Suite des habitations de kendra KârWaor était peu convaincu par l'explication hâtive d'Aztai. Cependant, ce n'était pas l'avis de Rudy qui organisait déjà le plan: il consistait à attirer le plus possible de garde et de filer droit dans l'ouverture.
-Si nous passons, il faut absolument faire attention aux archers postés sur la muraille!-Et arbalétriers! Ajouta Waor.
Je vois que parmi les quatre hommes devant la porte, deux en sont équipés...Rudy lâcha un soupir de désespoir... Ce qui ne lui ressemblait pas. Il ne semblait y avoir aucune issue... En effet, devant la gigantesque porte entrouverte, deux miliciens parlaient entre eux. Deux autres s'étaient placés un peu plus sur la droite, adossés à la muraille côté intérieur. D'après ce qu'Aztai voyait, encore deux soldats situés sur la muraille, à au moins huit ou neuf mètres de hauteur: un endroit parfait pour tirer à l'arc.
-Je nous vois mal affronter tant de soldats à nous trois...Aztai manqua corriger "à nous deux", car il ferait tout pour éviter la bataille... Il ferait aussi tout pour éviter la mort de Waor et Rudy.
Et puis, les miliciens s'agitèrent sous les yeux des worans cachés à une trentaine de mètres de là. Après avoir échangé quelques mots inaudibles, deux d'entre eux quittèrent le groupe en leur direction, empruntant la grande rue principale.
-Aztai, (le woran tourna la tête),
voila ta diversion! Waor? Tu prends lequel? -Celui de gauche. Il évalua la situation.
Parfait, quand ils atteindront notre niveau les autres ne pourront les voir... -Mais ils pourront les entendre!-C'est pour ça que toi, tu vas longer la rue en face! S'ils s'aperçoivent de notre présence, retiens-les!"Tues-les" étaient le mot qu'il voulait dire, Aztai en était sûr. Depuis le coin de maison où ils étaient, il remarque un batiment semblable de l'autre côté de la rue.
-Allez! Aztai se lança, trébuchant, haletant, l'adrénaline bouillait en lui. Les soldats n'avaient rien remarqués grâce à la pénombre de la nuit. Sur ce, il engagea sa marche en direction de la porte le plus naturellement possible, allant en avant des hommes. Le capuchon rabaissé sur le crane, on ne lui jeta même pas un regard au moment où il croisa les soldats.
-...L'Auberge de la Tortue Guerrière! Disait l'un d'eux alors que l'autre approuvait avec enthousiasme. Aztai se retourna discrètement, dans quelques pas ils passeraient devant Waor et son père. Il s'immobilisa, s'adossant au mur de la longue baraque qu'il longeait: ainsi posté, il verrait les worans passer à l'attaque, et pourrait surveiller les deux hommes restés à la porte. Son coeur palpitait, il faisait tout pour garder son sang-froid, une épreuve des plus complexes. Même la fraicheur de la nuit ne le calmait pas.
Enfin il vit du mouvement: les deux worans avaient attendu que leurs proies passent devant eux pour les surprendre. De son imposante musculature, Rudy avait simplement rompu le cou de l'un d'eux. Waor, moins confiant avait apparemment utilisé son couteau. Jetant un regard à la porte, personne n'avait entendu le gargouillis immonde qu'avait lâché le soldat égorgé, retournant l'estomac d'Aztai.
-Parfait, murmura Rudy lorsque Waor et lui l'eut rejoint.
Maintenant... Faisant littéralement bondir de surprise Aztai il se mit à hurler:
AU SECOURS! en direction de la porte. Les soldats réagirent très rapidement.
-Mais qu'est-ce tu fais! Explosa Aztai.
-Chut! je vous laisse les deux qui arrivent et m'en va m'occuper des deux postés là-haut.-Qui te dis qu'il y en pas d'autre qui vont rappliquer? Aztai perdait son calme. Son poul lui cognait aux oreilles, il posa une main sur son épée en fulminaire et vérifia que la lame coulissait correctement dans le fourreau.
-Cela va dépendre de vous... Il se lança en avant, se montrant bientôt face aux soldats qui levèrent leurs armes, l'un une arbalète et l'autre une lance, devant la musculature imposante de Rudy. Celui-ci feignait la panique:
-Deux hommes gisent sur le sol, la-bas Messires! Il désigna l'endroit réel où étaient les cadavres. les deux hommes se lancèrent dans la direction opposée à celle du Rudy, ils croiseraient bientôt Waor et Aztai. Rudy courrait déjà vers la grande porte qu'ils se lancèrent.
Griffes ressorties, ce fut Waor qui lança l'assaut, soutenu d'Aztai qui fit tout son possible pour effacer la peur de son esprit. Allant à leur tour au-devant des deux miliciens, ceux-là levèrent à nouveau leurs armes. Waor ne s'arrêta pas, marchant en direction de l'arbalétrier:
-Messires, il y a deux hommes...-Oui on le sait! Coupa le lancier à la moustache bien touffu, agacé. Ils abaissèrent leurs armes et Waor, d'un bond, le chargea. D'un coup d'épaule magistral, il déséquilibra l'homme, sa lance lui échappant. Le deuxième homme leva son arme, prêt à tirer un trait mortel sur leur assaillant. Aztai entra en jeu. Il projeta son poing en direction de son bras, pour faire dévier le carreau. Dans un grognement de douleur et de surprise, le milicien n'appuya même pas sur la gâchette. Cependant il contra en frappant d'un coup de pied la cuisse d'Aztai. Perdant à son tour l'équilibre, il recula tant bien que mal: une erreur! En pleine ligne de mire, il se serait sûrement écroulé si Waor n'était pas intervenu: il saisit littéralement l'arbalète à deux mains, l'arrachant de force à l'homme, et lui en porta un coup au visage.
-Waor!Trop tard. ne pouvant faire face à deux hommes à la fois, l'autre revint en force et lui abattit la hampe de sa lance sur la nuque. Son ami s'écroula à terre dans un grognement, proprement sonné. Aztai s'élança, dans l'élan du dégainement de son épée, il porta un coup circulaire horizontal... qui se ficha dans le bois de la lance. L'homme le repoussa comme il pouvait, alors que le woran neige repartait à l'attaque. Soucieux de l'état de santé de Waor, il se déconcentra un moment et le moustachu put faire un demi-tour sur lui-même: dans son élan; le manche frappa de plein fouet le flanc d'Aztai qui en eut le souffle coupé. Reculant tant bien que mal, épée en avant pour ne pas baisser sa garde, l'homme bondit pour lui porter le coup de grâce, cherchant à enfoncer le métal froid dans la chair de son ennemi. Dans un tintement, la pointe s'entrechoqua avec l'os de fulminaire. Une vive douleur remonta dans le poignet d'Aztai qui dû faire appel à toute la volonté du monde pour ne pas lâcher son épée. Ainsi, il put, non sans difficulté, donner un coup à pleine puissance: la lance se rompit nette en deux laissant son propriétaire sans défense. Enchaînant sans réfléchir, il porta un coup mais ne sentit pas la lame entrer en contact avec quoique ce soit... pourtant, lorsqu'il fixa son regard sur le lancier, celui-ci se tenait la gorge à deux mains, crachant un flot de sang, tombant à genoux. Aztai n'eut pas le temps de savourer cette médiocre victoire qui lui avait couté une grande partie de son énergie: l'autre soldat qui avait repris ses esprits, surgissait et envoyait une droite bien placée dans la gueule du woran. S'écroulant à terre, il crut que son heure était venu. Le gout du fer circulait entre ses crocs, lui donnant la nausée; le milicien lui porta ensuite un coup de pied dans le ventre, lui arrachant un hurlement de douleur. Et puis, un rugissement de rage déchira la nuit. En un éclair, Aztai vit une patte s'élever au-dessus de la tête de l'homme. Une seconde plus tard il était plaqué au sol, un Waor plein de haine lui plantant ses griffes dans le corp, lui lacérant le visage. Les bruits de la haine se transformaient en douleur.
-Waor, marmonna le woran neige... Mais celui-ci ne l'entendait pas. Ce n'était pas un woran mais un animal devant lui, déchiquetant sa proie, barbouillant sa fourrure rousse de liquide vermeille.
Waor! Aztai bondit et tira son ami en arrière,
il faut fuir! Laisse-le!Waor repris raison et hocha la tête:
-Merci Aztai! Haleta-t-il.
-Merci à toi... je me croyais déjà mort. Ramassant son épée et la rengainant, ils se lancèrent à pleine vitesse en direction de la porte. Rudy n'avait eu aucun problème et les attendait, du sang au bout des griffes.
-J'en ai eu trois, fit-il. Du sang ruisselait tout de même sur sa cuisse, gorgeant les poils blancs de sa fourrure. il ne semblait pas s'en soucier. Cette image donna du beaume au coeur d'Aztai.
Ils franchirent la grande porte, Waor en tête suivit de Rudy et son fils. Ca y était, ils s'en était sortit indemnes! Si seulement...
-Sales bestioles...Une voix pennée avait prononcé ces mots. Caché contre le côté extérieur de la muraille, un homme se tenait contre la pierre, le bras ensanglanté. De l'autre, il brandissait tant bien que mal une arbalète chargée. Tout se déroula dans une lenteur effrayante, un ralentit interminable. Aztai était le seul à l'avoir vu, et le trait de bois quittait déjà l'arme, sifflant, se creusant un chemin dans l'air frais en direction de Rudy. Il posait une main sur le fourreau de l'épée fixé sur son dos, mais ce serait trop tard. Son père ne pourrait esquiver le carreau qui n'avait pas encore atteint sa cible. Aztai tenait la claymore dentée au clair, courant vers l'homme blessé à présent sans défense. Il allait lui faire payer ce crime! Lui retirer la vie comme il avait voulut retirer celle de son père. Avant que la terrible lame ne pénètre la chair, le woran neige n'entendit pas Rudy crier, il n'entendit pas son corps s'écrouler.
Le miliciens ne cria pas non plus lorsque le métal perça ses entrailles. Il leva un regard presque suppliant vers Aztai, mais il ne lui inspirait que de la haine et du dégout. le woran neige tourna les yeux vers son père et fut stupéfait. Rudy se tenait debout dans une position presque grotesque, une position "d'esquive" déduisit-il...
-Comment? Balbutia-t-il.
-Là où nous allons, tu sauras...Et Aztai comptait bien savoir! Une esquive digne de ce nom était chose incroyable, ou bien Rudy était capable de prouesses magiques... Une idée un peu stupide; Aztai n'avait que rarement entendu parlé de worans magiciens, mages ou capablent de maitriser un élément particulier, comme le feu ou les vents...
Il retira, impartial, la lame du ventre de l'homme à moitié mort qui lâcha un faible cri de douleur... Rudy et Waor n'avaient pas menti: la chair et le sang se déversèrent aux pieds du woran qui ne baissa pas les yeux, au bord de vomir... Ainsi il rengaina sa terrible épée.
Saufs... Impensable! D'ailleurs... Oui! Le coffre était bien calé au fond de sa poche, ce qui ajouta au soulagement du woran neige. Suivant son ami Waor, et son père Rudy, c'est en "famille", pensa Aztai, qu'ils s'engouffrèrent dans la nuit lourde de secrets...
Fin du Chapitre 5, fin du Premier Grimoire