Sous le coup, l'idée de Kyioheiki me parait être bonne et je m'attèle à la préparation de l'emplacement de la torche, plaçant pierres et bois issus du précédent bûcher en pyramide, de manière à garder au mieux la chaleur, j'ignore si ça va marcher, mais qui ne tente rien n'a rien.
Allumer une torche n'est guère difficile, un petit coup de briquet et c'est une petite flambée qui prend sur quelques rameaux de branches du loup géant. Une bonne demi-heure de plus passe le temps que le sol soit assez souple pour être creusé. Je laisse d'ailleurs à Kyoiheiki cet honneur, vu que c'est son arme, jouant juste de la pointe de mon épée pour briser un peu la terre, la rendre plus friable et donc plus simple à évacuer avec la lame large.
C'est finalement quasiment une heure plus tard que je peux commencer à installer un feu nécessaire au rôtissage de la bestiole à corne. Après avoir construit le feu et mis la broche en place, je me retourne vers Kiyoheiki avec un sourire :
"Voilà du travail bien fait. Je ne sais pas si vous avez à manger, mais je dois encore avoir des fruits secs, du fromage, de la viande et du pain de voyage et même du miel dans les fontes d'Harniän !"
Harniän, bien sûr, que j'avais oublié de déharnacher. Plantant tant bien que mal ma broche à la viande, je vais voir ma monture, qui attend sagement non loin du seul buisson pouvant lui fournir à manger. Je regrette alors de ne pas avoir prévu de l'avoine, contrairement au guerrier. Pour ma décharge, il faut reconnaître que j'avais pas prévu de traverser des terres aussi hostiles à mon compagnon quadrupède, ayant plus l'habitude des forêts et des plaines tant de Nirtim que du Naora. Prenant mon temps, je lui ôte les sacs et la selle, lui laissant cependant le carapaçon qui, à défaut, lui servira de couverture pour la nuit. Contrairement à moi, mon animal n'a aucun bijou pour adoucir les rudes conditions hivernales et il est accoutumé plutôt du chaud désert imiftilien que des plaines froides du Nosvéris.
Je retourne enfin à ma broche avec mon paquetage de nourriture naorienne, toute prête à partager mes vivres, certaine que j'en trouverais bien dans la forêt où nous allons, de toute façon.
"Je prendrais le premier tour de garde, il ne me faudra guère plus de deux heures de repos avant de partir pour être en pleine forme. Je vous laisserais le temps où l'aube arrivera, vous y verrez plus clair."
Je regarde durant quelques minutes la viande griller doucement quand Astinor en profite pour récupérer le contrôle de notre corps. La transformation est d'autant moins agréable que totalement inattendue... Sentir ainsi les poils poussés sur le corps, j'en avais l'habitude, mais en revanche, le changement de stature et de forme est nettement, mais vraiment nettement, moins confortable. Le pire étant de sentir l'appendice qui lui sert de queue pousser à la limite de ma jupe, ça gratte, ça fait mal en fait, comme quand ma main, coupée par un Garzok sur Verloa avait repoussée.
D'un geste souple, elle défait notre baudrier et ôte deux fourreaux, celui de l'épée feuillue de Leona et celui plus petit et horizontal, du kriss noir dans le dos. Posant avec délicatesse les deux armes au sol, elle rattache le baudrier, de manière à remettre la dernière épée à sa place, à mon coté. Elle récupère les deux fourreaux et les temps au guerrier avec une esquisse de sourire. J'aimerais bien un jour avoir un miroir pour voir exactement ce à quoi peut bien ressembler un sourire sur le museau de la femme-panthère.
"Comme promis. Deux lames contre votre arme. L'échange s'arrête quand nous partons."
Forcément, elle, elle n'aura pas oublié la promesse de s'amuser avec un jouet qu'elle ne connaît pas encore. Je souris en pensant que c'est une des choses qui nous sépare le plus. Manier une telle arme me fait peur et jamais je n'aurais cherché à l'utiliser, là où pour Astinor tout nouvel équipement, surtout offensif, est une découverte et un moyen d'approfondir les techniques qu'elle connaît déjà. Elle voit dans ce compagnon de voyage un moyen d'apprendre plus encore sur son domaine, là où moi je vois un coté humain. Son esprit rustre semble concevoir les rapports humains que en terme d'utilité. Un guerrier c'est utile, un civil c'est un poids à protéger, un ennemi c'est un défouloir, un noble c'est un brailleur qui sert à rien. Pour elle, Azuha ne représente qu'un fardeau qu'elle doit garder en l'état; là où Kyioheiki représente un véritable allié, un compagnon réel, intéressant et pouvant se révéler utile dans le cas d'embrouille...
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Je suis aussi GM14, Hailindra, Gwylin, Naya et Syletha
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