>> Les bois aux alentours de BouhenPremier jour de route"Franchement, Faropruneau... A quoi ça sert de louer un cheval si c'est pour avancer aussi vite qu'un hobbit repu ?""A transporter les marchandises de la charrette... Et à en ramener aussi...""Au début, je trouvais çà très chouette de voir du pays, mais finalement... Tu crois que c'est pour nous punir d'avoir failli mourir avec les gobelins ?"Le lendemain des faits dans la clairière de la forêt de Bouhen, Eucalyptus et Fareloke avaient été mandés par Lumbo pour faire un "petit voyage". Le petit voyage en question allait durer une bonne poignée de jours et ce rien que sur la route. Eucalyptus avait été très enthousiaste à cette idée, mais maintenant qu'ils étaient sur la route, il s'ennuyait à mourir. Les paysages étaient certes très jolis, mais rester assis toute une journée sur le banc d'une charrette gironde n'avait rien de quoi satisfaire le petit lutin. En plus, il n'avait pas eu le droit d'emmener Séléné avec lui, ni Pamela. Le seul animal qu'Eucalyptus avait eu le droit de négocier était sa petite salamandre qui portait le doux nom de Bidouille car elle semblait très chatouilleuse. Véritable trésor à écailles du lutin, personne n'avait eu le droit de la toucher, ni même de s'en approcher. Eucalyptus l'avait récupéré il y a quelques années lors de l'une de ses ballades et depuis, Bidouille ne le quittait plus, sauf lorsque le lutin lui demandait de rester sagement dans sa chambre. Bien qu'il lui prêtait volontiers des vertus magiques et des exploits magnifiques à la limite du surnaturel à qui voulait l'entendre, personne ne le croyait vraiment.
(Pourtant je l'ai bien vu se changer en lucioles ma bidouille... Cà, je l'ai pas inventé... Enfin, je crois...)____________________
Second jour de routePour cette première nuit passée sur la route, Eucalyptus et Fareloke s'arrêtèrent non loin du chemin et chacun prit des heures de garde, pour être sur que personne ne les volerait durant leur sommeil. Le lendemain, Eucalyptus était tellement fatigué qu'il dormit à poings fermés une bonne partie de la matinée, bercé par le chahut de la vieille charrette. Après que son estomac grondant le réveilla et qu'il engloutit pas moins d'une bonne dizaine de crêpes fourrées à la confiture de fraise et d'une demi-gourde lutine de lait de coco, Eucalyptus passa le temps à faire des tresses à la crinière du cheval qui les menaient doucement vers Kendra-Kâr. Après avoir nommé, renommé puis encore renommé le cheval, fait le point sur leur réserve de nourriture en prenant un soin méticuleux à compter les crêpes restantes, compté les papillons sur la route, puis les gens qu'ils croisaient, Eucalyptus était à court d'idées pour faire passer le temps et son regard malicieux se posa sur son ami, visiblement perdu dans des pensées mélancoliques...
"Dic donc, Faropruneau, tu serais pas en train de penser à certaine personne que je ne citerai pas et qui serait par le plus grand des hasards un marin ténébreux qui passe souvent te voir le soir après la pêche ?""Je ne vois pas de quoi tu parles...""De l'elfe avec qui tu fais des cochonneries à la pleine lune, pardi""Mais de quoi tu parles ?""Fais pas l'innocent, Faropruneau... On t'a suivi avec Faluche un soir, histoire de voir ce que tu traficotais avec un vendeur de poissons... Maintenant je comprends pourquoi Môman me dit tout le temps de ne pas sortir la nuit venue... Elle a certainement dû vous croiser... Il est pas très farouche ton marin...""Eucalyptus ! Ce n'est pas très gentil de me suivre comme un voleur...""Bah ! Ce n'est pas très gentil non plus de ne pas me dire que tu comptes fleurette à un pêcheur de Bohen... Remarque, de ce qu'on a vu, vous ne parliez pas beaucoup et il n'y avait pas de fleurs, non plus, ahahahahah !"____________________
Troisième jour de routePour le faire taire définitivement, Fareloke parla de sa cousine Plume et du prétendant qu'elle avait à Oranan. D'abord sceptique, Eucalyptus en vint à le croire sur parole, marmonnant dans la barbe qu'il n'avait pas quelques jurons lutins envers cet étranger romantique. Lorsque le soleil vint à planer vers l'horizon, les deux amis s'arrêtèrent et établir leur campement dans un champ non loin de la route. Eucalyptus, toujours en colère contre l'étranger dont avait parlé Fareloke, ne parla pas beaucoup, bouda énormément et ronfla comme un bien heureux toute la nuit. Très tôt le matin, il reprirent la route et à mesure que le soleil montait dans le ciel, Eucalyptus récupéra son attitude normale, joviale et taquine...
"On transporte des peaux de chèvre ?""Non, ce sont des marchandises diverses pour mes parents... Mais pourquoi tu parles de peaux de chèvre ?""Ca sent le bouc..."Les deux amis se regardèrent alors et explosèrent de rire, comprenant que cette odeur pestilentielle venait d'eux-mêmes. Une bonne demi-heure plus tard, ils s'arrêtèrent près d'un ruisseau et en moins de temps qu'il n'en faut pour écrire cette phrase leurs vêtements furent balancés en l'air et ils plongèrent avec joie dans le ruisseau. Ils profitèrent de cette pause pour s'amuser un peu puis ils lavèrent leurs vêtements qui le méritaient vraiment. Nus comme des vers, en attendant que leurs habits furent secs, ils discutèrent couchés dans les herbes hautes...
"Il s'apelle Carcairon...""L'infâme gars d'Oranan ?""Non, mon... Enfin le marin... Et je t'interdis tout commentaires à son sujet""Il le porte à merveilles..."Eucalyptus se retenait de rire pour ne pas blesser son ami...
"Tu sais, il y a quelque chose que je n'ai jamais compris chez toi... Tu parles couramment le quenya, Falleala dit que tu parles le gobelin et même Lumbo nous a confié que tu l'as reprise dans l'écriture de ses mémoires...""Ca devient une lubie chez les Desconti de me prêter des dons de polyglottes... Alors pour la dernière fois, je le dis et je le répête, je ne parle pas le quenya ni le vieil elfique antique et encore moins le gobelin !""Et là tu crois que tu parles en quelle langue, petit malin ?"Eucalyptus se sentit offusqué, il se releva et tourna le dos à Fareloke, le laissant observer ses petites fesses se diriger vers ses vêtements qui pendaient sur une brindille morte...
"Eucalyptus, ne le prends pas mal...""Je ne le prends pas mal mais vous me courez sur le haricot avec ces histoires ! Que dois-je faire pour vous le faire comprendre ?""Pourtant, je te le jure solennellement ! Je ne me moque pas de toi, tu as vraiment des dons particuliers...""Non mais tu m'as vu ? Tu crois que j'ai fait les grandes écoles ? Que je passe mon temps à apprendre les si fines et si délicates éructations gobelines ?"____________________
Quatrième jour de routeVéxé, en colère, Eucalyptus ne sortit plus un mot de la journée. Ni de la soirée, ni de la nuit, ni du matin qui en suivit d'ailleurs... Fareloke avait tenté de s'excuser, mais rien n'y faisait, Eucalyptus resta muet comme une carpe, se contentant de bouder, les bras croisés. Deux heures après la reprise de leur trajet, ils aperçurent une jeune étrangère qui marchait vers Kendra-Kâr. Alors qu'ils passaient devant elle, Eucalyptus plongea ses yeux noirs dans ceux de Fareloke et daigna enfin lui parler.
"Si tu t'arrêtes et qu'on lui propose de faire la route avec nous, je te pardonne... Topla ?"Fareloke ne rata pas une occasion pareille et scella le pacte en tapotant la main du lutin avec son index et Eucalyptus fut soulagé car cela devenait extrêmement dur pour lui de bouder. Il ne tarda pas à accoster la jeune étrangère et lui proposa donc gentiment de monter à bord de la charette en leur compagnie. Etrangement, Fareloke ne parla pas beaucoup et fronça un peu les sourcils mais Eucalyptus était trop absorbé par le récit de leur hôte pour s'occuper de lui. Elle venait d'Oranan, s'appelait Rose et par dessus le marché, elle était une voisine de Plume. Eucalyptus n'y avait jamais été mais comptait bien se rendre dans cette ville un jour, car il rêvait de visiter Oranan mais aussi et surtout de rendre visite à sa chère et tendre Plume.
Sous les conseils avisés du jeune lutin, les trois compagnons de route prirent leur déjeuner en continuant de rouler. Les remparts de Kendra-Kâr étaient visibles à l'oeil nu et Eucalyptus n'en pouvait plus de ce voyage. Alors qu'ils arrivèrent aux portes de la grande cité de Nirtim, leur passagère les remercia grandement et promit à Eucalyptus de lui faire goûter les spécialités de sa région s'il passait par Oranan...
"Laissez moi vous dire en tout cas que votre maîtrise des langues d'Oranan est juste parfaite... A bientôt !""Mais... Heu... Hinhin, très drôle Faropruneau... Si tu veux tant que çà raviver nos vieilles querelles, grand bien t'en fasse...""Mais de quoi tu parles à la fin ?""C'est çà ! Fais l'andouille... Tu l'as très bien entendue, vous avez comploté çà comment ? Parce que vous n'avez pas parlé tous les deux que je sache... D'ailleurs, je ne t'ai jamais vu aussi peu bavard...""Euca, je n'ai pas envie de me disputer avec toi, alors non, je ne te dirai pas que je ne sais pas ce qu'elle t'a dit, cette fille, et non, je ne te dirai pas non plus que tu parlais comme elle... Alors n'en parlons plus puisque tu préfères faire la sourde oreille et mettre en doute ma sincérité.">> Boutique magique du vieux Moboutou