Je m’apprêtais à sortir et donc dire une fois de plus au revoir à l’elfe de ma vie. C’est un visage triste que je tournais vers lui et je pouvais voir que dans ses yeux, il semblait y avoir de l’eau. J’essuyais une larme qui commençait à couler sur son beau visage.

"Oh non, ne pleure mon amour, je ne veux pas que ma dernière image de toi soit celle là. Tu es tellement beau."

On était sur le point de se donner un dernier baiser avant le moment tant redouté lorsque une elfe d’une beauté troublante, arriva rapidement vers nous. Nous ne l’avions même pas vue avant qu’elle m’accoste. Il me fallut quand même quelques secondes pour remarquer que c'était Pulinn qui s'avançait.

"Attendez, Salymïa. J’ai du nouveau pour votre affaire."

Déjà ? Cela ne faisait même pas un jour que j’avais quitté Lùinwë et, seulement quelques heures que je leur avais appris qu’un homme avait usurpé l’identité d’Helegièn, comment diable pouvait-il avoir des informations nouvelles ? Décidemment je sous-estimais le pouvoir de cette guilde. L’elfe examina Amhalak, elle devait essayait de savoir si il faisait partie de la guilde ou si il était un simple visiteur. Après quelques secondes, elle sourit et soulagée de constater que mon homme faisait lui aussi partit du groupe, elle continua à me livrer les informations qu’elle avait à me transmettre.

"Il est vain de partir à l’aveuglette vers une destination inconnue. Un contact à Lùinwë m’a prévenue d’un mouvement de celui qui se fait appeler Helegièn après que je lui ai demandé de le surveiller. Il semblerait qu’il ait quitté sa demeure avec une petite elfette pour prendre un Aynore en partance vers Tulorim."

Tout tournait à cent à l’heure dans ma tête. Ma mère était elle partit avec eux.. Tout ce qu’elle me disait en si peu de temps… C’était invraisemblable, du moins dans ma conception. Mon interlocutrice remarqua l’étonnement, qui devait se lire comme un livre sur mon visage. Elle pouvait certainement voir les questions que je me posais, défilées sur mon front. J’allais lui demander comment elle pouvait déjà avoir ces informations mais, tout en affichant un sourire énigmatique, elle repris la parole avant moi.

"Nous…sommes dotés de moyens de communication assez rapides…"

Je ne comprenais pas très bien tout ce que cela impliquait mais, cela pourrait être utile si je me trouvais loin du Temple et, que j’avais des informations très importantes à transmettre à la Gardienne de ces lieux. J’eus à peine le temps de penser qu’elle reprit la parole.

"Vous devez le retrouvez là-bas. Quelqu’un de fidèle au Temple peut vous y aider. Il se nomme Zarnam, et vit dans un endroit nommé « Maison d’Abandon ». Rendez-vous sur les quais de Kendra Kâr. Un navire, l’Allégresse, vous mènera à bon port. Logan, son capitaine, est lui aussi fidèle à notre cause…"

Sur ces paroles, Pulinn s’éloigna avant même que j'ai pu la remercier. Soit c'était par empressement, soit elle voulait nous laisser de l'intimité à moi et à Amhalak. Mais lorsqu’elle avait prononcé le nom de Zarnam, un frisson de peur mêlé à de l’excitation parcourut mon corps. Ce nom était à la fois terrifiant et terriblement attirant. Je me tournais vers Amhalak.

"Tu le connais ? Ce fameux Zarnam.

Non, je n’en ai jamais entendu parler… Je vais t’accompagner au port et je partirais ensuite de mon côté.

D’accord. Merci mon cœur."

Après ça, nous sortîmes du Temple. Et j’éprouvais curieusement un certain pincement au cœur.

>> L'Horloge d'Ynorie

"C'est là ?"
"Non..."

Pour la sixième fois en deux minutes, Eucalyptus, impatient de danser, désignait une bâtisse, tout en gigotant sur les épaules de son meilleur ami. Le jeune taurion blond s'arrêta enfin devant ce qui semblait être une énorme et somptueuse bâtisse, à en croire les esquisses que la nuit kendrane permettait de voir. Deux gardes en livrée rouge et munis d'imposantes hallebardes luisantes aux lumières alentours sourirent à l'arrivée des deux amis. Curieusement, bien qu'ils étaient postés de chaque côté de l'immense porte d'entrée, ils ne semblaient pas décourager Fareloke et Eucalyptus d'entrer.

"Wahouuuuu ! La classe ! On est loin d'avoir un accueil pareil à l'Horloge ! Bonsoir, bonsoir, Messieurs ! Nous aurions souhaité user nos humbles souliers sur votre piste de danse !"

Et pour prouver ses dires, il effectua deux petits pas de bourré puis dandina son petit derrière tout en sifflotant. Fareloke, lui, recoiffa rapidement ses cheveux mi-longs en arrière et s'avança à son tour. Ses beaux yeux bleus rencontrèrent ceux d'un des gardes et d'une voix suave et légèrement tremblante, il se présenta et demanda aussi l'autorisation de rentrer. Eucalyptus s'arrêta en plein mouvement de jambes et haussa un sourcil réflexif à l'encontre de son ami.

"Ah d'accord... Messieurs, prenez garde, tremblez, car vous succomberez tous devant les charmes du somptueux Fareloke Desconti ! Hihihihi..."
"Euca..."
"Arrête un peu Faropruneau, même ma grand-mère à Bouhen, elle t'a vu arriver avec tes gros sabots. Et pourtant, elle est myope comme une taupe !", confia-t-il ensuite à l'autre garde.
"Pfff, tu racontes n'importe quoi, j'essaie d'être gentil, c'est tout...", rajouta Fareloke en adressant un grand sourire au garde auquel il s'était présenté.
"Oh oh ! Il vous fait un sourire maintenant, vous êtes piégé mon bon monsieur !"
"Excusez-le, je crois qu'il a perdu la raison avec une sirène."
"On a dit qu'on parlait plus de cette mégère à arêtes. Et puis tu vois bien que cela n'intéresse pas ce cher... Humm, comment votre môman vous appelle ?"

Tout sourire, Eucalyptus fixait le garde droit dans les yeux, les siens étant gorgés de malice. Le petit numéro du lutin avait pour effet, d'une d'attirer l'attention, de deux, de faire passer Fareloke pour un gentil elfe tout mignon, et de trois, de connaître le prénom de ce jeune homme.

( Le plus rigolo, c'est que ca marchera jamais votre petit numéro. Foi de faera !)
( Ah ? Il aime pas les garçons, ce garde ? )
( Difficile à dire, mais je ne pense pas... Je ne suis pas sure, cet endroit est tellement chargé d'histoires que tout est brouillé dans ma tête ! )
( Toi qui sait tout, tu assures pas une cacahuète, là ! )

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Eucalyptus et Fareloke regardèrent le garde, puis eux-mêmes et enfin encore le garde. Ils haussèrent des épaules en même temps puis remercièrent poliment les deux gardes en leur souhaitant une bonne soirée. Alors qu'ils entrèrent dans les lieux, ils oublièrent totalement ce qu'il venait de se passer...

"Wa-ah-ouh !"

Eucalyptus n'en revenait pas. L'endroit était si grand qu'il se sentait encore plus petit que d'habitude. L'ambiance tamisée du hall du temple avait un il-ne-savait-quoi de confortable et de voluptueux. Les deux amis restèrent plantés devant l'entrée un bon moment, eucalyptus la tête penchée vers le haut. Il appréciait les courbes fines des chandeliers scintillants tandis que Fareloke, lui, appréciait celles d'un jeune homme qui le regardait aussi, éprouvant sans doutes les mêmes pensées concupiscentes.

"Je... Hummm... Je vais faire un tour par là, on se rejoint dans la salle de bal ?"
"Ah d'accord... Je vois... Mouais... T'as d'la chance ! Je te pardonne car tu es mon meilleur ami... Amuse-toi bien !"

Eucalyptus, hilare, descendit du corps de Fareloke et le regarda partir vers le jeune homme souriant. Maintenant au sol, sur les pierres blanches, il trouvait l'endroit encore plus grand qu'avant. Il ne put s'empêcher de faire le lien entre l'Horloge d'Ynorie et le Temple des Plaisirs et il constata une chose : cet endroit était bien plus riche et bien plus décoré avec goût ! Qu'avaient-ils eux au juste ? Une jolie bâtisse, certes, une somptueuse horloge que l'on pouvait voir de presque tout le parc mais l'intérieur payait moins de mine. La Société du Midi-Minuit avait, pour l'instant, plus une décoration typique "docks" avec plein de caisses en bois entreposées les unes sur les autres et même lorsqu'ils auraient tout rangé et tout entreposé, leur siège serait nettement moins fabuleux que l'entrée du temple.

(Il faut que je sache qui est leur décorateur !)
(Je rêve où il n'y a que moi qui ait trouvée bizarre la réaction du garde ?)
(Tu vois le mal partout, Bidouille ! Il a peut-être des ordres et ne doit pas se mêler aux gens qui fréquentent cet endroit !)
(Quel innocent tu fais... Pourquoi crois-tu que mes visions soient brouillées ?)
(Bah je sais pas, t'as du mal à digérer une mouche, ca te pèse sur l'estomac et du coup, t'es moins concentrée que d'habitude...)
(Hihihihi...)

En pleine discussion mentale avec sa faera, Eucalyptus arriva enfin devant le grand escalier et déploya ses ailes faériques car il se refusait catégoriquement à monter toutes ses marches de marbre blanc. Arrivé au premier étage, il passa la porte de la salle de bal et put enfin contempler l'endroit, qui était tout aussi merveilleux que l'entrée...

(Cet endroit est des plus mystérieux...)
(C'est vrai que côté mystères, tu t'y connais !)
(Je t'ai déjà dit cent fois qu'il y avait des choses auxquelles je ne peux te donner de réponse...)
(Pffff... Que tu ne veuilles me dire les secrets du fonctionnement des cynores passe encore, mais franchement, tu pourrais au moins me dire le nom du prétendant de Plume ! C'est pas comme si cette révélation pouvait chambouler le "Grand Ordre")
(Que tu crois...)
(Tu me fais marcher ! Tu le fais exprès parce que tu sais que si je sais son nom, je vais l'embêter jusqu'à ce qu'il craque et quitte la ville pour toujours !)
(Exactement ! Oh regarde ! )

Eucalyptus regarda alors vers l'estrade et tout penaud, marcha lentement pour s'assoir sur un coussin et profiter pleinement du spectacle. Les yeux, la bouche et les oreilles grands ouverts, il prenait ce son magnifique en pleine face. Pas moins d'une dizaine de jeunes filles en kimono chantaient en choeur, aidées de temps à autre par six joueurs de daiko et de triangle. Les voix des jeunes filles faisaient trembler littéralement le sol mais aussi le coeur du lutin, qui, pour une fois, était aussi sage qu'une image. Bidouille, sous sa forme de salamandre, ne râta pas, elle aussi, le spectacle et sauta sur la tête du lutin pour profiter de la performance des jeunes filles. Au fur et à mesure de ce chant, Eucalyptus avait l'impression d'être fouetté par leurs voix et avait l'impression de s'enfouir de plus en plus sur son coussin. Lorsqu'elles émirent leur dernière note, le jeune lutin en avait les larmes aux yeux...

"Exquise chorale, n'est-elle pas, jeune Eucalyptus Verdoyant de la forêt de Bouh-Chêne ?"

Le jeune lutin tourna la tête et émit un large sourire, les yeux toujours embués, quand il reconnut son interlocutrice...

"Oh mais je vous reconnais ! Vous êtes la dame qui accompagnait M'ssieur Ume pendant ma cérémonie de passage !"
"Je suis Sakura, sa soeur !"
"Ohhh ! Alors je connais enfin toute la famille Hidarikiki ! Je travaille avec Midori, votre soeur !"
"Le monde est petit, n'est-ce pas ! Vous êtes venus pour voir les poupées d'Oranan ?"
"Naaaaan ! Huhuhu ! Houhouhouhou... Ce sont les poupées d'Oranan ? Hihihihihi... Le monde est vraiment très petit ! Houhouhou... Je connais très bien leur luthière !"

Les présentations faites, Sakura et Eucalyptus discutèrent une bonne heure et n'eurent pas le loisir d'écouter le groupe suivant, tellement leur conversation était entraînante. Le sujet porta rapidement sur une jeune elfe blanche aux cheveux bleus et chacun y alla de son commentaire et de son engouement pour aider Lilotëa dans sa quête. Il apprit qu'elle fut tirée au sort pour participer à une croisière à bord d'un aynore splendide et fut content de l'apprendre. Il commenta ensuite qu'elle en avait grandement besoin et que le grand air ne pourrait que lui faire du bien, sur quoi Bidouille rajouta intérieurement qu'elle n'était pas si sure que Lilotëa était en ce moment même en train de s'amuser. La vieille voyageuse qu'était Sakura finit par se lever et s'excuser de son retrait en ces lieux, mais elle ne se faisait plus toute jeune et avait grand besoin de retrouver son lit. Eucalyptus la salua et la regarda partir de la salle de danse...

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(Les Hidarikiki sont vraiment des gens biens !)
(Et ils n'ont pas fini de faire parler d'eux !)
(Dire qu'ils n'ont pas de descendance, c'est triste...)
(En fait, si ! Quelque part vit le petit fils d'Ume mais il ne le sait pas... D'ailleurs personne ne le sait encore ! Et je te défends d'en parler !)
(Oui oui, le "Grand Ordre", tout çà... AAAhhhhhh !)

Tout à coup, la salle de danse fut plongée dans les noirs, et on entendit des pas inquiétants fouler les lames du parquet grinçant. Le tonnerre sembla gronder et un loup se mit à hurler, Eucalyptus ne voyait rien mais sentait bien que tout le monde était aussi effrayé que lui. Tout à coup, les lumières revinrent, mais moins nombreuses et une musique inquiétante jaillit des instruments des nouveaux artistes sur scène. Le chanteur, devant ses musiciens, faisaient des pas de danse et semblait imiter à la perfection la marche des zombies. Eucalyptus fut d'abord soulagé puis même amusé de voir une telle mise en scène...

"♫ Minuit va soooooooonneeeeeeeeeeeeeeeeeeeeer
Quelque chose se tapit dans l'obscuritéééééééééééé
Pile pooooooiiiiiiil sous les rayons de la luuuuuunnnee
Tu entrevois une bribe qui bloque presque ton coeur
Tu essaies de crieeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeer
Mais la teeeeeeeeerreur s'empare de ton cri avant
Tu commences à être immobiliséééééééééééééééé
Quand la terreur te regarde droit dans les yeuuuuux
Tu es paralyséééééééééééééééééééééééééééé !

Parce que c'est du suuuuuuuspennnnns,
une nuit de suuuuuuuuuussspeeeeeeens
Et personne ne va vous sauveeeeeeeeer
De cette bête sur le point de frappeeeeer
Tu sais que c'est un tuuuuuuuueeeeuuuur
une nuit de suuuuuuuuuussspeeeeeeens
Tu te baaaaaats pour ta viiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiie
Dans cette nuit de meeeeeeuuuuuuuurtre
et de suuuuuuuuuuuuspeeeeeeeeeeeens ! ♪"

Malgré les paroles franchement inquiétantes, Eucalyptus ne pouvait s'empêcher de balancer la tête au rythme de cette musique envoûtante et lorsqu'une bande de danseurs grimés comme des zombies vinrent danser bizarrement juste derrière le chanteur, Eucalyptus ne tenait plus en place, bougeant son corps comme un dingue sur le petit coussin où il était assis avant. Les danseurs zombies vinrent à la rencontre des spectateurs, les invitèrent à danser avec eux, peu refusèrent et Eucalyptus, lui, ne se fit pas prier pour rejoindre la petite troupe. Les pas de danse qu'il devait répéter n'avait pas l'air compliqué mais l'étaient en fin de compte, car pour bien faire, le lutin voulait coller exactement à la chorégraphie. Après quelques minutes d'hésitation, Eucalyptus connaissait la chorégraphie presque par coeur et prenait un malin plaisir à participer à cette danse commune pour le moins déroutante. Entouré des danseurs de cette troupe d'outre tombe, il était en sécurité et était sur de ne pas se faire piétiner. Mais Eucalyptus, lui, s'en fichait royalement, il s'amusait trop pour faire attention à sa propre vie. Alors que la scie musicale d'un des musiciens imita une nouvelle fois le hurlement d'un loup, Eucalyptus voulut mettre sa pierre à l'édifice et tenta d'imiter parfaitement les hurlements de Séléné. Quelque chose se produisit, il en était sur, mais le résultat n'était pas les hurlements de Séléné. Sur le moment, Eucalyptus se dit qu'il était surement tellement distrait par la danse et la musique qu'il avait mal fait son imitation mais quelque chose en lui lui disait qu'il venait de découvrir un secret enfoui par le temps. Les fumées des pots de fumigène sortirent de ces dernières mais Eucalyptus, qui était un maître du vent, comprit vite que certaines de ces fumées avaient un comportement bizarre mais il ne savait pas pourquoi. Le jeune lutin haussa des épaules et voulut se remettre à danser mais certaines fumées opaques se dirigèrent vers lui et il eut la peur de sa vie. Machinalement, il chercha son fifre dans son dos, oubliant pour un peu que ce dernier avait été cassé et alors qu'il faisait face à face avec la bête de fumée, la chanson de ce groupe de musique prenait alors tout son sens. A part le chanteur et ses danseurs qui continuaient de faire leur show, les autres invités étaient aussi figés sur place, contemplant avec terreur ce qu'il se passait.

La chose informe ouvrit sa bouche et Eucalyptus ferma les yeux, pensant alors que sa vie était finie, qu'il allait se faire manger tout crû par cette chose faite de vent. Mais rien de tel n'arriva. Rouvrant les yeux et haussant un sourcil, il regarda à nouveau la bête et fit enfin de gros yeux ronds d'éberlué car la fumée se dissipait et dévoilait la véritable origine de son faux agresseur de nuit. Une somptueuse sylphe, couchée sur les fumées et souriante, regardait le lutin et semblait attendre qu'il lui parle. Eucalyptus comprit alors deux choses essentielles. Les sylphes n'étaient pas des créatures de vent inventées dans les contes pour enfants et il venait de découvrir le moyen d'en appeler près de lui. Il se mit à rire, fit un clin d'oeil à la sylphe et lui montra les pas de danse à répéter. La majestueuse créature se releva avec volupté et se mit à suivre les pas et les positions du lutin, si bien qu'on aurait pu croire qu'il en était son marionnettiste. Les gens aux alentours applaudirent et tout le monde se mit à les regarder, même les danseurs et le chanteur. Enivrés, les musiciens se donnèrent à fond et Eucalyptus et la sylphe firent une chorégraphie des plus aériennes, se servant de leurs talents pour plier les fumées à leur volonté, au gré de leurs pas de danse. Au bout de quelques minutes, la sylphe partit en fumée et le lutin, exténué, se retrouva sur les genoux, applaudi par la foule...

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"Je crois, et même j'en suis sûr, que c'est pour çà que je t'aime !"
"Wouhouuu ! C'était trop puissant ! Je suis vidé de toute magie, en revanche..."
"Si maman avait été là, elle t'aurait embauchée directement après ! C'était à couper le souffle, ce que tu as fait !"

Fareloke, qui venait de rejoindre la salle de danse, discutait avec Eucalyptus, assis sur un des coussins. Les deux amis avaient l'air heureux et épuisés, mais pas pour les mêmes raisons. Une dame de haute lignée se permit à ce moment de déranger les deux amis et fit déposer par sa servante une bouteille de liqueur et des jus de fruits sur la petite table qui était à côté. Elle se présenta ensuite et déclara qu'elle n'avait jamais vu de sylphe de sa vie et encore moins un spectacle pareil. Dame Eugénie, car tel était son nom, était une jolie kendrane, grande et rousse, mise dans les plus beaux vêtements que la cité blanche pouvait confectionner. Eucalyptus remercia vivement la noble pour leur avoir offert des boissons et lui conseilla même de s'assoir avec eux et de discuter un peu.

"Je ne peux refuser l'invitation d'un tel magicien !"
"Merci beaucoup pour tout ses compliments, Dame Eugénie. C'est la première fois moi aussi, que je parle à une noble. Avez-vous réellement le sang bleu ou c'est pour la frime ?"
"Euca..."
"Celui qui pose des questions sur la vie n'est jamais idiot et démontre seulement sa soif de comprendre la vie !", dit-il en imitant Hidarikiki Ume qui jouait avec sa barbe en lançant de grandes phrases.
"C'est seulement une expression jeune homme. Désolée de vous décevoir mais mon sang est aussi pourpre que ce jus de raisin."

Alors que Fareloke servait tout ce petit monde et qu'Eucalyptus recevait encore des éloges sur sa prestation, le chanteur d'avant vint à leur rencontre aussi et s'excusa de les déranger mais voulait absolument parler au lutin. Eucalyptus lui conseilla de s'assoir à son tour et une fois fait, le chanteur entama la conversation.

"Jeune lutin, c'était un honneur de danser avec vous. Je me présente, Michel, ménestrel itinérant."
"Enchanté Michel le ménestrel ! C'était surtout un honneur pour moi mais aussi une surprenante découverte !"
"Je m'intéresse de près aux arts de la magie, vous savez, mais je ne connais rien de l'aéromancie. Et quand je vois ce que vous savez en faire... J'aimerais que vous nous accompagniez à Oranan la semaine prochaine, nous y avons une représentation et j'aimerais beaucoup vous compter dans nos rangs !"
"Et bien jeune homme, en voilà un lutin chanceux. Rares sont les personnes qui ont la chance de suivre Michel dans ses tournées."
"Vous êtes le fils du barde Jacques, c'est çà ?"
"Michel, fils de jacques, en personne. Alors jeune homme, quant dîtes-vous ?"
"J'en dis que ca serait un plaisir !"

Fareloke et Dame Eugénie s'entretinrent alors longuement tandis que Michel et Eucalyptus parlaient d'Oranan, de musique et de Dahram. Michel lui avait expliqué que c'était en se rendant dans cette ville que l'idée de la chanson et de la chorégraphie était née et Eucalyptus lui reposa tout un tas de questions. Il avait l'air sérieux et intéressé par cette histoire de revenants qui hantaient les rues et les alentours de la ville. Au même moment, deux accords furent conclus. Fareloke accompagnerait et veillerait sur Dame Eugénie à Cuilnen tandis qu'Eucalyptus proposait d'utiliser le Gousset d'Ecume pour se rendre à Oranan et participer à la soirée dansante de Michel. Puis il partirait le lendemain vers Dahram, pour enquêter sur cette dangereuse affaire, pour le compte de la Société du Midi-Minuit. Epuisés par la soirée, le petit groupe se leva et chacun repartit chez soi. Au passage, Eucalyptus remercia grandement les gardes pour cette soirée inoubliable et demanda à ce que l'on dise au gérant de cette bâtisse que l'endroit était fabuleux et qu'il venait de gagner un nouveau client pour la vie...

>> La Bise d'Ynorie