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 Sujet du message: Re: Les Chaînes de Montagnes
MessagePosté: Mar 24 Mar 2015 04:16 
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Iris sourit devant la tentative de Jager de négocier, puis reprit un air sérieux et dit d'une voix ferme et sans équivoque


" Je ne crois pas que vous soyez en mesure de négocier ! Je ne vous prendrai que mille yus comme convenu, remboursant ainsi la dette du père. Mais je n'ai pas qu'à reprendre mes yus mais aussi défendre mon honneur. Cet homme a tenté de me jouer un sale tour, alors il paiera pour. Comptez-vous chanceux que je vous rende la liberté à vous deux. Il serait tentant de garder le petit comme otage au lieu de la fille. Ces pouvoirs de guérison nous seraient fort utiles. Donc, n'usez pas de ma patience. "

La petite en rage et les larmes coulant sur les joues regardent d'un air interrogateur... puis s'adresse à Iris.

" Mais... elle... " puis elle s'arrêta là !

Iris alerté questionna Jager :

" Qu'est-ce que vous me cachez ? "

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 Sujet du message: Re: Les Chaînes de Montagnes
MessagePosté: Mar 24 Mar 2015 13:10 
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La négociation ne mène nulle part, ce type a l’air aussi borné que moi, et ce n’est pas bon signe pour la gamine qu’il a kidnappé, qui qu’elle soit. Mais bon, faut pas pousser mémé dans les orties non plus. Pas en position de négocier, c’est sûr : nous sommes des prisonniers. Mais qu’il me libère, et il verra ce que c’est que de m’avoir pris pour un mouton qu’on peut tondre. Autant que je veux bien raquer pour que tout le monde rentre chez soi et que la fin soit la moins malheureuse possible pour tous les partis, mais qu’on me prenne mille yus pour éponger une dette et garder quand même la gamine… Ah ! non, là ça va trop loin.

Et comme si ça ne suffisait pas, voilà la gamine les larmes aux yeux, sur le point de cracher le morceau. Lequel je sais pas, mais j’ai tendance à penser que quand elle ouvre la bouche, c’est pour ouvrir une trappe sous nos pieds, donnant directement dans un bassin de lisier. Bon, le coup des soins c’était malin, sûrement involontaire d’ailleurs, ça nous a plus ou moins sorti du fumier, mais de toute évidence ça a aussi éveillés les convoitises du chef de bande. Franchement, ma position dans cette situation me fait penser aux funambules des troupes d’amuseurs qui parfois parcourent l’Ynorie, avançant en vacillant sur une corde tendue entre deux poteaux, au dessus de sol. Sauf que moi je suis bûcheron, chasseur, pas saltimbanque, pas diplomate, et pas banquier. Mes sous, je les ai gagnés, en risquant ma peau ou en vendant celles d’autres bestioles moins chanceuses ; je les ai honnêtement gagnés, pas en enlevant des marmots à leur famille. Et je n’ai pas la prétention de venir farcir mes actes avec des niaiseries comme l’honneur, histoire de faire gober ça plus facilement au péquin moyen. L’honneur mes fesses… Enlever des gamins pour défendre l’honneur… Brillant ! Et puis pourquoi pas sauter les pucelles pour préserver leur virginité, dans le même ordre d’idée ?

Quoi qu’il en soit, je connais ce goût un peu métallique dans la bouche, et ce n’est pas le sang : juste la colère. Un sentiment à fleur de peau, qui a tendance à devenir ravageur. Je veux bien me contenir le temps qu’il faudra pour sortir de cette grotte, mais s’il me vole mon argent – car le prendre sans offrir de compensation, ce sera du vol à mes yeux – et continue de me prendre pour une lapereau de trois semaines, il va falloir qu’il s’attende à me trouver sur son chemin… Et ça, je vais bien me garder de le lui dire. Pour l’heure, rattraper la bourde de la mioche.

« Comment ça c’qu’on vous cache ? Z’êtes aveugle, par les dieux ? Vous avez craché sur son père, menacé la tranquillité de sa famille pour des questions d’argent, vous lui annoncez que même avec la dette effacée, vous allez gardez sa sœur ! Bien sûr qu’elle est innocente, la p’tite ! Et bien sûr que ç’ui là ça le r’tourne ! Et v’nez pas m’parler d’honneur, j’vois pas trop quel honneur y’a à enlever des mioches, à faire peser sur la tête des enfants la faute du père. Vot’ réputation, j’veux bien croire. Laquelle, ça c’est aut’ chose. Vous allez faire quoi ? Clamer à qui veut l’entendre que vous faites dans l’rapt de petite fille ? Qu’elle s’ra mieux ici avec vos hommes ? Attention, planquez vos enfants si vous essayez d’me prendre en traitre ? Vous croyez qu’les gens vont s’imaginer quoi, avec vos hommes dans ces grottes, et la p’tite ? Qu’c’est très honorable comme manœuvre ? Alors qu’vot’ réputation, vous pouvez p’t’êt’ la voir autrement. Z’avez montré qu’vous êtes capable de toucher une famille, qu’avec vous on plaisante pas. Plus d’coup en traitre. Y’a d’quoi refroidir les mauvais payeurs. Mais y’a aussi d’quoi encourager les tentatives désespérées. Des coups plus vaches. Les bêtes acculées sont les plus dang’reuses. Par contre… Si vous montrez qu’vous êtes capable d’êt’ ferme – et vous l’avez montré, y’a pas à dire – mais ferme en affaire, et capable de trouver des solutions conv’nables humain’ment… Ben moi j’dirais que j’préfère traiter avec un gars qu’a la tête sur les épaules, dont j’sais qu’y faut pas l’prendre pour un pigeon, mais dont j’sais aussi qu’il a un côté humain. J’vous d’mande pas d’trahir vos affaires, ça non ! Z’avez sûr’ment vos hommes derrière, qui comptent sur leur chef. Pas d’libérer la p’tite et d’nous laisser partir sur d’bons sentiments : les gens essaieraient d’vous attendrir, en ramassant des orphelins dans les rues, à plus savoir quoi en faire. Mais d’libérer la p’tite et d’nous laisser partir parc’que vous aurez eu l’argent, et une prime avec ça. Un coup à c’que les gens comprennent qu’vous êtes dur en affaire, mais réglo : si on vous pigeonne, vous sévissez, quand vous avez l’argent, tout rentre dans l’ordre, à condition d’compenser l’dommage. M’est d’avis que comme ça, vous trouv’rez plus de payeurs que d’gens prêts à vous r’froidir si y z’ont pas l’argent. J’sais pas c’qu’il en s’ra d’vot’ honneur, mais en tout cas, la réputation… Bah pour les gens du commun comme moi, ce s’rait un geste qu’aurait d’la valeur. D’main vous auriez un type qu’aurait appris la l’çon, plutôt qu’un enn’mi à Bouhen. Mille deux cent cinquante yus, et toute c’t’affaire s’conclut ici, maint’nant. Avec l’assurance d’avoir l’argent, et plus d’souci pour personne. L’argent cont’ la liberté d’la fille et l'effac'ment d'la dette. Pour celle du gamin, j’crois en vot’ parole : il a sauvé un d’vos gars, il a gagné sa liberté. Reste plus qu’à effacer la dette du père. Et c’est c’que j’vous propose. »


Puisqu'il faut partir...

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Dernière édition par Jager le Jeu 26 Mar 2015 16:09, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Les Chaînes de Montagnes
MessagePosté: Mer 25 Mar 2015 03:14 
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Iris écouta les propos de Jager sans broncher. Mais, il n'était pas nécessaire d'être perspicace pour voir que le chef de clan commençait à s'impatienter, son visage devenait rouge et sa respiration plus rapide. Mais c'est pourtant d'une voix calme, mais ferme qu'il rétorqua:


" Cette affaire ne vous concerne plus désormais ! Fin de la discussion !"

Au même moment, le dénommé Bastien celui qui avait apparemment trouvé la fille du paternel arriva un sac à la main. et lui chuchota à l'oreille. Iris ne fit aucun commentaire.

Tout en regardant Maël et Jager, il dit à Bastien.

" Va les reconduire au bas des montagnes. Utilise la sortie au sud, le labyrinthe."

Patron, MammyRay, leur a préparé des provisions, je leur donne ?

Oui, oui, ils en auront besoin pour le trajet de retour.


((( J'ai arrêté là. Si tu vu pcursuivre la discussion, je répondrai. Par contre, si Jager considère que la conversation est terminée, tu peux rp que Iris retourne à ses occupations, vous laissant avec Bastien qui vous reconduit à la sortie. Si tu veux discuter avec ce dernier, je répondrai. Sinon, tu peux rp la sortie de la caverne. Pleins de possibilités s'offrent à toi, c'est à toi de voir )))

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 Sujet du message: Re: Les Chaînes de Montagnes
MessagePosté: Jeu 26 Mar 2015 16:08 
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" Cette affaire ne vous concerne plus désormais ! Fin de la discussion !"

L’allure du gus ne me donne guère envie de continuer : sa figure a pris un teint rouge de mauvais augure, sans compter qu’il a le souffle un peu plus court. Peut-être que certains de mes arguments ont fait mouche, et que sa raison est entrée en conflit avec son orgueil.

« C’est vous l’chef, c’est vous qui voyez. Bon ben y m’reste plus qu’à vous souhaiter bonne continuation dans vos affaires… »

Sur ces entrefaites, l’autre spécimen de la bande, celui qui a porté l’annonce de la capture de la gamine, se ramène avec un sac, et reçoit la consigne de nous ramener au bas de la montagne. Retour aux pénates, tout du moins pour la gamine. Je ne crois pas qu’il y ait encore quelque chose à tirer du meneur de cette étrange bande, mais la mention de la guérisseuse qui a fait des miracles avec ses soins d’urgence réveille un espoir. Peut-être sera-t-elle plus sensible à certains arguments, et disposée à nous rendre un petit service : une information, un renseignement utile, une suggestion de conduite à tenir. Si ça se trouve, elle est en mesure d’influer sur Iris. Tandis que ce dernier s’en va – pour vaquer à quelle activité, je m’en fous pas mal – je m’adresse à l’acolyte censé nous servir de guide jusqu’à la sortie :

« Est-ce qu’avant d’partir, j’pourrais parler à MammyRay. J’voudrais la r’mercier d’vive voix pour avoir pris soin d’moi, et du ptit. »


L'infirmerie de MammyRay

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Dernière édition par Jager le Mer 15 Avr 2015 13:30, édité 2 fois.

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 Sujet du message: Re: Les Chaînes de Montagnes
MessagePosté: Jeu 2 Avr 2015 01:37 
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Après le départ de Iris, le dénommé Bastien fixa quelques secondes Maël puis lui parla avant de répondre à Jager.
Votre soeur vous ressemble beaucoup, mais ne vous en faites pas, elle n'est plus maltraitée depuis quelle est avec nous !

Maël, surprise, les yeux ronds comme des billes et ouvrit la bouche pour balbutier:

"Ma soeur..mais... maltraitée ?" Un peu fragile, elle cessa de parler et regarda le sol.

Apparemment satisfait de l'effet produit, Bastien répondit à Jager:

"Je peux vous conduire à elle sans problème, c'est un petit détour, mais le patron ne s'en formalisera pas ! "

Cela dit, il vous fit signe de le suivre et partit d'un bon rythme par un chemin que vous n'aviez pas encore visité. Le lieu était moins éclairé, mais tout aussi praticable. Après quelques minutes de marche, il pénétrèrent dans un long tunnel étroit qui mena à une assez vaste pièce aménagée pour MammyRay. Munie d'une grande table de travail, des quelques bibliothèques, de nombreuses étagères remplies pots et fioles de toutes sortes et puis de quelques lits pour accueillir ses patients. Justement dans l'un deux dormait l'homme que Maël avait sauvé de la mort.

Lorsqu'elle les aperçut, elle devança Bastien en les saluant:

"C'est gentil à vous de me rendre visite avant de partir !

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 Sujet du message: Re: Les Chaînes de Montagnes
MessagePosté: Mer 15 Avr 2015 13:29 
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Puisqu'il faut partir...

Maëlle chougne encore, des sanglots dans la voix quand elle cause… Un coup à ce qu’elle nous grille pour de bon avec ses états d’âme. L’autre guide, bien brave sans doute mais pas forcément malin, essaie de le rassurer, lui dit que sa sœur ne sera plus maltraitée avec eux. Nan, n’aie crainte, il n’y a pas de troll dans les buissons, il est déjà dans la maison… Pas une flèche celui-là, ou trop innocent pour douter de ce qu’il dit. Peut-être est-ce parce qu’il ne voit pas le mal, justement, qu’il accepte de nous mener à la guérisseuse. Il m’est d’avis que, contrairement à ce qu’il pense, son chef ne verrait peut-être pas d’un bon œil ce détour. C’est qu’elle m’a l’air d’avoir son indépendance dans cette bande de pendards, ou tout du moins son importance : la manière dont le chef lui a couru après dans les galeries ne me semble pas anodine, puisqu’il a préféré la préserver plutôt que de s’occuper de son trophée.

Au final, de détours en détours, de galeries en galeries – les nains et leurs exploitations minières ! – quelque minutes de marchent nous mènent à la résidence de la dénommée MammyRay. Un tunnel, long et étroit, nous amène dans une grande salle, sans doute aménagée par les soins de la guérisseuse : il y a là une grande table, à l’air pratique et utilisée régulièrement, outil de travail à part entière, des étagères sur presque tous les murs, portant aussi bien des livres que des pots, des fioles, et toutes sortes de récipients ; le nombre de lit peut laisser penser qu’elle héberge une famille nombreuse, mais l’absence du désordre caractéristique de la présence d’enfant, et le peu d’adéquation de l’atmosphère de la pièce avec une marmaille braillarde me laissent à penser que l’endroit sert aussi bien d’atelier que d’infirmerie. Le corps allongé dans une de ces couches, le grand blessé de la bataille dans les tunnels sauvé par Maëlle, va dans le sens d’une confirmation de mon intuition. L’accueil qui nous est fait peut être qualifié de chaleureux, en comparaison de la manière dont nous avons été jusque là traité.

« C'est gentil à vous de me rendre visite avant de partir ! »

« C’était la moindre des choses m’dame : v’vous êtes occupée d’me soigner, et z’avez évité au p’tit d’faire trop avec ses pouvoirs. C’aurait pas été conv’nable de partir comme des voleurs. On voulait vous r’mercier d’abord pour c’que vous avez fait pour nous. Et puis j’voudrais vous d’mander d’veiller sur la p’tite que vot’ chef a fait capturer. Il a beau dire qu’elle s’ra mieux ici qu’dans sa famille, c’est c’qui pense, et c’est pas l’avis du gamin. C’est d’jà terrible c’qu’est arrivé au frère, j’trouve qu’infliger ça à la sœur, c’est pire… J’ai offert d’l’argent à vot’ chef, pour qu’il y trouve son compte, qu’y fasse pas d’perte, et qu’chacun soit heureux chez lui, mais l’a rien voulu savoir. Alors on s’en r’met à vous. Comprenez, faudrait pas qu’elle soit trop malheureuse. Faire payer aux enfants les fautes du père, j’trouve pas ça… Ben c’est pas conv’nable. Enfin… J’crois qu’on est arrivé à un point où on n’a plus l’choix. L’chef a pas l’air décidé, et j’suis pas en état d’contester. J’espère juste que ça s’pass’ra bien pour la p’tite, et pour vous, qu’c’t’histoire amèn’ra pas plus d’malheurs qu’y en a déjà eu, pour personne. »



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Dernière édition par Jager le Dim 19 Avr 2015 17:13, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Les Chaînes de Montagnes
MessagePosté: Sam 18 Avr 2015 19:16 
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La vieille femme ainsi que Bastien écoutaient attentivement les arguments de Jager. Bastien semblaient arborer une attitude fermée, alors que MammyRay se permit d'examiner longuement (quelques secondes en fait) Jager, comme si elle tentait de l'analyser. Puis elle claqua de la langue, secoua la tête de gauche à droite, avant de se tourner vers le jeune homme

"Bastien ? " ! Demanda-t-elle gentiment

"Non, madame, je ne peux rien dire, mon patron me tuerait ! Rétorqua-t-il tel un soldat bien discipliné !

La vieille femme le fixa du regard sans rien dire. Vite, il devint mal à l'aise, et son visage prit des couleurs, mais il resta sur sa position.

"Non, madame ! Dit-il avec un peu moins d'assurance.


"Et bien soit, c'est moi qui en parlerait... et j'en sais probablement plus que toi. Iris viendra me voir s'il n'est pas content.... Va un peu plus loin avec Maël, je dois parler à cette homme, il mérite des explications ! Dit-elle d'une voix ferme et d'un regard autoritaire.

Bastien hésitait à sortir, visiblement mal à l'aise, prit entre l'arbre et l'écorce.
MammyRay, de son côté, aucunement intimidée, répéta son ordre :

"Allez ouste, sortez tous les deux ! "

Maêl aurait voulu rester elle aussi, mais le regard de la vieille la dissuada de tenter sa chance. Elle sortit donc, Bastien à sa suite.

Alors que Bastien s'apprêtait à franchir le seuil de la porte, la vielle, un sourire taquin sur son visage, l'interpella une dernière fois:

"Et fait gaffe Bastien, essaie de te contrôler pour une fois ! "

Le visage tout rouge, Bastien se dépêcha de quitter la pièce et entraîner Maël un peu plus loin.


" Je n'ai aucune crainte pour la petite, puisqu'elle est avec vous ! " Lâcha-t-elle du tact au tact.

"J'avais deviné pour la petite, mais je n'en avais rien dit à Iris. J'attendais de voir la suite des événements.... Iris avait envoyé Bastien, son homme le plus perspicace, afin de tenter de trouver la petite. Bien vite, Bastien apprit qu'il n'y avait pas de garçon, la jeune femme était fille unique. Pour ce qui est du père, c'est un salaud, n'ayons pas peur des mots. Il a pris sa servante, pauvre fille abusée et battue, pour la faire passer par sa fille afin de sauver sa peau. La jeune femme a accepté de jouer le jeu, car elle espérait être en meilleurs mains avec les kidnappeurs... c'est que dire. Mais les hommes de Jager ne sont pas idiots, ils ont bien vus que cette gouvernante, ne resssemblaient en rien, a la fille de l'homme. Pour ce qui est de Maëlle, elle ne connait que très peu son père. Sa mère morte en couche, elle a été élevé chez sa tante. Elle résidait chez sa tante dans une ville voisine, jusqu'à ce que celle-ci meurent, il y a quelques mois de cela. L'homme qui a accompagné Maël, était un ami de sa mère, son ange gardien qui a veillé sur la petite depuis sa naissance.... c'est lui que je considère comme son vrai père. "

Elle prit une pause pour laisser Jager digérer tout ça avant de reprendre.

" Iris va envoyer quelques autres de ces hommes, et ils vont s'occuper du père à leur manière. Iris a été reconnaissant pour ce que vous avez fait, mais je vous déconseille de vous mettre entre lui et le père, il n'aura pas de pitié. "

Elle rajouta enfin.

" Si vous n'avez pas d'autres questions, je vais rappeler Bastien."

Puisque Jager demeurait muet, MammyRAy plaça deux doigts entre ses lèvres et siffla. A peine, deux minutes plus tard, Bastien revint accompagné de Maêl.

"Voilà, tu peux les raccompagner à la sortie !" Annonça-t-elle à Bastien. Puis elle s'approcha de Maêl, lui fit un large sourire et lui recommanda de bien prendre soin d'elle.

"Je vous souhaite bon voyage de retour" Termina MammyRay à l'adresse de Jager.

Puis en sortant de l'antre de la guérisseuse, Bastien qui depuis quelques minutes examinait du coin de l'oeil, l'équipement de Jager, émit un commentaire.

" Vous avez une belle hache, il me semble avoir vu un casque dernièrement qui arborait les mêmes détails, les mêmes symboles. "

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 Sujet du message: Re: Les Chaînes de Montagnes
MessagePosté: Dim 19 Avr 2015 17:11 
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J’ai remercié MammyRay pour ses explications, et lui ai demandé de signaler à Iris que si les dieux veulent que nos chemins se croisent à nouveau pour une affaire de ce type, je ne serais pas contre une franche explication ; et à cette demande, j’ai joint mes remerciements pour ce qu’il avait fait : au fond, il s’était comporté en brave homme, et peut-être l’aurais-je imité s’il avait choisi de ne pas me cacher tant de choses. Les choses sont ce qu’elles sont, et l’on ne revient pas sur la passé, j’en sais quelque chose. Il était temps pour moi d’aller de l’avant, de retrouver une certaine stabilité, à commencer par ma solitude tranquille, autrement dit : ramener Maelle chez elle, même si j’avais de sérieux doute sur ce qu’elle allait trouver en la demeure paternelle. Quand MammyRay siffla Bastien, je ne dis pas un mot à l’enfant qui me questionnait du regard, et me contentai de lui souffler que nous parlerions de tout cela plus tard, et surtout loin des oreilles indiscrètes qui pouvaient rendre compte de nos propos au maître des lieux. Même si le chef de cette troupe de bandits ne me semblait plus aussi hostile, maintenant que je comprenais mieux ses motivations, je ne voulais pas avoir à me remettre dans ses pattes de sitôt. Dans ma tête, à mesure que nous avancions sous terre vers la sortie des galeries habitées par ces brigands des hauteurs, un plan prenait forme dans mon esprit. Hors de question de la ramener tout de suite à son père : peut-être avait-elle encore des attaches là où vivaient sa tante ? Il allait falloir la questionner à ce sujet.

De galeries en galeries, nous allions vers la lueur du jour, ou plus tôt vers ses derniers feux. Sous la montagne, mon sommeil n’avait obéi qu’aux impératifs fixés par mon corps, et non au mouvement des astres, et voilà que j’étais en parfait décalage, mais cela importait peu. Après nous avoir ouvert une porte de roche dérobée, par un quelconque mystérieux mécanisme inventé des nains qui taillèrent ce roc, Bastien nous laissa avec les provisions offertes par MammyRay, et un peu d’équipement, deux fagots de bois sec et de menus conseils sur la direction à suivre. Puis il disparut, et le raclement de la roche sur la roche sonna comme la fin de cette histoire.

Profitant de la luminosité déclinante de cette journée d’hiver, je cherche un lieu qui pourrait nous servir d’abris, l’enfant sur mes pas. Nous sommes encore sur les terres du duc d’Amaranthe, la ville la plus proche doit être Kendra-Kâr, ou tout du moins la plus accessible. Descendre vers la plaine s’avérera probablement la solution la moins risquée, plutôt que de prendre le risque de crapahuter dans le massif sur sa longueur, où le froid se fait plus redoutable, sans compter les bêtes et créatures que la faim rend plus audacieuses. Le lieu où nous nous trouvons est un chaos rocheux, il y a là des blocs détachés de la montagne plus haut que moi, et si lourd qu’il faudrait une troupe d’hommes équipés de leviers pour les déplacer. Peu de terre, et peu d’arbres : il nous faudra descendre encore un peu pour trouver les forêts, et donc assez de bois pour alimenter un feu au long de la nuit. Je ne veux pas brûler les fagots avant d’avoir eu l’assurance que l’on puisse renouveler nos provisions de combustible. Pour ce soir, il nous faudra sans doute nous contenter d’un creux dans la roche, des capes, des couvertures et des manteaux, ainsi que de nos chaleurs corporelles respectives.

« Jager… qu’est-ce qu’on va faire ? » me questionne Maelle, un peu intimidée.

« Nous r’poser. On n’y voit goutte, un coup à s’casser une patte. Quand y f’ra jour, on ira vers le sud, vers Kendra-Kâr. Pis là, on verra. »

« De quoi vous avez parlé, avec Bastien, quand vous m’avez demandé d’aller un peu en avant ? »

(Pas bête la mioche, même si des fois elle sait se mettre dans des situations pas possibles… Ouaip, elle sait que je lui cache quelque chose, mais là, les aveux, ça va pas être possible. Pas tout de suite… Alors autant se contenter d’une demi-vérité).

« Il m’a parlé d’un casque. Paraît qu’il ressemble pas mal à c’bouclier, et à c’te hache. Pis la légende d’Aaron parle d’un casque. Alors j’vais l’chercher. »

« Et pourquoi tu cherches ce casque ? »

« On en caus’ra plus tard, tu veux ? »

« Oui… »

Finalement, je trouve un lieu où établir le campement qui, s’il n’est pas idéal, est sans doute le mieux que je puisse trouver. Quelques maigres buissons ont poussé à l’abri d’un rocher qui s’avance comme une immense pointe de flèche penchée, retenu par d’autres blocs de pierre, là où de la terre s’est accumulée au cours des années. Une rapide inspection des lieux me rassure quant à son occupation : pas de traces de griffes sur les parois, ni de pattes ou de pas sur le sol, pas de marques de dents sur les branches nues des végétaux, ni poils pris contre l’écorce, rien qui trahisse que d’autres bêtes ou humains sont venus trouver refuge ici. A l’été, la végétation nous aurait bien mieux dissimulé, mais la position n’est pas si mauvaise. Après avoir chargé Maelle de déblayer la neige pour que nous puissions nous coucher, je reviens sur nos pas pour masquer grossièrement nos traces, puis remonte pour lui donner un coup de main ; l’activité nous a légèrement réchauffé, mais la froidure de la nuit tombe à mesure que la luminosité baisse ; le soleil a déjà disparu derrière les hauteurs à l’ouest. A force d’acharnement, nous parvenons à une couche de minces feuilles mortes rendues craquantes par le gel. Chacun à notre tour nous nous éloignons derrière les rochers, à portée de voix par sécurité, pour satisfaire à des besoins naturels, puis piochons dans les maigres provisions offertes par la guérisseuse : un quignon de pain et deux larges tranches de lard fumé nous font un repas qui convient à notre situation. La fillette s’est blottie contre moi, et enveloppés dans nos manteaux, puis dans nos couvertures, protégés des intempéries par la couche des capes, nous ne tardons pas à nous endormir. Je l’ai sentie sangloter en silence, elle qui avait presque toujours réussi à conserver le contrôle de ses émotions, et je me suis bien gardé d’intervenir d’une quelconque façon : je n’aurais pas trouvé quoi lui dire. Quand son souffle s’est fait plus lent et plus régulier, j’ai sombré à mon tour dans un demi-sommeil, mauvais pour reprendre des forces mais nécessaires pour ne pas se laisser surprendre. Je sais déjà que j’allais me réveiller plusieurs fois dans la nuit, au moindre craquement, pour le plus petit paquet de neige tombé sous l’effet du vent, mais peu m’importe, j’aurai tout le temps de me reposer une fois à destination… Plus tard…

Vers Kendra-Kâr - Premier jour

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 Sujet du message: Re: Les Chaînes de Montagnes
MessagePosté: Mar 28 Juil 2015 10:42 
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Séjour à Pont d'Orian

Une journée de marche fut nécessaire pour gagner le village indiqué par les habitants de Pont d’Orian. Là, m’avait-on dit, vous trouverez plus d’information sur les lieux, la grotte que vous cherchez est dans leur région. Aux premiers reliefs modérés de la sortie de la cité se sont succédés des sentiers bien plus abrupts, couverts par les neiges : j’ai progressé pas à pas, armé d’une longue perche pour sonder la couche blanche, les yeux rivés sur les poteaux censés servir de repère aux voyageurs.

Val bleu… Il paraît qu’il y a là profusion de fleurs, l’été venue, à la couleur éponyme, une merveille de Yuimen pour les yeux. Mauvaise saison pour contempler les lieux sous leur meilleur jour. Les habitations, une dizaine de corps de ferme, sont basses, probablement creusées en partie dans le roc, les toits conservent sur eux une forte couche de poudreuse pour leur fournir une isolation supplémentaire, sans doute au prix d’une charpente bien plus solide que ce qui se fait dans la pleine. Les volets sont tirés, les rais de lumière rares, la fumée des cheminées difficiles à percevoir. Pas de tour de garde, pas de guet, rien ni personne pour avertir de l’imminence d’une menace, aussi chacun doit-il se trouver claquemuré chez lui. J’ai frappé à trois portes sans réponse, ce n’est qu’à la quatrième que les coups sourds de mon poing ganté ont suscité une réaction dans la demeure. L’homme de la maison et deux de ses fils – l’air de famille sautait aux yeux – m’ont ouvert, armés chacun de leur hache, de solides instruments de travail et de mort. Comme plus bas, vers la plaine, dans le village où j’ai traversé le fleuve il y a de cela plus d’une semaine maintenant, on m’a offert de quoi manger, et de coucher dans l’étable, avec une couverture en plus de mes effets. J’ai insisté pour payer, de telle sorte toutefois à ne pas froisser le sens de l’hospitalité des gens du cru. Les yus m’ont peut-être valu qu’au matin, au lieu de me chasser, on me propose un bol de gruau, et me pose quelques questions sur le motif de ma venue.

« J’viens ici chasser une harde de gnolls. Paraît qu’y’en a une qui s’terre dans un coin d’ces montagnes. » expliqué-je.

« C’est l’duc qui vous envoie ? » me demande le paysan – Brün – en continuant la traite de la vache d’un geste machinal.

« Non. J’ai rencontré un gars qu’avait été attaqué par eux. On lui a pris un truc auquel y tient. Y m’a chargé d’le récupérer, pis d’en finir avec ces crevures. » Le lait chaud se précipite à petit jet dans le seau, régulier dans le rythme.

« Sont jamais v’nus au village, les dieux soient loués. On a d’mandé au comte, au duc, on a dit qu’y fallait y faire. Y nous ont causé d’impôts, de besoins d’soldats ailleurs. Pas d’mort qui z’ont dit, donc pas d’soldats. Pis y sont rev’nus sur les impôts. Soit disant qu’on d’vrait pas s’plaindre. Qu’on a pas payé tant qu’ça. Qu’on peut nous d’mander plus… J’me d’mande laquelle d’ces crevures nous bouff’ra en premier ! »

« Longtemps qu’y sont là, les gnolls ? »

« Sont arrivés à la fin d’l’été, d’là où on les a p’têt’ chassé. Z’ont trouvé une grotte, où qu’vivait un ours du temps d’mon grand père. Un coin à l’ombre pour les bergers d’nos jours, avant qu’les gnolls s’y collent. Z’ont bouffé des chèvres des moutons, et y’a plus guère de p’tit gibier qui passe là bas. Pire qu’des loups ces bêtes. Pas futé qu’y parait, mais vicieux. On en avait pas vu dans not’ coin des montagnes d’puis un temps… Faut qu’ça tombe sur nous, faut qu’ça tombe maint’nant… »

« J’peux vous aider. »

« On a pas grand-chose pour vous payer. Même rien, pour pas vous mentir. »

« Pas grave. J’me paye sur la bête. »


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Dernière édition par Jager le Mar 28 Juil 2015 13:00, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Les Chaînes de Montagnes
MessagePosté: Mar 28 Juil 2015 12:57 
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Etat des lieux


De braves gens, ces villageois. Pas pires qu’ailleurs, et certainement pas meilleurs, j’en suis conscient : il se traine comme peut-être partout des histoires pas reluisantes, de familles ou de voisins. Toujours est-il qu’ils ont abattu une bête pour moi, un beau cochon qu’ils se gardaient pour plus tard ; ma venue n’a fait que précipiter les choses pour le porc. Dans deux outres plaquées contre ma chemise, sous mon manteau, qui me font le torse comme une barrique, c’est son sang encore chaud que je transporte, et soigneusement emballés dans des boites en écorce, des abats et un peu de viande que les éleveurs m’ont cédé contre quelques yus symboliques. Au fond, je crois qu’ils auraient accepté que je parte sans rien leur laisser, quitte à emporter quelques pièces bien comestibles, pour le seul espoir que je les débarrasse de la menace. Profiter ainsi de leur foi en ma réussite, sans leur offrir de véritable garantie, m’a posé un problème de conscience, aussi ai-je payé. J’ignore si je vais revenir, alors autant que mon âme, si je meurs, ne soit pas alourdie du poids de ces yus.

L’homme qui m’a recueilli pour la nuit a accepté de faire avec moi un bout du chemin pour m’indiquer au plus près la grotte, tout en m’avertissant qu’il m’abandonnerait à quelques replis de terrain de la tanière des gnolls, pour être certain que son odeur ne soit pas portée par le vent jusqu’aux truffes des créatures. Contre des yus, ces petits disques de métal capables d’aplanir tant de difficultés à travers le temps et l’espace, j’ai pu acheter un traineau rudimentaire à un autre des villageois – il a dit loué, a parlé de caution, espérant mon retour autant, je l’espère, que celui de son bien – où j’ai chargé des peaux, des piquets, du bois, quelques provisions. Des sangles me permettront de le hisser sur les pentes, on m’a assuré que je ne devrais pas trouver de véritable obstacle à ma progression ainsi chargé si je fais attention. Et Brün, s’est proposé de tirer pour moi cette charge jusqu’au moment où il m’abandonnerait. L’économie de force était trop belle pour que je puisse refuser. Des remerciements, et voilà que les seuls mots que nous échangeons en attaquant les pentes. Nous économisons notre souffle, nos lèvres protégées par d’épais cache-nez, et je n’ai pas le cœur à parler. Le voir serrer sa femme et sa marmaille dans ses bras avant son départ, même si selon toute vraisemblance il allait les revoir avant la nuit tombée, m’a collé glacé plus que le vent qui souffle dans la montagne, remuant dans les vases de ma mémoire ces souvenirs dont j’espère chaque jour qu’ils s’enterreront un peu plus profondément si je n’y pense pas. Moi aussi j’aurais pu avoir une famille.

« Bonne chance mon gars. Continue sur c’te pente, et d’la haut, tu pourras voir trois rochers collés. La grotte est à côté. On la voit pas d’en haut, faut s’approcher. Avec la neige c’est p’têt’ pire. »

« Merci pour tout. »

« Pas d’quoi. R’viens avec la tête de ces gnolls, ça vaut tout les mercis, et c’est nous qui te devront plus que c’que tu nous a donné. »

« J’vais faire de mon mieux. »

« Yuia soit clémente avec toi. »

« Bon retour. »

Un dernier signe de la main, et le voilà qui disparaît. Avant de partir, il m’a aidé à me harnacher pour la dernière partie de l’ascension. Mes jambes me font mal, tirer le traineau, en sus du poids de mon sac, m’arrache des grimaces de douleur, mais je parviens à surmonter cette gêne à force de détermination. Une fois arrivé en haut de la pente, je m’aperçois que je pourrais descendre dans le petit creux de la montagne en me laissant glisser. La petite vallée est adossée à des pentes abruptes à l’est, ouverte vers l’ouest où elle s’abaisse, à peine encadrée au nord et au sud par des hauteurs comme celle que je domine. Je devine une ligne en creux peu large la traversant dans toute sa longueur, sans doute un torrent alimenté les beaux jours venus par la fonte des neiges. Je l’imagine déjà au printemps, riche de fleur et de hautes herbes, longue à l’éveil dans les brumes du matin, déployant sa beauté et son calme serein sitôt le soleil haut dans le ciel, profitant de ses rayons jusqu’aux dernières heures du jour. Dans ce creux paisible, les bêtes peuvent s’égailler sans s’égarer, et nul besoin d’y construire une cabane ou une hutte de pierre sèche comme cela se pratique parfois si une grotte offre un abri confortable. Autrefois un ours devait en chasser les hommes, maintenant les gnolls. Mon imagination à l’œuvre s’éteint comme revient l’objet de mon voyage. Disparues les couleurs et les sons, il n’y a plus qu’un paysage blanc et la sourdine de l’hiver, faite de vent, de craquements, de sons morts, lointains, parfois menaçants. La clémence de Yuia invoquée par Brün ne sera pas de trop. Yuia, mère des neiges, Rana, reine des vents, et Yuimen, seigneur des roches. Nombreux sont les dieux qui veillent ou châtient en ces montagnes, nombreuses sont les bénédictions, plus nombreuses encore les menaces.

Avant toute chose, il me faut me préparer à passer la nuit. Déposant mon sac sur le traineau, encordant mon arc pour plus de sécurité, je sonde avec l’un des piquets jusqu’à trouver ce que je cherche, une portion de la pente dans laquelle je pourrai me fondre, un petit rebord assez grand pour m’accueillir. Tout au long de l’opération, j’ai guetté le vallon, n’apercevant aucun signe de mes proies, sinon ce qui de loin pourrait être des traces de pas, ou n’importe quoi d’autre, comme une pierre délogée par le gel ayant roulé plus loin. J’ignore les mœurs précises des gnolls, d’eux je ne connais que les histoires colportées par ceux qui les craignent ou les ont affronté, du moins le prétendent. Ils ont une appétence toute particulière pour la viande fraîche, de cela je suis sûr. Il m’aurait cependant été plus utile de connaître leurs habitudes de chasse, savoir si ce sont des créatures diurnes ou nocturnes.

(Courir le continent, frapper à toutes les portes, pour savoir ce qu’il en est des habitudes de ces bestioles, pour en sortir quelques-uns de leurs tanières…)

L’idée me fait sourire. J’aurais pu mieux agir, plus prudemment peut-être, que je l’ai fait, fonçant tête baissée. Cette piste est la seule que j’ai pour une quête qui me semble parfois dépasser ma modeste réalité, voire confiner à la folie – ma propre folie. Pas question de la laisser refroidir. Et à quoi bon continuer, si je ne suis pas à la hauteur ?

Veillant à ne pas faire plus de bruit que nécessaire, je dégage des paquets de neige à l’aide de ma hache, me servant du plat de la lame comme d’une pelle, du tranchant pour venir à bout des blocs les plus tassés, jusqu’à trouver le couvert herbeux. C’est une terre glacée que j’attaque au couteau, pour creuser des trous assez profonds pour caler les piquets amenés jusque là. Une fois installés, les trois plus longs soutenus par un plus court, calé par un plus court contre la pente, le tout noué par des cordelettes de chanvre, je place les traverses, tend les peaux, ne me ménageant qu’un battant mobile en guise de sortie sur le flanc, et deux « rideaux » sur des trous que l’on peut appeler fenêtres avec un grand optimisme. Rester un jour au village a permis de tuer le cochon sans précipitation, mais de préparer à l’avance ce montage, affût de fortune aux mesures des circonstances. Une fois le tout consolidé sur les flancs par des murs de neige tassé, et recouvert d’une couche de poudreuse ne menaçant pas de faire s’effondrer la structure, il ne restera plus – je l’espère – qu’un relief étrange n’étant pas là la veille.

Le voyage m’a pris la première partie de ma journée, l’installation la seconde. Nul doute que je n’ai pas été d’une discrétion exemplaire, mais des observations régulières effectuées dans le creux du vallon m’ont à demi rassuré : rien n’avait bougé.

(Pourvu que ces crevures n’hibernent pas…)

Dans mon abri sous la neige, à peine assez large et long pour que je me couche, ou m’assoie, je m’apprête à une longue veille. Les outres de sang sont maintenant collées à une extrémité de ma cache, et je m’enveloppe soigneusement sous les couvertures pour ne pas perdre de ma chaleur. L’heure n’est pas encore venue d’allumer un feu. Avant tout, je mange de tout mon saoul, et bois l’eau conservée, comme le sang, près de mon corps pour ne pas qu’elle gèle : l’ascension et la préparation ont puisé dans mes forces. Il me faut les reconstituer avant d’envisager de passer à l’offensive.

Abattage ( [:attention:] contient des passages un peu macabres)

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Dernière édition par Jager le Ven 31 Juil 2015 10:51, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Les Chaînes de Montagnes
MessagePosté: Ven 31 Juil 2015 10:49 
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Préparation de l'affût

((( [:attention:] Ce texte contient quelques passages un peu macabres)))


Je les ai entendus avant de les voir. Que sont-ils, ces gnolls ? Des chiens sans cervelle ? L’écho de leurs cris, de leur bagarre, de leurs jappements, a roulé dans ce val. Sans cela, je les aurais peut-être manqués. Par cette nuit claire, je les ai perçues distinctement sur le couvert neigeux, cinq silhouettes à peu près humanoïdes, où malgré la distance je distinguais l’animal dans la forme comme dans l’attitude. Un plus gros domine les quatre autres, et mène le groupe. Sans se risquer sur les pentes, ils ont quitté la vallée par le chemin le plus aisé, laissant leur grotte sans surveillance apparente. Peut-être se cachent encore là d’autres de leurs comparses. Je ne me risquai pas à aller vérifier, l’abri est une cache mais aussi une protection. Ils sont rentrés avant le jour, dans un concert de paroles indistinctes mêlées d’aboiements, chahutant lorsque le chef ne venait pas mettre de quelques claquements de mâchoire de l’ordre dans sa petite meute. A leur retour, ils ne paraissaient chargés d’aucune proie : s’ils ont chassé, ils ont également festoyé sur place.

J’ai dormi tout le jour, accablé par la fatigue, rendu confiant par l’expédition nocturne des gnolls, confiance exacerbée par le besoin de me reposer peut-être. Plus assis que couché, mes mains sur la hache, j’ai somnolé, avant de sombrer pour de bon, enfermé dans ma petite cabane de fortune, dans la chaleur préservée de mon corps. Sans même savoir si j’allais me réveiller, comment j’allais me réveiller. Cela n’avait pas d’importance. Je ne craignais pas une mort que j’aurais pu éviter.

L’obscurité n’est pas la cause de mon éveil, mon corps a quitté l’état de repos pour repasser en état de veille, dans un mouvement que je ne comprends pas toujours très bien. Peut-être est-ce l’habitude. Je me fie à lui bien souvent, je ne crois pas qu’il m’ait jamais fait défaut dans les situations extrêmes où parfois je me suis fourré. L’avantage de penser que nous sommes deux, c’est que je peux me reposer sur lui quand je me montre déraisonnable…

Sont-ils déjà partis ? Partiront-ils ce soir ? J’espère. Le sang n’a pas gelé dans les outres, mais je me doute qu’il a maintenant une texture bien plus épaisse, et malgré le froid je doute pouvoir le conserver plus longtemps. Sans compter qu’avec les tripes dans les boites, près du traineau, même bien couvertes de neige, je prends des risques. Si ces gnolls flairent la manne, la situation deviendra pour moi plus précaire. Je veux qu’ils les flairent, je veux le sang attise leur faim, que cette dernière déborde leur prudence, leur prévention. Et que tout s’achève dans cette vallée.

Comme je l’attendais, ils ont quitté leur tanière, aussi bruyants que la veille. Cela signifie peut-être qu’ils n’ont pas trouvé de quoi se nourrir la dernière fois, ou pas assez, pour se risquer ainsi à nouveau dans le froid, plutôt que de digérer leur pitance dans la chaleur relative de leur abri. Et peut-être qu’à leur retour, ils auront faim. En attendant qu’ils s’éloignent assez pour m’assurer une descente en sûreté, je mange, je bois, je reprends des forces, je me prépare. Tout pourra se passer très vite, je n’aurai pas le droit à l’erreur. Cette nuit me fait penser à celle des loups, si proche dans ma mémoire et déjà si lointaine, cette nuit qui m’a fait entrer pleinement dans ce cheminent étrange à travers les montagnes, cette nuit qui m’a valu de gagner cette marque noire, sur mon visage. Même piège, même méthode, attirer les affamés avec de la viande fraîche, du sang, et tuer sans hésitation. Des loups alors, maintenant des gnolls, toujours pour apaiser les craintes de villageois.

(Je pourrais devenir comme ces bêtes que je traque, pour peu que je prenne les mauvaises décisions… Que l’on me prenne en horreur, que l’on me considère comme une menace, et il suffira que ceux là qui m’ont désigné comme coupable, effectif ou potentiel, feront appel à un autre mercenaire de passage, un homme assez courageux pour me traquer dans les montagnes, ou assez fou, qui m’observera sans que je l’aperçoive, me tendra un piège, me criblera de flèches, et ramènera une preuve de mon trépas. Je suis un peu comme ces loups, comme ces gnolls… La différence entre eux et moi, c’est que je n’ai pas mangé la mauvaise brebis… Et encore, cela dépend où…)

Des ynoriens pourraient probablement m’en vouloir assez pour exiger d’avoir ma tête, malgré l’ordalie, malgré le temps passé…

Assez de ces pensées sombres, ces souvenirs inadéquats : ils n’ont pas lieu d’être ici, sinon pour me troubler. Si je veux l’emporter sans risquer ma vie, il me faudra avoir l’esprit aussi clair et pur que possible, rester lucide quoi qu’il advienne. Sous mes moufles plus épaisses en fourrures, j’ai passé mes gants de laine ; je pourrai retirer les premières assez vite, les seconds me protègeront du froid le temps où j’aurai à me servir de mes armes, mais hors de question d’attendre sans protection. Sitôt l’affût quitté, il me faudra trouver un coin, me dissimuler, souffrir du vent et du froid plus sûrement que dans mon cocon. Tout tiendra à l’enchainement, au plan. Agir sans hâte, sans précipitation. Mieux vaut attendre un jour de plus que de risquer de voir capoter l’objet de cette expédition. Unes à unes, je vérifie les flèches de mon carquois, observant leur fût, leur empennage, la fixation des pointes, afin d’être certain qu’aucune ne me fera défaut pour avoir souffert des conditions climatiques et du voyage, de ma négligence surtout. Mon sac restera caché, à l’abri avec mes provisions, je n’emporterai que le strict nécessaire : le carquois à mon côté droit, la hache passée à ma gauche, l’arc d’une main, le bouclier de l’autre comme dernier recours. Pour la chaleur, je compterai sur mes vêtements chauds, ma cape de fourrure doublée de celle prise au cadavre du shaakt, il y a quelques jours de cela. Et puis ce sera tout.

Mais avant de guetter, il me faut mettre l’appât en place. C’est là que je prends le plus gros risque, car je n’ai emporté avec moi que la hache, conservant mes bras de libres pour emporter les outres et les boites d’écorce où les tripes ont gelé. Descendant la pente vers l’opposée de l’entrée de la grotte, là où je devrai attirer les gnolls, assez loin de leur abri pour pouvoir les abattre avant qu’ils aient le temps de se réfugier, je songe déjà à mon succès. D’un coup de couteau, j’éventre une outre, ne voyant pas d’autre moyen pour faire couler le sang maintenant presque coagulé, mais pas tout à fait ; j’ai ôté gants et moufles pour ne pas les souiller, je préfère avoir froid un peu et pouvoir me laver les mains dans la neige. Des boites je tire les abats, les roule dans le sang, puis les lance le plus loin possible vers la grotte, presque sur les traces laissées par mes proies quittant la petite vallée. Chaque lancé laisse derrière lui quelques gouttelettes sombres, un sillage vers la source de la chair. Sur les quelques morceaux de viande restant, j’éventre la seconde outre de sang. Cette sanglante mise en scène accomplie, mes mains nettoyées mais gelées, je renfile mes gants, dissimule outres et boites sous la neige, puis remonte en masquant tant bien que mal mes traces. C’est avant tout sur la gourmandise des gnolls que je compte, plus que sur ma capacité à être discret dans cet environnement hivernal.

De retour sur l’arrête où je compte me dissimuler, je m’aménage le poste de guet, bien sommairement : une peau de chèvre pour me protéger de l’humidité, un petit rempart de neige vite constitué pour masquer un tant soit peu ma présence. Le vent m’arrive en pleine face, dissimule mon odeur, me tire des larmes, et rendra peut-être mon tir plus difficile. Pas grave, les gnolls sont des cibles larges, ce qu’il me faut, c’est m’ajuster. La tache sombre du sang sur la neige est tentante, et je dois avoir assez de vingt flèches pour mener à bien mon ouvrage : mieux vaut en sacrifier une, et risquer d’éveiller la méfiance des bêtes – c’est un risque que je prends en considération, même si j’ignore à quel point ces créatures sont « intelligentes », et si une flèche suffira à éveiller les soupçons. La sensation que me procure l’arc bandé dissipe mes craintes. Entre la flèche et la cible, il n’y aura qu’un court instant de félicité, qui se prolongera peut-être si elle touche par la satisfaction du travail bien fait, de la maîtrise d’un art, toujours en recherche.

Deux paumes du but à peu près. Maintenant, je sais comment ajuster mon tir, quelle force mobiliser pour bander l’arc, l’angle meilleur de la flèche. Une attention accrue au premier tir me permet bien souvent de ne pas penser au suivant. D’’abord le tir, ensuite la proie. Je suis proche de la distance optimale pour mon tir à l’arc long, dominant de peu l’endroit où j’attends les gnolls ; par ce fait, je suis également proche d’eux, dangereusement proche. Mais le relief est mon allié, et le vent qui dessert mon tir est le même qui camouflera mon odeur. Et puis il y aura celle du sang…

Le temps s’écoule, rendant à chaque heure le froid plus dur ; je n’ose me lever, faire quelques pas, ranimer la flamme en moi par un peu d’exercice. Alors je ressers contre moi les capes, courbe la tête, me tasse un peu plus, comme une braise cachée sous la cendre. Je bougerai bien assez tôt, et je n’ai pas encore atteint mes limites : ce n’est pas le premier hiver où j’attends un gibier, je sais ce que mon corps peut supporter, et également ce que valent mes vêtements. Attendre.

Perdu au-dessus de cette vallée, le sens de toute cette histoire m’échappe. Il aura fallu l’érudition, la sagesse – ou la folie douce – d’un vieux sinari pour me jeter sur les chemins, hors de ma demeure. Pour la première fois de ma vie, j’ai résolu un mystère en faisant appel à des forces surnaturelles, obscures. La créature dans la demeure du nécromancien a apposé sur moi sa marque, cette trace noire sur ma joue, cette main squelettique, flétrissure dont j’ignore encore ce que le monde peut en penser, et ce qu’elle signifie. Je suis marqué dans ma chair par cette rencontre, tout comme je l’ai été par Maëlle. Les griffes du liykor noir ont creusé dans mes chairs, je porte toujours les cicatrices de ce combat, je les porterai jusqu’à la fin de ma vie, comme un souvenir d’une folie de plus. J’ai aidé une enfant, j’y ai gagné… Un bouclier. Un assemblage de bois, de cuir et de métal, prétendument ancien, le bouclier d’un héros tombé au combat… Et maintenant, je cherche un autre morceau de métal, un autre objet dont je ne conçois pas la valeur, mais dont j’espère qu’il pourra constituer un salut. Pas par le rachat de mes fautes, je le crois impossible : je ne ramènerai pas à la vie ma femme, ni son amant, ni ses frères, je n’effacerai pas la peine des familles, et la honte de mes parents, je n’ai pas ce pouvoir. Porter les armes d’un mort, moi qui suis déjà hanté par les morts, moi qui ait été touché par la mort : voilà un étrange projet. Depuis que je me suis mis en chemin, je n’ai pas songé à l’après. Le temps que durera cette quête initiée par d’autre, j’aurai un but, mais après ?

(Après le sang coulera à nouveau, le sang de nos ennemis. La hache tombera lourde sur le crâne des garzoks, le bouclier sera rouge de nouveau, et les ennemis de l’Ynorie trembleront devant le porteur du casque du martyr…)

Un bruit nouveau chasse la pensée qui s’est frayée jusqu’à mon esprit. La vie revient dans cet environnement glacé, à grands jappements et cris. Je me risque à jeter un œil, et retient un juron. Voilà qu’ils dépassent mes appâts sans réagir, sans que…

Le plus petit de la meute des cinq, resté en arrière pour éviter les manifestations violentes de ses comparses, s’arrête, hume, bifurque. (Les dieux soient remerciés…) Il tombe sur la première pièce de viande et, sans se manifester aucunement, peut-être pour éviter de se voir déposséder, il la saisit dans sa gueule et commence à mastiquer la chair prise par le gel. Son attitude de loin est ridicule : bras ballants, voûtés, d’un aspect vaguement humanoïde, immobile comme perdu dans sa mastication. Il a sans doute oublié un instant qu’un groupe n’est un groupe que parce qu’il connaît ses membres et dépend d’eux : il n’est pas un animal parmi d’autres, pouvant se détacher sans que cela importe. Son absence se fait remarquer, puis son comportement attise la curiosité. Le chef de meute en tête, les trois autres sur ses talons, ils courent sur leurs deux pattes, aussi vite que la neige le leur permet. Puis l’odeur du sang dégoulinant sur les babines du gnoll parvient à leurs truffes, et le mouvement se décompose, chacun y va de son rythme, pour que finalement, le dominant encore triomphe et renverse le découvreur de viande, cherchant à lui faire lâcher sa prise. Est-ce que les autres ont perçu le sang ? Ou se sont-ils tout simplement mis en quête de quelque chose à mettre sous la dent, l’instinct de traque attisé ? Les trois épargnés par la bagarre s’égaillent en éventail, jusqu’à ce que l’un d’eux trouve le deuxième jalon de la piste.

La suite pourrait de loin paraître comique, si elle n’était pas empreinte d’une telle violence. Chaque découverte d’un abat par un des plus faibles excite le plus fort, qui fonce pour le déposséder. Cela fait, plutôt que de se gaver, il courre vers celui qui avance vers la tache de sang, quelques morceaux encore dans la gueule, et tend à le déposséder à coup de griffes. Puis il ramasse son butin, des crocs et des pattes, et recommence. De bonne fortune en dépouillage, les cinq parviennent à la marre de sang gelé. La bataille commence. La faim donne plus d’audace aux moins favorisés par la nature, ils y vont de leurs morsures, et face à cette grogne venue du bas, le chef doit riposter plus vigoureusement. Il me semble de ma position qu’un sang plus chaud vient déjà couvrir celui que j’ai répandu. Peu importe. Pas le temps d’hésiter, pas le temps de douter, il me faut profiter de l’occasion. Je me redresse de toute ma hauteur, la flèche déjà encochée, bande l’arc, laisse le trait s’échapper. Il touche à l’épaule le plus gros gnoll, interrompant l’espace d’un instant sa tentative de remise d’ordre dans la meute, dont les autres profitent. Ils n’ont pas encore perçu l’origine de sa faiblesse, et tant mieux. Trois flèches s’envolent avant que tout le chahut cesse pour fuir la boucherie ; quand les survivants comprennent que la menace vient d’ailleurs, deux des créatures sont déjà couchées, en proie à une douloureuse agonie.

Voilà venu le moment crucial, l’instant où va se jouer la réussite de ma mission. Hors de question de rester plus longtemps perché, il me faut bouger. Les raquettes qui jusque là m’avaient permis de me mouvoir sans trop de peine sur le couvert neigeux me désavantage légèrement sur la descente, mais les gnolls dans la neige épaisse ne sont guère rapides. Je fais une halte, tire une flèche, dévale un peu la pente, nouvelle halte, nouvelle flèche. En cinq escales je parviens en bas, et sur cinq projectiles, j’en ai perdu quatre, mais le cinquième a fait mouche, un des trois gnolls en fuite s’effondre, touché en plein dos. Plus que deux.

Le plus petit, plus identifiable, fuit en direction de la sortie de la vallée, l’autre, un des trois intermédiaires du groupe, préfère le salut de la grotte. Le plus cohérent serait de traquer le plus faible avant qu’il ne s’échappe dans un environnement plus large, puisque je saurai où trouver celui qui reste. Mais… Je n’ai laissé aucune chance à ces bêtes, je n’en avais de toute manière pas l’intention. Celui qui fuit mérite sa chance : je ne le crains pas. Seul, il ne constituera pas une vraie menace, un chien de berger pourrait le tenir en déroute, d’autant plus appuyé par son maître armé d’un lourd bâton. La menace que constituaient ces gnolls ne tenait qu’à leur groupe. Un seul, les villageois pourront le débusquer sans peine… S’il revient. S’il survit à l’hiver. A ce petit, je laisserai la vie sauve, il mérite sa chance. Je sais que la hiérarchie des animaux est parfois différente de la nôtre, et que la pitié n’a peut-être pas de sens pour ces humanoïdes, mais de savoir qu’il a survécu dans ce groupe attire chez moi une certaine compassion. Dont ne bénéficie pas l’autre fuyard. Alors que je décide de laisser l’un survivre, je suis toujours en marche sur les traces de l’autre, qui trop hâtif, titube. Une flèche, puis deux, viennent couper son élan. Il n’est pas mort, tente dans un dernier sursaut de vie de ramper jusqu’à l’abri. Il n’y parviendra pas.

Vient la tâche la plus ingrate, peut-être la plus dangereuse. Certes, je suis venu les tuer, mais je ne m’abaisserai pas à laisser ces gnolls agoniser lentement dans la neige, se vidant de leur sang ou s’étouffant peu à peu si ma flèche a percé un de leurs poumons. Je suis un chasseur, pas un monstre. C’est là que je vais augmenter mes risques. Pour faire les choses proprement, je devrais, m’approcher, et si l’un d’eux, dans un sursaut de vitalité décide de griffer, ou de mordre… Le plus proche de moi vers la grotte, le premier touché dans sa course, n’est pas mort. Hache ou poignard ? Je délaisse l’arc et, une arme dans chaque main – le poignard pour faire face à un éventuel corps à corps – j’opte pour la décapitation, son cou bien en évidence me le permet, et j’ai une confiance suffisante en l’arme pour faire un travail net ; sa tête se détache dans un bruit de chair déchirée et d’os tranché. L’autre rampe encore quand je parviens jusqu’à lui, poussant des râles étouffés, mêlés de gargouillis. Lui souffre, poursuit dans ses dernières forces son projet de se dissimuler, alors qu’il doit être conscient que jamais il n’y parviendra. Hache également. En voyant cette tête détachée du tronc, je me dis qu’il me faudra peut-être ramener ces sinistres trophées comme preuve de ma victoire. Me faire le porteur d’un tel fardeau de n’enchante guère, mais je veux que les villageois soient mis face à l’accomplissement de leur volonté : certains s’en réjouiront, tous peut-être, mais qui sait, d’autres prendront conscience qu’en m’envoyant la haut, ils ont envoyé la mort sur ces bêtes…

Avant de reculer vers les deux premiers cadavres, je jette un dernier coup d’œil inquiet à la grotte, que je perçois maintenant, jusque là invisible depuis mes deux perchoirs. Ce n’est pas l’ombre dont elle déborde qui m’a le plus fait frissonner, mais tout ce qu’elle pouvait dissimuler. D’autres gnolls, une autre bête qui les dominait… Pendant le massacre, rien n’est sorti, et j’en suis un peu plus rassuré, pas totalement cependant. Les deux corps près des appâts sont ont ne peut plus mort lorsque je parviens jusqu’à eux. Le gros gnoll, ma cible principale, a bien péri sous le coup de mes flèches ; l’autre a été touché, sans que cela soit la cause de son trépas : sa gorge a été dans la curée ouverte par un coup de crocs, il s’est vidé de son sang.

(Demain, demain j’achèverai ce travail, au grand jour…)

Après avoir ménagé une petite ouverture dans le toit, j’ai allumé un feu dans mon abri, mangé, étouffé les braises pour ne pas risquer de m’y brûler dans un faux mouvement, et me suis endormi d’un sommeil lourd, sans rêve.

Au milieu d’un nouveau jour, j’ai nettoyé cette vallée aussi bien que je l’ai pu. En fouillant les corps, je n’ai rien trouvé dans les oripeaux qui les protégeaient du froid en sus de la fourrure. J’ai pu constater que si je n’avais pas tué ces gnolls, à moins d’une proie providentielle, l’hiver s’en serait chargé à ma place : ils n’avaient presque plus que la peau sur les os, comme ces loups qui parfois arrivent au printemps faméliques, auraient pu lutter dans leurs corps à corps, mais pas résister aux blessures des flèches. Ma venue les a condamné. En rattroupant les quatre têtes, je me demande si le cinquième a trouvé un abri pour la nuit, je me demande surtout s’il va revenir et chercher à se venger, et traduit cette inquiétude par une attention constante à mon environnement. Je n’ai pas peur de la nuit, car j’ai laissé les corps en évidence : s’il a faim, il ira d’abord se nourrir sur les dépouilles.

La lumière du soleil de l’après-midi éclaire bien la grotte, et la réchauffe sans doute un peu. Elle est assez profonde pour s’abriter du blizzard, mais pas pour dissimuler entièrement son contenu ; j’y tiens à peine debout, devant me courber à mesure que je m’avance. De là, le point de vue sur la vallée n’est pas mauvais, surtout sur le seuil : je comprends mieux pourquoi les bergers venaient s’y reposer, l’entrée doit être chaude le soir venu, tandis que le fond offre un abri frais lors des après-midi les plus chauds, et un bon endroit pour stocker des provisions.

Il y a aussi là le butin des rapides gnolles. Des tas de couvertures et de vêtements, sortes de nids dans lesquels ils devaient se fourrer pour se tenir au chaud, jonchaient le sol dans les coins les plus abrités du vent, complétés par des branchages, des brassées de feuilles mortes. Et en tas, près du plus gros nid, diverses armes et pièces d’armures, probablement le trésor de guerre de la meute sur lequel devait veiller le chef. Il y a là des haches de diverses factures, quelques épées, des gourdins, deux brigandines presque en lambeaux de cuir, trois cottes de mailles déchirées, des couteaux, des flèches mais aucun arc. Hors de question de laisser ces armes dans la nature, des fois que d’autres gnolls, ou pire, décident de venir passer l’hiver ici.

(Ils étaient probablement trop faibles pour s’encombrer de tout cela en partant en chasse… Ou bien préféraient chasser de leurs griffes et de leurs crocs…)

Pour les armures, rien à faire, trop encombrantes, mais pour tout ce qui peut servir à tuer ou à blesser. Les flèches viennent rejoindre mon carquois, je n’ai pas le temps d’étudier leur facture, mais il sera plus aisé de les transporter ainsi ; je peux facilement les distinguer : leur empennage est d’un noir profond. En deux voyages qui m’épuisent, je parviens à remonter en haut de la pente les armes, et à les placer sur le chariot. Après une pause et un repas bien mérité, je retourne à mon ouvrage de boucher : j’ai déjà ramassé les flèches perdues, mais je ne veux pas laisser celles dans les cadavres, si elles sont encore bonnes à l’usage. M’aidant de mon couteau, je parviens à les dégager. Ayant noué les têtes par la courte crête qu’arborent ces bêtes, ayant de remonter, je refais un dernier tour de la grotte, car je n’ai trouvé aucun casque.

Cette seconde exploration s’avère payante. Je me suis concentré la première fois sur les effets, le matériel, ignorant une partie ayant tout du dépotoir, un jonchement d’os et d’excréments, où je repère effectivement un bout de métal, que je tire du bout de la botte hors des fèces. Avant de dire s’il s’agit bien de ce que je cherche, il me faudra le nettoyer dans la neige. Un dernier coup d’œil aux squelettes me permet d’en deviner un peu plus sur le régime alimentaire des morts. Ils ont mangé des moutons, des chèvres, mais aussi un homme semblerait-il, ou un membre d’une race proche. Plus intéressant encore, j’y découvre trois têtes qui n’ont rien de commun avec des humanoïdes, et dont la mâchoire ne laisse que peu de doutes sur la race d’appartenance.

« Ils étaient huit, peut-être plus… Mais l’hiver a condamné ces trois là… Réserve de nourriture pour la survie de la meute… »

J’abandonne ces décombres de vivants sans une pensée de plus. Ma tâche ici est terminée, et la fatigue commence à se faire sentir, aigue. A genoux dans la poudreuse remuée par mes pas, je frotte le casque jusqu’à ce que disparaissent enfin toutes les souillures qui le couvrent. Il m’a l’air ancien, de bonne facture, solide mais absolument pas adapté à la tête d’un gnoll. Peut-être ce que je cherche…

Retour à l’affût. Je charge le traineau, prépare mon départ du lendemain, puis encore un feu, encore un repas simple, de viande séchée et de pain de voyage, pour reconstituer mes forces. Aller jusqu’au village sera plus aisé, il y aura beaucoup de descente, je dépenserai mes forces à freiner le traineau, non à le hisser.

« Merci. »

Ce mot est pour les dieux, ou pour le vent, la nuit, le monde autour de moi, ce qui a concouru à ce que je vois un nouveau jour se lever. Et j’espère que je m’éveillerai encore sur un jour nouveau.

La fête au village

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 Sujet du message: Re: Les Chaînes de Montagnes
MessagePosté: Mer 5 Aoû 2015 10:00 
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Je suis revenu au village exténué, dans le milieu de l’après-midi, alors que le jour commençait déjà à faiblir, car il était tard pour la saison. La fatigue m’a bien plus assaillie que le froid, et en parvenant dans le creux du Val Bleu, j’ai pris la mesure de ce que j’ai demandé à mon corps. Mes bras irradiaient de tension, comme mes jambes, alors que je n’avais plus à retenir le traineau sur la pente neigeuse. Je suis arrivé au but. Comme lors de ma première venue, je ne trouve personne dehors. Quoi de plus normal ? A cette heure, il n’existe que peu de raison de pointer son nez dehors ; le bois doit déjà être rentré, et tous les travaux effectués, car le froid tombe vite. Les volets sont clos, il n’y a guère que la fumée et les éclats de voix pour signaler de la vie. Abandonnant mon bât en vue des habitations, je termine le chemin plus léger, pour aller frapper à la porte de Brün.

« Qui c’est ? »

« Jager. Je suis revenu. »

L’homme qui m’ouvre affiche un air incrédule : je crois voir dans son regard quelque chose qui oscille entre le « déjà » et le « pas possible », si bien que la surprise laisse la place à la suspicion. Pas la peine de faire du mystère.

« J’en ai fini avec les gnolls. Y vous pos’rons plus d’problèmes. »

Silence. Puis sourire.

« Bern ! Passe tes bottes et ton manteau ! Va prév’nir les voisins ! Va cogner chez tout l’monde, annonce la nouvelle ! L’étranger, il est r’venu ! Il a tué les gnolls ! » Un adolescent, ressemblant trait pour trait à Brün, en plus jeune, moins charpenté cependant, se glisse entre nous une fois vêtu pour aller frapper à toutes les fermes. « Mais entrez donc ! Vous d’vez vous g’ler, et faut pas laisser rentrer l’froid. »

« Merci, mais j’ai encore vot’ traineau là bas, j’suis chargé… »

« Bien sûr, je comprends ! Bougez pas, j’vais v’nir vous donner un coup d’main, on va rentrer ça dans la grange à foin. »

Les têtes de gnolls lui ont fait marquer un temps d’arrêt, mais au moins les choses étaient claires pour lui, et le seraient pour tous les autres : quand je dis que j’ai débarrassé la grotte de ces bestioles, ce n’est pas du vent de bouche. Des trophées, macabres, terribles. Ce qu’ils en feront ne me concerne pas, qu’ils les exhibent, qu’ils les enterrent, qu’ils les jettent aux quatre vents, qu’ils les plantent sur des piques en guise d’intimidation. Je n’ai guère d’attirance pour les carcasses et la manière que l’on a de les exhiber : qu’on se serve des peaux, des os, que l’on mange de la viande, c’est une chose, pas la peine de laisser traîner dents, crânes et mâchoires.

Je garde de la soirée le souvenir d’une fête spontanée et joyeuse, tout le village massé et réuni dans la plus grande ferme du village. Dans un coin de la cour, les têtes de gnolls ont été alignées, les adultes sont venus les voir de leurs yeux, leur cracher dessus pour ceux qui en avaient eu le plus peur, et les enfants les plus téméraires guettaient de loin ces morceaux inquiétants éclairés de loin par les torches. Sommé de raconter mes exploits, j’ai sans doute déçu l’assemblée en me contentant de rappeler une scène de mise à mort brève, loin de ce qu’ils ont pu imaginer : pas d’affrontement sanglant au clair de lune, rien qui puisse construire la réputation d’un héros luttant au corps à corps avec des bêtes terribles, aucun élément qui puisse faire une histoire valable. L’affût, la ruse, les flèches, les créatures affaiblies, il n’y a pas matière à faire une chanson, et tant mieux. Si le récit ne convient pas, les villageois l’oublient bien vite dans un cruchon d’hydromel qui tourne à la cantonade, emplissant les chopes, et ramené régulièrement au tonneau. Nous avons bu, manger, et une fois la nuit avancée, Brün m’a trouver une paillasse et des couvertures pour que je dorme près de son foyer, et non plus dans la grange. Il m’a fallu du temps pour m’endormir. La respiration lente et profonde des animaux de la ferme ne me gène guère, mais je ne suis plus habitué à coucher dans une pièce où sommeillent des humains comme moi. Finalement, la fatigue est venue à mon secours. J’ai rêvé de flammes, de cris, d’une armée dans la nuit…

Je me suis réveillé bien après l’aube. Brün m’a proposé de rester encore un peu, de me reposer. La proposition est généreuse. La veille, quelqu’un avait jeté, une suggestion en l’air, que je pouvais bien m’installer ici, qu’il y a des filles à marier. Je me demande à quel point le propos était sérieux. C’est vrai que dans un village, un homme travailleur, capable de venir à bout des menaces, un chasseur de surcroît peut être un atout de valeur. Mais je ne suis pas prêt à m’installer. J’ai décliné son offre. Maintenant, il me faut rentrer. Savoir si ce que j’ai trouvé est bien ce qu’on m’a envoyé chercher. Et songer à l’avenir.

Avant de me mettre en route, j’ai accepté des provisions, des remerciements, et refusé les yus. Plus lourd d’un casque seulement – je leur ai laissé toutes les armes trouvées dans la caverne des gnolls – j’ai repris le chemin de ce qui se rapproche le plus de mon foyer, le bourg de Shory.

Retour à Shory

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 Sujet du message: Re: Les Chaînes de Montagnes
MessagePosté: Jeu 27 Aoû 2015 11:30 
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(7)



Zu'Gash s'emmerde. Non mais là, vraiment. Le trio de bipèdes plus la mule et le corbac femelle se sont tapés une route de montagne tranquille à en crever. Pendant près de trois jours. Pas un bandit largué par ses camarades. Pas un cadavre à détrousser. Et pire que tout, pas un seul animal à jolie fourrure à dépecer. Ils se sont d'abord farcis la plaine à hautes herbes où la bourrique voulait se prélasser tout le temps, puis la voie de rocs les écartant du passage principal, et pour finir ce sentier bordé d'arbres pas foutus d'avoir des feuilles normales.

Enfin, c'est pas tout à fait vrai. Plus ils se sont rapprochés du village des plateaux, plus la sensation d'être suivie a frappé la garzoke. Avant que ce soit un caillou qui le fasse. Pas le genre boulet, plutôt gravier qu'on ramasse partout dans le coin. Il venait d'une drôle de bestiole qui se planquait dès qu'on en croisait le regard. Et qui s'est barrée quand leur route a approché celle d'un woger. Pas de problème avec le louloup à cornes qui font Bzzzt, mais lui a attiré l'attention de la chose. Et ils ont bougé trop vite pour que la tanneuse leur fasse la chasse.

Le reste du voyage a été si tranquille que Zu'Gash aurait pu pioncer en marchant sans rien risquer. Et v'là qu'd'un coup, tout change. Maya, Marius, Aroroa et la peau-verte sont tapis contre une cabane de berger, à proximité du village paumé. Enfin, paumé, il a quand même une haute et large palissade en gros rondins tout autour. Et pointus en plus. Avec une grande double porte ouverte, et occupée par un tas de gens. À vue de pif, c'est d'ailleurs la seule entrée.

"Roaaah ?"

"Chut, sauf s'tu veux qu'j'y laisse aussi ma trogne.", préviens la rôdeuse en matant le bazar.

Une troupe de soldats qui brillent au soleil pour la plupart. Sauf deux ou trois en tenue de cuir. Des éclaireurs, sans doute. Y'a aussi quelques charrettes, et surtout un joli lot de têtes verdâtres bien en vue au ceinturon du gars le plus large. Y'a pas à dire, ils z'ont pas l'air d'aimer les peaux-vertes dans le coin. Zu'Gash s'en cogne, mais pas le Marius. Il baragouine encore des trucs genre traître, vendu et autres conneries dont la rôdeuse se contrefout. Trop compliqué. Et en prime, elle a la dalle. Et que ça cause avec un vieux qui a du mal à tenir debout tant il est bossu. Et que ça rigole, et que ça s'envoie des tapes.

Merde, ça a l'air de bien s'amuser en fait. Observation des alentours. Sourire à crocs et éclat de rire porcin. Qu'est-ce qu'elle fout ? Zu'Gash, se planquer alors qu'il est presque certain qu'en se montrant elle va y passer ? Et puis quoi encore !

"Ohé ! Salut la piétaille !", beugle-t-elle en s'avançant et en agitant un bras.

Elle n'a pas fait deux mètres qu'un truc siffle à ses oreilles. Ça lui rappelle un truc ça, et surtout le "tchoc" qui suit. Ah oais, un carreau d'arbalète. Qui est venu se planter dans le mur blanchi, juste à côté d'elle.

"Bwhahaha ! J'vois qu'y'a des bigleux d'l'arbalète partout !", s'amuse-t-elle en tirant sur le trait et l'arrachant du mur. Et voilà qu'Maya se jette sur son bras libre en secouant la tête comme un clébard qui se sèche. "Bah quoi ? On s'est pas tapées tout ce ch'min pour rester là, non ? C'est un tas d'soldats, c'est tout. Qu'est-ce qu'tu veux qu'il s'passe ?"

Et la rôdeuse s'avance, faisant tourner entre ses doigts le projectile de bois et de métal. Ah, elle a repéré l'arbalétrier. Un p'tit nerveux qui retend son arme à coup d'manivelle. Sauf que lorsqu'il la vise, le colosse de tête pose une grosse main gantée de fer dessus. Ah ? Pas d'autre tir ? Ah ouais, doué comme il en a l'air, le type serait foutu de planter le carreau devant les pieds d'Maya plutôt qu'la tronche de la peau-verte. Et là, vlan ! Un coup de tonnerre qui résonne.

"Vous !", Ah nan, c'est une voix en fait. Vachement grave, en plus. "Je vous laisse jusqu'à cinq pour me dire d'où vous venez, et ce que vous venez faire ici. Ou sinon nous... "

"Whola ! Des ou sinon ! Ca m'manquait !", s'esclaffe Zu'Gash avant d'éternuer et de se moucher dans ses doigts, toujours en tenant le projectile. "Putain d'air frais d'montagne. On arrive d'Dahràm. Et on accompagne c'te trouillard là.", fait-elle en désignant Marius du pouce, qui laisse à peine dépasser sa trogne sous capuche du mur. Et qui se planque comme un rat dès que l'attention tombe sur lui.

"Les garzoks s'aventurant dans les Duchés finissent mal. Très mal. Alors vous ne ferez pas d'histoire et vous allez nous suivre bien gentiment.", fait l'humain en armure que Zu'Gash examine de plus près, avec un sourcil haussé.

La tignasse très courte et marron clair, une demie-tête de plus qu'elle, dans une armure qui la rend ridiculement petite. Un gros kendran tout bardé de métal, avec un sourcil presque unique et un trou au menton. Carré d'ailleurs. Il aurait la peau verte et des crocs, ce serait un garzok d'Omyre des petons à la cicatrice qu'il a sur la gueule. Le con claque comme il le peut des doigts sous armure.

"Oais, mais nan, ça va, j'sais m'défendre. J'ai pas b'soin d'gardes du corps.", lâche-t-elle en effleurant du doigt le bec du corbeau à trois yeux posé sur son épaule.

"Là n'est pas la question."

"Ah ? ... Ah ! Mais nan plus, j'viens d'finir un taff d'escorte bien chiant, c'est pas pour m'en retaper un autre juste après. Surtout qu'j'ai pas encore été payée.", déclare la rôdeuse, en se grattant le crâne avec la pointe du carreau. "Allez, bouge-toi Marius ! J'ai pas toute la journée ! Et j'ai la dalle en plus !"

Sans la moindre peur, la rôdeuse se tourne vers le groupe de soldats et s'avance vers l'arbalétrier. D'un geste, elle lui colle le trait couvert de morve contre la protection qui brille. Merde alors, si elle avait su que ses crottes de nez étaient aussi collantes, elle les aurait utilisé avant ! Marrant la tête qu'il fait. Entre envie de dégobiller et larme à l'oeil. Elle se tourne vers le meneur qui la poignarde du regard. Pas de doute qu'avec sa grosse épée à deux mains dans le dos, il a du en trancher des gens. Mais Zu'gash a grandi en prenant des coups et en manquant crever un grand nombre de fois, c'est pas la possible menace d'une peut-être mort sanglante qui va lui faire perdre son sourire.

Maya lui tient la main et fait un geste bizarre. Elle agrippe sa tunique et plie un peu les genoux. Genre comme pour les saluer. Y font vraiment des trucs bizarres les humains. Le chef de la troupe fronce son sourcil et lance sa main vers la gosse. Que la peau-verte écarte et place derrière elle.

"Hop-là ! Pas touche avec tes grosses papattes en métal. La voir avec du bleu sur la tronche, ça va bien un temps.", prévient la rôdeuse avant de se tourner vers la gosse. "Mais p't'êt' que ça t'tente ? D'repartir avec eux, j'veux dire. T'es humaine après tout."

Là, la gosse fait une tête genre vexée. Elle fait signe à Zu'Gash de se pencher. Ce qu'elle fait, acte pour lequel elle est récompensée. Par une belle baffe. Bon, ça claque, mais ce n'sont pas ses petites mimines qui vont lui faire grand mal. N'empêche, pourquoi elle a fait ça ? Et la voilà qui boude maintenant. Et pendant que la peau-verte se frotte la joue sous les regards paumés de tout le monde, la petite tape des pieds par terre, rejoint Marius et l'agrippe par l'oreille. Et elle tient les rênes de la mule dans l'autre main. Et toujours en cognant des pattes au sol, elle passe entre la rôdeuse et le mâle en armure, bousculant les deux, en se dirigeant droit vers le centre du village.

Gros silence pendant que le Marius pousse des "aie" "eh" "mais euh" en s'éloignant.

"Pfff... Buwhahaha ! Quelle gosse ! Mais quelle gosse ! Ça, les claquemurés, ça va devenir un sacré bout d'femme !", éclate Zu'Gash, en collant son poing fermé contre la protection métallique du meneur.

"Qu'est-ce que vous cherchez, au juste ?", lance froidement le capitaine du groupe en agrippant et tordant son poignet.

"Ohlà, du calme, vieux. Un poignet pété m'ferait vraiment chier. C'est qu'j'en ai besoin, moi. Pas toi ?"

"On répond quand on vous pose une question. Et pas par une autre question."

"Pourquoi ?", sourit Zu'Gash, une idée à la con et plutôt marrante en tête.

"Vous êtes sur nos terres, et que je veux savoir pourquoi."

"Pourquoi dans l'sens pour quoi faire ?"

"Oui."

"Pourquoi ?"

"Pour savoir si vous êtes dangereux."

"Pour quoi faire ?"

"Pour savoir si je vous tue maintenant, ou si je vous ramène pieds et poings liés à Luminion."

"Pour quoi ?"

"Parce qu'aucune peau-verte ne traine dans les Duchés sans raison !"

"Non, j'ai pas dis pourquoi, mais pour quoi ?"

"Que quoi ? "

Oh la superbe tronche d'abruti paumé !

"Quoi quoi ? Par qui et pour quoi ? Quoi faire, quoi.", débite la garzoke sans s'arrêter.

"Par... Pour... Qu... Rhaaa !"

"Rhaaa ? Roaaah !", corrige l'oiseau noir.

"Héhé ! Et oais ! T'as perdu !", fait Zu'Gash en tirant la langue sur le côté et libérant son poignet. "J'sais pas d'quoi t'as peur, mais j'fais plus dans l'commerce d'gens d'puis un moment. On est que d'passage dans l'coin. J'vais quand même pas m'attarder là où y'a rien à chasser ! Bon, allez ! C'est pas tout ça, mais causer ça donne faim. À la revoyure les cuirassés !", lance-t-elle en s'éloignant à la suite des autres.

Y'en a bien un ou deux qui cherchent à la rattraper, mais ils se font barrer le passage. Bah oui, une fois dans la place, c'est pas comme si elle pouvait se tirer en escaladant le mur de bois, ou foutre le bordel à elle seule.

Après tout, cette fois-ci, elle est venue sans brok'nud pour tout défoncer !


(Après)

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Dernière édition par Zu'Gash le Mer 30 Sep 2015 15:57, édité 2 fois.

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 Sujet du message: Re: Les Chaînes de Montagnes
MessagePosté: Mer 2 Sep 2015 11:04 
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Un simple bout de cuir

Après avoir traversé la vallée tortueuse menant aux portes de Mertar, les aventuriers s'éloignent sur un sentier isolé. Les sommets enneigés les surplombent, les nuages s'invitent à l'expédition et inondent parfois les lieux d'une brume opaque et blanche. Daemon s'emmitoufle dans son manteau d'étain, ici les vents sont glacées et agressifs.

Il distingue en contrebas une ville humaine retranchée entre deux flancs de montagne. Les hauteurs sont dénuées de végétations, à l’exception de rares buissons et des alpages visibles à plus basse altitude.

Korben le mène au bord d'un précipice, de l'autre coté siège un pic rocheux semblable à un aigle gardant son nid. Deux excroissances forment les ailes au repos tandis qu'une bifurcation crochue du sommet achève la ressemblance.

Heureux d'avoir trouvé le repère le plus important, Korben et Daemon descendent afin de rejoindre le versant opposé. Après de multiples recherches et de nombreuses crises de nerfs, ils en viennent à douter de l’existence de la caverne. Aucun sentier passe en dessous des assises de l'aigle. Ils escaladent l'éminence de long en large, aucune corniche en vue.

Alors qu'ils traversent un escarpement accoudé au vide, Korben glisse sur les caillasses, les roches roulent sous ses pieds et lui font perdre l'équilibre.

« Daemon ! »

Impuissant, il constate que le nain dévale la pente en direction du précipice. Affolé, ventre à terre, Korben cherche des prises mais toutes lui restent dans les mains. Il disparaît dans les abysses avec un cri de terreur.

Le silence retombe et les genoux de Daemon chutent au sol. Son guide a disparu de manière si brève et imprévisible. Certes il était chiant, mais il s'y était habitué. Il piquait tout le temps sa bouffe, l'insultait en permanence, le poussait dans les tourbières et déclenchait plein de bagarres...

(Ô pauvre nain, c'est qu'il me manq...)

« Daemon ? »

Le semi-efle qui commençait son bref deuil, panique à son tour en se croyant hanté par l'âme vengeresse du nain. Existerait-il un fantôme plus casse couille ?

« J'ai trouvé la grotte ! »

Sa peine se mue en joie. Il descend et découvre qu'une nouvelle corniche était dissimulée en contrebas. Après un bref détour il rejoint le nain. Korben gueule comme d'habitude, mais ne semble pas vraiment affecté par la chute. Solide le nain.

L'entrée de la caverne est en effet présente. Pas de doute possible. Devant eux se dresse une béance sombre et menaçante, haute de plusieurs mètres. Des stalactites ornent la voûte supérieure telle la dentition d'un géant de granite s’apprêtant à les avaler d'une bouchée.


Korben, vous m'accompagnez ?

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Thème : Catacombae - Mussorgsky


Dernière édition par Daemon le Sam 24 Oct 2015 05:28, édité 7 fois.

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 Sujet du message: Re: Les Chaînes de Montagnes
MessagePosté: Mer 2 Sep 2015 12:40 
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Le sentier est casse-gueule, il faut que je me méfie. Les pics montagneux nous dominent tandis qu’un vent glacial s’abat sur nous. La roche est devenue plus lisse à force de subir les assauts répétés de la pluie, il faut donc redoubler de prudence. Je regarde derrière moi, Daemon semble très mal supporter cette température, progressivement le froid s’insinue à travers vos vêtements et vous affaiblit, pour un nain comme moi ce n’est pas un problème mais j’ai bien peur que l’elfe ne tienne pas.

Je prends sur moi et avance plus rapidement tout en tâtonnant le chemin pour éviter une chute malencontreuse. Nous arrivons au bord d’un précipice, en face trône le fameux « Aigle ». Un pic de montagne dont l’extrémité est un peu recourbée et dont les protubérances pourraient avec beaucoup d’imagination faire penser à des ailes. J’adresse un signe de la main à Daemon et lui désigne le repère, un sourire se dessine sur ses lèvres tandis qu’il me pousse dans le dos pour accélérer notre allure. On entame la descente pour rallier l’extrémité opposée. Maintenant sous le repère, je cherche un nouvel indice, mais rien n’indique qu’un accès à la grotte existe. Daemon fulmine derrière moi, énervé de ne pouvoir trouver l’emplacement caché de cette grotte abritant une relique sacrée. Je ne perds pas espoir et continue mes investigations sans hélas rien trouver.

A un moment donné, je me sens glisser et crie :

« DAEMON ! »

N’ayant trouvé aucune prise susceptible de m’aider, ma chute continue de plus belle ! La paroi est lisse et il m’est impossible ne serait-ce que de ralentir. Je finis par tomber, heureusement mon armure me protège bien et je m’évite une fracture. En revanche je ne distingue plus rien, je laisse mes yeux s’acclimater à l’obscurité ambiante et cherche une quelconque sortie. Un peu plus loin se dessine dans la paroi une entrée, celle d’une caverne….Pareille à une mâchoire prête à t’avaler tout entier.

(Bon j’espère qu’il m’croit pas mort et qu’il s’est barré…)

« DAEMON ? » que j’crie

Aucune réponse, je réitère cette fois en y mettant toute ma voix :

« J’ai trouvé la grotte ! »

Pas de réponses, je commence à perdre patience quand j’entends des pierres dévaler la paroi.

(Daemon doit être en train d’arriver, c’pas trop tôt.)

Quand je le vois arriver je me dis que c’la dernière fois que j’aurais affaire avec lui et l’idée me mets de très bonne humeur, surtout quand s’ajoute à cela la récompense à venir.

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J'suis tête en l'air... Merci à Dame Itsvara pour c'te superbe signature !


Korben's Song.


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