Après avoir distraitement commandé une chambre à l'aubergiste, Winsor pénétra dans l'étroite chambre suivi de sa tigresse. Il ne prêta pas attention aux rares meubles insalubres, mais s'allongea sur les draps sales comme un apollon. Nul doute que ce lit en avait vu défiler, des couples d'un soir ou des aventuriers de passage.
Il planta son regard enjôleur dans celui la Belle, qui se plaça alors face à lui et commença à se déshabiller. Winsor se leva d'un bond et remonta son bustier qu'elle avait commencé à ôter. Il ne voulait pas que cela se passe ainsi, que ce soit si facile. Il approcha lentement son visage de celui de la belle, et dans un murmure glissé à l'oreille lui demanda son prénom. Cedde. Il glissa alors ses mains froides dans le dos de la Belle, qui vibra sous ce contact surprenant, puis il posa ses lèvres sur celles de Cedde.
Pour une fois, la première fois de sa vie, elle ne savait pas quoi faire. Ça avait toujours été simple : se déshabiller, et faire ce qu'elle devait faire. Mais là, c'était différent, elle ne savait pas ce qu'elle devait faire, et pour la première fois elle était véritablement animée d'un désir mordant. Winsor glissa son nez dans le cou parfumé de la jeune femme, alors qu'il ôtait lentement son corset. Le sang nouveau dans ses artères n'était que la preuve trop flagrante de sa concupiscence.
Il posa lentement sa belle sur la couchette, et en ôta délicatement les pétales un a un, tout en la choyant des caresses et des baisers les plus tendres. Bientôt à leurs pied s'était accumulé un mont de textiles variés, alors que leurs peaux ne touchaient rien d'autre que celle de l'autre et ces draps mités. Leurs chairs s'agitaient dans les vapeurs de transpiration, et lorsque le colosse emprunta le même couloir que les excroissances manuelles un peu plus tôt, on put entendre de derrière la porte des gémissements rauques et coordonnés.
Finalement, Winsor roula sur le coté en soupirant, fatigué mais satisfait. Le jet de fluide ayant éteind l'incendie de son bas-ventre, il se reposa en s'étendant de tout son long, animé d'une sensation d'excitation assouvie. Son corps moite était maintenant mou, il baignait dans la vulnérabilité.
Et ça, la Belle le savait très bien. Jamais un homme n'est plus fragile qu'après s'être offert. Il avait pris son pied, maintenant, c'était à elle. Toujours nue, elle roula sur le coté et récupéra la lame qui se trouvait au milieu du tas de vêtements. Winsor l'observait avec nonchalance, mais dès qu'il aperçut le léger scintillement du métal aiguisé, il se leva en un sursaut, débout sur le lit, prêt à se défendre.
Face au regard sadique de Cedde, il demanda :
« Pourquoi fais-tu cela ! »« Tu crois vraiment que le maître prendrait le risque qu'un inconnu non digne de confiance aie vu son visage et sache ce qu'il fait ? »« Je suis digne de confiance. »« bientôt, tu ne sera plus rien! »Pour accompagner le geste à la parole, le tigresse se jeta sur lui, lame en avant. Il évita de justesse cette attaque et profitant que la belle soit de dos, il sauta sur elle pour tenter de lui ôter son arme. Winsor était en position ridicule, il n'avait pas d'arme, et l'appendice de fierté masculine qui pointait un peu plus tôt vers le septième ciel, pendait désormais mollement, et se secouait, balloté par les mouvements.
Alors qu'il tentait de lui subtiliser sa lame, il fut blessé à l'avant bras. La douleur attisa la folie constante de son esprit : toujours accroché à la belle, il lui mordit l'oreille de toutes ses forces, si bien qu'il finit par réussir à lui en arracher un morceau. Il cracha à terre le bout de cartilage qui n'était pas très agréable à manger, et profita des cris de Cedde pour lui lancer un coup de pied dans les mains, faisant voler la lame quelques mètres plus loin.
Elle enfonça alors ses ongles pointus dans le buste du fanatique, qui tenta de lui assener un coup de poing dans le crâne, et rata sa cible. Le genoux de la belle concentra finalement les bijoux à nus de Winsor, qui arracha un cri de souffrance. Plié en deux, il avait si mal qu'il croyait bien ne plus jamais pouvoir les utiliser. Les larmes perlaient au coin de ses yeux tant la douleur était intense. Cedde en profita alors pour multiplier les coups de pied sur son dos replié. Finalement, la colère et la soif de vengeance surpassèrent les souffrances de Winsor. Il se jeta sur la dague qui gisait à terre, et l'enfonça dans l'office qui lui avait procuré tant de plaisir un peu plus tôt.
Il remua la dague tant qu'il pouvait, alors que sa belle souffrait le martyr et se secouait dans de dernières convulsions pour tenter d'échapper à ce supplice. Finalement, le fanatique joignit les paumes, et murmura :
« Souffle de Thimoros » ôtant ainsi du fluide vital à la belle, il s'arrêta juste avant qu'elle ne meure. Il observa alors le corps divin désormais à l'agonie, et avec la lame de la belle, il découpa ses membres un à un, maculant ainsi la pièce de rouge écarlate, et les dispersa dans la pièce : un sous le lit, un dans le buffet en bois vermoulu, un sur la table... Il garda la tête dans sa sacoche, se rhabilla lentement puis sorti tranquillement de la chambre.
Sa douleur était déjà oublié, il remuait intérieurement le meurtre qu'il venait de commettre, et cela l'excitait bien plus que n'importe quoi d'autre.
(Dommage, elle était bien bonne.) Songea t-il finalement.