<<< Précédemment.77. À la maison."Bon ben il est pas là." annonça Nuyan les poings sur les hanches.
Très agacé, Sump ferma les yeux et maudit le monde entier.
"Mais il va bientôt revenir t'inquiète ! Ajouta le rouquin nonchalamment,
il part souvent cueillir des trucs hors de la ville mais il reste rarement absent plus d'une journée. Je pense qu'il sera revenu dès ce soir." Le soleil venait de se lever et Sump se trouvait devant une rangée de petites maisons toutes collées les unes aux autres en compagnie de Nuyan et Lena, l'archère aux cheveux noirs. Elle les avait rejoint ce matin après avoir été absente toute la veille pour une raison inconnue au Gobelin. Ce dernier avait passé la nuit sur le toit d'un des taudis en face du nouveau repaire de sa "bande", ne voulant surtout pas prendre le risque de se faire égorger dans son sommeil par cette dite bande. Le fait qu'il se tienne éloigné semblait avoir arrangé tout le monde. En effet excepté Nuyan et sa petite sœur, tous semblait voir d'un mauvais œil ce nouveau camarade vert, jusqu'à Lena qui, chemin faisant vers la bicoque du vieux druide, n'avait pas arrêté de se disputer plus ou moins discrètement avec le rouquin :
"C'est une très, très mauvaise idée de le garder avec nous, Nuyan. C'est un gobelin ! -Et alors ? Il n'est pas forcément mauvais. Il a sauvé nos fesses la nuit dernière je te signale. -Il est forcément mauvais justement ! Je le répète, c'est un gobelin ! Il va vous égorger pendant la nuit et... -Il nous a libéré du joug de Kotan pendant que tu étais tranquillement à l'abri chez ton père." Cette réplique assassine avait mit fin à toutes conversations entre les deux adolescents. Après quelques secondes où ils restèrent plantés devant la maison, Nuyan prit la parole :
"Bon on a d'autres chats à fouetter, dit-il les mains sur les hanches,
on reviendra en fin d'après-midi, d'accord ?" Lena choisit ce moment pour revenir à la charge :
"Il vaudrait mieux qu'il reste ici à l'attendre au cas où, non ? On ne sait jamais quand le vieux Schlaïd pourrait revenir." La jeune fille ne cachait aucunement son désir de voir le sekteg le plus loin possible.
"Tu vas pas recommencer..." S'agaca Nuyan.
Mais Sump tua dans l'œuf cette nouvelle dispute :
"Je reste là." Quelles que soit les choses qu'avaient à faire les deux adolescents, cela ne l'intéressait pas de toute façon. Et comme l'avait si bien dit l'archère, attendre ici ce fameux vieux "Schlaïd" lui permettrait d'atteindre son but sans perdre plus de temps. Car les pertes de temps Sump en avait assez. Rien ne pourrait le détourner de son objectif à partir de maintenant.
"Bon d'accord Sump... on se rejoint à la maison..." Lui dit Nuyan.
S'il savait rire, Sump l'aurait fait de bon cœur. "À la maison"... Comme si Sump se sentait chez lui avec ses gosses de rue.
Sump s'installa sur le rebord d'une des fenêtres de la maison du Schlaïd et se mit à tripoter sa main pourrie. Elle lui faisait de plus en plus mal et sentait de plus en plus mauvais. Il n'osait pourtant pas soulever les bandages, ces derniers étant humides d'une substance vert foncé causé par la putréfaction avancée de sa paluche. Heureusement grâce aux soins prodigués par Nimbé, un mire de Yarthiss, la maladie ne progressait plus vraiment et restait cantonnée à sa main ce qui était déjà une bonne chose. Il grimaça de douleur. C'est bientôt fini, se répétait-il mentalement. Encore un peu de patience et tout ça allait être terminé. Il retrouverait le confort d'une belle et confortable forêt pas trop dangereuse et prendrait sa retraite. Finies les mésaventures nauséabondes, finies les prises de risques en boucle, il retrouverait un mode de vie contrôlable pour changer...
Ce fut une journée ennuyante pour Sump qui ne fit pas grand-chose d'autre qu'attendre sans rien faire. À l'heure du déjeuner il avait tout de même réussi à rassembler son courage pour se rendre au marché non-loin de là s'acheter une brochette de viande. Il évita aussi quelques miliciens, plus que jamais envieux d'éviter d'attirer leur attention.
"Qu'est-ce que t'attends, sekteg ?" Lui demanda tout de même l'un d'entre eux, soupçonneux et une grosse saucisse dans la main.
Sump avait répondu en levant sa main morte :
"Soigner." Et le milicien, avec un mouvement de tête nonchalant, s'était éloigner à pas lents en donnant un grand coup de dent dans son repas. Ce fut une agréable surprise pour Sump. Le prenait-on vraiment comme un véritable voyageur ou même comme un véritable citadin dans cette ville ? Y'avait-il moyen qu'on l'accepte ? Même avec réticence ? Pour lui, il s'agissait déjà de beaucoup.
Mais le vieux Schlaïd ne se présenta pas et Sump rentra "à la maison", où se trouvaient déjà tous les enfants lorsque le soleil atteignait l'horizon. Les gosses avaient déjà trouvé leurs marques dans ce nouvel abri, l'ayant sans doute déjà habité auparavant. Lorsque Sump pénétra par l'entrée secrète qu'ils avaient dénichés tous ensemble, ils l'ignorèrent pour la plupart. Quant aux plus retors d'entre eux comme Gil et un petit dur à cuir dénommé Po, ils lui lancèrent un regard hostile. Seule la petite sœur de Nuyan s'était approchée de lui pour lui tendre un bout de pain qu'il avait refusé en grognant qu'il n'aimait pas ça avant de grimper sur le toit pour être seul. Car même s'il l'avait été toute la journée, il y'avait beaucoup plus de bruit au centre-ville que dans les coins reculés et délabrés comme celui-ci. Et ça faisait toute la différence.
Quelques minutes plus tard et de son toit, il vit Nuyan et Lena arriver par une ruelle. Ils semblaient euphoriques. Alors qu'en bas on les accueillait avec joie, Sump descendit pour écouter, curieux de savoir la raison de toute cette allégresse :
"Vous auriez dû voir leurs gueules, s'esclaffa Nuyan en ôtant ses mitaines mitées,
surtout celle du gros Tom quand il s'est pris la flèche de Jena ! C'était génial ! Non, tu es géniale Lena ! -Oui je crois que j'ai compris au bout de la dixième fois."dit-elle en riant et en replaçant une mèche d'onyx derrière son oreille.
Le gobelin se demandait pourquoi le visage de la jeune fille avait prit cette teinte rosée quand Gil s'avança :
"Alors ils sont bien revenus... Dit-il la mine grave.
"Exactement comme je l'avais prévu, se vanta Nuyan en souriant avec arrogance,
au coucher du soleil, quand ils savent qu'on se réunit tous, ils se sont pointés tous les trois à notre ancien repaire. C'était trop facile. -Il est mort ? Il est mort ? demanda le petit Po en trépignant d'excitation.
-Le gros Tom ? Tu rigoles, lui répondit Lena,
il a trop de graisse ! C'est un harpon qu'il nous faudrait !" Ils éclatèrent tous joyeusement de rire sauf Sump qui grogna et remonta sur son toit. Une minute plus tard, Nuyan le rejoignait, au grand dam de celui-ci.
"Ça va ? Lui demanda-t-il en s'asseyant à une distance raisonnable de lui sur le bord tu toit, puis voyant la mine basse de Sump il ajouta :
T'as pas pu voir le Shclaïd hein ? Eh, je t'assure qu'on te protégera jusqu'à ce que tu te fasses soigner. C'est promis...Fais moi confiance. " Sump grogna. Génial.
"Au fait j'ai pensé à un truc..." reprit celui-ci.
Quel bavard !
"On pourrait peut-être t'apprendre deux trois trucs pour voler des yus aux gens qu'est-ce que tu en penses ?" Vaguement intéressé, Sump tourna la tête vers lui mais Nuyan ressentit le besoin de s'excuser :
"C'est pas que je veuille apprendre quoi que ce soit en matière de larcin à un gobelin, hein ! Mais t'as pas l'air habitué aux grandes villes donc peut-être qu'on aurait des trucs à t'apprendre ?" ⌂⌂⌂
Nuyan était assis sur la rambarde, dos au vide et à la ville de Tulorim qui dormait :
"C'était il y'a quoi, cinq ou six lunes de ça ? Vous vous en rappelez sûrement pour ceux qui était déjà là mais c'était ce fameux jour où Kotan avait exigé qu'on vole un énorme paquet de yus pour l'anniversaire de sa copine. Bien sûr on avait pas réussi à réunir assez de pognon, alors Gil et moi on avait décidé cambrioler une des baraques des grands quartiers... -Qu'est-ce qu'on en a chié !" S'esclaffa Gil.
Ils étaient tous installés sous un énorme trou dans le toit. Au-dessus d'eux les surveillaient une énorme lune argentée encore bien ronde et une armée d'étoiles scintillantes. Les enfants étaient agglutinés sur des matelas dépenaillés ou sur des coussins déchirés mais tous écoutaient le récit rituel du soir. Même Sump, assis contre un mur un peu à l'écart, tendait l'oreille. Il adorait les histoires, surtout lorsqu'elles incluaient du gros argent.
"Donc, poursuivit Nuyan,
on se pointe à cette grande maison sur pilotis pas loin de la côte, le plus loin possible du quartier général de la milice, quoi, on est pas fous et... vous savez c'était la fois où la bande du Bouc avait réussi à faire tant de grabuge que tous les miliciens étaient occupés à le rechercher. Bref on s'est dit que normalement on allait être tranquille... -Normalement, répéta Gil.
-Il dit ça parce qu'en traversant le jardin il à marché dans une énorme merde de chien. Il a même glisser dedans tellement elle était énorme !" Déjà, des rires et des gloussements s'élevèrent de ci de là ainsi que des exclamations de dégoût. Même la plus séieuse du groupe, Lena, qui était cette fois-ci présente et se tenait près du rouquin, ne put s'empêcher de rire du nez en mettant une main sur son front comme si elle était désespérée :
"Ça commence bien !" Dit-elle.
Nuyan acquiesça en riant puis saisit son propre menton avec deux doigts :
"Là on savait qu'on allait être dans la merde, littéralement, parce que qui dit énorme caca de chien dit..."La voix de Gil termina sa phrase d'une voix morne :
"Énorme chien... -Mais, reprit Nuyan,
on entre quand même dans la baraque, pas le choix... et on commence à chercher. Je vous le dit pas mais, à l'intérieur, c'était autre chose que nos vieux skwats hein... Bref pas longtemps après je repère un petit coffret sur un meuble du salon. Je le secoue un peu et dingding ! Ça fait un bruit alléchant ! Alors je commence à jouer ma vie pour crocheter la serrure... et pendant que je suis en plein dedans voila que j'entends un cri ! Je lève les yeux... C'était Gil en train de se faire courser par un chien !" "C'était pas un clebs mais un cheval !" hoqueta Gil.
On s'esbaudit un peu partout et beaucoup pointèrent Gil du doigt. Nuyan aussi était mort de rire et basculait dangereusement d'avant en arrière sur sa rambarde de bois au-dessus du vide.
"Donc moi, poursuivit Nuyan en essayant de retrouver une voix claire,
j'étais toujours en train d'essayer de me concentrer sur cette foutue serrure mais c'était dur parce que ça devenait chaud toute cette histoire, les proprios pouvaient entendre à tout moment... je commençais à être nerveux... -Et Gil pouvait mourir... ajouta Lena, moqueuse.
-...et pendant ce temps Gil faisait des ronds dans le grand salon avec le chien aux fesses. Il essayait de le feinter en grimpant sur les canapés et les meubles tout en gueulant de me grouiller... -Il prenait son temps avec sa serrure le mec ! " intervint Gil.
"Arrête, je tremblais comme une feuille...À un moment j'ai flippé parce qu'il s'est fait choppé près de la baie vitrée..." Le public se tourna vers Gil, qui, pas peu fier d'être au centre de toute l'attention, se rengorgea :
"Vous inquiétez pas, il m'avait sauté dessus et je m'étais cogné la tête mais j'avais réussi à enrouler mon bras dans le rideau et ce con de chien s'obstinait à mordre le tissu...
-Bon moi je vois qu'il s'en sort plutôt bien, reprit Nuyan,
donc je met toute ma puissance sur cette serrure et comme rien ne me résiste, paf ! Je finis par ouvrir ce maudit coffret. Et il est remplis ! Je me dis bingo, je rafle tout les bijoux qui sont dedans et je file aider mon camarade...quand même..." Gil poussa un gémissement alors qu'il avait toutes les peines du monde à ne pas mourir de rire.
"Je me rapproche de la baie vitrée, poursuivit Nuyan,
et avec Gil qui est sous le chien, on se regarde et je me dis qu'il va falloir faire vite et bien parce que j'entends du bruit venant du fond de la maison. Ça se réveille dans le poulailler !" Nuyan rencontrait de grosses difficultés à garder son sérieux à présent:
"Et alors que moi je me demandais toujours comment on allait se débarasser de ce putain de chien de deux fois notre poids, vous savez ce que ce dégueulasse de Gil à fait ? Vous savez ce qu'il à fait s'apercevant qu'on devait se tailler de toute urgence ?" Il se tut et attendit pour conclure que les gamins piaillent d'impatience. À la tête qu'elle faisait, Lena s'attendait au pire. Même Sump avait les oreilles dressées, impatient lui aussi d'entendre la finalité de cette histoire.
Hilare, Nuyan montra sa paume et courba les doigts, comme s'il tâtait quelque chose d'invisible :
"Il lui à choppé les burnes et il les a pressées !" Un concert d'exclamations dégoûtées et hilares répondit à cette chute. Lena secoua la tête :
"C'est immonde !" Couina-t-elle.
Sump, qui n'arrivait pas à comprendre le comique de tout cela, grommela et s'appuya de nouveau contre le mur de la maison, les bras croisés. Lorsqu'au bout d'un moment les rires se calmèrent, la voix de Gil s'éleva :
"Le pire je crois c'est qu'elle l'a largué deux jours après qu'il lui ait offert son cadeau..." Et ils repartirent tous de plus belle. Quand le calme revint peu à peu et que des soupirs se faisaient entendre, la petite voix de la jeune sœur de Nuyan s'éleva :
"Et toi monsieur Sump ?" Le visage de son frère s'éclaira :
"Eh c'est vrai ça, Sump ! Tu dois en avoir des tonnes à raconter toi !" Constatant qu'une quinzaine de visage s'était tournés vers lui et le fixait avec curiosité et un poil d'hostilité pour certains, il haussa négligemment les épaules et grogna un "nan" bougon.
"Bah tu viens d'où ?" insista Nuyan.
Agacé, Sump hésita toutefois. Quel mal y'avait-il à révéler cette information à ces gamins des rues aussi hors la loi que lui ?
"Dehant." dit-il.
Il ne s'attendait pas à provoquer tant d'émoi avec ce seul mot :
"La vache c'est loin ! S'écria Gil.
-C'est au sud, hein ? -Oui, répondit Lena tout aussi étonnée que les autres,
c'est tout en bas.-Pourquoi t'es venu jusqu'ici ? Pour ta main ?" demanda Nuyan.
Après un court instant de silence, Sump décida de jouer le jeu pour une fois. Il était convaincu qu'il avait de quoi les impressionner avec sa manie bien à lui de toujours s'attirer des ennuis. Et les occasions qu'il avait de paraître grand aux yeux de quelqu'un étaient bien trop rares pour qu'il n'en profite pas lorsqu'elles se présentaient. Il se redressa et sortit Grifoniss la dague dorée de son fourreau :
"J'ai volé ça." Des "Oooh", des sifflements et des hochements de tête admiratifs se firent entendre parmi la petite assemblée. Sump avait pour la première fois révélé de quoi il s'agissait vraiment : d'un vol. Avec ce genre de public, il n'avait pas vraiment besoin de se cacher. De plus, il n'avait sûrement jamais dupé personne. Évidemment qu'il l'avait volé autrement comment un gobelin aurait-il pu se retrouver en possession d'une relique ?
"'Fallait fuir. Donna-t-il comme explication pour son départ de Dehant en haussant les épaules et en rangeant la dague.
-Ça veut dire que tu es recherché là ?" Demanda Po, les yeux brillants.
Sump hocha la tête et eut un maigre sourire :
" 'volée à un milicien, ajouta-t-il sans parvenir à masquer la note de fierté qui sonna dans sa voix enrouée,
et à un squelette." Lena fronça les sourcils :
"Un quoi ? Un squelette ? Répéta-t-elle, incrédule,
comment ça un squelette ?" Et de question en question Sump finit par leur raconter ce qu'il lui était arrivé ces derniers jours qui avaient changé tant de choses dans sa vie. Viston Marchecompte, les Banshees, Peau-Blanche, les trolls, la Sororité de Selhinae, l'armée de singes... Cela dura une bonne partie de la nuit et encore, il en avait oublié et n'avait pas tout dit. Tous sans exceptions burent ses paroles, fascinés, l'interrogeant sans cesse pour le relancer lorsqu'il s'arrêtait et attendant patiemment lorsqu'il cherchait ses mots. Malgré sa faible maîtrise du langage, son jeune public défavorisé ne parut pas s'en formaliser. Ils étaient enthousiastes devant ce drôle de gobelin à qui il était arrivé tant de choses. Même les plus âgés eurent leur dose de surprise. Bien que loin d'être bavard et malgré le fait qu'il eut plus parlé ce soir-là que dans toute sa vie entière, Sump n'avait presque pas arrêté de sourire. Les voir ainsi, tous passionnés par ce qu'il disait le rendait fier de lui, content... Rien que pour ça il ne regrettait pas d'en être arrivé là aujourd'hui, avec sa main pourrie, son bout d'oreille en moins, son œil poché par un lance-pierre... Conter le récit de ses aventures était quelque chose d'extraordinaire et qui lui faisait prendre conscience qu'il en était bien le héros, finalement. Et même si elles n'avaient pas été de tout repos lorsqu'il les avait vécues, il était maintenant heureux de les avoir traversées pour pouvoir les raconter. Le fait d'être au centre de cette attention admirative le dégrisait complètement. L'électrisait. Il se mit, le temps d'une soirée, à la place de Sammy, ce garçonnet surexcité qui l'avait fait rêver par ses histoires déjantées et incroyables. Ce soir et pour la première fois c'était lui le Sammy.
⌂⌂⌂
Alors que Sump venait de s'endormir à l'air libre sur un toit, il fut réveillé par une conversation. En grommelant il se redressa pour jeter un coup d'œil en bas. Juste en dessous, sur un autre toit, Nuyan, qui épluchait une mandarine, se trouvait en compagnie de Lena. Ils étaient assis côte à côte, les jambes dans le vide, un ou deux mètres les séparant.
"...et il veut qu'on aille vivre à Yarthiss, disait l'adolescente,
il dit que ce sera mieux pour moi..." Nuyan haussa les épaules :
"Il a sans doute raison. Tout est mieux qu'ici." Il y'eut un blanc qui fut brisé par Lena :
"Qu'est-ce que je devrais faire d'après toi ?" Le garçon aspira bruyamment le jus de son fruit puis cracha les pépins :
"Je sais pas, il t'as déjà laissé tomber une fois non ? Il peut très bien le refaire. -Il ne savait même pas que j'existais avant que ma mère lui envoie cette lettre avant de mourir ! répliqua-t-elle avec un gloussement exaspéré,
et depuis qu'il l'a lu, il vient avec moi s'entraîner à l'arc, me permet de vivre chez lui, me fais à manger...C'est un type bien Nuyan." Voyant que Nuyan tardait à réponde, elle continua :
"D'un côté c'est mon père tu vois ? Et...même s'il vient juste de revenir...je ne sais pas...c'est mon père ! Je l'aime et il s'occupera de moi...mais d'un autre côté, c'est vous ma vraie famille..." Elle tourna la tête vers son ami et le regarda intensément :
"Et je vous aime."
Nuyan détourna la tête et balança sa mandarine du toit. Il haussa ensuite à nouveau les épaules et dit d'une voix fermée :
"Fais comme tu veux. Si tu penses que tu seras plus heureuse avec lui à...Yarthi-truc, ben vas-y." Lena le regardait toujours mais lui s'efforçait d'éviter son regard. Elle finit par se détourner et hocha lentement la tête :
"D'accord..." Souffla-t-elle.
Levant les yeux au ciel, Sump grogna et s'éloigna pour finir sa nuit.
Suite.