Les RuellesLa scène qui venait de se dérouler sous ses yeux n’était pas des plus ordinaires, au point que Leoj en oublia presque l’odeur d’urine des lieux. Tout c’était passé très vite, mais Leoj en avait retenu l’idée essentielle : il y avait là un moyen de gagner un peu d’argent et rapidement en plus. Le "boss" gisant au sol une flèche en plein front, ses sbires prenant la fuite et le groupe de charlots se regardant avec des yeux ronds comme des soucoupes, il devait saisir cette opportunité avant quelle ne s’évanouisse dans la nature.
Les fuyards tournèrent au coin de la ruelle en lâchant leurs torches, cela déclencha un électrochoc qui sortit le jeune homme de son rôle de spectateur. Démarrant en trombe, il contourna le pâté de maison se ruant à la suite des bandits.
(Heureusement, une poignée de balourds paniqués comme ceux-là est facile à repérer, mais vaut mieux éviter que eux ne me repère.)Tout en courant, il concentra sa puissance magique sur son épiderme, exercice plutôt difficile dans sa situation et auquel il ne s’était entrainait que peu de fois depuis qu’il l’avait appris. Aussi les leçons de traque de son père allaient enfin lui servir, ses sens gérèrent alors son corps par réflexes : le moindre mouvement dans l’ombre, le moindre bruit perçu dirigé automatiquement la course de Leoj. L’instinct gouvernant sa course, sa conscience était toute à son sort : chaque pore de sa peau se mit au bout de quelques minutes à répandre un sombre nuage. Couvrant petit à petit sa peau puis ses vêtements, ce fin brouillard serait un camouflage plus efficace en mouvement que sa cape, de plus cette nuit sans lune complétait idéalement son noir habit. Son sort lancé, la conscience reprit la poursuite.
(Une silhouette tourne à droite ? on y va. Un bruit de bottes rapides à gauche ? c’est partit.)Le boucan émit par ces cinq gars masquait les bruits de pas de Leoj qui les suivait à distance raisonnable. De temps à autres, un regard était lancé par l’un d’eux en arrière, dans la peur que leur "diable" ne les rattrape mais le seul poursuivant leur resterait complètement invisible tant qu’ils ne scruteraient pas les ténèbres avec davantage d’attention.
Leoj se surprit à aimer cette situation, celle du prédateur chassant sa proie apeurée même si, dans le cas présent, la proie n’aurait fait qu’une bouchée du chasseur. Son cœur battait à tout rompre, ses sens étaient en éveil comme jamais, une légère peur de raté son coup le poussait à se dépasser malgré la fatigue qui s’accumulait dans ses jambes.
Après ce qui parut une éternité à zigzaguer entre les baraques et maisons de manière anarchique, les cinq fuyards ralentirent l’allure et se dirigèrent vers le port. Profitant de se ralentissement pour reprendre son souffle, Leoj n’en quittait pas la bande des yeux pour autant.
(Ils doivent penser que nul ne les suit.)Les hommes longèrent les quais en jetant de rapides regards de tout coté afin, sans doute, de s’assurer de n’être observer par quelque habitants ou marins traînant dans les parages. Longeant les entrepôts, Leoj les observa continuer leur route, puis sauter par la suite sur la plage en contrebat des quais. Leoj se précipita afin de ne les perdre de vue trop longtemps. Allongé au sol, il scruta les ombres se mouvant sous les pontons, la fine bande de galets répercutait les bruits de bottes des bandits. Ceux-ci s’enfoncèrent alors dans un tunnel des égouts se déversant dans la mer non loin de là. Après que le dernier soit entré à son tour, Leoj descendit en faisant le moins de bruit possible et entra dans le tunnel nauséabonde.
Les Egouts 
											
_________________
Leoj / Fanatique / Humain (Wiehl)
"Si on ne prend pas son destin en main, nul ne le fera à notre place."