'avenir tend. Les Pâles végétariens étaient prêts à livrer bataille contre leurs frères carnivores, mais maintenant, nombre d'entre eux sont... Brisés. J'imagine que bien des choses dépendront des exilés."

Je fronce les sourcils, pensant à ce que m'a dit la petite.

"Et de ceux qui les accompagnent."

Le lion humanoïde me fait remarquer que beaucoup de choses dépendront surtout de la Reine. J'esquisse malgré moi un petit sourire.

"Et des actes des yuiméniens. Et de possibles circonstances imprévues. La toile de l'avenir dépend de toutes les petites touches qu'y mettent les artistes dont nous faisons partie, mais difficile de dire quel tableau cela peindra au final... Mais peut-être sollicitiez-vous mon avis sur un sujet plus précis ?"

Le combattant gigantesque se penche vers moi, me surplombant de toute sa taille. Sauf que c'est une chose que je vis depuis trop longtemps pour en être incommodé. Il finit par me dire qu'il estime que les yuiméniens ont déjà trop interféré sur Aliaénon et qu'il serait temps de lui rendre son aspect d'antan. Il me demande ensuite de but en blanc à qui va mon allégeance. J'ignore ce qu'il cherche à faire en tentant de me classer de cette façon, mais je l'informe d'abord d'une chose : pour effacer toute trace d'influence des ressortissants de Yuimen, il faudrait pouvoir remonter à l'époque de la création des fluides. Quant à mon allégeance, elle est à mon peuple de naissance ainsi qu'à ceux qui ont versé leur sang de concert avec le nôtre.

L'humoran pense d'une façon vraiment étrange et avec une logique qui lui est propre. Il songeait plutôt à se débarrasser du Dragon mauve, responsable de la venue de créatures dangereuses qui ont surgi après le réveil des Titans, plutôt que de défaire la trame du temps. Il est vrai que Naral Shaam est l'un des plus grands mystères présent sur Aliaénon, et je manque d'informations sur ses véritables intentions pour prendre une décision. Ensuite, avec son manque de tact décidément habituel, Sirat se permet une pique à mon endroit, estimant que ma nature masculine explique pourquoi je prends le parti de la belle du manoir. Sur ce commentaire, il décide mettre fin à l'échange en me contournant, m'obligeant à pivoter pour le suivre du regard. Que croit-il ? Que Talia est du genre à manipuler en faisant usage de ses charmes ? Il se trompe complètement ! Sur elle, sur moi, sur mes raisons. En voyant l'humoran s'éloigner, un détail me saute au yeux, chassant toute la tension provoquée par son intervention.

"J'imagine que nous avons ce point en commun, ser Sirat. Nous savons tous deux qu'être considérés pour nous-mêmes et pas pour notre ascendance est rare. J'admets que mon regard peut être biaisé par la chance qu'ils m'ont donné, mais prendre leur parti est le choix que je fais."

Mains croisées derrière la tête, le guerrier s'éloigne non sans m'avoir donné raison sur un point : une chance, cela se saisit. J'ai beaucoup de mal à cerner cet être, tout comme je ne suis pas enclin à lui pardonner ses actes envers mon peuple. Et pourtant, je ne peux que constater qu'il est possible de parler avec lui dans certaines circonstances. Ma tête se secoue d'elle-même puis je reprends mon chemin en direction de la tour.

La porte donnant sur une chambre confortable est entrouverte à mon arrivée. Talia est à l'intérieur, en train de ranger quelque chose. Elle n'a pas encore dit un mot ou fait un geste qu'elle a déjà le don de chasser une partie de mon mal-être. Après avoir frappé à la porte pour attirer son attention, je lui demande s'il m'est possible de lui dérober un peu de son temps. Malgré le côté joueur de sa réponse, il n'est pas difficile de deviner que quelque chose accapare une partie de sa pensée. J'esquisse un sourire, reconnaissant de sa tentative pour m'y aider. Je m'approche d'elle, ouvrant la bouche pour parler, mais incapable de trouver des mots. Je pousse un soupir devant ma faiblesse.

"Par où commencer... "

Je lève la tête vers elle puis la baisse pour masquer mon regard.

"Des excuses, j'imagine... De ma part."

Face à son incompréhension, je m'explique davantage. Je suis désolé d'avoir disparu de nouveau sans prévenir, de ne pas avoir su empêcher une nouvelle souffrance pour les Pâles et surtout de ne pas avoir pu tenir ma promesse envers elle. Sa main se pose sur mon épaule. Elle cherche à me rassurer, à me faire comprendre que sans mon intervention, aucun Pâle n'aurait survécu. J'appose une main sur ses serres. Ses mots semblent anodins, mais ils contiennent une force et un apaisement dont j'ai grandement besoin. Je me saisis de la perche qu'elle me tend.

"Et sans la tienne, qui sait combien de temps cela aurait duré ou combien d'autres seraient tombés ? Comment te portes-tu Talia ?"

Son trouble se fait visible. Elle se répète inlassablement que si elle avait pu savoir et agir plus tôt, rien de tel ne se serait produit. Je la comprends et tente de lui faire savoir que nul n'aurait pu prédire la venue d'un tel adversaire, connaissance du passé ou pas, et que le plus important est d'y avoir mis un terme. Son visage se ferme un peu et elle m'apprend quelque chose d'étrange. Azra, sous couvert de son savoir en matière de magie et de mort, lui aurait affirmé que c'était le conflit entre les Pâles qui serait à l'origine de l'apparition, et que cette dernière reviendrait si la guerre éclatait de nouveau. Je porte la main à mes lèvres, songeur. Azra... Quand je me remémore l'aspect terrifiant qu'il a revêtu contre la Reine, j'ai du mal à croire qu'il s'agisse du même jeune homme.

"C'est... Étrange. Il est vrai que sa magie le rapproche du monde des morts, mais je ne vois pas vraiment le rapport entre cette... Entité et..."

Je marque un temps d'arrêt, suspicieux du lien que mon esprit tisse. C'est moi qui ai parlé de l’obélisque qui semblait tant fasciner Azra. Lui, incontrôlable, qui se trouvait sur les lieux lors de la catastrophe, et lui encore, que je sais capable de lier une âme à un objet. Aurait-il une quelconque responsabilité quant à... Non, je vais chercher trop loin. Je ne peux pas y croire.

"Et la guerre. Non, je pense plutôt qu'il tentait de se servir d'elle pour faire peur. Éviter un autre conflit, ce qui risque malgré tout d'arriver. Car si les Végétariens ne sont plus en mesure de se battre..."

Je fronce les sourcils.

"Les Carnivores appuyés par les troupes d'Arothiir, oui."

Compréhensive, Talia lui accorde ce bon point et m'apprend qu'elle ira avec lui au-devant des Carnivores pour les raisonner lorsque le moment sera venu. Je n'ai pas besoin de réfléchir longuement pour l'assurer de ma présence à ses côtés à ce moment-là. La jeune femme semble rassurée et elle vient se blottir contre moi. Dans un souffle, je l'entends s'inquiéter pour sa sœur. Mon étreinte se resserre. J'aimerais la réconforter, contacter Yurlungur pour en avoir le cœur net, mais c'est impossible. Je ne peux qu'être présent pour elle comme elle l'est pour moi. Et je prie Gaïa en mon for intérieur d'épargner une nouvelle souffrance à ma tendre Talia. Le léger son semblable à un sanglot étouffé qui parvient à mes oreilles me fait comprendre que l'heure n'est plus aux belles paroles. Je finis par me taire et simplement profiter de sa présence tout en lui offrant le soutien de la mienne.


***


Le temps du deuil et du répit est écourté le soir suivant. Un messager vient tous nous trouver en la demeure des D'Omble, porteur d'une inquiétante nouvelle : des mouvements de troupes ont été repérés autour de la capitale. Je suis tendu et inquiet. S'il s'agissait des carnivores, ces forces ne seraient pas qualifiées de "non-identifiées". Les armées d'Arothiir peut-être ? Quoi qu'il en soit, ma décision est déjà prise. Talia ayant prévu d'aller à leur rencontre, je me tiendrai donc auprès d'elle comme je lui ai promis. D'autres aventuriers semblent également partants.

Puisse ce contact se passer de façon positive, juste une fois.




- 4 450 mots

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Dernière édition par Kiyoheiki le Ven 6 Avr 2018 20:19, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Treeof
MessagePosté: Sam 31 Mar 2018 08:48 
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Il s'était enveloppé dans ses bras, et le silence retombait sur le charnier autour de leur écrin. Un silence pesant qui n'avait pas de prise sur eux. Il sentait son odeur et était simplement heureux qu'elle vive. Il relâcha son étreinte, doucement, considérant sa partenaire et se retourna vers l'autel qui avait vue mourir tant de monde. Les harpies se toisaient, prudentes alors que déjà les voix des yumeniens, s'entendaient déjà à vouloir influencer un débat auquel elles n'étaient pas conviés. Sirat resta silencieux, observa les protagonistes et le dragon doré dans le ciel qui semblait être le pédant petit elfe.
L'air frais frappait la plaine désolée, et balayait l'odeur des corps et du sang qui commençait a se rependre sur le sol terreux.
Le monstre avait écrasé l'armée végétarienne et il ne restait de celle si qu'une partie hagard et éclopé et bouleversé.

Les harpies ne dirent rien sur leur volonté et la pierre de Sirat resté dans le creux de sa main restait silencieuse.
ce mutisme tracassait l'humoran, qui se doutait d'un traquenard et c'est interdit et soucieux qu'il suivit tout le monde quand la reine invita les harpies a se replier à Treoof.
Il jaugeait la maître d'arme, discuter avec un garçon pale, cadavérique, ses cheveux brun tombant finement sur un visage d'oiseau de proie.
Le monde semblait au diapason du zélote, une ambiance lourde pesait sur la ville forestière.
On le toisait, mais on ne se permit pas de l'insulter.
Il alla directement au manoir d'Omble. Il n'avait pas la force de parler. Épuisé, il mangea et bu toute la journée, comme pour remplir la plaie béante de fatigue physique et psychologique qui le saignait depuis sa résurrection. Il est d'ailleurs étonnant de voir que dans ce genre de cas manger, panse le corps et le cœur tout aussi bien.

Le soir venu il alla se retirer dans ses appartements. La famille d'Omble avait mis à disposition des aventuriers des chambres.
Un lit, une table basse et une baignoire tenaient dans une petite chambre, faite de bois orner au sol et pierre apparente sur les murs. l'eau chaude formait a sa surface un brouillard léger qui attira le zélote fourbu. Il plongea sa main dans l'eau en apprécia la douceur et s'empressa de se dévêtir pour se laver et profiter de ce bain.
Le corps recouvert d'eau, la tête reposée en arrière, il laissait son esprit analysé les éléments, l'absence de réponse de la gamine, le silence troublant des harpies, ce géant qu'il venait de combattre, sibelle, l'unique.
La peur qu'il l'avait envahi dans le trou revenait le hanter. Il avait frôlé la mort et étudiait point par point ce qui l'avait ressenti. Les yeux fixés au plafond, il observait les ombres dansé a la lueur des chandelles qui éclairait la chambre. Il se plongeait dans ce petit théâtre de forme hâlé qui semblait tantôt se changer en monstre, tantôt en Sibelle au gré de ses fantasmes.
L'angoisse de l'échec lavait saisit là-bas, celle de ne pas finir, de ne pas avoir pu terminer et de partir laissant une trace démesurée dans son sillage.
Il soupira et passa sa main humide sur son visage. Les pions se déplaçaient lentement sur l'échiquier d'Aliaenon et formaient des structures complexe qui semblait inextricable. Quel merdier pensa-t-il. Même s'il ne voulait pas s'investir, il se retrouvait toujours impliquer malgré lui. Il devait suivre son instinct, peu importe les morts.
Il pensa a Sibelle et eut envie de la voir. Alors sortant de l'eau, le corps humide et fumant, il attrapa la serviette posé sur le lit, l'appliqua sur lui, rêveur, toujours perdu dans ses réflexions. il pensait a ce sentiment, cet amour qui prenait maintenant une place importante dans sa palette d'émotion.

Pouvait-on dire que c'était de l'amour, de la passion une attirance. Il ne savait pas, il la voulait et plus elle se refusait plus elle le dévorait de l'intérieur.

À la manière d'un adolescent, nue sur son plancher, l'eau ruisselante sur lui, à demi-essuyé, il se demandait encore et encore si c'était le bon choix. Il secoua la tête, essayant vainement de chasser ses doutes. Il continua de se sécher tapotant la serviette sur sa peau et passa son pantalon, assis sur son lit. La fenêtre tamisée par un rideau terne, laissé apparaître la lueur d'une lune naissante au-dehors.
On frappa à la porte et s'est machinalement qu'il alla ouvrir. L'elfe se tenait sur le seuil de celle-ci, droite, militaire, son air toujours aussi déterminé. Ses cheveux roux retombaient en cascade sur ses épaules athlétique. Sirat eut la gorge noué, et il s'écarta pour la laissée entré. Elle revêtait toujours les mêmes habits, tunique de combat, fonctionnel, qui retombait sur son corps laissant dévoilé ses courbes sans les étouffées. Elle était libre dans son attitude ses pensées et c'est ce qui contrastait avec lui et lui plaisait tellement chez elle.

Tu veux entrer, je pensais à venir te voir justement.

Sans dire un mot Sibelle entra dans la pièce, elle était visiblement contrariée. Lorsque l'humoran eut fermé la porte derrière lui, tout en le regardant dans les yeux, elle hésita ne sachant pas par ou commencer.
Contrairement à lui, elle ne s'était pas encore lavée. Elle ressentait toujours cette pression sur les épaules, celle du combat qui l'avait animé et tendu, elle restait immobile dans la chambre, presque gênée. Elle lui demanda comment commencer.

Je ne sais pas ...

Lui répondit-il, il l'observait, et la trouvait belle, malgré qu'elle pense le contraire, elle était fascinante de simplicité et tellement magnétique "

je tiens a toi, je sais que peu importe ma décision tu serais venu sur ses terres car s'était ton destin. Mais celui-ci fera peut-être que nous retrouverons l'un en face de l'autre. Si cela arrive, n'hésite pas une seule seconde car je ferais de même par respect pour ce que nous sommes des guerriers."

Il ne savait pas pourquoi il lui disait cela de manière si abrupte, mais là encore, il manquait de maîtrise et de savoir vivre.

Sibelle fronça les sourcils, elle ne comprenait pas ou Sirat voulait en venir, elle aimait les propos clairs et sans chichis, elle avait horreur des sous-entendus.
il est vrai que Sirat était abscons dans sa façon de s'exprimer, incapable lui même de comprendre ses pensées.

Elle avoua qu'elle avait eut peur qu'il meure
Elle se tut un moment, trop orgueilleuse pour avouer et s'avouer elle-même qu'elle commençait à s'attacher à l'humoran.
Elle reprit, elle ne croyait pas au destin, mais au courage et à l'honneur. Elle voulait s'étendre sur la bataille, l'attitude de Guigne qu'elle trouvait mauvaise et dangereuse et qui avait réveillé ce monstre et enfin pourquoi les carnivores n'étaient ils pas encore là.
Cette fois-ci, songeuse, elle se croisa les bras et attendit les commentaires de Sirat.
Sirat alla se servir a boire et proposa un verre a sibelle.

"l'honneur et le courage... " Répéta-t-il soucieux "cela ne changera rien a ce qui va se passer, Guigne n'est rien, elle sont trois et c'est Jess qui commande. Moi aussi, leur retard m'inquiète, mène ton enquête, sache que j'œuvre pour l'unique, c'est tout et c'est en toute honnêteté que je te le dis. "
Il reste songeur regardant son verre,

"nos quêtes ne changent rien à ce que nous ressentons l'un pour l'autre"

Elle serra ses poings, tenta de contenir sa rage, modérer son rythme respiratoire, mais il n'y avait rien à faire... Elle était en colère.
Après avoir dégluti avec peine, elle réussit à prononcer ces quelques mots, les yeux remplis de larmes elle lui demanda pourquoi il la trahissait. Ce n'était pas un cri, ni un reproche acerbe, mais à peine un murmure.

Des mots simples arrachés de force, d'une voix étranglée, des mots douloureux à prononcer, puisqu'ils énonçaient une fatalité... Leur séparation. Ses yeux remplis de larmes, elle recula d'un pas, posa sa main droite sur le dossier d'une chaise afin de ne pas perdre l'équilibre.

Elle ne partageait pas l'opinion de Sirat. Pour lui, leurs différences d'allégeances ne pouvaient affecter leurs sentiments réciproques. Pour Sibelle, il était impossible de concevoir une relation avec quelqu'un qui œuvrait pour le camp opposé.
Il comprenait qu'elle souffrait et voulut la protégée et la rassurer.

Torse nu, il s'approcha d'elle et l'entoura de ses bras. Toujours en colère, elle demeura immobile sans faire un geste pour s'éloigner.

" Je ne trahis personne, j'ai toujours été clair sur mes intentions et mes objectifs. Ce monde avant était beau, magnifique et seul l'unique peut lui rendre son éclat d'antan. je ne peux te forcer à me suivre, je respecte tes choix et ta liberté cela ne m'empêche pas de ... "

Il ne dit plus rien et resta grave, il leva le visage de la belle et tenta de l'embrasser
Insensible et aveuglé Sibelle ne croyait pas ses paroles.
Les larmes coulant à présent sur ses joues, la belle se défit rapidement de l'emprise du l'humoran, en le repoussant de toutes ses forces, refusant catégoriquement de répondre à ce baiser.

Bouillonnant de rage et blessée, elle lui cria qu'elle ne pouvait faire abstraction de ses choix et qu'il ne lui restait qu'a partir, mais elle ne le fit point incapable de détacher ses yeux de l'humoran, les poings serre, les jointures blanchit par la rage.
Il se recula, surpris et triste à la fois.

"Je comprends, tu as raison. Mais si tu crois qu'on est ennemi, tu te trompes. Quand l'unique reprendra sa place, tu verras que ce monde sera plus paisible. "


Il resta silencieux.
Elle prit la chaise et la jeta contre le mur l'éclatant en plusieurs morceaux et s'en alla en claquant la porte.
Rester seul, il retomba sur son lit.
Quel con... se dit-il pour lui-même. Il termina la bouteille et finit par s'endormir.

Le lendemain, matin, il se leva tôt pour se rendre en ville au château, là où se trouvait les harpies. Il ne croisa pas Sibelle et en fut soulager, il n'avait pas le courage de soutenir son regard, pas maintenant.
Quand il entra dans la salle ou se trouvait les trois monarques, il le fit sans peur, mais avec respect. Il se souvenait de son premier entretien et de son attitude cavalière qui lui avait coûté. Il fit une révérence devant les trois harpies et se planta devant elle.

"Il me semblait que vous aviez un accord avec moi ou même les carnivores, je voulais savoir ce qu'il en était maintenant que l'on a combattu cette chose et ce que vous comptez faire ? Nous n'avons pas de nouvelles des troupes de Bore. Cela ne semble pas vous inquiéter

Jess répondit, ses lèvres pale se mouvant lentement sur son visage de poupée. Tout se déroulait comme elles l'avaient prévue et les plans restaient inchangés. Les carnivores allaient arriver il ne fallait pas que l'humoran ai peur.
Sirat restait frustré, elle ne le mettait pas dans la confidence, elle ne le considérait pas comme un allié et restait prudent a son égard.

"Peu importe vos décisions, elles n'influeront pas sur celle que j'ai prise. Vous soutenez l'unique et je me suis donc allié avec vous dans cette optique et c'est la seule qui m'agite mes pensées. Les peuples ont leur prédestination et on doit l’accepter, je l'accepte. Vous avez ma confiance, j'aimerais donc la vôtre afin de connaître la suite des Événements et vous être utile

Il n'avait pas manqué de sincérité, il devait en savoir plus sur leur volonté et l'accord était juste, il montrait ses cartes à elles d'en faire autant.

Jess baissa la tête pour saluer la démarche et les propos de l'humoran. Elle était satisfaite de cette déclaration. Elle annonça alors un partie de leur plan, ils attendaient les carnivores, elles espéraient faire pencher la balance en leur faveur , obtenir le pouvoir du royaume pâle et la gouvernance des trois cités et ainsi avoir une puissance suffisante poiur oeuvrer pour l'unique à visage découvert.

La réaction de Guigne surprise, le visage orné d'une grimace, elle ne trouvait pas cela prudent d'en dire autant au zélote. Jess effaça ses propos, elle prenait note de ce qu'elle avait décide de dire au guerrier. Son comportement serait soit récompensés soit châtié. Sirat était content, il œuvrait pour l'unique, réparé ce qu'il avait fait, ce que les siens avaient déclenché rythmai ses pas sur aliaenon.

Il opina de la tête, et parla a guigne " n'ayez crainte de moi, madame, je partage vos envies " il lui fit un clin d'œil et reprit Guigne lui lança un regard soupçonneux, mais ne réagit pas davantage " je reste à votre disposition, j'attendrais vos instructions. Quelle était cette chose que nous avons combattus, un titan ? Si je dois tuer ou attaquer la reine pour vous, à t'elle un point faible ?"


C'est Jess, encore, qui répondit à la question sur la créature vaincue. Ce n'étais pas un titan, mais une réminiscence d'un lointain passé, plutôt. C'était une démone, tuée jadis par leurs aïeules. Sa réapparition n'avait rien de naturel, et elle doutait que la magie des titans ait quoique ce soit avoir avec ça... Sable, elle, précisa qu'il ne fallait pas tuer Sheeala d'Argentar : elle était la seule à pouvoir légitimer leur pouvoir sans que la force ne soit utilisée.

"Très bien et talia d'omble doit-on s'en méfier?" Il se redressa
Sable semblait devenu plus volubile et répondit La demoiselle d'Omble semblait imprévisible. Elle pourrait être un élément de poids dans les événements à venir.


il acquiesça "elle semble proche du nain elfique, cela peut être un moyen de pression" puis continua "je vais me rendre en forêt, jusqu'à l'obélisque puisqu'il est de pierre je peux enquêter sur lui et ce qui s'est passé, en attendant une autre mission"

Jess réagit aux dires de Sirat la proximité avec Kiyoheïki pouvait être autant un avantage qu'un inconvénient : leur force commune n'en était qu'augmentée. Quant à l'Obélisque, elle doutait qu'il vous en tire quoique ce soit... À moins de pouvoir se mesurer à la magie des titans. Elle le mit en garde de ne pas trop s'éloigner.

Il hésita un instant " je croyais que la magie des titans n'avait pas de liens avec cette entité ?"

Jess poursuivit qu'avec la démone, non. Mais l'arme qu'elle tenait, si. De nombreux objets de ce type ont pu être observés dans tout Aliaénon, depuis l'éveil des Titans.

Était-il capable de lutter contre la magie des titans... La même peur qu'il avait ressentit au seuil de la mort le fit tressaillir. Il devait éviter de se disperser, et s'accorda sur le conseil. "Je vais rester et me préparer"

Il referma la porte et se retrouva dans une des allées froides du château. Il faisait l'analyse de son entretien avec les trois régentes, tout en marchant machinalement. Il ne prêtait pas attention au décor qui défilait sous ses bottes. Mur de pierre froid et meurtrière filtrant la lumière d'un matin froid.

Au détour d'un couloir, perdu, sirat se stoppa et se retrouva nez à nez avec Kiyoheiki, silencieux et interdit pendant un court instant, il se rapprocha de lui finalement et prit la parole.

"Bien le bonjour chevalier, je ne suis pas mécontent de vous croiser, j'avais quelques questions qui me torturaient l'esprit et votre avis pourrait m'en libérer. "Sans vraiment attendre de réponse, il reprit : quel est votre bilan de tout ceci ? les pâles survivront il a leur avenir ?"
il inclina légèrement la tête sur le côté, le regard interogateur, il ignorait vers quoi l'avenir tendait. Les végétariens étaient brisés donc tout cela dépendrait des exilés et de ceux qui les accompagnent dit il en fronçant les sourcils
Il faisait allusion au zélote, c'est du moins ce qu'imagina Sirat.

"beaucoup de chose dépendront des décisions de la reine" répliqua l'humoran

il esquissa un sourire et rajouta que les actes des yumeniens, les imprévus formaient la toile du destin il était difficile de prévoir quelque chose. il maqua un instant de paue et li demanda pourquoi il l'avait interpellé. soulager de ne pas avoir a repondre de sa présence au chateau Sirat répondit avec flegme.

il se penche vers l'elfe, le surplombant de toute sa masse

"certes le destin depent de plein de petit tout... mais les yumeniens ont déjà que trop interférer dans les histoires de ce monde, il est temps de le rendre comme il était avant qu'on arrive il y a cinq ans ou du moins essayer"
"je vous sollicite pour savoir ou va votre allégence, chevalier, a votre coeur ou a vos responsabilités"


la masse du guerrier ne l'impressionnait pas, il avait l'habitude d'être plus petit cela ne datait pas d'aujourd'hui. la phrase de l'humoran lui paraissait étrange, proposait il de retourner dans le passé, ce monde luttait déjà difficilement pour trouver son nouvel équilibre. Pour son allégeance elle va a son peuple et a ceux auxquels son sang versé le liait. Il s'exprimait avec beaucoup de lyrisme.

"un retour en arrière non, on ne reviens pas sur ce qui fut. mais botter le cul au dragon apportera la paix, vous avez pas idée des monstres qui peuplent ces terres jadis si paisible. Ces choses n'existaient pas avant et elles ne sont là qu'a cause du réveil des Titans" il le contourna pour passer derrière lui. "votre peuple est dans un autre monde et peu importe vous êtes un mâle votre allégeance ira forcément à la belle du manoir" il lui fit un clin d'œil complice.

un léger embara traversa son visage quand Sirat mentionna Talia. Il restait incertains sur son avis sur le Dragon
Il jeta un regard par dessus son épaule et confirma ce que venait de dire l'humoran. Il était lié a ce peuple via la chance qu'il lui avait donné d'être considéré autrement que par son ascendance.

en s'éloignant avec un air nonchalant, les mains croisé derrière la tête "vous avez raison, une chance cela se saisie"

Il pensait à lui aussi, l'opportunité que lui offrait la trinité confirmait qu'il devait l'attraper et en faire sienne. Il se quittait cette fois si sur de bon terme, finalement il n'était pas si diamétralement opposé. Come pour Sibelle il espérait les convaincre le moment venu. il bifurqua et disparu du couloir pour entrer dans une autre traverse.

La journée s'égrénait lentement. Sirat se balladait dans la ville mais les regards suspicieux et haineux finirent par l'agacer, alors il se détourna et déambula jusqu'au lac.

Sur les rives de cette étendues d'eau opaque, bercer par la brise de la forêt, s'entrainait Xel. Il jesticulait un baton à la main, s'appliquant et consciencieu.

" tu as decidé de devenir un guerrier maintenant?" lui dit il un sourire en coin.


le jeune homme se figea en entendant le Zelote et lui adressa un signe de tête pour le saluer avant de répondre avec gravité qu'il lui fallait bien un plan de secours si sa magie lui faisait défaut. Il reprit ensuite son entrainement.

Sirat se rapprochea restant a bonne distance des mouvements

"toi, xel, tu seras prêt a aller jusqu'au bout, a tuer de tes mains tes adverssaire? il esquissea un sourire "la magie offre un certain anonymat, tenir une arme et frapper sois même est une sensation différente"

Les propos de l'humoran semblèrent perturbé le bohémien qu'il cessa ses mouvements pour ce concentrer. Il porta sa main a son visage le secoua et repondit en ce dirigeant vers le lac ou se trouvait son sac et sa gourde. Il avait déjà tuer, son baton massacrerait moins de personne.

Sirat haussa les épaules "certes" il le suit prêt du lac. "et qui vas tu tuer? quel est ton ennemi"

il ne savait pas, il savait juste que cela était inévitable.

"si tu es prêt à le faire, il te faudra une autre arme que cette brindille"
il désigna le baton

Xel jaugea son arme, perplexe et affirma que cela augmentais la force de ses vents, ceux de sa magie

sirat fit une moue " le but n'était donc pas de pouvoir te passer de ta magie?"

Il répondit qu'il avait conscience de son utilité, il voulait trouver une autre corde a son arc et une masse n'était pas adapeter.

Sirat regarda son marteau et acquiessa à cette reflexion puis il observa le corps du magicien et eut un petit rictus

"tu pouvais prendre une épée ou une lance, enfin un truc qui coupe ou blesse"


il se gratte la tête. et soupire

"j'ai l'impression dés fois que tu es un enfant enchevêtré dans un corps d'adulte"

Il opina du chef mais rajouta que depuis la dernière bataille il vaait changé.

Sirat garda le sourire et lui tapa dans l'épaule " j'ai hate de voir la prochaine étape de ta mutation alors" il scruta le ciel sombre un air soucieux lui barrant le visage "finalement elle semble se rapprocher" puis il reprit sa bonhomie "allez je vais aller boire un coup, faut s'hydrater avant les grands événements"

Avant qu'il ne parte il lui demanda si il n'avait pas e probleme avec les vegetariens en ville.

Sirat s'arreta un peu surpris "si biensur, mais j'ai l'habitude de ne pas être aprécier à ma juste valeur"

Il reprit son sourire et le jeune homme lui proposa de boire un verre avec lui quand tout cela sera terminer.

"rendez vous pris, alors, tache de rester en vie jusque la"

Il inclina la tête avant de recommencer à s'entrainer.

Sirat retourna finalement au chateau, ayant bifurquer pour prendre de la nourriture, il se posa sur les remparts. il regardait la forêt de sa tour de guet, fermant les yeux de temps à autres, ce qui sortirait de cette masse verte allait changé la donne demain et il ne savait pas vers quoi tout cela allait tendre.

Citation:
3600 mots correction faute plus tard désolé

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Dernière édition par Sirat le Sam 31 Mar 2018 15:41, édité 2 fois.

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 Sujet du message: Re: Treeof
MessagePosté: Sam 31 Mar 2018 09:59 
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...

Le reste de la journée se déroula lentement. Les Carnivores marchaient, abattus, toujours dans la longue file qui faisait penser à un exil forcé vers leur propre mort peut-être. Rien n'était moins sûr. Que souhaitait en faire la Trinité ? Des esclaves, peut-être. Elles ne les libéreraient pas, pas maintenant - le risque qu'ils se dérobent d'elles et qu'ils s'organisent en une force capable de les menacer était trop grand. Et si elles avaient voulu les tuer, elles l'auraient fait bien plus tôt. Non, le but évident était de les utiliser, dans un dessein quelconque...

Le soir tomba. Las et fatigués, ils n'avaient parcouru que la moitié du chemin, tout au plus : ils avaient avancé bien plus lentement que leur petit groupe d'aventuriers yuiméniens, à l'aller. Les Carnivores furent parqués au centre, tandis que les soldats montaient de petites tentes qui ne dépassaient pas le mètre de haut. L'archère, quant à elle, était invisible et ne dormait apparemment même pas dans le camp lui-même, à moins que Yurlungur l'ait ratée. Et elle, elle ne savait pas où se placer, hésitant à trop se rapprocher des Carnivores. L'incident de tout à l'heure devait avoir mis la puce à l'oreille à quelques uns d'entre eux et, même s'ils étaient tous attachés, elle préférait ne pas risquer de strangulation nocturne.

Si bien qu'alors que l'obscurité se mit à tout envahir et qu'elle, elle n'avait aucune envie de dormir maintenant - le coquard de son œil diffusait une légère douleur et c'était pire lorsqu'elle le touchait et elle se sentait tendue, trop tendue pour se reposer -, elle se dirigea vers l'un des feux de camp qui s'étaient allumés et autour desquels veillait, à chaque fois, un soldat dont c'était le tour de garde.

Elle s'approcha et, avec une légère appréhension de rejet, demanda à la silhouette empaquetée dans son uniforme :

« Je peux me joindre à vous ? »

Le visage de l'Arothiirien se leva vers elle en sursautant et un détail la frappa : il était jeune. Très jeune, même : c'était encore un adolescent et, à vue de nez, seules quelques années devaient le séparer de la jeune fille. Il répondit donc, visiblement nerveux et quelque peu inexpérimenté, que ça devait être possible, s'écartant un peu pour la laisser s'asseoir à ses côtés, sur un tronc abattu à côté du feu.

C'était amusant qu'elle n'ait même pas fait attention, jusqu'ici, à l'âge de ces combattants et, la fatigue aidant, un vague sourire satisfait se plaça sur ses traits tandis qu'elle l'observait en silence, contemplant le léger malaise qu'il éprouvait à une telle rencontre. Il avait vu, probablement, que l'archère l'avait détachée et cela avait aidé, probablement. Puis, comme il n'osait pas prendre la parole, elle forma un compliment :

« Vous vous êtes bien battus, tout à l'heure, finit-elle par annoncer. Les Carnivores étaient déchaînés, mais vous avez maintenu votre formation : c'était plutôt beau à voir. »

L'idée qu'ils aient pu avoir des pertes la traversa et, avec une mine plus soucieuse, elle se rattrapa :

« J'espère que vous... que vous n'y avez pas perdu d'ami, de proche ? »

Mais l'Arothiirien n'avait pas beaucoup de véritables amis dans cette armée, expliquant cela par un entraînement intensif. Un entraînement intensif qui les liguait les uns contre les autres autant qu'il les préparait ? Finalement, une telle stratégie n'étonnait même plus la jeune fille. C'était typique : exactement ce à quoi elle aurait pu s'attendre de la part de la Trinité.

Elle se pencha un peu en avant, posant son coude sur son genou et son menton sur sa main. L'air se faisait frais et le feu, autour, diffusait une chaleur agréable qui se perdait malheureusement trop vite à mesure qu'on s'éloignait.

« Bien entendu. Mais il est toujours déplorable de voir tomber certains de ses compagnons, quelle que soit l'affection qu'on leur porte, n'est-ce pas ? »

Et puis, soupirant un coup, elle demanda :

« Pas d'amis... Avez-vous de la famille à Arothiir, alors, ou êtes-vous définitivement sans attaches, comme moi ? »

Et puis, presque aussitôt :

« Tout à l'heure, c'était la première fois que vous preniez part à une bataille rangée, je me trompe ? »

Ça se voyait à son visage, en fait. Il était peu probable qu'il ait été envoyé au front alors qu'il était encore un gosse et elle n'avait pas entendu parler de conflit armé sur Aliaénon depuis environ cinq ans. Il haussa les épaules, précisant son statut d'orphelin, c'est-à-dire destiné à ce métier de soldat. Le schéma social d'Arothiir se précisait et s'affinait. Puis, regardant le feu, il confirma l'intuition de la jeune fille, puisqu'il n'avait pas participé à ce qu'il appelait la “Grande Guerre”. Elle lui sourit et répondit avec douceur :

« Ce n'est pas la peine de faire une telle tête. On survit, sans parents, ce n'est pas à vous que je vais l'apprendre. »

Elle songeait à quelque chose, à présent, en fixant le feu elle aussi. Elle s'était présentée comme relativement proche, d'un point de vue relationnel, de ce qu'il vivait lui ; de plus, elle pouvait compter sur une certaine aura de mystère qui l'entourait probablement à ses yeux - pourquoi leur cheffe l'avait-elle libérée ? Qu'avait-elle de si spécial ? Pourquoi quelqu'un de si jeune se trouvait-il là, encore plus jeune que lui ? Et il y avait peut-être - sait-on jamais - la possibilité d'agir sur ce qu'il ressentait lui-même. Il n'avait pas dû croiser beaucoup de filles dans l'armée, à Arothiir : et malgré son coquard, elle restait un individu de la gent féminine. Il fallait tenter le coup.

« Vous devez savoir ce qu'il va se passer à Treeof. Il n'y a rien à craindre. »

Le bluff était relativement gros, mais peut-être lâcherait-il des informations sur ce qu'ils y feraient, justement. Elle faisait mine de savoir aussi pour le mettre en confiance, afin qu'il se délivre : et justement, il haussa un sourcil et répéta le nom de la ville, demandant si c'était bien là qu'ils se rendaient.

Elle écarquilla les yeux, se redressant un peu, surpris. (Perdu.) Zut, zut, zut, il ne savait rien : et pire, elle venait de lui donner une information potentiellement fausse. Bah, il était probable qu'ils se rendent effectivement à Treeof - où d'autre, dans cette Forêt ? - mais maintenant, c'était elle qui se trouvait perdante dans l'échange d'informations.

Elle se sentait bête et aurait dû s'y attendre - c'était évident : si l'archère ne lui disait rien elle-même, c'était que personne d'autre ne lui dirait. Mais elle s'était tout de même protégée au point de laisser tous les soldats dans le flou le plus total... Autrement dit, si la tête était coupée, tout le corps se retrouvait sans directives et totalement perdu. Finalement, elle avait vraiment bien fait d'éviter tout drame potentiel avec la flèche de Celemar.

Elle secoua la tête et répondit :

« Oh, pardon. Je croyais que vous saviez... Au temps pour moi. »

Bon... Le risque était à présent que l'Ombre apprenne à ce propos, si elle ne le savait pas déjà. Il n'était pas impossible, au fond, qu'elle les espionne - qu'elle cherche à savoir absolument tout ce qu'il se passait dans ce camp. Mais il serait tout de même terriblement honteux pour elle que ce soldat divulgue l'information auprès de ses pairs et que le tout remonte aux oreilles de l'Ombre... Après un temps, se mordillant la lèvre, elle demanda d'une petite voix :

« Je n'étais pas supposée le dire, je suppose. Pourriez-vous me faire une faveur, et garder cela pour vous ? Comme si je ne l'avais jamais laissé échapper. »

Elle chercha à croiser son regard, un peu soucieuse. Et lui, un brin gêné, accepta finalement. Elle hocha de la tête, le remerciant brièvement, puis un moment de silence s'installa. Et brusquement, il indiqua qu'il n'avait jamais vu Treeof et, jetant un regard autour de lui, qu'il n'avait finalement connu qu'Arothiir de toute sa vie. Étonnant ? Même pas. Elle et son sourire s'attendrirent un peu.

« Treeof se situe effectivement en plein milieu de la Forêt que nous traversons. Depuis quelques temps, néanmoins, les arbres les plus proches de la cité ont été abattus pour dresser une palissade de protection autour. »

Elle agita la main d'un geste dédaigneux, désignant dans l'air un mur imaginaire.

« Par rapport aux murailles d'Arothiir, c'est ridicule, bien sûr. Ça a été fait à la va-vite et, face à une armée de métier, elles ne tiendront pas un quart d'heure. Et puis, vous verrez, la ville... C'est aussi beaucoup plus rural. Rien à voir avec ce que vous connaissez. »

Elle jeta un coup d'œil vers l'obscurité des bois et renchérit :

« Quant à la Forêt en elle-même... Il y a quelques bêtes sauvages. Mais nous formons un groupe bien trop imposant pour être attaqués, donc on ne risque rien ici. »

Elle lui sourit à nouveau, gentiment, les paupières déjà un peu alourdies. Il sembla un peu étonné, ou déçu. Et, effectivement, cela ne ressemblait pas, à ses yeux, à la description d'une véritable capitale.

Elle haussa des épaules.

« Non. Pas vraiment une capitale, ou en tout cas ça y ressemble bien moins qu'Arothiir elle-même. »

Voilà qui devrait instiller dans son esprit quelques petites idées. Puis, souhaitant laisser le garçon méditer là-dessus, elle indiqua :

« Merci pour la compagnie. Je vais me coucher, bonne nuit. »

Et, sur un dernier sourire, elle disparut. Il avait été décontenancé par tout ce qu'elle lui avait appris. Elle plaça finalement sa couche à mi-distance entre les premières tentes arothiiriennes et les Carnivores. Les étoiles, au-dessus, brillaient et elle, elles les trouvait lointaines. Trop ? Ces étoiles, c'étaient comme ses rêves qui s'en allaient : ou plutôt, qui se réalisaient comme elle l'avait espéré, mais en se transformant progressivement en cauchemars.

Quoique, ce n'en étaient même pas véritablement. C'était simplement que... tout ce qu'elle avait espéré, toute la puissance qu'elle voulait atteindre pour la seule raison de se protéger - se protéger contre tous ceux qui voudraient s'en prendre à elle, et vivre, vivre ! - tous ces rêves s'assombrissaient petit à petit. Ils quittaient leur statut onirique et se fondaient à la réalité, une réalité sombre et dure, qui n'acceptait pas les petites filles trop ingénues.

Elle ne voulait pas y penser. Pas penser à Kiyo, surtout. Elle l'avait trahi - et en même temps, ne l'avait-elle pas trahi depuis si longtemps ? Elle s'était donné bonne conscience en l'informant de l'implication de la Trinité, mais ce n'était plus rien à présent. Il mourrait, et ce serait sa faute...

Elle s'enroula dans son duvet et ramena ses jambes à elle. Il ne fallait pas y penser... C'était si simple de ne pas penser.


***

La journée du lendemain se passa sans interruption, aussi lentement que la première. Ils progressaient, sûrement, mais ça en devenait rasant. Et les bleus de la jeune fille, s'ils ne lui faisaient plus mal directement, restaient douloureux au contact, et bien visibles à quelques endroits. Elle ne savait pas combien de temps ce beau coquard resterait, mais ça ne l'enchantait pas trop.

Elle fut donc d'humeur morose et mutine jusqu'au soir, observant les soldats et les Carnivores autour d'elle telle une bête traquée. Et puis finalement, alors que le soir tombait mais qu'ils ne s'arrêtaient toujours pas, elle perçut une rumeur dans les troupes d'Arothiir et, se rapprochant un peu pour épier l'un des murmures, comprit finalement : ils approchaient de Treeof, enfin.

Sans attendre, elle rejoint l'archère en tête de file et demanda, doucement :

« Et maintenant, quel est le plan ? »


(((7500 mots au total (oups) )))

...

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Dernière édition par Yurlungur le Sam 31 Mar 2018 19:26, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Treeof
MessagePosté: Sam 31 Mar 2018 14:37 
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Treeof – Château. (Sirat, Daemon).

    Daemon retrouva Sirat entre les murs du château. L’agitation avait aussi gagné la cour de celui-ci. La rumeur était parvenue jusque sur l’île, alors que la noirceur nocturne enveloppait de ses bras d’ombre le paysage. Dans la cour, Le Trio de harpies, la reine Sheeala d’Argentar et son fidèle garde du corps et ancien gouverneur d’Andel’Ys, Astidenix, étaient rassemblés et en grande discussion. Talia D’Omble, elle, avait quitté le château plus tôt pour rejoindre la maison de sa famille, ainsi qu’Azra, Kiyoheïki et ceux qui voulaient partir au-devant des troupes inconnues dans la forêt. Daemon et Sirat les interrompirent en pleine conversation. De ce qu’ils comprirent, la Trinité d’Arothiir voulait emmener Sheeala d’Argentar en bordure de ville pour lui montrer une « surprise ». Astidenix, lui, ne semblait pas de cet avis. Lorsqu’ils arrivèrent, il était en train d’implorer sa reine de rester.

    « Dame, des troupes ont été aperçues autour de la cité. Nous ne savons pas qui ni combien. Je vous conjure de rester à l’abri de vos murs, ici. Donnez l’ordre à votre peuple de rejoindre le château, nous aurons au moins une base de défense convenable. Tout ce que vous trouverez là-bas n’est que mort et trahison ! »

    Mais Jess interposa son propre avis, posée et plus sereine que l’ancien gouverneur vieillissant.

    « Allons, majesté. Nous vous assurons une surprise agréable. Les insinuations à peine voilées de votre sbire n’ont aucun fondement : nous vous avons sauvée, vous et votre peuple, en renvoyant d’où elle venait cette démone ancestrale. Pourquoi dès lors voudrions-nous vous attirer dans un piège aussi trivial que pathétique. Suivez-nous, votre grâce. Vous nous devez bien ça. »

    Guigne, elle, se fit plus provocatrice, et toisa le vieux guerrier.

    « Qu’il reste là, s’il a peur. »

    Astidenix eut du mal à contenir sa colère. Il éructa :

    « Jamais ! Où que Sheeala d’Argentar aille, je la suivrai. Même si je dois y laisser la vie pour la sortir de vos viles griffes, félonnes ! »

    Le ton montait. Sable intervint cette fois, suppliante.

    « Majesté, je vous en prie : modérez votre suivant : l’outrage est grand, dans sa bouche. »

    Sheeala, ingénue et perdue, se tourna vers les deux aventuriers présents. Elle cherchait, sans mot dire, un conseil qui lui ferait prendre sa décision. Partir avec les harpies ? Rester ? Quoi d’autre, encore ? Les paroles de Daemon et de Sirat auraient une grande influence : il s’agissait de bien choisir ses mots.


Treeof – Abords directs (Xël).

    Xël avait dû attendre plusieurs heures avant de n’avoir une réponse d’Ibn Al’Sabbar. Sa pierre grésilla et cracha les paroles du Cadi Yangin.

    « Rien de neuf. Il n’y a aucune trace de l’apparition d’un titan dans la forêt d’Emeraude, aucune fluctuation magique. Nous n’avons aucune ressource à vous envoyer qui puisse arriver à temps : c’est une bonne chose que le problème soit réglé. »

    Il n’y avait de lieu pour observer l’extérieur que les portes de bois, dressées et cernées de tours de bois. Le reste de la palissade de rondins n’était qu’un mur, sans chemin de ronde. C’est là qu’il fut rejoint par Loeding. Partout à l’itérieur de la palissade, comme pour soutenir la structure, les végétariens s’amassaient. Parmi eux, il vit Dromi et Gleipnir. Ils ne lui accordèrent pas même un regard. Autour de la cité, tout était calme pour le moment. Un silence de mort : tout le monde était attentif au moindre mouvement. Les éclaireurs s’étaient-ils trompés ? Il n’y avait cependant que peu de doute : une armée approchait. Et l’on n’en savait rien.

    L’homme-chouette lorgna la forêt obscure et nocturne autour de la ville. Il soupira, et parla à Xël.

    « Ils ne veulent pas se battre. Ils ne sont pas prêts. Ils ont le moral en berne et se sentent faibles. Et pourtant, ils donneront tout pour défendre la cité. Si nous allons au combat, tout ça va finir en catastrophe… Que pouvons-nous faire, désormais, pour éviter ça ? »

    Une stratégie à proposer ? Un discours à poser ? Ou simplement une réponse humble à l’homme-chouette ? Xël était seul décisionnaire de ce qui allait se passer là.


Treeof – Armée d’Arothiir. (Yurlungur).

    L’archère, dont Yurlungur avait appris le nom, Elisha’a, se tint droite devant elle lorsqu’elle posa la question.

    « Maintenant, tu vas devoir choisir ta voie. Cette armée va continuer à avancer vers son but, avec les Carnivores. Ils n’ont plus besoin de moi dans leur rang, pour l’heure. De mon côté, je m’en vais vers le Manoir D’Omble pour contenir ceux qui pourraient nous causer du tort. Suis-moi, ou poursuis vers Treeof. »

    Elle était peu précise dans le détail de ses énoncés. Yurlungur devrait s’en contenter. Sans attendre sa réponse, elle s’enfonça dans les bois obscurs comme si elle avait fait ce chemin mille fois. L’armée, elle, progressait lentement vers la cité, sans aucune lumière, sans aucune torche. Comme s’ils voulaient une approche la plus discrète possible, même si leur masse était aisément repérable dans la forêt, par quelques éclaireurs. Penser le contraire était prendre les végétariens pour des dupes.

[Si tu suis l’archère, tu peux poursuivre avec les alentours du Manoir d’Omble. Sinon, dis simplement que tu suis avec l’armée. Inutile de préciser que le choix est unique, et que le prendre te privera de l’autre partie.]



Treeof – Alentours du Manoir d’Omble. (Azra, Sibelle, Kiyoheïki)

    La grande Maison D’Omble semblait bien vide, à cette heure tardive. Elisa et Khar’Tar y étaient finalement restés seuls. Ceux l’occupant étaient soit partis en ville, soit venaient de s’en aller pour aller à la rencontre des troupes inconnues approchant de la ville. Ils étaient cinq, en tout. Azra, Sibelle, Kiyoheïki, Talia et Nastya. Cette dernière avait accepté de suivre Sibelle sans vraiment être certaine de son choix, sans doute faute de mieux : depuis son départ pour chez les carnivores, elles ne s’étaient pas adressé la parole. Sans doute était-elle toujours aussi attachée à la cause des végétariens.

    Le petit groupe n’eut guère l’occasion d’aller bien loin, cependant : ils ne trouvèrent guère les troupes inconnues, mais furent trouvées par elles. Ou du moins par une inconnue, qui se planta, droite et menaçante, seule, sur leur chemin. Le Manoir était encore visible, derrière eux. Ils n’avaient parcouru que cinq cent mètres en dehors de la vaste propriété clôturée. Une silhouette féminine, au visage caché, bien que la pâleur de sa peau ne puisse faire aucun doute. Elle avait un long arc courbe à la main, et une flèche dans l’autre.

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    La voix de l’archère se fit alors entendre dans la nuit. Elle récitait des noms comme une litanie. Leurs noms. Ceux, en tout cas, qui étaient connus en ce monde.

    « Kiyoheïki. Azra. Talia D’Omble. Votre chemin s’arrête ici, ce soir. Toute résistance de votre part est inutile. Gardez vos armes dans leurs gaines et cessez tout mouvement. »

    Nastya envoya un regard curieux à l’elfe blanche. Étaient-elles également soumises à la consigne ? Dans le doute, elle ne fit rien et reporta son regard sur l’inconnue.

    « Vous n’interviendrez pas sur le sort des Pâles, ce soir, sans mon aval. »

    Puis, après un court instant :

    « Où pensiez-vous aller ? »




[Azra : 0,5 (introspection) + 1 (apartés) + 0,5 (aller au-devant de l’inconnu) + 2 (bonus longueur.)
Daemon : 0,5 (introspection) + 1 (apartés) + 0,5 (shopping) + 0,5 (au château !) + 2,5 (bonus longueur).
Yurlungur : 1 (introspection) + 1,5 (apartés) + 0,5 (libérée, délivrée) + 0,5 (et la suite ?) + 3,5 (bonus longueur).
Sibelle : 0,5 (introspection) + 0,5 (récolte de plumes) + 1,5 (apartés) + 0,5 (aller au-devant de l’inconnu) + 3 (bonus longueur).
Xël : 1 (introspection) + 0,5 (message au Conseil) + 0,5 (entraînement) + 1,5 (apartés) + 0,5 (gestion de crise du trio) + 0,5 (attendre les ennemis) + 4 (bonus longueur).
Kiyoheïki : 1 (introspection) + 1,5 (apartés) + 0,5 (veillée funèbre enivrée) + 0,5 (aller au-devant de l’inconnu) + 3,5 (bonus longueur).
Sirat : 0,5 (introspection) + 2 (apartés) + 0,5 (serment) + 3 (bonus longueur). Attention : tu ne lis pas dans l’esprit de Sibelle : ses réactions en narration lui sont propres, Sirat n’y a pas accès, et ne peut donc pas tout deviner. Attention à ne pas reprendre textuellement les mots de l’autre.]

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 Sujet du message: Re: Treeof
MessagePosté: Sam 31 Mar 2018 16:02 
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Une certaine agitation finit par attirer l'attention de l'humoran. La cour était en pleine effervescence les trois harpies argumentaient face à la reine et à son suivant butor. Véritable garde du corps celui-ci, comme un chien, montrait les dents, il n'avait pas confiance en Jess, Guigne et Sable qui voulait emmener la reine dans la forêt. Elles prétextaient avoir une surprise et cela intrigua l'humoran. La manière de présenter ce qui semblait être l'armée des carnivores était soit que celle-ci était venue en paix soit qu'ils avaient été mis en cage. La première solution était peu probable, la discussion avec Bore avait montré à Sirat que celui-ci ne renoncerait pas à ses terres, la seconde plus logiques étranglaient l'humoran car si c'était le cas il y avait participé et en plus il avait maintenant la main dans l'engrenage de l'esprit tactique des harpies.
Plutôt que de faire les choses à moitié, Sirat se remémora pourquoi il était là, pourquoi il s'était brouillé avec Sibelle et que tant de sacrifice ne serait pas vain. Il ne pouvait pas reculer ou hésiter.
Non loin de lui, le jeune homme, blafard, écoutait aussi attentivement. Il avait pointé son nez aquilin en entendant les bruits.
La reine regarda dans leur direction, cherchant une aide subsidiaire pour prendre une décision.
Sirat prit la parole.

"Reine, je suis Sirat Ybelinnor, nous n'avons pas eut encore la possibilité de parler ensemble, mais si vous le permettez."

Il prit un instant et s'avança.

"Si la trinité voulait atteindre à votre vie et votre pouvoir cela aurait plus d'impact dans les murs de votre château. Elle l'aurait déjà fait, vous auriez du déjà vous défendre. En les invitant ici vous avez reconnue leur aide et leur avait déjà accordé votre confiance. Vous ne pouvez pas accorder celle-ci qu'à moitié. Elles vous ont aidés alors qu'elles auraient pu attendre de ramasser les fruits de votre combat avec la démone. Votre peuple a besoin de vous tous, ensemble et que les querelles cessent. Si c'est ce que vous souhaiter ardemment en tant que régente vous devez montrer le chemin avec un signe fort. N'ayez crainte, suivez donc la trinité dans la forêt, votre dévoué cerbère est là"

Il jeta un regard en coin à Astidenix.

"Et je serais là aussi, comme quelqu'un me la déjà dit la loyauté est récompensé par l'amour, la fidélité par la confiance, la traîtrise par la mort."

Il regardait maintenant Jess et attendait la réponse de la reine.


Citation:
412 mots

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 Sujet du message: Re: Treeof
MessagePosté: Sam 31 Mar 2018 19:25 
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...

L'archère ne perdit pas de temps et lui expliqua aussitôt ce qu'il allait se passer à présent. Elle lui laissait le choix entre la suivre elle ou continuer avec l'armée arothiirienne, vers Treeof. Elle-même n'avait pas besoin de s'y trouver pour qu'ils gagnent la bataille : en revanche, il fallait qu'elle se rende au manoir des D'Omble, où elle savait se trouver quelques ennemis qu'elle aurait à contenir. Comment elle le savait, c'était là toute la question : des espions arothiiriens s'y trouvaient peut-être, ou alors elle avait reçu un nouveau message de la part de Sirat, qui sait...

Yurlungur lança un seul regard vers la longue file qui marchait vers la cité. Sa place n'était guère sur un champ de bataille : la prise d'une ville ne l'intéressait pas, d'autant plus qu'elle n'agirait que comme un électron libre qui risquerait de désorganiser la stratégie arothiirienne. Non, il était inutile qu'elle s'y rende : tout comme l'archère, elle avait intérêt à se rendre au Manoir, d'autant plus qu'Elisha'a, malgré tout, l'intriguait. Et puis, il y aurait Kiyo, probablement...

L'Ombre ne l'avait pas attendue et s'était déjà dirigée vers les bois obscurs de la Forêt : sans plus d'hésitations, la jeune fille marcha à sa suite, s'engouffrant à travers les arbres sur un chemin visiblement connu de l'archère, qui l'empruntait avec rapidité mais sans empressement visible. Derrière elle, l'armée entière disparut et les ténèbres les happèrent : mais même avec le manque de lumière, elle parvenait à distinguer la silhouette à la fois fine et forte de l'archère, devant elle, et la suivait en silence.

Oh, les branches qui craquaient sous ses pieds, son souffle, tout cela, Elisha'a devait l'entendre sans mal : il n'y avait donc rien à dire. On n'entendit rapidement plus rien que cela : peut-être y aurait-il des cris, du sang et des larmes une fois la bataille de Treeof engagée, mais ils seraient alors trop loin.

Elle ne pouvait s'empêcher de contempler la silhouette gracieuse et puissante de l'Ombre devant elle, qui avançait sans se poser de question. C'était un idéal, un idéal sombre et froid qui lui tournait le dos, entièrement dirigée vers un objectif qui les dépassait toutes les deux, vers la gloire de la Trinité et le malheur de leurs ennemis. Et toute l'angoisse de cette situation, lentement, commençait à l'envelopper, elle, la frêle Yurlungur qui, à côté d'une telle Ombre, risquait de faire bien pâle figure.

Elle sourit malgré elle au jeu de mots, mais c'était un sourire tendu, crispé.

Kiyoheïki serait là-bas, c'était évident - autrement l'Ombre aurait accompagné l'armée, connaissant la valeur de cet ennemi. Par témérité ou par bêtise, Yurlungur avait décidé de le rejoindre, ignorant superbement la solution la plus simple, qui aurait été de rester en marge des combats, de les observer depuis un lieu sûr et de n'intervenir qu'en dernier recours.

Son rôle, son rôle... elle ne savait plus où était son rôle, donc elle suivait, évitant les branches qui obstruaient le passage, enjambant les troncs et buissons, montant, descendant, sautant au-dessus d'un ruisseau. Les gestes étaient mécaniques, l'esprit perdu dans des considérations distantes. Et soudain, la Forêt s'ouvrit devant eux et le Manoir des D'Omble apparut. Elles s'arrêtèrent toutes les deux, un seul instant, mais Yurlungur en profita pour indiquer :

« Passez devant... Je vous rejoins. »

Elle continuait à regarder, béate, le Manoir devant elle, la main contre le dernier tronc à l'orée de la Forêt. L'archère finit par repartir devant et la laissa là, seule, encore dans l'ombre protectrice de la Forêt. Elle n'osait plus se montrer à la Lune ou aux étoiles : elle avait peur d'être aperçue, que tous ses masques et ses artifices, d'un seul coup, disparaissent et s'envolent, lui échappent, la laissant nue, entière, vulnérable. Ça l'effrayait, en fait : mais là-bas, du Manoir, quelques silhouettes sortirent.

Elle sentit son cœur se serrer. Combien étaient-ils, à sortir et se diriger le long de l'allée ? Elle distinguait à peine les différentes silhouettes, mais elle voyait le groupe avancer, inconscient du danger qui planait sur eux. L'archère, d'un moment à l'autre, allait les abattre, un par un...

Le souffle de la jeune fille s'était fait pressant. Elle était seule, au beau milieu de la nuit et à présent, elle ne savait absolument pas quoi faire. L'Ombre avait disparue dans la nuit, perdue de vue, mais elle allait tirer, tôt ou tard...

Puis, prise d'un courage insensé, elle s'avança un peu, vers le chemin. Elle était petite, discrète : sans doute ne la verraient-ils que lorsqu'ils seraient à quelques mètres d'elle. Et là, elle se planta, les laissant s'approcher, prête à la rencontre. Prête ? Elle tremblait, elle frissonnait de la tête aux pieds et ses doigts étaient crispés autour des deux dagues qu'instinctivement, elle avait saisies.

Mais le groupe ne l'atteint pas. Il fut arrêté par Elisha'a, qui se dévoilait à leurs yeux, sans crainte. De là où elle était, Yurlungur n'entendit pas ce qu'il se disait - les mots se perdaient dans la nuit : mais tous s'étaient stoppés comme un seul être, surpris par l'Ombre qui avait sorti son arc.

Sans attendre, Yurlungur avança vers eux, le visage tiré par l'anxiété. Elle arriva à temps, sans doute déjà aperçue par les plus sensibles du petit groupe, pour entendre l'archère indiquer posément qu'aucun d'entre eux n'interféreraient avec le destin des Pâles ce soir, avant de demander d'un ton qui ressemblait à un ordre le lieu où il comptaient se rendre.

Yurlungur, à présent, reconnaissait les différents membres du groupe : Azraël, l'énigmatique, Nastya et Sibelle, et évidemment Talia et Kiyo. Elle était déjà essoufflée et peut-être voyaient-ils à présent le coquard sur son œil droit : elle les regardait avec un visage empli d'angoisses et d'incertitudes. Mais il était trop tard, ils l'avaient vue, et à présent, elle devait parler aussi.

« Kiyo... souffla-t-elle dans la nuit, attirant enfin sur elle le regard de ceux qui ne l'auraient décidément pas aperçue, accourant le long de la route qui menait à Treeof. C'est trop tard. »

Elle ne pouvait rien dire de plus, la voix étranglée par un sanglot qui se formait. Le sort du peuple Pâle était déjà déterminé : là-bas, l'armée d'Arothiir écraserait sans peine les défenses de Treeof si les héros ici ne s'y rendaient pas pour leur venir en aide, d'autant plus si l'on en croyait le contenu du message de Sirat. Mais ils devaient faire face à une Ombre, une Ombre qui avait plongé Börte dans un coma dont il ne se réveillerait peut-être jamais, une Ombre qu'aucun Carnivore n'avait réussi à toucher dans la Forêt là-bas, une Ombre qui avait tué Edmar sans le moindre mal.

Il n'y avait rien d'autre à faire, si ce n'était espérer qu'ils obtempèrent - un espoir fou. Elle se moquait de savoir si tous survivraient, mais c'était lui, l'Ynorien qu'elle avait trahi, qu'elle voulait voir vivre, dont elle ne pourrait peut-être pas se remettre de la mort, si elle venait. Mais il voudrait se battre, il voudrait se battre...

Et s'il attaquait, dans quel camp serait-elle ?


(((1000 mots)))

...

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Dernière édition par Yurlungur le Sam 7 Avr 2018 16:50, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Treeof
MessagePosté: Dim 1 Avr 2018 18:17 
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Le manoir étant hors de la ville, il était presque vide. En fait, il n'y avait que Talia, une autre femme pâle, Kiyoheiky et la guerrière Sibelle. La harpie ne se fit pas prier et en fait, ce fut tout le groupe qui sortit ce soir là. L'idée de troupes approchant était suffisamment inquiétante en soit pour se décider à faire quelque chose, même quelque chose d'inutile.

Aussi, ils étaient tous sorti lorsque les premiers mouvements apparurent. Les carnivores seraient déjà là ? C'était inquiétant. Azra aurait préférer les trouver dans leur camp plutôt que sur le pied de guerre. On peut arrêter une armée posée, pas une armée en marche...

Soudain, une femme sortit de la forêt. Voilée, équipée d'un arc et parfaitement humaine. Elle avait pourtant bien la peau des hommes-pâles... Elle devait venir d'ailleurs. Ce n'était pas une carnivore et ces vêtements semblables à ceux des hommes du désert d'Imiftil... Azra n'avait vu cela qu'une seule fois en Aliaénon, et c'était sur la personne de Karin ! Une femme d'Arothiir ? Absurde, que ferait-elle aussi loin de chez elle ? Une mercenaire venue avec ses chefs ? En même temps, il n'avait pas oublié les craintes de Daemon et de Sibelle sur un complot venant de là-bas. Oui, pas à dire, cette histoire sentait vraiment mauvais...

Cela faisait trop de questions et le nécromancien commençait à soupçonner qu'il n'allait pas aimer les réponse. Soupçons qui se confirmèrent quand la femme leur suggéra de se rendre sur le champ, tout en s'étonnant de ce qu'ils faisaient de sortie. Pour elle, ils n'avaient aucun rôle à jouer dans le destin des hommes-pâles. Elle n'était pas seule. Une jeune fille fluette était là aussi. Pas une femme-pâle. Elle tint des propos aussi brefs qu'énigmatiques à Kiyo. Qui était-elle ? Encore une question !

Azra haussa les épaules :

« Désolé si je n'ai pas l'air très effrayé, j'ai déjà reçu mon comptant de menaces de mort au court de mon existence... Si vous voulez savoir, nous allions avertir les carnivores des risques de dévastation auquel cette région serait exposé si une guerre éclatait. Ça a déjà commencé pas plus tard qu'il y a deux jours, et il vaudrait mieux que ça s'arrête là... »

Il continua à l'inspecter, curieux.

« Vous êtes originaire d'Arothiir, n'est-ce pas ? Je comptais faire un tour là-bas, sous peu... Mais que faites-vous si loin de chez vous ? »

Il garda un œil sur la fille à côté. Il ne savait pas qui elle était, ni si elle représentait une menace. Très jeune, peau claire, cheveux sombres... il l'avait déjà vu parmi les aventuriers, ce qui était surprenant malgré son jeune age, Azra était bien placé pour savoir que l'age n'avait que peu d'importance.

« Et toi ? Que fais-tu ici, aventurière de Yuimen ? »

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Merci et à Inès pour la signature
et à Isil pour l'avatar!
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Dernière édition par Azra le Mar 3 Avr 2018 08:01, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Treeof
MessagePosté: Lun 2 Avr 2018 04:44 
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Dans ce manoir suffisamment grand pour accueillir plus d'une cinquantaine de personnes, il ne restait plus que les hôtes, Elisa et Khar' Tar. Les serviteurs avaient rejoint la ville afin d'être en sécurité derrière les palissades de bois. Et la fille des Ombles, la puissante harpie Talia, celle-là même qui avait achevé de sang-froid la démone venue d'un autre temps était partie à la rencontre de la troupe d'inconnus qui s'approchait de la ville.
Mais elle n'était pas seule, Sibelle,inquiète du retard que prenaient les carnivores, avait manifesté son désir de l'accompagner. Ayant partagé quelques aventures et mésaventures avec la guerrière, Natsya n'avait pu refuser la demande de celle-ci de se joindre à elle. A ces trois êtres courageux, s'ajoutait Azra, l'homme décharné et le petit soldat d'Ynorie, nommé Kiyoheïki.

Dans la noirceur de la nuit, ils n'avaient pas franchi cinq cents mètres au-delà des limites de la riche demeure qu'une ombre se manifesta devant eux leur coupant la route. À la lueur de la lune, il distinguèrent la silhouette d'une femme en riche armure argentée d'un bleu sombre pourvue de quelques plumes à sa base. Sa tête était recouverte d'un voile noir agrémenté d'ornements dorés qui recouvrait presque la totalité du visage. Seuls une peau très pâle et des yeux perçants permettaient de deviner l'origine de la dame qui en imposait par sa stature droite et menaçante.

(Des plumes... une peau pâle...une disciple des harpies? )

Nourrissant une méfiance envers le trio des harpies, le premier réflexe de Sibelle fut de les croire initiatrices d'un odieux complot. Son regard attiré par les plumes terminant l'armure de leur vis à vis, elle eut l'automatisme de poser sa main sur son corsage, à l'endroit même où elle avait inséré la délicate plume d'harpies suite à sa toilette.

D'une voix mystérieuse et dévoilant une assurance non dissimulée, tout en nommant Azra, Kiyo et Talia, la femme au bas du visage dissimulé somma les aventuriers de demeurer immobiles et de ne tenter sous aucun prétexte de dégainer leurs armes.

Combattante avant tout, Sibelle attarda son regard aux armes de cette femme. Seule une guerrière aguerrie pouvait avoir assez d'assurance pour défier des combattants d'expériences. L'hinionne remarqua le carquois de flèches et l'arc courbé, arme de jet destinée à combattre à distance. Méfiante dans l'âme Sibelle se doutait bien que cette archère devait dissimuler sous ses habits un poignard ou une arme de cet acabit afin de permettre les combats au corps à corps.

Sortant Sibelle de ses réflexions, Azra fut le premier à répondre à l'inconnue. Haussant les épaules,d'un air nonchalant il expliqua ne pas être intimidé par les menaces de mort, en ayant eu plus que sa part. De sa propre volonté, il annonça son intention de prévenir les carnivores des risques de la dévastation de la région si la guerre persistait.

Pour sa part, affichant une attitude de confiance et une posture fière, Sibelle regarda l'intruse d'un air de défi:

«Qui êtes-vous et à la solde de qui obéissez-vous pour nous donner un tel ordre ? »

Un léger bruit derrière la femme voilée alerta la guerrière qui se tut un instant, cherchant à scruter l'horizon avant de reprendre:

« Notre destination ne vous concerne en aucun point. Et nous ne sommes pas sous votre gouverne, nous ne dépendons pas de vous. Et nous n'avons donc pas besoin de votre accord pour respecter nos engagements envers le peuple des hommes pâles»

Une fois de plus Sibelle tendit l'oreille, tentant de discerner le bruit insolite qui se fit de plus en plus perceptible, jusqu'à ce qu'elle en voit l'origine: Yurlungur.

La fillette arriva essoufflée, l'oeil au beurre noir et complètement bouleversée. Elle ne prononça que le nom de Kiyo avant de rester là immobile, les yeux remplis de larmes.
Ignorant les commentaires d'Azra, et surprise par cette apparition soudaine, Sibelle fit un pas en avant:

« Yulungur ! Que fais-tu ici avec cette femme ? Qu'est-ce qui est arrivé à l'armée des carnivores ? Où sont Edmar et Celemar ?

Intriguée, les inquiétudes de Sibelle se faisaient de plus en plus présentes. Et sa méfiance envers les harpies beaucoup plus tangible.

(((685 mots )))

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Sibelle, Maître d'armes


Dernière édition par Sibelle le Sam 7 Avr 2018 02:24, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Treeof
MessagePosté: Lun 2 Avr 2018 11:36 
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Pas de remparts dans la cité de Treoof. Nous sommes loin des murailles d’Esseroth ou de Fan-Ming. Pas de chemin de ronde ici. Seule une palissade de bois nous protège des agressions extérieures et pour observer la forêt je dois monter dans une tour de guet proche de la porte. A l’intérieur de la palissade, les végétariens s’amassent alors que les bois restent calmes. Je suis rejoint par l’homme chouette, en pleine forme. Il soupire et m’explique que les végétariens ne sont pas prêts à se battre. Ils ont le moral en berne et se sentent faible mais malgré ça ils donneront tout pour défendre la cité. Je fronce pendant un instant les sourcils tant ce qu’il me raconte s’oppose quand il conclut en disant que tout va finir en catastrophe et me demande comment faire pour éviter ça. Je lui réponds d’un ton dur.

"J'ai le sentiment que vous avez condamné cette cité en cachant autant de choses. Ce n'est qu'un pressentiment. Je peux me tromper. Mais j'ai la forte sensation que c'est déjà trop tard pour l'éviter."

Ils ont dissimulés quelque chose, empêchant d’entamer des négociations et trouver une solution pour vivre sereinement. Il n’y a plus rien à faire pour éviter une bataille, j’en étais convaincu.

Il me demande pourquoi je ramène tout à cet incident en m’expliquant que c’était un déclencheur et que les végétariens n’étaient pas tranquilles avant qu’il arrive. C’est très justement ça qui me dérange, que ce meurtre ai mis le feu au poudre et que si les carnivores n’étaient pas partis ils auraient très bien pu se finir bien plus mal pour eux. Je sens qu’il s’énerve mais ça me touche peu, moi aussi je suis en colère. Il poursuit en disant que les survivants présents vont se faire massacrer et que je n’ai pas besoin de ressasser le passé et que ce n’est pas ce qu’ils ont besoin d’entendre. Il ne comprend pas que si la vérité était révélée ça permettrait de partir sur des bases justes pour un jugement, pour des négociations, pour se mettre d’accord. Mais l’idée qui me trotte dans la tête m’enrage bien trop pour que je lui explique calmement. J’énonce alors simplement ce qui me vrille l’esprit depuis que j’ai quitté sa maison le soir d’avant, avant qu’il ne descende de la tour.

"Je pense que ce meurtre était un coup monté. Pendant mon voyage, sous l'influence du Thiir, un compagnon a tué un ami proche. Peut-être que c'est ce qui s'est passé avec ton ami et sa femme. Un meurtre qui devait servir à chasser les carnivores ou pire. Tes deux amis cherchent trop à cacher la vérité pour que ça ne soit pas coupable. Mais ils n'avaient sans doute pas pensé qu'un chef se lève parmi eux pour partir et ensuite revenir. Je te crois quand tu me dis ne pas être au courant de tout. Mais je ne te crois pas quand tu me dis ne rien savoir. Sinon tes deux amis n'auraient pas débarqué chez toi hier en étant si nerveux."

Il fait volte-face pour défendre ses amis et me demande ce que cette substance ferait ici ? Il me demande si je remets en cause la légitimité de la lettre que j’ai trouvée et s’il ne s’en serait pas rendu compte s’il avait ingéré du Thiir. Une réponse à chaque question me vient rapidement à l’esprit mais je ne les énonce pas à voix haute, tentant de créer encore des liens dans mon crâne qui commence à être douloureux. Le Thiir est un bien commerciale il peut donc très bien être vendu ici. N’importe qui aurait pu écrire cette lettre et si le pendu ne connaissait ni le goût ni la substance qui peut prendre diverses formes comme j’ai pu le voir lors de mon séjour à Arothiir alors il aurait très bien pu croire à une crise de folie venant de sa condition de carnivore. L’image de Thrag me revient en tête, c’est vrai qu’il ressemblait à une bête sauvage. Fatalement, je pense également à son marteau écrasant la poitrine de mon ami. Je garde le regard pointé vers la forêt, ne voulant pas lui montrer mes yeux humides. Je hausse les épaules avant de répondre à sa dernière interrogation.

"Pas forcement. J'ai vu qu'il pouvait être sous différentes formes."

Il secoue la tête et me demande si c’est bien le moment de songer à ça.

"Non. Comme je te l'ai dit. Je pense qu'il est trop tard."

Il me demande encore si selon moi il n’y a plus rien à faire, que nous allions tous mourir pour rien. Il se tourne et me dit à nouveau que ce n’est pas ce qu’il était venu chercher chez moi en montant cette tour. Je demeure silencieux, attristé par le souvenir douloureux du désert d’Arothiir et le sentiment que quel que soit le camp gagnant, il serait aussi perdant.

Je détourne mon regard de la forêt pour observer les végétariens qui s’amassent. Je suis étonné de ne pas voir plus de visages connus. Où sont Nastya, Sirat, Sibelle, Kiyo, Azra ? Peut-être amassés à une autre porte ou au château. Je suis du regard Loeding qui rejoint les siens. Je vois la même peur qu’a Esseroth, la même que j’ai ressenti sur les hautes murailles face à l’armée s’étendant à perte de vue. Je me souviens du courage, de la volonté de vaincre que nous avons transmis aux Esserothiens.

J’inspire profondément et descend la tour en expirant. Loeding avait raison, ils avaient besoin de quelqu’un pour leur donner l’envie de se battre. J’étais prêt à jouer ce rôle. Moi-même, étonnement, j’avais envie d’en découdre avec ceux qui voulait reprendre cette cité de force. Loeding m’a demandé si je pensais que nous allions tous mourir. Je n’en avais pas l’intention. Pas aujourd’hui. Je descends la dernière marche de bois, déposant mon pied sur le sol en m’exprimant à voix haute. D’une vois assurée. Le torse bombé en m’avançant vers la foule venus se regrouper devant les portes.

"Ecoutez-moi ! Ecoutez-moi. Je sais ce que vous ressentez. Je le sais car j'ai ressenti la même chose à Esseroth, à Fan-Ming, quand l'armée de Vallel s'étendaient à perte de vue. Des Orcs, des gobelins, des rats géants, des horreurs noires et autres monstruosités. Des créatures que vous avez peut-être vous aussi combattu. Vous avez peur et c'est normal. Peur de mourir. Peur de voir mourir vos proches. Peur de perdre ce que vous aimez. Souvenez-vous que même si nous n'arrivons pas à éviter une bataille, nous pouvons éviter une défaite. Souvenez-vous que votre désir de protéger votre foyer est aussi fort que leur désir de vous le reprendre. Vous avez une palissade de bois. Vous avez eu le temps de vous préparer. En quoi des cornes, des bois, des serres sont moins dangereux que des crocs et des griffes ?!"

Je continue d’avancer, me frayant un chemin à travers eux en poursuivant mon discours.

"Vous êtes là, survivants d'une bataille contre un monstre dépassant la cime des arbres. Alors je vous le demande, en quoi ces prédateurs vous inquiètent ?! Si la bataille est inévitable alors soyez prêts à tout donner pour la gagner ! Cessez de vous amasser devant cette porte ! Que des groupes partent surveiller les autres entrées de la cité. Que les plus rapides d'entre vous servent à transmettre les messages entre les différents groupes. Que ceux qui parmi vous ont la meilleur vision grimpe au sommet de ces tours pour surveiller tout mouvement dans la foret."

Je me retrouve devant Dromi, Gleipnir et Loeding pour leur confier à une voix plus basse sans pour autant vouloir être discret auprès de ceux qui pourraient entendre.

" Quand les carnivores seront là, j’irais dehors pour tenter d’ouvrir un dialogue et éviter des effusions de sang. Mais si ça échoue… alors il faut se tenir prêt. "

Plus fort je répète à l’attention de tous.

"Tenez-vous prêt ! Vous êtes les seuls à pouvoir défendre ce à quoi vous tenez !"

Je poursuis mon avancée vers les portes.

"Prevenez-nous au moindre mouvement suspect à l’extérieur ou à l'intérieur de la cité."

Enfin, je parviens au pied des portes de bois. et je conclue mon discours en hurlant pour atteindre les oreilles de ceux qui progressent dans les bois et en espérant être suivi par mes alliés.

"POUR TREEOF !"


Alors que les ennemis étaient toujours invisible. Je ressentais l'excitation d'une bataille proche. Mon cœur qui s'emballe, mes mains tremblantes, ma respiration frénétique. J'attendais les mains serrées sur mon arme qu'on m'annonce une présence pour sortir et tenter d'éviter le pire.

((environ 1400 mots))

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 Sujet du message: Re: Treeof
MessagePosté: Mer 4 Avr 2018 21:23 
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Localisation: Sur la planête Aliaénon
Une nuit particulièrement sombre tombait sur Treeof. A mesure que l’obscurité déclinait, l’enceinte fortifiée apparaissait. Une rumeur montait et l’agitation se répandait, portée par un vent calme, jusque sur les eaux noires du lac. Daemon y cabotait en solitaire, sur un frêle esquif, en direction du château. La place forte, qui était pourtant imposante, était presque invisible à cette heure ci ; une masse noire au centre de miroitements timides, que l’on devinait aux rares fenêtres où perçait une lumière…

Il s’y approcha paisiblement, scrutant les ombres à la recherche d’un rivage accessible. Il finit par s’échouer non loin de la porte, pour amarrer sa barque à un chêne tordu, tout en saluant silencieusement les hommes en poste. Il pénétra ainsi entre les murs, sans ôter son capuchon.

L’agitation de la ville semblait avoir gagné la cours du château, où il trouva une discussion très animée. Le trio de harpies, la reine Sheeala, ainsi que son bras droit s’étaient rassemblées en son centre. Il était apparemment question d’une sortie à l’orée de la ville, à laquelle Astidenix s’opposait bruyamment. Les trois sœurs prétendaient réserver une surprise à leur hôte, mais il fallait pour cela que la reine les suive à l’endroit en question. Une invitation étrange à une heure aussi tardive et dans de pareilles circonstances. Le guerrier avait raison de se méfier, mais il s’insurgeait avec violence à l’égard des invitées.

Une harpie nommée Jess s’évertuait à rester douce et avenante, prétextant une surprise agréable, alors qu’une autre, Guigne, provoquait directement le vieux guerrier, qui finit par les menacer sans ambages. Comme toujours dans ces circonstances, la reine qui était pourtant une formidable guerrière, peinait à prendre une décision. Son regard chahuta dans le vide, jusqu’à se poser sur le semi-elfe.

Un mouvement se fit sentir non loin et une ombre se détacha des remparts. Daemon n’avait pas fait attention à sa présence, c’était le fameux Sirat, l’homme lion de Yuimen. Il se présenta et exposa son point de vue sur la question. Selon lui, si les trois harpies voulaient intenter à la vie de la reine, maintes opportunités s’étaient présentées à elles ces derniers jours, et de plus, refuser une invitation de ses sauveurs c’était manquer à la bienséance. Il encouragea donc Sheeala à se comporter en réelle meneuse, car le destin de son peuple en dépendait. Après cela, il se proposa en tant qu’escorte, en voilant à peine une mise en garde à l’égard des harpies.

Astidenix paraissait désespéré. Daemon accrocha alors son regard. Il partageait son avis, en référence aux mises en garde de Sibelle, mais même si les intentions des harpies étaient douteuses, elles ne pouvaient décidément pas tendre un piège aussi grossier... Il préféra donc réfréner les ardeurs du serviteur.

« Vous ne pouvez imposer votre volonté à votre reine, ni nuire à ses bonnes relations… Cette décision ne vous appartient pas. »

Il se détourna alors, pour se plier d’une révérence courte à l’égard de la reine et ses convives.

« Si ces dames sortent à la faveur de la nuit, puis-je m’associer à votre équipée ? J’ai toujours affectionné les balades nocturnes. »


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Multi : Erastos, Meraxès
Thème : Catacombae - Mussorgsky


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