Un oiseau était occupé à béqueter gentiment de l'eau dans une flaque.
Ce dernier releva la tête, aux aguets, il sentait des vibrations sur les dalles de la grande rue. Ouvrant grand les yeux vers la silhouette noire se dirigeant à vive allure dans sa direction, il se mit à battre des ailes aussi vite qu'il le put, s'envolant avant de se faire écraser.
La bourse que Xytas venait de dérober pesait son poids. Même dans la Grand-Rue, il continuait de courir, ne regardant pas derrière. Il était nerveux. Le voleur n'avait pas prit la peine de vérifier le contenu du paquet qu'il avait dérobé à Larnskal, une dizaine de minutes auparavant. A l'instant ou il avait décidé de régler la transaction lui même, prenant le risque de se faire démasquer, et sans doute assassiner. Xytas n'était pas parvenu à garder parfaitement son calme. Au moment d'échanger les deux biens, il était persuadé qu'il allait se dévoiler, à cause de sa nervosité. De plus, il avait maintenant un meurtre sur le dos, chose qu'il n'avait que très rarement faite, sa dernière victime remontant à six mois, Grosse-Paluches John. Cependant, courir ainsi dans la Grand-Rue, essoufflé et tant pressé, peut attirer l'attention. Un milicien se chargea d'ailleurs de s'interposer sur la route du jeune voleur, qui donna le plus grand mal à s'arrêter à temps sans le percuter. Courbé, les mains sur le haut des genoux, il reprenait sa respiration avec difficulté. Le milicien, quand à lui, prit la parole, d'un air hautain.
Et bien ? Vous avez le diable sur les talons, citoyen ? Après avoir laissé échapper une quinte de toux, le jeune homme répondit, quelque peu agacé.
Ma soeur vient d'accoucher, je suis parrain. Je tiens à être au plus vite à ses côtés, et voir mon filleul. Navré de vous déranger... Se grattant la nuque, le jeune garde le laissa passer, après l'avoir félicité joyeusement. Il reprit son poste, un sourire niais sur les lèvres. Xytas n'en revenait pas. Il reprit sa course, se dirigeant vers les portes de Kendra Kâr. Cette ville le dégoûtait, il ne souhaitait plus y rester. De plus, il avait entendu les bribes d'une certaine maladie, apparemment contagieuse et qui avait prit une ampleur non négligeable. Plus rien ne le retenait ici. Plus les jours passaient, plus il risquait de se faire emprisonner par les gardes, qui à force d'entendre parler de ses larcins fréquents, commençaient à mémoriser le profil du voleur. Il se sentait autrefois libre, sur les toits de la capitale, mais maintenant, la ville toute entière était devenue une prison à ses yeux. Il ne connaissait personne, et n'avait pas d'affaires à reprendre. La Grand-Rue menait directement aux portes de la ville, et c'était parfait. Cependant, les pensées plus à l'aise, Xytas se décida à marcher, son rythme cardiaque l'en remerciant chaleureusement, pouvant s'apaiser à présent. Lors de son trajet vers les portes, il avait rabaissé sa capuche, contemplant les habitations, les étales, les boutiques, le château, une dernière fois avant longtemps. Ce n'était pas un adieu qu'il faisait à cette ville. Un jour ou l'autre, une raison l'attirera de nouveau ici. Mais c'est le présent qu'il regardait.
Les portes se dessinaient maintenant au loin, et Xytas avait à nouveau rabattu son capuchon sur sa tête une centaine de mètres auparavant. Il ne voyait pas ce que les gardes allaient pouvoir lui reprocher quand à sa sortie de la ville, et au pire, il trouverait bien un moyen de passer. L'art des mots était en lui, et il en était fier. Cet atout l'avait sorti maintes fois de situations critiques, notamment lors de ses altercations avec d'autres truands ou encore la garde. Il partait plutôt confiant, après tout, il avait comme seule arme une dague, qui faisait pale figure face à une vraie lame. Les seuls bien que possédait Xytas, mis à part ses vêtements, étaient l'argent qu'il avait dérobé.
Il prit une grande bouffée d'oxygène, puis, d'un pas confiant, se dirigea vers
les portes de Kendra Kâr.(C'est le grand moment... Je ne recule plus, je fais face. Tout va bien se passer, et dans cinq minutes, je quitte ces murs, pour la première fois depuis la mort de mon père... C'est parti !)