J'avais l'impression de boire du miel liquide tellement ce breuvage était sucré. Il me donnait une impression de chaleur et de bonheur que je n'avais jamais ressenti. Après quelques secondes, on sentait le gout de l'alcool. Pulinn se délecta de son verre tout auton que moi puis elle s'adressa de nouveau à moi.

« Peut-être vaudrait-il mieux que vous partiez, maintenant. Il serait malvenu que vous vous trouviez au Temple lorsque votre billet d’Aynore vous parviendra. Puisse ce voyage vous apporter paix et bonheur, Aenaria. »

Elle me salua, cela signifiait que notre entretien était terminé. J'inclinais ma tête en signe de remerciement, posait mon verre sur un petit guéridon et prit congé de mon hôte. ce Temple recélait pleins de mystères qu'il me restait à découvrir. Pour le moment, il fallait que je sorte pour pouvoir me préparer à mon voyage.

Dire que j’avais couru jusqu’à l’entrée du temple aurait été un euphémisme, j’avais bondi bousculant tout sur mon passage. J’avais renversé une étale de marchand mais le pire c’est que j’avais renversé un enfant et je ne m’étais même pas arrêté. Sa mère m’avait hurlé dessus, en y repensant je ne pouvais pas l’en blâmer mais je ne voulais plus perdre une seconde, trop de temps, à mes yeux, s’était écoulé depuis la dernière fois où je l’avais vu. Je ne m’étais jamais sentie comme ça, aussi excitée, car s’était ce mot qui convenait et j’avais toujours pensé que ce sentiment serait absent de ma vie à jamais mais Amhalak me l’avait apporté.

Je me trouvais devant les portes du Temple, même si je savais que j’allais y pénétrer dans quelques secondes, je fis une pause dans ma course folle pour profiter pleinement de ce moment. Je l’avais tant attendu, tant espérer en pensant ne jamais y arriver, mais j’étais là maintenant devant ce magnifique bâtiment blanc et je remarquais que la tour était immense, comment avais je pu la louper. Peut être que l’empressement m’avait brouillé la vue, mais tout de même. Après deux secondes de poses où tout se bousculait dans ma tête je poussais la porte du bâtiment.

Une vague de désir me frappa dès mon entrée dans le temple. L’endroit exercait sur moi un pouvoir attractif surprenant. Pendant plus de deux minutes je ne sus même plus pourquoi j’étais là. J’avais seulement une grande envie de…NON ! Il fallait que je me concentre, j’étais pour retrouver Amhalak et parler à cette fameuse Pulinn pour avoir des informations concernant mon père. Je me ressaisis et jetais un regard autour de moi. L’endroit était tout simplement sublime. Des canapés confortables qui semblait me murmurer des choses.

…on est très agréables, viens te poser et tu ne voudras plus partir…

Je commençais à délirer. Des canapés moelleux et qui transpirait la sensualité venaient me parler. Je me mis à rigoler de ma propre stupidité et je décidais de ne plus me laisser perturber…mais c’était chose vaine. Une nouvelle bouffée de désir s’empara de moi. Si Amhalak avait été dans ce hall, je me serais jetée sur lui et Gaïa seule pouvait savoir ce qui se serait passé. Mais il n’était pas là et malgré son absence le désir ne diminué pas, bien au contraire.

De caractère je ressemblais beaucoup à mon père et je commençais à comprendre pourquoi il aimait venir ici. Même un sage n’y résisterait pas. Je me mis en quête de quelqu’un qui serait capable de m’indiquer où je pouvais trouver Pulinn. Un homme qui semblait attendre quelqu’un était assis sur un de ses canapés.

"Excusez moi…puis je me permettre de vous déranger pour un renseignement ?

Bien sûr ma belle, et pour autre chose si tu veux."

Tout en me souriant d’une manière qui ne laissait aucune place au doute au sujet de ses intentions il s’allongea sur le canapé en gardant appui sur les coudes. Mon corps ne m’obéissait plus, je me penchais au dessus de cet homme et je lui donné ma réponse qui sortie spontanément et me surprit au plus haut point de même que mon attitude.

"Peut être plus tard mais pour le moment je cherche une elfe du nom de Pulinn. Tu peux m’indiquer où je peux la trouver."

Ce n’est que trop tard que je me rendis compte du ton langoureux et sensuel que j’avais mit dans ma réponse. Il se redressa et je reculais vivement. Étonné et certainement pas dupe il me désigna une elfe qui se tenait plus loin sur notre droite.

"Euh…hmm hmm….je vous remercie"

Il me fit un signe de tête qui devait signifiait « à ton service ». Je me détournais et c’est là que je remarquais que je l’avais tutoyé. Cela commençait bien. Comment cet endroit pouvait-il être aussi attirant ? Il fallait absolument que je lutte et ce de tout mes forces.

"Je t’attendrais aussi Amhalak, tu es celui que je veux et que j’aime."

Sur cette pensée je me dirigeais vers l’elfe que l’on m’avait indiqué.

"Excusez moi, je suis confuse de vous dérangez, êtes vous bien Pulinn ?"

L’elfe qui se trouvait en face de moi était d’une beauté renversante. Comme moi elle était une elfe blanche mais elle avait quelque chose de particulier, que j’avais du mal à identifier et que je n’avais jamais vu chez les elfes de ma race. Il émanait d’elle une force magnétique, elle devait attirer tout le monde comme un aimant.

Je me sentais irrésistiblement attirée par elle. Une part de moi voulait caresser sa peau qui semblait encore plus douce que le velours qui recouvrait les canapés rouges, parcourir du bout du doigt ses tatouages dorés qui ressortaient magnifiquement sur sa peau plus blanche que le blanc lui même, effleurer ses lèvres qui ressortaient particulièrement et qui allaient à merveille ses yeux. Malgré une manière légèrement hautaine de se tenir, elle inspiré la confiance et même si il restait présent à mon esprit que je devait me méfier de tout le monde en générale, je n’arrivais pas à me dire qu’elle était capable de faire du mal à qui que se soit.

"Je suis Pulinn. Qui la demande ? Bienvenue au Temple des Plaisirs."

Lorsqu’elle tourna son regard vers moi et que nos yeux se rencontrèrent, tout son magnétisme me saisit et je fus prise d’un vertige violent, d'une envie violente de me rapprocher d’elle. Je tombais sur un des nombreux canapés somptueux, heureusement pour moi qu’il se trouvait juste derrière moi. Je levais de nouveau mon regard vers Pulinn en essayant de me reprendre et de me concentrer sur les raisons de ma venue mais la tenue, très peu couvrante de l’elfe, ne m’aida pas.

Je me cramponnais aussi fort que je pouvais pour résister à l’envie qui montait en moi. Je n’arrivais pas à comprendre ce qui m’arrivait. Depuis que j’étais entré en ces lieux, le désir me tenait dans ses griffes et je ne pouvais lui échapper et je n’étais pas sûre de le vouloir. Je rassemblais toutes mes forces pour lui répondre du ton le plus naturel.

"Le Temple des Plaisirs…c’est…c’est…oh ! Excusez moi je…j’ai un peu la tête qui tourne. Je m’appelle Salymïa, fille d’Higbaèm. Quand je suis rentrée chez moi à Lùinwë un ami de mon père, Helegièn, m’a appris que mon père avait été assassiné. Suite à ça il m’a conseillé de venir vous trouver, que vous, vous seriez mieux placé pour m’aider. S’il vous plaît, aidez-moi…je…je dois comprendre…s’il vous plaît."

Cette simple présentation m’avait épuisé mais elle m’avait permis de chasser légèrement le désir qui m’oppressait.

J’examinais le visage de Pulinn suite à ma présentation. Lorsque j’avais évoqué mon père ainsi que son ami, un changement s'était produit sur le visage de la gardienne, ce qui ne la rendait pas moins belle, bien au contraire. Je me sentais toujours attirée par la jeune femme, un sentiment de peur, de crainte apparut. Mais ce sentiment renforça mon désir car, c’était bien connu, le danger était toujours très excitant.

Subitement son visage se ferma et se fit plus dur et plus froid mais, ô Gaïa, qu’est ce qu’elle était belle, elle m’hypnotisait totalement. J’avais l’impression de glisser vers un autre monde, un endroit où les interdits et tout ce qui était tabou n’avaient pas leur place. C’était une sensation si délicieuse que je me laissais glisser avec volupté dans ce puits. Y résister était vain, en ne luttant plus contre ce désir mais en l’acceptant je sentis le poids sur ma poitrine disparaître brusquement. Je pris une grande inspiration et expirait de soulagement.

Toujours aussi froide, elle s’approcha de moi sans faire de bruit puis elle me demanda avec un mélange subtil de politesse et de suspicion :

"Qu’as-tu appris d’Helegièn, exactement ?"

En détachant le dernier mot de sa question elle me faisait bien comprendre qu’elle voulait tout savoir dans les moindre détails et je sus tout de suite qu’il était inutile de lui mentir, si je le faisais, elle le saurais. De plus elle ne semblait pas apprécier l’ami de mon père et je me demandais bien pourquoi. Je m’apprêtais à lui répondre lorsque je perçus une odeur délicieuse. Un parfum à la fois discret et puissant. Je cherchais du regard d’où cette odeur envoutante provenait et je me rendis vite compte qu’il ne fallait pas que je cherche bien loin.

Cette odeur émanait d’elle. Je respirais avec un plaisir que je ne cachais pas son parfum. Mais mon cerveau resta quand même en alerte et je comprenais que ce parfum était une arme pour Pulinn. À la fois attirant et donc déstabilisant, grâce à ça elle pouvait obtenir toutes les informations qu’elle voulait et ce de n’importe qui. Je faisais partie de ce "n’importe qui" et curieusement, j’en étais flattée. Je lui livrais tout ce que je savais et ce sans aucune retenue.

"Helegièn m’a dit qu’à la suite d’un séjour à Kendra Kâr, mon père était devenu…comment a-t-il dit…ah oui, qu’il était devenu mystérieux et taiseux sur ses activités. Helegièn savait seulement qu’il était en lien un certain Temple des Plaisirs. La veille de sa mort, mon père est allé le trouver, il semblait effrayé et lui as donné…"

Je lui désignais les boucles d’oreilles que je portais.

"…une paire de boucles d’oreilles identiques à celle là. Mon père lui a demandé de les remettre à ma mère, qui vit toujours à Lùinwë et qui a toujours sa paire à elle. Il m’a ensuite avoué qu’il avait tenté de comprendre ce qui s’était passé, il a mené son enquête qui l’a amené jusqu’ici, mais il a été horrifié par ce monde plein de secrets, de faux-semblants, de trahison, selon ces propres mots. Il a donc renoncé. Après ça il m’a révélé que mon père, que j’ai toujours cru mort au combat, avait été assassiné et qu’une elfe du nom de Pulinn, la Gardienne du Temple pourrait me dire pourquoi cet acte abject avait eu lieu."

Je jetais un nouveau regard à l’elfe.

"C’est tout ce qu’il m’a dit. Il y a un problème sur ce qu’il m’a dit ? Je...je veux savoir, j'ai besoin de savoir. J'espère que vous me comprenez."

J'étouffais un sanglot.

Après avoir dit tout ce que je savais, enfin tout ce qu’Helegièn m’avait appris je relevais les yeux vers Pulinn qui semblait plongée dans ses pensés. Son regard était toujours fixe mais je crus voir diverses choses passées dans son regard, décidément toujours aussi magnifique, mais ce qui me surpris le plus fut la compassion que je cru déceler dans ses yeux de marbre. Tout en me regardant, elle dit avec une politesse teintée de gravitée :

"Tu ne devras révéler à personne ce que je vais te dire maintenant, Salymïa. Ça pourrait mettre en danger beaucoup de monde. La nouvelle que tu m’apportes est grave. Très grave."

Elle se tut. Je voulais lui dire qu’elle n’avait rien à craindre de ma part, pour preuve je n’avais même pas dit à ma mère que son mari, qu’elle croyait mort en héros, avait été assassiné, mais un élément me troubla dans ce qu’elle venait de me répondre et cela m’empêcha de le lui dire. Apparemment je lui apportais une nouvelle. Mais qu’est ce que cela pouvait bien être ?

Je n’avais fait que répéter des choses qu’elle était censée déjà savoir puisque je me retrouvais ici pour avoir un complément de réponse. Il était impossible que je lui apporte un élément nouveau. J’essayais de m’en convaincre car sinon cela voulait dire que le mystère s’épaississait de plus en plus. Alors que mon cerveau essayait de démêler tout ça, je fus interrompue par Pulinn qui reprenait son discours.

"Il y a de ça bien longtemps, ton père a en effet été assassiné, dans des circonstances obscures. Nous n’en connaissons à l’heure actuelle toujours pas la raison, ni le responsable. C’était une époque sombre, pour le Temple. Il y a eu beaucoup de disparitions. Soudaines, inexpliquées. Ça a commencé avec Higbaèm, retrouvé mort alors qu’il venait rendre compte ici-même. Helegièn avait en effet proposé son aide pour découvrir le responsable de ce meurtre, de par son amitié pour Higbaèm. Helegièn était l’un de nos meilleurs éléments, à l’époque. Un Gardien, tout comme moi. Et il aurait sans doute résolu cette affaire, s’il n’avait pas été retrouvé mort, à son tour…"

Un silence pesant s’abattit, en moins de temps qu’il ne faut pour le dire, me laissant complètement sous le choc. Je regardais l’elfe qui n’avait pas perdu son regard concentré et froid. Ma tête commençait à me faire mal, cela avait déjà été un choc d’apprendre que mon père avait été assassiné, mais là j’étais…sans voix. Je ne comprenais pas tout ce que Pulinn avait dit. Tout se mélangeait dans ma tête et tout devenait confus. Une conclusion pourtant simple jaillit dans mon esprit mais je me refusais à y croire, non…c’était…impossible… La Gardienne se rendit compte de mon désarroi et elle me répéta ce qu’elle venait de me dire pour que j’en saisisse toute l’ampleur.

"Tout comme Higbaèm, Helegièn est mort depuis de nombreuses années…"

Tout comme moi elle se plongea dans des réflexions profondes qui découlaient de ce que l’on venait d’apprendre, et l’une et l’autre. Mon cerveau était bloqué sur ce nouveau coup du sort. Helegièn était mort peu de temps après mon père. Comment cela se pouvait-il puisque je lui avait parlé…et à ça je ne trouvais qu’une réponse, l’homme qui m’avait parlé à Lùinwé était un usurpateur. Une colère soudaine monta en moi lorsque je réalisais que je m’étais peut être retrouvé en face de l’homme responsable de l’assassinat de mon père. Mais si tel était le cas, pourquoi m’aurait-il conduit jusqu’ici ? Il devait bien se douter de ce qui se passerait et cela aurait été stupide de sa part. Après quelques minutes d’un silence qui sembla durer une éternité, je réussis enfin à parler.

"Donc…donc si je reprends tout. Helegièn est mort… peu de temps après mon père… et moi je viens et je vous annonce lui avoir parlé. J’imagine votre surprise et vous pouvez facilement imaginé la mienne en apprenant que j’ai tout apprit de la part d’un inconnu, qui, si cela se trouve est l’assassin de mon père. Ce qui ne colle pas c’est que si il avait été l’assassin, pourquoi m’aurait-il conduit jusqu’à vous ? Je…je ne comprends pas…excusez moi mais je suis totalement perdue…"

Une tristesse sans fin s’empara de moi. Il me fallait voir Amhalak, j’avais besoin d’une étreinte réconfortante. Je me mis à pleurer et j’en avais honte, de pleurer ainsi comme une enfant devant cette femme qui savait parfaitement gardé son calme.

"Et vous…vous…ne savez rien de plus je suppose ? Je suis désolée d’être dans cet état mais…je suis venue ici pour trouver des réponses et je ne trouve que des nouvelles questions…je…"

Je me ressaisis et lui dit :

"Puis-je être utile pour démêler ce mystère ? Il me concerne directement et je dois dire que l’inquiétude qui semble émaner de vous me touche et…je veux vous aider."

Je plantais mes yeux dans ceux de Pulinn en attendant sa réponse.

La Gardienne pris un temps conséquent pour me répondre. Ma détermination commençait à faillir, et si elle me disait non, si elle refusait mon aide. Je ne pouvais l’accepter mais je ne pouvais pas non plus la forcer à quoi que se soit. Tout en plongeant mon regard dans le sien je compris qu’elle était en train de m’examiner, d’essayer au mieux de savoir si elle pouvait avoir confiance en moi. Cela devait demander des années d’expérience pour savoir si l’on pouvait accorder sa confiance à quelqu’un que l’on connaissait seulement depuis quelques minutes. Toujours en réfléchissant, elle répondit :

"J’ignore pourquoi l’individu qui se faisait passer pour Helegièn vous a amenée ici. Sans doute pour vous éloigner de lui le temps qu’il fuie cette couverture. Un tel passé vous rattrape de toute façon un jour ou l’autre. Dans son cas, il a su être chanceux et discret. Un peu trop, d’ailleurs."

Je suivais le raisonnement de Pulinn qui était une explication logique. De nouveau la colère me saisit, si je m’étais réellement retrouvée devant l’assassin de mon père, le jour où nos chemins allaient se recroiser, il allait mourir.

"Je te le promet père, je ne lui ferais pas de cadeaux !"

Cette pensée venait du plus profond de mon cœur et je savais que je ne trouvais pas la paix tant que cet individu ne serait pas punit. Moi qui avais toujours été d’un naturel plutôt pacifiste, cette histoire faisait surgir en moi des envies de meurtre. Je réalisais que je n’étais plus celle que j’avais été, et c’était peut être mieux ainsi car apparemment, pour survivre dans ce monde il fallait savoir être cruel parfois. Et bien qu’il en soit ainsi, je le serais.

Je me souvins du trouble qui était apparut chez l’homme que j’avais pris pour Helegièn et je compris que ce trouble n’avait rien à voir avec le fait de raconter des faits difficiles qui remontaient à plusieurs années, mais il avait réalisé qu’il allait devoir faire vite pour me filer entre les doigts. Et dire que j’avais eu de la compassion pour cet être abject. J’eus un haut le cœur à cette pensée, cela me répugnait. Alors que j’étais perdue dans mes réflexions, Pulinn repris la parole mais cette fois ce n’était pas un partage sur ce qu’elle pensait de l’attitude de l’usurpateur, mais pour s’adresser directement à moi.

"Je sais des choses, mais dans cette affaire elles pourraient toutes être remises en doute. Je préfèrerais donc les garder pour moi, et puisque vous êtes déjà impliquée dans tout ceci, requérir votre aide pour démêler les nœuds du passé. Votre esprit pur de toute information fallacieuse, ou presque, vous protègera contre les rumeurs des temps anciens, qui sont sans doute fausses."

Ceci confirma mon avis sur l’elfe, elle était très intelligente. Ne pas me faire partager ce qu’elle savait, et qui était complètement remit en cause avec la nouvelle que je venais de lui apprendre, était très astucieux de sa part. Cela allait me permettre de garder l’esprit clair et je n’aurais pas des maux de têtes inutiles à essayer de démêler le vrai du faux. C’est donc avec soulagement que je prenais son acceptation pour l’aide que je lui proposais. Elle ne me mettais pas à l’écart de cette histoire, mais sans doute n’avait-elle pas le choix et son discours qui suivit me le confirma.

"Vous l’aurez compris, ce qui se passe ici dépasse largement les activités dévoilées du Temple des Plaisirs. Nous faisons partie d’un groupement nommé ‘Amants de la Rose Sombre’, et ce que vous savez à notre sujet dépasse de loin tous ce que les apprentis de cet ordre connaissent. En réalité, vous seriez à un grade équivalent à l’initié. Acceptez vous de rejoindre cet ordre, et d’en garder à jamais le secret enfoui en vous ? Personne ne doit nous connaître. De notre discrétion dépend beaucoup, notamment notre sécurité, à nous et à nos membres. Êtes-vous d’accord ?"

La question ne se posait même pas à mon esprit. Cela allait être dur de garder le secret par rapport à Hyrahùm…non pas que j’allais lui dire, mais il savait tellement lire en moi que je craignais quelques suspicions de sa part, cependant je savais aussi qu’il me respectait assez pour ne pas insister si il voyait que je ne voulais pas en parler. À part lui, il n’y avait personne à qui je pouvais avoir envie d’en parler.

"Je suis prête à rejoindre votre ordre sur le champs et je vous promet solennellement de garder le secret afin de préserver la sécurité de tous."

Pendant toute la discussion, une idée s’était formée dans ma tête. Comme ce que j’avais appris me venait d’un menteur et que ma mère m’avait confié qu’elle avait continué à le voir pendant que j’étais parti en apprentissage, il se pouvait que ma mère savait que c’était un imposteur. Elle avait connu le vrai Helegièn… Une idée terrifiante germait petit à petit dans mon esprit, mais étant donné que j’étais dans les révélations choquantes jusqu’au cou, autant m’y plonger totalement. Je décidais de le confier à la Gardienne.

"Je pense que je dois vous faire partager une idée qui m’est venue. Lorsque je suis rentrée à Lùinwë, je n’avais aucune connaissance de cet homme. C’est ma mère qui m’a conduit à lui…C’est dur pour moi de penser cela mais c’est trop suspect… Elle a connu Helegièn avant la mort de mon père mais le plus surprenant c’est qu’elle m’a dit l’avoir revu durant mes années d’apprentissage…"

Je laissais Pulinn réfléchir à ce que je venais de lui dire. Puis timidement je lui posais la question qui me tenait le plus à cœur.

"Euh…je voulais vous demandez…enfin…l’elfe qui m’a remis la paire de boucles d’oreilles que je porte, il les tenait de mon père et après avoir découvert ce que je devais chercher chez moi, il m’a demandé de venir ici et qu’il m’y attendrait…donc euh…savez-vous où se trouve Amhalak ?"

Je devais passée pour une folle avec toutes mes hésitations. Il faut dire qu’en matière de rencontre et tout ça, je n’étais pas très douée. Même si ça allait en s’améliorant, il me restait encore du chemin à parcourir, quoi qu’au vue de mon attitude avec l’homme de tout à l’heure, j’allais peut être progresser plus vite en faisant partie de cette ordre. Fébrilement, j’attendais la réponse de la jeune et belle elfe.

La Gardienne garda le silence pendant un moment considérable. Elle réfléchissait à toutes les possibilités qui pouvaient découler de ce que je venais de lui dire à propos de ma mère. Cette idée me terrifiait de plus en plus mais, plus cela cheminait dans ma tête plus je ne pouvais pas m’empêcher de repenser à l’attitude de ma mère et à ce que j’avais ressentit lorsque je l’avais revu. Ma mère avait changé et au fond de moi je savais que ce n’était pas en bien. Cela m’attristait au plus haut point, mais la colère, que j’avais éprouvée vis à vis d’elle sur la zone d’embarcation, n’avait pas cessée alors qu’en temps normal, elle se serait apaisée durant le voyage. Heureusement pour ma mère, Pulinn émit d’abord des possibilités plus indulgentes à son égard.

"Cela signifie sans doute que l’être que tu as croisé ressemblait fort à Helegièn. Ou que ta mère a été abusée par quelque artifice. Ou encore…"

À ce moment là je compris que l’elfe et moi étions sur la même longueur d’onde. Je la fixais droit dans les yeux simplement pour lui signifier qu’elle pouvait parlé sans crainte. Elle pouvait parfaitement me dire qu’elle soupçonnait ma mère d’être la complice de cet homme et peut être même sa complice du meurtre de mon père ainsi que celui de son ami. Le seul problème c’est que je n’arrivais pas à trouver des raisons. Pourquoi ma mère en aurait-elle voulu du mal à mon père. Qu’est ce qui s’était passé à cette époque. Je compris que ma mission allait consister à remonter la rivière de ma vie jusqu’à cette période fatale. La Gardienne formula alors, à haute voix, la même hypothèse que celle que j’avais en tête.

"Peut-être est-elle sa complice. Peut-être sait-elle plus de choses qu’elle ne te l’a dit. Quoi qu’il en soit, je refuse de croire qu’il s’agisse d’Helegièn. J’ai vu son cadavre de mes propes yeux."

Et voilà, c’était définitivement formulé. Ma mère était peut être responsable du meurtre de mon père. Au delà de la douleur qui me transperçait le cœur, une colère sans fin, sans limite m’envahit. Que ma mère soit responsable de toutes les blessures qui avaient résulté de cet événement, c’était comme un poignard qui s’enfonçait plus profondément dans ma poitrine et remuait les plaies béantes déjà présentes. Ma mère…elle m’aurait trahit…elle m’aurait regardé souffrir durant toutes ces années en se sachant responsable… Si telle était la vérité, elle méritait de mourir, car j’étais morte le jour où l’on m’avait annoncé la mort de mon père.

Après avoir parlé à Pulinn d’Amhalak, j’avais rougit comme jamais cela ne m’était arrivé. Je me sentais honteuse d’éprouver l’impression que je n’avais pas le droit d’éprouver du désir pour quelqu’un et ceci était complètement stupide. Après tout j’étais comme tout le monde, je n’avais pas à être une personne parfaite, pure de tout désir, je voulais vivre ma vie à fond et je ne voulais plus m’être mes envies de côté. Pulinn sembla se détendre, par rapport au sérieux qu’elle avait affiché précédemment.

"Ainsi tu connais Amhalak ? Je ne l’ai pas vu au Temple, aujourd’hui. Peut-être se repose-t-il dans la salle de musique. Il aime à y flâner, quelque fois. C’est là-bas, en haut des escaliers. Je vais te laisser maintenant, Salumïa. Reprends contact avec moi lorsque que tu en sauras plus sur cet Helegièn, ou sur ce meurtre du passé…"

Elle me désigna un magnifique escalier en colimasson taillé dans un marbre de blanc pur, tout simplement magnifique. Je souris lorsqu’elle prononça mon nom, l’erreur était commune lorsque l’on venait de rencontrer une personne, surtout que je ne m’étais présenté qu’une seule fois.

"Merci pour votre confiance et pour…"

Je montrais d’un signe de tête l’escalier. J’espérais vivement retrouver Amhalak là-haut.

"…Je reviendrais lorsque j’aurais une information importante à vous communiquer et je risque de ne pas répondre au nom de Salumïa, en revanche, Salymïa marchera mieux."

Je souris gentillement à Pulinn, je ne lui en voulais pas le moins du monde.

"Je pars dès que je serais allée voir si Amhalak est dans la salle de musique."

Je repris mon sérieux avant de lui dire :

"À très bientôt."

Je lui tournais alors le dos et me dirigeais vers l’escalier.

Tremblante d’excitation, je montais l’escalier que l’on m’avait indiqué. Mon cœur cognait si fort dans ma poitrine que je pouvais même le sentir dans ma gorge. Il me semblait que cela faisait une éternité que je ne l’avais pas vu alors que l’on s’était quitté il y avait quatre jours de cela. Mais l’obsession qu’il avait suscitée en moi m’avait écrasée durant toute la séparation. En continuant de monter les escalier je pensais que rien ne me garantissait qu’Amhalak se trouvait dans la salle de musique. Mon cœur refusait en bloc cette éventualité, je ne voulais pas l’envisager, pas après tout les secrets que j’avais appris, j’avais besoin de le voir et de savoir comment il avait eu ces boucles d’oreilles.

Une fois arrivée en haut, j’atterris dans une pièce immense et richement décorée. Partout des tapisseries ornaient les murs, des canapés, identiques à ceux que l’on pouvait voir en bas, encadraient une somptueuse piste de danse où je pouvais observer des couples évoluant gracieusement. Des chandeliers en or apportaient une lumière tamisée et cela ne faisait qu’augmenter la majesté du lieu. Sur la droite de cette pièce, plus longue que large, un homme était assis à un piano et jouait une mélodie envoutante, ses doigts caressaient à peine les touches et pourtant la musique résonnait dans toute la salle.

La beauté de la scène était à couper le souffle tellement l’amour ou simplement le désir, transpirait de ces corps collés les uns aux autres. Je m’arrêtais nette, frappée par un élan d’amour, de passion, de désir, le tout mélangé. C’était complètement déstabilisant et tellement grisant que je me sentais attiré vers tous ces gens ici présent, au point d’en oublier ce que je venais faire dans cette pièce. J’avais envie de danser avec lui et mes yeux se mirent automatiquement à le chercher. Mais ma recherche était infructueuse. La tristesse m’envahit ainsi qu’un sentiment de panique. Il devait être là, il m’avait dit qu’il m’attendrait.

Paniquée, je me mis à parcourir la salle dans l’espoir de l’apercevoir, soit en train de danser, soit assis paisiblement sur un canapé, un verre à la main. Mais tous les gens présents étaient sur la piste tendrement proches. Je m’assis et caressais du dos de ma main le velours et me concentrais sur ce geste pour ne pas verser les larmes qui me piquaient les yeux et qui menaçaient à tout moment de rouler sur mes joues.

J’étais tellement absorbée par mon chagrin que je ne sentis pas qu’une personne s’approchait de moi, dans mon dos. J’eus seulement le temps de voir un ruban satiné se plaquer contre mes yeux me plongeant ainsi dans un noir absolu. Une main me caressa le bras sur toute la longueur et me saisit la mienne en m’entraînant sur la piste.

"Euh…excusez moi, mais…j’attends, enfin…je cherche quelqu’un et euh…"

Avant de pouvoir allée plus loin, la personne qui m’entraînait sur la piste me ferma la bouche avec un baiser. Je sentis tout mon corps frémir sous cette douce caresse, je faillit même tombé, mais l’homme, car j’avais à présent la certitude que c’était un homme, me rattrapa et m’enlaça afin d’éviter toutes chutes.

Il s’arrêta juste le temps de placer mes bras autour de son cou. Je sentis de longs cheveux filer entre mes doigts. Je me mis à palper le visage de celui qui me fessait bouger au rythme langoureux de la musique. Je sentais sous mes doigts des oreilles fines et pointes, un elfe donc, un nez aquilin, et un bandeau métallique sertit d’une pierre en son milieu, ornait son front. Sa peau était douce, comme le velours des sièges et il dégageait une agréable odeur de fleur.

Mon cœur allait sortir de sa poitrine et mon corps se consumait de désir, à l’intérieur. Je ne voulais qu’une chose, l’embrasser encore, même si je ne savais pas qui s’était. Mon cerveau ne répondant plus que pulsions de mon corps, je l’embrassais à mon tour mais en y allant plus franchement, je ne masquait pas mon désir.

"Je ne savais pas que tu étais du genre à embrasser comme ça des inconnus."

Cette voix envoutante glissa sur moi comme une caresse. Je me jetais au cou d’Amhalak sans retenue, je n’en pouvais plus, l’attente avait été insupportable.

"Si tu savais combien tu m’as manqué.

Au vue de ton attitude, je crois que j’ai une idée.

Je peux ôter le bandeau ?

Non…"

Puis il me murmura avec sensualité.

"…ça permet d’entretenir le mystère et de laisser ton imagination vagabonder.

Mais je veux te voir, je…

Chut. Détend toi et profites juste de l’instant présent."

Je décidais de suivre ce qu’il me disait. Petit à petit je sentais toutes les tentions, qui avaient habité mon corps durant ces derniers jours, s’apaisaient pour finalement disparaître. Dans un geste tendre, je fis glisser mes mains le long de ses bras afin de mieux me caler contre lui. Je me sentais bien dans ses bras, j’étais protégée et aimée. Alors que j’étais tranquille dans ses bras, il fit glisser ses lèvres le long de mon coup afin de l’embrasser discrètement mais avec fougue. Je me sentis glisser de plus en plus vers une perte de contrôle total de mon corps.

"Ah…euh…oh…arrêtes…je vais…oh…

Non, ce lieu n’est pas fait pour ça.

Ah…oui…alors…oh…je t’en prie…arrêtes…

Tu es sûre d’en avoir envie ?

Oh…non…mais ce lieu n’est pas fait pour ça…

En effet, mieux vaut bien se tenir. »

Brusquement il s’arrêta et repris une bonne conduite. J’essayais au mieux de cacher ma frustration. Après un temps incertain, il m’entraîna vers l’un des canapés où il m’ôta le bandeau et il se plaça à ma gauche.

Je pus enfin le voir. Je pris son visage délicatement entre mes mains pour imprimer le moindre détail de ce visage pareil à celui d’un ange. Des traits fins et un visage qui respirait la bonté même. Du bout des doigts j’effleurais ses lèvres et lui déposais un baiser.

"Je…je dois te dire quelque chose.

D’accord. Je t’écoute."

Je lui souris.

"Je t’aime.

Tu ne sais pas combien j’ai prié Gaïa que tu m’aimes. Dès que je t’ai vu, je l’ai sentit.

Sentit quoi ?

Que tu étais l’elfe de ma vie."

Il m’embrassa de nouveau. Et ce fut un baiser si intense que je ne voulais plus reprendre ma respiration. Je voulais me noyer en lui, disparaître pour n’être qu’avec lui et loin de mon monde qui s’écroulait.

"J’ai quelque chose pour toi.

Encore ? Décidément tu me couvres d’or.

Ce n’est pas de l’or.

Ça m’est égal, tout ce qui vient de toi est un trésor pour moi. Avant de me donner ce que tu as à m’offrir, comment as-tu eu ses boucles d’oreilles ?

Euh…il fallait bien que je te l’explique à un moment. C’est ma mère qui les avait reçues de ton père et c’est elle qui devait te les remettre. Mais elle morte il y a peu et c’est à moi qu’elle à confié cette mission. Je t’ai cherché, observé et puis finalement trouvé. Je suis désolée."

Tout en me disant ces mots, il me caressa les cheveux. Il sentait que je pouvais lui en vouloir, mais je ne pouvais pas. Certes j'étais surprise d'apprendre que c'est sa mère qui avait les boucles d'oreilles, mais toutes les pensées concernant ma quête n'étaient plus dans mon esprit. Je lui redonnais un baiser.

"Je suis heureuse qu’elle t’ai choisit.

Oh ! Merci. J’ai eu tellement peur que tu m’en veuilles.

Rassures toi, je t’aime et ce n’est pas près de changer. Alors qu’est ce que j’ai gagné cette fois ?"

Il me sourit avant de sortir de sa poche un parchemin ainsi qu’une fiole semblable à celle que ma mère m’avait donnée à Lùinwë. Je dépliais le parchemin et compris qu’il s’agissait d’un guide pour apprendre un sort.

"C’est un parchemin…

…D’apprentissage de sort et un fluide de lumière.

C’est ça. Je ne pensais pas que tu étais aussi callée. Tu devrais l’absorber tout de suite, avec la quête qui t’attend, tu vas en avoir besoin.

Tu m’accompagnes ?

Je ne peux pas, je dois accomplir quelque chose pour…

Oui j’ai compris. Ne te mets pas en danger.

Je regrette, mais dès que je pourrais je te retrouverais. Je te le promets.

Ne t’avise pas de la rompre."

Je l’embrassais de nouveau puis j’absorbais le fluide qu’il m’avait donné. Comme à Lùinwë, un vague de magie déferla sur moi mais plus puissante que la précédente puis je rangeais le parchemin dans mon sac.

"On doit y aller. Enfin, surtout moi, cela fait quatre jours que je repousse mon départ. Je ne voulais pas m’en aller avant de t’avoir vu.

Merci de m’avoir attendu.

Avant que l’on ne parte et que nos chemins se séparent de nouveau, temporairement, j’ai une question.

Oui ?

Quand tout cela sera finit et que je te ferais officiellement ma demande, accepteras tu de te marier avec moi ?"

Je ne cessais de sourire. En entendant sa question mon cœur fit un bon, je comptais le lui demander mais, comme si il lisait en moi ce désir de le posséder, il s’était jeter à l’eau avant. Je me penchais vers lui et déposais un baiser dans son cou, sur son front et je finis sur ses lèvres, avant de lui murmurer.

"Oui..

Oh…c’est moi qui vais perdre pied maintenant.

Et oui, il ne faut pas faire trop le malin."

Je me levais dans un bond.

"Viens, on y va.

Tu es si pressée que l’on se sépare de nouveau ?

Non…oh non. Mais je veux plus que tout être ta femme et, je ne pourrais l’être qu’une fois que tout ceci sera terminé."

Il se leva à son tour, s’approcha de moi et colla son front au mien.

"D’accord."

Il me pris la main et me guida au milieu des danseurs qui restaient et l’on descendit ensemble l’escalier. Lorsque l’on arriva devant la porte, je m’arrêtais. Je ne savais plus si je voulais vraiment partir ou pas.