L'Univers de Yuimen déménage !


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 Sujet du message: Re: Route entre Kendra Kâr et les Duchés des montagnes
MessagePosté: Mar 3 Fév 2015 19:18 
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Mes battements rapides d'ailes me rapprochent de mon point de départ. Je devine la forme du demi-elfe non loin, les mains crispées. Il a tant fracassé sa pierre sur le corps de l'insecte que les éclaboussures jaunes ont fait des taches un peu partout. Pas de trace de la femelle. Je fais exprès de me rapprocher de l'endroit, cherchant à aiguiller mes poursuivants sur une cible plus facile. Le son de frottement se reproduit, précédant la venue de décharges électriques. Volant sur mon flanc, je parviens à esquiver la première salve. Horrifié, je comprends le piège. Mais trop tard. La seconde bestiole, celle que je n'ai pas encore blessé, a attendu de voir ma trajectoire pour frapper.

"Uagh !"

Un son brutal m'échappe quand l'attaque touche si vivement que mes deux ailes se bloquent. Deux impacts, un autre cri. Le géant a été pris pour cible par la charge de la première bête. Et l'autre se rue sur moi ! Quasiment sur le dos, planant vaguement malgré la douleur, je vise mon assaillant. Ma fléchette part mais ne la touche pas. Trop rapide, l'animal vrille pour l'esquiver et me percute de plein fouet. Choc brutal, sensation de brûlure dans le dos, écho dans mon casque. La saloperie m'a plaqué au sol ! À cause de l'élan, les pierres sont telles des épées contre mon corps ! Mon arme m'échappe et roule hors de portée au brutal à-coup.

Je déglutis douloureusement et sens ma sueur perler sous ma protection. Les mandibules plongent dans ma direction, visant ma gorge. Instinctivement, mes mains se lèvent, saisissant ce qu'elles peuvent. Dents serrées, cœur si rapide qu'il a l'air de taper en continu, je grimace à la douleur que je perçois. Je résiste à la pression, concentrant toute ma puissance dans mes bras pour ne pas flancher. L'animal se met alors à déplacer son poids, cherchant à agripper l'un de mes bras avec sa propre patte. Il faut que je me dégage de là et vite !

Rassemblant mes fluides, j'utilise le premier sort qui me vient instinctivement. S'enroulant autour de mon bras corrompu, ma main obscure vient attraper la zone entre la tête et les premières pattes de l'insecte. Imprécise, elle me permet toutefois de gagner du temps. Mais ce n'est pas suffisant. Je sens la masse de ses autres pattes s'arrimer fermement à mes jambes, me causant un renouveau de douleur, et à mes ailes. Point positif, elle ne peut pas m'électrocuter tant que je suis sous elle. Point terriblement négatif, je suis désarmé et elle est trop près. Et c'est un insecte. Tenter de lui causer une peur panique ou du désespoir serait un gaspillage d'énergie. Je n'ai que mon corps pour me défendre !

Contre la mandibule, ma main claire se serre et je cogne du poing contre la forme animale. Je ne parviens qu'à presque me fouler un doigt dessus. Mais je n'abandonne pas ! L'armure dorée enveloppe jusqu'au dessus de mes mains, m'incitant à cogner de plus belle. Mais mes petits coups rapides ne font pas même chanceler la créature. Il me faut frapper plus fort, mais surtout en une seule fois ! Faire dégager cette créature en un impact assez fort pour que je puisse me reprendre !

Mâchoire crispée, je repousse comme je le peux cette tête sur le côté. C'est le seul moyen de donner de l'élan à mon bras. Tout mon corps proteste, mais je fais au mieux pour ne pas l'entendre. Ma puissance martiale se regroupe dans mon abdomen, et je tente de la faire passer dans mes bras. La lutte au sol m'interrompt dans mes efforts, surtout quand cette saloperie bascule tout son poids sur l'avant de son corps ! Mes coudes touchent presque par terre quand un bruit visqueux se fait entendre. Mon agresseur émet un bruit strident me vrillant les tympans. Profil aspergé d'un liquide, la bête siffle et se secoue. Quelques gouttes glissent contre sa tête, venant irriter la peau de mes phalanges.

( De l'acide ? )

Remonté, je serre les dents.

"Je suis dessous, imbécile !", hurle-je avec colère.

J'ai déjà assez à faire avec cette créature, ce n'est pas pour déguster de l'acide dans la figure en plus ! Au moins, cela a le mérite de distraire la bête pour que je puisse rassembler ma force. Concentré, je sens mon bras parcouru de puissance, que j'applique férocement contre la tête insectoïde. L'animal ne tressaille même pas, comme si mon énergie s'était dissipée avant ma frappe. L'attention du danger vivant attirée par ce qui l'a frappé, je réitère l'opération. Trop pressé. L'énergie se décharge avant que mon poing ne touche. L'erreur. La mouche a du s'en rendre compte. Son cri perd en intensité. Sa sale gueule reprend son sinistre mouvement. J'entends en prime le froissement de ses ailes.

Sueur glacée dévalant mon dos sanglant, je plisse les yeux en percevant la tension dans le corps de l'insecte. Mais la décharge n'est pas pour moi. Son agressivité reportée sur un autre, je me concentre pour donner un puissant coup de poing à la créature. Cette fois-ci, impact et déploiement d'énergie se font en même temps. Constat affreux. Cela ne donne rien. Tout juste un vif mouvement de tête de la créature, comme pour se débarrasser d'une poussière. Je manque de puissance ! Il me faut me concentrer plus longuement !

Aidée par ma volonté, ma force physique se rassemble dans mon bras gauche. Pressé, presque angoissé, je ne décèle un léger halo autour de mon poing que par chance. Ayant sans doute touché sa cible, la mouche reporte son attention sur moi. Sa soudaine pression m'oblige à appliquer mes deux mains contre sa sale trogne. Mon énergie physique se dissipe alors que je lutte pour garder sa bouche aussi loin que possible de ma gorge. Un autre impact se fait entendre, faisant de nouveau siffler la chose. Un liquide me goutte dessus. De l'eau cette fois.

L'attention de la créature attirée, je parviens à repousser sur le côté sa caboche ronde. J'arme mon poing, recréant cette aura physique autour. Décidé, j'applique férocement ce dernier contre la tête penchée. La mouche semble secouée, mais elle reste là, à maintenir mes membres au sol. Nouvelle salve liquide. Là, la force aquatique est assez grande pour soulever la vile bestiole. Mon aile est enfin libre ! Révolté d'avoir été si longuement dans cette posture de soumission, je dévoile mes dents. Ma colère gronde. J'arme mon bras et sens tous les muscles de mon torse à mon épaule accompagner le mouvement. Poussant sur mon aile, je redresse mon buste et joins à mon assaut un grondement enragé.

Cette fois-ci, ma main entourée de sa force percute la bête avec une telle violence que l'armure dorée tinte. L'énergie martiale fait le reste. L'insecte déguste. Le coup donné est tel qu'il fait s'envoler la bête dans les airs, et l'amène à percuter lourdement la paroi de pierre proche. En s'éclatant à son tour sur les cailloux acérés à sa chute. Je sens une traction sur mon bras frappeur, mais l'arrache à l'étreinte. C'est l'immonde géante aldryde qui tente de me relever.

"Bas les pattes, femelle !", lui crache-je dessus en me remettant sur pieds seul.

Tout mon corps pulse, mais mes pensées sont focalisées sur la récupération de ma sarbacane. Et surtout la maîtrise de moi-même. Entre la sueur froide provoquée par cette situation, la douleur et la colère, je suis sur le point d'exploser ! La bestiole que j'ai projeté contre la roche a l'air un peu sonnée. J'en profite. Amenant ma sarbacane à mes lèvres, je lui lance une fléchette à la naissance de l'aile. Une autre cogne à celle d'une patte, arrachant cette dernière dans une gerbe écœurante. Au final, je concentre tant mon tir que le projectile en devient dévastateur. L'insecte est littéralement décapité par le puissant impact.

Souffle court, je me tourne vers le dernier des spécimens. Un brin de frustration m'étreint quand j'assiste à la chute d'une pierre plate dessus. Et surtout aux coups de pied à répétition que donne le demi-elfe, avant que sa jambe blessée ne lâche. Il tombe alors à genoux sur la dalle dans un son des plus gluants. Agacé par cette chute, dans tous les sens du terme, je lance un regard noir à cet imbécile, puis sens monter de l'inquiétude. Je siffle deux notes précises une fois et une deuxième. Alors que j'amorce la suivante, Lyïl apparait enfin, visiblement en un seul morceau. Soulagé, je cherche à étendre ma main vers lui quand il se pose, et ne peut que constater la faiblesse de mon enveloppe.

Entre les charges, les décharges, la sensation sanguine dévalant mon dos entre mes ailes, la peine sourde de mon mollet et le jonglage entre ma magie et ma puissance physique, je suis bien content que mon harney soit là. Sa silhouette me sert d'appui, le temps que mon souffle revienne à la normale. Je darde alors un regard froid et sévère à l'aldryde et surtout au grand idiot qui m'a mis dans cette situation. Je me suis fais très peur, mais c'est ce qui me fait me sentir vivant. Ma vie sur le fil du rasoir. Le combat contre des adversaires imprévisibles, et desquels j'ai triomphé ! Pas indemne, c'est certain, ni entièrement seul non plus, mais je m'en fiche. L'important, c'est que mes adversaires aient péri ou soient sur le point de le faire.

Reste maintenant à savoir qui est ce grand benêt, et surtout s'il peut me servir à quoi que ce soit. Je n'en ai qu'un léger doute. Après tout, il a clairement interpellé la grande imbécile par son prénom avant toute cette histoire.





Tentative d'apprentissage de la CCSA "Envol du faucon"

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Dernière édition par Nessandro le Ven 6 Fév 2015 11:03, édité 3 fois.

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 Sujet du message: Re: Route entre Kendra Kâr et les Duchés des montagnes
MessagePosté: Mer 4 Fév 2015 00:08 
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La pression du combat retombe progressivement, amenant un rappel douloureux de mon état. J'ai le souffle encore court. L'armure dorée et apparemment le mur magique ont atténué le tout, mais mes avant-bras sont marqués par des brûlures très claires et douloureuses. Point d'impact de la foudre de ces foutues mouches. Et à n'en pas douter, quelques plumes ont du franchement roussir. Je sens aussi le côté poisseux de mon sang dans mon dos. Et vu le terrain, je dois avoir des poussières enfoncées dans les plaies. Peste soit des protections non intégrales ! D'un autre côté, je vois difficilement comment mieux me protéger sans gêner le mouvement de mes ailes. Et puis j'ai aussi ce mollet qui pique !

( Ah. Oui, forcément. Encore un duo de trous. Saloperie de bestioles ! )

Lentement, je fais quelques pas, la main contre mon oiseau. Je veux m'assurer pouvoir reprendre la route bientôt, malgré les décharges subies. Mon attention finit par se reporter sur la femelle, que je constate indemne, si on fait fi des bandages déjà là avant. Pourquoi est-ce que cela ne m'étonne même pas ? Par contre, le demi-elfe est moins bien portant. Son bras saigne, son nez aussi, sa cheville est gonflée, mais vu qu'il boitait, cela ne me surprend pas. Mais j'attends quand même des explications. Le grand imbécile tremble et scrute la femelle. Il finit enfin par ouvrir sa boite à caries.

"Sol'Aïna... Je ne pensais pas te revoir si... Enfin... Merci quoi."

"Je sais que ce n'était pas ta faute, Justinien. Mais tu n'as rien fait pour aider non plus.", fait la femelle, de façon étrangement neutre.

"C'est qui ?", fait l'imbécile en me pointant du doigt.

"Range cet index immédiatement.", menace-je, pas encore départi de ma volonté de combattre.

"C'est L... Nessandro. Il connait l'aldryde qui t'a blessé."

"Oh.", s'agite nerveusement l'hybride, en particulier quand il aperçoit Plume d'Argent, solidement arrimée au sac de ma monture.

"Ça, c'est un mercenaire ?", lâche-je avec une incrédulité blasée.

"Oui mais euh... Plutôt soutien technique. Fabrication des filets. Réparations des cages, tout cela... D'ailleurs, que fais-tu là ? ", tente d'expliquer la femelle.

"Tu sais, ça d'vait arriver. Le fer de l'ânesse a lâché. Elle a trébuché et s'est rompue la nuque. J'étais pas du bon côté du chariot qu'a basculé. Luovik m'a laissé pour mort.", avoue le géant.

"Et c'est censé m'intéresser ?", gronde-je, sentant ma colère remonter. "Je me fous de tes malheurs, grand imbécile. Où ont-ils emmené l'aldryde ?"

Là, le soi-disant Justinien se met à se tortiller et scrute la femelle, comme perturbé par quelque chose. Il le sait mais ne dit rien. Et ce regard vers la grande abrutie m'intrigue. Encore ce silence qui me faire perdre mon temps pendant qu'il arrive mes-ailes-savent-quoi à Dae'ron ! Mes sourcils se froncent, mais aucune réponse ne m'est offerte.

"Quoi qu'il en soit...", commence à bredouiller la femelle. "Il faut qu'on te trouve de l'aide. Tu nous diras tout après, hein ?"

Aucune conviction dans cette voix. Mon apaisement après la mort de ces insectes s'amenuise d'instant en instant. Ma haine reprend progressivement sa place, et c'est pire quand je constate le climat presque détendu de cette rencontre.

"Oui, oui, je suis désolé. Je me dirigeais vers le croisement quand ces sales bêtes m'ont...", bave encore le géant.

"Suffit !", le coupe-je. "Tu as des informations dont j'ai besoin, et tu vas me les donner. Maintenant.", affirme-je sur un ton froid.

"Je le ferai, mais quand on aura trouvé une caravane. Tu sais te défendre, et je ne peux pas. Et j'ai mal, moi.", sourit péniblement le sang-mêlé.

"Il ne va rien dire maintenant, c'est sa seule monnaie d'échange. On n'a pas d'autre choix. Il va falloir l'aid...", commence la grande idiote.

"Assez ! ", m'énerve-je devant une telle rétention d'informations. "Je ne rebrousse pas chemin !", siffle-je.

"Ne le prends pas comme ça. Du calme.", tente l'affreuse.

Je lui lance un regard si noir que malgré sa frange, elle en tressaille. Pourquoi ne presse-t-elle pas cet imbécile pour des réponses ? Elle ne tient pas à sauver ses idiotes de consœurs ou quoi ? Ou alors elle sait pertinemment que quand j'apprendrai ce que je veux savoir, je la laisserai en plan ? J'en ai assez que l'on se paie ma tête ! Hors de question de faire demi-tour ! Pour en plus tomber sur une caravane vraisemblablement humaine ! Et rien ne dit alors qu'il tiendra parole ! Ma patience atteint ses limites.

"Du calme ?", persifle-je. "Ce type a les réponses qu'il me faut ! Il n'a rien fait pour empêcher la capture, et toi tu le traites comme un bambin écorché à ménager ?", fais-je en haussant le ton. "C'est ta dernière chance, bâtard... Tu vas cracher le morceau. Maintenant.", menace-je ouvertement, en tendant ma sarbacane hostilement. Il a vu ce que j'ai fait contre ces insectes énormes. Il devrait avoir compris à quoi s'attendre de ma part. S'il croit que je bluffe, il va le regretter. Surtout que je suis plus sur les nerfs que jamais !

"Non, attends !", tente d'intervenir l'emplumée en bleu, comme pour m'empêcher une fois de plus d'apprendre quelque chose de capital.

Une pointe glacée se fiche dans ma poitrine. Ma dernière once de patience rompt aussi brutalement qu'une corde trop tendue. J'amène alors mon énergie combattive dans mon poing et fais un vif mouvement vers l'avant. Placé entre le géant et la femelle, dents serrées, je la prends par surprise. Sans retenue, j'effectue le même coup que contre la mouche. La femelle tétanisée par mon geste inattendu ne parvient pas à réagir à temps. Mon poing serré et entouré de son halo physique la percute dans l'abdomen avec assez de force pour l'envoyer cogner rudement contre la paroi. Elle choit ensuite aussi élégamment qu'une bouse par terre. Je crache dans sa direction, expulsant l'amertume accumulée pendant le voyage. Tant pis pour ce qu'elle pouvait m'apprendre sur mon passé. Je ne vais pas laisser une laideronne, même informée, se mettre entre moi et la piste menant au brun ! C'est la toute première fois que je fais passer une vie avant ma quête de vengeance, que j'en suis pleinement conscient, et que je le fais de mon plein gré.

Mon regard noir se porte sur le géant alors que je secoue lentement la main. Incrédule, ce dernier déglutit.

"P... Pourquoi t'as fait ça ? Vous êtes amis ! Vous faites équipe !"

"Ha ! Cela me ferait mal !", lâche-je avec un sourire mauvais. "Maintenant, raconte-moi exactement ce qui est arrivé à l'aldryde brun. Donne-moi tous les détails sur les membres de ta troupe, aussi. Et vite."

"No... Non ! Pas avant d'avoir trouvé une..."

"Tu as mal compris...", constate-je avec une intonation glacée. Ma main noircie se lève, et sans prévenir, je lance sur ce crétin une ombre assoiffée de sa vie. Pendant qu'un son de douleur lui échappe et que je sens les plaies de mon dos se ressouder par en-dessous, chose qui expulse les éléments minéraux, je poursuis. "Ce n'est pas négociable."

Le bâtard moitié humain moitié elfe se crispe. La peur se lit dans son regard. L'autre assommée avait raison. Ce type n'est vraiment pas un habitué du combat et de la douleur. Son élan presque paniqué est vraiment réjouissant. Il déglutit, tentant de mettre ses bras en barrage d'abord, puis tendant les mains comme pour me garder à distance. Il va même jusqu'à essayer pathétiquement de se reculer au sol.

"Si... Si je te dis tout, tu me laisses tranquille ?", commence à chouiner le géant.

"Mauvaise réponse.", constate-je avec dépit. Ras-les-ailes de me faire mener par le bout du nez. Maintenant, j'applique mes règles. Mais voyant qu'il ne se décide pas à faire mieux, comme comptant vraiment sur une promesse de l'épargner, je pousse un souffle nasal presque joueur. "Je vais te donner un coup de pouce.", m'amuse-je, en tirant le croc de son étui et en le plantant résolument dans sa cheville enflée. La dent descend et déchire sa peau sur quelques centimètres avant que je l'arrache avec violence. Le cri vif que j'ai provoqué me laisse indifférent. Tout comme la tentative de ma victime de ramener sa jambe pour la protéger. C'est à peine une égratignure comparé à ce que j'ai enduré. Quelle femelle ce type...

"Alors ?", reprends-je. "Ces informations ?", grimace-je avec une cruauté exaspérée.

Sur ce, je donne un coup sec sur le côté, éjectant les gouttes de sang maculant ma dague. Salir une telle arme sur une moité d'humain, quelle plaie. Cela dit, s'il me faut le frapper encore une dizaine de fois, je ne dis pas non. Après l'irritation causée par cette femelle et ces insectes, faire couler du sang rouge ne peut que me détendre.

Temporairement.



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Dernière édition par Nessandro le Mer 4 Fév 2015 14:57, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Route entre Kendra Kâr et les Duchés des montagnes
MessagePosté: Mer 4 Fév 2015 14:56 
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Ma dague doit encore plonger deux fois dans la chair du géant avant que ce dernier, tétanisé par la peur, ne se décide à parler. Dommage, mais tant mieux. Bafouillant jusqu'à ce que je le menace, il me raconte sa version. D'après lui, les trois aldrydes féminines sont bien rentrées bredouilles auprès de la troupe. Elles avaient été envoyées récupérer un mâle aldryde soi-disant caché à Bouh-Chêne, car propriété échappée. Le son de ces paroles m'est étrangement familier, sauf qu'il ne s'agissait pas de moi.

Là où sa version diffère, c'est que la troupe n'a nullement décidé de se retourner contre les femelles. La raison ? Ces dernières avaient repéré un substitut potable. Ma peau se hérisse. Dae'ron était bel et bien là, à la recherche du terrier. Ce qu'il a pris pour une agression contre les laideronnes n'était qu'une mise en scène. Elles savaient qu'il les observait, sans savoir précisément d'où. Pour le faire sortir au grand jour, elles ont joué la comédie. La peur, la trahison, les attaques sournoises. Et le brun est tombé dans le panneau.

( Je t'avais pourtant dit de te méfier... )

Par contre, la prise de contrôle sur la femelle de foudre était bien réel. Tactique mise au point parce que l'imbécile volante, surexcitée en permanence, devait être canalisée pour être utile. Le demi-elfe m'apprend alors que la crétine en bleu aurait essayé de le protéger, mais en vain. Mon sang bout. C'est Justinien qui a lancé le filet ayant triomphé du protecteur. Pire, chose qui me fait enrager un peu plus, ils n'avaient plus de cage à sa taille. Le mâle a donc été enfermé dans une vulgaire souricière. Ces salopards vont me le payer...

En ce qui concerne l'idiote en bleu, son comportement a exaspéré le chef de cette bande. Soi-disant au nom de certains principes, elle aurait déjà gêné ses camarades pendant des captures. Elle s'est réellement pris un plat d'arme qui l'a propulsé dans des épines. Pour regagner les faveurs de l'elfe, elle devait lui ramener un animal ou quelque chose de valeur. Mes sourcils se froncent. Mon instinct ne m'avait pas dupé sur ses intentions. Mais elle n'avait pas du prévoir que nous tomberions sur cet énergumène tremblant en route. Et surtout qu'il parle autant.

( Rien de tel qu'une menace concrète pour délier les langues. )

Encouragé par l'éclat du croc, le géant poursuit. La troupe se dirige vers la ville sombre de Dahràm. L'un des plus gros client y réside, et la plupart des membres ont leurs habitudes dans cette cité. Par contre, Justinien est infoutu de me dire ce qui va arriver à Dae'ron. Seul Luovik a pleinement connaissance de tout ça. C'est lui qui prend en charge tout ce qui est relation avec les commanditaires, paiement et le reste.

"À quoi il ressemble et où je le trouve, cet hinïon ?", demande-je en secouant mon croc.

"Il est... Il va... Agh !", hurle le blessé alors que je soupire en lui taillant le gras une nouvelle fois.

"Clairement. Je te l'ai déjà dit.", grince-je en retirant lentement mon arme de sa chair.

Des larmes se forment au coin des yeux coloris verdâtre et cernés. Je dois donc chercher un elfe blanc si grand qu'il dépassera de loin toutes les têtes en ville, chevelure mi-longue et plus blonde que la mienne. Sous couvert d'une activité de ménestrel, il est généralement équipé d'une protection légère et en cuir elfique, rehaussé de motifs végétaux dorés. Deux boucles d'oreille en forme de cobra mordent son lobe gauche, et il porte un ocarina à la ceinture. S'il ne traine pas sur le port, ni ne s'assure que ses chariots sont bien gardés, il est souvent à l'auberge du voyageur, reconstruite récemment. Il est du genre à courir la gueuse. Ou plutôt à les charmer d'une parole avant de...

"Immonde.", coupe-je avant d'avoir trop de détails. "Et les autres ?"

Rapidement, j'apprends que le reste du groupe se repose. Voire aide à reconstruire les dernières bicoques endommagées par une catastrophe maritime. Je le coupe au sens propre quand il commence à me vriller les tympans.

"Oh. Réflexe.", m'amuse-je en le voyant se tordre et plaquer ses mains contre sa cuisse.

Culpabilité ? Envers un géant qui n'a pas levé le petit doigt pour aider mon congénère ? Et pire, a concouru à sa capture ? Aucune.

"Bien.", fais-je en étendant mes ailes, ma faiblesse encore présente, mais atténuée par ce petit moment fort divertissant. "Je crois que j'ai ce qu'il me faut."

Sur ce, je me tourne vers la femelle qui n'a pas encore repris connaissance. Sale garce. Même si elle m'a menti au sujet de ce qui s'est passé en forêt, rien ne justifie son savoir à mon sujet. Cette pimbêche a du l'apprendre d'une autre façon. Faisait-elle partie de ma colonie d'origine ? Peut-être, mais comme je n'avais d'yeux que pour le mâle Hyjuud à l'époque, impossible d'en trouver trace.

Mais je ne compte pas lui pardonner le temps qu'elle m'a fait perdre. Ma colère est intense. Je saisis l'une de ses ailes et en arrache les plumes sans ménagement. Je fais si bien que la peau que j'aperçois en saigne. De l'autre côté, ma dague découpe ces éléments blanchâtres. Elle ne volera plus avant un moment. Agrippant sa tignasse, je la soulève brutalement, découvrant sur son front une marque étoilée. Une cicatrice affreuse, mais bien plus supportable que sa tronche. Cela dit, c'est une explication à sa frange trop longue. Les apparences, toujours les apparences.

"Arr... Arrête !", pleure le blessé dans mon dos. "Tu as ce que tu veux ! Laisse-nous tranquille ! Pitié !", ajoute-t-il en croisant ses mains tâchées de son propre sang.

"Pas faux.", fais-je en lâchant la tête de l'inconsciente au-dessus d'une pierre. "Juste un dernier détail."

Regardant autour de moi, j'aperçois un galet de belle taille. C'est sans la moindre hésitation que j'attrape puis laisse choir ce minéral sur l'aile gauche de la femelle. Comme si deux pierres calcaire entraient en contact, le bruit de son os malmené parvient à mes spirales. Non, je ne vais pas la tuer. Lui faire endurer une partie de ma souffrance est bien plus agréable. Et puis, s'il a dit vrai, elle a tenté d'interférer avec la capture.

"Bien. À ton tour.", lance-je de façon meurtrière au blessé mouillant son pantalon.

"N... Non ! Tu as promis !", chiale-t-il quand il voit l'éclat de ma dague.

"Ah non.", corrige-je. "Tu t'es foutu ça dans le crâne tout seul. Et tu as porté la main sur Dae'ron...", continue-je plus froidement encore. "Grossière erreur."

Ma sarbacane est pointée sur différentes zones de son corps, lentement, lui faisant retenir son souffle. Mes spirales perçoivent un bruit régulier et de plus en plus fort. Je projette alors une fléchette droit dans sa sale paluche, lui arrachant un cri douloureux de plus.

"Tu as de la chance.", constate-je en décelant le grincement de roues cerclées de fer. "Ou peut-être pas.", grimace-je avec un sourire cruel. "Si je te retrouve en travers de mon chemin, je me sers de ma dague pour débarrasser tes os de leur chair. Copeau par copeau. Phalange par phalange. En commençant par les orteils."

Le demi-elfe pâlit à grande vitesse jusqu'à ce qu'il montre des signes évidents de perte de connaissance. Sans m'attarder, j'enfourche mon harney alors que des éclats de voix se répercutent contre la paroi proche. Je croise brièvement le regard bleuté d'un géant à large chapeau de cuir avant de pousser mon oiseau à s'envoler. Je me fiche d'avoir été vu. J'ai enfin une piste solide, car un crétin redoutant la douleur est plus fiable qu'une femelle. Vraiment plus.

Dahràm. Une cité dont la sale réputation n'est plus à faire. Et encore à bien au moins un jour et demi de voyage. Ma colère persiste, mais ma haine s'est atténuée. C'est fou ce que cela peut me détendre de ne pas être le seul à déguster. Par contre, je ne refuserais pas une bonne baignade d'ici peu. Entre la sueur du voyage, le sang qui a coulé de mes plaies voire le jus de mouche qui a maculé mes bottes, je dois être dans un triste état.

Et j'ai horreur de puer.



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 Sujet du message: Re: Route entre Kendra Kâr et les Duchés des montagnes
MessagePosté: Sam 7 Mar 2015 19:51 
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Nous sortons du manoir sous une bourrasque de cette fin d'hiver, Melicera s'apprête à faire la fête en l'honneur de leur jeune maîtresse devenue une dame. Même si les moyens ne sont pas là, à cause de la guerre pour l'essentiel, l'esprit est là. Nous croisons des enfants qui nous hurlent des bénédictions auxquels je réponds par un sourire et Iraën par un regard aussi incompréhensible que d'habitude.

"Croient-ils réellement que j'ai fait de vous mon épouse ?"
"Cela aurait été bon, pour eux comme pour nous, ne le croyez-vous pas, mon lige ?"
"Non, je ne le crois pas." me répond-il, soudain rembruni tandis que je rougis rien qu'à cette idée dont j'ai longtemps rêvé.

Nous trottons jusqu'à la sortie du village sans nous arrêter, ne voulant pas gâcher ce moment de plaisir des villageois. Nul besoin de choisir la destination pour l'instant, il n'y a qu'une seule route praticable par des chevaux à la sortie de Melicera. La question de la direction se posera donc que d'ici plus d'une dizaine de kilomètres, quand nous serons sortis du domaine des champs de fleurs. Cette particularité s'explique par une volonté de ne pas troubler les abeilles par la présence de voyageurs dans les environs.

Il fait nuit, il fait frais, le genre de temps qui n'encourage guère le voyage à vrai dire. Je profite cependant du trajet, heureuse d'être libre, d'être dehors et d'être sur un cheval. Moi qui ait toujours vécue pour être une dame enfermée dans un château à manger des gâteaux secs en buvant des infusions en regardant des marmots courir sur le sol de pierre, ou encore à broder en écoutant mon époux me parler de réserve de blé et de litige de fermier, je me rends compte que ma vraie vie commence maintenant, et c'est agréable. Je me décide même à exprimer ce nouveau départ à travers quelques rimes chantées :

"Partir un matin, changer la route du destin
Traverser les fleuves et les rivières du chagrin
Pour la vie
Partir prendre un chemin pour un royaume d'illusion
Là où l'océan raye d'un trait notre horizon
Trouver l'oubli"


Cela n'égaye pas le visage d'Iraën qui n'a fait que se fermer depuis que nous sommes partis du manoir, visiblement de plus en plus contrarié. Nous longeons bientôt un mur de lourdes pierres bleues, partiellement écroulé d'ailleurs, je sais que d'ici quelques minutes, nous Nous arriverons à un croisement qui marquera le temps du choix.
Mon plan à l'origine était de monter vers le Nord pour rejoindre Bois d'Argent, mais je sais désormais que ce n'est pas là-bas que je trouverais un abri. Pour le reste, j'avoue ne jamais avoir dépassé les limites de la Seigneurie de mon père et donc j'ignore totalement où aller et où les routes peuvent me mener.

"J'ai pris une carte en partant. Mettons-nous à l'abri le temps de faire le point exactement sur le trajet possible, et sur les choix que nous avons réellement."

Nous descendons de cheval et nous nous réfugions dans la chapelle à Phaïtos, attenante au petit cimetière de Melicera, qui marque la fin du domaine seigneuriale d'ailleurs. Il a été construit par mon grand-père, lors d'une épidémie qui a failli ravager le village, quand ils se sont aperçus que le surplus de cadavres franchement enterrés nuisaient à la récolte du miel et du pollen par les abeilles. Iraën sort de ses fontes un rouleau de cuir, marqué de l'emblème de Melicera, sans doute appartenait-il à mon père d'ailleurs, ainsi qu'une lampe à huile avant de me rejoindre à l'intérieur.

Après avoir allumé la mèche, il déroule le parchemin avec la carte du duché de Gamerian sur la grande pierre plate qui sert d'autel par défaut. Melicera est au sud du duché, quasiment le dernier village du duché avant d'atteindre le comté de Bouhen. Au nord de notre place se situe... Gamerian, la demeure Seigneuriale et le village attenant de la famille Gramefeux, mes suzerains, enfin l'étaient-ils jusqu'à ce soir. La route pour Oranan passe forcément par là, manifestement. Et tandis que je suis le tracé de cette route du doigt, je sens un froid étrange dans la chapelle, Iraën ne dit rien, mais je vois à sa manière de se comporter que quelque chose le dérange profondément, à moins que ça soit les ombres projetées par la flamme incertaine de la petite lampe qui me donne cette impression.

De l'autre coté, la route part vers l'Ouest et Bouhen suivant approximativement le fleuve jusqu'à la mer. C'est par là que passe la majorité des marchands de bois, laissant leurs troncs dérivés par l'eau. Cette route a l'avantage d'être assez surveillée et ne devrait guère causer de problème, à part quelques attaques de gobelins, ou de créatures sauvages.

"La route semble toute tracée ! Nous commencerons notre voyage à Bouhen !"
"Je ne peux vous suivre, ma dame."
"Comment ça ? Vous avez juré de me protéger, vous êtes mon chevalier-lige !"
"Je ne suis pas plus votre lige que je ne suis chevalier, ma Dame. Et c'est bien pour vous protéger que je ne peux venir avec vous."

Dehors, seule la lune pâle brille dans le froid ciel d'hiver; dedans le minuscule abri où nous sommes réfugiés, la seule lumière vient de la petite lampe à huile allumée par Iraën nous permettre de lire la carte. Celle-ci s'est d'ailleurs roulée sagement dès que je l'ai lâchée. L'impression d'une liberté en sécurité que j'avais pendant la chevauchée à totalement disparue, en même temps que mes certitudes. Je cherche le regard d'Iraën malgré l'obscurité, restant abasourdie par ce qu'il vient de me révéler.

"Vous êtes mon lige ! Iraën de Nereys, obéissez, et venez avec moi."

Ma voix est aiguë, beaucoup trop aiguë d'ailleurs, c'est à nouveau une voix de fillette terrifiée et pas celle de la dame lui ayant ordonné le départ. Il hoche la tête en signe de négation et soupire.

"Cessez de m'appeler ainsi. Je me nomme Cilyän de Nareön, Iraën de Nereys est le nom que votre père m'avait choisi pour me protéger. Je lui dois beaucoup vous savez, sans doute la vie. C'est en son nom que j'avais accepté de vous protéger autant que je le pouvais."
"Alors venez avec moi. Soyez mon Ayric et je serais votre Florène !"
"Cela ne se peut pas. Je ne vous demande pas de comprendre, accepter juste que je ne puis me rendre à Bouhen."
"Dites-moi juste pourquoi !"
"Parce que je tiens à la vie, c'est la seule chose que j'ai à dire."
"C'est la route la plus sûre. Je ne peux aller vers Gamerian, vous le savez trop bien, Bouhen est le seul chemin pour moi !"
"Reste le troisième chemin, celui des champs et de la liberté."

Nous sommes ressortis durant la discussion, et Iraën me montre un troisième chemin, fait de pierres et de boue, partant à travers les champs vers les bois.

"Là-bas, c'est la forêt des faeras, puis le lac de Nostyla et enfin Oranan. Viendrez-vous avec moi ?"

Je regarde ce chemin, cette seule alternative à notre séparation manifestement. Sous la pâle lune grise, je ne parviens pas à y voir un début ou une aventure, juste un coupe-gorge où nous pourrions nous faire surprendre par des bandits, des Sektegs ou encore un kirin légendaire prêt à nous piétiner. Et le nom même d'Oranan résonne encore en moi comme une terre en guerre, où des hommes fiers, valeureux combattants meurent les armes à la main. Je ne peux m'empêcher de sentir le froid de la main de mon père sur son linceul noir, son visage si pâle et si beau. Non cela, il ne peut pas me le demander. Je suis une femme et contrairement à Florène, je ne suis pas prête à mourir à la guerre, les armes à la main. Je n'ai pas peur de me battre, mais j'ai peur de cette obscurité, j'ai peur des légendes sur la forêt des faeras, et j'ai peur de la guerre.

"Je n'irais pas à Oranan. J'ai décidé que j'irais à Bouhen, j'irais à Bouhen avec ou sans vous !"

Ma voix tremble, mais je ne cèderais pas à son ultimatum. Je refuse d'aller aussi proche de la guerre et du front, la voie du Nord n'est pas pour moi, pas pour l'instant durant.

Un moment qui me semble presque une éternité s'écoule tandis que chacun reste sur ses positions. C'est Iraën qui brise cet instant en allant, tête basse vers sa monture. Il y a en lui quelque chose de profondément humain, qui détonne complètement d'avec son attitude habituelle. Je me rue vers lui, mais m'arrête juste avant de le toucher. Que faire, que dire ? Je ne reviendrais pas sur ma décision. Même si je me sens en sécurité avec lui, je n'irais pas à Oranan, je n'irais pas à la guerre. Pourquoi ne peut-il pas simplement venir avec moi à Bouhen ?

"J'aurais aimé que notre aventure dure plus longtemps, ma Dame. Votre choix est fait, le mien aussi."

Il a la main sur le licol de sa monture et s'apprête à remonter en selle, mais à ses gestes, je sens qu'il attend quelque chose de moi. Veut-il que je l'embrasse, que je lui saute au cou, que j'abandonne mon idée pour suivre la sienne ? Comment veut-il que je lui fasse confiance alors qu'il refuse de m'expliquer de quoi il retourne ? C'est n'est pas au chevalier d'imposer ses caprices et mon père m'a assez appris du commandement pour que je sache que si je cède maintenant, j'aurais perdu, définitivement, tout autorité. Mais si je le perds lui, mon dernier ami, mon dernier parent, mon dernier rempart, n'aurais-je pas tout perdu ?

"Dites-moi au moins pourquoi il doit en être ainsi !"
"Je ne le peux, désolé. Mais je ne romprais pas un serment, même pour des yeux aussi beaux que les vôtres."
"Un serment ? Vous ne pouvez rien me dire ou ne pas venir à cause d'un serment ? Répondez !"

Lentement, il se tourne vers moi et plante ses yeux dans les miens. Je soutiens son regard, ses yeux sont perçants, typique de tous les elfes que j'ai vu, et me mettent mal à l'aise. Il le sait pertinemment et en jouait quand j'étais son élève. Mais désormais je suis une dame et je dois cacher ce que je ressens, je tâche donc de relever le défi tacite et durci ma volonté autant que mes traits. Au bout d'un long moment, il finit par adoucir son visage et souris légèrement.

"Votre père et moi avons été les témoins d'une affaire qui nous dépassait tous les deux. Il m'a sauvé la vie et en échange j'ai accepté d'oublier ce que j'ai vu cette nuit-là. Vous en dire plus serait dangereux pour vous, autant que pour moi. Mon serment envers votre père m'empêche de me diriger plus loin vers Bouhen. Je partirais sur les chemins plus sombres, mais nous nous retrouverons, Naya, je vous le promets."
"Vous êtes mon lige ! Vous ne pouvez pas m'abandonnez !"
"Je ne suis même pas chevalier, comment pourrais-je être votre lige, Demoiselle ?"

J'en reste bouche bée, comment ça, il n'est pas chevalier ? Qui est-il donc réellement ? Je n'ai pas le temps de lui poser les questions qu'il vient voler un baiser sur ma joue avant de sauter en selle. Il m'assène un dernier conseil avant de partir :

"Allez à Bouhen, en chemin, l'auberge de la Courtisane est réputée pour son accueil, vous y trouverez un lit cette nuit ainsi qu'un endroit où vous changer. Ensuite continuez la route, mêlez-vous aux marchands. Une fois en ville, cherchez l'écurie, revendez Céleste, l'argent de la vente vous permettra de vivre jusqu'à trouver de l'argent, je sais que vous y arriverez. Vous avez les yeux, mais aussi le courage de votre père !"

Ce sont sur ces derniers mots que mon formidable guerrier elfe me laisse là, non loin d'un cimetière, par une magnifique nuit de pleine lune. J'ai envie de pleurer, de hurler, de me ruer à sa poursuite, mais rien que les quelques pas vers Céleste me semblent impossibles à faire. C'est dans un semi-rêve que je finis cependant par remonter sur mon cheval et faire les kilomètres qui me sépare de l'auberge de la Courtisane.

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Naya, fille du chevalier Cyrial de Rougeaigues, seigneur de Melicera


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 Sujet du message: Re: Route entre Kendra Kâr et les Duchés des montagnes
MessagePosté: Dim 8 Mar 2015 20:21 
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L'auberge de la Courtisane n'est pas vraiment le genre d'établissement que j'ai eu l'occasion de fréquenter durant mes courtes années de vie, c'est donc avec une curiosité mâtinée de crainte que je m'approche du bâtiment. Construit à flanc de colline, l'auberge est composée de trois bâtiments entourant une cour. L'un des bâtiments semble être l'écurie, la portion de cour attenante est d'ailleurs recouverte d'herbe où paissent les montures craignant moins le froid. Je surprends d'ailleurs de biens étranges animaux parmi la petite dizaine de chevaux : on dirait des ... chèvres ? Non, pas des chèvres, des boucs. Cela fait bien longtemps que je n'en ai pas vu -autrement que rôtis à la broche ou en tourte bien entendu-. Je devais avoir quoi, 8 ou 9 ans quand mon père était rentré d'une bataille au Nord des duchés, avec un groupe de Torkins, tous montés sur des boucs de guerre, autrement plus épais que les trois spécimens qui paissent ici.

Je démonte et laisse ma monture à un jeune palefrenier, à peine mon âge et encore même pas certain, aux cheveux courts et sales, et aux tâches de rousses plus nombreuses sur son minois que l'autre rouquin de Gramefeux. Avec un sourire, il s'incline en prenant les rênes, s'adressant à moi comme à une grande dame. Je soupire en comprenant clairement ce que voulait dire Iraën en m'incitant à me changer. Ma robe de cérémonie et ma cape de soie ne conviennent manifestement pas aux voyages, et encore moins à une voyageuse pauvre sans titre. Cette impression n'est qu'amplifier au moment où je rentre dans le bâtiment au Nord de la cour, d'où émerge le plus de bruits. C'est la taverne, dont le réfectoire est assez rempli. Un rapide coup d'oeil me permet de déduire qu'une compagnie vient de rentrer de batailles, car plus de la moitié de la troupe rassemblée ici porte mailles, cuirs et surtout tabards. Sur leur tenue crasseuse, maculée de terre et de sang, les armes de Bouhen : gueules, azur et deux épées croisées. Il vaut mieux des gardes et des soldats que des bandits ayant fait leur journée en détroussant des pauvres demoiselles ressemblant à moi à l'heure actuelle. Je n'ai pas eu le temps d'avancer pour aller jusqu'au comptoir qu'un homme, portant un tablier aussi propre que le sol s'avance vers moi. Manifestement, il s'agit de l'aubergiste, je souris en songeant qu'il s'agit d'une bien étrange courtisane.

"Et ça sera quoi pour la petite dame ?"
"Une chambre, et un repas."
"Vous voyagez seule ?"
"Euh... Oui."
"Nous n'avons pas de chambre, mais vous devriez trouver un lit dans le dortoir. Celui au fond est réservée pour les femmes. La soupe sera prête d'ici une demi-heure. Si vous voulez vous rafraîchir, y a un bac d'eau à l'étage."

Une réplique intéressante ne me vient qu'une fois que l'homme s'est éloigné, dommage, il faudrait que je les note pour les sortir au besoin. Aiguisé mon esprit à réagir vite et bien comme me disait mon père est un art difficile à maîtrise quand votre nourrice autant que votre précepteur vous apprend à vous taire en présence d'adultes ou d'enfants mâles de noble naissance. Ce n'est pas les enfants des domestiques qui auraient pu trouver des choses à redire, vu qu'on les poussait -voire même plus que ça- à se taire en ma présence, car "on ne parle pas à une dame, sale morveux !" comme disait Iraën. Moralité, il va falloir que je travaille ça, je suis certaine que la langue commune peut devenir une arme quand elle est aussi bien maniée que les lames ou la magie. Il faudra d'ailleurs que j'apprenne aussi à la contrôler cette peste-là. Nous n'avions guère d'ouvrages à la maison sur le sujet, aussi je n'en sais finalement presque rien.

Mais bon, pour l'instant, je traverse la pièce en direction du dortoir. Je monte l'escalier de pierres brutes jusqu'à l'étage. J'atteins une salle vide pour l'instant, chauffée uniquement par la cheminée en-dessous, où sont étalées des bottes de pailles, des couvertures de laines voire l'une ou l'autre peau de mouton, à moins que ça soit du kaesch, courant dans la région. Moi qui voulait vivre à la dure, comme dans les romans d'aventure, je suis pour ainsi dire comblée. Au moins, ici, ce n'est pas le confort qui me tuera. Je parviens à une seconde pièce, séparée de la première par un simple rideau de toile tendu. Le dortoir des femmes est exactement le même que celui des hommes : de la paille, de la laine et des peaux de bêtes. A part que nous sommes comblées par la présence de coussins, en laine eux aussi, fourrés très certainement à la laine, voire au foin ou avec des restes de vêtements. Deux femmes sont là, correspondant d'un coup au nom de l'auberge. Maquillées à outrance avec les joues et les lèvres d'un rouge cerise, des robes simples aux larges laçages pour souligner des hanches rondes et une poitrine opulente.

"On peut faire quelque chose pour toi, princesse ?" me demande l'une des deux en train de réajuster son maquillage avec un miroir en métal.

La consigne d'Iraën me revient à l'esprit, il faut que je me change, hors je n'arriverais jamais à ôter ce maudit laçage toute seule.

"Oui, j'aurais besoin d'ôter cette robe."

Je détache ma cape que je lâche au sol, sur une des paillasses et désigne mon dos aux deux femmes.

"T'as pas de servantes pour le faire ? On est pas tes chiennes, hein !"
"Euh non... Je..."

Le passage à une vie de simple femme est plus compliquée que prévu, mais je ne vais pas m'arrêter à la première difficulté. Certes, je suis habituée à me faire vêtir depuis que je suis toute petite, mais ce temps-là est révolu. Je prie pour qu'Iraën m'ait trouvé une tenue plus simple à porter, que je puisse m'habiller toute seule au moins. Cette robe est certes magnifique, très bien taillée, mais je ne vais pas pouvoir la garder, pas pour la vie qui m'attend. Je fouille dans mon sac, pour savoir les vêtements que celui qui se faisait passer pour mon lige m'a trouvé. Ce que je découvre me surprend mais m'agrée parfaitement. A croire qu'il avait prévu que je doive partir dans ces conditions. A coté d'une robe et d'une sous-robe à l'étoffe plus lourde et plus commune que ma robe de fiançailles, il m'a trouvé une tenue d'homme : bottes légères, pantalon brun, chemise bleue vieillie et tunique de cuir. L'idéal pour traîner dans les champs, les bois ou à cheval je suppose. J'en profite pour ranger ma dague de femme dans le sac, je la glisserais dans le corsage de la tunique dès que je me serais changée.

Il ne me reste plus qu'à me déshabiller, et pour cela il me faut délacer ce maudit corsage dans mon dos, que les deux femmes refusent de toucher. Une troisième femme est venue les rejoindre. Elle est plus menue, plus fine que les deux premières, et dois avoir au maximum deux ans de plus que moi. Son visage est fin et une fois débarbouillée à l'eau froide des bacs, elle paraît presque belle. Je la détaille un instant, et une idée me vient à l'esprit, qui me permettrait de me débarrasser de ma robe, autant au niveau du laçage que du passé encombrant qu'elle représente.

Je m'approche de la nouvelle arrivante et lui chuchote à l'oreille :
"Dis, j'ai besoin de toi. Tu m'aides à ôter cette robe, et je te l'offre. Ca te convient ?"

Ses yeux s'éclairent brutalement, on peut tout acheter à prix de l'or disait mon père, et pour des femmes du peuple, ma robe doit bien valoir une solde de quelques journées. Aussitôt dit aussitôt fait. Je me retrouve en sous-vêtements entrain d'aider la jeune courtisane à enfiler mon ancienne tenue. En serrant bien les lacets, elle finit par se retrouver telle une magnifique jolie dame, dans une robe de soie bleue tandis que les deux commères médisent allègrement.

"Elle va pas s'faire égorger au moins notre petiote ?"
"Tu lui as filé ça pourquoi ?"
"Je n'en aurais plus besoin." réponds-je brièvement en enfilant la tenue d'homme prévue par Iraën.

Certes, le pantalon est nettement moins agréable que la jupe, et sert plus les cuisses, mais pour le haut, j'y gagne plus que nettement en confort qu'en portant cet abominable corset qui m'étouffait le ventre.

"J't'ai d'jà vu, non ? Tu viens d'où ?"
"De Melicera. Et ça m'étonnerait beaucoup qu'on se soit déjà rencontrées."
"Tu s'rais pas la fille du sieur et de la dame, toi, par Zewen ?"
"T'as p'tête bien raison. Comment qu'c'était son nom ? Naya, non ? Les hommes râlaient de rater le mariage à Bois d'Argent. T'rappelles, le capitaine l'en parlait hier soir !"
"Ouais, t'as raison. C'est bien Naya, elle a les yeux du Sieur, et ses ch'veux. Mais on dit qu'elle a une tignasse jusqu'à ses pieds."

Je ne peux m'empêcher dans un réflexe de porter la main à ma nuque où ce matin encore j'avais mon épaisse tresse. Ce geste ne passe pas inaperçu, me trahissant auprès des deux femmes.

"En effet, je suis bien Naya de Melicera, fille de Cyrial de Rougeaigues et d'Almaïs de Vifon. Comment me connaissez-vous ?" demandé-je avec un soupçon de curiosité autant que de mépris dans la voix.
"Je suis de Melicera. J'ai bossé durant dix ans pour dame vot' mère. On a été j'té par Adalric, votre onc'." m'explique-t-elle en crachant par terre au nom de ce dernier, "et on a fini ici à faire la femme à soldat. J'm'appelle Eloise, et elle s'est Blanche. La petiote, c'est Melisse. Et que fout la jeune Dame ici, à se nipper comme un homme ?"

Je souris, finalement, je ne suis pas si loin que ça de chez moi. Par contre, si je veux éviter de raconter mon histoire et faire oublier mon passé, il faudra que je réfléchisse sérieusement à m'inventer une nouvelle vie.

"Adalric a voulu me marier à Leoncel, le vieux maître d'armes. J'ai pas voulu, je me suis enfuie."
"Putain ! T'as fait ça ? T'es tarée, gamine. Le seul truc que tu d'vais faire de ta vie, c'est boire ce putain de calice. Et t'as r'fusé ? Tu t'es barré ? Tu comptes faire quoi, en v'nant ici ?"
"L'était si moche que ça, le gars ?"
"C'était le maître d'armes de mon père. Il a l'âge de mon grand-père, deux fois veufs et estropié de guerre. Ce n'est pas mon type d'homme, vous comprenez. Je souhaitais juste avoir un beau jeune guerrier pour lui faire des enfants tous aussi nobles que lui."
"Ouais, j'capte bien. Mais là, cherche pas les mômes nobles, hein. T'es jolie, tu pourras gagner pas mal. Mais bon, cherche pas à tapiner qu'les jeunes, ça paye pas et trop de chances d'avoir un marmot."
"Moi j'capte pas. T'as pas refusé l'vieux pour te faire mettre des mains par des soldats en mal de putains ?"

Plus la discussion avance, plus j'ai l'impression de louper une donnée importante. Je ne sais que trop bien ce que sont des courtisanes, énormément d'histoires parlent de ces femmes faites pour courtiser les glorieux soldats rentrant ou partant à la guerre pour tester leur foi vis-à-vis de leurs épouses. Mais là, d'un coup, j'ai l'impression que plus que de vierges tentatrices, elles...

Je pique un fard en comprenant soudain le rôle jouer réellement par ces dames de compagnie dans mes romans et je me retrouve idiote durant plusieurs secondes face à mes interlocutrices, en réalisant ce qu'elles sont : de simples filles de joie; destinées non pas à être juste des tentatrices mais bien à assouvir les passions des hommes.

"Non, je ne suis pas une femme de joie."
"Ca, on s'disait aussi que vu tes fringues, ça risquait pas. Pourtant ici, c'est bien à ça qu'ça sert !"

Mais bien sûr, les coussins et le rideau, c'était pas pour les femmes invitées, mais juste pour permettre un minimum d'intimité à ces couples d'une nuit. La méprise est encore plus grosse que prévue et je me retrouve dans une situation absolument rocambolesque.

"Y a un homme qui m'a envoyé ici. Avec un tablier."
"Geory, l'tôlier. Il t'a pas pris pour une ribaude. Prends tes frusques, on va voir Jeka, la dame des lieux et on va t'arranger ça."

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Dernière édition par Naya de Melicera le Dim 8 Mar 2015 22:09, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Route entre Kendra Kâr et les Duchés des montagnes
MessagePosté: Dim 8 Mar 2015 20:23 
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On descend par l'escalier au fond du dortoir, derrière les bacs d'eau froide. Celui-ci mène au fond de la cuisine, où nous attend la dénommée Jeka, ainsi que quatre bols de soupe et un peu de pain. Melisse est déjà là, soufflant sur sa soupe pour la refroidir. Jeka est une femme rude, à la face rubiconde et à la tenue d'un blanc aussi douteux que celui de son chiffon à la main.

"Vous ne serez pas trop de quatre aujourd'hui. Ils sont une bonne quarantaine, affamée, assoiffée et ils reviennent des combats. Profitez-en, ils ont reçu leur solde en arrivant, ils ont donc les sous et envie de filles."
"Jeka, y a une couille."
"Y en a quasiment une centaine. Heureusement, c'est de ça qu'tu vis non ?" s'esclaffe la tôlière.
"Putain, ta gueule un peu, Geory a fait l'couillon. La petite-là, c't'une cliente."

Jeka cesse alors de rire brutalement et me regarde de ses petits yeux noirs porcins, ne parvenant pas à croire ce qu'elle vient d'entendre.

"Et elle a de quoi payer la donzelle ?"

Je sors de ma bourse une pièce d'argent de dix yus, espérant que ça soit suffisant. Malgré la graisse, Jeka s'empresse de s'en emparer et de la mordre à pleines dents, pour en vérifier la véracité. Les yeux de la patronne me darde alors, cherchant sans doute à savoir d'où je tire cette somme, qui ne me semble pourtant pas aussi exorbitant que cela.

"Une deuxième comme ça et j'te file une chambre de servante pour la nuit, loin des hommes avinés. Ca te va ?"

Ignorant tout des tarifs courants pour ce genre de transactions, je ne cherche même pas à discuter et en sors une seconde pièce, que je dépose sur la table, sans pour autant ôter ma main. Voulant malgré tout tester ma capacité à négocier un minimum, je lance un :

"Et un repas chaud avec de la viande servi ici pour le même prix ?"
"Blanche, va lui chercher à bouffer. Et de la bière de table pour aller avec."

La courtisane se lève aussi sec et va me chercher un repas tandis que Jeka pose ses doigts boudinés sur ma pièce en argent en mordant dessus un coup. J'estime que pour un premier marchandage, je m'en suis honorablement sortie, d'autant plus quand je vois arriver une assiette bien copieuse comprenant une bouillie de blé et de navets et de la viande indéterminée nageant dans une sauce grasse encore fumante.

"Avec les excuses de Geory."

Je la remercie d'un sourire et trempe la cuillère en bois dans le jus brun de la viande. C'est brûlant, c'est... fade, terriblement fade. La nourriture n'est pas salée, du tout, et je n'ose pas en demander, persuadée que Jeka se ferait un plaisir de me faire payer ce moindre condiment. La sauce a un goût de cramé et la viande, loin d'être fondante comme je m'y attendais, à quelque chose proche du morceau de cuir. Sans le moindre doute est-ce de la vieille carne, possiblement de la viande venant d'une ancienne bestiole de traits, d'un vieux kaesh abandonné par son groupe ou, pire que tout de la nourriture faisandée.
Tant bien que mal, j'avale cette nourriture dégueulasse, regrettant déjà la tourte au pigeon au miel, le rôti de Kaesh à l'Amaratha ou encore le pâté de canard. Cependant, j'ai faim, et il faut que je fasse honneur à mon hôte. Je parviens donc à la fin de mon assiette, digérant cela tant bien que mal avec un verre de bière qu'il ne me faut qu'une gorgée pour reconnaître : de la barbar. Je vais pour remercier Blanche, mais les jeunes femmes sont déjà parties travailler dans l'autre partie de l'auberge d'où s'élève des cris et des chants, et le bruit tellement typique des chopes heurtant le bois des tables.

"Nous sommes les nains sous la montagne
On creuse le jour, on boit la nuit
Et on aime pas ceux dla surface !"


L'accent est impossible à confondre : c'est celui d'un véritable Torkin de Mertar, ce qui confirme la présence des boucs de guerre dans la prairie. Je profite de l'animation de loin, l'avantage des soldats et des Torkins, c'est qu'ils sont assez bruyants pour qu'on puisse suivre l'ambiance même avec un mur entre eux et nous. Je passe ainsi la soirée, assise, attendant que Jeka parvienne à dégager assez de temps pour me montrer où je vais pouvoir dormir cette nuit. Mais le travail d'une tenancière d'auberge a l'air bien plus dur que ce qu'imaginait et je finis par m'endormir sur la table en cuisine, éreintée par une journée trop longue et trop lourde en émotions.

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 Sujet du message: Re: Route entre Kendra Kâr et les Duchés des montagnes
MessagePosté: Dim 15 Mar 2015 16:51 
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Quand je me réveille, e suis sur et sous une pelisse de fourrure. La fenêtre fait tomber sur moi un délicat rayon de soleil, c'est la raison de mon éveil je suppose. J'ouvre mes yeux en m'étirant, mon corps courbaturé comme si j'avais dû dormir à même le sol, ou que j'avais fait plusieurs heures de cheval dans la journée d'hier. Il est encore tôt dans la matinée vu la luminosité. C'est l'odeur d'une bouillie d'orge au miel qui me fait retomber brusquement sur terre. Oui, j'ai dormi à même le sol, enfin plutôt sur une paillasse répartie sur un sol de bois; avec une peau de kaesh en guise de drap et une couverture en patchwork de bouloum d'un bleu grisonnant. Oui, j'ai chevauché hier soir depuis Melicera. Je suis seule, perdue et j'ai peur. C'est étrange, là comme ça, mais oui, j'ai peur, peur de ce qu'il va m'arriver aujourd'hui, peur de ce que je ferais demain, ne sachant même pas ce que je vais manger, ni où je dormirais à la nuit tombée. C'est maintenant que j'ai tout perdu que toute ma vie au manoir me semble si douce et si attirante.

(Non, je ne dois pas voir ça ainsi ! Aujourd'hui je suis libre, libre d'aller où je veux, libre de manger ce que je veux, libre d'aller dormir à la belle étoile si cela m'agrée, ou dans une auberge !)

C'est empreint de cette nouvelle détermination que je me lève et me rafraîchit (et le terme est bien choisi) au bac d'eau laissé à ma disposition. Usant de mes doigts, à défaut de peigne, je démêle ma coiffure, heureuse de les avoir coupé hier, même si mes longues mèches blondes me manqueront malgré tout. Je m'habille comme la veille au soir : ma tunique bleue, mon pantalon et mes bottes de cuir. Je ne regretterais par contre pas les corsets bien trop serrés qui empêchaient quasiment de respirer et que l'ont m'a forcé à porter depuis deux ans déjà, marquant mon passage d'enfant à jeune femme. Il paraît que c'est plus confortable pour la poitrine, mais bon, je verrais ça plus tard, ce n'est pas comme si la mienne avait une taille suffisante pour avoir besoin d'être soutenue non plus.

Je passe ma cape bleue et attrape mon sac avant de descendre et de traverser la cour vers la salle principale. J'ai fini par faire ce trajet dans le sens inverse hier en fin de nuit, quand Jeka a réussi à trouver du temps à m'accorder et a pu me conduire à la chambre de bonne. Les soldats sont sur le point de partir, tous massés non loin de l'écurie. Je partirais pour ma part après m'être restaurée. Il faut d'ailleurs que je vois si Jeka aurait de la nourriture que je pourrais emmener pour ce midi, comme une bouteille de ma barbar favorite, du pain ou du jambon.

"Un bol de bouillie, m'dame ?"
"Bien volontiers !"

Je m'installe à une table vide, sans les soldats ni les marchands, l'auberge est beaucoup plus calme. Melisse et Blanche viennent se joindre à moi, ce qui me permet d'apprendre que les marchands viennent à peine de partir, il y a peut-être une demi-heure de cela que les Torkins et une partie des soldats ont quitté la place à l'aube. Les autres ne devraient guère tarder d'ailleurs et elles me conseillent de me joindre à eux. Peu de chance d'agression, au pire quelques plaisanteries un peu grivoises, et surtout cela réduit à néant les risques d'attaque de brigands, pour qui je représenterais une cible facile et donc attirante. J'apprécie la suggestion et avale mon bol d'autant plus vite. Moins d'une demi-heure plus tard, je rejoins l'écurie, avec de quoi tenir deux repas de plus dans mon sac : un morceau de saucisson, du pain, du fromage sec et une gourde de vin aux épices.

"Aucun doute possible, il s'agit bien de ce cheval-ci !"

Je m'approche du groupe de soldats, toujours stationnés près de l'écurie, occupés à sceller les chevaux dans le pré. J'ignore de quoi parle le capitaine un peu plus loin avec le lad et vais vers son second, occupé avec sa propre monture :
"Bonjour, vous vous rendez bien à Bouhen ?"
"En effet, que pouvons-nous pour vous, demoiselle ?"
"Je voudrais juste savoir si je peux voyager avec vous."

"Reste à savoir qui est venu avec. Vous pouvez m'aider ?"

"Oui, bien sûr. Vous faites bien, la route n'est pas sûre. Vous avez une monture ?"

Je tourne la tête pour répérer Céleste et répondre au second, quand je la repère... à coté du capitaine et du lad, celui-là d'ailleurs répond au premier :
"C'est celui de la jeune fille là-bas. Qui discute avec votre second, m'sire !"

Je réalise brutalement qu'ils parlent non seulement de ma monture... mais aussi de moi. Le second a entendu aussi bien que moi les paroles du jeune garçon et pose sa main gantée de manière ferme sur l'épaule. Etrangement, ce geste n'a absolument rien de rassurant.
"C'est votre cheval, le noir et palomino ?"
"Oui, c'est Céleste."

Au regard du capitaine qui s'est approché de nous en tenant ma jument par les rênes et à la fermeté de la main qui tient désormais mon épaule et ma cape, je comprends que quelque chose ne se passe absolument pas comme prévu.

"Bien essayé de vouloir voyager avec nous. Mais votre cheval est trop reconnaissable pour que ça passe. En même temps, quel idée de vouloir voler un cheval de pure race avant de s'enfuir..."

Voler ? Comment cela voler ? C'est mon cheval, mon père me l'a offerte, elle n'était encore qu'un poulain. Ne me dites pas que ce jeune prétentieux qui a récupéré le manoir a osé considérer que j'avais volé ce cheval, mon cheval ? Et pourquoi pas mon diadème ou le collier de ma mère tant qu'il y est ?

"Non, c'est ma jument, je ne l'ai pas volée. Elle se nomme Céleste et ses fers sont marqués d'une abeille, celle du forgeron de Melicera !"
"C'est bien ça. C'est bien la jument dont le vol a été déclaré par messire Aon de Gramefeux !"

(Oh le... )

Je réalise que je n'ai pas de mots de vocabulaire pour décrire ce à quoi il me fait penser là sur le moment. Pourtant il doit bien exister des mots pour exprimer le dégoût en nommant un individu absolument affreux comme celui qui aurait pu devenir mon suzerain. Finalement, je suis d'ailleurs bien content que ça ne soit pas lui avec qui mon oncle comptait me fiancer.

"Mais c'est ma jument. Demandez aux villageois, ils vous le diront !"

Je suis au bord des larmes, une accusation de vol de chevaux à un noble n'est pas n'importe quoi. Je pourrais me faire couper la main, me faire fouetter ou passer plusieurs jours dans un cachot sale et puant pour ce crime. Ce n'est pas ainsi que commence les histoires et les récits de vierges aventurières, du moins pas celles qui finissent bien. Et je n'ai pas envie de devenir une folle aveuglée par le sang de la vengeance, terrifiante par la rage. Non, je veux juste être une aventurière qui parcourt les routes en faisant le bien et en aidant ceux dans le besoin.

"Nous ne sommes pas de la milice; nous leur laisserons faire l'enquête."
"Nous l'emmenons à Bouhen. La milice s'occupera bien d'elle en attendant le jugement. Et nous saisissons le cheval au passage, ils la ramèneront jusqu'à Melicera."

Bon, voyons le point positif, je vais être emmenée à Bouhen. Au moins, il y a peu de chance que je tombe dans une embuscade de brigands escortée par ces soldats. Par contre, je n'apprécie que peu l'idée de faire le trajet littéralement attachée à un énorme percheron. Mais ce n'est pas comme si on me laissait réellement le choix. Ce n'est que grâce au second que j'évite le trajet façon ballot de pommes de terre en travers de la selle. On me fait grimper sur un immense cheval beige scellé juste pour moi. Une corde bien relier mes pieds entre eux sous le ventre de la monture, non sans m'attacher au passage aux étriers, tandis qu'une autre corde vient serrer mes poignets devant moi, au pommeau de la selle. Et c'est ainsi que, prisonnière, je quitte l'auberge de la courtisane vers Bouhen.

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 Sujet du message: Re: Route entre Kendra Kâr et les Duchés des montagnes
MessagePosté: Dim 15 Mar 2015 18:05 
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J'ai nettement moins le goût au trajet qu'en arrivant à cette auberge. Entourée d'hommes en armures, je devrais être à l'aise et rassurée, mais dans la posture où je suis, c'est plutôt l'inquiétude qui prédomine. Je ne sais que trop bien que le procès, s'il y a, tournera en la faveur d'Aon, je ne suis plus rien et lui est noble et d'une grande famille. Si je veux vivre libre, je dois prendre mon courage à deux mains, et arracher cette liberté à ces soldats. Mais cela est loin d'être sans danger, il me faudra trouver le bon moment, en sachant qu'une fois aux portes, ça sera trop tard ! Et que nous sommes à peine une journée de marche de la ville, nous devrions y être à la tombée de la nuit, au maximum.

Je regarde vaguement le paysage, la route pavée longe la fleuve où s'écoule placidement l'eau turquoise devenue brune par les alluvions. Les troncs venant de la forêt suive les longs méandres, ils serviront à faire des navires, des maisons ou des machines de guerre, je ne sais pas trop bien d'ailleurs; peut-être même les trois d'ailleurs. De l'autre coté du fleuve, nous pouvons apercevoir parfois un troupeau place de Kaesh, ces grands herbivores aux poils longs, même si c'est pour l'essentiel dans la plaine kendrane qu'on les trouve.

Quand le décor achève de me lasser, je me tourne vers les cavaliers qui m'entourent. Une troupe d'une petite dizaine de têtes, tous à la peau burinée par de nombreuses heures au soleil. Certains portent des marques de blessures récentes, mais bien entretenue comme des bandages propres visibles sous les casques ou au bras. Certains chevaux portent eux aussi des traces d'emplâtres et de plaies en cours de cicatrisations. Il y a d'ailleurs en plus du mien, cinq autres chevaux sans cavalier. Sans doute leur propriétaire est mort à la guerre, comme l'est mon père. Il ne fait guère de doute dans leur attitude, y compris celle du capitaine et du second, qu'il s'agit d'une escouade épuisée revenant de la guerre. Les armures elles aussi montrent des défauts : des mailles ouvertes, des sangles coupées et remplacées tant bien que mal par de la corde, ou encore des gambisons crevés d'où la paille s'échappe.

Depuis combien de mois ces hommes n'ont-ils pas vu leurs femmes et leurs enfants ? Combien d'entre eux ont déjà perdu un frère ou un père à la guerre ? A qui appartenait ces montures et même celle sur laquelle on m'a fait monter ? Combien des cavaliers chevauchent en réalité le cheval d'un ami mort au combat pour remplacer leur propre monture, morte elle aussi sous les flèches ou les sorts ennemis ?

Ce n'est qu'en fin de matinée qu'un changement brusque s'opère dans le groupe. Une forme de tension vive s'installe soudain et les instincts de ses guerriers se réveillent tout aussi vite : un bruit de métal contre du métal parvient jusqu'à mes oreilles. Bien que n'ayant jamais connu la guerre et le combat, les Dieux m'en préservent, je ne sais que trop bien qu'il ne s'agit pas ici d'une louche contre une marmite.

Le chevaux sont mis au trot, et au tournant suivant, à l'endroit où la route longue un bois plus épais que les autres, la situation s'éclaire brutalement : une quinzaine d'individus, vêtus de cuir sombres sont entrain de combattre ou de massacrer un groupe d'à peu près autant de marchands, luttant comme ils le peuvent, n'ayant aucune possibilité de fuir sur leurs chars à boeufs. Un homme est couché à terre dans la poussière de la route, une flèche dans les omoplates. Rien qu'en le voyant, je ne doute pas une seconde de son trépas.

"Un combat, allons-y, soldats de Bouhen !"

Plus de la moitié de la cavalerie vient de s'élancer, épée au clair. Je me retrouve en réalité seule avec un garde unique, un joli jeune homme, qui doit avoir au maximum 4 ou 5 ans de plus que moi, et encore. Les cris des combattants et des victimes devant moi me tournent la tête, non ce n'est vraiment pas ce que j'attendais comme aventure et j'ai bien l'intention de vivre et non de mourir comme les soldats, les brigands et les marchands qui sont peut-être à cent mètres devant moi.

Dans un geste quasiment instinctif de défense, mes mains, toujours attachées, se portent à la petite dague que les gardes ne m'ont pas ôté -pas plus que mon sac d'ailleurs-. La présence de cet acier froid me rassure, je cherchais une ouverture, la voilà !

(C'est parti.)

J'ai passé une bonne partie de la journée à réfléchir à la possibilité que pouvait m'offrir la magie qui coule dans mes veines. Dans ce que j'en avais lu, la magie fonctionne sur un système de fluide basé sur les éléments, chaque fluide appartient à un élément et le mage peut, par la force de sa pensée, le convertir en magie, en lui donnant une forme. Il s'agit donc, à partir de là, à comprendre comment chaque élément intervient dans le monde pour se faire une idée des possibilités de chacune des facettes de la magie. Les Dieux m'ont offert la foudre d'après ma découverte de la veille. Je peux donc toucher malgré le métal voire même grâce au métal. Mais ce n'est pas le soldat que j'aimerais bloqué là, mais son cheval. Si je parvenais à immobiliser sa monture, ou à la tuer, je pourrais partir au galop sans qu'il puisse me rattraper aisément.
Dans ce que j'en ai vu face à Aon de Gramefeux, l'électricité a l'air de faire réagir de manière étrange les muscles, son bras se contractait tout seul quand il est tombé sous la surprise. Si je fais donc glisser de l'électricité dans la cuisse de sa monture, au pire, elle partira au galop, incontrôlable, au mieux, il s'immobilisera. Quelque soit le résultat, j'y gagnerais pour m'enfuir. Je lance une courte prière à Yuia pour qu'elle m'offre le sang froid qui va m'être nécessaire durant les prochaines minutes.

Je sors ma dague pour libérer mes poignets, dont les cordes sont très lâches. Le second n'a manifestement pas vu en moi un quelconque danger. Une fois libérée de mes entraves, je dégage aussi mes chevilles, pour plus de confort. Je coupe la corde qui sert de longe, tout en gardant l'autre extrémité en main, pour maintenir une tension constante. D'un mouvement de cuisse, je fais comprendre à mon percheron qu'il faut qu'il avance, au moins de quelques pas. Je raccourcis au fur et à mesure le lien avec le garde, pour ne pas l'alerter de mes mouvements. Il semble d'ailleurs trop bien concentré sur le combat qui se joue en bas pour me prêter attention. Pour la première fois depuis bien longtemps, je suis contente qu'un jeune homme ne s'occupe pas de moi d'ailleurs.

Arrivée à proximité de la croupe de la monture du soldat, je cherche à rassembler ma magie. Etrangement, alors que je ne l'ai jamais fait volontairement, cela me paraît très simple, instinctif comme le fait de respirer. Je sens mes fluides qui viennent me chatouiller les doigts, si la sensation n'est pas désagréable, elle n'est pas non plus agréable en tant quelle, proche des fourmillements que l'ont peu parfois ressentir. Je cherche alors à visualiser l'idée du sort : des petits éclairs pour faire se contracter la cuisse de son cheval, rien de plus. Manifestement cette étape-là est plus complexe que prévue. Car si je sens bien mes fluides se sauver de mes doigts, rien ne semble vouloir se produire. Je peste intérieurement et recommence à mobiliser mes fluides.
Ce coup-ci, il faut pas que je me rate, ou il va finir par s'en rendre compte et là, je serais dans une très mauvaise posture. La détermination vient s'ajouter aux éclairs. Je ne veux pas blesser, je veux contracter cette foutue croupe. Je veux que ce cheval parte en courant...

Le résultat n'est pas réellement celui escompté, mais cela marche quand même. Loin de s'enfuir, le lourd percheron du guerrier est pris d'un spasme sur sa croupe qui le fait se dresser brutalement, mon sort l'a fait se cabrer et évacuer son cavalier à quelques mètres derrière lui au milieu des autres montures, qui affolées, se mettent à ruer, et à hennir de colère. Je ne prends pas le temps d'en voir plus, la situation est désormais idéale et plus rien ne m'empêche de partir, loin de préférence.

Sans rênes, je m'accroche à la crinière et à mon pommeau et, hurlant d'excitation sous ce premier exploit, je lance mon immense cheval de guerre au galop hors de la route. Je contourne le bois par le sud, laissant à ma droite les soldats, les brigands et les marchands. Mélisse m'a expliqué que les fantassins et les Torkins sont partis à l'aube, soit environ trois heures avant nous. Il vaut mieux pour moi que je reste à distance donc de la route, si je ne veux pas tromper sur le second groupe qui est encore devant nous. Je ne doute pas qu'ils sachent reconnaître un cheval militaire et je n'ai aucune envie de me faire arrêter alors que je viens tout juste de retrouver ma liberté si chèrement acquise. Plus heureuse que jamais et bien décidée à écrire ma propre histoire, qui ne ressemblera à aucune autre, je me mets à chanter :

"Libérée, Délivrée
C'est décidé, je m'en vais
J'ai laissé mon enfance en été"


Je les double au final peu après midi, les boucs broutant sur la colline derrière laquelle je passe en sont la meilleures confirmations. Je me décide de rejoindre la route quelques kilomètres plus loin et mets mon cheval au pas, il a bien besoin de se reposer et moi je commence à avoir faim de ma folle cavalcade. Sans cesser d'avancer, ne voulant pas prendre le risque de m'arrêter et d'être rattrapé par les soldats, je déguste mes vivres et profite -et largement- de ma gourde de vin. Certes, je lui préfère de loin la cervoise et la bière brassée que je déguste depuis plusieurs années, mais ça reste désaltérant.

La suite de la journée s'avère paisible, et la nuit est, comme prévue, quasiment tombée quand j'arrive en vue des portes de Bouhen. Ne doutant pas la moindre seconde que mon cheval sera reconnu par les gardes, je l'abandonne dans un champ, avant de finir à pieds. Cette dernière heure de marche est épuisante, mes jambes n'ont guère l'habitude d'une telle sollicitation cumulée avec les heures de chevauchées.

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 Sujet du message: Re: Route entre Kendra Kâr et les Duchés des montagnes
MessagePosté: Mar 24 Mar 2015 13:42 
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L'homme sourit, mais ses paroles ne sont en rien sympathique :

« N’essaie pas de jouer à la maligne avec moi, tu veux ? Bon, de toute façon, il ne faut pas perdre de temps. On part dès cette nuit. Endormez les... »

Le dernier commentaire à de quoi laisser perplexe... mais tu comprends finalement assez bien ce qu'il voulait dire après t'être réveillée, nauséeuse et la tête douloureuse, dans une charrette sur la route. Tu es étendu à l'arrière, avec la dénommée Cawen. Celle-ci est déjà réveillée et te fixe comme si elle pouvait te réduire en cendre par la seule force de son regard.

Autour de vous, il y a un bazar d'objets divers, tous bâchés et donc inidentifiables.

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 Sujet du message: Re: Route entre Kendra Kâr et les Duchés des montagnes
MessagePosté: Lun 30 Mar 2015 20:52 
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La tentative échoua lamentablement, l'homme n'était pas aussi âgé qu'Itsvara, mais cela ne l'empêchait pas d'avoir suffisamment de jugeote pour ne pas tomber dans le piège tendu. Il lui sourit avec malveillance avant de lui répondre :

"N’essaie pas de jouer à la maligne avec moi, tu veux ? Bon, de toute façon, il ne faut pas perdre de temps. On part dès cette nuit. Endormez-les…"

"Malgré l'heure tardive, je ne su…"

Sa remarque fut interrompue par un violent coup à l'arrière du crâne et elle s'écroula lourdement. La métisse subit le même sort et, toutes les deux, se retrouvèrent allongées, l'une contre l'autre, à l'arrière d'une charrette en route pour une destination inconnue.
Le crâne d'Itsvara balançait au gré des cahots, augmentant ainsi la douleur lancinante qui le tambourinait. Elle observait autant que faire se peut le décor. Un ciel dégagé, une charrette chargée de multiples objets, tous bâchés. Les trois ravisseurs étaient hors champ de vision et elle présuma qu'ils étaient tous à l'avant. L'espace d'un instant, elle ressentit la lassitude d'être encore une fois enlevée, impuissante, inutile. Elle s'inquiéta ensuite pour le petit Gabriel, laissé à son sort à Kendra Kâr. Arriverait-il à s'en sortir sans elle ? Elle soupira d'ironie. Bien sûr qu'il s'en sortirait, il le faisait déjà avant de la rencontrer. Elle devrait mieux se préoccuper de son sort.
Une fois encore, elle tira comme elle put sur le cordage qui maintenait ses mains, sans succès. Elle tapota alors du pied la bâtarde Cawen et lui chuchota :


"Essayons de se détacher l'une l'autre, non ?"

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 Sujet du message: Re: Route entre Kendra Kâr et les Duchés des montagnes
MessagePosté: Lun 30 Mar 2015 20:57 
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La semi-elfe plissa les narines :

« Ah oui ? On est au beau milieu de nul-part, tu comptes faire comment pour filer sans qu'ils nous voient ? »

Elle parlait néanmoins à voix basse, pour être sûr de ne pas être entendue. Heureusement, les sabots des chevaux étaient assez bruyants. A l'oreille, tu en discernais sans doute deux pour tirer la charrette et un autre qui cheminait à côté.

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 Sujet du message: Re: Route entre Kendra Kâr et les Duchés des montagnes
MessagePosté: Sam 4 Avr 2015 17:07 
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Itsvara contint un soupir de lassitude lorsque sa compagne d'infortune lui répondit, prenant garde à ne pas l'emporter sur le bruit des sabots percutant la chaussée.

"Ah oui ? On est au beau milieu de nulle part, tu comptes faire comment pour filer sans qu'ils nous voient ?!"

Cette réponse délimitait les capacités d'une personne engluée dans l'action, incapable d'analyser les faits de manière à anticiper les futurs possibles événements.
La Sindel aurait aimé présenter, même succinctement, son raisonnement et les multiples voies qu'elle voyait s'ouvrir devant elles, mais elle se convainquit de la faiblesse d'esprit de ce sang mêlé et lui chuchota simplement :

"Ce n'est pas forcément pour fuir immédiatement. Mais admettez que nous aurons plus de facilités et de possibilités à le faire sans avoir les mains entravées.
Tenez ! Cela pourrait s'avérer utile ne serait-ce que pour jeter un œil à ces paquets et ainsi en déduire qui sont ces hommes et ce qu'ils recherchent."


Elle marqua une courte pause, et questionna à nouveau la jeune femme :

"À part essayer de voler les bibliothèques, avez-vous des habilités particulières qui puissent nous être utiles ?"

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Dernière édition par Itsvara le Jeu 23 Avr 2015 23:37, édité 2 fois.

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 Sujet du message: Re: Route entre Kendra Kâr et les Duchés des montagnes
MessagePosté: Sam 4 Avr 2015 18:03 
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L'autre hausse les épaules.

« Et si on ne trouve pas d'ouverture et qu'ils nous voient détachés, on va prendre cher ! Vous n'avez donc jamais appris à réfléchir ? Quand à ces paquets, je sais très bien ce qu'ils contiennent ! »

Vous êtes interrompues par la voie du chef de la bande. Celui-ci vient se placer derrière le chariot et vous sourit :

« Les filles, nous voilà à destination. L'antre de notre chère Cawen ! »

Le chariot entre dans ce qui semble une grande ferme abandonnée. Vous êtes entourés de bâtiments passablement délabrés. Le toit d'une grange de bonne taille a été partiellement remplacé par une toile cousue.

Alors que le véhicule s'arrête le long de cette grange, l'homme aux cheveux gris saute à bord et entreprend de vous détacher.

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 Sujet du message: Re: Route entre Kendra Kâr et les Duchés des montagnes
MessagePosté: Dim 5 Avr 2015 22:16 
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La courte pause d'Itsvara leur avait permis d'appréhender leur environnement sonore. Les roues de la charrette glissaient entre les pavés, secouant, par soubresauts, les paquets et leurs voisines. Au claquement des sabots, on reconnaissait deux chevaux pour conduire ce convoi et un autre sur le côté.
À la dernière question posée, la métisse haussa les épaules, frôlant celles d'Itsvara. Cette dernière était persuadée d'être, comme toujours, détentrice de la sagesse omnisciente. Aussi, lorsque Cawen lui répondit :

"Et si on ne trouve pas d'ouverture et qu'ils nous voient détachées, on va prendre cher ! Vous n'avez donc jamais appris à réfléchir ? Quant à ces paquets, je sais très bien ce qu'ils contiennent !"

La Sindel se renfrogna une demi-seconde avant de hocher la tête d'assentiment. Une multitude de nouvelles options s'ajoutaient à son schéma de pensées. Il est vrai qu'elle aurait pu lui demander quelques renseignements avant d'échafauder des théories. L'analyse de la bâtarde, était enrichie d'une expérience qu'elle ne possédait pas et, peu à peu, elle réalisait qu'elle était incapable de maîtriser les diverses voies qui s'ouvraient devant elle.

Elle s'apprêtait à lui faire part de l'évolution de son avis, toutefois toujours porté sur la nécessité de se détacher, quand une secousse nette se fit ressentir et s'arrête peu après. Autour de la charrette, un nuage de poussière s'élève avant de s'effacer pour laisser la place à l'homme aux cheveux d'argent.

"Les filles, nous voilà à destination. L'antre de notre chère Cawen !"

Sur ces mots, il les rejoignit et les desserra leurs liens, en commençant par Itsvara. Elle n'eût nulle envie de s'échapper ou de lutter ; Cawen avait raison sur un point non négligeable : Elles étaient incapables d'affronter physiquement ces trois malfrats. Elle s'assit, son corps lui rappelant immédiatement les coups qu'elle avait subits à la bibliothèque, et observa la demeure ; du moins ce qui devait en avoir porté le titre à une époque.

Une ruine. Voilà la première impression qui frappe l'esprit d'Itsvara. Les bâtiments, formant un ensemble de taille honorable, sont en triste état. Ici, un pan de mur qu'une fissure parcourt jusqu'à en décrocher les pierres des dernières assises. Là, un lierre qui engloutit toute une façade.
De la pitié. Telle était la seconde sensation qui envahit les pensées et le corps d'Itsvara. Pour Cawen qui, comme Gabriel, n'avait pour seul monde que la misère et la survie. Elle comprenait mieux pourquoi elle était si incommodée à la bibliothèque.


Elles furent extirpées de la charrette, arrêtée à côté d'une longue grange délimitant un côté de la cour. La poussière, la caillasse et la végétation folle du chemin semblaient se prolonger sur tout le bâtiment. Le toit était en grande partie éventré et une toile cousue en recouvrait une partie. Seule la porte dénotait du délabrement environnant.

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Dernière édition par Itsvara le Jeu 16 Avr 2015 23:54, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Route entre Kendra Kâr et les Duchés des montagnes
MessagePosté: Lun 6 Avr 2015 10:14 
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Alors que tu regardais autour, le chef demanda à ses deux sbires de vider la cargaison. Tu remarquas que Cawen, tout en exprimant toujours son dépit, présentait un très vif intérêt, et quand les bâches furent retirées, tu vit un dispositif étrange, qui n'était pas sans te rappeler de vieux souvenirs. Un système complexe de tubes et de récipients métalliques. Sans être une experte, il te semble bien... qu'il s'agit d'une petite centrale fluidique ! Comment un tel objet a-t-il pu arriver entre les mains de vulgaires humains ? Et que pouvaient-ils bien en faire ? Décidément, tout cela devenait de plus en plus étrange...

Les deux bandits commencèrent à débarquer la centrale qui était en trois grosses pièces détachées, et ils n'étaient pas trop de deux pour porter chaque pièce. Le chef ordonna à Cawen de les aider et elle se précipita pour s'exécuter.

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