Astinor, profitant de son noir pelage, nous guide vers le campement, le plus discrètement et le plus silencieusement possible. Fermant les yeux, à distance raisonnable, Astinor se concentre sur chacun de ses sens, l'un après l'autre. Se fiant à notre goût, elle hume les senteurs du camp... et manque de s'étouffer sous les arômes proprement infectes de la pitance militaire. Je pensais la nourriture du camp Sindel dégoûtante, mais rien que les remugles de celle Garzoks sont encore cent fois pire.
(Trouvé !) (De quoi ? Où ? Puis change de sens, ou je vais être malade pour deux !)
Astinor me fait le plaisir d'ouvrir à nouveau les yeux, rompant notre goût trop développé, beaucoup trop développé sur ce coup-là d'ailleurs.
(Le goût du ragoût. D'un vrai ragoût !) (Un vrai ragoût ? Ou ça ?) (Derrière le rat grillé.) (et ?) (Laisse-moi vérifier !)
Elle ferme à nouveau les yeux, et se concentre sur ses oreilles. Bien vite, des lumières apparaissent dans mon esprit, brillant tout autour de nous. Les bruits de pas, les ronflements, les lames qu'on aiguise, la graisse qui chuinte sur les cuirs des armures, le bois qui craque dans les feux de camp, des parchemins qui changent de mains, des pas légers des messagers, ... chacune de ses sonorités viennent laisser une trace de couleurs, comme lorsque sur Nyr, entrain de passer les épreuves de Yuimen. Chaque tâche a une place précise, celle qu'elle aurait dans la réalité, celle de son point de départ.
Très vite, même si elle reste fort chaotique, une ronde de bruits s'inscrit dans mon esprit, formant des cercles identifiables, trois cercles en réalité. Le premier se situe sur le pourtour extérieur, il est composé de plus de monde, moins organisés, plus axés sur les rumeurs d'une vie de camp : les ronflements des troupes, les grognements et les marmonnement des somnambules. Un second est enfermé dans le premier, où les troupes prévoient leur combat, possiblement du lendemain, affûtant leurs armes, graissant leurs protections, raccommodant peut-être à la lumière d'un feu les gambisons ou des sangles, vérifiant les flèches et les carreaux de leurs armes de jet. Enfin au coeur du campement, se place le dernier cercle, le plus à l'intérieur, où on entend les messagers et d'où provient la nourriture la plus fine, les dirigeants, sans doute, là où je dois parvenir pour faire ma mission...
Nous reprenons nos sens et Astinor se met à l'approche, il va falloir trouver dans le camp, par où nous pouvons rentrer. Elle parvient sans encombre à moins de dix pas des premières tentes extérieurs, qu'heureusement aucune barrière ne protège. Non loin de l'un des abris, elle observe le chemin vers l'intérieur du camp, jetant un regard à travers les râteliers.
Quand, soudain, avant que j'ai pu comprendre quoique ce soit, elle se plaque au sol, dans l'ombre de la tente. Il ne faut guère plus de quelques secondes pour que j'entende les râleries et les rires gras d'une patrouille de Garzoks. Ils s'arrêtent à deux pas de nous et trois d'entre eux commencent à se déchausser pour... uriner, sur la tente, le jet au-dessus de nous. Astinor se retient de grogner et de rager contre ce coup du sort, parvenant à garder son sang froid uniquement en oubliant tous ses sens hormis celui de la vue, pour se concentrer sur le reste du groupe. Je les vois parler, mais n'entend pas ce qu'ils disent, mais je vois surtout leurs armures, de relativement bonnes factures. Ils sont même plutôt bien protégés pour des Garzoks en patrouille du soir, à croire qu'ils se sentent menacés. Ce n'est que quand ils disparaissent, qu'Astinor daigne récupérer ses cinq sens.
"Bordel, c'était quoi ces fontaines à vin ? Ils pouvaient pas lancequiner, ailleurs ?" La voix est maîtrisée, de manière à ne pas trop alerté tout le monde autour de nous.
(En parlant de lance...)
Anouar nous indique le râtelier, où effectivement le terme de lance est le plus approprié, nous sommes du coté des piquiers, sektegs vu la taille des armes d'ailleurs.
(On fait quoi ?) (Faut entrer. Dans le camp, au coeur.) (Cherche le coin des arbalètes. Vu les ravages du titan, il ne doit pas en rester beaucoup, y aura de la place pour se faufiler.) (Hey, t'es pas conne quand tu t'y mets !)
S'écartant à nouveau des abris de tissus, partiellement de crainte d'être prise pour une cible urinaire ou autre, Astinor entreprend de contourner la zone, à la recherche de ce qu'il reste des sektegs et des géants, mis à mal par le monstre géant. Cela sera, au passage, le moyen de se faire une idée de ce qu'il en reste et, tant qu'on y est, avoir une vue globale des forces en présence pour un combat futur...
_________________
Je suis aussi GM14, Hailindra, Gwylin, Naya et Syletha
|