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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Lun 8 Aoû 2011 09:22 
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[HRP] Suite 1




***




Odoacre vois-tu ça là-bas?

Oui... je n'ai jamais vu de chose pareille. Il va falloir en parler aux ancêtres. L'autre est blessé et il n'ira pas bien loin car elle ne pourra le soutenir longtemps.

Mais alors... allons l'aider, elle est trop be... Odoacre allez?

Nan ! ... On est trop près du domaine de la démone. Nous avons été stupides de suivre cette bestiole et cette chose devant nos yeux est peut-être une des créatures de Keresztur qui emmène ce guerrier en pâture, ou tout autre dessin sombre… alors...

Tu te trompes Odoacre regarde, elle ne serait pas si attentionnée, si affolée en jetant des regards dans son dos si c’était pour le sacrifier et…

Shut ! ... bouge plus... regarde !

Les chasseurs entraînés trop loin par la fuite de leur gibier étaient tombés sur le couple. C’est le bruit de pas de branches cassées et les murmures devant eux qui les avaient arrêtés. Tapis, en embuscade au-dessus des fuyards sur une saillie rocheuse, l’arc à portée de main, ils discutaient en messes basses sur la réaction à prendre.
La bête en avait profité pour prendre la poudre d’escampette. Les deux homme rentreraient bredouilles au grand d’âme de leurs aînés.
Ils se regardaient, se toisaient, incertains de l’attitude à prendre. Deux hommes, dont l’un à peine plus vieux d’une quinzaine de printemps, fougueux, le cœur tendre, curieux, aurait bien sauté à la rencontre de l’animal gris aux formes aguicheuses qui soutenait le géant blessé. Wulfar était fasciné depuis que ses jeunes yeux s’étaient portés sur l’Humoran.

Soudain, dans cette forêt abandonnée, une envolée de corbeaux s’égosilla en réaction au tonnerre de l’ost qui quittait le manoir de Keresztur en direction l’ouest. La Baronne allait-elle mettre un terme probable à la rumeur des villages saccagés et brûlés par les barbares roux du grand nord ?

Tout ça ne concernait en rien le clan des chasseurs. Ils vivaient chichement du produit de leur chasse, troquant les peaux et de menus objets aux bouseux qui occupaient ces terres sombres.
Partie insignifiante du troupeau d’esclaves au service de la démente Baronnie, ils jouissaient d’une certaine liberté en échange parfois de quelques renseignements glanés lors de leurs périples nomades.
Leur interlocutrice depuis quelque temps était une femme blonde, aussi ensorceleuse que jolie, douée pour les armes, bien trop jeune pour être générale d’une armée, mais... Cependant, les hommes la suivaient et lui obéissaient, corps et âmes.
Eux, chasseurs nomades, ils ne portaient pas dans leur cœur cette usurpatrice ténébreuse, sa patronne la Baronne, sournoise et machiavélique, sur qui tant d’histoires enrichissaient les rencontres et les veillées, celle dont-ils avaient peur, mais n’osaient l’avouer par fierté.
Donc, ils se faisaient petits, sauvages, itinérants et discrets ne perdant pas à l’esprit que leur condition était précaire et toujours en équilibre sur le plateau de la balance de Phaitos. Ils s’en contentaient, restant neutre et à l’écart.

Les deux hommes laissèrent passer l’ouragan, trop près du danger que représentait le domaine. Leurs sens en alerte, silencieux et concentrés sur le duo en dessous de leur position, ils patientaient. Les ressources animales avaient périclité depuis l'arrivée de la Baronne. La forêt s'était assombrie et les raides des orques et des barbares du nord avaient augmenté. Bien sur le manoir repoussait les invasions, mais depuis d'étranges choses traînaient, certains disaient que des hommes lézards hantaient les coins les plus sombres. Donc la prudence, la méfiance était de mise.


( C’est bien ma veine par Zewen, j’en peux plus il est lourd comme une montagne. Maudits archers…)

Thalos je vous en prie tenez bon, ne perdez pas conscience, je vais vous adosser là contre ces rochers et …


Hum ! ça va aller damoiselle, veuillez excuser ma maladresse et le fardeau que je représente pour vous, par Gaïa… Nous devons avancer, nous éloigner… du danger…

L’assourdissante armée défilait au loin à la lisière de la forêt. Thalo se redressa, étouffant un râle de douleur, tendit l’oreille comme s’il était en pleine possession de ses moyens et déposa un doigt sur les lèvres de la jeune femme qui allait protester.

Voilà au moins une chance pour nous. Si jamais cette armée est lancée vers un but plus important que la fuite de deux vagabonds… ce que je crois, alors rassurez vous… Jeune damoiselle, ça va aller, je tiendrai, avançons…

Il détourna la fente de son casque de l’attention de N’Kpa, retint une grimace de douleur, que le heaume salvateur dissimula à merveille. Il sentait le liquide chaud s’échapper de la plaie de son omoplate gauche et dégouliner sous son armure. Le carreau était profondément fiché et chaque mouvement de son bras était une douleur effroyable. Seule sa volonté guerrière, le soutien de son engagement envers Rosa, l’aide de l’Humoran, le poussaient à aller de l’avant.
Il se maudissait d’avoir entraîné la Shaakt et l’Humoran dans cette mésaventure :
Oh pardon Rosa… mais il m’était impossible de laisser cet homme de fois bafoué sans agir. Gaïa ne me l’aurait pas pardonnée, moi non plus…
Le guerrier maugréait son repentir, à la limite du délire. Il se devait de survivre pour remplir sa tache, mais cela devenait de plus en plus difficile.

L’armée passa son chemin, la forêt redevenait silencieuse, pas un son, pas un cri. Mais c’était sans compter dans les capacités de l’Humoran. La jeune femme se redressa, ses oreilles pivotaient en tout sens. Son nez en l’air, ses cellules olfactives cherchaient, analysaient l’odeur musquée que la petite brise tournante venait de lui offrir.


Wulfar, elle a senti quelque chose, elle nous a repéré. Retirons-nous, laissons les où ils sont cela ne nous attirera que des ennuis.


Le chasseur tournait la tête, la surprise le suffoqua. Son compagnon était parti et quelques secondes plus tard, il apparaissait devant les étrangers...

Namaste, mit navn Wulfar, jeg vil Dem intet ondt ... Uh, jeg kan hjælpe dig og føre dig rundt med din kammerat til at helbrede.

La jeune femme pencha la tête sur le coté, surprise en position défensive toutes griffes dehors. Thalo réagit plus vivement, se mordant les lèvres derrière son casque, il se mit en garde, l’arme au clair. Le jeune homme était apparu de nul par, s’était approché, mais gardait une bonne distance. Il était brun, yeux gris, cheveux courts et deux tresses dégoulinaient le long de son visage picassé. Il portait des vêtements de factures simples un peu crottés bruns et verts, un court poignard et un arc à double courbures surmonté de grandes flèches à empennages noirs.
Il avait le sourire et aucune animosité ne transpirait de son attitude. N’Kpa le regarda attentivement et décela une lueur goguenarde sans ces yeux. Elle esquissa un rictus à l’adresse de Thalo. Le jeune homme était gêné, se gratta sa tignasse et traduisit en commun ce qu’il avait dit dans sa langue précédemment.


Je m'appelle Wulfar, je ne vous veux aucun mal... Euh je peux vous aider et vous mener quelque par pour soigner votre compagnon.

Les fourrés derrière le jeune chasseurs s’écartèrent, un adulte main sur son long poignard arrivait. Il était la copie presque parfaite du premier, bien que plus âgé et plus aguerrit, tout dans son attitude montrait plus d’expérience. Il s’approcha et discuta avec le premier, sans perdre de vue le couple.

Je vous présente Odoacre, c'est un ami chasseur. Nous allons vous mener à notre village.

Ils avaient fini par tomber d’accord en quelques minutes d’un échange soutenu. Le jeune homme vint au secours de N’Kpa, l’aida à soutenir le guerrier, trop heureux de pouvoir s'approcher de l'étrangère et peut-être même de la frôler, voir de la toucher.
Une bonne heure de marche harassante suivit. Ils arrivèrent dans une petite clairière, accueillie par une ribambelle de mioches curieux. Un petit village d’une vingtaine de tentes en peau entouraient une d’entre elle, centrale. Des hommes et des femmes vaquaient à diverses activités pendant que les enfants couraient en tous sens. Rapidement un groupe se forma autour de Thalo, N’Kpa et des deux chasseurs.
Aucun sentiment d’agressivité, juste de la curiosité rassasiée par le jeune Wulfar, alors que son compagnon plus âgé plus distant et taciturne, partait en avant vers la hutte centrale.

Quelques minutes plus tard, ils étaient présentés devant un groupe de trois vieillards…





[HRP] reste un chapitre en cours de construction

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Lun 8 Aoû 2011 20:22 
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Hrist resta sur la plage. Elle n'avait pas souhaité rentrer en même temps que les troupes. Souhaitant ardemment éviter les congratulations de sa cour. Elle n'avait pas fait ça pour passer pour une âme charitable, une héroïne, une femme occupée à protéger les siens dans l'espoir qu'ils puissent continuer à vivre. Non, elle ne faisait que ça pour la discorde. Ruiner la vie, scarifier la plage, anéantir les âmes et offrir aux mouettes une montagne de carcasses ensanglantés sur laquelle elle se regroupaient déjà. Crabes, oiseaux de tout genre s'approchaient timidement entre les derniers débris de la bataille pour profiter de ce banquet phénoménal.

Le vent soufflait, Lydia s'était éclipsée au château, laissant pour Hrist un cavalier de Malina en toute protection. Les routes étaient surveillées, sûres pour la plupart mais quoiqu'il en était, une Baronne solitaire pouvait faire la cible de nombreuses personnes, surtout la Baronne de Keresztur qui ne comptait pas de très nombreux amis. Les pans de sa robe noire flottaient aux aléas du souffle froid de la mer. Du bout de la botte, elle n'avait plus que pour dernière occupation que de bouger quelques pierres en regardant par intermittente, la Laide s'éloigner vers l'île où se regroupaient ces barbares qui lui causaient tant de problèmes. Son protecteur se trouvait à cent pas d'elle. Sa monture assortie à l'armure noire de Malina, ne faisaient de lui qu'une ombre sinistre qui observait invariablement la femme face à la mer.

Rien ne valait l'odeur de l'iode, surtout lorsque celle-ci était entachée du sang et de la mort.
« Comment trouver ce spectacle... Agréable ? »

Silmeria soufflait ces mots non sans un effort qui lui sembla insurmontable, l'énergie de Hrist consommait tant qu'un poids qui n'existait pas, pressait la poitrine absente de Silmeria. C'était son impression, le simple fait de se tenir éveillée lui faisait tourner la tête, elle ne souhaitait que s'endormir. Quelque part en elle, elle savait qu'il était impossible de résister, que le meilleur choix serait de s'endormir, laisser la femme faire son office et profiter d'être lovée dans cette enceinte de chair et de furie... Mais une autre partie d'elle trouvait ceci injuste, être exclue de son propre corps était une insulte difficile à accepter et à subir. C'était la raison de sa résistance, aussi futile soit-elle.

« Pour moi, plus le spectacle est horrible, meilleur il est... Un peu ton inverse... »
« Comme dans... Un miroir ? » Demanda-t-elle avant de s'évanouir une seconde fois.
« Non... Désormais, les miroirs seront interdits. »

Cèles se flanqua un autre coup de pied au cul mental, pour elle, si la Frémissante privait Silmeria de ses affections aussi simples qu'un miroir, c'était de mauvaise augure. Tout cela, même si Hrist n'en avait que faire, des miroirs. Pour elle il ne s'agissait là que de la différence entre les deux âmes. Elle quitta la mer et se dirigea vers Calpurnia pour rentrer. La monture n'était pas affectée par le combat, Hrist inspecta sa robe, caressant l'encolure de la bête pour la remercier ou la féliciter, de toutes façons, elle n'était plus réputée pour être prévisible...

Elle chevaucha suivie de son protecteur jusqu'aux petites routes en bordure du village située à deux lieux de la plage. Désertes, les routes avaient été abandonnées, le bruit de la bataille faisant rage avait dû dissuader même les marchands d'emprunter ce chemin poussiéreux pour au moins plusieurs jours. Les humains étaient si impressionnables, si couards parfois.

La route, jusqu'à présent, s'était déroulée sans encombres... Jusqu'à ce que...

Hrist passa un virage étroit, les broussailles et fougères n'avaient pas été taillées ou mangées par les bêtes, à tel point qu'elles privaient les passants de toute visibilité. Une lance vint éclater sa lame sur le sol, plantée là, signe d'un danger. Calpurnia prit peur et se cabra, le cavalier derrière elle tira son épée et passa devant la Baronne, prêt à remplir son devoir de gardien, de soldat, de martyr au final.

Lorsque la monture se fut calmée et que Hrist pu de nouveau en tirer le contrôle, elle pu voir ce que les herbes avaient jusque là, dissimulé. Une créature étrange, semblable à un dragon, ceux qu'on voit dans les livres... Cependant, la bête n'avait rien de ces allures terrifiantes, et ne puait pas le souffre. Perdue sous des tonnes d'acier, il s'agissait d'un cavalier et d'une monture, la monture elle, avait un long cou, flasque et mou qui passait comme un vers ou un serpent au dessus du sol, la tête protégée par un épais casque de fer, qui ne laissait dévoiler que de nombreuses rangées de dents aiguisées et brunes. Les filets de bave tombaient, de toute évidence, ce n'était pas le genre de bestiole à qui l'on donnait du foin... Son cavalier lui non plus, n'était pas commun, un homme lézard des plus étrange, rien à voir avec ses semblables moins évolués, celui-ci avait presque fier allure... Armure lourde, une lance à la main, largement plus longue que celle envoyée en guise de provocation à la femme. Elle lui conférait un avantage de portée immense, le cavalier noir de Malina s'approcha et somma la créature de quitter les lieux sous peine d'être châtié. Pour toute réponse, il n'eut qu'un hurlement sinistre et aigue de la part de l'homme lézard, peu décidé à quitter le chemin sans un combat... Mortel. Le protecteur chargea alors. Animé par son désir de travail bien fait, il chevaucha vivement vers sa cible elle aussi, en route. Le chemin prenait alors des allures de terrain de joute, là où s'entrainaient les cavaliers Kendrans et également, celles où les chevaliers amusaient le peuple, pour toute différence était que leur lance était émoussées et les armures renforcées. La bête rampante avançait en remuant de manière visqueuse sa masse mais à grande vitesse, presque plus vite qu'un cheval. Hrist n'avait pas reculé, elle observait quasiment ébahie le spectacle auquel rien ne l'avait préparée. Pris de court par la vitesse et la longueur d'arme de son adversaire, le soldat fut tué lors de la charge, la lance du lézard avait percé la gorge du cheval pour finir sa course dans les entrailles de l'humain. Coup violent, porté par un adversaire doté d'une force impressionnante, le cavalier n'avait pas eu le temps de souffrir, Hrist quant à elle, n'avait pas eu le temps de tirer sa lame que déjà, la bête qui servait de poney à son maître dévorait déjà la carcasse du cheval.

Hrist ne semblait pas très impressionnée, lorsque Silmeria revint à la surface et qu'elle vit le résultat de cette joute improvisée, elle préféra s'évanouir de nouveau après avoir demandé :
« Qu'est ce donc que... »
« On dit que les hommes lézards perdent leur queue lorsqu'ils ont peur... » répondit-elle à voix haute tout en tirant la Scélérate hors de son étuis à mesure que son sourire grandissait. Son adversaire avait décapité sa cible et tenait le visage du vaincu en l'air, dans un air triomphal, il jeta le morceau d'homme aux pattes de Calpurnia. La tête roula, elle avait conservée ses expressions d'horreur et de peur, à jamais figée dans les muscles faciaux de ce corps sans vie. Le cri retenti de nouveau, la bête s'apprêta de nouveau à charger pour cette fois-ci, tuer la Baronne.

La charge molle et vive recommença, les rennes de Calpurnia claquèrent mais Hrist n'était pas dupe, elle savait qu'en chargeant de front, elle serait – ou sa monture – blessée, tuée voire capturée, tout dépendait du dessein de l'adversaire aussi vif qu'inattendu.
« J'ai hâte de voir ça ! »

Carlpunia était plus animée par la peur que par son éducation, lorsque Hrist décida de faire demi-tour, il se fit de lui même tant sa monture noire préférait éviter de se trouver en face d'une telle créature. Hrist avait certes dévoilée une arme au lézard, elle avait de la ressource, bien que peu habile à l'arbalète, elle tira néanmoins l'arme de jet hors de son écrin de cuir une fois le virage étroit passé. Elle ralenti alors la vitesse de sa monture qui obéissait à contre-coeur. Le point de l'arme fixé sur le passage touffu. La bête arriva, lancée dans son élan et comme Hrist l'attendait, elle dû couper toute vitesse pour se replacer convenablement. Devant elle, les chemins étaient plus escarpés et les petites routes fréquentes, rien de plus compliqué pour une monture lourdement chargée, ce qui n'était pas le cas de celle de Hrist. La Frémissante tira son carreau, l'acier volant alla percuter le cavalier ou plus précisément l'armure qui lui couvrait les reins, éclatant dans une poussière d'étincelles.

« Mais, comment tu fais pour toucher le cavalier en visant la monture, toi ? »
« Si tu crois que c'est simple de tirer à cheval ! » cracha Hrist, exaspérée de l'intervention de sa petite Faera.
« Je suppose que tu ne vas pas me demander d'invoquer un lézard ou un serpent ? »
« Pour effrayer un homme lézard, je vois pas l'intérêt... »
« Il pourrait avoir l'intention de l'adopter. »

Son adversaire cria de ce son si désagréable avant de claquer les rennes sur son familier, les lourdes pattes faisaient trembler le sol et levaient une quantité de poussière énorme à mesure où le monstre approchait. Calpurnia ne pouvait pas aller plus vite, trop escarpées, une chute sur ces routes et il en était fini pour elles. Hrist se retournait régulièrement, constatant non sans une certaine amertume qu'il aurait été préférable d'acheter un cheval de course.

Les chemins qu'elle décida d'emprunter étaient ceux qui avaient des arbres biens jeunes... Avec des branches de préférence bien basses. Chose qui la forçait souvent à quitter les chemins pour courser directement dans les bois, augmentant alors le risque de chute d'une façon qui frisait presque la certitude. Calpurnia avait un désavantage énorme, rapidement empêtrée dans les ronces et les fougères, elle perdait la précieuse distance qui les séparait et Hrist, en se retournant voyait la bête s'approcher de plus en plus, la lance cependant, ne pouvant être pointée vers la tueuse en raison du terrain et du trop grand nombre d'arbres.

Bientôt les sous-bois furent dépassés et les cavaliers étaient à présent lancés à vive allure en direction d'un petit moulin où s'activaient une demi-douzaine de paysans qui venaient broyer les stocks de grains entreposés dans la petite grange prévue à cette intention. A une demi-lieue, un femme braillait en voyant la course poursuite, ce qui flanqua immanquablement la frayeur dans le petit groupe qui détalla sur le champ, laissant le moulin et la grange abandonnées. Le terrain n'était pas spécialement propice au combat à cheval, le cours d'eau qui servait à alimenter les rouages du moulin coupait le terrain en deux, la bestiole ne pourrait sans doute pas le sauter, cependant il était bien trop peu profond pour l'empêcher de le franchir.

Hrist tentait opiniâtrement de recharger cette '' satanée arbalète '' qui se révélait être un véritable jeu d'adresse. Le carreau refusait de loger dans la petite cale où était située le tendeur, le rouet glissait et Hrist perdait patience en se demandant quel était l'imbécile qui avait eu l'idée de créer un engin pareil. Calpurnia, lancée dans un dernier effort et animée de la peur gagnait assez de distance et Hrist pu passer le petit point d'eau avant que l'homme lézard ne soit à portée. Trop préoccupée par la santé de son cheval, Hrist descendit et piqua son arrière train à l'aide du carreau qu'elle avait enfin pu armé dans l'arbalète. Le martèlement des pattes sur le sol attirèrent son attention de façon alarmante, il y avait maintenant deux solutions, à cheval, elle n'avait pas de grande chance de pouvoir seulement le toucher, maintenant qu'elle n'avait plus de monture, elle n'avait plus vraiment ses chances non plus... Seule solution restait de le priver de sa monture, ça suffirait pour se trouver sur un pied d'égalité.

A la vitesse où le machin à quatre pattes s'approchait, elle pouvait toujours tenter de se glisser sous lui, là où l'armure était plus souple et tenter de lui ouvrir le ventre... A supposer qu'il ne décide pas de lui bouffer un bras dans la manœuvre, ou qu'il ne lui tombe pas carrément dessus. Une tonne de viande de lézard et presque autant d'armure, elle ne se sentait pas capable de s'extirper de tout ça. La grange de bois n'offrait pas un abri suffisamment solide, le moulin était de pierre mais si elles s'écroulaient, le résultat serait le même... Il lui restait une seule solution : l'eau.
« Je pense que pour l'effrayer, il faudrait une illusion plus forte, l'espèce de monstre qui lui sert de monture ne reculera pas devant grand chose. »
« Pourquoi créer des catastrophes alors que la nature en est pleine. Il y a la famine, des épidémies de peste de toutes les couleurs, des pandémies de chiasses de toutes les couleurs aussi, des tremblements de terre... »
« Sois sérieuse ne serait-ce qu'un instant, s'il te plaît. »
« Je suis aussi sérieuse qu'une pneumonie chez un orphelin ! Mais à cet instant particulier, tu devrais porter ton attention sur la bête furieuse qui te charge. »

Plus loin, derrière les fourrés, un trio macabre de cavaliers enchevêtrés de noir, habilement dissimulés dans les broussailles observaient la femme.

« Voici donc la lice, cette Baronne anorexique face à Esmar, chevalier raptor... Il n'en fera qu'une bouchée, tout comme il a écrasé son garde. Messieurs, profitez du spectacle. » Soufflait l'un d'entre eux, un sourire démoniaque posé sur ses lèvres.

« Ces crimes innommables vont enfin être punis... Un instant ? Que fait-elle ? »
« Elle entre dans l'eau... Rassurez-vous, ces voies d'eau ne mènent nul part, il n'y a plus aucune issue et elle est à pied. »

Effectivement, quelques mètres plus loin sur la plaine; Hrist venait de s'immerger mais contrairement à ce que pensait le mystérieux commendataire de Sir Esmar, elle ne souhait en rien s'enfuir, elle n'avait à cet instant que le seul et unique désir d'expier son adversaire. La cape de dissimulation sur les épaules, elle bénéficiait en plus du reflet du soleil sur la surface du liquide qui rendait sa détection délicate.

Le contact frais embrassait sa peau, promenant ses cheveux et s'insinuant partout dans son armure, la rendant plus lourde et glissante... Elle espérait que ce troisième désavantage ne lui porte pas préjudice. Les yeux rivés à la surface de l'eau, la Frémissante pu entendre très distinctement les vibrations dans l'eau qui trahissaient la présence de la bête énorme qui passa son cou flasque et rouge au dessus de l'eau, plongeant alors sa tête pour déceler sa proie, un peu à l'image d'un énorme grizzly cherchant du saumon.

Dès que l'œil lui fut visible, Hrist tira carreau dans l'iris de la bête, dévoilant un épais nuage rouge dans le liquide pur avant que la créature ne hurle à la surface de l'eau, se décalant vers la droite du rivage en fauchant les barrières de bois comme un château de cartes. La créature était donc blessée, presque aveugle et Sir Esmar... Au sol. La bête infernale se relevait pour tomber à terre et recommencer son manège en rampant plus loin. Le lézard se releva avec une souplesse effarante, armé désormais d'une épée fraichement tirée du fourreau, il menaçait le cours d'eau de la lame courbée, semblable à un sabre qui jouissait d'un tranchant exceptionnel.

Hrist sortit la tête de l'eau, reprenant son souffle, elle constatait non sans peine que son équipement trempé la rendait plus lente, et elle avait besoin de toute sa vitesse et ses réflexes pour affronter un tel adversaire. Sir Esmar s'approchait, courbant le cou long et flexible, il déambulait rapidement et avec grande souplesse malgré le poids de son armure, l'ennemi de Hrist approchait alors qu'elle gagnait le rivage, armée de la Scélérate, elle scrutait les poids faibles du lézard.

Selon Hrist, sa souplesse lui était autant un atout qu'une faiblesse, l'armure, à moins d'avoir été faite pour lui, lui bloquerait quelques mouvements, même s'ils n'étaient que minimes, ça lui serait une aide en combat. Les pièces de métal ne lui couvraient pas les genoux ni les coudes, la gorge et une partie du visage étaient également visible et faciles à toucher, seul son casque haut empêchait de lui frapper directement sur le crâne, cependant, ce genre de tactique n'était pas les méthodes de prédilection de la femme qui préférait largement s'attaquer aux endroits vitaux de ses victimes dans le but d'en finir le plus vite possible.

Le lézard usa de sa queue comme appuis pour se projeter en avant et ainsi lancer de haut en bas une frappe redoutable qui grâce aux réflexes de la femme ne rencontra que du vent et ensuite, la terre. Dans la précipitation, elle avait vu à quel point la lame s'était enfoncée dans le sol, phénomène qui l'alarma sur l'instant, lui faisant comprendre que tenter la moindre parade contre cette lame serait une erreur fatale.

Silmeria quant à elle était toujours dans son sommeil de morte, Cèles racontait des histoires sans intérêts et Hrist, elle était bien trop occupée pour y prêter attention de toutes façons. Trop fascinée par les sifflements et les vibrations graves que provoquait la lame en l'air dès qu'elle passait trop près d'elle. La bête hurlait et crachait, dévoilant une rangée de dents affutées comme des couteaux, il usait maintenant de la gueule et de la lame, tentant de renverser la jeune femme qui peinait à esquiver en raison de la vitesse et la souplesse reptilienne du chevalier raptor qui lui tenait tête.

Plus loin :
« Rassurez-vous, Sir Esmar est fait pour ce contrat, bientôt cette femme ne sera qu'un mauvais souvenir pour cette terre et ses habitants...»
« Vous ne semblez pas satisfait ? »
« Disons que la dernière fois que j'ai vu cette femme, elle travaillait pour moi. Tuer un riche homme de Kendra Kâr. Jusqu'à présent, je n'avais plus entendu parler d'elle. »
« Hm. Quoiqu'il en soit de vos rapports, n'oubliez pas que vous êtes grassement payé vous et votre assassin pour cet office. »


***

« La grange, faut aller vers la grange avant d'être coupée en huit ! »
Hrist se ruait aussi vite que possible vers un endroit où elle pourrait utiliser l'environnement pour se défendre et attaquer. La plaine ne jouissait pas de nombreux moyens de repousser un adversaire, et Hrist n'a jamais été la meilleure pour attaquer à grand renfort de brins d'herbe. Et un dernier effort, elle passait la porte, derrière elle, un véritable moulin qui faisait tourner sa lame de façon obsessionnelle en poussant des hurlements totalement ridicules.

De la porte, son épée en fit des allumettes. Hrist manquait mine de rien une légère déception, la grange ne contenait qu'un gigantesque silo de farine, un autre de grains de blés, une fourche, quelques harnais à chevaux, de la corde, du foin, des cruches de mauvais vin et un couteau planté dans une miche de pain. Les fondations en revanche, celles qui soutenaient la lourde charpente étaient faites d'un bois noir orné de fer, très solide car les silos étant fixés au plafond, devaient être retenus par quelque chose. De préférence, quelque chose sur lequel on ne pourrait pas frapper très facilement. Mais allez expliquer ça à un lézard énervé qui court après une anguille.

Hrist profita que son adversaire soit assez proche de lui et qu'il ait les deux bras fins prêts à abattre son épée sur elle pour se précipiter dessus. Armée de la Scélérate, elle frappa et grâce à ses nombreux entraînements et sa précision acquise au fil des aventures... Elle rata le bras et ne réussit qu'à entailler légèrement la partie souple de l'armure de cuir sur laquelle était posée ça et là de lourdes plaques de métal rouge et doré.

« Faut admettre, on est plutôt mal barrées...»

Peu commode et également peu satisfait de s'être fait frapper, la bête lui décrocha un coup de patte qui envoya la femme quelques pas en arrière, acculée au silo de farine. Ils s'arrêtèrent tous les deux. Hrist savait que sous la toile, se trouvait bien des tonnes de farine et que n'importe qui avec la moitié d'un cerveau ne frapperait quoique ce soit pas à moins d'un mètre de la toile usée de peur de renverser tout le labeur des paysans.

De fait, ils terminèrent en quelques secondes ensevelis sous une farine humide qui avait rempli l'atmosphère de son amidon et son odeur qui prenait le nez de Hrist.

« Par l'enfer... Il l'a fait...»

Plus loin, les quelques hommes à cheval s'interrogeaient sur la provenance de ce brouillard soudain qui blanchissait l'herbe à des lieux à la ronde. Hrist entra dans une fureur qui aurait pu mettre mal à l'aise le plus stoïque des bourreaux. Les cheveux devenus blancs, l'armure collante, elle avait l'impression d'être un gâteau pas cuit dans lequel on avait triplé les proportions de farine. De rage, elle retourna la lame contre elle et ouvrit alors son bustier de cuir en deux, perdant une protection et deux kilos de farine mouillée. Le lézard quant à lui était bien trop occupé à chercher son épée emportée par le flux qu'il avait libéré dans sa stupide erreur. En farfouillant la poudreuse, il passa sa queue dépourvue de toute armure devant Hrist qui ne manqua pas l'occasion de vérifier si elle repousserait.

La bête hurla des insultes terribles dans sa langue barbare tout en tenant de ses deux pattes le morceau amputé qu'il lui restait. Hrist lui lança le morceau ensanglanté au visage. Esmar dans sa colère lui bondit dessus, soulevant un énième nuage de farine. Il maintenait fermement la poitrine de la femme sous la masse blanche en tentant de l'étranger, tandis qu'elle, à l'image d'un chaton joueur ne cherchait qu'à lui arracher les yeux pour lui faire payer son infâme geste. Il lui était impossible d'ouvrir les yeux sous peine de ne pas pouvoir retrouver la vue avant quelques minutes, de même que prendre sa respiration sous la farine est presque aussi compliqué que de le faire sous l'eau. En définitive, elle se sentait un peu merdeuse dans cette situation.

Si elle réussit à se dégager, elle ne le devait qu'à sa cape, ou plutôt précisément au capuchon qu'elle avait cousu à sa cape lorsqu'elle était encore à Tulorim. De toutes façons, elle n'avait jamais été bonne en couture et les couleurs juraient ensemble; lui donnant une allure d'arlequin.

Le chevalier Raptor se retrouva avec un bout de capuche noire alors que la femme se relevait, ou plutôt tentait de se relever convenablement, et lorsque ce fut le cas de tenir debout sans s'empêtrer les jambes dans la toile déchirée dont les lambeaux attendaient sournoisement, cachés ça et là, qu'un imbécile se prenne les pattes dedans.
Lorsque le lézard, toujours désarmé décida de finir ça à mains nues...

Hrist perdit patience... Elle ralentit alors ses mouvements, le Lézard était à quelques mètres d'elle, s'approchant comme le bête prédateur qu'il était, usant d'arc de cercle pour acculer une nouvelle fois sa victime. La Scélérate fermement tenue comme un poignard, chose que la Frémissante n'appréciait pas, préférant la souplesses de quelques doigts le long de la lame, était en fait un moyen d'essayer quelque chose sur ce qu'elle considérait à présent : son cobaye.

Elle se courba, et sentit alors toute sa hargne et sa colère l'enivrer et filer le long de ses veines. Hrist approchait d'un état de furie qui dépassait de nombreuses personnes, mélangée à une exitation et un bien être provoqué par une enzyme proche de l'euphorie alimentée par la colère, elle se sentait comme un hypoglycémique qui venait de manger un paquet entier de fraises tagada. Le revers de l'arme n'attendait que de frapper, on pouvait croire que son arme prenait vie, du moins que son coeur battait, mais n'importe qui aurait précisé avec un air dédaigneux qu'il ne s'agissait que des battements de son propre coeur - à supposer qu'elle en eut un - qui se ressentait dans la lame de jais.

Il arriva, et le coup qu'elle lui flanqua au travers du "menton" à l'aide du manche de son arme partit si vite qu'elle en fut même surprise. Elle se mordit les lèvres, toutes cette colère emmagasinée qui n'avait fait que repousser son adversaire qui se tenait la mâchoire en comptant le nombre de dents qu'il pouvait bien lui rester. Il saignait de la tronche et de la queue qui d'ailleurs, contre toute attente ne repoussait pas. Il tenta de rejoindre la sortie, ce fut le courant d'air des Sylphes qui l'en empêcha. Repoussant une large bande de farine et claquant les portes.

« Si on s'en sort vivante, j'veux plus jamais voir un moulin, ni même une boulangerie.»

Cèles continua ses palabres en précisant que si le Lézard ne pesait pas le poids de la grange en armure, il aurait connu son baptême de l'air, mais faute d'un poids de lépreux lors d'une famine, il était resté sur ses pattes, choses qui ne serait pas arrivée à un autre plus léger.

La carapace de fer n'avait toujours pas d'arme, il se rattrapa alors sur la seule et unique fourche des environs pour tenter de charger Hrist, dans un dernier élan de colère. La femme n'était pas dépourvue de tout réflexes, libre de son bustier, elle pu esquiver la fourche vicieuse qui ne demandait qu'à visiter ses entrailles et réussit à frapper la gorge de son infortunée victime qui n'avait pas vu le coup venir.

« Lèche ma lame, Lézard !»
« Attaque ! »
« Expire !»

La peau élastique du lézard se scinda en deux et il perdit un bon litre de sang en plein dans le visage de Hrist qui vira du blanc farine, au rouge ensanglanté et sous ce masque de beauté, elle était bel et bien verte de rage. Elle frappa un nouveau coup, dans la poitrine de la bête cette fois ci, la protection de cuir avait cédé et elle pu enfoncer, non sans peine, la pointe d'acier jusqu'à l'organe palpitant de sa nouvelle victime, brisant les côtes au passage dans un effort carnassier.

La lice était close, Sir Esmar, chevalier Raptor venait de mordre la farine dans un dernier hoquet de sang. Laissant à terre la triste dépouille du chevalier, Hrist ouvrit la porte de la grange et chercha des yeux Calpurnia. Ce qui ne tarda pas à alarmer les cavaliers dissimulés quelques mètres plus loin.

« Par Gaïa ! Mais... Elle est victorieuse ! Vous nous avez trompés !»
Ivres de rage, deux des cavaliers tirèrent leurs épées pour tenter de tuer le troisième : l'inconnu qui avait engagé le soldat lézard pour éliminer Silmeria. Cet homme, envers et contre tout tira de sa longue cape noire un petit objet noire aux symboles runiques rouges sang...

***


Hrist avançait sur la plaine, époussetant sa cape de toute la farine possible avant de voir une immense gerbe noire jaillir de derrière les fourrés. Alarmée, elle s'attendit en premier lieu à un autre cataclysme à écailles... Elle s'approcha avec une grande prudence, s'assurant à chaque mètres que rien ne l'attendait grâce aux bracelets des assassins. Lorsqu'elle arriva sur place, il n'y avait rien d'autre qu'une odeur d'herbe brûlée et des morceaux de cadavres à dix mètres à la ronde. Ces morceaux de chevaux et d'hommes brûlés et coupés assez fins pour servir de gueuleton à des fourmis fumaient encore.

« ... »
« Cèles... Va falloir m'expliquer ce qui a provoqué ça, un dragon ? Oaxaca elle même ?»
« Ni l'un, ni l'autre... Je crois qu'il s'agit d'une pointe spirituelle. Je ne pensais pas en voir une de ton vivant pour ainsi dire. Zewen a du se planter dans le destin. »
« Une arme ? »
« Plus complexe. Du moins, elle utilise la magie pour détruire les corps de gens. Une sorte de rune de malédiction, destruction suprême. »

Hrist regardait autour d'elle. On trouvait des lambeaux d'armures, des bris d'épée tranchants qui luisaient au soleil et un pendentif encore tiède. Elle le ramassa, repoussant du pouce les plaques de sang coagulés dessus. Le symbole le fit un choc violent... Elle mettait alors en corrélation l'attaque surprenante du Lézard, et le meurtre de... Elle ne savait pas combien d'hommes, juste après qu'elle en soit sortie victorieuse. Quelqu'un avait de toutes évidences payé pour son meurtre... Et le médaillon portait le symbole de la sororité de Selhinae...

Elle jeta un dernier regard autour d'elle... Abandonnant l'espoir fou de deviner combien ils étaient... Et déclara enfin.
« Et bien... Si Gaïa souhaite reconnaitre les siens, elle n'est pas couchée...»

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Ven 12 Aoû 2011 22:00 
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[HRP] Suite et fin



***



… Le jeune homme tenace et bourré de plein d’espoir se leva tout sourire, tendit une main à la perle de ses désirs. Son acolyte plus âgé, moins enclin à l’esclavage sournois de ses sentiments, alla s’entretenir avec les trois vieillards.
N’Kpa dégagea de ses jambes engourdies la tête de Thalo assoupit et lui glissa quelques mot à travers son casque.
Elle prit son courage à demain, exténuée par ces dernières heures, elle aspirait à un grignoter quelque chose et prendre enfin du repos. Alors, elle laissa le jeune homme heureux le soin de l’aider à se relever.
Odoacre revint vers eux et s’adressa à Wulfar avant de s’extirper de la hutte. Le jeune chasseur trop fier se planta devant elle l’air radieux.


Il va chercher du monde pour porter votre ami. La vieille Brunhilde va s’occuper de lui, en attendant je m’occupe de vous. Venez, nous allons manger et nous pourrons parler.

L’Humoran jeta un œil en arrière une question sur les lèvres. Elle ouvrit la bouche, sentit une main l’attirer dehors, mais… les trois vénérables discutaient encore, indécis sur ce qu’il fallait faire de ces deux étrangers. L’un d’eux perçut son intérêt sans le relever et continua avec ses compères.
N’Kpa abandonna l’espoir de poser sa question. Peut-être Wulfar pourrait y répondre.
Quatre hommes robustes arrivèrent, au moment où les deux jeunes gens sortaient. C’est à ce moment que Thalo sentant qu’on le manipulait se réveilla et dans un élan d’héroïsme primaire machiste et de fierté gronda sa colère.


Holla ! laissez moi… je suis assez grand pour me porter, Dame N’Kpa où êtes vous, partons… Rosa … ?

L’homme blessé se débattait pour ne pas laisser les chasseurs le saisir. N’Kpa se rapprocha du Wiehlenois posa une main sur sa poitrine pour calmer le volcan de chair.

Thalo, Thalo, calmez vous, on va vous soigner. Ne vous faites pas de soucis, on ne restera que le temps de se reposer un peu. Je ne crois pas qu’ils ont l’intention de nous garder longtemps.

La protection de la Shaakt se calma, acquiesça du chef et suivit tête haute les quatre hommes. N’Kpa suivait d’un œil amusé le géant au milieu des gamins qui tournaient autour chantants, riants l’agaçants par instant. Les chasseurs finirent par les faire fuir.
Wulfar revint à la charge :


Vous avez sûrement faim et je vois que vous êtes fatiguée. Euh je ne crois pas avoir entendu votre nom demoiselle, ni d’où vous venez et comment vous êtes arrivée ici ?

N’Kpa esquissa un sourire

Je m’appelle N’Kpa et je viens de la forêt de Cuilnen.

Elle ne sentait pas le besoin d’en dire plus. Moins il en saurait, moins il courait le risque d’avoir des ennuis…

… Elle découvrit le campement, les enfants curieux, joua même avec eux et sympathisa avec les gens. Wulfar se montra un guide avenant et serviable.
En soirée, Thalo réapparut accompagné du soigneur. Il était affaibli, mais il avait retrouvé des couleurs. Un cataplasme retenu par un savant bandage et son bras tenu en écharpe pour éviter trop de mouvement terminait les soins apportés.
Les trois ancêtres vinrent à leur rencontre et rapidement il fut décider que les étrangers ne pouvaient rester plus longtemps. Après quelques discussions menées par un Thalo remonté, naturellement Wukfar et Odoacre furent chargés de raccompagner au plus vite le duo vers la plage où se déroulait probablement le théâtre des opérations.

C’est ainsi qu’une bonne heure plus tard, le groupe se séparait aux abords du village côtier.

N’Kpa s’approcha du jeune homme et dans un élan l’enlaça et lui glissa un petit mot à l’oreille dans sa langue natale. Sciemment elle ne souhaitait pas qu’il sache, juste qu’il imagine. Elle se doutait que le son de ces mots chantant serait graver pour longtemps dans sa mémoire et c’est là tout ce qu’elle voulait.

Thalo poussé par le désir de ne pas perdre de temps, avait déjà commencé de gravir le promontoire rocheux, battu par les vents marins. Sa silhouette s’amenuisait perdue dans l’onde des hautes herbes. Au loin plus bas provenant de la plage, les restes du combat faisaient rages. N’Kpa sourit, plongea ses yeux couleurs miel dans le regard du jeune homme, avant de prendre la même direction que l’armure de Rosa. Elle ne se retourna pas… les deux chasseurs quittèrent rapidement le lieux… Plus jamais elle ne devait le rencontrer…



***




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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Lun 22 Aoû 2011 21:19 
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Le signal de la charge résonna finalement au sein de l’armée, provenant de Malina. Les hommes de Keresztur, si stoïques, se mirent en branle sans autre bruit que celui des sabots des chevaux. Nark observait la discipline exemplaire des cavaliers, leur placement en U parfait. En troisième ligne, on pouvait voir la Baronne dans son immonde armure violette. Ils arrivèrent rapidement à proximité de la plage, les chevaux se remirent au pas et les cordes des arbalètes claquèrent. On entendit des cris de douleurs et l’on voyait les barbares tomber les uns après les autres. Pourquoi donc avait-il tenté ce pillage ? D’après ce que leur avait dit Erzébeth, leurs incursions étaient nombreuses. Ils devraient donc savoir qu’il ’avait aucune chance face aux guerriers si disciplinés et surentraînés de la Baronne.

La bataille était plus une boucherie qu’autre chose. Une fois que les arbalétriers n’avaient plus assez de cible, ce fut au tour des lanciers de partir, pour achever les blessés. Derrière lui, il entendit un cri d’Heartless, il se retourna donc :

« Oh le con, oh le con. Il regarde la baronne charger pendant cinq minutes et il lui balance même pas le fumigène. Oh le con »

Nark se rendit compte de sa propre bêtise et éclata de rire. Que pouvait-il faire d’autre ? Il y avait eu trop de problèmes durant cette folle nuit pour qu’il s’énerve pour si peu. Après tout, mieux valait en rire qu’en pleurer, comme disait une philosophe Kendran. Les lanciers étaient incrédules devant ce fou rire inattendu. Mais l’un des officiers reprit ses esprits et leur ordonna d’avancer. Ainsi donc, ils allaient devoir affronter les barbares qui avaient réussi à survivre à ce déluge de flèches, les meilleurs donc. Et bien, quelle chance ils avaient. Le petit groupe fut rapidement séparé et tous entrèrent dans le village en flammes. Un des lanciers était avec lui. Alors qu’il passait à côté d’une maison encore debout, un barbare en jaillit et frappa le cheval du guerrier à l’aide d’une énorme massue hérissée de pointes, qui s’écroula avec son cavalier et le bloqua dessous. Le barbare tua ce dernier d’un coup en pleine tête qui lui arracha la moitié de la figure.

Nark recula de quelques pas pour observer son adversaire. Il était bien plus grand que lui, avoisinant les deux mètres. Ses cheveux blonds étaient ébouriffés et son visage celui d’un dément. Ses yeux étaient injectés de sang et de la bave dégoulinait de sa bouche. Son torse musclé était recouverts d’une simple fourrure d’animal. Sa massue, longue de plus d’un mètre trente et d’un diamètre d’au moins vingt centimètres, était l’arme d’un titan. Et pourtant, le guerrier faisait des moulinets avec comme si elle ne pesait pas plus qu’une plume. Tout son corps étaient couverts de cicatrices, attestant sa qualité de combattant : il avait survécu à de très nombreuses batailles. Le dernier des Lounge sortit ses deux rapières de leurs fourreaux et attendit que le barbare lui fonce dessus. Cela ne tarda pas. Mais contrairement à ce que pensait l’épéiste, il était beaucoup plus vif et rapide que l’aurait laissé supposer sa masse. Le fils de marchand esquiva de justesse l’attaque horizontale de son ennemi en plongeant au sol. Il se releva avec une roulade pour voir la massue du barbare se dirigeait vers sa tête sans défense. De toute manière, qu’il en ait une ou pas, il mourrait si son adversaire le touchait de plein fouet.

Il bougea la tête, mais l’un des clous enfoncés dans le bois lui ouvrit légèrement la joue. Nark s’éloigna rapidement pour souffler quelques secondes. Il ne devait pas attendre que l’homme lui saute dessus, sinon celui-ci imposerait son rythme et le spadassin finirait par être tué. Il devait prendre les devants dans ce combat mal engagé. Son ennemi revenait déjà à la charge, bavant comme un chien enragé. Nark s’avança à sa rencontre, ce qui perturba quelque peu le barbare. La plupart de ses adversaires devait fuir devant lui habituellement, impressionnés par son aspect bestial et par sa taille démesurée. Les deux rapières fusèrent en deux coups de taille quasi-impossible à parer par un adversaire ne possédant qu’une arme. Mais le barbare n’était pas un combattant ordinaire. La mort ne lui faisait pas peur. Seul comptait l’honneur. Au lieu de tenter de parer les longues et fines épées, il voulut asséner une attaque horizontale à son opposant. Mais le jeune homme ne recula pas. Si ses lames touchaient en premières, le combat serait gagné. Dans le cas contraire, Nark mourrait. S’il avait de la chance, ce serait rapidement. Cette fois, c’était quitte ou double.

Après un dixième de seconde qui sembla une heure, les rapières du jeune guerrier pénétrèrent la chair de son ennemi, mais pas suffisamment pour que la massue s’arrête. Dans un hurlement inhumain, le barbare fit un dernier effort pour que la massue touche les côtes de l’épéiste, qui s’écroula. Il atterrit lourdement sur le sol jonché de cadavres. Le sang quittait son corps et il sentit qu’au moins une de ses côtes était fendillée. Son adversaire était encore debout. Il regarda son ennemi gisant, cracha du sang et se dirigea vers lui. Nark allait être vaincu. Ici finissait son épopée qui n’avait duré que quelques jours. Ici finissaient ses rêves de grandeur. Dans le sable rouge, aux côtés de dizaines d’autres corps, dans une bataille qui ne le concernait pas. Son adversaire leva très haut sa massue dans les airs, un rictus sur les lèvres. Puis il dit d’une voix gutturale, dans un commun approximatif :

« Dis-moi au revoir. »

Il y eut un sifflement. Un carreau empenné de plumes noires dépassait du torse du barbare, qui louchait dessus. Il s’écroula au sol, lorsque Nark perçut le bruit des sabots d’un cheval. Un cavalier apparut, une arbalète à la main. Il ôta son heaume et le guerrier reconnut le jeune homme à qui il avait dit quelques mots avant la bataille. Il avait le sourire aux lèvres et dit d’une voix moqueuse :

« Et bien, je crois que je vous ait sauvé la mise. »


Le second d’Heartless sourit et demanda l’assistance du combattant pour l’aider à se relever. Il prit ensuite une feuille d’algue marine donnée par Illiode, qu’il plaça sous sa langue. Ensemble, ils se mirent en route en direction des barques qui mouillaient à quelques centaines de mètres, là où on leur avait ordonné d’aller. Avant de quitter le lieu du combat, Nark chuchota à l’attention du cadavre :

« Au revoir. »

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Dernière édition par Nark le Ven 26 Aoû 2011 21:51, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Jeu 25 Aoû 2011 22:29 
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Les deux hommes se dirigèrent vers la plage où se trouvaient la Baronne, l’un supportant l’autre, qui était blessé. Ce dernier était Nark, second d’Heartless, pirate d’eau douce réputé pour son humour douteux et son inaptitude à savoir se battre. Celui qui soutenait le jeune guerrier était l’un des soldats de la Baronne de Kerezstur, qui avait capturé l’équipage du borgne la veille au soir. Deux de ses membres, Thalo et N’Kpa, avaient néanmoins réussi à s’échapper. Nark réussit à dire quelques mots, malgré la douleur qu’il le tiraillait suite à un combat face à un énorme barbare :

« Pourquoi t’es tu engagé dans l’armée d’Erzébeth ? Elle ne te mérite pas. »

En effet, l’épéiste avait beaucoup d’estime pour le soldat, qui l’avait sauvé d’une mort certaine en tuant son ennemi.

« J’ai appris à me servir d’une épée à mon plus jeune âge, mon père étant un chevalier renommé. Mais nous avons eu une violente dispute. Etant sans le sou, je me suis engagé dans cette armée voilà quelques semaines. Je ne peux rien faire, je n’ai rien. Ma solde a servi à acheter mon équipement et je dois encore travailler pour la Baronne pendant six mois si je veux la rembourser. D’ailleurs, je m’appelle Asirak. »

« J’en oublie les bonnes manières. Je suis Nark. Quand nous quitterons cette Baronnie, viens avec nous. La baronne ne prendra pas le risque d’envoyer une douzaine d’hommes nous arrêter alors que les incursions des barbares sont de plus en plus fréquentes, si j’ai bien compris. »

« Hmm. Je vais y réfléchir. »

Le reste du court trajet se fit dans un silence gêné. Une fois arrivé à la plage, ils eurent une bien étrange vision. La Baronne était les deux pieds dans l’eau, faisant face à plusieurs embarcations remplis d’ennemis. Tout à coup, une rage sourde et meurtrière, s’empara de Nark. Il vit les moments les plus tristes de sa vie, la mort de ses parents et leurs cadavres, leurs meurtriers le supplier de les achever une bonne fois pour toutes et leurs cris de plaisir quand le jeune guerrier avait soulevé sa rapière pour les tuer. Par Gaïa, que lui arrivait-il ?

Les barques s’arrêtèrent dans le sable de la plage. Des barbares en sortirent. Le spadassin dégaina ses deux rapières et se jeta dans le tas. Il ne songeait pas à se défendre et la douleur avait disparu sous l’effet de la rune. Il taillait dans tous les sens, virevoltaient et tuaient de nombreux ennemis. Quelques instants après le débarquement des barbares, tous étaient morts, alors que le clan de la Baronne n’avait subi que très peu de pertes. Le fils de marchand n’avait que quelques blessures superficielles, mais ses côtes le faisaient toujours souffrir. Il reprit une feuille d’algues pour apaiser la douleur.

Peu après, on reprit leurs armes aux prisonniers et plusieurs chaloupes arrivèrent. Dans l’une d’elles, un personnage haut en couleur, une armée sur pattes. Le capitaine Von Klaash, capitaine de la Laide-les-Maines, l’un des bateaux d’Erzébeth. Cet homme était le stéréotype même du pirate. Il boitait, portait un tricorne et avait une barbe. Il ne manquait plus que le cache-œil d’Heartless pour conclure le tout. Alliée à ses cheveux désordonnés, sa petite barbe noire lui donnait un air féroce, sans compter son regard fiévreux qui le rendait terrifiant. Il proféra quelques insultes envers les barbares (qui les méritaient bien) mais fut interrompu par la Baronne, qui devait être habitué aux paroles grossières de l’homme. N’écoutant que d’une oreille les paroles de sa patronne, il tira une outre d’une de ses poches. Un tord-boyau de marin, un truc imbuvable pour qui ne fréquentait pas les tavernes à longueur de journée.

Le capitaine examina rapidement les prisonniers. Il reconnut en Heartless un pirate, mais un pirate de troisième zone, plus sur terre que sur l’océan, incapable de naviguer, qui avait le mal de mer et qui mettait un cache-œil pour passer pour un dur. Dès lors, Nark sut que le borgne allait devenir le martyr de Von Klaash, ce qui le fit rire intérieurement. On les mit tous dans une chaloupe, accompagnés de plusieurs soldats. Asirak en faisait partie. Un futur allié qui pourrait peut-être les aider en cas de problème. La Baronne préféra rester à terre, tendit que s’éloignaient les frêles embarcations vers la Laide-les-Maines, puis vers l’île qu’occupaient les barbares. Nark, quant à lui, était loin de savoir que Thalo et N’Kpa étaient non loin d’eux, déguisés en soldats. Ce qui était sûr, c’est que les hommes d’Heartless ne laisseraient pas un bon souvenir à la maîtresse des lieux, Hrist la frémissante, caché dans le corps de Silméria, alias Erzébeth.

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Mar 2 Avr 2013 20:45 
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Une nuit, une jeune femme brune regardait par le vitrail et respira profondément. Une brume argentée, presque lumineuse enveloppait les contrées alentours, les étoiles situées bien au dessus de l'horizon pâlotte, brillaient de toute leur âme. Il y avait au creux de cette nuit, la même douceur et délicatesse qui bouleversait cette jeune femme.

Elle était au château de Keresztur, vaste demeure silencieuse. Quelques bûches crépitaient dans le cheminée, de jeunes domestiques plantées dans les courants d'air, sagement à lutter contre le sommeil. Au bas de sa demeure, elle observait d'un œil las les jardiniers matinaux qui luttaient contre la nature qui tentait chaque jour de rendre au parc son aspect primitif. Arrachant les fleurs, se débarrassant des tiges mortes. Ils n'avaient cependant pas le droit de toucher au lierre. Personne ne savait pourquoi d'ailleurs, la jeune femme non plus, quant bien même l'ordre émanait de sa volonté. Peut être au fond d'elle, cette brunette appréciait la noble pauvreté de la nature, cette végétation presque sauvage qui étendait sous les fenêtres du château sa présence, grimpant jusqu'aux toit avec les mille petites mains de lierre qui nouait ses liserons aux grandes portes et vitraux que l'on n'ouvrait plus.


Le soleil apparaissait. Le monde grouillait et renaissait. La fraîcheur nocturne laissait enfin place aux tièdes rayons qui réchauffaient les fleurs et rendait aux terres ses couleurs. Revêtus d'un habit de printemps, Keresztur reprenait enfin vie.

Silmeria n'avait pas pu dormir. Trop de choses en tête. Trop d'idées et de projets. Après avoir frôlé la mort et ce, jusqu'à l'avoir trouvée, elle espérait mieux que ce qu'elle avait fait à présent.

Le monde devant elle venait d'éclore comme une fleur sous la tiède chaleur d'un astre. Elle avait presque envie de tendre la main, comme pour espérer en recueillir une infime partie de sa beauté. On frappa à la porte, la tueuse en resta confondue et perdit sa main dans ses cheveux.

« Teresa. C'est comme si tu m'avais manqué. »
Dit-elle sans même se retourner. Elle n'avait en rien oublié les habitudes de ses suivantes. Teresa sa chambrière rentrait toujours en ouvrant doucement la porte après avoir frappé deux fois. Elle savait qu'en entrant trop brusquement, elle énervait Erzébeth et qu'une fois qu'elle prenait quelqu'un en grippe c'était insupportable.

La Baronne se retourna, observant sa précieuse Teresa qui n'avait pas changé d'un poil. Toujours la blancheur d'une oie, les bouclettes dodues et brillantes, les lèvres pourpres et ses deux yeux bleus clairs qui lui donnaient un air d'enfant. La chambrière souriait. Elle n'avait pas encore vu Erzébeth depuis qu'elle était revenue, au milieu de la nuit. Il n'y avait qu'Ursula et Katalina accompagnée de cinq soldats qui depuis, n'avaient pas quitté le couloir de sa chambre.

Teresa elle, essayait de faire bonne figure. Elle voulait se montrer plus joyeuse, mais ne savait pas si cette réaction serait bienvenue auprès de la femme. Aussi, elle pinçait les lèvres, avait envie de dire autre chose que " Madame " et finalement fit une révérence en déposant le panier qu'elle tenait entre ses mains et annonçait qu'elle venait apporter une collation.

La jeune fille recula.

« Tu en mets toujours trop. Tu sais pourtant que je ne mange pas tant... Allons. Viens t'assoir. »

La manoeuvre n'avait pas d'autres buts que de voir si elle avait toujours une influence sur la jeune femme. Katalina avait assuré le contrôle du domaine, bien qu'Erzébeth lui voue une confiance quasi-totale, elle voulait s'assurer que son contrôle était toujours total.

Teresa ne savait plus trop où se mettre. Le calme de la Baronne était souvent le calme avant la tempête. Elle tortillait ses doigts et faisait au mieux pour ne pas laisser transparaitre son mal-aise.
Erzébeth observait ce qui venait de lui être apporté. Un petit panier dans lequel une serviette blanche emballait ce qui semblait être un pain blanc, une poire, quelques grains de raisin, une tranche de lard luisante et quelques fromages de chèvres ronds et cendrés parmi lesquels se tenaient une petite cruche de lait de chèvre tiède. Erzébeth de mémoire savait que la servante Teresa prenait souvent une grappe de raisin pour sa consommation personnelle, lorsque personne ne regardait. Ce qui avait souvent amusé la Baronne, qui n'ignorait rien de cette manoeuvre mais s'était toujours refusé de punir cet acte.

« Et bien... Tu vas bien accepter de picorer quelque chose avec moi ? » fit-elle avec un sourire amical. Au fond, la Baronne était revenue, et elle semblait en être plus que ravie.

Teresa arrêta enfin de trembler et toutes deux restèrent une longue heure dans les quartiers de la Baronne à discuter de toute chose. Erzébeth ne voulait pas cacher quoique ce soit, aussi elle raconta en détail ce qui s'était passé, comment elle avait appris a retourner ses bottes la nuit lorsqu'elle dormait pour ne pas en faire un abris à parasites, comment elle avait su reconnaître un champignon toxique d'un comestible, comment elle pouvait éviter de faire des feux la nuit et cuire la viande en l'arrosant d'agrumes et en l'emballant dans un tissus pour la consommer quelques heures plus tard. L'histoire des lépreux et comment elle avait fait flamber la chaumière pleine à craquer des fanatiques qui avaient brûlé vive une jeune femme.

Erzébeth raconta aussi à quel point la jeune mariée ressemblait à Teresa, s'en suit la promesse que rien n'arriverait à ses suivantes les plus fidèles tant qu'elle serait en tête du domaine. Elles riaient de concert et enfin, se séparèrent. Erzébeth regardait la jeune fille sortir, le sourire aux lèvres.

La femme resta un instant assise sur son lit. Elle se questionnait, se demandant comment il était possible de s'attacher autant à ses suivantes. Longtemps elle les comparait à des oies maladroites et sans ambition. Quelque part, elle se trompait. Elle espérait un jour que Teresa lui annoncerait qu'elle se mariait. Qu'Erzébeth ferait organiser une grande soirée en cet honneur et que les choses ne tourneraient pas au vinaigre comme elle venait de le connaître.

« Teresa... Elle m'avait vraiment manqué. »

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Dernière édition par Silmeria le Mer 8 Mai 2013 13:12, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Jeu 11 Avr 2013 14:27 
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On vint l'interrompre alors qu'elle lisait au bord de la fontaine sous le chant du madrigal rouge des forêts en cage, à sa droite. Katalina sa seconde semblait un peu embêtée. D'ordinaire, elle ne laissait rien transparaître concernant ses sentiments, là, Erzébeth ne tarda pas à comprendre que quelque chose de nouveau venait d'arriver.

« Baronne. Un groupe de gardes en patrouille a arrêté trois personnes qui volaient des moutons à un paysan. »

Erzébeth releva les yeux de son livre. Il n'était pas rare qu'on la tienne informée de ce genre de crimes, souvent elle en décidait elle même arbitrairement les sanctions. Mais l'expression de Katalina lui faisait sous-entendre que le vol avait quelque chose d'inhabituel. La seconde de la tueuse connaissait bien les châtiments réservés aux crimes commis, elle aurait pu rendre justice elle même mais au lieu de ça, elle été venue voir sa Baronne pour lui demander de venir.

« Et bien ma chère ? Ordonnez qu'ils soient pendus pour vol. C'est ce que nous faisons toujours, non ? »
« Je crois que vous devriez tout de même venir voir. Les voleurs sont surprenants. »

La brune n'en dirait pas plus. Katalina parlait peu et elle en avait déjà dit suffisamment pour attiser l'attention de la Baronne. Toutes deux s'en allèrent dans la grande salle.

----------


Lydia était en salle. Dubitative. La garde était plus nombreuse qu'elle n'aurait dû l'être pour trois voleurs de moutons. Au milieu de toute cette attention se trouvaient trois Shaakt. La surprise se vit immédiatement sur le visage de la Baronne et elle restait latente sur les autres visages, étonnées d'avoir devant eux de tels visiteurs. Les prisonniers étaient totalement entravés, chevilles et poignets alourdis par des boucles de fer qui claquaient à chacun de leurs mouvements.

Faute de connaître à la perfection ces étrangers, Lydia avait fait renforcer la garde, de mémoire, la générale Kendrane savait qu'ils maîtrisaient pour beaucoup la magie et ne voulait pas risquer la vie de quelqu'un du château. La blonde restait dans un coin de la salle, silencieuse, les doigts caressant son menton et quelques mèches de cheveux. Elle vint enfin à Silmeria qui observait elle aussi, en silence ces trois invités.

« Un fermier a entendu du bruit dans sa grange au petit matin. Il a fermé la porte de celle-ci, piégeant les voleurs. La garde est venue mais ils avaient déjà tué quatre moutons. Par perfidie, sans doute. Voici la seule arme qu'ils avaient. »

« Bien qu'ils soient rares en cette région, de nombreuses personnes affirment que les Shaakt sont souvent en groupe. Ces trois là doivent bien appartenir à un clan, une tribu ou quelque chose qui s'y rapproche. Depuis leur capture, ils n'ont pas prononcé un seul mot.»

Erzébeth observait attentivement l'arme que lui tendait la Kendrane. Un poignard simple mais robuste fait d'un métal sombre aux reflets gris, la garde était trop courte pour en faire une arme destinée au combat, le manche était strié et lourd, ça ressemblait presque à une lame de cérémonie ou un ustensile de table destiné à des us inconnus pour la Baronne.

Erzébeth n'avait pas encore d'idée quant à leur châtiment. Il était maintenant évident que ces trois avaient dépassé le simple vol et méritaient mieux que la pendaison.

« D'où peuvent bien venir ces trois Shaakt... Ne sont-ils pas un peu loin de leurs grottes ? » lança-t-elle avec un sourire moqueur. Du peu qu'elle en savait, les elfes noirs étaient profondément ancrés sous terre, ne sortant que peu à la surface, ce qui expliquait la surprise de tout le monde d'en retrouver ici. Elle avait également entendu qu'ils n'aimaient pas bien les autres races et s'estimaient tous bien supérieurs.

Les visages des trois elfes noirs tiraient des grimaces mais aucun d'eux ne dit mot. Le silence plombait toute la pièce. Les gardes eux, semblaient un rien tendus, car si la Baronne se mettait à les provoquer, ils pourraient répondre avec un acte de sorcellerie qui pourrait être fatal à quelqu'un dans la pièce. Erzébeth elle, semblait néanmoins savoir ce qu'elle faisait.

« En une journée, vous avez été pris au piège deux fois. La première par un fermier, dans une grange. La seconde par la garde, au Château de Keresztur. Qui seront les moutons maintenant ? »

Les expressions se tiraient, les yeux noirs des Shaakt envoyaient des tonnes de mépris à la femme qui s'approchait doucement d'eux, arme à la main.

« A qui est ce couteau de table ? Lequel d'entre-vous a tué ces pauvres petits moutons. Et pourquoi ? Qu'est ce qui dans l'esprit de nos trois nouveaux invités de marque a bien pu vous pousser à commettre non pas un mais deux crimes... »

Un temps passa.

« Et bien. J'imagine que vous ne voulez pas parler. Après trois jours de torture, peut être que vous aurez plus de choses à me dire. Un jour de torture par personne, sous les yeux de ses compagnons. Ca vous laissera le temps de potas...»
« Notre mort sera vengée ! Chienne ! »

Le sourire de la Baronne grandissait et n'annonçait rien de bon. Lydia avait raison. Les Shaakt n'était donc pas seuls si ils pouvaient espérer qu'on venge leur mort. Les deux autres qui étaient restés silencieux baissèrent la tête, déçus du comportement de leur frère qui les menait à leur perte à un rythme effréné. Tant qu'ils avaient quelque chose à dire, ils resteraient en vie. Maintenant la Baronne savait ce qu'elle voulait.

« Donc vous n'êtes pas seuls. Hm, laissez-moi deviner. Une cinquantaine ? Vous devez être tout de même assez nombreux pour essayer de voler plusieurs moutons, à moins d'avoir un appétit féroce. »

Elle se glissa doucement vers celui qui avait parlé. Le Shaakt la foudroyait du regard et la garde écarta les deux autres, laissant Erzébeth et sa proie seuls à seuls, face à face. La Baronne fit tomber entre eux deux la lame grise et tira lentement l'aiguille d'argent de ses cheveux qui se décoiffaient à mesure que la tige d'argent luisante apparaissait. Elle pointa le bout de l'aiguille sur la poitrine de l'Elfe, sur le côté gauche, entre deux côtes.

« D'ici quelques instants, vous apprendrez sans doute à vos dépends que la férocité ici, c'est moi. »
Elle enfonça l'aiguille d'un coup sec dans le poumon du Shaakt qui, plié de douleur, tomba presque à terre.

Erzébeth se recula d'un pas, la garde se jeta sur le Shaakt accroupis et haletant et l'emporta avec elle quelques pas en arrière. La tueuse elle, regardait le liquide rouge qui glissait le long de la tige d'argent et déclara :

« C'est presque le même sang qui coule dans nos veines. Je ne vois pas de raison pour lesquelles vous vaudriez mieux que nous. Voleurs. Voleurs de moutons. Que dis-je, même ça vous l'avez raté. C'est à se demander comment vous avez pu vivre assez longtemps pour atterrir ici. »

« Nous voulions de quoi nourrir notre clan ! Et nous connaissons trop bien les humains, faibles et égoïstes ! Alors nous sommes venus vous priver de vos vivres ! Vous ne méritez pas de vivre alors que certains d'entre nous ont faim ! »

Il cracha au sol en direction du trio de femmes. Un garde lui envoya la garde de son épée en plein ventre. Un second glissa une dague sous la gorge du Shaakt et leva la tête vers Lydia, attendant le signal pour égorger le prisonnier.

Ce fut Erzébeth qui leva la main, poing fermé et dit au garde :
« Halte. Vous n'avez pas entendu, jeune homme ? Notre prisonnier se plaint de la faim. Hm, on aurait dû y penser. Après tout, s'ils volent des moutons c'est bien pour les manger. Je pense que nous devrions offrir le couvert à notre ami, sa colère vient sans doute d'un estomac vide... Qu'on l'attache. »

On vit un sourire se dessiner sur le visage des gardes, Katalina elle même semblait amusée, Lydia, quant à elle conduisit les deux autres prisonniers dont un à la respiration sifflotante et paniquée.

Le troisième, visiblement le plus âgé était solidement entravé à une chaise en bois lourd dépourvue de dorure et de parure. Au bout de quelques minutes, deux palefreniers passèrent la porte, portant entre eux un lourd chaudron encore fumant destiné aux chevaux. Les animaux attendraient un peu. La mixture était épaisse et tiède, composée de poires bouillies, maïs, racines et marrons. Le Shaakt s'agitait. Il essayait tant bien que mal de secouer ses chaînes mains elles restaient invariablement fixées à la chaise.

L'elfe noir fut gavé. On glissait dans sa bouche trop étroite une sorte de truelle aux bords arrondis pour envoyer la mixture directement dans son gosier, pour lubrifier le tout, l'eau des animaux dans laquelle flottait encore quelques fétus de paille. Le bord des lèvres du Shaakt avait craqué et le sang se mêlait maintenant à la nourriture. Le chaudron ne désemplissait pas. Il secouait la tête mais les palefreniers, habitués aux chevaux plus fougueux n'avaient aucun mal à maintenir, de leurs grosses mains, la tête du prisonnier.

Son ventre était déjà tendu et le chaudron était encore plein. Il en fichait partout sur la table et dès qu'on sentait qu'il se faisait vomir, on lui pencha la tête en arrière et noya le tout avec une louche d'eau croupie. Ses yeux pleuraient et son énergie chutait. Son ventre était si tendu qu'Erzébeth eut envie de taper dedans pour voir ce que ça donnerait.

Katalina observait également la scène. Tous se demandaient combien de temps l'elfe allait survivre. Puis, ce ne fut qu'au bout de deux heures de gavage que le Shaakt tomba. Tête sur la table parmi les débris de ses relents. Katalina s'approcha du chaudron et dit à la Baronne avec un certain sourire ravi :

« Quel appétit. Il reste à peine de quoi en tuer un autre. Qu'en est-il des autres prisonniers ?»

Erzébeth elle, était dans ses songes. Elle avait observé distraitement la scène, trop occupée à se demander ce qu'il en était du reste du clan. Etaient-ils une centaine ? Plus ? Cette vermine ne se bat pas sur un champ de bataille mais de manière insidieuse. Elle ferait brûler les granges, les maisons, tuerait les villageois mais n'affronterait pas la Baronne directement. Comment elle pourrait endiguer cette menace si les choses venaient à s'envenimer ?

« Pendez les autres à l'entrée du château, sans cérémonie. Jetez celui-ci aux chiens. »

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Dernière édition par Silmeria le Mer 8 Mai 2013 13:19, édité 2 fois.

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Ven 12 Avr 2013 23:12 
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« En ces temps difficiles, j'ai compris que la justice devait être respectée ou arrachée. Ces chiens l'ont bien compris. »

Erzébeth et Katalina se trouvaient dans l'enclos. Une petite pluie faisait vibrer les flaques d'eau, la terre devenait doucement molle et tournait à la boue. Les chiens du domaine rassemblés dans un enclos s'arrachaient des lambeaux du Shaakt. Il leur avait été livré entier. Les mâchoires des molosses avaient fait le reste. Les deux femmes restaient silencieuses. Toutes savaient que les Shaakt étaient des êtres perfides mais elles se refusaient également de s'en tenir à des racontars de voyageurs et des rumeurs colportées et déformées par le bouche à oreille.

« Lydia rapporte que les villageois ont peur. La nouvelle de trois elfes noirs se répand et beaucoup de villageois pensent qu'ils vont chercher à se venger. »

Erzébeth observait la dépouille méconnaissable de la victime tirée et trainée sous les crocs des molosses. Les entrailles et le sang se mêlaient à la terre et aux déjections des animaux. Vu ainsi, ils n'étaient en rien une menace. Fragiles. Mortels.

« Quoiqu'il se passe, ne nous attendons pas à une attaque directe. Je pense qu'ils vont harceler les paysans et les troupeaux. Nous ferons en sorte que rien de tout ça n'arrive bien sûr. »

« Bien que je ne sois pas experte, je sais de par les livres que les Shaakts sont des êtres maléfiques, qui vivent en clans dirigés par des femmes et qu'ils excellent dans l'art magique et du meurtre. Je crains qu'on ne trouve tôt ou tard un assassin dans le domaine. S'il n'est pas déjà là. »

La Baronne frémit doucement. La pluie tombait plus fort et les chiens se mettaient à l'abri, abandonnant le corps à son état. L'idée qu'un meurtrier puisse entrer au château était tout de même peu probable si on considérait l'endroit où se trouvait le domaine. Au milieu d'une côte, la majeure partie des remparts étaient directement au dessus de rocs abruptes et escarpés rendant l'ascension risquée et mortelle en cas de chute. Erzébeth et ses suivantes étaient en sécurité, mais qu'en était-il du reste ?

« Ne crions pas avant d'avoir mal. Ceux là déjà ne sont plus une menace. Si les paysans ont peur, ça pourrait nous être utile. Les rumeurs montent facilement au château et elles permettront vite de savoir si oui ou non, ils étaient plusieurs. »

La Baronne s'en alla. Le soleil brillait au loin, par delà les nuages gris qui pleuraient sur les terres. Le printemps et ses parfums de fleurs nouvelles embaumait déjà quelques pièces. Katalina s'en chargeait personnellement. La seconde aimait les fleurs, autant qu'elle aimait les entretenir et elle faisait à ses heures quelques parfums qu'on vantait comme étant exquis.

Les deux autres Shaakt se balançaient au bout d'une corde. Le visage gonflé, la peau ruisselante sous les craquements de la corde de lin fixée au bois brut qui les avait vu tomber et se débattre jusqu'à ce que la mort vienne les cueillir dans le printemps de leur vie.

« On dit que la pluie lave les crimes de morts. Est-ce vrai ? »

Teresa se trouvait là aussi. Elle était venue se glisser sans bruit derrière Erzébeth et observait les deux corps sans vie. La Baronne appréciait beaucoup sa chambrière. Malgré sa naïveté, sa timidité, elle portait en elle toutes les promesses de la jeunesse et la flamme increvable de la fidélité. En dépit des souffrances que lui imposait la Baronne lors de son ascension au château.

« Je crois qu'il est certain crime que l'on ne peut laver. Encore moins se défaire. Partons. Les fleurs sont nées et elles feront un bien meilleur spectacle à vos eux que deux elfes renvoyés au néant. »

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Dernière édition par Silmeria le Mer 8 Mai 2013 13:21, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Dim 21 Avr 2013 01:50 
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Durant son absence, Katalina avait transformé la salle de lecture d'Erzébeth en une gigantesque serre située au coeur du château. Elle y faisait germer de nombreuses graines et maintenant que la tiédeur des beaux jours revenait accompagnée des premiers rayons de soleil, les plantes poussaient et la seconde se remettait à son passe temps préféré, la confection de parfums.

Erzébeth en faisait le tour suivie de sa chambrière. Katalina n'était pas là pour jouer les guides, elle détestait ça, pour elle, la confection était un intérêt qui se passait de présentation, les effluves rendaient la pièce délicieusement agréable.

Quelques rayons de soleil traversaient les pâles vitres situées en hauteur et on voyait le pollen danser dans les airs sous la forme de petites boules dorées qui tombaient doucement sur la terre. Au centre de ce ballet naturel, la fontaine fraichement gagnée par la mousse faisait chanter l'eau claire qui ruisselait sur la roche.

« Il faut vraiment lui reconnaître un don pour les parfums... Saviez-vous ma chère, qu'elle ne les confectionne qu'à partir de plantes mortelles ? »

« Oui madame. Mais elle affirme qu'il n'y aucun danger pour celui qui se parfume avec. Elle dit qu... Dame Katalina dit que c'est grâce à l'alcool que les parfums ne sont plus dangereux. »

Sur de nombreux supports de pierre, la seconde du domaine avait fait disposer les plantes usées lors de la confection d'un parfum ainsi qu'une fiole. Chacun des autels avait un parfum et les plantes qui le composaient. Erzébeth les respirait à plein poumons. Sa chambrière prit congé et finalement, la Baronne se retrouva seule, du moins, c'est ce qu'elle pensait.

Elle ouvrait de petites fioles de verre gravé et huma les senteurs qui s'en dégageaient. Katalina avait su rendre ses créations si variées que chacun de ces trésors était une réelle surprise. Il y avait des odeurs de fleur, d'oeillet, de datura, de pins.

« De la volaille... »

La tueuse ouvrit les yeux. Une odeur s'était glissée dans son expérience, une odeur qui ne faisait pas partie des fleurs ni des plantes, pas même de la terre. Il s'agissait d'une ombre qui s'était glissée sans bruit entre les gardes au grès des couloirs. Un mal étranger qui avait rampé jusqu'à elle et l'observait au coin d'une porte. Ses sens étaient en alerte, Erzébeth n'avait pas oublié. Elle se sentait observée.

La tueuse referma les yeux et respira encore. Il fallait continuer. De toutes façons, elle n'était pas armée, il n'y avait que l'aiguille dans ses cheveux pour lui servir d'arme. Elle ne pouvait pas non plus héler la garde sous le coup d'une intuition.

Pendant quelques minutes, la tueuse hésitait quant à ses sens, les parfums cachaient trop de choses et puis soudain, son nez fut remplacé par ses yeux et elle vit une ombre sur le sol qui bougeait derrière une porte.

Même si elle n'avait pas pu voir la personne, seulement l'ombre, elle avait trahi la présence de quelqu'un ou quelque chose qui s'était arrêté pour observer et de toutes évidences, quelqu'un qui n'avait rien à faire ici.

C'est la coiffure défaite que la Baronne arpentait maintenant les couloirs d'où venaient la menace. L'aiguille glissée entre deux doigts, habilement cachée, elle préférait feindre l'ignorance plutôt que de faire comprendre à l'espion qu'elle venait de le remarquer. Quoiqu'il fut, l'intrus avait traversé les couloirs à une vitesse époustouflante et Erzébeth ne pu entrevoir qu'à une seule reprise une forme noire sautiller d'un pas étrange et déglingué au coin d'un corridor. Elle eut un sourire, le corridor emprunté par l'inconnu menait à un balcon sans issue, à moins d'avoir envie de faire une chute et de s'écraser sur les flancs affûtés de la roche.

«... C'est étrange. » lâcha-t-elle.

Car elle était sur le balcon en question, mais il n'y avait rien. Rien d'autre qu'un croisement moqueur. Erzébeth resta un instant accoudée au balconnet. Au bas, les petits villages aux cheminées fumantes et aux fenêtres éclairées. Les gens rentraient du travail, parfois sous la pluie et allaient profiter d'un repas avant une paisible nuit. Car c'était ainsi qu'elle voulait que ça se passe. Si pendant un temps elle faisait trucider le moindre vaurien en rivalisant avec elle même de méthodes de plus en plus cruelles, c'était pour réaliser un écrémage ethnique. Elle désirait garder les fiers travailleurs, les artisans modèles qui vivraient sans être embarrassés par les voleurs et criminels.

Katalina vint la rejoindre, elles restèrent toutes deux silencieuses, face à l'horizon jusqu'à ce que la Baronne ne rompe le silence du soir.

« Vous le saviez ? L'espion. »
« Un Krähe. Cela fait quelques jours que j'entends des commérages sur un inconnu. La garde ne mettant pas la main dessus, je pensais à des sottises jusqu'à ce que je le vois moi même. Il évite les gardes, il évite Lydia mais est moins prudent avec les servantes car il sait qu'elles ne représentent pas une grande menace. Je suis même surprise que nous ayons pu le voir. Je ne sais pas ce qu'il fait ici. Du moins, ce qu'il espionne .»

« Son arrivée concorde avec les heurts rencontrés avec les elfes noirs ? Il aurait pu être engagé par ces vauriens pour savoir ce qu'on envisageait à leur sujet. »

« A dire vrai, je ne sais pas quoi en penser. Si les Shaakt sont dans les parages, ils risquent d'agir de façon différente, espionner ne serait pas une solution surtout qu'engager un Krähe est difficile et surtout destiné à une personne ayant beaucoup de ressources. Je crains qu'il ne s'agisse de quelque chose d'autre. »

« Les malheurs ne sont jamais loins les uns des autres... Et pour les Shaakts ? Je crains qu'ils ne répondent. Nous avons beaucoup de mendiants ici et aux alentours. Ils cherchent la même chose que les elfes noirs. De quoi subvenir à leurs besoins. Je crains que notre ennemi ne cherche à en tirer profit. »

« Une rébellion ? C'est envisageable oui. Plusieurs domaines des Duchés en ont subit ces derniers mois. Beaucoup de bonnes familles ont terminé sous les arbres au bout d'une tresse de lin. Mais il faudrait être nombreux. Je ne crois pas que les mendiants ne représentent une menace directe. »

« C'est un problème que je compte résoudre. Combien de prisonniers sont dans les geôles ? »

Katalina arracha une fleur de lierre. Les plantes grimpaient des douves jusqu'aux balcons grâce au lierre qui créait un lieu de vie à part, fait d'insectes, de ruches et de nids d'oiseaux.

« Une douzaine. Des vols mineurs ou bagarre le plus souvent, bagarre d'ivrognes pour être exacte. Un projet les concernant ? »

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Dernière édition par Silmeria le Mer 8 Mai 2013 13:26, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Dim 28 Avr 2013 18:20 
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Les tours de Keresztur viraient au vert, Erzébeth elle avait viré au rouge. La Baronne avait exigé que les prisonniers soient envoyés à l'orée d'un bois pour y reconstruire le moulin dans lequel elle avait privé le voleur Goldrik de sa tête. Erzébeth avait un plan pour régler le problème de la mendicité et de la pauvreté sur ses terres, elle ne voulait pas que les Shaakts usent des esprits trop faibles et désespérés pour les retourner contre elle. Cela dit, si elle s'était réfugiée dans sa tour verte de rage, c'était qu'elle avait assisté à la sortie des prisonniers et que l'un d'eux avait craché sur ses bottes. Certes, ce geste lui avait coûté un châtiment supplémentaire, si on en croyait la langue encore boursouflée et tiède que la tueuse tenait entre ses doigts serrés, voire même crispés. Elle malaxait ce triste organe déjà vidé de son sang comme une éponge en observant les hommes de garde conduire ces vauriens jusqu'à leur lieu de châtiment.

« Puis-je espérer vous approcher sans risquer de me faire démembrer par votre chien ? »

Car si le printemps arrivait, Erzébeth n'y était pas insensible, elle s'était même prise d'affection pour un des chiens du domaine qu'elle empruntait de temps à autre à son maître. Un bon molosse presque tout en muscle avec un sens de l'humour mal dosé. De temps à autre, il sortait de sa sieste et courrait vers un rat du château. Teresa sa chambrière; qui avait vécu la douloureuse expérience de se faire renverser par un molosse trop joueur, n'appréciait que moyennement l'existence d'Hector, le chien.

Erzébeth appréciait sa présence paisible, lorsqu'il ne tuait pas de rongeurs, il restait sagement allongé sur le sol à roupiller et acceptait de se lever lorsque la Baronne avait envie de lui grattouiller le ventre. En réalité, elle ne l'avouait pas, mais Cèles sa Faera et Hrist, son alter-ego maléfique, lui manquaient.

Elle laissa tomber la langue le long de son balcon, le morceau de chair alla se perdre dans les tentacules vertes du lierre d'été et la femme se retourna vers Katalina qui venait d'entrer.

« La garde ne rapporte pas de rumeurs concernant les Shaakt. La tension au sein des villages semble s'apaiser. J'ai également une visite pour vous. Une ancienne connaissance qui arrive en même temps que quelques voyageurs Kendrans, venus pour distraire les domaines avec l'arrivée du printemps. »

« Des bardes ? »
« Hm... Des péquenauds. J'en ai fichu la plupart dehors avec pour ordre d'amuser les villageois, j'ai préféré garder ceux qui semblaient le mieux vêtus et qui ne sentaient pas la bouse. J'ai eu plus de mal... »

Erzébeth tira un sourire. Elle s'avança jusqu'à sa porte suivie d'Hector et de Katalina pour descendre jusqu'à la grande salle. A mesure qu'elles y approchaient, elles purent entendre très distinctement des aboiements familiers.

« Hahahaha, par ma barbe, la langue. LA LANGUE ! Haha, c'était une excellente idée. Enfin, s'que j'en dis moi. J'aurais préféré qu'on lui COUPE SA GROSSE PAIRE DE...»
« Aheum. » interrompit Katalina en lui lançant un regard noir.
«.. Avant des les lui enfoncer à coup de pompe dans le ..»
« Bonjour... Capitaine Von Klaash. » Trancha également Erzébeth, déjà lassée par les propos vulgaires du capitaine de la Laide.

« Comme je vous le demandais, vous n'êtes pas un peu loin de votre navire ? »
« Haha, et toi ma poulette ? T'es pas un peu loin de ton poulailler ? »

La seconde passa par toutes les couleurs possibles avant de réussir enfin à contenir son énervement. Si elle en avait eu l'autorité, elle l'aurait flanqué immédiatement à la porte avec les chiens au cul.

« Bien... Puisque votre venue rime avec convivialité... Qui est cet homme ? »
« Lui ? J'en sais pas bien ,moi. J'trainais à pieds sur les routes et c'est cette tafiole qui a insisté pour me conduire ici. Regardez moi ces frusques ? Et il se trimballe un bouloum en cage. HAHA ! Un putain de CASSE DALLE AU BOUT D'UNE LAISSE. Hey mon pote, hey, t'as déjà été touché par une femme ou bien ? Jamais ? Bin quoi ? »

Von Klaash puait l'alcool à trois lieux mais comme Katalina l'avait annoncé, il était accompagné de voyageurs. L'homme qui se tenait à côté de lui, visiblement très mal à l'aise à cause du capitaine, était relativement bien habillé, assez jeune, beau garçon et il serrait effectivement dans ses bras protecteurs un petit animal bleu, un petit bouloum effrayé par l'agitation de Von Klaash. Le marin n'était pas habitué aux relations humaines, il avait passé le plus clair de son temps à boire de l'alcool réalisé par ses soins à base d'algues au beau milieu de marins isolés qu'il embarquait avec lui des mois durant. De nombreuses histoires souvent horribles collaient à ce triste personnage.

Le jeune homme portait un pantalon de jute et une large houppelande qui devait servir aussi bien à se couvrir lors de son sommeil que de se protéger des pluies. Elle avait une jolie couleur mais sa matière n'avait rien de noble, de la laine épaisse mal tricotée. C'était ça qui amusait Von Klaash qui le comparait à ces moitiés d'hommes efféminés que l'on trouvait parfois près des ports et qui coutaient souvent deux Yus de moins que les femmes, même les malades.

Le Capitaine riait si fort qu'il en attrapa une quinte de toux. Katalina réagit immédiatement.

« Et bien ? Vous avalez votre connerie de travers ? Vous voulez quelque chose pour dégager votre gorge ? De l'eau ? Un nid de frelons ? Un coup de hache peut être ? »
« Eeeurk Kof kof Crrrèèeurk. keuf, morue. »

« Toi, jeune homme. Viens et raconte moi ton histoire. Ne fais pas attention à notre Capitaine... Il fait parfois... Preuve d'éloquence, et c'est ça façon pour lui de montrer qu'il est notre ami. »

Le jeune homme semblait plus en confiance face à Erzébeth qu'à Von Klaash qui était maintenant plié en deux à cracher ses poumons sous le regard amusé de Katalina qui comptait le temps qu'il mettrait avant de crever étouffé dans ses propres glaires.

« Un. Deux. Trois. Quatre. Cinq... »

Le jeune garçon vint s'approcher de la Baronne. Il présenta un petit bouloum, une boule de poils bleus aux grands yeux noirs, l'air bête mais terriblement attachant et mignon.

« Mes respects madame. J'arpente les routes avec quelque camarades, ils sont restés dehors, moi je fais partie d'une.. Troupe. J'ai un bouloum apprivoisé ! Il sait faire des tours. Regardez donc madame. »

Sa voix était quelque peu hésitante, mais on voyait que derrière ces traits, ce jeune garçon avait pu forger son art et son éloquence devant plusieurs foules de paysans rustres. Il ne fit pas plus de cérémonies et présenta Kowi, son bouloum. La petite boule de poils vint grimper sur l'épaule d'Erzébeth et lui flanquer sa petite truffe froide au creux du cou. La tueuse trouvait le spectacle charmant, le petit animal était doux et tiède, affectueux, la Baronne vit chez son maître une légère crainte, de peur qu'on lui fasse du mal, trahissant un attachement énorme à ce petit animal.

« Soixante-douze. Soixante-treize. Ha, Teresa, venez ici ma petite. Qu'avez-vous dans les mains ? De l'eau ? »
« Heu. Oui madame. Mais c'est l'eau croupie des cuisines. »
« Ca fera l'affaire. Donnez la à notre cher Capitaine. »

Teresa eut un sursaut. Elle connaissait la nature violente de Von Klaash et craignait de recevoir un mauvais coup à cause de l'ordre de Katalina. Mais à en juger le regard de la femme, elle ne savait pas qui elle devait craindre le plus. Très mal à l'aise, elle s'approcha un peu de Von Klaash trop occupé à s'étouffer pour faire attention à elle. Reculant d'un pas, elle jeta de nouveau son regard dans celui de Katalina qui ne laissait pas de place à la compassion. Voyant qu'aucune option ne s'offrait à elle, elle tendit vivement l'eau à Von Klaash sans dire un mot, puis, il lui arracha la soucoupe de cuivre des mains et but à gueule renversée, en fichant autant sur sa barbe mal taillée que dans son bec.

Aucune réaction. Von Klaash n'avait pas été dégoûté par la mixture, mais il l'avait bu si vite qu'elle était arrivée de travers, et il s'étouffa encore. Toussant deux fois plus fort qu'au départ.

Katalina restait figée. A la fois surprise et déçue que ça n'ait pas pu fonctionner. Sa vengeance devrait attendre un peu.

« Soixante-quatorze. Soixante-quinze... »

De son côté, le jeune garçon ne fit plus attention à Von Klaash, il souriait en montrant quelques tours à Erzébeth, comment le Bouloum était capable de se glisser dans une manche pour en ressortir vers l'épaule, comment il pouvait attraper au vol un noyeau de prune et le manger, toutes ces petites choses ridicules mais qui apportent une touche de charme dans les marchés et les villages.

« Dis moi, mon garçon. Comment sont les routes en ce moment ? As-tu vu des Elfes noirs en venant par ici ? »
« Non madame, la seule créature maléfique que j'ai pu rencontrer est actuellement en train de s'étouffer derrière moi. »

Son visage n'avait pas exprimé la moindre sensation de regret, le jeune homme avait du cran, plus qu'on ne pouvait le croire en voyant sa gueule juvénile et sa voix fluette. La Baronne lui adressa un sourire, à croire qu'elle aimait sa franchise. Le bouloum lui, s'accrocha à l'aiguille d'argent qui tenait attachés les cheveux de la Brune. Elle glissa et le bouloum tomba à terre, l'aiguille suivit sa chute et fit un bruit clinquant en heurtant la pierre.

« Haha, et bien, Kowi, je t'avais déjà dit de ne pas t'accrocher aux parures. » Fit le jeune garçon en se penchant pour toiser son petit animal.

Mais malheureusement, Kowi n'était pas le seul animal dans la pièce et Hector avait été tiré de sa sieste par un couinement imbécile de bouloum trop proche à son goût de celui du rat. Le molosse se dressa immédiatement sur ses pattes et alla cueillir la tête du petit bouloum qui n'avait rien vu venir comme on cueille une pomme sur un arbre. Hector croquait le petit crâne avec bruit tout en léchant les coulures de sang et de cervelle le long de ses babines.

Même Von Klaash avait arrêter de tousser, tous observaient la scène. Erzébeth était prête à se confondre en excuse, mais en voyant le visage dévasté du jeune garçon, elle comprit que ça ne servirait à rien. L'expression anéantie du jeune chantre et l'expression complètement indifférente de son chien provoqua en elle un grand éclat de rire qu'elle ne pu retenir, elle rougit et fit de son mieux pour cesser de rire face au ridicule de la situation et son rire à demi étouffé fut bientôt rejoint par le plus bruyant de l'assemblée, Von Klaash. Le jeune se mit à pleurer et tout en reculant peu à peu face au corps décapité de son compagnon, il prit la fuite par la porte ouverte que Teresa venait d'emprunter.

Depuis, plus personne au château n'eut le plaisir de voir le jeune homme. Erzébeth avait tout de même chargé Teresa de lui faire porter dix pièces pour le dédommager. A défaut d'avoir séduit le domaine avec son animal, il avait apporté une certaine joie... De courte durée.

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Dernière édition par Silmeria le Mer 8 Mai 2013 13:35, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Lun 6 Mai 2013 00:19 
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Il faisait nuit noire. Keresztur baignait sous un ciel pauvre en étoiles, le vent soufflait et faisait bruisser les arbres dans un chant lugubre. Sous la pierre froide des murs du domaine, l'agitation grandissait. La Baronne avançait dans les couloirs armée d'une bougie et se frayait un chemin parmi les curieux et les gardes jusqu'à la chambre de Teresa.

On avait pu entendre la jeune chambrière hurler d'effroi dans la nuit, un cri qui avait glacé le sang de la Baronne située juste au dessus de sa chambre, la fillette avait crié si fort et si longtemps que tout le château avait été en alerte. Les premiers sur les lieux furent les gardes qui avaient vite fait d'empêcher tout le monde d'entrer dans la chambre. Au chevet de Teresa, Katalina visiblement tirée elle aussi de son sommeil, tentait de la réconforter.

Erzébeth ordonna qu'on fasse place nette, la garde repoussa doucement les servantes qui s'agglutinaient autour de la chambre. Le spectacle aurait retourné les estomacs de plusieurs jeunes filles du domaine. Teresa avait été réveillée par un bruit dans le couloir et lorsqu'elle alluma sa bougie, elle réussit à distinguer deux têtes de chiens sur son chevet.

« Erzébeth... On a sous estimé le problème. Les têtes sont encore fraiches, la coupure suinte encore. C'est un avertissement. Quelqu'un va s'en prendre au domaine et nous ne sommes pas en sécurité ! » La seconde avait terminé sa phrase avec une voix tranchante, comme elle savait bien le faire. La Baronne n'en croyait pas ses yeux. Les deux têtes mutilées étaient fourrées dans des sacs de toile par un garde. Teresa était planquée dans son lit et gémissait, essayant de calmer sa crainte. Un garde lui exposa n'avoir vu personne en se rendant dans la chambre de Teresa. Cependant, il insistait bien sur le fait que l'intrus soit probablement encore dans le domaine, peut être même juste à côté et que la garde cherchait déjà le coupable.

« Vivant... Je le veux vivant, peu importe qui, il faut l'interroger. Teresa, ma petite, vous n'avez vu personne ? »

« Elle n'a vu personne, j'ai déjà essayé de savoir mais rien. Quelqu'un est venu, a déposé les têtes et s'en est allé en silence. Estimez-vous heureuse qu'il ne se soit rien passé de pire ! »

La colère montait dans la poitrine des deux femmes. Erzébeth était furieuse de l'affront qu'on portait, qu'on se moquait de sa sécurité et qu'on abandonne des menaces dans la chambre de ses suivantes. Katalina elle, entretenait une relation plus complexe avec la colère, beaucoup pensèrent qu'elle craignait juste pour sa vie et celle des filles du château et qu'elle serait strictement insupportable tant qu'on aurait pas mis la main sur le tueur qui avait fait ça.

Erzébeth remonta prestement dans sa loge, elle se devait d'assister aux recherches, de toutes façons, il lui aurait été impossible de dormir avec cette colère et cette étrange panique qui lui rongeait les pensées. Arrivée dans sa chambre, elle ferma la porte, il n'y avait pas de garde dans le couloir, tous étaient descendus au niveau inférieur pour traquer le fugitif. Elle alluma quelques bougies ça et là dans la pièce, essaya de se calmer mais intérieurement, elle bouillait. Elle s'arma de patience et après avoir enfilé quelques parures plus chaudes, elle rangea ses cheveux en chignon négligé qu'elle fit tenir à l'aide de son aiguille d'argent.

Sur la table de sa chambre, elle fut attirée par un phénomène étrange. Katalina lui avait offert la veille quelques plantes. Bien qu'elle n'eut pas l'esprit très nature, la Baronne appréciait les plantes toxiques de Katalina et aimait à les étudier pour affûter ses connaissances. Les feuilles vertes et épaisses penchaient doucement. Les fleurs blanches brunissaient à la triste lueur des flammes et les plantes flétrissaient en accéléré. Jusqu'à mourir.

Le sentiment de panique monta d'un cran. Si les plantes venaient de mourir aussi vite, c'était bien l'oeuvre d'une magie. Elle se tourna brusquement.

Le choc fut violent. Erzébeth le reconnu immédiatement. Son passé lui explosa au visage et apportait avec lui toutes les conséquences que ça impliquerait. Cet homme au visage détraqué, au sourire jaune et aux cicatrices diverses qui lui traversaient le visage, mal rasé, crocs pourris, chauve petit au front carré. Elle avait ardemment souhaité ne plus voir ce visage, qu'il soit mort, enterré quelque part ou bouffé par les vers dans le fond d'une fosse de chemin. Or il était là. Au sourire presque amical qui donnait une touche encore plus terrifiante à ce personnage. Car l'homme qui avait tué les chiens, qui avait échappé à la garde et s'était glissé jusque dans sa chambre n'était autre que son ancien employeur de Kendra Kâr, l'homme pour lequel feu Silmeria avait clos de nombreux contrats en particulier celui d'un riche homme de la ville qui vivait dans un bordel.

« Espèce d'ordure !» lança la Baronne tout en essayant d'agripper le cou de son adversaire pour l'étrangler. La réaction ne se fit pas attendre et de ses mains, il attrapa les poignets de son attaquante pour bloquer sa tentative. En réponse, elle lui envoya immédiatement son genoux dans l'entre-jambe. Il tomba plié.

« Pfeuh... Tu pensais que j'allais me faire avoir deux fois de suite ? Je garde encore une désagréable cicatrice au cou depuis que tu as cherché à m'égorger dans l'auberge. Tu aurais dû affûter tes techniques. »

Mais pour toute réponse, elle n'eut qu'un éclat de rire. Dans le couloir Erzébeth pu entendre des bruits de pas rapides. Bientôt la porte s'ouvrit à la volée et deux soldats entrèrent brusquement, renversant un vase au passage et il prirent immédiatement l'homme entre les griffes. Entravé, une lame sous la gorge les deux soldats n'attendaient qu'un ordre, un simple mot pour agir.

Il riait toujours. Mais à la lumière du couloir, les soldats purent remarquer d'étrange bubons sous la gorge, en soulevant son crâne pour y placer sa lame, l'un des deux hommes déclara brusquement :

« Bon sang, qu'est ce que c'est ? Il saigne de partout ! »

Le visage n'avait rien hormis sa laideur naturelle, or le jeune soldat disait vrai. Son corps était recouvert de cloques et d'étranges bubons dont certains saignaient ou suintaient. Mais si la douleur provoquait chez lui quelques toux, il n'en cessait pas moins de rire. Ses mains étaient pleines de sang, un sang noir et craquelé, probablement celui des chiens qu'il venait de tuer mais le soldat qui le fouillait ne pu mettre la main sur aucune arme.

Erzébeth était si en colère qu'elle commençait à en voir trouble. Elle fit monter l'homme dans la plus haute tour de Keresztur, une alcôve étroite et sombre qui a la lueur des bougies avait un aspect presque sacré, silencieux, rien d'autre qu'une trappe et une chaise en bois. L'homme solidement attaché à la chaise fut privé de ses vêtements noirs. Après un rapide examen, il n'y avait rien de particulier dans son équipement. Une bague rouge en forme de serpent, une tenue de lin et de cuir noir sale et pleine de pu et de sang. Pas d'arme ni de clef, rien d'autre. Il n'avait toujours pas dit un seul mot.

« Réveillez le bourreau. Qu'il monte et prenne son matériel le plus abject. Il a du travail. »

On acquiesta et bientôt, Erzébeth fut seule avec le prisonnier, elle ne voulait pas qu'on cherche à assurer sa protection, elle voulait montrer qu'elle était capable de se défendre seule en dépit des menaces envoyées.

« Tout ton matériel ne te sera d'aucune utilité. Si je suis ici c'est pour te raconter quelque chose... Approche.»

Dès lors que ses yeux furent totalement habitués au noir ambiant, Erzébeth distingua facilement l'étendue des dégâts. Son corps avait déjà été torturé. On avait lacéré sa chair il y avait peu de temps et par dessus tout, il avait été empoisonné. Sous sa peau, quelques tâches noires. La Baronne mit du temps avant de comprendre ce dont il s'agissait, quelqu'un avait glissé des feuilles de plantes empoisonnées sous la peau de l'homme. Le poison s'était diffusé dans son corps ce qui expliquait pourquoi il était en train de vomir et de tousser.

« Tu es venu seul ? »

« Hahaha. Quelqu'un m'a envoyé ici. Je vais mourir. Tu devrais le deviner facilement non ? Tu étais assez douée dans ce domaine. »

Il cracha. Ses cheveux étaient complètement dégarnis et il bavait une substance jaunâtre mêlée au sang qui sortait de ses gencives. Erzébeth lui jeta un sourire cruel et déclara que s'il expliquait ce qu'il faisait ici, loin de Kendra Kâr, elle mettrait fin à ses souffrances sans cérémonie.

« Tu as perdu de ta poigne... Autrefois tu m'aurais plutôt fait soigner pour que mon calvaire s'étende... Le luxe a du te rendre molle. C'est regrettable car... Ta fin approche. »

« Il y a une fin pour toute chose. Je devrais me consoler de savoir que tu seras mort avant moi. Et si les blessures n'ont pas raison de toi, crois moi bien que je me ferais un malin plaisir à extirper la dernière étincelle de ton être. »

« On s'était bien amusés hein. Les émeutes, l'aéromancien égorgé. De mémoire tu avais égorgé trois de ses femmes aussi. Ho. Oui. Je me souviens maintenant. »

Erzébeth fit quelque pas dans la pièce. Tout sentait la poussière maintenant mêlée à la transpiration de l'homme inconfortablement assis sur la chaise. La Baronne s'arrêta de marcher et se fixa devant une fenêtre qui donnait sur le dehors. Le ciel était noir mais au loin, la lumière commençait à poindre.

« Pourquoi l'espion corbeau ? Tu pouvais facilement rentrer sans te faire prendre, même blessé. Qu'est ce qui a pu te motiver ? Et plutôt, qui a tu mis en colère pour mériter une telle torture ? »

« Ca en fait des questions... Le corbeau ne vient pas de moi. Disons que la personne qui m'a torturé est celle qui désire... Ta mort. Elle a formé un cercle. Un engagement. Un groupe... Tu me suis ? »

Erzébeth restait impassible, du moins c'est ce que les apparences montraient, en son for intérieur, la flamme de la colère prenait des mesures d'incendie vorace.

« Nous étions quatre. Il a offert à chacun de nous un objet. Un sort. Le mien a la forme d'une bague. Celle que tu m'as confisqué. Grâce à elle, je devais faire mourir les plantes du domaine. C'est comme ça que tout commence. Il n'y aura pas de belle saison ni de fleurs pour toi. Rien que la décrépitude. Je suis celui qui te l'annonce. »

Elle tourna la tête, il était de dos. Transpirant, affaibli, ensanglanté et tremblant, il trouvait toujours le moyen de garder un ton stable et sa voix ne faiblissait pas.

« Quatre ? »

Un vomissement soudain frappa l'homme. Des grumeaux jaunes et baignant dans le sang tombèrent sur ses genoux. L'odeur tiède devenait très désagréable et Erzébeth ouvrit doucement la fenêtre.

Un vent de face frappa soudainement le visage de la tueuse et la plupart des bougies moururent sous la bourrasque. Sa voix devenait de plus en plus terrifiante. Le message également.

« Tu croyais qu'il s'agissait là d'un coup du sort ? Les Shaakt ? Les espions ? Et maintenant moi... Tu crois que je me serais laissé avoir si facilement ? Tu te souviens, les plages pleines de barbares ? C'était nous. Le chevalier lézard c'était nous aussi... »

« Je m'en souviens bien... Après sa mort, il s'est passé quelque chose d'étrange. Dans les fourrés non loin du lieu où il fut défait, j'ai vu un masse noire, tentaculaire apparaître dans un flash blanc et disparaitre. Sur les lieux, il n'y avait plus que des morceaux d'hommes. C'était toi l'auteur de ce sort ? »

« Hahaheurk. Oui. Un sort d'autrefois. Il ne se maîtrise pas, quelque chose confié par notre maître. Une pointe spirituelle. Si tu savais les objets qu'il a su mettre de côté rien que pour toi... Nous avons décidé de commencer doucement avec la décrépitude... Un prélude à ta chute. »

Les talons de la femme claquèrent contre le sol, elle s'approcha jusqu'à n'être qu'à quelques centimètres en face de lui, ses doigt se serrèrent sur son menton et elle lui releva la tête.

« Mais de qui est-ce que tu parles !? QUI ?»

« C'est un fardeau et un secret que j'emporte volontiers avec moi.» Sa voix avait flanché. Il avait peur d'une chose et ce n'était certainement pas la femme qui lui griffait le menton en enfonçant ses ongles dans ses joues sous l'effet de la colère.

« Et... Où est notre chère Hrist ? Cela fait longtemps que nous ne sentons plus sa présence en toi. »

L'adrénaline lui percuta les sens et Erzébeth l'aurait démembré sur place si elle n'avait pas encore tant à savoir de lui. Elle pencha son visage sur le sien et dit sur un ton mauvais :

« Mieux vaut pour toi qu'elle ne soit plus là, tu aurais passé une soirée moins confortable avec elle. »

La lumière de l'aube gisait à l'horizon, les premiers nuages d'oiseaux montaient aux cieux et leur chant se fit entendre. Mais, aux oreilles de la Baronne et après les avertissement étranges de son prisonnier, le chant perdait toute sa mélodie.

« Qui sera le prochain à venir ? »

« Heurk. Tu ne pourras pas le reconnaître. Il a grandi et de toutes façons... Tu ne le voyais même pas. Tu as tué sa mère devant lui car son seul crime était de t'avoir bousculée. Tu ne l'as même pas regardé mais jamais il n'a oublié ton visage. Il cultive la colère et la soif de vengeance contre toi. Alors tu te doutes bien que lorsque nous sommes venu le voir pour lui parler de toi, il s'est montré très... Intéressé. Il a encore l'ardeur de la jeunesse. Tu devrais t'en méfier. »

Elle lui jeta un petit sourire amusé.

« L'ardeur... L'ardeur n'est-elle pas un état de colère sans expérience ? »

Il vomit de nouveau en silence, Erzébeth retira ses ongles de son visage, les doigts mouillés de sang et de sa sueur.

« Je te dis de t'en méfier ! Malgré la jeunesse, il a tellement de colère contre toi qu'il doit être un de ceux qui souhaite le plus de te voir morte. Tu l'as privé de tout. Il ne lui reste que toi et il te hait plus qu'il n'aimait sa mère aujourd'hui défunte et toi ! Toi ! Toi tes mains en sont encore sales ! Fais toi discrète Silmeria Erzébeth, Baronne cruelle et usurpatrice du domaine, car tu es dans l'oeil du cyclone. J'étais déjà mort. Alors viens donc faucher ma tête couchée. Termine nos efforts. »

Puis, il cessa. Il n'ajouta rien. Il n'observait même plus Erzébeth qui avait frissonné sous ses dernières paroles. Son regard se perdait, elle connaissait trop bien ce personnage et lorsqu'il faisait ça, il n'était plus disposé à parler et aucune des armes ou des instruments de torture n'auraient pu lui extraire le moindre mot de la bouche.

Elle tapa du pied sur la trappe de la pièce. Deux hommes dont le bourreau montèrent la petite échelle.

« Jetez le dehors... »

Le soleil apparaissait au loin. Les rayons illuminèrent la campagne et la vie émergeait doucement. Les deux gaillards s'emparèrent de leur étrange prisonnier et le levèrent. Il n'opposait aucune résistance et se laissait faire, pire, il avait plus l'allure d'un corps mort que de celui d'un vivant. Ils s'approchèrent de l'échelle.

« Attendez ! Que faites-vous ? »

« Baronne, vous venez d'ordonner qu'il soit mis dehors ? »
« Jeté dehors... Et je n'ai pas précisé qu'il devait emprunter les escaliers... La vue est agréable en ce matin.»

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Ven 24 Mai 2013 18:56 
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Vos groupes parviennent au château un peu avant l'heure du déjeuner. Les cavaliers passent en tête, leurs montures visiblement impatientes de retourner à l'écurie. Quelques personnes présentes accueillent votre venue avec un certain silence. Apparemment, le retard que les cavaliers ont accumulé par votre présence n'est pas bien perçu.

Du chariot des ménestrels émanent des sifflements, admiratifs pour certains, complices pour d'autres. Pourtant, contrairement à ce qu'ils faisaient pendant le voyage, aucun des six n'a l'air pressé d'amuser la galerie. Même le rat du géant demeure étrangement sage contre le cou de ce dernier. Tu peux deviner une voix se demander si c'est bien cela Keresztur, puis c'est de nouveau le silence.

Adrien fait avancer sa carriole à la suite, stoppant l'animal de trait assez rapidement. Il n'a pas l'air spécialement ravi, et semble même plutôt pressé de partir en sens inverse. Pourtant, quand il croise des regards, il s'efforce de sourire.

La cavalière qui vous a mené jusqu'ici descend de sa monture, et la flatte. À voix basse, elle parle, comme répétant un texte qu'elle s'apprête à devoir prononcer avec distinction. Tu n'en perçois rien, hormis que son visage découvert est paré de respect.



Voilà. Mes excuses pour ce trop long délai. Faites-moi signe l'une ou l'autre si quelque chose cloche.

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Sam 25 Mai 2013 11:43 
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Le château est aussi accueillant qu’une ruelle d’Exech. J’aime cet endroit ! Je m’y sens chez moi.
Du monde qui s’agite autour de nous aussitôt notre arrivée… et on peut pas dire qu’ils resplendissent la joie de vivre. Je ne peux pas m’empêcher de sourire. Les forains, qui étaient surexcités, se sont calmés et mon cocher a, à nouveau, une tête de constipé.
Quant à la blondasse, elle nous ignore et parle à son canasson. J’me demande à quoi ressemble l’intérieur.

« Il fait faim, non ? »

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Sam 25 Mai 2013 17:11 
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La porte claqua lourdement. Les jugements tombaient les uns après les autres. Les soldats avaient pour ordre de traquer et d'arrêter toute personne ayant grandit à Tulorim afin d'être jugés. Erzébeth était entourée de deux gardes et de Von Klaash ainsi que quelques uns de ses sbires malodorants.

Dans la grande salle défilaient les jeunes paysans, voyageurs, chantres et toute personne qui avait eu le malheur de se trouver face aux hommes de Von Klaash et de Lydia. Certains arrivaient en piteux état, les yeux pochés et le nez en choux-fleur encore ensanglanté. Katalina posait les questions. Elle menait l'interrogatoire et décidait du sort des jeunes hommes en une poignée de secondes.

« Quand êtes-vous arrivé ici ? »
« Pourquoi ? »

« Prouvez le !»

« Emmenez le...»

Personne ne s'embarrassait de questions inutiles. Erzébeth voulait que l'on fasse vite. Les hommes les plus forts seraient envoyés aider les prisonniers à fortifier le vieux moulin sur ses terres. Les autres descendaient directement dans la Cour intérieure du château sans même savoir ce qui pouvait les attendre.

Von Klaash observait la scène en se grattant le cul et buvait à outrance son alcool maison qui puait à trois bornes. Plus personne n'entrait. La garde avait envoyé à la mort en l'espace d'une matinée près de vingt jeunes hommes. Des rapports annonçaient la colère des villages voisins, victimes de ces rafles. Certes il n'était pas rare de venir de Tulorim, mais Erzébeth savait que son assassin était parmi eux. Elle ne prendrait aucun risque.

Von Klaash rompit le silence.

« Savait, ma bonne Baronne. Qu'aussi bien c'te lascar s'ferait passer pour un peigne-cul de poulet venant de Kendra Kâr, bin que vos oiseaux là, y'f'raient que passer à côté.»

« Ca me fait mal de le dire, mais le capitaine dit vrai. Si seulement l'assassin avait caché ses origines, nous arrêtons les mauvaises personnes. »

Erzébeth le savait. Mais elle préférait ne rien répondre. Elle se terrait dans un profond silence et observait calmement les jeunes hommes qui défilaient devant elle, rassemblant dans sa mémoire quelque chose qui pourrait l'aider à reconnaître son assassin. Elle avait tué sa mère alors qu'il n'était qu'un enfant, selon ses estimations, il ne devait pas avoir plus de quinze ans et ne comprenait pas parfaitement en quoi il aurait pu être une menace pour elle. Même s'il lui paraissait improbable qu'un enfant puisse crever la sécurité du domaine, les mots de ancien mentor lui avaient fait froid dans le dos. Elle se savait donc en danger, elle ainsi que toutes les femmes de rang du domaine. Katalina, Lydia, Teresa...

Elle craignait secrètement plus pour leurs vies que pour la sienne.

Von Klaash avala bruyamment une longue rasade d'alcool et se releva tant bien que mal en s'appuyant sur les accoudoirs de son fauteuil.

« Tant qu'à faire, envoyez moi vos prisonniers sur le bateau, j'dois bien pouvoir en faire quelque chose d'vos minous moi. Pas vrai les gars ? »

Ses sbires éclatèrent de rire avec fracas. Von Klaash ne s'entourait que des anciens, de vieux loups de mer malmenés par les flots et arborant des dizaines de cicatrices. Erzébeth l'observait d'un regard noir.

« Le dernier équipage nous a presque coûté la Laide-les-Maines... J'imagine que vous ne l'avez pas oublié. Vous vous êtes tous couverts de honte, et moi avec. » Erzébeth jouait avec l'aiguille et de temps en temps, se piquait le doigt avec, mais la douleur lui évoquait trop la réalité et que ce qu'elle vivait n'avait rien d'un rêve.

Elle était assise, les cheveux complètement défaits qui tombaient en de nombreuses mèches sur ses épaules vêtues de rouge. Le visage fixant le vide, elle se mordait les lèvres en observant maintenant la porte, attendant de voir entrer les nouveaux prisonniers.

Von Klaash demanda, visiblement plus ivre qu'il n'en avait l'air, si lui et ses hommes pouvaient mener le prochain interrogatoire. Katalina lui jeta deux tonnes de mépris, une par oeil et cracha :

« Vous imaginez pouvoir faire mieux ? Je croyais que vos activités se résumaient à boire, vomir et courir les pouilleuses des ports. »

L'homme s'approcha d'elle en titubant un peu et lui lança d'un air mauvais :

« Je sais aussi pendre par les tripes ceux qui osent me provoquer... Et j'crois bien que vous aurez besoin de ça pour mettre la pogne sur votre tueur. A supposer qu'il existe. »

« Je ne vois pas pourquoi ça ne serait pas possible. Plusieurs indices montrent déjà des actes malveillants sur le domaine. Plus tôt on mettra la main sur leurs auteurs, plus vite ils perdront de la hauteur. »

La porte s'ouvrit enfin. Deux soldats passèrent le pas et s'annoncèrent.

« Baronne. Lydia est revenue. Ils ont pu retrouver un groupe de bardes et de catins qui passaient par nos terres. Aucun d'eux n'a montré de signes hostiles pour l'instant. Ils sont dans la Cour extérieure. »

Katalina et Erzébeth se lancèrent un regard.

« Qu'ils montent. Von Klaash, restez ici.»

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Dim 26 Mai 2013 20:07 
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Des gardes nous entourent et nous voilà dirigés vers l’intérieur du château. J’sais pas pourquoi, mais j’pense que la bouffe n’est pas pour maintenant.

En tout cas, elle n’a pas l’air d’être une marrante la maquerelle ici… Les couleurs sont tellement tristes… et vu la tronche des gens qui montent et descendent les escaliers, guidés par des gardes qui ne ressemblent pas à Jo le Rigolo, je suis sûre que l’hospitalité n’est pas la spécialité locale.

On suit le troupeau jusqu’à entrer dans une grande salle. Au fond, quelques personnes sont assises et les bouseux défilent devant. Ça supplie, ça pleure, ça rit pas beaucoup. J’en ai marre d’attendre, ça fait trois jours que je suis ballottée en charrette et, là, j’m’en fous un peu des plaintes des blaireaux du coin.
Je pousse les quelques personnes devant moi et viens me placer devant les flemmards assis. Mon cocher a bien essayé de me retenir mais je me suis dégagée.
D’ici, je sens l’alcool du gros porc… à croire que l’odeur est livrée avec la sale tronche.

« Bon, vous êtes mignons mais on m’avait promis un château et, du coup, je pensais être traitée un peu mieux. Qui est celle qui dirige tout ça ? »

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