Vie d'Escampette, Préambule
Le brouhaha incessant de l'établissement massif résonnait dans les tempes du jeune Sinari, mais les sons ne parvenaient que comme de doux murmures sonores aux oreilles de celui-ci; perdu dans ses pensées en fixant l'âtre gigantesque. Malgré le tintamarre ambiant, il ne pouvait s'empêcher d'être en paix; ces allés et venus traqué comme une vulgaire bête l'avait épuisé au plus haut point. Les voyages étaient rudes en solitaire, particulièrement avec peu de connaissances du monde en dehors des milieux ruraux. Entre Dehant et Yarthiss, le trajet avait semblé durer des années.
(Enfin un peu de répis... je me demande ce qu'ils servent à manger ici... pas du ver par pitié... Peu importe, je mangerais même ces maudits vers...)
Il avait, au cours de ces 3 mois, très peu mangé. Si on considère les standards Sinari, il aurait été perçu comme un malnourri. Son petit bedon traditionnel avait laissé place a un ventre plat qu'il voyait comme un peu anormal. Malgré tout, il trouva utile ce nouvel atout inusité pour se faire passer pour un enfant et amadouer l'instinct protecteur des femmes humaines. Se cachant de chaumières en chaumières sur la route, comme un orphelin en cavale Il s'y était amusé un temps, puis les informations étaient venues aux oreilles de « Kree »; Il aurait alors risqué de mettre la vie de plusieurs enfants en danger. Préférant abandonner son stratagème, il avait encore vagabondé sur les routes, puis finalement atterri dans la taverne de la Porte de l'Enfer. Il espérait profiter du vacarme continuel que provoquait le commerce pour se protéger de ses poursuivants.
(S'il faut endurer ces barbares et tout ce boucan pour être en paix, que Zewen me laisse le temps de récupèrer un peu ici. Au moins, je peux compter sur l'idiotie des gens du coin pour me protéger en cas de pépin...)
Quelques hommes un peu ivres convièrent la formation d'une table de jeu...et la tentation fut trop grande, il s'installa, retroussant ses manches devant un magot déjà anticipé. Le voleur n'était pas reconnu pour apprendre de ses erreurs... Oubliant sa faim grâce à son seul vice plus grand, il était déterminé à repartir avec une belle petite somme rondelette.
(Dans l'état où ces rustres sont... ce sera du gâteau ) Pensait-il.
«
Alors les gars... je peux me joindre à vous? J'ai bien envie de jouer aussi... Et de gagner. »
Les hommes se regardèrent, l'air amusé, ne prenant pas au sérieux le hobbit, pensant même faire de l'or facilement sur le dos de celui-ci; Ils l'acceptèrent silencieusement et nonchalamment à joindre la tablée, tous d'un signe de tête approbateur.
Vie d'Escampette, Chapitre 1
Les chasseurs des Portes étaient aussi à cran qu'à leur habitude, Jondolar était confortablement installé avec trois inconnus humains autour d'une table de jeux bien garnie. Un odeur de sueur et de bière enveloppait la table dans un cocon hermétique où les joueurs s'affrontaient. Il avait débuté la série de parties avec des mises modestes et avait triché subtilement, comme à son habitude, pour gonfler sa mise à souhait. Les affaires allaient bien et les autres joueurs de sa table étaient trop ivres pour dénoter les tours de passes-passes du Sinari. Il se frottait déjà les mains, jubilant précocement d'un départ en bateau vers un continent lointain où il pourrait refaire sa vie tranquillement, sans Kree à ses trousses.
Tout à coup, la Porte changea d'ambiance, un petit frisson d’inquiétude instinctif parcouru l'échine du Chanceux. Il leva les yeux vers l'entrée de la Porte. Les chasseurs avaient abandonnées leurs occupations, fixant en direction de la porte. Un grand homme encapuchonné au teint olivâtre fixait le jeune Sinari. Une arbalète de poing dans une main et une épée courte rouillée dans l'autre, il releva sa tête pour asséner un sourire carnassier laissant transparaître ses crocs.
Jondolar su qu'il était cuit, il se releva d'un bond, vautrant le plus possible de pièces dans son sac à la hâte. Il avait tout de suite reconnu l'homme mystérieux par sa stature inhabituelle.
«
Désolé messieurs, on ferme boutique, le grand Jondolar doit partir! On remet sa n'importe quand, allez aurevoir! » D'un ton rapide, saccadé.
(Vraiment? Mais merde! Comment a-t-il pu me retrouver si vite... Je te déteste Zewen! Tu me lâches toujours quand j'ai besoin de plus de temps... )
Les joueurs qui étaient attablés avec lui se levèrent également d'un bond, vociférant des protestations! La pauvre serveuse juste à coté de la table de jeux serra son plateau de service contre sa poitrine, fixant l'entrée. Le jeune hobbit, eut à peine le temps de relever le regard vers son détracteur pour voir l'arbalète de poing mirée vers lui.
Usant de son instinct de survie, il arracha des mains le plateau de la serveuse en se faufilant comme une torpille vers les escaliers menant à l'étage. Sous l'air ébahi de la jeune femme, un carreau se planta dans le plateau de service, couvrant la fuite du Sinari. Il pu sentir la pointe du carreau titiller son avant-bras, alors qu'il lâchait le bout de bois ruiné.
À ce moment précis, tout commença à se dérouler selon le plan de Jondo, dès que le carreau siffla pour se planter dans le bois craquelé du plateau, une bagarre générale éclata entre les clients de la taverne qui cherchaient déjà depuis quelques heures une raison de se battre entre-eux.
(Comme prévu... excellent. Espérons que ça suffira.)
Joueur, il prit le temps de faire une petite moue provocante vers le chasseur de primes, qui brandit son épée courte pour poursuivre en ligne droite le jeune hobbit. Dans un élan de colère, il bousculait tout sur son passage, suivant le Sinari à la trace. Ralenti par la foule qui commençaient son délire général, Jondolar eu le temps de monter à l'étage in extremis.
Malgré son apparente maîtrise de la situation, le voleur commençait à paniquer, nerveux, il couru au fond du couloir pour entrer dans une chambre au hasard et referma la porte derrière lui. Il surprit au lit un chasseur vétéran bien costaud accompagné d'une charmante demi-elfe.
(Probablement une prostituée... hum, non, focus Jond, pour l'amour de Kubi...)
Il entendant le pas déterminé du tueur comme si ce sont transcendait le vacarme du rez-de-chaussée, son cœur débattait à toute allure. Le vieux chasseur se leva, brandissant un poing menaçant vers l’intrus qui avait gâché son coït.
«
Ce n'est pas ce que vous pensez... excusez-moi... Je ne.... »
S'approchant de la fenêtre en catimini, les bras levés pour calmer les ardeurs de l'homme enragé, il était de plus en plus nerveux. Contournant le lit, l'air paniqué, il n'osait pas crier à l'aide pour ne pas attirer une menace encore plus grande sur ses talons.
«
Espèce de petit crétin! Je vais t'apprendre moi! » Beugla l'homme, chargeant le petit homme à tout allure, le projetant à travers la fenêtre qui éclata en plusieurs morceaux. Sombrant dans l'inconscience sous la puissance du coup, il fit une chute silencieuse.
Notre jeune aventurier était tombé dans une charrette de nature inconnue. Si les citadins relevèrent les yeux pour voir ce qui avait causé le bruit, il était trop tard pour voir le petit hobbit inconscient s'affaler dans le convoi, qui continuait son chemin. La chance avait encore soufflée en sa faveur car sa petite corpulence avait empêché le conducteur de remarquer la présence de son clandestin.
Probablement ralenti par le chasseur en furie, Kree arriva trop tard dans l'alcôve de la fenêtre, ne dénotant qu'un paysage urbain indiscernable, sans aucune trace du petit joueur.
«
JE TE RETROUVERAI! » Cria le demi-orque dans un élan de rage, qui sauta du deuxième pour retomber sur ses pieds dans le milieux de la rue au grand étonnement des passants qui n'en croyaient pas leurs yeux. En haut, le chasseur brandissait toujours le poing vers Kree, la demie-elfe lovée dans ses bras et couverte seulement d'un drap blanc sur lequel coulait le sang de son amant.
En route vers l'inconnu, encore...